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L'Encadrement Juridique des Systèmes Financiers Décentralisés dans l'U.E.M.O.A.

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par El Hadji Mansor DIOP
Gaston BERGER de Saint- Louis du Sénégal - Maitrise de Droit De L'Entreprise 2008
  

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SECTION 2: LA TUTELLE DES S.F.D

Le contrôle de tutelle vient en appoint à celui effectué au niveau interne par les organes propres des S.F.D. Il symbolise le droit de regard des autorités publiques sur ce domaine particulier de l'économie. Ces donc une méthode de surveillance qui s'exerce suivant certaines modalités ( A) dont l'efficacité est garantie, le cas échéant, par diverses sanctions (B) .

Paragraphe 1) LES MODALITES DU CONTROLE DE TUTELLE

Le principe de la nécessité du contrôle étant légalement admis, il convient de s'intéresser non pas aux textes qui encadrent ce contrôle, mais bien aux formes que peut revêtir le contrôle (b). Mais il est certainement utile de commencer par déterminer les organes chargés d'exercer ce contrôle (A).

A) LES ORGANES TUTELAIRES

Il faut rappeler que l'adoption de la loi-cadre qui régit dans leurs grandes lignes les S.F.D, s'est faite au niveau communautaire. Ce qui signifie que le rôle des Etats dans la création des normes a été de nature modeste. Cependant une place plus importante leur a été accordée pour ce qui est de l'application de ces normes. C'est ainsi le ministère des finances est habilité à exercer un contrôle de tutelle (1).

Cependant, le domaine d'activité des S.F.D. relevant d'un secteur privé, l'efficacité du contrôle ne pouvait avoir lieu sans l'intervention d'organes dont les compétences professionnelles dans ce cadre sont avérées. C'est sans doute pour ces raisons que la B.C.E.A.O. et la commission bancaire ont aussi été désignées comme instances de contrôle de tutelle.

1) Le ministère chargé des finances

La tutelle désigne généralement un procédé de droit consistant à établir une surveillance exercée par les pouvoirs publics sur les activités menées par certaines personnes. Elle est souvent instituée pour protéger des intérêts divers. En outre toute tutelle, en raison sans doute des restrictions qu'elles comporte à l'égard de ceux qui en sont l'objet, doit être prévu par des textes qui la règlementent.49(*)

Dans l'occurrence des S.F.D. exerçant leurs activités dans l'U.E.M.O.A, la consécration textuelle du pouvoir de la tutelle s'est faite par le biais de l'article 15 de la loi P.A.R.M.E.C. Article aux termes duquel, « L'autorité de tutelle des institutions mutualistes ou coopératives d'épargne et de crédit est le Ministre chargé des Finances ».

Tel est donc le fondement légal de la tutelle ministérielle qui est aussi justifiée par des considérations de nature pratique. En effet, le cadre juridique institué par l'U.E.M.O.A. s'est voulu à la fois souple, mais aussi efficace s est à dire susceptible de permettre l'atteinte des objectif du secteur du micro crédit. La sécurité des déposants, ainsi que la protection du marché financier sont d'autant plus assurées que l'Etat réserve à ses démembrements la possibilité d'avoir une vue exacte des activités des S.F.D.

Pour ce faire, le ministre des finances jouit d'une compétence générale, en matière de surveillance des institutions coopératives. Ces attributions ont fait l'objet d'une consécration légale par le truchement de l'article 63 de la loi qui dispose « Les rapports et états financiers annuels sont communiqués au Ministre, dans un délai de six mois suivant la clôture de l'exercice ; ceux des confédérations, des fédérations ou des organes financiers doivent, en outre, être communiqués à la Banque Centrale et à la Commission Bancaire, dans le même délai ». Cette disposition doit être lue non seulement de manière à identifier ses conséquences à l'égard du ministre, mais aussi ses effets à l'endroit de la B.C.E.A.O. et de commission bancaire.

D'abord envers le ministre des finances, la disposition établie le principe d'une compétence qui s'étend à toutes les institutions de micro finance. Ce confirme la nature générale des attributions de l'autorité administrative.

Mais cette compétence pour générale qu'elle soit n'est pour autant exclusive. En effet, à l'endroit des autorités communautaire (B.C.E.A.O.ET commission bancaire), la loi pose aussi le principe d'une compétence limitée aux institutions constituées sous la forme faîtière.

En attendant d'en venir à la tutelle exercée par les autorités communautaires, il est nécessaire de s'attacher à la connaissance de la procédure du contrôle effectué par le ministre de tutelle.

Cette procédure semble pouvoir faire l'objet d'une analyse en deux temps. C'est-à-dire le contrôle exercé en amont, au moment de la constitution de la structure de micro finance. Mais aussi la surveillance exercée en aval qui est relative aux vérifications effectuées dans l'activité des S.F.D. déjà constitués.

S'agissant en premier lieu du contrôle en amont, il repose dans le pouvoir de délivrer des agréments aux institutions de base ou aux réseaux. En effet le caractère obligatoire du recours à l'agrément préalablement à toute activité, est une mesure qui permet à l'institution tutélaire de vérifier dès la constitution, la conformité de la structure aux lois et règlements en vigueur.

C'est ainsi que ce contrôle exercé en amont, sur les institutions ayant introduit des requêtes tendant à ce qu'il plaise au ministre de leur délivrer l'agrément, permet à ce dernier, d'éviter l'entrée de structures illégalement constituées dans la vie juridique. Ce n'est ainsi qu'à l'issu de ce control que l'I.M.F. agréée, jouira de la confiance de l'Etat qui lui permet d'exercer son activité.

Le ministre bénéficie de ce même droit de regard pour ce qui est de la modification de la nature juridique des S.F.D. C'est dans ce sens qu'aucune fusion, scission, ou dissolution ne peut intervenir sans un contrôle effectué par le ministre. Il faut aussi préciser, que dans le cadre strict de la constitution des S.F.D. le ministre semble jouir d'une compétence exclusive l'habilitant à être la seule instance autorisée à délivrer des agréments. Cet agrément demeure en conséquence, la seule forme suivant laquelle la confiance des Etats est attribuée aux I.M.F.

Cependant sans doute parce cette confiance, à l'instar de toute autre, n'est de nature à entraver un éventuel contrôle, le ministre jouit également de la faculté surveiller l'activité des S.F.D déjà constitués. Dans ce cadre, l'exercice du pouvoir de tutelle repose dans un droit de regard du ministre sur les activités menées par structure qui ont obtenu sont agrément. Mais ce droit, le ministre n'est pas la seule autorité à le détenir.

En effet la surveillance du fonctionnement des institutions déjà constituées fait l'objet d'un partage des compétences entre structures nationales (les ministres des finances des Etats membres) et les autorités communautaires que sont la B.C.E.A.O. et la Commission Bancaire.

2) La B.C.E.A.O. et la commission bancaire.

Ces deux institutions communautaires jouent un rôle important en matière de tutelle des S.F.D. de nature faîtière à l'exclusion des unions. Ainsi le veut l'article 63 de la loi qui dispose en substance que les institutions constituées sous la forme de réseaux50(*) sont tenues de faire parvenir leur rapport financier non seulement au ministre mais également à la B.C.E.A.O. et la Commission.

La particularité de la tutelle exercée par ces dernières est sans doute le fait qu'elles jouent un rôle beaucoup plus important que celui joué par le ministre dans la création de normes dérivées de la loi dans le but de régir le secteur.

Dans ce sens, il convient de noter que l'approche de l'U.E.M.O.A .pour ce qui de la tutelle des SFD est très incitative51(*) .En effet, l' UEMOA a inscrit son action dans l'optique d'une harmonisation du droit dans le secteur ; ce qui implique une certaine marge de manoeuvre laissée aux institutions dans la détermination des règle de leur gestion mais cela implique également que soient créé des textes, communautaires, dont l'objectif sera de compléter l'encadrement juridique des institutions.

LA Banque Centrale jouit ainsi de la faculté de rédiger des textes complémentaires au dispositif législatif déjà mis en place. Dans ce cadre, des instructions ont été émises pour la détermination des règles techniques qui régissent certains domaines dont le caractère sensible ne permet pas que liberté soit donnée aux institutions faîtières d'élaborer leurs règles de conduite.

La banque a ainsi émis huit instructions, à l'intention des I.M.F, qui ont pour effet de créer des obligations à la charge des institutions qui en sont destinataire.52(*).

De même la banque est chargée par les Etats parties, d'assurer une assistance technique aux institutions mutualistes par la mise en place d'organes chargés d'assure aux institutions de micro finance l'assistance technique requise par l'exercice de leur activités. Tel est l'objectif du Programme d'Appui aux Structures Mutualistes d'Epargne et de Crédit mit en place par la B.C.E.A.O. en collaboration avec le B.I.T.53(*)

Quant à la commission bancaire, elle exerce des attributions identiques à celles dévolues à la banque de telle sorte que ce pouvoir de contrôle qui leur est attribué demeure un cadre privilégié de collaboration entre les institutions communautaire. Mais la coopération s'étend aussi à l'autorité nationale qui oeuvre dans le même sens.

De ce fait, le contrôle de tutelle s'exerçant au niveau communautaire ou national, son efficacité dépend en grande partie des efforts déployés par instances tutélaires aussi bien de manière individuelle que collective. La tutelle, poursuivant le même objectif, les mêmes moyens ont du être mis en oeuvre pour la mener à bien. Cette unicité des moyens du contrôle se ressent à travers les formes qu'il revêt.

B) LES FORMES REVETUES PAR LE CONTROLE

Le contrôle effectué par des organes différents, s'opère aussi suivant deux formes distinctes. Les autorités tutélaires peuvent ainsi recevoir des renseignements sur la base d'informations qui leur sont communiquées par les institutions sous tutelle : c'est le contrôle sur pièces (1).

Mais elles peuvent également décider d'effectuer des visites afin de s'informer des réalités du terrain : il s'agit du contrôle sur place (2)

1) Le contrôle sur pièces

La modalité la plus courante pour les instances tutélaires de recueillir des informations à propos du fonctionnement des organes placés sous leurs compétences, c'est la vérification réalisée à partir de documents qui leur sont communiqués. Cette forme correspond au contrôle dit sur pièces par référence aux documents qui sont principal instrument.

Dans le cas des S.F.D. la transmission des pièces revêt un caractère obligatoire. En effet c'est la loi elle même qui en affirme le principe avant que celui-ci soit, par la suite précisé par le décret d'application et les instructions de la Banque qui vont dans ce sens. C'est ainsi qu'aux termes de l'article 63 de la loi, les rapports financiers des institutions mutualistes doivent être communiqués dans les six mois qui suivent la clôture de l'exercice.

Les documents dont la fourniture est exigée comportent des informations sur la situation économique et financière de la structure considérée. Cela est de nature à permettre les vérifications requises par le contrôle de tutelle instauré justement dans le but d'opérer une surveillance externe des activités menées par les S.F.D. bénéficiaires de l'agrément. C'est dans l'optique d'une facilitation de l'exercice par les instances tutélaires des obligations mises à leur charge, que la loi exige que les documents comportent « en sus des informations sur les activités de l'institution, les états financiers approuvés par l'assemblée générale et établis selon les normes déterminées par instructions de la Banque Centrale et de la Commission Bancaire ».

Les normes fixées par la Banque Centrale, relativement à ce domaines, sont comprises dans Instruction n° 01 relative à l'obligation pour les systèmes financiers décentralisés (SFD) de produire des états financiers. Cette instruction précise que le rapport financier doit comprendre : la situation patrimoniale ; l'état de formation du résultat ; les états annexes.

La pertinence de ces documents quant à l'exercice du contrôle de tutelle n'est pas l'objet de doute. Il semble cependant que leur nombre élevés ainsi l'expertise qu'exige leur rédaction, peuvent être de nature à décourager les structures informelles que sont les S.F.D à présenter des rapports conformément aux normes imposées par la B.C.E.A.O. Cela peut aussi constituer un facteur de retard du dépôt des rapports financiers et exposer, par la même occasion, les institutions retardataires à des sanctions qu'il n'est pas sûr qu'elles le méritent.

Il faut signaler que la fin de l'exercice des S.F.D ne coïncide pas avec le terme de l'année civile. En effet, aux termes de l'article 49 de la loi « L'exercice social court du 1er octobre au 30 septembre de l'année suivante, sauf pour le premier exercice qui débute à la date d'obtention de l'agrément ».

Ce délai fixé pour le dépôts adapté pour les caisses de base parce que ces dernières ne sont tenues de déposer leurs rapports respectifs qu'au niveau du ministère de tutelle au sein du pays dans lequel elles exercent leurs activités. Pour les réseaux cependant, le délai fixé semble appeler à quelques réserves à propos de son opportunité. En effet les institutions faîtières étant de taille plus grandes que les caisses de base, il va de soi que la préparation de leurs rapports financiers prend beaucoup plus de temps. Il aurait donc été judicieux de leur accorder un délai moins contraignant.

Mais toujours est il que le non respect du délai peut être constitutif d'une faute de la part de l'institution considérée et appeler ainsi à l'application des sanctions prévues dans ce sens. Ce qui garantit quelque peu l'efficacité du contrôle sur pièces.

Il peut toutefois arriver que les organes tutélaires décide de déplacer pour effectuer la surveillance sur le terrain : cela correspond au contrôle sur place des S.F.D.

2) Le contrôle sur place

Les modalités du contrôle effectué sur place sont à distinguer selon que l'initiative de ce contrôle a été prise par le ministre ou par les institutions communautaires.

Dans le cas de l'autorité nationale, le législateur dispose que « Le Ministre peut procéder ou faire procéder à tout contrôle des institutions »54(*) . Ce qui semble signifier trois choses.

D'abord le ministère de tutelle peut procéder au contrôle en dépêchant au siège de la structure des contrôles relevant de son propre personnel ou des service qui lui sont rattachés.

La seconde modalité consisterait dans la faculté offerte au ministre de désigner la personne ou structure qu'elle juge habilitée à lui fournir des informations fiables. Dans ce cadre, le ministère pour recourir aux services d'un experts afin que celui-ci se transporte au niveau de la S.F.D dans le but d'y exercer le contrôle au nom et pour le compte du ministère de tutelle.

La dernière modalité consiste, pour le ministre, à susciter l'intervention de l'autorité judiciaire. Il lui ainsi loisible d'adresser au ministère publique une requête tendant à ce qu'il lui plaise de mouvoir au niveau de la structure dont la gestion semble suspecte, afin d'opérer les vérifications nécessaires.

Il faut dire que l'exercice de ce contrôle par les soins du ministre peut se révéler encombrant en raison des nombreuses charges administratives auxquelles le ministre est tenu de faire. C'est ainsi que le caractère facultatif de cette modalité du contrôle en aurait limité la portée si ce n'était que la même faculté de contrôle est offerte aux institutions communautaire spécialisées dans les domaines bancaires et para bancaires.

En effet la B.C.E.A.O. ainsi que la commission bancaire jouit également des mêmes prérogatives soit qu'elles l'exercent sous leur propre initiative, soit à la demande du ministre de tutelle. La loi P.A.R.M.E.C. dispose dans ce sens que « La Banque Centrale et la Commission Bancaire peuvent, de leur propre initiative ou à la demande du Ministre, procéder à des contrôles sur place des organes financiers et de toutes sociétés sous le contrôle de ces derniers »55(*).Cette disposition constitue le fondement légal de la faculté de contrôle sur place offerte aux institutions communautaires.

Elles peuvent, dans ce sens, dépêcher leurs services aux niveaux des structures faîtières afin de constater par elles mêmes le respect des dispositions légales ou règlementaire qui régissent le secteur des S.D.F. les structures qui peuvent faire l'objet d'un tel contrôle sont non seulement les institutions faîtières mais également les sociétés créées par elles dans le cadre de la poursuite de leurs objectifs. Le contrôle ainsi institué a un domaine d'intervention très large qui permet d'aller au-delà des seules institutions mères.

Ce domaine est d'autant plus large que les pouvoir attribués aux autorités de tutelle son étendus. Il est impossible de leur opposer le secret professionnel auquel sont tenues les personnes oeuvrant dans le cadre des institutions de nature faîtière. Cela implique que les administrateurs des S.F.D. doivent apporter leur diligence à l'effectivité du contrôle, ainsi qu'à l'accès des contrôleurs aux documents de la structure. En effet, la loi dispose à ce propos que « Le secret professionnel n'est opposable ni au Ministre, ni à la Banque Centrale, ni à la Commission Bancaire, dans l'exercice de leur mission de surveillance du système financier. En tout état de cause, le secret professionnel n'est pas opposable à l'autorité judiciaire».

Mais à la lumière de cette disposition il convient de retenir d'abord que l'inopposabilité du secret professionnel aux instances tutélaires est suspendue à l'existence d'une condition. C'est que la collaboration des administrateurs est uniquement requise dans le cadre de ce contrôle de tutelle. Si tel n'est pas le cas, le secret professionnel demeure opposable à toutes les instances tutélaires. Ensuite, à l'égard de l'autorité judiciaire, le secret professionnel ne peut, pour quelque motif que ce soit, être opposé.

Quelle que la forme suivant laquelle le contrôle est effectué, son efficacité est limitée si il n'est pas assorti de sanctions susceptibles de la garantir. C'est dans ce sens que sont prévues des normes destinées à incriminer certaines pratiques : ce sont les sanctions attachées au pouvoir de contrôle.

* 49 Pas de tutelle sans texte, pas de tutelle au-delà des textes.

* 50 Mais l'article n'énumère que la confédération, la fédération et l'organe financier. Ce qui exclue donc l'union qui pourtant est de nature faîtière).-

* 51 Voir sur ce point SAR Marième, Rapport de stage, la participation de la BCEAO dans la consolidation de l'environnement normatif des SFD. 2006

* 52 VOIR SUR CE POINT LES ANNEXES DE LA LOI PARMEC

* 53 Voir sur ce point, THIAM S. YOMB, M2MOIRE de DEA La Régulation des S.F.D.,1998-1999, p .16

* 54 Art.66 loi P.A.R.M.E.C.

* 55 Art.67 loi P.A.R.M.E.C.

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