Ministère de l'Economie et des Finances BURKINA
FASO
Secrétariat Général Unité -
Progrès - Justice
Ecole Nationale des Régies financières
Année académique 2007 - 2008
Direction des Etudes et des Stages
Pour l'obtention du diplôme du cycle A de l'Ecole
Nationale des Régies financières
Présenté et soutenu publiquement par
: Paul W. DABONE Option : Fiscalité
Directeur de Mémoire
Hassane OUEDRAOGO
Inspecteur des Impôts, Receveur des Domaines et de la
Publicité Foncière Mars 2008 de BOGODOGO
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
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DEDICACE
A Papa,
A Maman,
A mes frères défunts,
A vous qui êtes si proches de nous aujourd'hui, par votre
douloureuse absence.
Loin de nos yeux, si proche de nos coeurs que jamais la mort ne
pourra vous faire oublier !
Morts d'hier, toujours vivants en nous aujourd'hui ! Oh mort,
où est donc ta victoire ?
Merci chers aimés, d'habiter chacun de nous vivants, vous
que nous ne pouvions si abondamment partager.
Morts d'hier, toujours vivants en nous aujourd'hui !
Reposez dans la paix du Vainqueur de la Mort, et veillez sur
nous,
Qui ne vous oublierons jamais !
Paul DABONE
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AVERTISSEMENT
Ce mémoire a été réalisé en
vue de l'obtention du diplôme du cycle A de l'Ecole Nationale des
Régies Financières (ENAREF). Il a été
rédigé sous la supervision de mon Directeur de Mémoire et
avec le concours de plusieurs personnes ressources. Il constitue cependant le
fruit d'un
travail personnel et comporte des opinions personnelles qui ne
sauraient nullement engager l'ENAREF, mon Directeur de Mémoire ou toutes
autres personnes.
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SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE PREMIERE PARTIE : ETUDE
SOMMAIRE DES LEGISLATIONS FONCIERES
APPLIQUEES AU BURKINA FASO
CHAPITRE 1 : LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE
CHAPITRE2 : LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE
CHAPITRE 3 : ANALYSE DU STATUT JURIDIQUE DE LA
TERRE DU BURKINA
CONCLUSION PARTIELLE DEUXIEME PARTIE :
PROPOSITION DE REFORME
CHAPITRE1 : ETAT DES LIEUX DES PROJETS DE REFORME EN
COURS : LA
POLITIQUE NATIONALE DE SECURISATION FONCIERE EN MILIEU RURAL
CHAPITRE 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE COHESION
SOCIO-CULTURELLE ?
CHAPITRE 3 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ?
CONCLUSION GENERALE
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ABREVIATIONS
A.N : Assemblée
Nationale
A.N.T.R : Agence
Nationale des Terres
Rurales
A.O.F : Afrique
Occidentale Française
C.F.R : Commission
Foncière Rurale
C.N.S.F.M.R : Comité
Nationale pour la Sécurisation
Foncière en Milieu
Rural
C.V.D : Comité
Villageois de Développement
D.F.C.T : Domaine
Foncier des Collectivités
Territoriales
D.F.E : Domaine
Foncier de l'Etat
D.F.N : Domaine
Foncier National
I.N.S.D : Institut
National de la Statistique et de la
Démographie
M.A.H.R.H : Ministère de
l'Agriculture, de l'Hydraulique et des
Ressources
Halieutiques
P.N.G.T : Programme
National de Gestion des
Terroirs
P.N.S.F.M.R : Politique
Nationale de Sécurisation
Foncière en Milieu
Rurale
R.A.F : Réorganisation
Agraire et Foncière
R.D.P : Révolution
Démocratique et Populaire
INTRODUCTION GENERALE
« Nous n'héritons pas de la terre de nos parents,
nous l'empruntons à nos enfants. » L'étude que nous voulons
mener repose sur cette assertion d'Antoine de
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Saint-Exupéry qui pose par elle-même le
problème de l'usage et de la gestion pérenne de la terre, par la
définition des droits dont elle peut faire l'objet, de la
modalité de leur constatation et de leur transmission.
Quelle législation foncière le Burkina Faso
pourrait-il mettre en oeuvre, afin d'assurer le développement
économique auquel il aspire, tout en préservant l'ensemble de
cette ressource unique et non proliférante que constitue la terre, pour
les générations futures ? Quelle législation
foncière le Burkina Faso pourrait-il mettre en oeuvre, qui
définit un régime juridique unique et constitue par ce fait, un
outil de cohésion sociale autour d'objectifs de développement
communs, parce que conforme aux facteurs socio - culturels du pays ?
Jeanne-Marie TRAORE affirme, parlant des problèmes d'aménagement
urbain en Haute Volta, que « l'un des inconvénients relatifs aux
modes d'aménagement employés par l'Etat provient du fait que ces
modes sont restés fondamentalement basés sur des principes
d'aménagement européens, français en particulier, la
plupart des concepteurs étant toujours influencés par le mode de
penser occidental. Les textes législatifs et réglementaires en
matière d'aménagement urbain ont été
également conçus à partir de textes français, sans
tenir réellement compte des modes de vie de la société
concernée... »1
Nous nous demandons, si l'une des difficultés des
législations foncières appliquées jusque-là au
Burkina Faso ne résiderait pas dans le fait que ces textes
(législatifs et réglementaires), ont été
influencés par une conception européenne de gestion
foncière, fruit d'un héritage colonial que leurs concepteurs ont
intégré dans leur mode d'approche, de conception et de traitement
de la question foncière. Dans la même logique que le colonisateur,
les régimes politiques qui lui ont succédé n'ontils pas
mis en place des législations foncières, en n'intégrant
pas suffisamment les paramètres socio - culturels ?
Notre conviction est qu'il n'est pas possible de mettre en
place une politique foncière durable et qui organise la gestion et
l'appropriation du domaine foncier national sans tenir compte de ces
paramètres socio - culturels. Nous pensons enfin que la
législation foncière devrait prendre en compte les
caractéristiques actuelles de la société à laquelle
elle veut s'appliquer afin de ne pas être caduque ou
dépassée, dès sa mise en place. « Au terme du
recensement général de la population effectué
1 Espaces disputés en Afrique noire ; éditions
karthala, Paris 1986, page 33
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au cours de l'année 2006, le Burkina Faso a une
population totale estimée à treize millions trois cent dix mille
(13 310 000) habitants, dont environ 70% ont moins de 35 ans, tandis que le
groupe compris entre 15 et 34 ans représente 30% de cette population.
Quant aux moins de 20 ans, ils représentent plus de 50%. Ce tableau nous
montre que la population burkinabè est essentiellement
jeune1. » Une législation foncière
n'intégrant pas ces paramètres ne sera-t-elle pas source de
conflits sociaux dans le futur ?
Nous voulons essayer d'apporter notre modeste contribution au
débat qui a cours actuellement partout en Afrique de l'Ouest sur la
question du choix d'une législation foncière qui ne favorise pas
les conflits sociaux, mais constitue plutôt un outil de
développement économique, en traitant le thème suivant :
quelle législation foncière comme outil de cohésion
sociale et de développement économique, adaptée aux
réalités socio - culturelles du Burkina Faso ? Ce choix a
été motivé par deux raisons essentielles que voici :
- l'intérêt que nous avons porté à
ce sujet nous a conduit à effectuer des recherches sur les études
qui en ont déjà traité. Au fil de nos lectures nous avons
réalisé que le sujet était non seulement
d'actualité mais n'était toujours pas épuisé ;
- le Burkina Faso a entrepris une série de reformes des
textes législatifs et réglementaires qui traitent de la question
foncière. Ces reformes étant toujours en cours, nous
espérons pouvoir apporter notre modeste opinion aux débats qui se
mènent actuellement.
Afin de pouvoir aborder ce sujet, il nous paraît
indispensable de donner d`abord une définition de la «
législation foncière ».
Selon le dictionnaire `'le petit Larousse
illustré» la législation est un ensemble de lois qui
traitent d'une matière donnée. La législation
foncière peut donc être définie comme l'ensemble des
règles juridiques applicables aux immeubles d'un pays donné, qui
détermine les différents droits dont ils peuvent faire l'objet,
ainsi que les modalités de leur constatation, de leur exercice et de
leur protection.
Afin de proposer une législation foncière conforme
aux réalités socio - culturelles du Burkina, nous articulerons
notre étude en deux (2) parties.
Dans une première partie, nous procèderons à
une analyse sommaire des législations foncières qui se sont
succédées au Burkina Faso, de la période coloniale
1 Journal « Le Pays » n° 3956 du mardi
18 septembre 2007, page 12.
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à nos jours. Cette analyse nous permettra de relever
les caractéristiques des différents régimes juridiques
dont la terre a fait l'objet ainsi que les différents types de droits
véhiculés par chacun de ces régimes.
Dans la deuxième partie nous essayerons de faire une
proposition de reforme qui intègre les réalités socio -
culturelles et les objectifs de développement économiques du
Burkina Faso.
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PREMIERE PARTIE :
ETUDE SOMMAIRE DES LEGISLATIONS
FONCIERES APPLIQUEES AU BURKINA FASO
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Plusieurs études ont été menées
sur les législations foncières appliquées au Burkina. Nous
n'avons pas la prétention d'apporter ici, des éléments
vraiment nouveaux mais de relever, dans le cadre de l'approche
méthodologique que nous avons adopté, les caractéristiques
des différentes législations foncières qui ont
administré la terre avant et depuis la période coloniale
jusqu'à maintenant. Pour ce faire nous examinerons la législation
foncière coutumière (chapitre 1) et règlementaire
(chapitre 2). Un troisième chapitre sera consacré à
l'analyse du statut juridique de la terre et permettra de relever les points de
divergence et de convergence des différentes législations
foncières afin de vérifier s'il est envisageable d'instituer une
législation foncière unifiée.
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CHAPITRE 1 : LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE
Avant la pénétration coloniale, les terres de
l'actuel Burkina Faso étaient occupées par plusieurs groupes
ethniques. Etabli en clan ou en famille, chaque groupe possédait des
coutumes et des pratiques foncières différentes de celles des
autres groupes. Ces terres étaient donc régies par autant de
régimes fonciers qu'il existait de groupes sociaux. Malgré cette
diversité de pratiques les régimes fonciers coutumiers
présentent des similitudes permettant de les étudier ensemble.
SECTION 1 : LES CARACTERISTIQUES DU REGIME FONCIER
COUTUMIER
Les caractéristiques du régime foncier coutumier
comportent deux notions. Il s'agit de la personne habilitée à
gérer la terre coutumière, et de la nature des droits
coutumiers.
I - LA PERSONNE HABILITEE A GERER LA TERRE COUTUMIERE :
LE CHEF
DE TERRE
L'administration des terres coutumières est
assurée par un chef de terre. Celui-ci représente le premier
occupant des lieux dont il est le descendant. Il a un double rôle :
religieux et juridique.
- Son rôle religieux consiste à procéder
aux offrandes sacrificielles nécessaires pour obtenir ou rétablir
le droit d'user de la terre, au bénéfice des demandeurs.
- Son rôle juridique consiste à octroyer les droits
d'usage pouvant être exercés sur la terre, et à
régler les litiges fonciers.
II - LA NATURE DES DROITS FONCIERS COUTUMIERS
Le régime foncier coutumier reconnaît un droit de
propriété collectif et des droits d'usage individuels.
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II-1 :LE DROIT DE PROPRIETE
II-1-1 : Le mode d'appropriation de la terre
L'appropriation de la terre se faisait par des actions non
violentes ou violentes.
a) L'appropriation non violente des
terres : elle se faisait de deux façons : le droit de
hache et le droit de feu.
- Le droit de hache : C'est le droit reconnu aux
ancêtres d'un groupe ethnique d'avoir été les premiers
à procéder à l'aménagement de la terre, par la
coupe des arbres, et donc par l'usage de la hache.
- Le droit de feu : il est conféré
à un groupe ethnique par le fait que ses ancêtres aient
été les premiers à procéder à
l'aménagement de la terre, par le défrichage de celle-ci par le
feu.
b) L'appropriation violente de la
terre : l'appropriation se faisait dans ce cas par la force. Elle
peut être considérée aussi comme `'un trophée de
guerre.» Elle consiste en l'annexion par les vainqueurs d'une guerre, de
terres jusqu'alors occupées par les vaincus.
II-1-2 - La constitution du droit de
propriété
Le droit de propriété est certes établi
par le premier coup de hache ou le feu, mais il n'est tacitement reconnu par
l'ensemble des communautés que lorsque celle qui s'est installée
et a établi sa présence par la marque (de la hache ou du feu),
occupe effectivement la terre pendant au moins trois générations.
« Les territoires ainsi délimités et sur lesquels chaque
communauté vit et exerce ses activités de subsistance, deviennent
des propriétés collectives surtout à partir de la
deuxième génération après celle qui les avait
`'approprié» par le fait de l'occupation.»1
Deux conditions doivent donc être réunies pour que
le droit de propriété soit reconnu par l'ensemble des
communautés :
- l'occupation effective de l'espace ;
- l'occupation par trois générations
consécutives au moins.
1 `'Espaces disputés en Afrique noire»,
Edition karthala, Paris 1986, page 43
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II-1-3- La nature du droit de propriété
Le droit de propriété est collectif et
inaliénable.
- Le droit de propriété est
collectif parce que la terre coutumière appartient à
l'ensemble de la communauté et que les individus ne peuvent disposer du
droit de propriété.
- Le droit de propriété est
inaliénable parce que les communautés africaines
considèrent la terre comme un don des ancêtres et des forces
surnaturels et non comme un bien transmissible. C'est cette
considération qui explique les cultes à la terre et aux
divinités, conduits par le chef de terre.
II-2 : LE DROIT D'USAGE INDIVIDUEL
Le droit d'usage est soit direct, soit conféré
- Le droit d'usage direct est celui
exercé par les descendants, membres authentiques de la
communauté. Il se transmet de père en fils et ne peut être
prêté aux tiers qu'avec l'accord du chef de la
communauté.1Il est permanent, transmissible et en principe
imprescriptible
- Le droit d'usage conféré.
C'est le droit d'usage octroyé aux personnes étrangères.
Dans ce cas, la terre leur est concédée sous forme de prêt
conditionné ou sans condition. Dans le premier cas, la terre est
concédée moyennant une redevance en nature (récolte,
bétail, volailles... )2 . Dans le second cas, la terre est
concédée au nom de la solidarité et de l'assistance
mutuelle. Le droit d'usage conféré est permanent, transmissible
mais précaire et révocable à tout moment.
III - LES COMPOSANTES DU REGIME FONCIER
COUTUMIER
L'examen des différents rôles du chef de terre
permet d'identifier deux composantes au régime foncier coutumier. Pour
rappel, le chef de terre exerce principalement deux (2) rôles : religieux
et juridique.
1 `'Espaces disputés en Afrique noire»
éditions Karthala, Paris 1986, page 44
2 Idem que la note précédente
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Ces deux rôles représentent les deux aspects du
régime foncier coutumier, et partant, les deux aspects de la terre telle
que perçue par ce régime.
- le rôle religieux : il vient du fait
que la terre coutumière est une entité sacrée. C'est de
cette sacralité que viennent les différents cultes et rites
sacrificiels conduits par le chef de terre.
- le rôle juridique : li vient du fait
que les différents usages de la terre par la communauté peuvent
occasionner des conflits que le chef de terre doit régler. Celui- ci
intervient ainsi pour accorder le droit d'usage, veiller au respect des
modalités de son exercice et régler les conflits fonciers.
Le double rôle du chef de terre est la résultante
des deux aspects du régime foncier coutumier : une législation
foncière, mais aussi une pratique religieuse.
Les deux composantes du régime foncier coutumier
permettent aussi de comprendre les différents droits qui peuvent
être exercés sur la terre et qui sont règlementés
par la législation foncière coutumière.
IV - LA LEGISLATION FONCIERE
COUTUMIERE IV-1- LES OBJECTIFS DE LA LEGISLATION FONCIERE
COUTUMIERE
Le premier objectif est la préservation de la
propriété collective pour les générations futures.
Les autres objectifs sont :
- assurer et garantir la cohésion de la communauté
en faisant de la terre un bien commun;
- pérenniser l'existence de la communauté en
évitant le risque de dispersement des membres que pourrait causer la
dépossession de ses terres.
Les modalités d'exercice du droit de
propriété constituent l'élément principal de
différenciation des législations foncières qui se sont
côtoyées au Burkina. Ces modalités découlent du
concept d'appropriation tel que perçu par chacune d'elle.
IV-2- LE CONCEPT D'APPROPRIATION
L'examen des différents modes d'appropriation de la
terre et d'exercice du droit de propriété permet de comprendre la
conception coutumière de la notion de propriété et partant
du concept d'appropriation.
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- La constitution du droit de
propriété : elle provient d'une action collective. C'est
en effet l'acte posé par un groupe de personnes, ou par une personne
mais pour le compte d'un groupe de personnes qui est reconnu par les autres.
Ainsi, l'appropriation aussi bien violente que non violente se fait par ou pour
plusieurs personnes. Par ailleurs, quel que soit le mode de constitution du
droit de propriété (par des actions pacifiques ou violentes), les
populations africaines ne perçoivent pas ce droit comme la
résultante d'actions humaines uniquement. Une force supérieure
invisible est toujours intervenue pour aider la communauté à
prendre possession de l'espace terrestre. Voila pourquoi le chef de terre
exerce un pouvoir qui ne lui est pas contesté. D'abord parce qu'il tire
sa légitimité de sa filiation avec les ancêtres. Ensuite
parce qu'il exerce un rôle mettant obligatoirement en présence, au
moins deux entités : lui-même en tant que vivant et celui de qui
il tire sa légitimité, c'est-à-dire son ancêtre. Les
droits exercés sur la terre sont donc originellement collectifs parce
que acquis collectivement (directement ou par héritage) et
exercés pour le compte d'une communauté. Un chef nigérien
exprime avec justesse cette conception lorsqu'il affirme : « à mon
sens la terre appartient à une grande famille dont beaucoup de membres
sont morts, quelques uns sont vivants et dont le plus grand nombre est encore
à naître... »1
- L'exercice du droit de
propriété : le caractère collectif de la
propriété coutumière détermine le principe
fondamental du droit de propriété coutumier :
l'inaliénabilité de la terre. Cette inaliénabilité
pourrait tirer son explication dans le mode de constitution du droit de
propriété et dans la perception que les populations africaines
ont de la terre.
L'article 544 du code civil définit le droit de
propriété comme « le droit de jouir et de disposer des
choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un
usage prohibé par les lois et par les règlements. » Le droit
de propriété se présente ainsi comme le droit le plus
absolu qui soit sur les biens. Il est exercé par le «
propriétaire » du bien. La condition essentielle de l'exercice du
droit de propriété est donc d'être le propriétaire
du bien. Les communautés africaines considèrent les terres
régies par le régime foncier coutumier comme la
propriété exclusive d'êtres non vivants ou invisibles
(ancêtres et autres êtres surnaturels). Les vivants exercent
1 DARGA Basile, « la problématique de la
sécurité foncière au Burkina Faso : constat et
perspective. », mémoire de fin d'études, ENAREF mars 1998,
page 9.
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sur elles, uniquement un droit d'usage. Le droit d'usage
n'étant pas le droit de propriété stricto sensu, les
vivants ne peuvent transmettre que ce qu'ils possèdent.
Par ailleurs, la conception africaine du foncier place le
caractère sacré de la terre avant tout usage et par
conséquent, avant tout droit qui peut être constitué sur
elle. Léopold S. SENGHOR la décrira en ces termes : « la
première de nos entraves, c'est le titre qui rend la
propriété respectable ; c'est la défense faite à
l'homme de toucher à ce qui appartient à un autre, sans le
consentement du propriétaire... Mais les hommes ont voulu
posséder exclusivement ce qu'ils avoient reçu pour en jouir en
commun. Il a bien fallu dès lors que l'art inventât des limites,
et que la justice les rendît sacrées. Voilà le vrai
fondement de la société, et l'objet comme la source de toutes les
lois... Leur esprit est de consacrer la propriété : il faut donc
que la propriété leur soit antérieure. Mais la
propriété elle-même n'a pu être que l'effet d'une
société quelconque. D'où il suit qu'il y a dans le monde
un principe secret, plus ancien que les lois, indépendant du pacte
social ... »1
Selon le dictionnaire le petit Larousse
illustré, l'appropriation désigne l'action d'approprier
c'est-à-dire de rendre propre à un usage, d'en faire sa
propriété2.
Et pour Etienne le Roy, pour passer de l'idée
d'appropriation à la propriété privée, il faut que
l'on passe d'une conception sacrale de la terre à une conception
mercantile3.
C'est dire que tant que l'aspect sacré de la terre
existe, l'appropriation telle que définie par la législation
foncière moderne n'existe pas dans celle coutumière. Etienne le
Roy définira pour ce faire, l'appropriation dans la conception africaine
traditionnelle comme « l'affectation de l'espace à un usage
»4. Léopold S. SENGHOR abondera dans le même sens
lorsqu'il affirmera lors d'une conférence à Strasbourg en 1964
qu'en Afrique noire traditionnelle, la terre ne peut être l'objet de
propriété : elle est seulement l'objet d'usufruit.
L'appropriation, pour la législation foncière
coutumière, consiste donc à affecter un espace à un
usage.
1 `' L'appropriation de la terre en Afrique noire» Editions
KARTHALA, Paris, 1991, page 28
2 Le petit Larousse illustré, Paris, 1968, page
78
3 `'L'appropriation de la terre en Afrique noire `',
Editions Karthala, Paris, 1983, page 30.
4 `'L'appropriation de la terre en Afrique noire `',
Editions Karthala, Paris, 1983, page 30
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SECTION 2 - LES FORCES DE LA LEGISLATION
FONCIERE COUTUMIERE
I - LE RESPECT DES PRINCIPES FONCIERS COUTUMIERS
La législation foncière coutumière a
bravé toutes les tentatives de la supprimer, de la période
coloniale à nos jours. La dualité des systèmes de gestion
des terres s'est imposée à tous les régimes politiques.
Même après la suppression légale des droits fonciers
coutumiers, l'ensemble de la population burkinabè, décideurs
politiques et citoyens ordinaires continuent de faire recours aux
autorités coutumières dès qu'ils envisagent
acquérir une terre aussi bien pour l'usage communautaire (pour les
autorités communales par exemple) que pour l'usage individuel. Cette
situation constitue une force de la législation foncière
coutumière. En effet, si personne ne permettait aux responsables
coutumiers d'exercer leur autorité dans la gestion des terres
burkinabè, la législation foncière coutumière
s'éteindrait d'elle-même. Mais tout le monde a recours à
l'autorité coutumière pour obtenir la terre. «...en effet,
dans la pratique, tout le monde y compris ceux-là même, qui sont
chargés de concevoir et de faire appliquer la loi se
réfèrent aux règles traditionnelles lorsqu'il s'agit pour
eux d'accéder à la terre en milieu rural. Le schéma est le
même et il consiste à s'adresser, directement ou par
l'intermédiaire d'une tierce personne, aux `'propriétaires
terriens `'. Ainsi, tous ceux qui s'intéressent au foncier, y compris
les intellectuels, accèdent aux conditions à remplir, notamment
les offrandes aux ancêtres pour implorer leur pardon et leur protection
dans l'utilisation des terres concédées. »1
II - L'OCCUPATION OBLIGATOIRE DE L'ESPACE, UN
PREALABLE A L'ACQUISITION DES DROITS FONCIERS COUTUMIERS
Les conditions d'obtention et d'exercice de tout droit sur la
terre constituent de notre point de vue une seconde force de la
législation foncière coutumière. En effet,
1
moussaouedraogo@hotmail.com `' Le foncier dans les politiques de
développement au Burkina Faso : enjeux et stratégies»
OUEDRAOGO Moussa, page 13.
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ni le droit de propriété, ni celui d'usage ne se
conçoit dans le régime foncier coutumier sans une occupation
effective de l'espace.
A l'heure des spéculations foncières, effets
induits de l'approche règlementaire de la question foncière qui
ne considère la terre que selon sa valeur économique,
l'occupation effective de l'espace comme condition obligatoire de
détention de tout droit sur la terre apparaît comme une
véritable force de la législation foncière
coutumière. Surtout pour un pays comme le Burkina qui tire l'essentiel
de ses ressources de la terre exploitée. « L'appropriation,
à l'origine ne se conçoit pas sans une mise en valeur,
c'est-à-dire sans que les deux conditions suivantes soient remplies :
vivre sur la terre et vivre de la terre occupée. Les terres
cultivées et les parcours de chasse étaient donc
considérés comme occupés par une collectivité et
donc appropriés par elle (...) Il faut donc considérer que le
`'premier coup de hache» qui confère le droit de
propriété, n'était qu'un symbole à travers lequel
se manifestaient toutes les formes d'activités qu'exerçait une
communauté sur un territoire, et qui lui procuraient ses moyens de
subsistances... »1
III - L'EXCEPTION AU PRINCIPE D'INALIENABILITE DU
DROIT DE PROPRIETE
L'évolution de certains principes coutumiers tels que
celui de l'inaliénabilité du droit d'usage est une force de la
législation foncière coutumière. La pratique qui
était peu courante à l'époque coloniale a pris de
l'ampleur au fil de l'évolution des sociétés africaines.
« Les donations vraies se conçoivent comme une forme de
contournement de la règle de l'inaliénabilité de la terre
en coutume traditionnelle. Elles se faisaient contre des paiements en nature,
et plus tard en nature et en espèce. Elles ont conféré les
droits de propriété aux bénéficiaires et ces droits
n'étaient pas révocables, mais se transmettaient de
génération en génération. »2
Cette évolution fait la preuve contraire des
appréhensions du colonisateur français, en montrant que le
système foncier coutumier africain, comme toute structure sociale
évolue et se modèle au gré des exigences sociales et
économiques du moment. La `'donation» est un mode de transmission
des droits fonciers coutumiers, qui ressemble à s'y méprendre,
à la vente.
1 `'Espaces disputés en Afrique noire»,
éditions Karthala, Paris, 1986, page 42.
2 `'Espace disputé en Afrique noire»,
éditions Karthala, Paris 1986, page 45.
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SECTION 3 - LES INSUFFISANCES DE LA LEGISLATION
FONCIERE
COUTUMIERE
La législation foncière coutumière comporte
entre autre, les insuffisances suivantes qu'il nous paraît important de
souligner.
I - L'IMPOSSIBILITE D'ETABLISSEMENT DE LA PREUVE DE
DROIT
La législation foncière coutumière repose
sur l'oralité. Ni le droit de propriété, ni celui d'usage
ne sont définis dans leur portée et leur consistance spatiale par
un document. Les limites des espaces sur lesquels portent les droits de
propriété et de jouissance des communautés et des
personnes sont difficiles à établir. Les conflits
intercommunautaires et entre individus vivants dans une même
communauté pour la possession du droit d'usage sont inévitables,
surtout avec l'accroissement démographique et la raréfaction des
espaces libres.
II - LA PRECARITE DES DROITS ACCORDES AUX
PARTICULIERS
Le droit d'usage qui est l'unique droit dont peuvent disposer
les particuliers devient encore plus précaire avec le manque de terres
disponibles. Les terres accordées aux étrangers qui sont faciles
à reprendre peuvent être retirées à tout moment sans
explication. La première conséquence de cette situation est le
frein à l'investissement provenant de la crainte d'investir sur une
terre sans avoir l'assurance de la garder longtemps.
En plus l'attribution des terres n'obéit pas toujours
au besoin de la communauté mais à d'autres critères que
les difficultés économiques peuvent imposer. Les
différentes études menées sur la gestion du foncier par la
coutume indiquent que les responsables coutumiers accordent quelques fois les
terres à certaines personnes sur la base d'affinités qu'elles ont
avec elles. Les membres de la communauté n'échappant pas à
ce mode de partage, les terres fertiles ne sont pas toujours détenues
par les bras valides.
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III - LA PLURALITE DES REGIMES COUTUMIERS, UN
FACTEUR
D'EFFRITEMENT DE L'UNITE NATIONALE
Ainsi que nous le disions précédemment, il
existe autant de régimes fonciers que de communautés ethniques au
Burkina. Cette pluralité des régimes coutumiers est un frein
à la consolidation de l'unité nationale. En effet, bien qu'elles
présentent d'importantes similitudes permettant de les regrouper, les
pratiques foncières coutumières sont quand même un peu
différentes d'une communauté à une autre. La nature du
droit d'usage ainsi que sa précarité et sa
transmissibilité sont fonction de l'appartenance ou non à la
communauté détentrice des terres. Les notions
`'d'autochtone» et `'d'étranger» évoluent très
peu. On ne change pas d'ethnie pour avoir séjourné longtemps dans
une autre communauté ethnique. L'étranger selon la distinction
coutumière, ce n'est pas seulement celui qui vient d'un autre pays ;
c'est aussi celui qui ne vient pas du même village. Vu sous cet angle, le
régime foncier coutumier, détenteur exclusif du droit de
propriété coutumier, fait des burkinabè non originaires du
même village, d'éternels étrangers sur une partie du sol de
la patrie à laquelle ils appartiennent. Et au sein de laquelle ils
doivent être tous égaux en droit1.
IV - LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE, UNE AFFAIRE
D'HOMMES
Plus de la moitié de la population burkinabè est
composée de femmes. Mais cette frange de la population est
défavorisée par la gestion foncière des hommes. A l'heure
de l'institutionnalisation de l'égalité des sexes partout dans le
monde, les règles coutumières qui sont discriminatoires à
l'égard des femmes finiront par être tôt ou tard des
facteurs de troubles sociaux.
Le régime foncier coutumier a géré les
terres du Burkina avant la
colonisation. Pendant et après la période
coloniale, les terres burkinabè ont été
administrées par le régime foncier règlementaire qui a
tantôt accordé une place à la législation
foncière coutumière, tantôt décidé de
détenir la totalité des prérogatives de gestion
foncière. Après avoir présenté le régime
foncier coutumier, il convient d'étudier la législation
foncière réglementaire.
1 Constitution du Burkina Faso, article 1
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CHAPITRE 2 : LA LEGISLATION
FONCIERE REGLEMENTAIRE
La législation foncière règlementaire a
été introduite dans les colonies d'Afrique noire par le
colonisateur français. Après l'accession à
l'indépendance, les législations foncières
instituées par les régimes politiques post-coloniaux ont
été inspirées de celle coloniale. Ensuite, la
Réorganisation Agraire et Foncière (RAF) a introduit une nouvelle
approche de la gestion foncière. Les différentes autorités
politiques qui ont présidé aux destinées du pays, de la
Haute Volta au Burkina Faso, ont ainsi institué à tour de
rôle, la législation foncière qui leur semblait la mieux
adaptée aux objectifs de la politique de développement qu'elles
mettaient en place.
Nous présenterons l'évolution (section 1) et les
caractéristiques (section 2) de la législation foncière
réglementaire. Ensuite nous relèverons quelques unes de ses
forces et faiblesses (section 3).
SECTION 1- L'EVOLUTION DE LA LEGISLATION FONCIERE
REGLEM ENTAI RE I - LE REGIME FONCIER
COLONIAL
Le colonisateur français a introduit dans les colonies
de l'Afrique Occidentale Française (A.O.F), la notion de
propriété privée des terres. Il a institué un
régime foncier dont les principes proviennent du droit civil et des lois
françaises et administré les terres africaines sur la base de la
distinction « domaine public - domaine privé ».
I-1 - LA DISTINCTION DOMAINE PUBLIC - DOMAINE PRIVE
I-1-1- Le domaine public
C'est le décret du 23 octobre 1904 qui institue le domaine
public en énumérant les biens qui en font partie.
Le domaine public comprend des biens qui, en raison de leur
nature ou de leur destination, ne peuvent faire l'objet d'appropriation par des
personnes de droit privé.
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Ils sont donc grevés d'indisponibilité du fait
de leur domanialité.1 Pour ce faire la législation
leur a conféré les caractères leur permettant
d'échapper aux différents modes d'appropriation privée des
biens : ils sont inaliénables, imprescriptibles et insaisissables.
I- I-2 : Le domaine privé
Il est constitué de biens pouvant faire l'objet
d'appropriation par des personnes physiques ou morales de droit privé.
Il comprend les « terres vacantes et sans maître » 2 , mais
aussi tous les autres biens pouvant faire l'objet d'appropriation
privée.
L'importance de la distinction domaine public - domaine
privé réside dans la nature des droits pouvant être acquis
sur les biens appartenant à l'un ou l'autre domaine. En effet le
colonisateur français a introduit avec ces notions, celle de
propriété privée. Ainsi, à l'inverse des biens du
domaine public qui ne peuvent faire l'objet d'appropriation par des
particuliers, ceux du domaine privé peuvent être acquis en pleine
propriété.
I-2- LES CARACTERISTIQUES DU REGIME FONCIER COLONIAL
Le régime foncier colonial est caractérisé
par la personne habilitée à gérer les terres et par la
nature des droits fonciers règlementaires.
I-2-1 - La personne habilitée à gérer
les droits fonciers : le conservateur de la propriété
foncière
Les bureaux de la conservation sont gérés par
des préposés qui portent le titre de « conservateur de la
propriété foncière » et qui sont
désignés par arrêté du Gouverneur
général3. Ils sont chargés :
- de la suite à donner aux demandes d'immatriculation et
de la formalité de l'immatriculation sur les livres fonciers ;
1 Décret du 23/1 0/1 904, article 1
2 Décret du 23/1 0/1 904, article 10
3 Décret du 26/07/1 932 modifiant le
décret du 24/07/1 906, article 9
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- de l'inscription, à la suite des titres fonciers et des
copies de ces titres, des droits réels constitués sur les
immeubles immatriculés ;
- de la conservation des actes et plans relatifs aux immeubles
immatriculés et de la communication au public des renseignements
contenus dans leurs archives et relatifs aux propriétés
immatriculées.1
I-3 : LES DIFFERENTS DROITS DU REGIME FONCIER COLONIAL
Le régime foncier colonial reconnaît :
- a) Les droits réels immobiliers suivants : la
propriété des biens immeubles, l'usufruit des mêmes biens,
les droits d'usage et d'habitation, l'emphytéose, le droit de
superficie, les servitudes et services fonciers, l'antichrèse, les
privilèges et hypothèques ;
- b) Toutes les actions qui tendent à revendiquer ces
mêmes droits. 2
I-4-LES MODES DE CONSTITUTION DES DROITS REELS IMMOBILIERS
DU
REGIME FONCIER COLONIAL
Dans le but d'imposer sa conception des droits devant
être exercés sur la terre, le colonisateur mettra en place le
régime de l'immatriculation qui reconnaît uniquement les droits
acquis selon le code civil, comme porteur d'effets juridiques et opposables aux
tiers. Mais qui reconnaît cependant l'existence de prérogatives
foncières aux autorités coutumières et l'existence de
droits détenus en vertu de la coutume. Devant le peu d'adhésion
des populations africaines à ce concept, il assouplira sa position en
instituant successivement les régimes du titre foncier indigène
et du livret foncier qui reconnaissaient les droits acquis selon le
régime foncier coutumier comme ressemblant au droit de
propriété civiliste et opposables aux tiers.
I-4-1 : Le régime de l'immatriculation
Il permet de désigner un terrain par un numéro au
registre foncier. Il comporte une procédure et une formalité
d'immatriculation.
1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le
décret du 24/07/1 906, article 10
2 Décret du 26/07/1 932 modifiant le
décret du 24/07/1 906, article 20
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La procédure d'immatriculation
Elle commence à l'initiative d'une personne
détenant un droit réel immobilier et est conduite par le
conservateur de la propriété foncière. Elle porte sur les
fonds de terre bâtis ou non bâtis et se déroule selon les
étapes suivantes :
1) La procédure d'immatriculation est
enclenchée par une demande spéciale du propriétaire de
l'immeuble. Après avoir clôturé l'immeuble, celui-ci
établit une déclaration en langue française, signée
et contenant :
- les informations sur son identité (nom,
prénoms, qualités, domicile, état civil) et une
élection de domicile dans une localité du ressort judiciaire
où se trouve l'immeuble à immatriculer ; domicile auquel seront
effectués, par la suite, toute notifications, significations et actes
divers de procédure ...1
-la description de l'immeuble et de tous les investissements qui
s'y trouvent ainsi que l'indication de sa valeur locative et vénale ;
- le détail des droits réels et des baux de plus de
trois années afférents à l'immeuble avec mention de
l'identité des ayants droits ;
- la réquisition au conservateur de la
propriété foncière de procéder à
l'immatriculation de l'immeuble décrit.2
A l'appui de sa déclaration (la réquisition), le
requérrant dépose :
- tous les contrats et actes publics ou privés
constitutifs des différents droits réels
énumérés ou un état des transcriptions et
inscriptions afférentes à l'immeuble ;
- un plan de l'immeuble à l'échelle, établi
conformément aux instructions du service topographique ;
- une provision égale au montant présumé
des frais de la procédure.3
2) Le conservateur vérifie la régularité
de la réquisition avant de l'accepter. Il s'assure pour cela que les
titres produits ou invoqués sont établis dans les formes
prescrites par la législation applicable au propriétaire et
à la propriété.
3) Le conservateur fait insérer un extrait de la
réquisition au Journal Officiel (J.O) de la colonie. Cet avis
d'insertion est affiché pendant trois (3) mois dans les
1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le
décret du 24/07/1 906, article 90
2 Décret du 26/07/1 932 modifiant le
décret du 24/07/1 906, article 90
3 Décret du 26/07/1 932 modifiant le
décret du 24/07/1 906, article 93
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lieux d'usage pour faire une large publicité afin de
permettre aux éventuels détenteurs de droits portant sur
l'immeuble à immatriculer de se faire connaître, et de
préciser la nature, la valeur et l'étendue desdits droits : soit
par voie d'opposition en cas de contestation sur l'existence ou
l'étendue du droit de propriété du requérant ; ou
par demande d'inscription en cas de prétentions à l'exercice d'un
droit réel susceptible de figurer au titre à établir et
non énumérés par le requérant dans sa
déclaration. Ces déclarations sont faites oralement ou par
écrit et reçues par le conservateur qui les transcrit dans un
registre spécial.1 Elles doivent être faites pendant le
délai d'affichage de l'avis d'insertion. Aucune opposition ou demande
d'inscription n'est recevable après l'expiration de ce délai,
sauf pour les cas de délais supplémentaires accordés
spécialement aux absents.
4) Les droits fonciers coutumiers
révélés sont purgés par voie amiable ou par voie
d'exécution forcée. Si le registre spécial fait ressortir
l'existence d'oppositions ou de demandes d'inscription, l'immatriculation de
l'immeuble n'est accordée au requérant qu'après que
celui-ci ait apporté la mainlevée de toutes les oppositions et
demandes ou son acceptation des droits des personnes ayant formulé ces
requêtes. Pendant la période d'affichage, un bornage
contradictoire du terrain est fait avec établissement d'un
procès-verbal qui indique exactement les limites de l'immeuble et qui
est signé par le géomètre et tous les assistants
lettrés.
5) A l'expiration du délai d'affichage et à la
réception du procès verbal après le bornage, le
conservateur vérifie encore la régularité de la
réquisition et des titres, l'accomplissement de toutes les prescriptions
et l'absence ou la levée de toutes les oppositions. Il procède
ensuite à l'immatriculation de l'immeuble sur les livres fonciers.
La formalité d'immatriculation
Elle consiste à :
- l'inscription au registre des dépôts d'une mention
constatant l'achèvement de la procédure ;
- l'établissement du titre foncier sur les livres fonciers
;
- la rédaction de bordereaux analytiques pour chacun des
droits réels soumis à la publicité et reconnus au cours de
la procédure ;
1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le
décret du 24/07/1 906, article 97
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- la mention sommaire de ces divers droits à la suite du
titre foncier ;
- l'annulation des anciens titres de propriété
remplacés par le titre foncier ;
- l'établissement d'une copie du titre foncier à
remettre au propriétaire et de
certificats d'inscription à délivrer aux
titulaires de droits réels susceptibles de
cession .1
La procédure et la formalité d'immatriculation
aboutissent à la création du droit de propriété et
des autres droits accessoires. Le droit de propriété est le plus
absolu dont les personnes peuvent disposer sur un bien. Il est composé
de trois éléments : l'abusus, l'usus et le fructus.
- L'abusus : c'est la faculté
reconnue au propriétaire d'une chose, d'en `'abuser,»
c'est-à-dire de disposer de la chose tel qu'il l'entend. C'est le
caractère absolu du droit de propriété.
- L'usus : c'est la faculté reconnue au
propriétaire d'user de la chose, c'est-à- dire d'en tirer
utilité.
- Le fructus : c'est la faculté
reconnue au propriétaire d'user de la chose et d'en tirer profit. Il
englobe donc l'usus en ce sens qu'en plus d'user de la chose, la loi
reconnaît au propriétaire la faculté de faire fructifier la
chose.
Parmi ces trois éléments, l'usus est l'aspect
contrôlé du droit de propriété, qui peut affaiblir
ou anéantir ce droit. En effet la seule limite que la loi
reconnaît au droit de propriété, c'est l'usage contraire
à la loi.
LES CARACTERES DU DROIT DE PROPRIETE
Le droit de propriété comporte un caractère
exclusif, absolu et perpétuel. - Exclusif, parce qu'il
confère au propriétaire seul la faculté d'utiliser et de
jouir de la chose.
- Absolu, parce qu'il confère au
propriétaire la totalité de la faculté de faire de la
chose ce qu'il veut.
- Perpétuel, parce que le droit
reconnu au propriétaire ne s'éteint pas du fait de sa non
utilisation par celui-ci. La prescription extinctive n'atteint pas le droit du
propriétaire. En plus, le caractère perpétuel vient du
fait que le droit de propriété peut être transmis
intégralement à une autre personne.
1 Décret du 26/07/1 932, article 119.
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La législation foncière coloniale confère
donc sur la terre un droit personnel, absolu et perpétuel.
I-4-2 : Le régime du titre foncier
indigène
C'est un décret du 8 octobre 1925 qui instaure le
régime du titre foncier indigène, encore appelé certificat
administratif. Il a été mis en place pour tenir compte des
raisons qui expliquaient le manque d'adhésion des populations africaines
au régime de l'immatriculation afin d'inciter celles-ci à
déclarer leurs droits immobiliers.
En effet, le coût élevé de
l'immatriculation, la complexité et la longueur de la procédure
et la méfiance des populations vis-à-vis de ces instances
étrangères chargées d'administrer leur terre, ont
été relevés comme raisons essentielles de l'échec
du régime de l'immatriculation après près de vingt (20)
ans d'application. Le colonisateur a alors institué le régime du
titre foncier indigène afin de permettre aux populations africaines de
faire connaître leurs droits fonciers à l'issue d'une
procédure courte, simple et peu coûteuse. Pour cela :
- le détenteur de terre régie par le
régime foncier coutumier qui désire faire reconnaître ses
droits afin de les rendre opposables à toute autre personne, adresse une
demande écrite au représentant de l'administration coloniale
comportant indication de son identité complète ainsi qu'une
description sommaire de son immeuble.
- à la réception de la demande, un
récépissé est délivré au requérant
qui peut dès lors délimiter son terrain par tout moyen de
repère. Le représentant de l'administration inscrit ensuite la
demande sur un registre ad hoc avec un numéro d'ordre.
- une palabre est ensuite organisée. Si dans les trois
mois suivant aucune opposition n'est formulée et si l'état ne
revendique pas le terrain, les pièces établies sont
numérotées et réunies pour former un livret auquel un plan
des lieux est joint.
- Les différentes inscriptions du livret sont transcrites
sur un registre spécial dont copie est délivrée au
requérant à sa demande.
Le titre ainsi obtenu par le requérant confirme
celui-ci dans ses droits. Il est opposable aux tiers qui se prévalent de
droits coutumiers et reste valable tant que celui-ci ou ses ayants droits
occupent effectivement l'immeuble.
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I-4-3 : Le régime du livret foncier
L'un des objectifs de la politique coloniale était
l'exploitation des terres fertiles pour une bonne production agricole. Le
colonisateur a mis en place dans ce but, un important programme de production
agricole avec l'espoir que les agriculteurs africains en y adhérant,
produisent en grande quantité. Pour pérenniser ce programme en
intéressant vraiment les populations africaines et après avoir
constaté l'échec des régimes précédents, le
colonisateur entreprit une nouvelle organisation du régime foncier afin
de pouvoir introduire la notion de propriété privée dans
le régime foncier coutumier. Il espérait un meilleur
succès de ce nouveau régime pour les raisons suivantes :
- la profonde évolution des mentalités africaines
;
- le désir des populations africaines d'accéder
à la propriété privée afin de pouvoir utiliser la
terre à des fins économiques.
Il institua le livret foncier qui permettait de faire
constater les droits fonciers coutumiers et de les exercer librement, dans les
limites prévues par la loi. Les populations africaines avaient aussi la
possibilité de convertir leurs droits fonciers coutumiers en droit de
propriété, par la formalité de l'immatriculation.
Pour obtenir le livret foncier, le détenteur de droits
fonciers coutumiers qui avait réalisé une mise en valeur de la
terre avec emprise permanente sur le sol, devait la faire constater par
l'autorité compétente. A la suite d'une procédure
légère, le livret foncier lui était délivré.
Il lui permettait de disposer de son droit foncier coutumier de la même
manière qu'un détenteur de droits fonciers
règlementaires.
Pendant la période coloniale, le colonisateur
français a instauré plusieurs régimes fonciers afin de
faire entrer dans les colonies d'Afrique occidentale et équatoriale, la
notion de propriété privée. La législation
foncière coloniale a cependant reconnu l'existence de droits fonciers
coutumiers et essayé d'amener les populations africaines à
convertir ces droits en celui de propriété. Le décret
n°55- 580 du 20 mai 1955 qui institue le livret foncier constitue la
dernière tentative coloniale de convertir les droits fonciers des
populations africaines. L'accession à l'indépendance des
états de l'Afrique Occidentale Française marquera la fin du
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régime foncier colonial et la mise en place, par les
nouvelles autorités des pays africains de nouveaux régimes
fonciers. La Haute Volta ne fera pas exception à cette nouvelle tendance
et instituera aussi son régime foncier.
II- LE REGIME FONCIER POST COLONIAL
Les autorités politiques qui ont administré la
Haute Volta indépendante ont reconduit l'essentiel des notions et
principes introduits par le colonisateur. Il s'agit de la domanialité
des terres et des différents modes de constitution ou d'acquisition des
droits fonciers, à travers la procédure de l'immatriculation. Il
s'agit également de la reconnaissance de prérogatives
foncières aux autorités coutumières et partant, de droits
fonciers coutumiers.
Les services chargés des domaines et les chefs de
circonscriptions administratives ont été investis des missions de
gestion des terres et des droits fonciers.
Les autorités post-coloniales ont néanmoins
adapté la législation héritée du colonisateur en
introduisant la concession comme mode d'acquisition des droits fonciers.
LA CONCESSION
Elle a été le mode d'aliénation des terres
du domaine privé de l'Etat. Elle comporte deux étapes :
- la concession provisoire qui fixe les
conditions de jouissance et d'aliénation des terres du domaine
privé de l'Etat. Elle est accordée par un arrêté de
concession provisoire et un cahier de charge contenant les conditions à
remplir par le concessionnaire pour pouvoir demander l'aliénation
définitive des terres.
- la concession définitive, obtenue
après parfaite réalisation des obligations imposées par
celle provisoire et avis favorable de la commission de constat de mise en
valeur. Elle est octroyée par un arrêté de concession
définitive. Le titre foncier est obtenu ensuite, après paiement
du prix ainsi que des différents droits et taxes requis pour la
mutation, l'immatriculation et l'inscription du terrain.
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III- LE REGIME FONCIER REVOLUTIONNAIRE ET POST-
REVOLUTIONNAIRE
La Révolution Démocratique et Populaire (RDP) et
les régimes politiques qui lui ont succédé ont introduit
une nouvelle conception de la gestion foncière basée sur la
notion de Domaine Foncier National (DFN).
Cette nouvelle approche de la gestion foncière est
différente des précédentes d'abord par la suppression de
la notion de domanialité des terres qui prévalait
jusque-là, l'institution d'un DFN unique et par la nature des droits
dont peuvent disposer les personnes de droit privé.
Elle est ensuite différente par la non reconnaissance
de prérogatives de gestion foncière aux autorités
coutumières et l'annulation des droits fonciers coutumiers.
III-I- LE DOMAINE FONCIER NATIONAL (DFN)
Il comprend « toutes les terres situées dans les
limites du territoire national, et celles acquises par l'Etat et les
collectivités publiques secondaires à
l'étranger.»1 Il s'agit :
- des terres précédemment définies ou
classées dans le domaine public de l'Etat et des collectivités
publiques secondaires ;
- des terres du domaine privé de l'Etat et des
collectivités publiques secondaires affectées ou non
affectées, concédées ou non concédées ;
- des terres faisant l'objet de titres de propriété
(titres fonciers) au nom des personnes physiques ou morales de droit
privé ;
- des terres détenues en vertu des coutumes ;
- des terres appartenant à l'Etat et aux
collectivités publiques secondaires à l'étranger.
Le DFN remplace ainsi les domaines public et privé
précédemment constitués.
1 Décret n° 85-404/CNR/PRES du 04
août 1984 portant RAF, article 1
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III-1 -1- La constitution du DFN et la
propriété de l'Etat
La proclamation par la loi de la création du DFN et de son
appartenance à l'Etat, constitue le DFN et confère à
l'Etat sa propriété de plein droit, sans une autre
formalité. En effet, l'article 2 de la loi 014/96/APD du 23 mai 1996
portant RAF stipule : « il est crée un domaine foncier national du
Burkina Faso. » Quand à l'article 4 il affirme que « le
domaine foncier national est de plein droit propriété de l'Etat.
»
La propriété proclamée de plein droit de
l'Etat sur le DFN découlerait de sa souveraineté et de la
volonté du législateur d'affirmer cette souveraineté sur
les terres du territoire national et les biens immeubles ou assimilés
acquis à l'extérieur.1
III-I-2- Les caractéristiques des biens du DFN
Elles sont différentes selon que le bien est disponible ou
non.
- Les biens indisponibles : Il s'agit des
biens précédemment classés dans le domaine public de
l'Etat. Ils conservent leurs caractères d'inaliénabilité,
d'imprescriptibilité et d'insaisissabilité.
- Les biens disponibles : Il s'agit des
biens précédemment classés dans le domaine privé de
l'Etat, à l'exception des terres du domaine privé affecté.
La détention de la propriété de ces biens a connu des
évolutions qui ont déterminé des droits de natures
différentes pour les personnes.
III - 2- LE DFN ET LA PROPRIETE DE L'ETAT
III-2-1- Le D.F.N est de plein droit
propriété exclusive de l'Etat.2
En déclarant l'Etat propriétaire unique et
exclusif des terres burkinabè, le législateur de la RAF de 1984 a
conféré à l'ensemble des biens composant le DFN, les
caractères de ceux précédemment classés dans le
domaine public de l'Etat. Toutes les terres burkinabè sont ainsi
devenues inaliénables, imprescriptibles et
1 DARGA Basile, cours de 2em année du cycle B
de l'ENAREF, année scolaire 2006-2007-, page 33.
2 Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août
1984 portant RAF, article 3
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insaisissables.1 Pour atteindre la totalité
des terres, il a annulé les titres de propriété (les
titres fonciers) jusque-là détenus par les particuliers et
décrété que « les terres détenues en vertu des
coutumes » devenaient elles aussi propriété exclusive de
l'Etat. Quand aux détenteurs de titres fonciers, il leur a offert la
possibilité d'obtenir des titres de jouissance en
remplacement.2
Pendant l'application de la première version de la RAF,
les personnes de droit privé ne pouvaient donc obtenir qu'un droit
d'usage sur les terres burkinabè. Le droit de propriété
était détenu par l'Etat.
III-2-2- Le D.F.N. est de plein droit
propriété de l'Etat.
En supprimant l'exclusivité de la
propriété de l'Etat, les législateurs des deux autres
versions de la RAF (1991 et 1996) ont enlevé à certains biens du
DFN les caractères d'inaliénabilité,
d'imprescriptibilité et d'insaisissabilité. En effet, la RAF de
1991 stipule à son article 3 que « les terres du Domaine Foncier
National peuvent être cédées à titre de
propriété privée aux personnes physiques ou morales...
» Quant à celle de 1996, elle précise que « certaines
terres du domaine foncier national peuvent être cédées
à des particuliers à titre de propriété
privée... »3
Sans revenir à la notion de domanialité, les
législateurs burkinabè de la deuxième et troisième
version de la RAF, ont conféré à nouveau aux biens
précédemment classés dans le domaine privé de
l'Etat leur caractère de biens économiques pouvant êtres
possédés en pleine propriété par des
particuliers.
Ils ont réintégré le titre foncier comme
titre de propriété et réhabilité les titres
annulés par la première version de la RAF.
III-3 - LE MODE DE CONSTITUTION DU DROIT DE PROPRIETE :
L'IMMATRICULATION
L'immatriculation selon la RAF consiste aussi à
désigner un terrain par un numéro au livre foncier. Ce
numéro permet de particulariser le terrain car à chaque
1 Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août
1984 portant RAF, article 5
2 Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août
1984 portant RAF, article 4
3 Loi 014/96/ADP du 23/05/1 996 portant RAF, article
5
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parcelle correspond un numéro unique qui n'est plus
attribué à une autre. Chaque numéro correspond aussi
à un feuillet du livre foncier, qui constitue le titre foncier.
Mais l'immatriculation telle que définie par la RAF
revêt une portée différente de celle qu'elle avait
jusque-là. En effet avant la RAF, elle permettait de
révéler les droits fonciers existants sur la parcelle et de
purger les droits fonciers coutumiers. Depuis l'institution de la RAF, les
terres détenues en vertu des coutumes faisant partie de la
propriété de l'Etat, l'immatriculation ne consiste plus à
la révélation et la purge des droits fonciers coutumiers. Elle
comporte néanmoins toujours deux étapes :
1) la procédure d'immatriculation qui
permet de borner le terrain.
2) La formalité d'immatriculation qui
consiste à inscrire l'immeuble dans le livre foncier en lui affectant un
feuillet dudit livre, à inscrire les différents droits
réels détenus sur l'immeuble à la suite de celui de
propriété.
- La publication des droits réels.
La publication des droits réels détenus sur l'immeuble permet de
les rendre opposables aux tiers.1
SECTION 2 - LES CARACTERISTIQUES DE LA LEGISLATION
FONCIERE REGLEMENTAIRE
La législation foncière règlementaire
actuellement en vigueur au Burkina est caractérisée par
l'unicité d'autorité sur la terre, l'instance chargée de
sa gestion ainsi que par la nature des droits fonciers.
I - L'UNICITE D'AUTORITE SUR LA TERRE
BURKINABE
Le législateur de la RAF, en ne reconnaissant pas de
prérogative de gestion foncière à l'autorité
coutumière, confère à l'Etat seul l'autorité de
gestion foncière.
En effet, en incluant les terres détenues en vertu des
coutumes dans le DFN et en déclarant que « le domaine foncier
national est de plein droit propriété de l'Etat
2», le législateur burkinabè annule toutes les
prérogatives foncières de l'autorité coutumière.
1 Décret 97-054/PRES/PM/MEF portant
modalité d'application de la loi sur la RAF, article 461
2 Loi n° 014/96/ADP du 23 mai 1996 portant RAF,
article 4.
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Cette nouvelle approche de gestion foncière est l'une
des différences fondamentales qui existent entre la RAF et les lois qui
l'ont précédé. En effet, les lois foncières
précédentes avaient reconnu l'existence de prérogatives
foncières coutumières et partant de droits fonciers
coutumiers.
La proclamation de l'unicité de l'autorité sur
la terre a été dictée, selon le législateur de la
RAF, par le souci de mettre en place un système agraire et foncier
« qui permette une occupation et une utilisation rationnelle des terres
envisagées comme des sols c'est-à-dire sous l'angle de la
productivité et de la justice sociale1.
Le législateur de la RAF a donc choisi de
privilégier la conception matérielle de la terre, perçue
uniquement comme un outil de production.
II - LA PERSONNE QUI GERE LA TERRE : L'AUTORITE
POLITIQUE
L'article 33 de la loi 014/96/ADP du 23 mai 1996 portant RAF
au Burkina confie la gestion des terres au Ministre chargé des Domaines.
La mise en place du cadastre et la préservation de l'environnement sont
confiées par le même article aux Ministres chargés du
Cadastre et de l'Environnement.
Les actes quotidiens de gestion de la terre ont
été confiés à une autre autorité politique,
le Maire et à défaut le Préfet. Ainsi le décret
portant conditions et modalités d'application de la RAF
désigne-t-il le maire et le Préfet comme Président des
structures de gestion ou signataire des actes d'attribution des terres et le
Ministre comme signataire de l'acte de propriété.
III - LES OBJECTIFS DE LA LEGISLATION FONCIERE
REGLEMENTAIRE
Ils sont plusieurs mais peuvent être regroupés en
huit (8) objectifs principaux :
- a) assurer l'autosuffisance alimentaire. Près de 90%
de la population burkinabè pratique les activités agro-pastorales
mais le pays ne parvient toujours pas à assurer l'autosuffisance
alimentaire ;
- b) protéger l'environnement ;
- c) promouvoir l'activité économique ;
1 Confère préambule de la RAF de 1984
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- d) résorber le problème du chômage ;
- e) gérer les effets pervers de la croissance
démographique : contrôler l'immigration et éviter les
conflits entre autochtones et migrants;
- f) Contrôler la transhumance des troupeaux et assurer la
paix et la cohésion sociale en évitant les conflits entre
agriculteurs et éleveurs ;
- g) assurer une gestion moderne des terres en tenant compte des
réalités socio - culturelles, historiques et économiques
;
- h) unifier le régime juridique de la terre. 1
IV- LES MODES D'OCCUPATION DES TERRES
La RAF subordonne toutes formes d'occupation des terres du DFN
à la possession préalable d'un titre d'occupation, sauf pour
l'exploitation des terres rurales non aménagées dans le but de
subvenir aux besoins de logement et de nourriture de l'occupant et de sa
famille2. Pour ce faire elle prévoit des titres de jouissance
et un titre de propriété.
IV-1- LES TITRES DE JOUISSANCE
Ils confèrent un droit de jouissance temporaire ou
permanent à leurs titulaires. - Les titres de jouissance
à caractère temporaire. Il s'agit :
a) du permis d'occuper délivré
pour l'installation d'activités lucratives sur des terres du DFN qui ne
peuvent être concédées en jouissance privative de longue
durée en raison de leur nature, de leur destination ou de toute autre
raison.
b) du bail délivré pour
conférer aux personnes physiques ou morales un droit de jouissance de
courte ou longue durée sur certaines terres du DFN.
- Les titres de jouissance à caractère
permanent. Il s'agit de:
a) l'arrêté d'affection
délivré au service public pour occuper des terres du DFN. Il
confère à ces terres un caractère
d'indisponibilité.
b) l'arrêté de mise à
disposition délivré à des personnes physiques ou
morales pour l'installation d'activités non lucratives sur des terres du
DFN. Ce titre de
1 Préambule des lois portant RAF
2 Article 142 du décret 97-054/PRES/PM/MEF portant
modalités d'application de la RAF
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jouissance qui confère à son titulaire un droit de
superficie peut être converti en titre de propriété par
l'acquisition en pleine propriété des terres qui en font
l'objet.
c) le permis urbain d'habiter
délivré pour l'occupation des terres du DFN destinées
à l'habitation. Il confère à son titulaire un droit de
superficie qui peut être converti en droit de propriété par
l'acquisition en pleine propriété des parcelles.
d) le permis d'exploiter
délivré à des personnes physiques ou morales pour
l'installation d'activités lucratives sur des terres du DFN. Il
confère à son titulaire un droit de superficie mais les terres
qui en font l'objet peuvent être acquises en pleine
propriété.
V-2- LE TITRE DE PROPRIETE
Il s'agit du titre foncier. La RAF l'a d'abord supprimé
(article 4 du décret n° 84- 050/CNR/PRES du 04 août 1984), et
ensuite réhabilité en instituant la possibilité de cession
des terres du DFN en pleine propriété (article 3 de la zatu
n° AN VIII-0039 BIS/FP/PRES du 4 juin 1991).
Le titre foncier est obtenu après respect des
conditions particulières de mises en valeur prévues à
l'article 229 du décret 97-054/PRES/PM DU 06 FEVRIER 1997 portant
modalités d'application de la RAF, et paiement du prix du terrain.
SECTION 3 - LES FORCES ET LES FAIBLESSES DE LA
LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE
I - LES FORCES DE LA LEGISLATION FONCIERE
REGLEMENTAIRE
Nous en retiendrons deux, qui nous paraissent importantes. Le
premier provient de l'institution même du droit de
propriété et le second de l'exercice de l'autorité
reconnue à l'Etat.
I -1 -L'INSTITUTION DU DROIT DE PROPRIETE
L'article 149 de la loi 014/96/ADP du 23/05/1996 portant RAF
au Burkina Faso qui institue le droit de propriété, accorde toute
faculté au propriétaire et limite le caractère absolu du
droit de propriété par une condition : que l'exercice du droit
ne
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soit pas contraire aux lois et aux règlements. La RAF
confère ainsi à l'Etat qui est garant du respect des lois et
règlements, le pouvoir de contrôler l'exercice du droit de
propriété. Cette disposition constitue une des forces de la
législation foncière règ lementai re.
En effet ce qui est contraire aux lois et aux
règlements est variable d'un Etat à un autre et est ainsi
laissé à la souveraineté nationale. Les objectifs de
préservations des droits des générations futures peuvent
ainsi faire partie des priorités de l'Etat qui peut réguler
l'exercice des droits accordés.
I-2- L'ANNULATION DES DROITS DES PARTICULIERS PAR
L'EXERCICE DE LA
SOUVERAINETE DE L'ETAT
La législation foncière règlementaire
accorde à l'Etat, le pouvoir de récupérer la terre sur
laquelle porte le droit de propriété, par la procédure de
l'expropriation pour cause d'utilité publique.1 Ici, ce n'est
pas la limite de l'exercice du droit de propriété, définie
par l'article 544 du code civil qui est appliquée. C'est l'exercice de
la souveraineté de l'Etat sur les terres burkinabè. Il
n'obéit à aucune conditionnalité autre que
l'utilité publique. Que le propriétaire ait usé de son
bien dans le respect des interdits prescrits par les lois et règlements
ne suffit pas à éviter la reprise de la terre objet dudit droit,
lorsque l`utilité publique, qui est définie par l'Etat
l'exige.
II - LES INSUFFISANCES DE LA LEGISLATION FONCIERE
REGLEMENTAIRE
La législation foncière règlementaire
comporte plusieurs insuffisances qui peuvent être
énumérées. Nous en citerons quelques unes, qui nous
paraissent importantes, et qu'il est important de combler pour pouvoir
instituer une législation foncière au service de la
cohésion sociale et du développement économique.
1 Loi n° 014/96/ADP du 23 mai 1996 portant RAF,
article 6
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II -1- L'INADAPTATION DES REGLES DE LA LEGISLATION
FONCIERE
REGLEMENTAIRE
Cette inadaptation provient de la précocité de
l'institution de règles calquées sur celles conçues et
appliquées par des sociétés dont le niveau
d'évolution sociale et économique est supérieur au notre
et le manque de mesure d'accompagnement, ou au moins d'assouplissement de ces
règles.
L'histoire du droit de propriété dans les pays
européens nous apprend que le concept d'appropriation privée
n'est pas une invention extérieure ou l'apport de quelques esprits
supérieurs qui l'ont imposé à des sociétés
parce que sachant mieux que les populations ce qui est bien ou mal pour elles.
Mais plutôt la conséquence de mutations socio-économiques
qui ont modifié les conceptions médiévales, « qui
étaient également fondées sur une appropriation comme
affectation à des usages »1. L'individualisme, le
capitalisme marchand, le renouveau du droit romain et d'autres mutations
(politiques et religieuses) sont des facteurs qui ont favorisé
l'introduction du concept de propriété privée de la terre
dans ces sociétés.
Il est certes vrai qu'il n'est pas envisageable d'annuler
l'héritage colonial pour retourner à des habitudes propres
à nos sociétés africaines, mais l'attitude consistant
à balayer d'un revers de main toutes les valeurs sociales et culturelles
africaines pour adopter des principes issus de mutations naturelles d'autres
sociétés, les imposer aux nôtres au nom des ambitions de
progrès, ne peut pas rencontrer l'adhésion populaire qui doit lui
conférer sa légitimité.
II - 2 - LES FREQUENTES MODIFICATIONS DES DISPOSITIONS DE LA
LEGISLATION FONCIERE REGLEMEMTAIRE
Tout Etat devrait avoir des règles de gestion
foncière pouvant varier sensiblement d'un régime politique
à un autre, mais qui soient basées sur des principes
fondamentaux, adoptés, institutionnalisés et très peu
immuables, pour garantir une paix sociale durable. Sans vouloir jeter
l'opprobre sur qui que ce soit, ni faire les oiseaux de mauvais augures, nous
pensons que tirer leçon de l'expérience de la Côte d'Ivoire
peut aider à mieux faire comprendre nos assertions.
1 `'L'appropriation de la terre en Afrique
noire», éditions Karthala, Paris, 1991, page 16
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En effet, dans le but d'insuffler à leur pays le
développement économique recherché, les autorités
ivoiriennes du début des indépendances ont choisi de
sécuriser uniquement l'investissement en déclarant dans une loi
du 20 mars 1963 que « la terre appartient à celui qui la met en
valeur, à l'exception de tout autre détenteur de droits
coutumiers»1. Le but visé a peut être
été atteint, mais la situation sociale qui a
résulté de cette option politique a crée les
conséquences que nul n'ignore. En effet, toutes les autorités
politiques qui ont succédé aux premières ont adopté
des attitudes différentes mais avec un objectif commun face à
l'imminence de la crise qu'elles voyaient venir. Les terres acquises par des
personnes non ivoiriennes avaient atteint une telle proportion, qu'une part
importante de la population ivoirienne se retrouvait sans terre dans leur
propre pays.
Pour protéger le bien commun et le rendre
intégralement aux générations futures, les nouvelles
autorités ivoiriennes ont adopté une approche politique
différente de celle de leurs prédécesseurs et
essayé en même temps de restituer aux responsables coutumiers la
totalité de leurs droits. Il s'agissait de retirer la terre à
ceux qui les avaient mises en valeur, et l'attribuer aux ivoiriens. Pour cela,
les autorités politiques ont recouru à la loi pour imposer leur
nouvelle conception de la gestion de la terre. Certains articles de la loi
foncière ivoirienne de 1998 sont suffisamment expressifs de cette
volonté et ne requièrent aucun commentaire. Nous en citerons
trois à titre d'illustration.
*** Article 1er : Le
domaine foncier rural est constitué par l'ensemble des terres mises en
valeur ou non et quelle que soit la nature de la mise en valeur. Il constitue
un patrimoine national auquel toute personne physique ou morale peut
accéder. Toutefois, seuls l'Etat, les collectivités publiques et
les personnes physiques ivoiriennes sont admises à en être
propriétaires.
*** Article 4 : La
propriété d'une terre du domaine foncier rural est établie
à partir de l'immatriculation de cette terre au registre foncier ouvert
à cet effet par l'administration et en ce qui concerne les terres du
domaine foncier coutumier par le certificat foncier. Le détenteur du
certificat foncier doit requérir l'immatriculation de la terre
correspondante dans un délai de trois ans à compter de la date
d'acquisition du certificat foncier.
1 Aline AKA, bulletin de liaison du Laboratoire
d'Anthropologie Juridique de Paris n°26, sept 2001, pages 130-143.
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*** Article 8 : Le constat d'existence
continue et paisible de droits coutumiers donne lieu à délivrance
par l'autorité d'un certificat foncier collectif ou individuel
permettant d'ouvrir la procédure d'immatriculation aux clauses et
conditions fixées par le décret.
Au Burkina le statut juridique de la terre a changé
constamment, au gré de la volonté politique du moment. Les droits
fonciers coutumiers ont ainsi été successivement
considérés :
- comme non ressemblants au droit de propriété
(décret du 26/07/ 1932) ;
- comme existants et convertibles en droit de
propriété (régime du livret foncier indigène);
- comme inexistants (RAF de 1984)
- enfin comme officiellement inexistants mais officieusement
existants (RAF de 1991 et 1996 et pratiques politiques et administratives).
La terre a ainsi appartenu :
- simultanément à l'Etat, aux personnes de droit
privé, aux autorités et aux propriétaires fonciers
coutumiers (avant 1984) ;
- à l'Etat seul (pendant l'application de la RAF de
1984).
- simultanément à l'Etat seul, aux personnes de
droit privé officiellement et aux propriétaires fonciers
coutumiers officieusement (depuis la RAF de 1991).
Cette situation pourrait d'ailleurs expliquer partiellement la
légitimité du régime foncier coutumier dont la
législation se présente finalement de part sa constance comme la
référence juridique pour les populations burkinabè.
II- 3- LE MANQUE DE COHERENCE ENTRE PRATIQUES
ADMINISTRATIVES ET
DISPOSITIONS LEGISLATIVES
Les pratiques administratives actuelles des structures et des
services de gestion de la terre constituent une des faiblesses de la
législation foncière réglementaire.
II-3- 1 - Au niveau des structures de gestion
La gestion des terres est effectivement assurée par le
Maire ou le Préfet. C'est cette autorité politique qui fournit la
part la plus importante de l'offre foncière pour
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satisfaire les demandes de tous usages. Car c'est elle qui
déclenche les procédures conduisant aux différents
aménagements au regard des besoins en terres, et qui procède
à l'attribution des lots. Elle a été instituée par
la RAF pour remplacer toutes les autres autorités foncières, et
principalement l'autorité coutumière qui exerçait cette
fonction dans les sociétés traditionnelles burkinabè.
Pourtant, les Maires et les Préfets accordent toujours
une place importante à l'autorité coutumière qu'ils sont
censés remplacer. Aucun aménagement n'est ainsi engagé
sans au préalable la collecte des exigences des autorités
coutumières compétentes sur l'espace concernée et sans la
satisfaction de ces doléances. Aucune structure administrative ne peut
contrôler ou empêcher cette pratique de l'autorité
politique. En effet, le Maire ou le Préfet à qui incombe
l'initiative d'aménagement agit seul au départ, au moment ou la
terre est non aménagée. C'est seulement au cours de la
procédure qu'il a engagé, que les responsables administratifs
sont associés aux actes de gestion. Il considère donc que les
structures administratives n'interviennent que lorsque la terre est
administrable et ne peuvent donc comprendre l'importance des actes que
lui-même a posé auparavant.
Par ailleurs, l'autorité politique acquiert le pouvoir
de gestion à la suite d'un acte politique, l'élection ou la
nomination à un poste politique. Sa perception de la gestion du foncier
n'est pas toujours celle de l'administration qui est sous l'autorité de
la loi, mais intègre des fois des considérations politiques qui
vont le plus souvent à l'encontre du droit positif. Ces
considérations sont celles de la plupart des burkinabè, et
laissent une place importante à la coutume. Voilà pourquoi, il
n'est pas rare de rencontrer dans une procédure de lotissement et
d'attribution de parcelles, `'la liste des autorités
coutumières», établie par elles et inscrite par
l'autorité politique en bonne place parmi les besoins à
satisfaire impérativement.
II 3- 2- Au niveau des services d'appui
Sans reconnaître l'existence des droits fonciers
coutumiers, les usages administratifs exigent toujours la purge de ces droits
avant toute procédure d'attribution. A côté des pratiques
des personnes évoquées par M. OUEDRAOGO Moussa dans son
écrit, il convient de souligner celles des services. La terre appartient
certes à l'Etat, mais aucune procédure d'attribution n'obtient
l'autorisation des services compétents sans l'accord préalable
des propriétaires coutumiers.
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Ainsi pour les parcelles situées en zone rurale,
lorsque le service des domaines transmet le dossier de demande d'attribution
aux structures dont les avis sont requis dans le cadre de l'instruction dudit
dossier (élevage, agriculture...), ces services émettent la
plupart du temps, un avis défavorable lorsqu'un procès verbal de
palabre n'est pas joint pour attester que les `' superficiaires » ont
donné leur accord, et ce quelque soit le lieu de situation du terrain.
Nous avons pu constater cela dans plusieurs localités du Burkina, entre
autres à Bobo-Dioulasso, Koudougou, Ouagadougou...
La notion de `'superficiaire» employée par le
législateur de la RAF manque elle-même de précisions
suffisantes pour éviter d'être sujette à
interprétations. Nous avons essayé de la comprendre. La
première remarque que nous avons pu faire est que la RAF même ne
la définit pas. Mais puisqu'elle provient du terme `'superficie»,
nous avons donc émis l'hypothèse qu'elle désigne les
détenteurs du droit de superficie. Ce droit réel est
défini par l'article 150 de la loi 014/96/ADP portant RAF au Burkina
comme un droit d'usage et de jouissance. Les droits fonciers coutumiers
étant supprimés nous avons déduit que la RAF
désignait par ce terme, les personnes qu'elle autorisait sans la
possession préalable de titre administratif, à occuper et
exploiter les terres rurales non aménagées dans le but de
subvenir à leurs besoins de logement et de nourriture et à ceux
de leurs familles. Dans ce cas le procès verbal de palabre ne devrait
pas être une formalité obligatoire pour des « terres vacantes
» c'est-à-dire non exploitées, en vertu de l'exercice de la
propriété de l'Etat. Finalement nous sommes arrivés
à la conclusion que face aux dangers menaçant la cohésion
sociale dans la perspective d'une gestion foncière n'impliquant pas les
autorités coutumières, les autorités politiques ont choisi
de laisser les habitudes sociales prendre le dessus sur la loi.
II - 4 - «L'IMMUNITE JURIDIQUE» DES AUTORITES
COUTUMIERES
L'imprécision du rôle des autorités
coutumières, qui est la conséquence de l'attitude politique que
nous venons d'évoquer constitue une autre insuffisance du régime
règlementaire. Celles-ci se retrouvent en effet dans une situation qui
ressemble fort à une `'immunité juridique» et dont les
conséquences sont encore plus graves aujourd'hui qu'avant l'institution
de la RAF.
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En effet, la loi en annulant les droits fonciers coutumiers ne
les considère pas comme susceptibles de produire des effets juridiques.
Par conséquent les autorités coutumières exercent un droit
dont elles ne répondent pas des conséquences. Ainsi, la vente des
terres par les autorités coutumières n'existe pas officiellement
puisqu'elles n'en détiennent pas la propriété. Nul
n'étant censé ignorer la loi, celui qui recourt à
l'autorité coutumière pour acquérir une terre (la quasi
totalité de la population burkinabè selon M. OUEDRAOGIO Moussa)
ne peut se prévaloir de sa propre turpitude selon un principe
consacré du droit pour se plaindre de s'être fait grugé.
II - 5 - LE PROBLEME DES HABITATS SPONTANES
Une autre insuffisance de la RAF, liée à la
liberté accordée aux autorités coutumières par
celles politiques, produit d'importantes difficultés dans les
procédures de lotissement, surtout pour les zones se situant à
côté des centres urbains. Il s'agit des habitats spontanés
(les `'non loties» dans le langage courant). En effet, les personnes qui
s'installent sur les terres urbaines et rurales ne le font pas sans obtenir
l'autorisation des `' propriétaires terriens coutumiers» même
si les articles 52 et 53 de la loi portant RAF autorisent l'occupation des
terres du DFN à des fins de logement et de nourriture sans la possession
d'un titre.
L'expérience des déguerpis de Nimpouy en 2003,
démontre bien l'implication des autorités coutumières dans
la gestion foncière et les effets du manque de contrôle d'une
telle implication sur la stabilité sociale. En effet, les populations
n'ont pas requis l'autorisation de l'administration que prescrit l'article 505
du décret 97- 054/PRES/PM portant application de la RAF. Elles ont
cependant requis celle de l'autorité coutumière territorialement
compétente. Sur la base de son accord, environ six mille neuf cents
trente sept (6937) personnes se sont installées sur le site et ont
défriché de grands espaces pour y mener des activités
agro-pastorales et de logements. Elles ne l'ont pas quitté malgré
les diverses injonctions de l'autorité publique qui a finalement
été contrainte de les déguerpir par la force, sur
instruction du gouvernement1.
Cette pratique a cours sur l'ensemble du territoire et est
particulièrement perceptible dans les zones périphériques
non aménagées des centres lotis. Après
1 Journal le Pays n° 2881 du 22/05/2003
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l'installation autorisée par les autorités
coutumières, les occupants des habitats spontanés revendiquent le
statut de « demandeurs résidents 1» ou d' «
autochtones résidents 2», ou s'en prévalent pour
exiger d'obtenir une parcelle. Les autorités coutumières qui ont
permis ces installations sont encore celles qui introduisent des listes
à satisfaire par celles publiques, au moment des lotissements.
II - 6 - LA SPECULATION FONCIERE
Le phénomène des « nouveaux acteurs »
que décrit M. Bonoudaba DABIRE3, Ministre
Délégué Chargé de l'Agriculture dans un
écrit, est une autre conséquence de cette liberté non
contrôlée accordée aux responsables coutumiers. M. DABIRE
explique : « depuis une dizaine d'années environ, le Burkina
connaît un phénomène nouveau qualifié de
phénomène des « nouveaux acteurs ». Il s'agit d'un
processus d'accaparement de grandes superficies de terres dans les villages
(plusieurs dizaines ou plusieurs centaines d'hectares) par des élites
urbaines. Les données collectées indiquent que la plupart des
« nouveaux acteurs » ne sont pas en mesure de mettre en valeur les
superficies acquises et que les objectifs de spéculation foncière
ne sont pas absents de leurs stratégies d'accumulation foncière.
»
Il convient de préciser ici que les nouveaux acteurs
acquièrent les terres auprès des responsables et
propriétaires fonciers coutumiers et requièrent ensuite
l'attribution auprès de l'administration. Tous les superficiaires,
satisfaits de la transaction préalable, signent le procès verbal
de palabre et autorisent ainsi l'administration à procéder aux
formalités d'attribution.
L'exclusivité du droit de propriété sur
les terres burkinabè n'a en définitive été
conférée à l'Etat par la RAF que pendant sept (7) ans. Le
mode de gestion du droit de propriété constitue
l'élément fondamental permettant de différencier tous les
régimes fonciers qui se sont succédés au Burkina de la
période coloniale à nos jours. L'harmonisation de la gestion de
ce droit a par ailleurs été perçue par la plupart des
1 Loi n° 014-96/ADP du 23 mai 1996, portant Raf,
article 156
2 Loi n° 014-96/ADP du 23 mai 1996, portant Raf,
article 155
3
www.icarrd.org
`'Problématique de la gestion du foncier et du développement
durable au Burkina faso. Quelle politique de sécurisation
foncière ?», Bonoudaba DABIRE, page 3.
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
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législateurs comme un impératif obligatoire qui
garantit la cohésion sociale et le développement
économique. Pourquoi les diverses tentatives d'instaurer un
régime foncier unique n'ont-elles pas abouti ? Nous essayerons de
répondre à cette interrogation, par une analyse du statut
juridique de la terre burkinabè.
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adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
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CHAPITRE 3 : ANALYSE DU STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE
DU BURKINA
Le `'statut» est l'ensemble des dispositions qui fixent
les règles de fonctionnement d'une matière
donnée1. Quant à l'adjectif `'juridique», il
désigne ce qui relève du droit2.
Le statut juridique de la terre peut donc être
défini comme l'ensemble des règles de droit qui fixent les
conditions d'utilisation de la terre. A qui appartient la terre du Burkina ?
Qui détient le pouvoir de définir les règles de gestion du
foncier au Burkina ?
L'une des ambitions de la RAF était d'unifier le statut
juridique de la terre en conférant à l'Etat la
propriété exclusive des terres et en devenant l'unique texte de
loi qui règlemente l'ensemble des ressources foncières. Un quart
de siècle après l'institution de la première version de la
RAF, force est de constater que cet objectif n'a pas été atteint.
En effet, face aux insuffisances de la RAF, plusieurs textes de loi ont vu le
jour pour règlementer la gestion de ressources foncières relevant
déjà de la RAF. On peut citer de manière non exhaustive
les textes suivants à titre d'illustration.
- La loi n°006/97/ADP du 31 janvier 1997 portant Code
Forestier au Burkina Faso qui règlemente le régime de l'eau, des
forêts, de la faune et des pêches, alors que les dispositions des
sections 1, 2, 3 et 4 du Chapitre 3 de la loi 014/96/ADP portant RAF traitent
du même domaine.
- La loi n°031-2003/AN du 8 mai 2003 portant Code Minier
au Burkina Faso qui réglemente la gestion des substances des
carrières et des mines en lieu et place des dispositions de la section 5
du Chapitre 3 de la loi 014/96/ADP portant RAF.
Quant à la législation foncière
coutumière, elle semble avoir gardé la totalité de ses
prérogatives.
Près d'un demi siècle après l'accession
du Burkina Faso à l'indépendance, et plus de vingt ans
après la Révolution Démocratique et Populaire (RDP) toutes
les tentatives de suppression du régime foncier coutumier n'ont pas
réussi à enlever à ce régime d'administration de la
terre, sa légitimité aux yeux des populations. Quels
1 Définition du Dictionnaire `'le petit
Larousse illustré».
2 Définition du Dictionnaire `'le petit
Larousse illustré»
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sont les points de divergence et de convergence des
législations foncières coutumières et
règlementaires ? Quelles sont les raisons éventuelles des
difficultés d'institution d'une législation foncière
unique (section 1) ? Nous examinerons le statut juridique de la terre
burkinabè (section 2) par une tentative de réponse à ces
différentes interrogations.
SECTION 1 : LES POINTS DE DIVERGENCE ET DE
CONVERGENCE
DES DIFFERENTES LEGISLATIONS FONCIERES I -
LES POINTS DE DIVERGENCE
Le principal point de divergence des deux législations
est l'exercice du droit de propriété. L'ordonnance n°
84-050/CNR/PRES du 4 Août 1984 portant RAF au Burkina semble avoir voulu
trouver une solution alternative à cette divergence. En effet, en
retirant à la coutume et aux particuliers le droit de
propriété pour le conférer à l'Etat, le
législateur de la première version de la RAF a
opéré une véritable révolution foncière qui
atteint les deux régimes fonciers qui se côtoyaient
jusque-là.
Les législations foncières coutumières,
faibles de l'espace géographique sur lequel elles s'exercent, ne
garantissent pas la cohésion de tous les burkinabè puisque chaque
village dispose de règles propres.
Quant à la législation foncière
règlementaire, elle offre aux particuliers un droit dont l'absolutisme
et le caractère exclusif annihilent pour les non propriétaires,
toutes les possibilités de jouir un jour de la chose commune.
II- LES POINTS DE CONVERGENCE
La nécessité de protéger les terres
burkinabè en conférant à une autorité collective
des prérogatives lui permettant d'exercer un contrôle de
l'utilisation des droits accordés et d'annuler au besoin ces droits
constitue, le point de convergence le plus important des deux
législations. La véritable nature des droits accordés (le
droit d'usage pour la législation foncière coutumière,
l'usus et le fructus pour celle règlementaire) et leur ressemblance sont
la preuve de cette convergence des objectifs de ces deux législations
foncières.
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Selon Etienne le Roy, la propriété
apparaît quand la chose qui en est l'objet devient un bien,
c'est-à-dire lorsqu'elle a une valeur pécuniaire.1 La
terre coutumière est sacrée. Sa vente, désignée
longtemps sous l'appellation de donation, peut paraître paradoxal. C'est
pourtant le processus mis en oeuvre pour rendre cette `'donation» possible
qui permet d'affirmer qu'il existe un point de convergence de la
législation foncière coutumière vers celle
règlementaire. En effet, avant de `'donner» la terre, les
responsables coutumiers la désacralisent par des rites destinés
à l'extraire du champ du sacré pour l'amener dans celui ou le
droit d'usage peut être monnayé.
Les points de divergence des deux législations semblent
avoir trouvé un repère commun depuis l'institution de la RAF. Des
difficultés d'institution d'un régime foncier unique applicable
à toutes les terres burkinabè subsistent cependant. Quelles
peuvent être les raisons qui expliquent une telle situation ?
III - QUELQUES RAISONS DES DIFFICULTES D'INSTITUTION
D'UNE
LEGISLATION FONCIERE UNIQUE
L'institution d'une législation foncière est un
acte d'abord politique car la législation constitue le support juridique
de la politique. Quant à la politique foncière, son choix est
déterminé par le projet de société que le politique
veut mettre en oeuvre.2
La décision d'institution d'une législation
foncière unique a été prise au Burkina, par les
autorités politiques qui ont institué la RAF. Les raisons qui
semblent avoir rendu cette initiative quasiment impossible pourraient provenir
à notre avis, de l'approche de la question foncière par le
pouvoir politique. Pour étayer nos assertions, nous rappellerons
l'approche des autorités coloniales afin d'établir un
parallèle entre elle et l'attitude de l'autorité politique qui a
institué la RAF.
a) - L'autorité politique
coloniale. Les premiers actes règlementaires institués
par l'autorité politique coloniale avaient pour conséquence
juridique, la non reconnaissance de droits fonciers détenus par la
coutume, comme ressemblant au droit de propriété français.
Pour ce faire, elle a commencé par instituer
1 `'L'appropriation de la terre en Afrique
noire», Editions karthala, Paris, 1991, page 30.
2 `'L'appropriation de la terre en Afrique
noire», éditions Karthala, Paris, 1991, page 19.
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l'immatriculation et la publicité comme seules
procédures permettant la naissance et la conservation des droits
détenus sur les immeubles et opposables aux tiers.1
L'anthropologue américain Paul BOHANNAN,2
abonde dans ce sens lorsqu'il explique que le colonisateur a approché le
droit foncier coutumier avec, a priori, les trois jugements suivants :
1) - le type de carte occidental peut être introduit dans
les régions africaines, où il existe d'ailleurs
déjà, même s'il est inconnu des peuples africains ;
2) - le concept de propriété est suffisant pour
exprimer tous les types d'unités homme - chose ;
3) - le contrat et la loi successorale sont des modes normaux
pour organiser les rapports sociaux dans un contexte spatial.
Pour rappel, après avoir constaté le manque
d'adhésion des populations africaines à ce concept, des
procédures intermédiaires ont été instituées
pour leur permettre de faire constater, exercer, conserver et convertir au
besoin leurs droits fonciers coutumiers.
b) - L'autorité politique de
la RAF : Son attitude semble être une reprise de celle de
l'autorité politique coloniale. Elle annule les droits fonciers
coutumiers en faisant entrer les terres détenues en vertu des coutumes
dans le DFN. Elle annule l'existence de ces droits en supprimant la
procédure prévue par le régime foncier colonial et reprise
par celui post colonial pour les purger.
Elle laisse cependant les populations `'se
débrouiller» avec les responsables coutumiers pour obtenir les
terres et n'intervient pour les gérer qu'après que ceux-ci aient
donné leur quitus.
Les régimes politiques de la Haute Volta colonie
française au Burkina Faso ont eu une approche similaire des droits
fonciers coutumiers dont la conséquence est la dualité des
législations, toute chose qu'ils ont voulu éviter. De notre point
de vue, deux raisons expliquent cela :
- Le choix politique. Les différentes
autorités politiques du Burkina ont fait le choix d'instituer une
législation foncière unique. Pour ce faire, la législation
foncière coutumière devait disparaître. Ce choix a
été opéré dans le but de disposer d'une
législation foncière efficace et véritablement au service
« du développement et du
1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le
décret du 24/07/1 906, article 21.
2 « Land, Tenure and Land-Tenure », African
Agrarian systems, oxford, 1963, page 106.
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progrès1 ». Le choix alternatif aurait
pu être celui d'une législation foncière unifiée qui
rassemblerait les forces de celles qui étaient en présence en
s'appuyant sur leurs points convergents et en résolvant les divergences
par une action politique continue.
- La procédure mise en oeuvre pour instituer la
législation foncière unique. Elle a consisté
à user de la légalité législative pour annuler la
législation foncière coutumière. Une telle approche traite
le régime foncier coutumier en ignorant une partie de sa composante :
l'aspect religieux. En effet, en réfutant toute prérogatives au
régime coutumier, les autorités politiques essaient de combattre
le religieux avec le légal. L'histoire du Burkina démontre
éloquemment les faiblesses d'une telle approche, que M. OUEDRAOGO
Moussa, confirme dans son écrit décrivant l'attitude de ces
mêmes autorités lorsqu'elles doivent acquérir la terre
rurale2.
La mise en place d'une législation foncière
unifiée qui accorde à tous les acteurs une part de pouvoir et
partant de responsabilité aurait pu être une solution alternative
qui aurait permis d'opérer sur l'aspect juridique du régime
foncier coutumier, les modifications nécessaires en évitant les
contraintes de l'aspect religieux.
SECTION 2 : LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE
Le DFN comprend toutes les terres situées dans les
limites du territoire national. Il est de plein droit propriété
de l'Etat3. La propriété de l'Etat sur les terres du
DFN est-elle une réalité ?
I - LA PROPRIETE ABSOLUE DE L'ETAT
Au regard de l'attitude des dirigeants et de la population
vivant au Burkina évoquée par M. OUEDRAOGO Moussa, l'on peut
répondre par la négative à cette question. Si la terre
appartenait uniquement à l'Etat, il constituerait l'unique interlocuteur
pour son acquisition.
1 Préambule de la loi 014/96/ADP du 23 mai 1996
portant RAF au BURKINA
2
moussaouedraogo@hotmail.com: `'Le Foncier dans les politiques de
développement au Burkina», OUEDRAOGO Moussa, page 13
3 Loi 014/96/ADP du 23 mai 1996, articles 3 et 4
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En plus des détenteurs de titres fonciers,
propriétaires de la superficie et du sous-sol ne contenant pas de
richesses, les autorités coutumières exercent toujours de fait,
un droit de propriété sur les terres qui sont dans leurs espaces
de compétence. C'est la reconnaissance de ce droit qui conduit
l'ensemble de la population burkinabè à recourir à elles
pour acquérir la terre.
Le système foncier coutumier étant uniquement
basé sur l'oralité, la sécurité de la transaction
foncière y est précaire. Pour illustration, ce sont les
autorités coutumières ivoiriennes qui ont octroyé les
terres aux ressortissants étrangers, qui les ont réclamées
ensuite1. La terre coutumière, sacrée au
départ, acquiert une valeur économique et entre dans le commerce
dès que l'autorité coutumière la désacralise. A
partir de ce moment, la législation foncière coutumière
devient en principe inopérante.
Quelque soit la personne physique ou morale qui acquiert la
terre coutumière, elle procède après l'acquisition aux
différentes formalités administratives requises par la
législation foncière règlementaire. Ce comportement
résume en partie la difficulté qui subsiste dans la
définition du statut juridique de la terre au Burkina. En effet, les
actes sociaux étant sujets à conflits, qui de l'autorité
coutumière et règlementaire détient la pleine
compétence pour connaître des conflits fonciers ?
L'une des raisons qui rendent impérative l'institution
d'une législation foncière acceptée par l'ensemble de la
population et constituant de ce fait un gage de cohésion sociale est la
difficulté de trouver un interlocuteur unique qui détient toutes
les compétences pour connaître des conflits fonciers. Car à
la dualité de la législation foncière, correspond une
dualité des instances de règlement des conflits fonciers.
II - LA DUALITE DES INSTANCES DE REGLEMENT DES
CONFLITS
La difficulté suscitée par la dualité des
instances de règlement des conflits réside dans le fait que la
terre coutumière désacralisée sort du régime
foncier coutumier, ne serait-ce que par la volonté de celui qui l'a
acquise.
L'immunité juridique conférée par les
autorités politiques à celles coutumières revêt ici,
son aspect le plus expressif et permet de percevoir le danger qui subsiste dans
une politique foncière ne clarifiant pas les responsabilités de
tous les acteurs.
1 Aline AKA, bulletin de liaison du Laboratoire
d'Anthropologie Juridique de Paris n°26, sept 2001, pages 130-143
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M. OUEDRAGO Moussa évoque d'ailleurs cette situation
dans son écrit en ces termes : «cependant, si les règles
traditionnelles constituent la référence pour accéder au
foncier, il n'est pas toujours le cas dans la gestion des conflits entre
acteurs. En effet, en cas de conflit lorsqu `une partie des protagonistes n'est
pas satisfaite de la manière dont le différend est
réglé, elle fait recours aux juridictions modernes. A ce niveau
les instruments sur lesquels se basent les juges pour dire le droit sont
essentiellement constitués par les textes portant réorganisation
agraire et foncière. Or, n'ayant pas été la
référence au moment des transactions, la loi apparaît
naturellement `'illégale `' pour légiférer sur la question
suivant la perception des communautés rurales, notamment les
sphères de décision sur le foncier. »
Evoquant les limites de la justice à rendre des
jugements susceptibles d'apaisement ou de résolution de crises sociales
créées par la gestion foncière des autorités
coutumières dans certaines régions du Burkina, M. OUEDRAGO Moussa
rapporte dans son écrit les propos d'un juge qui affirme que « les
conflits fonciers tranchés selon la loi moderne et rien que selon elle
ne s'éteignent jamais... dans tous les cas, en matière
foncière, la raison en justice s'arrête généralement
à la porte du palais et tout le monde en est conscient. »
III - LES EFFETS DE LA DECENTRALISATION
INTEGRALE
Le danger qui menace la cohésion sociale du fait de la
dualité de la législation foncière deviendra encore plus
perceptible avec la mise en place d'instances administratives
décentralisées au niveau local. La communalisation
intégrale du territoire ajoute un nouvel acteur à la scène
foncière ou les rôles ne sont toujours pas clairement
définis. Il s'agit de l'autorité communale. Selon l'article 38 de
la loi n°055- 2004/AN du 21 décembre 2004 portant Code
Général des Collectivités Territoriales au Burkina Faso,
« les ressources financières des collectivités territoriales
sont constituées de recettes propres, de dotations budgétaires de
l'Etat et de toutes autres contributions. »
Les collectivités territoriales
décentralisées doivent donc générer
elles-mêmes une partie de leurs ressources de fonctionnement. Les taxes
foncières constituent actuellement une part importante des ressources
communales Si les communes urbaines peuvent compter sur l'abondance des
ressources provenant de l'imposition fiscale de l'activité
économique qui a lieu sur leur territoire pour assurer une part
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importante de leur budget, celles rurales doivent trouver
d'autres sources de revenus pour compenser la faiblesse des recettes de ce
secteur. La terre jusque-là gérée par les autorités
coutumières, loin de celles règlementaires, constitue la
ressource la plus importante en milieu rural et celle sur laquelle les
autorités communales peuvent imposer des taxes substantielles. C'est
ainsi que la quasi-totalité des communes rurales de la province du
Kadiogo a institué la perception d'un droit sur les procès
verbaux de palabre destinés à constater l'accord des
superficiaires pour l'occupation des terrains en zone rurale.
L'examen du statut juridique de la terre permet de relever la
complexité de la situation foncière du Burkina. Les deux
législations foncières qui ont administré les terres
jusque-là, comportent toutes des insuffisances. Mais ce qui peut
paraître comme de véritables divergences entre elles peut trouver
des points de convergence, si le politique à qui incombe la
destinée du pays, la cohésion et la stabilité sociale
ainsi que le développement économique décide de poser les
actes nécessaires pour unifier le régime juridique de la terre.
Sans une définition claire de ce statut, il n'est pas possible de
déterminer et sécuriser les droits des différents acteurs,
et donc d'assurer un développement socio-économique durable.
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CONCLUSION PARTIELLE
La précarité de la cohésion sociale qui
résulte de la dualité du système foncier et de l'absence
de coordination des actions et des responsabilités des différents
acteurs est un facteur d'insécurité des droits fonciers qui
freine le développement économique. Conscientes de cette
situation, les autorités politiques ont entrepris d'instituer une
législation foncière unique afin d'offrir aux différents
investisseurs, la sécurité juridique nécessaire pour que
la terre, ressource principale de l'économie du Burkina, soit son levier
de développement. La faiblesse de la législation foncière
règlementaire réside dans l'approche de la question
foncière par l'autorité politique qui n'a pas suffisamment
modelé les règles reçues du colonisateur pour
intégrer les paramètres socio-culturels du Burkina.
Trois textes de loi portant RAF ont été
successivement adoptés pour corriger les insuffisances de la loi.
D'autres encore pourraient être institués, mais risqueraient de
produire les mêmes effets si l'approche politique n'intègre pas la
légitimité de l'autorité coutumière. Les plus
hautes autorités burkinabè reconnaissent d'ailleurs les
insuffisances de la RAF et admettent qu'elles sont la source de nombreux
problèmes fonciers tels que le changement de destination des terres (de
cultures en parcelles d'habitation ou des terres aménagées pour
des usages auxquels ils n'ont pas été destinés). En mai
2004, M. Adama FOFANA alors Ministre chargé des relations avec le
parlement et porte parole du Gouvernement a évoqué lors d'un
point de presse les problèmes des habitats spontanés en faisant
référence aux conclusions d'un rapport inter - ministériel
qui lie ces problèmes à des insuffisances de la RAF. « Les
raisons des problèmes nés de l'occupation ou de l'affectation des
terres, selon les conclusions du rapport, sont : textes de la Réforme
Agraire et Foncière (RAF) incohérents, incomplets ou
dépassés ; schémas d'aménagement du territoire non
élaborés selon la vocation des terrains ; conflits de
compétence dans l'administration et parfois même confusion de
rôle ; irrégularités impunies.1 »
1 Journal « l'Observateur paalga » n°
7024 du 03 décembre 2007
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L'anthropologue américain Paul BOHANNAN suggère
de remplacer les trois préjugés de l'approche coloniale, dont la
conséquence est la dualité du régime foncier des pays
d'Afrique noire, par les trois propositions que voici :
1) - les peuples ont une représentation propre du pays
dans lequel ils vivent ;
2) - ils disposent d'une série de concepts pour parler et
traiter des rapports entre eux et les choses ;
3)- l'aspect spatial de leur organisation
sociale trouve, d'une façon ou d'une autre, une expression ouverte en
paroles et en actes1.
Nous pensons, comme le suggère M. BOHANNAN, qu'en
tenant compte de la représentation que se font les populations du
Burkina de leur pays, la volonté politique pourrait mettre en place une
législation foncière qui intègre cette
représentation et acquiert par ce fait, la légitimité
provenant de l'adhésion populaire à la loi. Car, comme l'indique
Michel CREZIER, « si le modèle administratif français est
aussi un `'modèle culturel», on comprend dès lors que
l'imposition d'un appareil administratif ou étatique initialement
conçu et progressivement révisé dans des
sociétés non africaines ne peut que participer d'un
mimétisme dont on mesure mieux l'inadaptation des instruments choisis.
Une telle greffe débouche sur une crise, celle de l'Etat et de la
légitimité de son pouvoir. »2
Les insuffisances des textes portant RAF au Burkina ont
été relevées par plusieurs institutions ; certaines ont
essayé de les corriger en proposant à la sanction
législative, des textes destinés à règlementer
certains domaines relevant de la RAF.
Dans le but de proposer une reforme foncière
adéquate, nous procéderons à un examen des textes en
projet d'adoption afin de les intégrer dans nos propositions s'ils
satisfont à toutes les exigences de cohésion sociale et de
développement économique.
1 « Land, Tenure and Land-Tenure », African Agrarian
Systems, P. BOHANNAN, Oxford, 1963, page 106
2 « Le pouvoir fiscal en Afrique » Jean-Baptiste
FOTSING, éditions LGDJ, paris, 1995, page 159.
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DEUXIEME PARTIE :
PROPOSITION DE REFORME
Depuis l'accession du Burkina Faso à
l'indépendance, les régimes politiques qui ont
présidé aux destinées du pays ont eu à coeur de
disposer d'un outil juridique efficace pour mener à bien leur politique
de développement. La loi étant le support de la politique, elles
ont estimé que le préalable à tout dispositif juridique
était la mise en place d'une politique globale et cohérente du
secteur concerné afin que la loi accompagne la réalisation des
objectifs de l'action politique.
Pour ce faire, et au regard des insuffisances de la RAF, le
gouvernement du Burkina a entrepris, à travers le Ministère de
l'Agriculture, de l'Hydraulique et des Ressources Halieutiques (MAHRH), de
mettre en place une Politique Nationale de Sécurisation Foncière
en Milieu Rural (PNSFMR).
Dans le but de proposer une reforme actuelle et
réalisable (chapitre 2 et 3), nous examinerons la PNSFMR afin d'en tenir
compte si ses dispositions satisfont aux impératifs de cohésion
socio - culturelle et de développement social et économique
(chapitre 1).
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CHAPITRE 1 : ETAT DES LIEUX DES PROJETS DE REFORME
EN COURS : LA POLITIQUE NATIONALE DE SECURISATION FONCIERE EN MILIEU
RURAL
La politique de sécurisation foncière est
l'ensemble des processus, actions, et mesures de toute nature, visant à
permettre à l'utilisateur et au détenteur de terres rurales de
mener effectivement ses activités productives, en le protégeant
contre toute contestation ou trouble de jouissance de ses
droits1.
Selon le Ministre Salif DIALLO, Ministre d'Etat, Ministre de
l'Agriculture, de l'Hydraulique et des Ressources Halieutiques, la question
foncière ne se pose pas au Burkina (9 millions d'hectares dont 3,5
millions d'hectares emblavés actuellement) en terme de redistribution
des terres mais essentiellement en terme de sécurité juridique
sur les propriétés actuelles et à venir, aussi bien des
particuliers que des collectivités territoriales constituées que
sont l'Etat et les communes.
Pour sécuriser davantage les droits fonciers des
acteurs ruraux, les autorités politiques du Burkina Faso ont entrepris
l'élaboration d'une PNSFMR. Nous la présenterons (section 1)
avant de relever ses forces (section 2) et ses insuffisances (section 3).
SECTION 1 : PRESENTATION DE LA POLITIQUE NATIONALE
DE
SECURISATION FONCIERE EN MILIEU RURAL
La mise en oeuvre de la politique de sécurisation
foncière en milieu rural se fera à travers un document portant
PNSFMR qui contient l'ensemble des actions et des dispositions à mettre
en oeuvre et une loi de mise en application de ces directives.
Ces documents (celui de PNSFMR et l'avant-projet de loi) ont
été soumis à l'analyse des différents acteurs du
milieu rural sur l'ensemble du territoire national.
1 Définition contenue dans le document de PNSFMR
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Nous présenterons le document portant PNSFMR (I), les
conclusions des ateliers de concertations des acteurs du milieu rural (II)
ainsi que l'avant-projet de loi relatif à la sécurisation
foncière en milieu rural (III).
I - PRESENTATION DU DOCUMENT DE
PNSFMR
La PNSFMR vise à « assurer à l'ensemble des
acteurs ruraux, l'accès équitable au foncier, la garantie de
leurs investissements, la gestion efficace des différends fonciers afin
de contribuer à la réduction de la pauvreté, à la
consolidation de la paix sociale et à la réalisation d'un
développement durable. 1»
Pour atteindre cet objectif global, la PNSFMR s'articule
autour de six orientations principales qui comportent chacune des objectifs
spécifiques qui constituent des axes à réaliser.
I-1- PREMIERE ORIENTATION : RECONNNAITRE ET PROTEGER LES
DROITS LEGITIMES DE L'ENSEMBLE DES ACTEURS RURAUX SUR LA TERRE ET
LES RESSOURCES NATURELLES
Il s'agira de reconnaître les droits fonciers des
productrices et producteurs ruraux, de l'Etat, des collectivités
territoriales et des particuliers ; ainsi que la maîtrise locale des
communautés villageoises et inter - villageoises sur les ressources
communes de leur terroir.
1-2 - DEUXIEME ORIENTATION : PROMOUVOIR ET ACCOMPAGNER
LE DEVELOPPEMENT D'INSTITUTIONS LEGITIMES A LA BASE
Cette orientation se fera à travers les axes suivants :
- le renforcement de la participation des institutions locales
à la gestion foncière ;
- l'implication des autorités coutumières dans la
gestion foncière locale ; - la clarification des règles locales
de gestion foncière rurale ;
1 Salif DIALLO, note introductive du document de
PNSFMR.
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- la promotion de nouvelles approches d'appui et d'accompagnement
de la constitution d'institutions villageoises et inter - villageoises
légitimes.
1-3 TROISIEME ORIENTATION : CLARIFIER LE CADRE
INSTITUTIONNEL DE GESTION DES CONFLITS AU NIVEAU LOCAL ET AMELIORER
L'EFFICACITE DES INSTANCES LOCALES DE RESOLUTION DES CONFLITS
Pour y arriver la PNSFMR prévoit de reconnaître
les prérogatives locales des institutions villageoises et inter-
villageoises dans le règlement alternatif des conflits et renforcer
leurs capacités.
1-4 - QUATRIEME ORIENTATION : AMELIORER LA GESTION DE
L'ESPACE RURAL
- Clarifier et définir les types de domaine foncier ;
- Délimiter les terres relevant du Domaine Foncier de
l'Etat (D.F.E) et élaborer de manière participative des plans et
schémas d'aménagements locaux ;
-Mettre en oeuvre des mesures spécifiques relatives
à l'amélioration de la gestion des périmètres
aménagés.
- améliorer la gestion des aires de préservation
des ressources naturelles.
- mettre en oeuvre les mesures spécifiques suivantes
relatives aux espaces ruraux : clarifier le statut des espaces ruraux : les
immatriculer, leur attribuer des titres de jouissance, entreprendre des actions
d'aménagement avec les acteurs concernés...
I-5- CINQUIEME ORIENTATION : METTRE EN PLACE UN CADRE
INSTITUTIONNEL COHERENT DE GESTION DU FONCIER RURAL
La gestion du foncier rural se fera par la mise en place
d'institutions de gestion foncière :
- au niveau de la base ;
- au niveau intermédiaire ;
- et au niveau central.
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
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I-6- SIXIEME ORIENTATION : RENFORCER LES CAPACITES DES
SERVICES DE L'ETAT, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE LA SOCIETE CIVILE
EN MATIERE FONCIERE
- Par le renforcement de l'efficacité des services
techniques de l'Etat, des collectivités territoriales et de la
société civile ;
- Et par la promotion et le renforcement des fonctions de suivi
et d'évaluation de la sécurisation foncière.
II - CONCLUSIONS DES ATELIERS DE CONCERTATION SUR LA
PNSFMR
Le document de PNSFMR a été soumis à
l'appréciation des différents acteurs du milieu rural au cours de
quatre ateliers organisés à cet effet à Kaya, Tenkodogo,
Koudougou et Bobo-Dioulasso. Deux autres ateliers ont été
organisés à Kaya et à Bobo-Dioulasso pour les élus
locaux.
Les acteurs qui ont participé à ces ateliers ont eu
entre autre à se prononcer sur l'implication ou non des autorités
coutumières dans la gestion du foncier et sur la détention par
l'Etat seul, de la propriété des terres. La majorité des
participants a estimé qu'il était impératif d'impliquer
les autorités coutumières dans la gestion des terres. Beaucoup
d'entre eux ont trouvé que l'Etat ne devait pas être l'unique
propriétaire des terres. Certains acteurs ont néanmoins
émis des réserves ou fait des observations :
- Kaya : Les services techniques ont émis des
réserves quant au désengagement de l'Etat qui selon eux, doit
contrôler la régularité des aménagements.
-Tenkodogo : La question de l'implication des
autorités coutumières a été diversement
appréciée. Certaines personnes estiment que la PNSFMR les
écartent tandis que d'autres pensent qu'elle les implique.
III - CARACTERISTIQUES DE L'AVANT-PROJET DE LOI DE
SECURISATION
FONCIERE EN MILIEU RURAL
L'avant-projet de loi de sécurisation foncière en
milieu rural prévoit une instance de gestion des terres et
précise la nature des droits fonciers ruraux.
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cohésion sociale et de développement économique,
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III-1- LE SERVICE CHARGE DE LA GESTION DE LA TERRE
RURALE
Au niveau de chaque commune rurale, l'article 39 de
l'avant-projet de loi crée un Service Foncier Rural (S.F.R)
chargé de la gestion du foncier. Il effectue cette tâche « en
collaboration étroite avec les services techniques compétents
déconcentrés de l'Etat 1».
Il est appuyé dans sa tâche par une Commission
Foncière Rurale (C.F.R) créée par l'article 41 au sein du
Comité Villageois de Développement (C.V.D) de chaque village
constitué.
III-2- LA NATURE DES DROITS SUR LA TERRE RURALE
L'avant-projet de loi stipule que les terres rurales
constituent un patrimoine commun à la nation mais que l'Etat ne dispose
pas d'une propriété de plein droit sur l'ensemble. Il institue
des droits de propriété et d'usage sur la terre rurale. Pour ce
faire il instaure deux domaines fonciers :
- le Domaine Foncier de l'Etat (D.F.E)
- le Domaine Foncier des Collectivités Territoriales
(D.F.C.T)
La propriété foncière des personnes de
droit privé est reconnue. L'avant-projet de loi classe la terre en deux
catégories : d'une part, les terres susceptibles de cession et d'autre
part, celles qui ne sont pas cessibles. Il confie l'élaboration de la
PNSFMR au Ministère chargé de l'Agriculture, en collaboration
avec les ministères concernés2.
III-2-1 Le droit de propriété
1) Les terres pouvant être
cédées. Les terres rurales appartiennent aux
personnes physiques ou morales suivantes qui disposent du droit de
propriété à la suite des procédures
d'immatriculation en leur nom :
- l'Etat, pour les terres rurales aménagées et
celles qu'il acquiert à la suite
de négociations amiables avec les possesseurs fonciers
ruraux. Ces terres entrent dans le DFE;
- les collectivités territoriales pour les portions du DFE
qui leur sont cédées
1 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, article 40.
2 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, articles 3, 4 et 5.
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à titre définitif par l'Etat et celles qu'elles
acquièrent à la suite de négociations amiables avec les
possesseurs fonciers ruraux. Ces terres font partie du DFCT.
- Les possesseurs fonciers ruraux qui possèdent les
terres rurales à titre individuel ou collectif (personne physique ou
morale de droit privé, famille ou groupement de familles). Ils peuvent
convertir leur possession foncière en droit de jouissance ou de
propriété définitive par la procédure de
l'immatriculation1.
2) Les terres ne pouvant pas être
cédées. Il s'agit des terres n'appartenant
pas en propre à des particuliers. Les communes rurales sont tenues de
les recenser, les délimiter et les immatriculer en leur nom.
Ces terres acquièrent dès lors, les
caractères de la domanialité publique et sont de ce fait
inaliénables, imprescriptibles et insaisissables2.
III-2-2- les droits d'usage
Il s'agit des droits d'exploitation accordés par les
possesseurs fonciers ruraux ou les maires à de tierces personnes
à titre personnel et temporaire.
Constituent des droits d'usage fonciers ruraux :
- les prêts de terres rurales à caractère
temporaire ou pour une durée indéterminée ;
- les locations de terres rurales, à l'exclusion des baux
emphytéotiques ; - les autorisations temporaires de cultures ;
Le cas du bail
emphytéotique. A la différence des autres
droits d'usage, l'emphytéose constitue un droit réel immobilier
que seul l'Etat peut accorder sur les terres qu'il a aménagé. Il
est susceptible d'hypothèque et est consenti pour une période de
35 ans renouvelable3.
SECTION 2 : LES FORCES DE LA PNSFMR
I - L'APPROCHE POLITIQUE
L'approche de la question foncière par l'autorité
politique traduit la volonté de celle-ci d'adapter la loi aux
réalités sociales du Burkina et renforcer ainsi la
cohésion
1 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, article 12
2 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, article 32
3 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, articles 34 et 35
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sociale. En témoigne la démarche consistant
d'abord à élaborer un document cadre de politique nationale en
matière foncière, qui a l'avantage de pouvoir intégrer
tous les aspects socio - culturels de la société burkinabè
avant de prendre une loi. Car la loi dont la portée est par essence
générale ne peut intégrer de manière explicite, les
préoccupations spécifiques de toutes les composantes de la
société.
Cette approche constitue aussi une force de la PNSFMR au
regard du fait qu'elle a permis aux différents acteurs ruraux de
discuter de l'ensemble de la politique gouvernementale et d'émettre
leurs observations avant que l'autorité politique n'adopte la loi.
II - LA PRISE EN COMPTE DES DROITS ACQUIS EN DEHORS DE
LA LOI
REGLEMENTAIRE
La PNSFMR reconnaît l'existence de droits fonciers ne
découlant pas systématiquement de la loi réglementaire.
Près de vingt cinq ans après la suppression officielle des droits
conférés par la coutume, l'autorité politique revient sur
sa position en reconnaissant qu'une partie de la société
burkinabè dispose de droits fonciers acquis sans l'autorisation de la
loi et essaie de mettre en place un processus de publication de ces droits en
vue de leur conférer les prérogatives du droit civiliste.
Pour ce faire, la PNSFMR reconnaît l'existence de deux
concepts en matière de sécurisation foncière :
- le concept de légalité
foncière qui permet à toute personne de défendre
ses droits fonciers en les rendant opposables aux tiers ;
- le concept de légitimité
foncière qui suscite la reconnaissance et le respect
spontanés des droits de l'exploitant par toute la communauté.
La PNSFMR reconnaît enfin que la
légitimité foncière permet de faire l'économie de
nombreux conflits fonciers, ce qui nous semble important au regard du fait que
c'est justement cette légitimité des autorités
coutumières qui ne leur est toujours pas entièrement reconnue.
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SECTION 3 : LES INSUFFISANCES DE LA PNSFMR
La PNSFMR comporte de notre point de vue, certaines
insuffisances. Nous en énumérerons quelques unes, qui nous
semblent les plus importantes.
I - L'INADEQUATION ENTRE LA VOLONTE POLITIQUE ET LA
PORTEE
DE LA PNSFMR
Ainsi que nous le précisions tantôt, l'objectif
global de la PNSFMR est « d'assurer à l'ensemble des acteurs
ruraux, l'accès équitable au foncier et la garantie de leurs
investissements 1». La PNSFMR vise donc à
protéger tous les acteurs du milieu rural contre tout trouble de
jouissance de leur droit. La première insuffisance réside dans la
spécificité du secteur que la volonté politique voudrait
règlementer au regard de la portée de la PNSFMR et apparaît
dans les notions d'acteurs et de milieux ruraux.
En effet, la notion `'d'acteurs ruraux» peut être
comprise comme désignant tous les acteurs intervenant dans le milieu
rural. Les acteurs intervenant dans le milieu rural sont d'abord des hommes et
des femmes, des jeunes et des personnes adultes avant d'être des acteurs
ruraux. L'action politique devait donc faire intervenir toutes les structures
responsables du milieu rural, au lieu d'être l'apanage de quelques unes
seulement. Ainsi, des ministères comme celui chargé de la
jeunesse et celui chargé de la promotion de la femme, devaient
être impliqués car ces structures maîtrisent mieux les
préoccupations des couches les plus vulnérables de la population
que sont les jeunes et les femmes.
Quant au `'milieu rural», il ne constitue pas une
entité distincte et différente mais bien une partie de l'ensemble
de la terre formant le territoire national. C'est peut être la raison
pour laquelle des structures du Ministère chargé des Domaines,
qui ne sont pas spécialisés pour gérer des zones
spécifiques tels que le milieu rural, par opposition à celui
urbain, ou le milieu d'habitation par opposition à celui commercial par
exemple se sont toujours vues confier des missions de gestion du foncier.
L'agriculture et l'élevage constituent certes des activités qui
doivent disposer d'une
1 Note introductive de la PNSFMR.
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réglementation spécifique mais l'espace
terrestre constitue un ensemble indissociable que la volonté politique
doit atteindre dans son ensemble.
C'est de notre point de vue, une des raisons qui expliquent
que depuis la constitution du territoire qui forme le Burkina, tous les
régimes politiques, de la période coloniale à nos jours
aient règlementé la terre par un dispositif juridique qui traite
de la question foncière dans son ensemble. Les terres de Ouagadougou et
de Bobo-Dioulasso sont différentes du point de vue des richesses
qu'elles contiennent, et même des hommes qui y vivent car le Burkina est
une diversité écologique et sociale. Mais la nation est unique et
le dispositif juridique doit y être le même. Quelle
différence y a-t-il entre les terres rurales et urbaines ? Les terres
rurales ne peuvent- elles pas avoir vocation à devenir des terres
urbaines un jour ? Surtout au Burkina, un pays en construction dont les terres
urbaines continuent toujours de s'étendre sur celles rurales ?
II - LA REDEFINITION DU STATUT DE LA
TERRE
La PNSFMR est, ainsi qu'elle se dénomme, une politique
c'est à dire un ensemble de prévisions et d'actions. Les terres
du Burkina ont toujours été administrées par une loi
unique qui fixe les dispositions globales qui servent de
référence à l'ensemble des acteurs et sur la base duquel
chaque secteur élabore des documents spécifiques pour
compléter les dispositions globales. Les droits pouvant être
acquis sur la terre sont ainsi de mêmes natures quelque soit le type de
terre concerné (rural ou urbain). Pour exemple, des secteurs comme celui
des mines ont élaboré des lois spécifiques mais sans
remettre en cause les principes fondamentaux de la propriété
telle que définie par la loi globale que constitue la RAF.
La PNSFMR intervient sans abroger la RAF mais redéfinit
sa notion fondamentale qui détermine le statut de la terre, c'est
à dire celle de DFN. Le DFN n'étant pas constitué
uniquement de `'terres rurales», nous pensons que l'action politique
devait intégrer tous ses aspects et partant tous les secteurs de la vie
nationale concernée par le foncier, dans un document de politique unique
ne serait- ce que pour mettre en oeuvre en remplacement ou en complément
de la RAF, un texte de dimension similaire. Ou alors, procéder d'abord
aux modifications de la RAF avant de prendre des textes qui traitent du milieu
rural, si elle désire revenir sur la composition du DFN et la nature des
droits telles que définies par la RAF.
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La loi relative à la PNSFMR n'est certes pas encore en
vigueur même si elle a été adoptée en Conseil des
Ministres1, mais si elle le devenait un jour dans ses dispositions
actuelles, les usagers se retrouveraient avec un texte définissant un
DFN unique et un autre instituant différents domaines fonciers. Cette
situation serait d'autant plus complexe que la première loi dispose pour
l'ensemble des terres du Burkina et fixe pour cet ensemble, des droits
différents de ceux que la seconde institue pour le secteur rural
uniquement. Ainsi la RAF définit le DFN comme constitué de
l'ensemble des terres du Burkina tandis que la loi de PNSFMR détermine
un DFE, un DFCT et un patrimoine foncier des particuliers, dont la composition
et la nature des droits sont différentes de celles du DFN.
III - LE STATUT CONFUS DE L'INSTANCE QUI GERE LA
TERRE RURALE
La PNSFMR définit deux domaines fonciers appartenant
à deux personnes morales, l'Etat et la collectivité territoriale
décentralisée. La loi relative à la sécurisation
foncière en milieu rural « crée 2» au niveau
de la commune rurale le Service Foncier Rural (S.F.R) chargé
d'administrer la terre rurale. La commune rurale étant une structure
décentralisée dotée de la personnalité juridique et
de prérogatives spécifiques, quel rapport existe entre elle et le
S.F.R qui ressemble à une structure déconcentrée
créée par une loi nationale ? Car la loi `'crée» le
Service Foncier Rural au lieu de donner aux communes rurales le pouvoir de
l'instituer par arrêté communal par exemple.
Cette situation nous paraît confuse au regard du fait
que la PNSFMR confère la propriété de la terre aux
communes rurales en créant leur domaine foncier propre. La
propriété conférant un droit absolu, nous pensons que le
législateur de la loi de sécurisation foncière en milieu
rural devait aller au bout de sa logique et laisser aux collectivités,
la latitude de disposer de leurs biens comme elles l'entendent, ou prendre la
juste mesure des risques d'une telle disposition et reconduire la notion et la
portée juridique du DFN telles que définies par la RAF.
1 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, article 61
2 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, article 39
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cohésion sociale et de développement économique,
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IV - LA NATURE INADAPTEE DES TERRES REVETUES DU
CARACTERE DE
DOMANIALITE PUBLIQUE
L'avant projet de loi réintroduit la notion de terres
vacantes et confère aux « espaces communautaires » les
caractères des biens précédemment classés dans le
domaine public de l'Etat.1
Ce n'est pas ici la nature du bien et le fait qu'il soit
destiné à l'usage communautaire qui le rend inaliénable,
insaisissable et imprescriptible mais le simple fait que la terre soit libre.
L'article 32 de l'avant projet de loi instruit les communes rurales
d'immatriculer « les terres n'appartenant pas en propre à des
particuliers » en leur nom et confère à ces terres le
caractère de domanialité. Cette disposition a suscité en
nous les interrogations suivantes pour lesquelles le projet de loi reste muet
:
- De quel délai dispose le possesseur pour faire
reconnaître son droit vu que la possession n'est valable que s'il la
déclare auprès des autorités communales et reçoit
le document de possession délivré par le juge2 ?
En nous inspirant de l'échec des diverses initiatives
passées tendant à obliger les personnes disposant de terres en
vertu des coutumes à faire valoir leur droit par une déclaration
administrative, nous pouvons affirmer qu'un risque subsiste qu'une partie des
populations rurales ne satisfasse pas rapidement à cette exigence pour
se faire reconnaître un droit qu'elle ne tient de toute façon pas
de l'administration. Que deviendront alors les terres non
déclarées ?
- Qui sont les possesseurs ruraux désignés par
l'avant-projet de loi et pouvant faire valoir leurs droits sur la terre rurale
?
-Quelles sont « les terres n'appartenant pas en propre
à des particuliers » ?
Les dispositions du projet de loi nous permettent d'affirmer
qu'il ne s'agit ni des autorités coutumières, ni de la terre
qu'elles régissent. En effet, l'article 14 précise que la
possession de fait est constituée par l'utilisation effective de la
terre par son exploitation régulière, son entretien, son
aménagement et sa mise en valeur.
L'exercice du droit de propriété foncier
coutumier ne se limitant pas aux espaces aménagés mais portant
sur l'ensemble de l'espace de la communauté, le possesseur foncier n'est
donc pas l'autorité coutumière. Celui-ci peut d'ailleurs faire
1 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, article 32
2 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, article 13
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valoir ses droits au même titre que les autres acteurs
ruraux et dans les mêmes conditions, c'est-à-dire pour l'espace
qu'il a effectivement aménagé. Cette situation qui ne
résout pas le problème de la dualité des régimes
fonciers, l'accentue par l'institution de nouveaux domaines fonciers.
Par ailleurs, le projet de loi ne dispose pas pour les biens
énumérés à l'article 34 de la RAF et revêtu
du caractère de domanialité publique. Quel est par exemple le
statut des sous-sols contenant des minerais ?
V- LA PERSISTANCE DE LA DUALITE DES REGIMES FONCIERS
La PNSFMR reconnaît que les autorités
coutumières constituent des acteurs incontournables en milieu rural mais
les implique très peu dans la gestion foncière.
En effet, l'avant-projet de loi stipule que les
autorités coutumières sont membres de plein droit des commissions
foncières rurales1 mais l'examen des compétences de
cette commission indique qu'elle constitue une structure d'appui et non de
gestion du foncier. La PNSFMR prévoit certes l'implication des
autorités coutumières dans la gestion foncière locale mais
leur confère un rôle d'appui - consei l2.
La difficulté du respect d'une telle disposition
réside dans le fait que les autorités coutumières pensent
elles aussi être incontournables dans la gestion du foncier et disposer
de droits qu'aucun dispositif juridique n'a réussi à leur
enlever. Pourquoi se contenteraient-elles de rôles consultatifs quand
elles disposent d'un véritable droit de propriété qui n'a
jamais pu leur être contesté ? L'écart qui existe entre la
perception que les autorités coutumières ont du rôle
qu'elles pensent devoir jouer et celui qui leur est accordé par la
PNSFMR est très perceptible dans les rapports des ateliers ou les
groupes des autorités coutumières n'ont pas hésité
à demander par moment la suppression de certains passages du document de
PNSFMTR et leur remplacement par des dispositions qui disent clairement
qu'elles doivent être membres de toutes les institutions qui
gèrent le foncier3.
1 Avant projet de loi relatif à la
sécurisation foncière en milieu rural, article 41
2 Confère axe 2 de la 2eme orientation de la
PNSFMR
3 Se conférer à titre d'exemple aux
recommandations des autorités coutumières relatives à
l'axe 2 de la 2ème orientation à Kaya.
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L'anthropologie et la sociologie juridique démontrent
que les dispositions législatives et institutionnelles ne doivent pas
être conçues comme une somme de propositions techniques pour
résoudre un problème donné mais comme un «
phénomène social » dans lequel des groupes sociaux peuvent
se saisir des propositions de développement que la loi leur fait, tout
en s'efforçant de les infléchir pour mieux servir leurs propres
intérêts1. Quelles que soient les formules
utilisées par le législateur, seul l'intérêt de
l'autorité coutumière déterminera sa bonne collaboration.
La PNSFMR lui offre certes un rôle mais ses véritables
prérogatives ne sont toujours pas reconnues. La propriété
foncière coutumière n'étant pas formellement reconnue, la
responsabilisation des autorités coutumières demeure
insuffisante.
La dualité du système foncier n'étant pas
résolue, toutes les difficultés de ce double mode
d'administration de la terre subsistent et seront sources de conflits, surtout
que le nombre de « propriétaire » de la terre augmente. Car
nul n'ignore l'impact de la gestion du foncier par les communes urbaines sur la
cohésion et la paix sociale. Si ces communes qui disposent de ressources
alternatives plus importantes n'ont pu gérer convenablement la terre qui
ne leur appartenait pas, celles rurales qui auront besoin de ressources
financières qu'elles ne peuvent obtenir ailleurs risquent de constituer
de sérieux concurrents aux autorités coutumières, surtout
que la terre leur appartient. La paix et la cohésion sociale n'en seront
que plus menacées.
VI - L'OUBLI DES COUCHES VULNERABLES
Le document de PNSFMR prévoit d'aider les couches les
plus vulnérables, c'est-à-dire les femmes et les jeunes, à
accéder à la terre rurale. Les différents acteurs ruraux
ont d'ailleurs débattu de cette question pendant les ateliers de
concertation.
Nous n'avons relevé aucune disposition dans l'avant
projet de loi tendant à faciliter l'accès de la terre à
ses couches de la société burkinabé, alors que tous
reconnaissent l'impérieuse nécessité de les y aider.
1 « Opérations de développement et droits
fonciers en Afrique - la lutte antiérosive au centre -ouest du Burkina
Faso », Délise Y et Jacob J-P, dans la revue
`'sécheresse», vol 3.
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La nouvelle approche de l'autorité politique, qui tient
compte des droits acquis en dehors de la loi nationale dans la PNSFMR constitue
une avancée dans le processus de mise en place d'une législation
foncière qui constitue un outil de développement
économique et qui intègre en même temps les
réalités socio - culturelles du Burkina.
Cependant, la mise en place d'une politique foncière du
milieu rural uniquement constitue une importante insuffisance car la terre
burkinabè se retrouve subdivisée en deux entités
régies par deux dispositifs juridiques différents. En plus, la
dualité des régimes fonciers reste une entrave non levée
à la mise en place d'une législation foncière
légale et légitime, car l'implication des autorités
coutumières est toujours insuffisante.
La terre burkinabè est disponible selon le Ministre
Salif DIALLO. C'est justement cette disponibilité qui doit permettre de
définir actuellement des droits adaptés à notre
configuration sociale et prévenir ainsi tous conflits sociaux majeurs
dans le futur. Car quoi que l'on dise, la patrie c'est d'abord la terre. Si la
population burkinabè, dont la moitié a moins de quinze (15) ans
aujourd'hui se retrouve un jour en voie de devenir
`'étrangère» dans son propre pays, l'objectif de
développement pourrait être atteint mais la paix sociale s'en
trouverait sérieusement compromise. Nous proposerons dans les chapitres
à venir, d'autres aspects d'une législation foncière au
service de la cohésion sociale et du développement
économique.
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CHAPITRE 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE
COHESION SOCIO - CULTURELLE ?
L'histoire du Burkina Faso, aussi bien avant, pendant
qu'après la colonisation montre à quel point il est difficile de
définir une législation qui prend en compte les différents
aspects de la corrélation entre la gestion du foncier et la
consolidation de la cohésion et de la paix sociale. La situation
foncière burkinabè est d'une telle complexité que toute
proposition de solution semble relever de la gageure. Avoir donc la
prétention de proposer une solution complète dans le cadre d'une
réflexion individuelle est ainsi quasiment inimaginable. Nous nous
intéresserons pour ce faire à quelques aspects spécifiques
qui nous paraissent déterminants pour la cohésion sociale.
Selon Etienne le Roy, « le rapport foncier est un rapport
social déterminé par l'appropriation de
l'espace»1. Cette assertion résume toute la
complexité de la situation foncière burkinabè. En effet,
et ainsi que nous l'avons expliqué dans la première partie de
cette étude, l'appropriation de la terre revêt au Burkina au moins
deux significations : d'une part, il consiste à rendre propre à
un usage et ne renferme dans ce cas qu'un droit d'usage ; d'autre part et selon
la volonté politique du moment et les exigences économiques, il
concerne l'action de s'attribuer la propriété de quelque chose et
véhicule dans ce cas une conception ressemblant à celle civiliste
de la propriété. Mais qui en diffère en ce sens que le
droit de propriété tel que défini par la
législation burkinabè n'accorde pas indéfiniment l'abusus
au propriétaire. La terre burkinabè étant unique et non
proliférante, l'élément fondamental de la cohésion
socio - culturelle réside dans la définition de son statut, qui
doit obligatoirement prendre en compte ces deux significations de
l'appropriation. Pour y parvenir, il convient de faire l'état des
éléments qui déterminent la cohésion socio -
culturelle (section 1) afin de pouvoir en tenir compte dans la
définition du statut juridique de la terre (section 2).
1 « L'appropriation de la terre en Afrique noire »,
éditions KHARTALA, Paris, 1991, page 11.
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SECTION 1 : LES ELEMENTS DETERMINANTS DE LA
COHESION SOCIO - CULTURELLE
I - LES REALITES CULTURELLES DU BURKINA
I - 1 LA LOI ET LA COUTUME
La société burkinabè est
caractérisée par la place prépondérante qu'elle
accorde à la tradition dans ses différents aspects. Ainsi, les
burkinabè sont dans leur grande majorité respectueux des
exigences coutumières de leur village, des fois en dépit des
dispositions règlementaires contraires. La loi conçue en ville
définit les rapports de l'homme à la terre mais l'application au
village respecte d'abord les rapports de la société à la
terre avant d'introduire la loi. Le problème qui subsiste ici provient
de l'inadaptation de la loi aux comportements des burkinabè et des
insuffisances des coutumes :
- la loi est inadaptée car elle n'intègre pas les
habitudes culturelles des burkinabè.
- la coutume est insuffisante car elle ne satisfait pas à
toutes les exigences de cohésion socio - culturelle.
I - 2 - LA LEGISLATION FONCIERE UNIFIEE
La législation foncière doit tenir compte des
habitudes culturelles de la société burkinabè. Elle doit
donc reconnaître les compétences des autorités
coutumières en matière foncière et l'existence des droits
fonciers coutumiers. Mais elle doit réguler l'exercice de cette
compétence afin de ne pas reconduire la coutume intégralement car
une telle attitude contribuerait à renforcer la dualité du
régime juridique et éprouverait sérieusement la
cohésion et la paix sociale.
En effet, un demi-siècle s'est écoulé
depuis l'accession du Burkina à l'indépendance. Au cours de cette
période, les coutumes burkinabè ont connu des mutations à
l'instar de toutes structures sociales humaines. La législation
foncière doit tenir compte de cette évolution. Selon
l'anthropologue ivoirienne Aline AKA1,
1 « Analyse de la nouvelle loi de 1998 au regard de la
réalité foncière et de la crise socio-politique en
Côte d'Ivoire », Aline AKA, bulletin de liaison du l'AJP n° 26,
septembre 2001
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pour qu'une coutume reproduise fidèlement les effets
qu'on lui a connus à une certaine époque, il faut que la
situation sociale et la logique fondant cette coutume existent toujours au
moment où on la reconduit. C'est dire que reconduire la coutume peut
contribuer à fragiliser la paix et la cohésion sociale car elle
aussi est inadaptée aux réalités sociales actuelles.
Une législation foncière qui ne tient pas non plus
compte de la coutume ne peut résoudre la dualité des
régimes fonciers et se révèlera inefficace à long
terme.
Au Burkina les mutations sociales de la coutume ont aussi
été influencées par les différentes
décisions politiques en matière foncière. Les
autorités coutumières du Burkina ont toutes conscience
aujourd'hui de ne pas disposer d'un droit absolu et au dessus de la loi
nationale. Cette situation constitue de notre point de vue un
élément que la volonté politique peut exploiter pour
exercer aisément un contrôle de l'action coutumière sans
trop de difficultés. Car reconnaître aujourd'hui l'existence de
compétence foncière coutumière, c'est achever de
réintégrer les autorités coutumières dans la vie
communautaire dont ils avaient été quelque peu en marge depuis
l'avènement de la première version de la RAF, en droits mais
aussi en devoirs.
La législation foncière doit donc
reconnaître la compétence des autorités coutumières
en tant qu'acteurs fonciers et les impliquer dans toutes les étapes de
la gestion du foncier. Pour ce faire il convient de:
1)- reconnaître la terre coutumière comme existante
bien que faisant partie des terres du Domaine Foncier National du Burkina.
2) - reconnaître à l'autorité
coutumière la compétence de la gestion de ces terres.
3) -reconnaître l'existence de deux types de droits
fonciers coutumiers :
a- un droit de propriété collectif et non
individuel.
b- des droits d'usage collectif et individuel.
4)- réglementer la transmission des droits fonciers
coutumiers. Pour ce faire :
a - Pour ce qui est du droit de
propriété. Au regard de son caractère collectif
et non individuel, le déclarer non transmissible par des personnes
agissant pour leur propre compte et non transmissible à des personnes
autres que l'Etat. Pour la transmission du droit de propriété
à l'Etat, instituer une cellule à mesure de poser les actes de
transmissions et composée des autorités foncières
coutumières et des représentants des différentes
composantes du village.
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Exemple de cellule : Les personnes suivantes pourraient
faire partie de la cellule, dans les régions où la configuration
des villages est ainsi : le chef de village, le chef de terre, un
représentant des femmes, un représentant des jeunes, un
représentant des personnes qui exercent les activités
menées dans le village (agriculture, élevage...).
La composition de la cellule pourrait être
arrêtée par région. Confier aux autorités
coutumières l'initiative des actions de transfert du droit de
propriété mais déclarer délictuel et de nul effet
tout transfert non cautionnée par la cellule de transfert.
Pour que la propriété foncière
coutumière profite à l'ensemble de la communauté, et pour
soumettre les actions des autorités coutumières à la
sanction populaire, arrêter une grille de valeurs des terres
coutumières qui fixe, en fonction des pratiques actuelles, la valeur
minimum des terres coutumières par région. Elle aura deux
avantages majeurs :
Pour les transactions du droit de propriété,
elle servira de base au dédommagement de l'Etat. Prévoir qu'une
partie des sommes issues de ces dédommagements soit obligatoirement
reversée dans un compte collectif et serve à financer des
activités de développement du village.
Elle servira aussi de base pour définir la valeur
monétaire de la terre et permettra aux détenteurs de droits
d'usage fonciers coutumiers de les transmettre, les prêter ou même
les donner en garantie par exemple pour obtenir des financements au niveau des
institutions qui accompagnent les activités rurales.
b- Pour ce qui est des droits d'usage
coutumiers. Leur reconnaître des effets similaires mais de
moindre portée que ceux des droits démembrés du droit de
propriété. Pour ce faire circonscrire leurs effets en les
limitant à des activités spécifiques, à un espace
et à des investissements maximaux.
Par exemple le possesseur de droit d'usage coutumier pourrait
se servir du document constatant la possession de ces droits pour les
transmettre, les prêter, les gager... aux conditions cumulatives
suivantes :
- Activités : si la terre objet du droit d'usage
coutumier est destinée uniquement aux activités suivantes:
l'agriculture, l'élevage et la pêche.
- Espace : si l'espace concerné ne dépasse
pas une certaine superficie. -Investissement : si les investissements
réalisés ou requis pour mener l'activité ne
dépassent pas un certain montant. Ce montant pourrait être la
limite
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maximale du financement dont le document de constatation des
droits d'usages coutumiers peut servir de garantie par exemple.
On pourrait même aller plus loin en désignant les
structures habilitées à octroyer des financements ou à
constater la transmission ou le prêt des droits d'usage coutumiers. Les
structures qui financent habituellement les activités agricoles,
pastorales ou piscicoles pourraient être autorisées à
recevoir ces documents en garantie des financements qu'elles octroient tandis
que les services financiers des communes du lieu de situation de l'espace
concerné pourraient être compétente pour connaître
des actes de transmission ou de prêts des terres sur la base du
document.
Mais dès que l'une des conditions
énumérées n'est plus remplie, le document de constatation
du droit d'usage coutumier devra être insuffisant pour sécuriser
le droit concerné et pour l'utiliser. La gestion de la terre
concernée n'étant plus de la compétence de
l'autorité coutumière, celle réglementaire pourrait alors
prendre la relève.
II - LES REALITES SOCIALES DU BURKINA
II - 1- PRESENTATION DE LA CARTE SOCIALE DU BURKINA
Dans le cadre de notre étude, nous avons choisi de relever
quelques aspects de la société burkinabé qui peuvent avoir
une influence sur la cohésion sociale.
II-1-1 - Présentation de la structure de la
population du Burkina1 COMPOSITION DE LA POPULATION
RESIDENTE
- Population totale résidente (selon le recensement de
2006) = 13.730.258 - Composée de : - Hommes : 6.635.318 soit 48,3% de la
population totale
- Femmes : 7.094.940 soit 51,7% de la population totale
1 Source : Institut National de la Statistique et de
la Démographie du Burkina
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REPARTITION DE LA POPULATION RESIDENTE PAR SEXE SELON
LE MILIEU
DE RESIDENCE *
MILIEU DE RESIDENCE
|
SEXE
|
MASCULIN
|
FEMININ
|
TOTAL
|
URBAIN
|
1.380.320
|
1.386.063
|
2.766.383
|
RURAL
|
5.254.998
|
5.708.877
|
10.963.875
|
TOTAL
|
6.635.318
|
7.094.940
|
13.730.258
|
*Source : Institut National de la Statistique et de la
Démographie du Burkina
INFORMATIONS COMPLEMENTAIRES
Structure de la population par âge
- Population âgée de 0 à 14 ans : 46,8% de la
population totale.
- Population âgée de plus de 14 ans : 53,2% de la
population totale. Population vivant hors du Burkina : Nous n'avons pas
pu obtenir de statistiques récentes mais en 2000, la population
résidente qui avait séjourné au moins une fois et pendant
plusieurs années hors du Burkina mais était revenue pouvait
être estimée à environ 29% de la population totale ; Quant
à celle qui vit actuellement hors du Burkina, elle avoisinerait 20% de
la population résidente. Ce taux serait plus élevé avant
la crise ivoirienne.
Taux d'alphabétisation : 25,7% de la population
totale en 2005 selon les statistiques INSD.
Langues : Environ 60 groupes ethnolinguistiques.
Activités : -Agriculture, élevage,
pêche : environ 86% de la population active
-Autres activités (commerce, activités
salariées...) environ 14% de la population active.
II-1-2- Quelques observations sur la carte sociale du
Burkina
Les informations de la carte sociale du Burkina nous
permettent de faire six remarques sur la population burkinabé. Ces six
observations constituent des facteurs qui influent à court et long terme
sur la paix et la cohésion sociale
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1) - Le Burkina Faso compte une soixantaine de groupes
ethnolinguistiques et donc au moins autant de diversités
coutumières, établies dans plusieurs centaines de villages. Si
l'Etat du Burkina Faso n'était pas constitué, l'espace qui le
compose serait administré par au moins autant de lois foncières
coutumières et chaque burkinabè serait toujours étranger
quelque part dans cet espace.
2) - 46,8% de la population totale, soit environ six millions
quatre cent vingt cinq mille sept cent soixante (6.425.760) personnes ont tout
au plus quatorze (14) ans et n'ont donc pas l'âge minimum requis pour
postuler à la possession d'un terrain. En effet, l'âge minimum
requis par la RAF pour être attributaire d'une parcelle est de quinze
ans1. Cette portion passe à plus de la moitié de la
population totale si l'on considère l'âge de la majorité
juridique c'est-à-dire dix-huit (18) ans.
3) - Sur environ quatorze millions de personnes que compte le
Burkina, près de onze millions vivent en milieu rural. Selon les
informations recueillies à l'INSD, sur cinq (5) burkinabé, quatre
(4) vivent en milieu rural.
4) - L'immense majorité de la population active tire
ses revenus de la terre.
5) - Plus de la moitié de la population est
composée de personnes vulnérables et défavorisées
par la gestion foncière de l'autorité coutumière : il
s'agit des femmes et des enfants.
6)- Une forte portion de la population
burkinabé est immigrante et participe faiblement à la demande en
terre au niveau national. Mais y a néanmoins droit, au même titre
que la population résidente.
II - 2 - ELEMENTS CONCEPTUELS D'UNE LA LEGISLATION FONCIERE,
OUTIL DE COHESION SOCIALE
Ainsi que nous le rappelions dans le premier chapitre de cette
partie, la loi doit être un phénomène social afin que les
populations se l'approprient. C'est la condition sine qua non pour la rendre
légitime. C'est la condition primaire pour rendre la loi vraiment
applicable. C'est enfin de cette condition que découlent la
légitimité et la sécurité des droits des individus.
Nous reviendrons sur ce dernier point dans le troisième chapitre de
cette partie.
1 Décret n° 97-054/PRES/PM/MEF portant
application de la RAF, Article 155.
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La législation foncière ne peut être
vraiment au service de la cohésion sociale si la population
dépendante de la terre qu'elle régit ne se sent pas
protégée et prise en compte dans ses dispositions. La
législation foncière burkinabè doit donc tenir compte de
la configuration sociale du pays. Elle doit permettre l'égal
accès à la terre, en vertu de l'article 1 de la Constitution du
Burkina qui garantit à tous, l'égalité des droits devant
la loi. Pour ce faire elle doit répondre à huit (8) aspirations
qui nous paraissent essentielles :
1) - Au regard de la diversité de la configuration
ethnolinguistique du Burkina, la législation foncière doit tenir
compte des règles foncières coutumières mais ne doit
jamais leur laisser la prédominance sur la loi nationale. A
défaut, la cohésion sociale serait fracturée. Force doit
donc rester à la loi nationale et à l'Etat qui constitue le
garant de l'unité de la nation. La reconnaissance de la nature
collective et non individuelle du droit de propriété coutumier et
son mode de transmission permettrait de maintenir la cohésion sociale de
la nation dont l'Etat constitue le garant.
2) - La population burkinabè est essentiellement
jeune. La législation foncière doit protéger les droits de
cette frange de la société. Elle doit donc préserver la
terre pour cette population jeune ainsi que pour les générations
futures. La loi et la coutume accordent au Burkina des droits similaires sur la
terre. La législation foncière doit donc être l'expression
de cette réalité. Le caractère absolu du droit de
propriété qui pouvait constituer le point de divergence entre les
deux législations foncières n'en constitue pas puisque la
propriété selon la loi burkinabè ne confère pas
l'abusus indéfiniment. La détention du droit de
propriété par l'Etat constitue la meilleure garantie de la
préservation des droits des générations futures.
3)- L'article 155 du décret
97-054/PRES/PM portant modalités d'application de la RAF permet aux
autochtones âgés de quinze (15) ans et résidant dans les
villages englobés par les lotissements de postuler à
l'attribution d'une parcelle. Le délai de mise en valeur étant de
cinq (5) ans (article 159 du décret précité),
l'administration est fondée à retirer ces parcelles lorsque les
autochtones ayant bénéficié de cette disposition
dépasseront l'âge de vingt (20) ans. Combien de jeunes
burkinabè sont à mesure de mettre une parcelle en valeur à
cet âge ? Cette disposition, au lieu de préserver le droit de la
jeunesse d'accéder à la terre, la fragilise au contraire et fait
de ces jeunes des instruments de spéculation foncière aux mains
des adultes qui utilisent leurs noms pour les attributions des parcelles
destinées à être revendues
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plus tard. Pour éviter cela, l'âge requis pour
postuler à une attribution doit être de vingt (20) ans pour
tous.
4)- Quatre burkinabé sur cinq, vit en milieu rural. La
loi doit disposer pour cette frange de la société en l'aidant
à accéder à la terre. La reconnaissance de l'existence des
droits fonciers coutumiers permettrait de sécuriser les droits
déjà existants de cette frange de la population.
5)- L'immense majorité des burkinabé tire ses
revenus de la terre. La loi doit sécuriser les droits de cette frange de
la société. La reconnaissance des droits d'usage coutumiers et le
fait de leur conférer des effets similaires à ceux des droits
démembrés du droit de propriété civiliste
contribueraient à sécuriser les droits des populations
rurales.
6)- Plus de la moitié de la population est
constituée de femmes et de jeunes qui sont considérés
comme vulnérables au regard de la précarité de leurs
conditions de vie. La loi doit protéger cette frange de la
société et résoudre sa vulnérabilité en
l'aidant à accéder à la terre au même titre que les
couches non vulnérables. La législation foncière pourrait
s'appuyer au départ, sur l'existant en milieu rural. Dans ce cas, elle
pourrait commencer par favoriser l'accès des jeunes et des femmes
organisés en association car des milliers d'associations existent en
ville et en campagne et sont pleinement intégrées à la vie
communautaire. Ensuite les attributions individuelles pourraient suivre.
7)- Une importante portion de burkinabé vit hors du
pays. Selon l'article 13 de la déclaration universelle des droits de
l'homme « toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le
sien, et de revenir dans son pays. » La législation foncière
doit donc tenir compte de la frange importante de burkinabè vivant hors
du pays. Elle doit pour ce faire veiller à décourager la
spéculation foncière et accorder des droits ne remettant pas en
cause l'accès à la terre des burkinabé vivant à
l'étranger, en conformité avec les dispositions de l'article
précité.
8)- La majorité de la population burkinabè n'a
pas un niveau d'éducation lui permettant de lire et comprendre les
dispositions législatives. Selon les statistiques de l'INSD, 74,3% de la
population n'est pas alphabétisée. Cette portion passe à
plus de 85% si l'on considère les personnes qui n'ont pas le niveau
3° de l'enseignement scolaire. C'est cette population qui tire le plus sa
subsistance d'activités liées à la terre et qui a besoin
de comprendre ses droits et devoirs tels que définis par la loi. La
législation foncière gagnerait a être
élaborée (ne serait-ce qu'en ses dispositions les
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plus usuelles) en langues nationales afin que cette population
se l'approprie et soit à mesure de défendre ses droits face
à ceux qui voudraient les spolier. Car si elle n'occupe pas la place qui
peut lui revenir dans les esprits de l'ensemble de la population, la
législation foncière règlementaire laissera à la
coutume cet espace qui est pourtant celui qu'il convient de conquérir en
premier.
Sur la base de la carte sociale du Burkina que nous venons de
dresser et en fonction des facteurs déterminants de la paix et de la
cohésion sociale, nous essayerons de définir le statut juridique
de la terre.
SECTION 2 : DEFINITION DU STATUT JURIDIQUE DE LA
TERRE
Il s'agira ici de voir qui doit disposer du droit de
propriété et définir le rôle des différentes
autorités politiques qui sont impliquées dans la gestion de la
terre jusque- là.
I - LES PERSONNES CHARGEES DE LA GESTION DE LA
TERRE
L'histoire foncière du Burkina a été
marquée par la présence de deux législations
foncières qui se sont toujours disputées la gestion de la terre,
l'une essayant de s'imposer et faire disparaître l'autre. Ces deux
législations foncières sont les instruments de deux
autorités politiques différentes, l'autorité politique
investie du pouvoir d'Etat et celle coutumière.
La loi peut être efficace, applicable, juste et
équitable dans ses dispositions, mais produire des effets pervers
pendant son application. Car la loi est toujours l'instrument des hommes. Avant
d'apprécier l'efficacité de la loi, il convient d'abord
d`évaluer la rigueur avec laquelle les personnes qui la mettent en
pratique ou qui veillent à son application travaillent. Au Burkina,
c'est aux maires qu'incombe la gestion de la terre. Les services des
impôts accompagnent l'autorité communale dans cette gestion et
veillent à ce qu'elle se fasse dans le respect des lois en vigueur.
Quant à la terre coutumière elle a toujours
été gérée par les autorités
coutumières à savoir les chefs de terre et de village et toutes
autres autorités coutumières investies de cette mission, selon le
groupe ethnolinguistique.
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Plus d'un demi-siècle après l'accession du
Burkina à l'indépendance le constat qui découle de la
gestion du foncier par ces deux autorités permet de conclure que les
personnes finissent toujours par agir au gré de leurs
intérêts en appliquant la loi et non selon celui de la
communauté :
- la gestion foncière des autorités communales
n'a pas toujours servi l'intérêt de la majorité. Les
problèmes sociaux et fonciers occasionnés par cette gestion sont
toujours en attente de solutions.
- la gestion foncière des autorités
coutumières a montré ses limites depuis que la terre a une
importante valeur monétaire. Beaucoup d'autorités
coutumières ont tout simplement bradé les biens de leur
communauté sans vraiment associer la majorité de la population
à cette gestion et sans se soucier des risques de fracture sociale
qu'une telle attitude favorise.
Au regard de tout ce qui précède, la solution de
conférer la propriété de la terre aux communes et donc de
confier la gestion de cette propriété aux autorités
politiques communales ou même à celles coutumières semble
de notre point de vue, desservir la paix et la cohésion sociale. La
législation foncière ne peut vraiment servir la paix et la
cohésion sociale tant que des personnes disposeront du droit de
propriété perçu au sens civiliste du terme.
La gestion de la terre non coutumière peut rester dans
la compétence de l'autorité communale ; la reconnaissance de
compétence de gestion à celles coutumières, et de droits
transmissibles issus de cette reconnaissance permet de l'impliquer.
L'autorité coutumière doit être membre des
différentes instances de gestion foncières au niveau local pour
apporter sa contribution et aussi prendre conscience des effets d'une gestion
incontrôlée de la terre.
Mais le droit de propriété doit être
détenu par une personne qui peut la protéger contre toute
tentation, et qu'aucun facteur social ne peu corrompre.
II - LE DROIT DE PROPRIETE
Les législations foncières qui ont
administré les terres du Burkina jusque-là ont
conféré à des personnes non physiques le pouvoir de
contrôle et de sanction de l'action humaine et ont limité les
effets de tous les droits fonciers des personnes de droit privé:
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-la législation foncière réglementaire
confère à l'Etat qui est une personne morale de droit public le
pouvoir de contrôler les usages auxquels sont destinés les terres
de toutes les personnes détentrices de droits fonciers précaires,
permanents ou définitifs. Le droit de propriété est certes
définitif et inattaquable, mais il ne porte en réalité que
sur le sol et l'espace au dessus. En effet, même pour les terres
appartenant en pleine propriété à des particuliers, la
découverte par exemple de gisements dans le sous-sol, permet à
l'Etat de reprendre la terre au propriétaire, certes contre juste
dédommagement, mais sans aucune possibilité pour ce dernier de
refuser de céder la terre qui lui appartient ou de demander par exemple
une partie du gisement. Car les richesses du sous-sol sont exclues du droit du
propriétaire.
- la législation foncière coutumière
confère quant à elle, le droit de propriété aux
forces surnaturelles qui ne sont pas des personnes physiques vivantes.
Etienne le Roy confirme cette assertion lorsqu'il affirme que
« l'appropriation en Afrique se présente comme une affectation
à un usage, avant d'être une attribution exclusive et absolue d'un
bien1 ».
Par ailleurs le caractère absolu de l'appropriation
telle que définie par le code civil menace la paix et la cohésion
sociale car comme l'affirme SAHLINS2, «...l'appropriation au
regard de la nature est proportionnelle à l'expropriation au regard de
l'homme,» ce qui a pour conséquence de condamner une partie de la
population à ne jamais disposer du bien commun.
En outre, les communes présentent des faiblesses
similaires à celles de la coutume car les autorités communales
appartiennent toujours à un parti politique, à un village,
à une ethnie... par opposition aux autres partis politiques, aux autres
villages, aux autres ethnies... Leur gestion sera toujours influencée
par cette appartenance qui peut avoir un impact sur la paix et la
cohésion sociale.
Au regard de tout ce qui précède, l'Etat
apparaît comme la seule personne morale à mesure de détenir
et préserver le droit de propriété car lui seul peut
exiger et obtenir des comptes de la gestion des autres personnes (physiques et
morales). C'est encore une raison pour laquelle, nous estimons qu'il doit
être l'unique interlocuteur de l'autorité coutumière, pour
la transmission du droit de propriété coutumier.
1
« L'appropriation de la terre en Afrique noire »,
éditions KHARTALA, Paris, 1990, page 14
2 SAH LINS citée par un article du FAO.
Confère www.fao.com/
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Pour garantir la paix et la cohésion sociale, et
obtenir la légitimité populaire, la législation
foncière doit s'identifier à la société
burkinabé et impliquer tous les acteurs. La législation
foncière qui est adaptée aux réalités socio -
culturelles du Burkina pourra constituer un véritable outil de
cohésion sociale. Mais la paix et la cohésion sociale sont aussi
tributaires du développement économique. Quelle
législation foncière peut donc satisfaire aux impératifs
de développement économique du Burkina ?
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CHAPITRE 3 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ?
Les ambitions de développement économique du
Burkina semblent être l'une, sinon la principale cause de la
difficulté d'institution d'une législation foncière
unifiée. La prise en compte de la corrélation entre gestion
foncière, paix et cohésion sociale apparaît presque comme
impossible tant les exigences de développement économique
semblent éloignées de celles de cohésion et de paix
sociale.
Pourtant la sécurité foncière, outil
fondamental du développement économique, ne peut se
réaliser sans la prise en compte des exigences de cohésion
sociale et de paix. La prise en compte de cette seconde corrélation
entre la sécurité des droits fonciers, la paix et la
cohésion sociale est la condition sine qua non de l'institution d'une
législation foncière au service du développement
économique.
Notre proposition d'une législation foncière qui
satisfait aux exigences de développement économique commencera
donc par la définition des éléments déterminants du
développement économique (section 1) sur la base desquels nous
essayerons de déterminer le type de législation dont les droits
peuvent être sécurisés parce que adaptés à
nos réalités socio - culturelles (section 2).
SECTION 1 : LES ELEMENTS DETERMINANTS DU
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
Pour les cerner, nous définirons d'abord le rôle
de la loi dans le développement économique. Ensuite nous
rechercherons les acteurs du développement afin d'identifier les droits
adaptés à leurs ambitions.
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I - LE ROLE DE LA LEGISLATION DANS LE DEVELOPPEMENT
ECONOMIQUE
I- 1- LA LOI ET LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
Le développement économique peut être
défini comme l'amélioration qualitative durable d'une
économie et de son fonctionnement1.
Les autorités burkinabè associent cette
définition tantôt avec l'adjectif `'durable» ou
`'social».
Le développement économique durable peut être
défini comme une amélioration qualitative et pérenne d'une
économie.
Quant au développement économique et social, il
consiste à l'amélioration des conditions de vie de la
société, issue de celle de l'économie.
C'est dire qu'il existe un lien étroit entre
`'développement économique» et `'développement
social». C'est de notre point de vue cette corrélation qui
détermine le rôle de la loi. En effet, toute économie a
besoin de s'appuyer sur un dispositif juridique efficace pour
s'améliorer et se pérenniser.
Quant à la loi, elle ne peut offrir l'efficacité
requise à l'économie que si elle constitue un
phénomène social dont les individus se sont appropriés.
L'efficacité de la loi exige et impose même qu'elle soit le reflet
de la société. Les lois foncières burkinabè
d'aujourd'hui présentent quelques insuffisances car elles
intègrent insuffisamment les réalités socio - culturelles
du Burkina. La solution d'abroger des règles (coutumières ou
règlementaires) appliquées pendant une période, et
instituer de nouvelles règles n'est pas non plus la bonne. Une telle
attitude réduit davantage les chances d'applicabilité de la loi.
« L'abrogation juridique n'implique pas une abrogation dans la conscience
collective, car la règle connue demeure vivante dans la conscience de
l'individu2 ».
La loi doit donc consister en une construction juridique qui
part de l'existant, le modèle pour l'adapter à la
société. La législation foncière modelée
obtiendra la légitimité nécessaire lui permettant de
sécuriser vraiment les droits des individus. Quand peut-on donc
considérer que les droits fonciers sont sécurisés ?
1 Définition du dictionnaire « le
dictionnaire le petit Larousse illustré"
2 www.FAO.com/ Archives de la FAO : « les
besoins d'un droit pour une coviabilité à long terme des
écosystèmes et des modes d'exploitation », page 23
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I-2- LA SECURISATION FONCIERE
Plusieurs études soutiennent la nécessité
de sécuriser les droits fonciers et font de cela un préalable
à tout développement économique durable. Nous
paraphraserons le document de PNSFMR pour donner une définition de la
sécurisation foncière.
I-2-1 - Définition
La sécurisation foncière peut être
définie comme l'ensemble des processus, actions et mesures de toute
nature, visant à permettre à l'utilisateur de terre de mener
efficacement ses activités productives, en le protégeant contre
toute contestation ou trouble de jouissance.
Cette définition semble de notre point de vue, contenir
les différents éléments qui conditionnent la
sécurité des droits. Ces éléments proviennent des
termes processus, action, mesure, utilisateur, activité et
contestation.
I-2-2- Les éléments déterminants de la
sécurisation foncière
-1) Les processus. Pour qu'il y ait
sécurisation foncière, la législation doit s'inscrire dans
le cadre d'un processus. Ce processus doit concerner les textes qui doivent
être modifiés au fur et à mesure pour être
adaptés à la réalité socio - culturelle du Burkina.
Il doit aussi concerner les populations que la sensibilisation peut convaincre
de la nécessité de la loi et dont la loi doit intégrer les
préoccupations.
-2) Les actions. Des actions doivent être
entreprises par tous les acteurs du foncier. Les acteurs politiques doivent
rendre la loi effective en veillant à ce qu'elle soit respectée.
Ils doivent donner aux gestionnaires du foncier les compétences
nécessaires et les appuyer dans l'exercice de ces compétences.
Des actions continuelles et quotidiennes doivent être menées sur
une période suffisamment longue pour que la loi soit effective dans son
application. Elles permettront aux détenteurs des droits de pouvoir en
jouir mais contrôleront aussi les abus.
-3) Les mesures. La législation foncière
doit prévoir les conséquences des actes des individus. Les
mesures doivent, par leur mise en oeuvre, encourager ou
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décourager certains comportements. Des dispositions
spécifiques doivent être prises pour faire respecter les droits
des couches spécifiques telles que les plus défavorisées
qui constituent la majorité de la population. Elles rendront la loi
pérenne et garantiront les droits acquis dans la durée, en les
protégeant des contestations futures.
-4) Les utilisateurs. La législation doit
protéger et encourager l'utilisateur de la terre à mener ses
activités productives. La notion d'utilisateur revêt une
importance capitale et doit être précisée. Car
l'utilisation constitue le seul aspect contrôlé de la
propriété civiliste. La non utilisation, la spéculation et
l'utilisation contraire à la loi doivent être interdites et
sanctionnées par des mesures vraiment appliquées.
-5) Les activités. La législation doit
disposer pour les activités et protéger leur exercice. Les droits
octroyés doivent correspondre aux activités entreprises. Leur
consistance doit tenir compte de la nature de l'activité et des
investissements réalisés par les utilisateurs. Les populations
burkinabè exercent principalement l'agriculture, l'élevage et la
pêche. L'agriculture est saisonnière tandis que l'élevage
est transhumant. Ces trois activités s'exercent sur les mêmes
espaces. L'agriculture occupe le sol surtout pendant la saison pluvieuse.
Ensuite, l'élevage occupe le même espace en saison sèche.
Agriculteurs, éleveurs et pêcheurs utilisent ensemble les cours
d'eau en toutes saisons, mais surtout en saison sèche. Si les terres
octroyées à l'agriculteur sont revêtues d'un droit absolu
qui interdit à l'éleveur d'y accéder en saison
sèche, la loi sera toujours source de conflits et donc
d'insécurité foncière. De même que si le
pêcheur dispose d'un droit absolu sur les abords des cours d'eau,
empêchant agriculteurs et éleveurs d'y accéder.
-6) Les contestations. Elles constituent le principal
facteur qui menace la sécurité foncière. C'est contre les
contestations que la loi doit protéger l'utilisateur de la terre. Les
contestations sont de deux ordres qui sont de notre point de vue, la
résultante des deux composantes de la sécurité
foncière. Il s'agit de la contestation légale et de celle
légitime.
*La contestation légale : il s'agit de
la remise en cause des droits par la loi. Elle est la plus facile à
prévenir et à résoudre. Il suffit d'être en
conformité avec la législation en vigueur pour protéger
ses droits contre la contestation légale. Le respect de la
législation confère la légalité des droits et
protège l'utilisateur contre la contestation légale.
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* La contestation légitime : Il s'agit
de la remise en cause des droits par la société. L'insuffisance
de la prise en compte de cette forme de contestation constitue la raison
fondamentale de l'insécurité foncière. Cette raison nous
paraît si importante que nous pensons qu'elle explique les échecs
de toutes les tentatives de résolution de la dualité des
régimes fonciers et de sécurisation des droits des acteurs
fonciers. Nous pensons qu'aucune sécurité foncière n'est
réellement envisageable tant que les droits des utilisateurs ne seront
pas protégés contre elle. Car la contestation légitime
détruit la légitimité de la loi qui constitue la source
des droits légaux et finit toujours par atteindre les droits acquis. La
sécurité foncière issue de la légalité
juridique ne peut être pérenne si elle ne provient pas aussi de la
légitimité sociale. Une législation foncière qui
octroie aux utilisateurs des droits légaux et légitimes parce que
adaptés aux réalités socio - culturelles du Burkina leur
offrira vraiment la sécurité foncière.
II - LES DIFFERENTS ACTEURS DU DEVELOPPEMENT
ECONOMIQUE
Au regard de l'histoire foncière et des
réalités socio - culturelles du Burkina, on peut regrouper les
acteurs du développement économique en deux groupes : les acteurs
politiques et les utilisateurs de la terre. Nous avons choisi de
déterminer les acteurs avant de définir les droits afin que la
loi reflète le rôle, les devoirs et les droits des personnes dont
elle constitue l'instrument.
II-1- LES ACTEURS POLITIQUES
Il s'agit de l'Etat, du Ministre chargé des domaines, des
maires et des autorités coutumières.
- L'Etat : Il instaure la législation
foncière. Il est le garant du respect de la loi et constitue de ce fait
la seule autorité à mesure de sécuriser les droits
exercés par les personnes
-Le Ministre chargé des domaines : il
l'exerce en pratique la propriété de l'Etat et contrôle le
respect de la loi. Il est chargé d'octroyer le droit de
propriété tel que défini par la loi, aux personnes.
-Les maires : ils gèrent la terre et
octroient les droits de jouissance.
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-Les autorités coutumières : elles
gèrent la terre et octroient les droits d'usage prévus par la
coutume.
II-2- LES UTILISATEURS DE LA TERRE
Il s'agit de l'Etat pour le compte des structures publiques et
para - publiques centrales et déconcentrées, des services publics
décentralisés, des personnes physiques et morales de droit
privé, qui mènent des activités productives à
savoir les agriculteurs, les éleveurs, les pêcheurs, les artisans,
les industriels, les commerçants... et les personnes qui utilisent la
terre pour y bâtir des maisons d'habitation ou pour y mener des
activités non lucratives (associatives, religieuses...) ...
II-3 - LES AUTRES PERSONNES PHYSIQUES ET MORALES
Il s'agit de toutes les personnes physiques et morales qui
accompagnent les différents acteurs de développement et qui
conditionnent l'octroi de leurs services par des garanties constituées
de droits fonciers sécurisés. On peut citer de manière non
exhaustive les institutions financières nationales et
internationales...
III - QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES ROLES DES ACTEURS
DE
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
Les observations suivantes peuvent être faites sur les
rôles des différents acteurs de développement
économique, par rapport à la nature et à la gestion des
droits fonciers.
III-1- LES INSTANCES CHARGEES DE LA GESTION DES TERRES
La gestion du foncier est assurée par des autorités
politiques :
- l'Etat représenté par le Ministre chargé
des domaines (actuellement le Ministre des finances) pour l'exercice du droit
de propriété ;
- les autorités communales et coutumières pour la
gestion des terres et l'octroi des droits de jouissance.
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III-2- L'EXERCICE DU DROIT DE PROPRIETE
Le droit de propriété est détenu par
l'Etat, mais son exercice est confié au Ministre des finances. L'une des
raisons de la difficulté de la mise en oeuvre de la RAF provient de ces
dispositions.
En effet, la propriété de l'Etat a
été très peu perçue dans la réalité
en raison du fait qu'elle est confiée à une autorité
concentrée alors que celui-ci ne dispose pas de moyens humains
adaptés (c'est-à-dire revêtu de pouvoir politique) , pour
l'exercer effectivement sur le terrain. Parallèlement la loi
confère aux autorités communales qui sont des structures
décentralisées (et des autorités politiques), la gestion
des droits d'usage, issus du droit de propriété. On pourrait
caricaturer cette situation en disant que le droit de propriété
est à Ouagadougou (lieu de situation du Ministère des finances)
tandis que le droit d'usage est partout au Burkina (dans les lieux où
sont situées les autorités communales et coutumières).
La gestion du foncier étant de la compétence des
autorités politiques, les services déconcentrés du
Ministère des finances ne peuvent exercer un contrôle efficace de
leur gestion. Ces autorités étant de fait, hors du contrôle
des structures déconcentrées de l'Etat qui les accompagnent dans
leur gestion, le contrôle du respect des dispositions législatives
devient difficile.
En fonction des éléments déterminants du
développement économique que nous venons
d'énumérer, nous essayerons à présent de proposer
les éléments d'une législation foncière à
mesure de les satisfaire et de respecter les impératifs de paix et de
cohésion sociale.
SECTION 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, COMME OUTIL DE
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ?
Pour pouvoir prendre en compte les préoccupations des
différents acteurs du développement dans la proposition d'une
législation foncière unifiée à mesure de
résoudre les effets pervers de la dualité des régimes
fonciers appliqués jusque-là, nous ferons dans un premier temps,
une présentation sommaire de la situation socio- économique du
Burkina. Ensuite nous procéderons à la définition du
statut
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juridique de la terre et du rôle que pourraient jouer
les différentes autorités politiques. Enfin nous
définirons les droits des différents acteurs en tenant compte des
exigences de sécurité foncière.
I - PRESENTATION DE LA SITUATION DE LA PAUVRETE AU
BURKINA
Les statistiques de l'INSD fournissent les informations suivantes
sur la population burkinabè.
- Population vivant avec moins de 1 $ US/jour : 27,2% de la
population totale ;
- Population vivant avec moins de 2 $ US/jour : 71,8% de la
population totale ;
- Population vivant en dessous du seuil de pauvreté
(c'est-à-dire disposant d'un revenu annuel ne dépassant pas
82.672 francs CFA) : 46,4% de la population.
Selon ces informations, la majorité des pauvres se
trouve en milieu rural et mène les activités agricoles ou
pastorales. Les couches vulnérables de la population (les femmes, les
jeunes et les enfants) sont les plus exposées à la
pauvreté.
II - LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE
Les différents acteurs du milieu rural qui ont
participé aux ateliers de concertations sur la PNSFMR ont tous soutenu
l'idée que l'Etat ne soit plus l'unique propriétaire de la
terre.
Mais nous avons expliqué dans cette étude que la
loi étant l'instrument des hommes, toutes les personnes physiques qui
ont administré la terre jusque-là, ont fini par agir dans leur
intérêt (personnel ou politique). Une telle attitude porte
atteinte à la cohésion sociale sans laquelle aucune
sécurité réelle des droits n'est possible.
La difficulté d'accorder le droit de
propriété à des structures pilotées par des
personnes physiques est encore plus perceptible lorsque l'on considère
les exigences de sécurité foncière. De notre point de vue,
un lien doit être établi entre la durée de gestion du droit
de propriété (par les personnes habilitées à le
faire et pour la période pendant laquelle elles répondent
vraiment de leur gestion) et celle de l'effectivité du droit
accordé aux utilisateurs du foncier. Car la gestion des hommes peut
être sujette à conflits, alors que les conflits sociaux peuvent
fragiliser la sécurité foncière. En effet, la durée
de gestion foncière des hommes est nettement inférieure à
celle des besoins de sécurité foncière. Les
autorités politiques exercent dans le
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meilleur des cas, leur fonction le temps d'une vie humaine,
mais dans la plupart des cas, sur une période d'une quinzaine
d'années tout au plus. La plupart d'entre elles se soucient beaucoup
plus de leur propre bien-être pendant cette période, que des
conséquences des actes qu'elles posent, dans le futur. La durée
légale des entreprises peut quant à elle, aller jusqu'à
quatre-vingt dix neuf (99) ans. Certaines entreprises exercent bien au
delà de cette durée. La véritable sécurité
foncière doit protéger les investissements de ces entreprises
tant que durent leurs activités, et donc beaucoup plus longtemps
après la période de gestion des autorités politiques, et
même au-delà des régimes politiques qui ont institué
la loi.
Pour ce faire, le droit de propriété doit
être détenu par l'Etat en dépit des positions de certains
acteurs du foncier. Nous pensons que la faculté de l`Etat à
exercer un contrôle de la gestion des droits secondaires par les autres
personnes, doit aussi venir de sa détention du droit de
propriété.
Pour sécuriser les investissements, l'Etat doit octroyer
des droits d'usage incontestables sur des périodes suffisamment longues
pour rassurer l'investisseur.
III- LES ROLES DES DIFFERENTES AUTORITES
POLITIQUES III-1- DANS L'EXERCICE DE LA PROPRIETE DE L'ETAT ET
LE CONTROLE DE
LA GESTION DES TERRES
Le Ministre des finances doit être maintenu dans son
rôle actuel et doit être compétent sur l'ensemble des terres
du Burkina, quelques soient les usages auxquels elles sont destinées.
L'unicité juridique de la terre burkinabè, qui résulte de
l'unicité d'autorité, en sera préservée ainsi.
Mais il devra être appuyé dans l'exercice de ses
fonctions par des structures politiques afin que le contrôle de la
gestion des structures coutumières et administratives
décentralisées soit effectué en temps réel par des
structures de même nature. L'exercice du droit de propriété
de l'Etat sera ainsi beaucoup plus perceptible. La mise en oeuvre du
contrôle que l'Etat doit exercer sur la gestion des structures
décentralisées sera ainsi beaucoup plus efficace.
La mise en oeuvre de telles dispositions pourrait se faire de
manière progressive. Les Gouverneurs pourraient par exemple assumer
cette fonction au niveau régional dans un premier temps. Ensuite une
partie de leur responsabilité
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pourrait être conférée à des
structures politiques beaucoup plus déconcentrées au fur et
à mesure.
III-2-DANS LA GESTION DES TERRES
C'est au niveau de la gestion des terres que la dualité
du régime foncier est la plus perceptible. La mise en place
d'institutions locales de manière participative et consensuelle
constitue de notre point de vue la voie d'institution d'une législation
foncière unifiée. La gestion des droits fonciers doit se faire
par stade.
- Le premier stade doit être du ressort
des autorités coutumières. Pour ce faire une loi nationale doit
être prise pour réglementer la constatation et l`exercice des
droits fonciers coutumiers.
Des chartes locales doivent être élaborées
au niveau de chaque commune, entre les détenteurs des droits fonciers
coutumiers et les autorités communales, sur la base de la loi nationale
et en tenant compte de la spécificité des villages, pour
impliquer tous les acteurs dans l'exercice des droits octroyés par la
coutume.
Les autorités communales pourraient intervenir à ce
stade pour constater les différentes occupations et transactions
foncières.
- Le second stade doit être du ressort
des autorités communales. La gestion foncière des
autorités communales doit commencer lorsque la terre a quitté la
compétence de l'autorité coutumière. Le document de
constat de l'occupation ou de la transaction foncière (entre
l'autorité coutumière ou le détenteur de terres
coutumières et l'acquéreur) peut constituer l'acte qui met un
terme à la compétence de l'autorité coutumière. Il
doit être dressé sous la supervision de l'autorité
communale et impliquer la cellule foncière locale du village ainsi que
les représentants du ministre chargé des domaines et des services
concernés par l'activité qui est exercée sur la terre
objet de l'acte.
Les différentes actions de gestion de l'autorité
communale ne doivent commencer qu'après l'élaboration du document
de constat d'occupation ou de transaction foncière.
- Lorsque la transaction est au bénéfice de
l'Etat, d'un de ses services déconcentrés ou d'une structure que
l'Etat appuie, l'interlocuteur de l'autorité coutumière pourrait
être le Gouverneur qui agirait sous le couvert du Ministre des Finances
et par le biais du Service des Domaines.
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- Par souci d'efficacité, la loi doit définir
des délais pour les différentes transactions. L'autorité
coutumière pourrait disposer pour ce faire, d'un délai maximal
pour réagir à toutes sollicitations de l'autorité
politique (centrale ou décentralisée) qui courra à compter
de la date à laquelle la demande de terre est formulée à
son niveau et qui est matérialisée par un document
écrit.
IV- LES DROITS DES DIFFERENTS ACTEURS FONCIERS
Les différents acteurs du développement
économique du Burkina recourent très souvent aux services des
institutions financières nationales et internationales et à
d'autres structures dans le cadre de leurs activités. Celles-ci exigent
que les droits fonciers, donnés en guarantie de leurs différentes
prestations soient sécurisés afin d'offrir une contrepartie
sûre aux ressources qu'elles mettent à leurs dispositions.
Nous essayerons de définir les éléments
qui conditionnent la sécurisation juridique des droits des utilisateurs
et déterminent le degré de sécurité des
investissements. Mais avant, nous proposerons des mesures qui nous paraissent
déterminantes dans la lutte contre la pauvreté et la mise en
oeuvre d'un véritable développement socio-économique. Car
le développement économique de l'ensemble de la
société Burkinabé constitue de notre point de vue, l'une
des plus importantes garanties des droits fonciers.
IV-I QUELQUES MESURES DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
Le développement économique s'entend ici, d'une
progression de la situation économique de l'ensemble des couches
composant la société burkinabè. Les conclusions des
enquêtes menées par l'INSD, révèlent qu'une
importante portion de la société burkinabé vit dans une
situation économique relativement précaire et tire l'essentiel de
ses ressources d'activités liées au foncier. On peut subdiviser
la population burkinabè en trois groupes socio-économiques : les
pauvres (environ 40% de la population), les moins pauvres (environ 40% de la
population) et les riches qui constituent à peu près 20% de la
population.
La portion des riches est celle qui dispose de la majeure partie
des terres faisant l'objet de titres de possession.
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Quant à la plus grande portion de la population, (80%
environ), elle vit dans une situation économique difficile, qui
résulte en partie de la précarité de sa situation
foncière. En effet, selon la Banque Mondiale, il existe un lien
étroit entre la possession foncière, la sécurité
des droits et la lutte contre la pauvreté. Elle a publié un
rapport qui abonde dans ce sens et affirme qu' « une
propriété foncière garantie et l'allègement des
contraintes liées à la cession des terres permettent aux pauvres
de mieux se prendre en charge, améliorent la gouvernance et produisent
des avantages économiques pour tous. 1»
Sur la base des recommandations de ce rapport, nous proposons
que la législation foncière favorise l'accès des pauvres
et des moins pauvres du Burkina à la terre et facilite les
modalités d'acquisition des droits fonciers.
1) Pour ce qui est de l'accès des pauvres à la
terre, les mesures tendant d'abord à privilégier les associations
paysannes, que nous proposions pour les couches vulnérables pourraient
s'étendre à l'ensemble des pauvres et des moins pauvres, pour les
terres destinées aux activités agricoles, pastorales et
piscicoles. En plus de résoudre le problème de l'accès
à la terre, elles pourraient insuffler une nouvelle dynamique de
développement économique en résorbant le problème
d'emploi des pauvres. Car selon des enquêtes menées par la
Direction des Etudes et Programmes du Ministère de l'Agriculture en 1988
et interprétées par Monsieur Djibril TRAORE alors Directeur
Général de l'ERPAD (Études et Réalisation de
Projets d'Aménagement et de Développement), la
propriété collective est plus créative d'emplois que la
propriété privée2.
2) La réduction des droits de mutations aura
l'avantage de permettre à une part importante de la population de
satisfaire aux conditions d'acquisition des titres de possession. Ces mesures
pourraient concerner les terres destinées à tous les usages, et
principalement celles destinées aux activités
précédemment énumérées ainsi qu'à
l'habitation et aux activités commerciales dans les zones ordinaires.
Puisque ces différents domaines sont ceux où s'investit la
majorité de la population. Pour le cas spécifique des mutations
des parcelles destinées à l'habitation dans les zones d'habitats
ordinaires ainsi que celles destinées aux activités agricoles,
pastorales et piscicoles, le droit pourrait être indexé sur la
superficie (comme la taxe
1
http://qo.worldbank.org/VYMIQ2R350
2 www.fao.com/ Archives de la FAO. «
L'Etat, la tenure communautaire et la participation populaire au Burkina Faso
»
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de jouissance), au lieu de porter sur le montant de la
transaction (qui inclut la valeur de la parcelle ou celle des investissements
réalisés et qui décourage ainsi l'investissement).
La situation foncière du Burkina montre aujourd'hui
qu'il y a beaucoup d'utilisateurs qui acquièrent les terres et
n'engagent pas ou ne vont pas au bout des formalités de mutation
à cause de leurs coûts élevés. Cette portion
étant plus importante que la première qui est à mesure de
satisfaire aux exigences financières de mutation, l'insuffisance de
recettes qui pourrait résulter de la baisse des tarifs sera
compensée par les sommes provenant des formalités que cette
portion de la population accomplira pour sécuriser ses
investissements.
IV- 2 -PROPOSITIONS DE RESOLUTION DE QUELQUES PROBLEMES
IV - 2 -1- Les problèmes des habitats spontanés
Les habitats spontanés constituent de véritables
obstacles à la mise en oeuvre des opérations de lotissement et le
contrôle de leur installation ainsi que la précision des
conditions de leur prise en compte pour les attributions doivent être
clarifiés.
Les difficultés causées par les habitats
spontanés proviennent aussi bien des dispositions législatives
que des pratiques des propriétaires fonciers.
En effet, l'article 155 du décret 97-054/PRES/PM
portant modalités d'application de la RAF, permet d'attribuer des
parcelles aux autochtones résidant dans les villages englobés par
les opérations de lotissement. Quant à l'article 156 il donne la
priorité d'attribution aux demandeurs résidents déguerpis.
Le manque de précisions de ces deux (2) dispositions et les pratiques
des propriétaires fonciers coutumiers créent des
difficultés dans les opérations d'attribution des parcelles des
zones nouvellement loties. En effet, que renferment exactement les notions de
déguerpissement, d'autochtones et de résidence ?
- Les résidents déguerpis. Le droit de la
personne déguerpie est-il lié à sa possession d'une maison
duquel il est déguerpi ou au fait qu'elle résidait sur les lieux
du lotissement ? Car plusieurs personnes peuvent occuper la même maison,
avoir l'âge minimum requis pour postuler à la possession d'une
parcelle. Par exemple trois (3) personnes adultes peuvent habiter une maison de
trois pièces (3 chambres), appartenant à l'une d'entre elles ou
même à une tierce personne.
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Chacune d'elles peut occuper une des pièces avec sa
femme et même ses enfants. Si ces personnes sont contraintes de quitter
la maison à cause de l'opération de lotissement, chaque famille
subira le préjudice du déguerpissement. L'article 156 stipule que
le demandeur résident déguerpi est prioritaire. Ces trois
personnes ne sont-elles pas fondées à demander une parcelle
puisqu'elles résidaient toutes sur les lieux avant le lotissement ?
- Les autochtones Comment déterminer
l'autochtone ? Car la notion d'autochtone exige des précisions sur les
origines des populations qui habitent les villages que les autorités
communales ne peuvent définir seules. Face à cette
difficulté, les maires et les préfets associent les
autorités coutumières, ou laissent cette tâche à
leur diligence. Alors que depuis 1984 (date de la première RAF), elles
ne sont plus censées participer aux activités foncières.
Comment contrôler alors la véracité des listes que
celles-ci établissent ?
- La condition de n'avoir jamais été
attributaire d'une parcelle dans la même ville. La gestion des
attributions est laissée à la seule diligence des
autorités communales qui ne disposent pas de moyens logistiques
suffisants pour contrôler les attributions (informatisation
systématique des listes d'attribution, établissement de banques
de données sur les attributions par commune et mise en réseau de
ces informations...). En plus, celles-ci n'ont pas ou ne perçoivent pas
forcement l'intérêt de mener des contrôles sur les
attributions, de nature à rendre effectif le respect de cette condition
pour postuler à une parcelle. En effet, pendant les activités de
lotissements, certaines autorités communales inscrivent dans leurs
priorités, d'attribuer des parcelles à leurs proches (parents et
amis politiques qui ne remplissent pas forcement cette condition) ou d'en
vendre tout simplement quelques unes, soit pour assurer les frais de
lotissement, soit pour se faire un peu d'argent. La règle de l'offre et
de la demande, qui détermine les coûts des biens enseigne que plus
la demande est importante par rapport à l'offre, plus les prix montent.
Le respect de cette condition pour prétendre à une attribution
permettrait d'écarter bien de postulants, ce qui diminuerait la demande
et partant, amoindrirait les prix auxquels les parcelles peuvent être
vendues. Devant un tel calcul, qui s'obligerait à dépenser pour
contrôler le respect de cette condition et agir en même temps
contre ses propres intérêts ?
Au regard de toutes ces difficultés, il convient de
contrôler les installations dans les zones non loties. Pour y parvenir la
mise à contribution des autorités
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coutumières et leurs désintéressements
conséquents, établis en fonction des espaces à lotir qui
leur appartiennent pourraient les amener à conserver leurs terres au
lieu de les vendre à moindre prix aux personnes qui construisent les
habitats spontanés.
Par ailleurs, les opérations de recensements
révèlent de forte densité d'habitants sur les espaces
avant les lotissements. Il n'est pas rare par exemple de recenser trois (3),
quatre (4) ou même plus de logements sur un espace de deux cents
cinquante mètres carrés (250 m2) par exemple; lequel espace
correspond tout au plus à une parcelle dans certains lotissements. Cette
situation (qui est très fréquente) aboutit des fois à
l'établissement de listes de résidents comportant plus de
personnes que de parcelles disponibles sur l'ensemble du lotissement. Comment
satisfaire toutes ces personnes, ainsi que toutes celles qui ont le droit de
postuler, même si elles ne résident pas dans les zones en voie de
lotissement ? Face à cette situation, les autorités communales
fixent des conditions spécifiques d'attributions pour chaque
lotissement. Ces conditions peuvent aussi être subjectives ou servir des
intérêts autres que ceux des populations. Face à ces
difficultés, il convient :
1) de subordonner la prise en compte des personnes occupant
les habitats spontanés par le respect par elles, de conditions
d'occupations des zones non loties, qui soient harmonisées sur
l'ensemble du territoire.
2) de définir des superficies minimales dont
l'occupation peut permettre de recenser une personne comme résidente. La
prise en compte du résident pourrait ainsi être indexée
à la superficie de l'espace sur lequel il a investi au lieu d'être
subordonnée à la seule condition de résidence.
Considérons par exemple une zone où les parcelles loties ont des
superficies de deux cents cinquante (250) mètres carrés. Si dans
cette zone l'on établit que l'occupation de quatre cent (400) ou cinq
cents (500) mètres carrés de zone non lotie donne droit à
l'inscription d'un nom sur la liste des résidents, les personnes qui
installent des maisons sur des superficies de moindre grandeur seront
contraintes de s'associer pour pouvoir postuler à une parcelle au risque
de perdre. L'espace que chacun doit occuper pour espérer obtenir une
parcelle étant supérieure à la superficie d'une parcelle
lotie , le risque d'avoir plus de résidents que de parcelles pourrait
être quelque peu résorbé.
3) d'impliquer les autorités coutumières et les
populations autochtones dans le contrôle des habitats spontanés.
Pour y parvenir, il convient d'instituer un titre d'occupation foncière
coutumière que celles-ci délivreront aux personnes à qui
elles
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cèdent des terres. La délivrance de ce titre ne
devra être possible que pour une superficie au moins égale
à la superficie minimale dont l'occupation peut permettre de se faire
recenser comme résidant dans la zone non lotie. Ainsi, pour la
périphérie des villes telles que Ouagadougou et Bobo-Dioulasso
où la superficie des parcelles des zones d'habitation traditionnelle
peut atteindre 300 ou 400 mètres carrés, les propriétaires
fonciers coutumiers ne doivent pouvoir délivrer de titre d'occupation
foncière coutumière que pour les terres dont les superficies sont
supérieures d'au moins 100 mètres carrés à celles
des parcelles loties. La liste des personnes vivant dans les zones non loties
et pouvant prétendre à une attribution de parcelle doit
être conforme à la situation des personnes détenant les
titres d'occupation foncière coutumière. Cela permettra de
connaître à tout moment la situation exacte de l'occupation des
zones non loties et d'éviter aussi tous les abus qui ont cours dans les
opérations de recensement avant les lotissements.
4) d'appliquer le principe de
l'égalité de tous devant la loi et de réguler les
appétits des autorités coutumières. Celles-ci
n'hésitent pas des fois à exiger des centaines de parcelles ou
à prétexter l'existence de sites de cultes fictifs sur de grands
espaces (de plusieurs hectares) pour en demander l'attribution. La
reconnaissance de prérogatives foncières à
l'autorité coutumières peut se traduire par l'attribution de
quelques parcelles supplémentaires mais doit être
régulée pour éviter les abus.
IV-2-2- Le problème des parcelles non mises ou
insuffisamment mises en valeur
Une importante portion des parcelles attribuées aussi
bien en zone urbaine que rurale ne sont pas mises en valeur ou le sont
insuffisamment. Pendant que la satisfaction des demandes de parcelles est de
plus en plus difficile, certains attributaires ne réalisent aucun
investissement sur les espaces attribués, ne respectent pas les
délais impartis pour s'acquitter des droits et taxes ou pour la mise en
valeur des parcelles. Les délais de mise en valeur et de paiement des
droits et taxes sont pourtant clairement définis par la RAF et sont
connus de la quasi-totalité des acteurs fonciers.
Il convient de veiller au respect strict desdites conditions
et de sanctionner les manquements par des retraits. Car les objectifs de
spéculations foncières ne sont pas toujours étrangers
à ce genre de pratiques. Surtout que les parcelles acquièrent
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toujours de la valeur au Burkina, par le simple fait du temps
qui passe, même si elles ne sont pas mises en valeur. Sinon, comment
expliquer que les populations s'organisent pour mener diverses actions
revendicatives, quelques fois violentes afin d'obtenir des parcelles, au motif
qu'elles n'ont pas de logement ; mais dès qu'elles sont satisfaites, les
rythmes des investissement qui étaient si élevés au moment
où les zones n'étaient pas loties, diminuent ? L'application des
mesures de retrait empêchera une minorité de se faire attribuer
des parcelles qu'elle ne peut mettre en valeur, juste dans le but de
spéculer et de les revendre à prix d'or quelques années
plus tard. Ces mesures doivent être appliquées à toutes les
zones car la spéculation est plus importante dans les zones où
les parcelles sont les plus coûteuses (zones commerciales, industrielles,
résidentielles...)
IV-3- LES DROITS FONCIERS DES UTILISATEURS ET LES
ELEMENTS
DETERMINANTS DE LEUR SECURISATION
La sécurisation des droits détenus sur la terre
est un facteur déterminant du développement économique car
elle constitue l'une des principales exigences du financement de
l`activité économique. Ainsi que nous l'avons expliqué
précédemment, la véritable sécurité provient
beaucoup plus de la non contestation des droits par la société,
que de la nature des droits détenus. Un titre de propriété
ne vaut propriété que si la société reconnaît
le droit du détenteur et le respecte. Il peut être valable
quelques années ou le temps d'un régime politique, mais les
changements à la tête de l'Etat et les exigences sociales qui les
insufflent peuvent fragiliser la sécurité offerte par le titre si
la société l'exige.
Mais les exigences sociales sont plus lentes à
s'exprimer que celles économiques. Pour satisfaire aux impératifs
économiques qui sont actuels, il convient d'offrir aux différents
utilisateurs de la terre, des droits qui protègent effectivement les
investissements réalisés.
Les différents droits démembrés du droit
de propriété prévus par le code civil peuvent être
détenus par les utilisateurs et peuvent sécuriser les
investissements. Il s'agit principalement:
- de l'usufruit des biens immeubles ;
- du droit d'usage et d'habitation ;
- de l'emphytéose ou bail emphytéotique ;
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- du droit de superficie.
Ces droits sont à même de sécuriser les
investissements et les titres permettant de les constater peuvent offrir la
guarantie exigée par les investisseurs et les institutions
financières, si les droits constatés ne sont pas susceptibles de
contestations incontrôlées et s'ils sont acquis pour une
période suffisamment longue (de la même durée que celle des
entreprises par exemple).
C'est une législation foncière au service du
développement et du bien être de l'ensemble de la population qui
peut offrir aux différents acteurs de la vie économique du
Burkina, la sécurité pérenne des droits fonciers. Elle
doit donc être le reflet de la société dont elle veut
servir les ambitions de développement économique, en
intégrant le pluralisme culturel et juridique car « aucune
société n'étant totalement homogène, le pluralisme
juridique est la conséquence du pluralisme culturel.1
»
1 Confère Archives de la FAO au
www.fao.com/ Titre : « le foncier -environnement : fondements
juridico - institutionnels », page 3
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CONCLUSION GENERALE
Les Etats africains ont tous cru à leur accession
à l'indépendance, à l'universalité du régime
civiliste du droit de propriété et de la domanialité
publique. « Le pouvoir de l'exclusivité individuelle qui transforme
la terre ou le fonds en bien, constitue a-t-on pensé, un cadre de
référence inévitable pour une société
moderne. Mais lorsque le droit privilégie la dualité de
l'appropriation privée/publique, il fait abstraction du rapport
traditionnel entre les hommes et semble préférer un rapport
économique homme/bien. Par conséquent la terre-fonds n'est pas
considérée comme un patrimoine mais comme un bien, une chose
monétarisée et appropriée. Cette conception
propriétariste de la terre est antinomique avec la conception
patrimoniale traditionnelle et actuelle des populations locales.1
»
L'inadaptation de la conception civiliste de la
propriété avec celle locale des droits exercés sur la
terre, est à la base de la dualité des régimes fonciers
qui ont administré la terre au Burkina. La difficulté de se
départir de l'héritage colonial, ou de le modeler
profondément pour l'adapter aux réalités socio -
culturelles du Burkina a entretenu cette dualité, éloignant ainsi
la loi de la société burkinabè. Le droit ne doit pas
être une abstraction, mais une réponse à un besoin
d'organisation formelle de la société. Il doit partir de
schèmes élaborés sur la base de données culturelles
pour aboutir à la règle juridique. C'est à ce niveau que
doit s'effectuer la synchronisation entre les normes juridiques et sociales.
Quelque soit la règle codifiée, elle doit provenir du fond
culturel.
Le droit peut-il être cet instrument qui transforme ou
bouleverse les comportements sociaux ? Comment une loi peut-elle s'appliquer
sans tenir compte des réalités et des diversités locales ?
« Selon CARBONNIER, la norme juridique émane de la norme sociale
dont elle constitue la codification des pratiques. C'est pourquoi la
réalité culturelle est une donnée que le droit ne peut
occulter puisqu'il la recouvre. La sociologie du droit souligne, à ce
propos que le droit émane bien des hommes qui le plient à leurs
intérêts mais aussi à leur prudence. La législation
est flexible car soumise à la volonté des hommes, sans quoi le
vent continuel de la
1 Archives de document de la FAO, www.fao.com/
« un droit étatique reposant sur la propriété
foncière ».
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dynamique sociale ne cesserait de le briser en remettant
perpétuellement en cause l'armistice social1. » La
législation foncière du Burkina ne peut obtenir la
légitimité sociale qui la rendra applicable et garantira par ce
fait, les droits fonciers que si elle reflète la société
burkinabè.
La législation foncière qui veut refléter
la société burkinabè et prévenir les conflits
sociaux, doit protéger la propriété des terres afin de la
préserver pour la majorité de la population, les jeunes qui n'ont
pas de droit foncier aujourd'hui ainsi que les générations
futures. Elle doit éviter de favoriser les risques de fractures sociales
en régulant le pouvoir (politique et coutumier) des hommes qui
gèrent la terre. Pour cela, les faveurs de la loi doivent être au
dessus de l'appartenance ethnique ou politique. Le droit de
propriété, droit absolu sur la terre, ne doit pas constituer de
ce fait un instrument aux mains de quelques privilégiés mais un
outil de cohésion sociale, d'une communauté partageant un destin
commun.
Mais la législation foncière doit être
réaliste en reconnaissant l'existence de prérogatives
foncières aux autorités coutumières. Les autorités
politiques doivent prendre la juste mesure des conséquences de
l'institution de textes fonciers irréalistes et accepter d'impliquer
toutes les composantes de la société dans la gestion du
foncier.
C'est seulement à ce prix qu'elles pourront garantir et
pérenniser la paix et la stabilité sociale. Le bimensuel
l'Evènement consacre trois (3) articles de sa seule
publication du 10 janvier 2008, aux problèmes fonciers. Ces trois
articles traitent de problèmes fonciers impliquant les autorités
et les propriétaires fonciers coutumiers dans deux opérations de
lotissement, l'une à Ouagadougou et l'autre dans le village de Bassinko.
Quant au troisième article intitulé `'le foncier rural, une
poudrière meurtrière», il traite de problèmes
fonciers survenus sur des terres rurales et est assez révélateur
du climat qui prévaut actuellement dans plusieurs localités du
Burkina. « Le foncier rural est le théâtre de conflits
itératifs qui finissent souvent par des voies de fait et des massacres.
La zone de l'Est connaît ces derniers temps une effervescence dont les
causes tiennent à des revendications foncières. On se souvient
encore des jacqueries de Baléré où neuf personnes avaient
perdu la vie. Plus près de la capitale, Nakamtenga sise dans la commune
de Koubri a connu des oppositions qui ont failli tourner au drame, n'eût
été l'intervention des sages de la
1 Archives de document de la FAO, www.fao.com/
« un droit étatique reposant sur la propriété
foncière ».
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zone (...). Le foncier rural est aujourd'hui une
poudrière qui risque d'hypothéquer le processus de
décentralisation, si rien n'est fait pour délimiter les
territoires communaux et clarifier les rôles et les compétences
des acteurs. La RAF dont tout le monde semble stigmatiser les limites, continue
pourtant de régir le foncier rural. Et l'on ne semble pas pressé
d'en sortir comme s'il n'y a pas d'autres solutions à l'horizon. Pendant
ce temps, c'est la pagaille qui s'installe sur le terrain avec les drames
humains que l'on ne finit pas de déplorer. .. 1» Avoir
la volonté politique et le courage de partager le pouvoir de gestion du
foncier avec les autorités et les propriétaires fonciers
coutumiers et les associer à toutes les étapes de cette gestion
est la meilleure alternative pour assainir le climat social et faire face aux
conflits qui sont de plus en plus récurrents.
La société burkinabè, à l'instar
de toute organisation humaine, aspire au bien- être. Pour y parvenir, le
préserver et l'améliorer continuellement, elle a besoin de se
développer économiquement. Les ambitions de progrès
économique rendent impérative la sécurité des
droits fonciers des acteurs de développement. L'objectif de la
sécurisation foncière est de garantir l'accès et la
gestion d'un espace à une personne ou à un groupe social. Cette
garantie de maîtrise spatio-temporelle ne peut être assurée
que par un droit qui responsabilise à l'égard des ressources,
stabilise les rapports sociaux, conforte et mobilise les investissements. La
sécurité foncière doit avoir pour fonction, d'harmoniser
les rapports entre les différents systèmes d'exploitation
(moderne et traditionnel) et entre les usagers. Pour cela, et pour qu'elle soit
effective à moyen et long terme, la gestion foncière doit
être envisagée sur trois axes : institutionnel,
règlementaire et décisionnel. Ce dernier est la pierre angulaire
de toute stratégie de gestion.
La difficulté consiste surtout à trouver une
législation foncière suffisamment opérationnelle.
L'appropriation privative ne peut se conforter dans la société
burkinabè où les rapports sociaux et fonciers, s'organisent
davantage au sein du groupe avant de se définir au niveau de l'individu.
En partant du modèle social burkinabè pour asseoir la loi, les
droits fonciers qui en découleront pourront offrir la
sécurité nécessaire à l'investissement et au
développement économique.
Pour ce faire, la politique foncière doit être
une politique des habitudes socio - culturelles du Burkina. Suite aux
études qu'elle a diligenté sur la gestion de la terre et
1 Journal l'Evènement n° 131 du 10 janvier
2008.
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la lutte contre la pauvreté et après
consultation de près de huit cents (800) spécialistes de la
question foncière sur l'ensemble de la planète, la Banque
Mondiale est arrivée à la conclusion que « la politique
foncière est l'unique problématique du développement
durable susceptible d'aider à préserver la paix et la
stabilité, favoriser la croissance économique et un
développement social juste et éclairer une gestion rationnelle
des ressources.1 »
C'est dire que la gestion foncière est à la base
de tout développement social et économique durable. Elle est
d'une telle importance qu'elle doit être l'affaire de toute la
société burkinabè. Nous l'avons réalisé au
fil de nos recherches et tout au long des travaux d'élaboration de cette
étude. Nous avons aussi réalisé l'impossibilité de
traiter de tous les aspects d'un tel sujet par une seule personne, et surtout
dans un document unique. Voilà pourquoi, nous espérons que cette
étude constituera une contribution, si modeste soit-elle, à la
longue et difficile quête d'une législation foncière qui
reflète tous les aspects de la société burkinabè.
Nous espérons enfin, qu'elle sera une approche quelque peu
différente, de la question du foncier et constituera de ce fait, le
début ou la suite de nouvelles perspectives de recherches et de
discussions en vue de l'élaboration d'une législation
foncière, au service de la cohésion sociale et du
développement économique.
1
http://qo.worldbank.org/VYMIQ2R350.
Confère rapport Banque mondiale sur la pauvreté et la gestion
foncière.
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TABLE DES MATIERES
PREMIERE PARTIE : ETUDE SOMMAIRE DES LEGISLATIONS
FONCIERES APPLIQUEES AU BURKINA FASO 9
CHAPITRE 1 : LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE
10
SECTION 1 : LES CARACTERISTIQUES DU REGIME FONCIER
COUTUMIER 10
I - LA PERSONNE HABILITEE A GERER LA TERRE COUTUMIERE : LE CHEF
DE TERRE 10
II - LA NATURE DES DROITS FONCIERS COUTUMIERS 10
II-1:LE DROIT DE PROPRIETE 11
II-1-1 : Le mode d'appropriation de la terre 11
II-1-2 - La constitution du droit de propriété
11
II-1-3- La nature du droit de propriété 12
II-2 : LE DROIT D'USAGE INDIVIDUEL 12
III - LES COMPOSANTES DU REGIME FONCIER COUTUMIER 12
IV - LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE 13
IV-1- LES OBJECTIFS DE LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE 13
IV-2- LE CONCEPT D'APPROPRIATION 13
SECTION 2 - LES FORCES DE LA LEGISLATION FONCIERE
COUTUMIERE 16
I - LE RESPECT DES PRINCIPES FONCIERS COUTUMIERS 16
II - L'OCCUPATION OBLIGATOIRE DE L'ESPACE, UN PREALABLE A
L'ACQUISITION DES DROITS
FONCIERS COUTUMIERS 16
III - L'EXCEPTION AU PRINCIPE D'INALIENABILITE DU DROIT DE
PROPRIETE 17
SECTION 3 - LES INSUFFISANCES DE LA LEGISLATION FONCIERE
COUTUMIERE 18
I - L'IMPOSSIBILITE D'ETABLISSEMENT DE LA PREUVE DE DROIT 18
II - LA PRECARITE DES DROITS ACCORDES AUX PARTICULIERS 18
III - LA PLURALITE DES REGIMES COUTUMIERS, UN FACTEUR
D'EFFRITEMENT DE L'UNITE
NATIONALE 19
IV - LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE, UNE AFFAIRE D'HOMMES
19
CHAPITRE 2 : LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE
20
SECTION 1- L'EVOLUTION DE LA LEGISLATION FONCIERE
REGLEMENTAIRE 20
I - LE REGIME FONCIER COLONIAL 20
I-1 - LA DISTINCTION DOMAINE PUBLIC - DOMAINE PRIVE 20
I-1-1- Le domaine public 20
I- I-2 : Le domaine privé 21
I-2- LES CARACTERISTIQUES DU REGIME FONCIER COLONIAL 21
I-2-1- La personne habilitée à gérer les
droits fonciers : le conservateur de la propriété
foncière 21
I-3 : LES DIFFERENTS DROITS DU REGIME FONCIER COLONIAL 22
I-4-LES MODES DE CONSTITUTION DES DROITS REELS IMMOBILIERS DU
REGIME
FONCIER COLONIAL 22
I-4-1 : Le régime de l'immatriculation 22
I-4-2 : Le régime du titre foncier indigène 26
I-4-3 : Le régime du livret foncier 27
II- LE REGIME FONCIER POST COLONIAL 28
III- LE REGIME FONCIER REVOLUTIONNAIRE ET POST- REVOLUTIONNAIRE
29
III-I- LE DOMAINE FONCIER NATIONAL (DFN) 29
III-1-1- La constitution du DFN et la propriété de
l'Etat 30
III-I-2- Les caractéristiques des biens du DFN 30
III - 2- LE DFN ET LA PROPRIETE DE L'ETAT 30
III-2-2- Le D.F.N. est de plein droit propriété de
l'Etat. 31
III-3 - LE MODE DE CONSTITUTION DU DROIT DE PROPRIETE :
L'IMMATRICULATION 31
SECTION 2 - LES CARACTERISTIQUES DE LA LEGISLATION
FONCIERE REGLEMENTAIRE 32
I - L'UNICITE D'AUTORITE SUR LA TERRE BURKINABE 32
II - LA PERSONNE QUI GERE LA TERRE : L'AUTORITE POLITIQUE 33
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III - LES OBJECTIFS DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE
33
IV- LES MODES D'OCCUPATION DES TERRES 34
IV-1- LES TITRES DE JOUISSANCE 34
V-2- LE TITRE DE PROPRIETE 35
SECTION 3 - LES FORCES ET LES FAIBLESSES DE LA
LEGISLATION FONCIERE
REGLEMENTAIRE 35
I - LES FORCES DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE 35
I -1 -L'INSTITUTION DU DROIT DE PROPRIETE 35
I-2- L'ANNULATION DES DROITS DES PARTICULIERS PAR L'EXERCICE DE
LA
SOUVERAINETE DE L'ETAT 36
II - LES INSUFFISANCES DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE
36
II -1- L'INADAPTATION DES REGLES DE LA LEGISLATION FONCIERE
REGLEMENTAIRE 37 II - 2 - LES FREQUENTES MODIFICATIONS DES DISPOSITIONS DE
LA LEGISLATION
FONCIERE REG LEMEMTAIRE 37 II- 3- LE MANQUE DE COHERENCE ENTRE
PRATIQUES ADMINISTRATIVES ET
DISPOSITIONS LEGISLATIVES 39
II-3- 1 - Au niveau des structures de gestion 39
II 3- 2- Au niveau des services d'appui 40
II - 4 - «L'IMMUNITE JURIDIQUE» DES AUTORITES
COUTUMIERES 41
II - 5 - LE PROBLEME DES HABITATS SPONTANES 42
II - 6 - LA SPECULATION FONCIERE 43
CHAPITRE 3 : ANALYSE DU STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE DU
BURKINA 45
SECTION 1 : LES POINTS DE DIVERGENCE ET DE CONVERGENCE
DES DIFFERENTES LEGISLATIONS FONCIERES 46
I - LES POINTS DE DIVERGENCE 46
II- LES POINTS DE CONVERGENCE 46
III - QUELQUES RAISONS DES DIFFICULTES D'INSTITUTION D'UNE
LEGISLATION FONCIERE
UNIQUE 47
SECTION 2 : LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE
49
I - LA PROPRIETE ABSOLUE DE L'ETAT 49
II - LA DUALITE DES INSTANCES DE REGLEMENT DES CONFLITS 50
III - LES EFFETS DE LA DECENTRALISATION INTEGRALE 51
CONCLUSION PARTIELLE 53
DEUXIEME PARTIE : PROPOSITION DE REFORME 55
CHAPITRE 1 : ETAT DES LIEUX DES PROJETS DE REFORME EN
COURS : LA POLITIQUE NATIONALE DE SECURISATION FONCIERE EN MILIEU RURAL
56
SECTION 1 : PRESENTATION DE LA POLITIQUE NATIONALE DE
SECURISATION FONCIERE EN MILIEU RURAL 56
I - PRESENTATION DU DOCUMENT DE PNSFMR 57
I-1- PREMIERE ORIENTATION : RECONNNAITRE ET PROTEGER LES DROITS
LEGITIMES DE L'ENSEMBLE DES ACTEURS RURAUX SUR LA TERRE ET LES RESSOURCES
NATURELLES 57 1-2 - DEUXIEME ORIENTATION : PROMOUVOIR ET ACCOMPAGNER LE
DEVELOPPEMENT D'INSTITUTIONS LEGITIMES A LA BASE 57 1-3 TROISIEME
ORIENTATION : CLARIFIER LE CADRE INSTITUTIONNEL DE GESTION DES CONFLITS AU
NIVEAU LOCAL ET AMELIORER L'EFFICACITE DES INSTANCES LOCALES DE
RESOLUTION DES CONFLITS 58
1-4 - QUATRIEME ORIENTATION : AMELIORER LA GESTION DE L'ESPACE
RURAL 58
I-5- CINQUIEME ORIENTATION : METTRE EN PLACE UN CADRE
INSTITUTIONNEL COHERENT DE GESTION DU FONCIER RURAL 58
I-6- SIXIEME ORIENTATION : RENFORCER LES CAPACITES DES SERVICES
DE L'ETAT, DES
COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE LA SOCIETE CIVILE EN MATIERE
FONCIERE 59
II - CONCLUSIONS DES ATELIERS DE CONCERTATION SUR LA PNSFMR 59
III - CARACTERISTIQUES DE L'AVANT-PROJET DE LOI DE SECURISATION
FONCIERE EN MILIEU
RURAL 59
III-1- LE SERVICE CHARGE DE LA GESTION DE LA TERRE RURALE 60
III-2- LA NATURE DES DROITS SUR LA TERRE RURALE 60
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III-2-1 Le droit de propriété 60
III-2-2- les droits d'usage 61
SECTION 2 : LES FORCES DE LA PNSFMR 61
I - L'APPROCHE POLITIQUE 61
II - LA PRISE EN COMPTE DES DROITS ACQUIS EN DEHORS DE LA LOI
REGLEMENTAIRE 62
SECTION 3 : LES INSUFFISANCES DE LA PNSFMR 63
I - L'INADEQUATION ENTRE LA VOLONTE POLITIQUE ET LA PORTEE DE LA
PNSFMR 63
II - LA REDEFINITION DU STATUT DE LA TERRE 64
III - LE STATUT CONFUS DE L'INSTANCE QUI GERE LA TERRE RURALE
65
IV - LA NATURE INADAPTEE DES TERRES REVETUES DU CARACTERE DE
DOMANIALITE
PUBLIQUE 66
V- LA PERSISTANCE DE LA DUALITE DES REGIMES FONCIERS 67
VI - L'OUBLI DES COUCHES VULNERABLES 68
CHAPITRE 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE
COHESION SOCIO - CULTURELLE ? 70
SECTION 1 : LES ELEMENTS DETERMINANTS DE LA COHESION
SOCIO - CULTURELLE 71
I - LES REALITES CULTURELLES DU BURKINA 71
I - 1 LA LOI ET LA COUTUME 71
I - 2 - LA LEGISLATION FONCIERE UNIFIEE 71
II - LES REALITES SOCIALES DU BURKINA 74
II - 1- PRESENTATION DE LA CARTE SOCIALE DU BURKINA 74
II-1-1 - Présentation de la structure de la population du
Burkina 74
II-1-2- Quelques observations sur la carte sociale du Burkina
75
II - 2 - ELEMENTS CONCEPTUELS D'UNE LA LEGISLATION FONCIERE,
OUTIL DE
COHESION SOCIALE 76
SECTION 2 : DEFINITION DU STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE
79
I - LES PERSONNES CHARGEES DE LA GESTION DE LA TERRE 79
II - LE DROIT DE PROPRIETE 80
CHAPITRE 3 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ? 83
SECTION 1 : LES ELEMENTS DETERMINANTS DU DEVELOPPEMENT
ECONOMIQUE 83
I - LE ROLE DE LA LEGISLATION DANS LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE
84
I- 1- LA LOI ET LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE 84
I-2- LA SECURISATION FONCIERE 85
I-2-1 - Définition 85
I-2-2- Les éléments déterminants de la
sécurisation foncière 85
II - LES DIFFERENTS ACTEURS DU DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE 87
II-1- LES ACTEURS POLITIQUES 87
II-2- LES UTILISATEURS DE LA TERRE 88
II-3 - LES AUTRES PERSONNES PHYSIQUES ET MORALES 88
III - QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES ROLES DES ACTEURS DE
DEVELOPPEMENT
ECONOMIQUE 88
III-1- LES INSTANCES CHARGEES DE LA GESTION DES TERRES 88
III-2- L'EXERCICE DU DROIT DE PROPRIETE 89
SECTION 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, COMME OUTIL DE
DEVELOPPEMENT
ECONOMIQUE ? 89
I - PRESENTATION DE LA SITUATION DE LA PAUVRETE AU BURKINA 90
II - LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE 90
III- LES ROLES DES DIFFERENTES AUTORITES POLITIQUES 91 III-1-
DANS L'EXERCICE DE LA PROPRIETE DE L'ETAT ET LE CONTROLE DE LA
GESTION DES TERRES 91
III-2-DANS LA GESTION DES TERRES 92
IV- LES DROITS DES DIFFERENTS ACTEURS FONCIERS 93
IV-I QUELQUES MESURES DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE 93
IV- 2 -PROPOSITIONS DE RESOLUTION DE QUELQUES PROBLEMES 95
IV - 2 -1- Les problèmes des habitats spontanés
95
IV-2-2- Le problème des parcelles non mises ou
insuffisamment mises en valeur 98
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IV-3- LES DROITS FONCIERS DES UTILISATEURS ET LES ELEMENTS
DETERMINANTS DE LEUR SECURISATION 99
CONCLUSION GENERALE 101
TABLE DES MATIERES 105
BIBLIOGRAPHIE 109
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BIBLIOGRAPHIE
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J.B FOTSING : Le pouvoir fiscal en Afrique
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l'ENAREF, année scolaire 2003-2004
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Moussa TRAORE : Cours de Législation
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l'ENAREF, année scolaire 2006-2007
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OUAGADOUGOU, 24-25 Octobre 2003
GRAF : Politiques foncières et
développement durable : les voies
de l'élargissement du débat
Actes des journées nationales du foncier
OUAGADOUGOU, 30 Novembre - 1er Décembre
2001
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
TEXTES DE LOI, CODES ET DOCUMENTS DIVERS
- Constitution du Burkina Faso
- Code civil
- Déclaration universelle des droits de l'Homme
- Décret du 26 Juillet 1932 réorganisant le
régime de la propriété foncière en Afrique
Occidentale Française
- Décret du 8 Octobre 1925 instituant un mode de
constatation des droits fonciers des indigènes
- Décret 55-580 du 20 Mai 1955 portant
réorganisation foncière et domaniale en Afrique Occidentale
française
- Loi 77-60/AN du 12 juillet 1960 portant règlementation
des terres du domaine privé de la Haute Volta
- Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 04 Août 1984
portant RAF au Burkina Faso
- Décret n° 85-404/CNR/PRES du 04 Août 1985
portant application de la RAF au Burkina Faso
- ZATU n° AN-VIII-0039 Bis/FP/PRES du 04 juin 1991 portant
RAF au Burkina Faso
- KITI n° AN-VIII-0328 TER/FP/PRES/PLAN-COOP du 04 juin 1991
portant application de la RAF au Burkina Faso
- Loi 014/96/ADP du 23 mai 1996 portant application de la RAF au
Burkina Faso
- Décret n° 97-054/PRES/PM/MEF du 06 Février
1997 portant conditions et modalités d'application de la RAF au Burkina
Faso
- Loi n° 006/97/ADP du 31/01/1 997 portant Code Forestier au
Burkina Faso - Loi n° 03-2003/AN du 08/05/2003 portant Code Minier au
Burkina Faso
- Loi n° 055-2004/AN du 21/12/2004 portant Code
Général des Collectivités
Territoriales au Burkina Faso
- MAHRH : Documents portant Politique Nationale de
Sécurisation Foncière en Milieu Rural, Burkina Faso, Août
2007
Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina ?
Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr
- Journal « L'observateur paalga » n° 7024 du
3-12-2007 - Journal « Le Pays » n° 2881 du 22-05-2003
- Journal « Le Pays » n° 3956 du 18-09-2007
- Journal bimensuel « L'évènement »
n° 131 du 10-06-2008
- Archives FAO
- Dictionnaire « Le petit Larousse illustré »
- Code des Impôts Directs et Indirects du Burkina Faso
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