"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
"Pour une remise en cause du maillage
politico- administratif français
?
Exemple de la limite départementale et
régionale entre Pau et Tarbes."
INTRODUCTION GÉNÉRALE.
"La France, qui a toujours révéré ses
découpages internes historiques, constate aujourd'hui qu'ils s'adaptent
de plus en plus mal aux exigences économiques, sociales, voire
administratives. On déplore, selon les sensibilités et les
enjeux, un découpage communal archaïque, des départements
devenus trop petits et trop grands, des régions parfois sans logique, la
difficulté à faire entrer dans la réalité
institutionnelle des concepts tels que le "bassin de vie", les
réticences à créer des territoires transfrontaliers, en un
mot une forme d'exception française comme toujours aussi attachante
qu'exaspérante".
Cette citation de Jean-Marc et Philippe
Benoit et de Daniel Pucci écrite au
début de la conclusion de leur ouvrage sur la "France
redécoupée", fait état d'une situation qui en France
pose aujourd'hui évidemment de nombreux problèmes. En effet, si
en 1789 le maillage politico-administratif français constituait un outil
du pouvoir central lui permettant d'assurer correctement ses fonctions
régaliennes de base (la justice, la police et l'armée), 200 ans
plus tard, ce même maillage politico-administratif français doit
faire face à une double évolution. D'une part, la mise en oeuvre
des nouvelles compétences de l'État (dans le domaine
économique et social notamment, et ce depuis un siècle environ :
1914, 1929, 1936, 1946, etc...) à partir d'un maillage ancien
génère des difficultés : la création des 22
régions de programme en 1956, et leur renforcement les décennies
suivantes, procède ainsi de cette évolution qui oblige le pouvoir
central à créer de nouveaux points de repères (donc de
mettre en place de nouvelles mailles, dont la géométrie est
discutable). D'autre part, nous assistons à une modification dans la
répartition des pouvoirs depuis les lois de décentralisation de
1982- 1983. Dans ce dernier cas, la redistribution du pouvoir entre le local et
le national nécessite que chaque maille politico-administrative soit
pertinente pour le citoyen et l'acteur socio- économique ; or cela est
quasiment impossible, car une dispersion des compétences survient et que
les limites (les mailles donc) ne collent pas avec les territoires des hommes
qui ont fortement évolué, surtout depuis les années 1960.
Il faudrait ainsi un niveau (voire deux) de participation locale avec des
limites dans lesquelles le citoyen et l'acteur socio-économique se
retrouvent, ce qui n'est actuellement pas le cas.
Comme nous l'avons dit auparavant, le maillage
politico-administratif français est ancien, mais il est surtout
inadapté aux logiques actuelles de gestion et de contrôle de
l'ensemble du territoire national qui sont celles développées par
l'État (le pouvoir centralisé). Cette inadaptation conduit
à de nombreuses remises en cause, à de nombreuses critiques : ces
dernières sont parfois directes ou indirectes, longuement
développées ou allusives, mais de plus en plus prégnantes
dans les discours, qu'ils soient ceux de géographes,
d'économistes de politiciens, de politistes, ou d'autres personnes
intéressées par la question.
L'objet de notre réflexion consiste donc à
réfléchir sur les rapports (et plus précisément sur
l'inadaptation qui existe en France) entre le maillage politico-administratif
et l'espace socio- économique, en se focalisant particulièrement
sur la pertinence et la validité des mailles départementales et
régionales, utilisées comme outil dans la gestion et le
contrôle de ce même
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
espace socio-économique. En effet, si ce dernier a
évolué et évolue constamment, le maillage
politico-administratif français, quant à lui, est le même
depuis 200 ans. Certes, il fût établi, en partie, pour ne pas
correspondre aux nombreux territoires pratiqués par la
société civile de cette fin de 18° siècle, or
aujourd'hui, les rapports de l'État et de l'homme à l'espace ne
sont plus les mêmes, comme nous l'avons expliqué auparavant.
De même, dans ce mémoire, nous nous focaliserons
essentiellement sur les circonscriptions administratives, tout en sachant que
certaines sont aussi des circonscriptions électorales. Notre but n'est
pas en effet de remettre ici en cause les modalités d'élection
des représentants politiques français.
Finalement, les anciens cadres territoriaux (communes, cantons,
arrondissements, départements et régions) et leurs mailles
respectives, constituent-ils une entrave au développement des nouvelles
logiques d'organisation de l'espace socio-économique français
(liées, par exemple, aux nombreuses mobilités
géographiques) ? Autrement dit, ces anciens cadres territoriaux sont-ils
toujours pertinents et valides, sachant que les rapports de l'État et de
l'homme à l'espace ont profondément évolué ?
De tout ce développement, découle notre
problématique, formulée sous forme interrogative :
le maillage politico-administratif français correspond-il aux
logiques actuelles d'organisation, de gestion et de contrôle de l'espace
socio-économique ?
Autrement dit, en quoi ce maillage politico-administratif
ancien nuit-il aux
recompositions territoriales qui se développent
actuellement sur l'ensemble du territoire national français
?
Pour nous aider dans cette réflexion, nous posons ici
deux hypothèses, en partie déjà
évoquées précédemment, qui représenteront en
quelque sorte dans ce mémoire notre fil directeur :
* Le maillage politico-administratif français
actuel est inadapté à une gestion et un contrôle performant
et objectif de l'espace socio-économique.
* Il y a par conséquent nécessité
de procéder à une réforme, une refonte de ce maillage, ou
du moins de certaines mailles politico-administratives, afin de rétablir
la cohérence dans l'articulation et l'adaptation des différentes
logiques en présence.
Dans cette perspective, le plan que nous avons retenu s'articule
ainsi en trois parties :
* La première partie développe les
concepts, la problématique et la
méthodologie : "Maillage politico-administratif et espace
socio-économique : une adaptation en France de plus en plus
difficile".
Nous expliquerons ainsi ce qu'est un maillage, nous
développerons aussi la formation des communes, des départements
et des régions, pour terminer par la mise en évidence des
nombreuses modifications et évolution de l'espace
socio-économique, ainsi que les remises en causes auxquelles nous
faisions allusion auparavant.
* La seconde partie est constituée d'une
étude de cas : "Le contact
Pyrénées-Atlantiques - Hautes-Pyrénées :
recompositions territoriales et discontinuités géographiques
entre Pau et Tarbes".
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politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Ce terrain d'enquête, ou étude de cas, du fait de sa
proximité et de son caractère original, constitue pour nous un
support nécessaire mais non suffisant d'argumentation et de recherche.
Ainsi, à partir de cet exemple, nous analyserons plus finement certains
phénomènes qui remettent en cause actuellement le maillage
politico-administratif français.
* La troisième partie est une ouverture du
sujet : "Les solutions à envisager : une réforme
française est-elle nécessaire ?".
En partant des recompositions territoriales mises en
évidence dans la seconde partie, nous montrerons quelles sont les
perspectives d'avenir et les avantages qu'apporteraient un développement
plus général et global des espaces projet français, tels
que les "réseaux de villes" ou encore les "pays".
Sans vouloir nous enfermer dans une théorie bien
précise, notre démarche sera dans ce mémoire
essentiellement dialectique, tant cette théorie
peut nous permettre de comprendre, d'analyser et de dépasser les
paradoxes et les contradictions qu'offre la problématique qui nous
intéresse. Il s'agit pour nous de soulever ici une problématique
que nous aimerions développer plus longuement dans le cadre d'une
thèse de Doctorat, à savoir celle de l'avenir du maillage
politico-administratif français, ainsi que celle (la
problématique) des échelles politico-administratives et
géographiques pertinentes pour l'aménagement du territoire, face
aux différentes dynamiques (géographiques, économiques,
sociales,...) auxquelles nous assistons quotidiennement.
Ainsi, et compte-tenu des exigences inhérentes à la
rédaction d'un mémoire de D.E.A., nous soulèverons ici
beaucoup d'interrogations auxquelles nous apporterons peu de réponses,
ou alors de manière très imprécise. Cependant, les
contraintes temporelles et matérielles rencontrées cette
année ne sont pas totalement étrangères à cet
état de fait...
Première Partie :
Maillage politico-administratif et espace
socio-économique : une adaptation en France de plus en plus
difficile.
Procéder à une remise en cause du maillage
politico-administratif français, nécessite auparavant d'expliquer
(dans la mesure du possible) les finalités de ce dernier, de le
définir et de décrire sa formation. De même, il est
nécessaire aussi de décrire et d'étudier
l'évolution des rapports (de force) qui se sont établis entre ce
dernier et l'espace socio-économique, ainsi que d'analyser, toujours
dans la mesure du possible, les différentes logiques qui sont à
l'origine de l'évolution de ces différents ensembles. Il
apparaît ainsi que les années 1960 constituent un tournant majeur
dans les rapports de force ainsi établis. Cette césure traduit
une inversion des tendances dans les logiques de contrôle et de gestion
de l'ensemble du territoire national, ainsi qu'une modification majeure dans
l'organisation et la structuration de l'espace socio-économique. La
perspective historique permet en effet un éclairage très
intéressant des problèmes que soulève l'évolution
des rapports de l'homme à l'espace, notamment ces dernières
décennies. L'articulation de nos deux sous-parties selon une
structuration "avant" et "après" la décennie 1960,
participe ainsi de cette logique.
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politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Les rapports dialectiques qui découlent de la
confrontation des différentes logiques en présence s'inversent
eux aussi avec la décennie 1960, d'où les remises en cause
(actuelles) que ce mémoire se propose d'étudier.
Compte-tenu de notre choix et de notre terrain d'étude,
notre développement insistera surtout sur les circonscriptions
administratives (et peu sur les circonscriptions électorales, quand
l'espace étudié associe directement les deux) que constituent les
départements et les régions. Ces deux entités, l'une
ancienne et l'autre récente, sont très étroitement
liées. Leurs mailles respectives sont aujourd'hui criticables autant
dans leur processus de mise en place et d'évolution que dans leur forme,
ce qui constitue une autre forme de dialectique (celle du processus et de la
forme) qui sera abordée dans le développement qui suit.
A) - Le maillage politico-administratif français
: définition, formation et rôle jusqu'aux années 1960.
I - Qu'est-ce qu'un maillage ? Pourquoi mailler l'espace
?
Le terme de maillage est une notion polysémique :
polysémique car il présente plusieurs acceptions selon les
auteurs, et c'est une notion par conséquent (et non pas un concept)
puisqu'il est difficile de lui donner une définition unique admise par
tous. Dans le développement qui suit, nous allons tenter de mieux le
définir, afin de préciser quel sens nous lui donnons dans ce
mémoire.
Le maillage est donc l' "ensemble des filets qui situent les
lieux dans les mailles de l'appropriation et la gestion du territoire" ;
c'est aussi un "principe de partition opératoire et socialisé
de l'espace".
Cette définition de Roger Brunet (et des
co-auteurs), qui sous-tend de nombreuses implications et interrogations, est
essentielle dans le cadre de notre travail. Ainsi (et a fortiori
aujourd'hui), l'espace est fondamentalement maillé ou"parti".
De ce fait, les processus d'appropriation conduisent à une partition de
l'espace qui fait apparaître des mailles (maille :"espace
délimité, base d'un découpage du territoire pour
l'appropriation ou pour la gestion"). Le maillage constitue par
conséquent un relais et un outil du pouvoir dont le but est de
maîtriser une étendue donnée. Quand cette dernière
est de grande taille, l'État procède à une
délégation de pouvoir qui engendre une organisation
hiérarchique permettant le contrôle et la gestion du territoire
par et pour le pouvoir. Il s'agit donc tout simplement "de diviser
pour régner et pour coexister".
Dans cette perspective, nous traitons ici du maillage au sens
général du terme, sans procéder à des distinctions.
Or, il en est une fondamentale pour nous : celle qui distingue les logiques
politico-administratives des logiques socio-économiques.
Les premières engendrent un maillage
(politico-administratif) dont le but est de diviser et d'organiser l'espace, de
contrôler ce dernier ainsi que les hommes qui le peuplent, et cela de la
manière la plus optimale possible. Les mailles qui en résultent
sont ainsi nettes et claires, objectives et objectivées, et bien
définies dans l'espace. Elles sont aussi relativement statiques,
notamment à l'échelle d'une vie humaine (cf par exemple les
limites qui sont
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dessinées sur les cartes topographiques, et que nous
retrouvons d'une édition à l'autre, alors que de par et d'autre
de ces mêmes limites la physionomie d'ensemble a parfois fortement
évolué).
Les secondes, à l'inverse, engendrent plus de gradients
que de mailles. En effet, la partition de l'espace qui résulte des
logiques socio-économiques entre pôles (de part et d'autre d'axes,
de frontières, etc...), met en évidence des mailles floues,
incertaines, évanescentes (nous avons donc plutôt affaire à
des gradients, à des formes transitionnelles, et non pas à des
discontinuités ou des mailles bien affirmées), difficilement
objectivables, mais pourtant réelles et objectives. Ces gradients, quant
à eux, sont essentiellement dynamiques, à la fois dans l'espace
et dans le temps (cf par exemple la difficulté à définir
les limites des espaces urbains, celles des espaces périurbains et
celles des espace ruraux ; il en est de même pour les aires d'influences
des villes : jusqu'où s'étendent-elles réellement, quelles
sont leurs formes précises ?...).
Les relations qui s'établissent entre le maillage (en
général), les mailles qui le constituent, et les gradients
résultant des logiques développées
précédemment, sont de type dialectique, les uns
influençant les autres, et inversement. De même, il ne faut pas
perdre de vue qu'une maille (et ce, quelle que soit la logique qui en est
à l'origine) est à la fois un contenant et un contenu. Partant de
là, d'autres relations dialectiques s'établissent ici, en
l'occurrence entre le processus et la forme des mailles
considérées.
Plus largement, il s'agit ainsi de la dialectique de la forme
et du fond, de la forme et du processus (donc de celle du contenant et du
contenu) : "il ne s'agit pas (...) de concevoir l'espace comme un contenant
(un cadre statique) à l'intérieur duquel gigoteraient des hommes
contenus, comme des mouches dans un bocal. La dialectique du contenant et du
contenu est plus riche. C'est le rapport du fond et de la forme".
Si les espaces et les gradients socio-économiques sont
dynamiques dans l'espace et dans le temps, le maillage et les mailles
politico-administratives ne sont pas cependant complètement statiques,
figés pour toujours. En effet, il arrive parfois à ces derniers
d'évoluer, même de disparaître, quand le pouvoir en place le
décide et que les dynamiques socio-économiques mettent en
évidence la nécessité d'une réforme, d'une
révision ou au moins d'une modification (comme dans le cadre d'un Plan
d'Occupation des Sols, par exemple).
Le maillage constitue donc un des éléments
clé de l'organisation de l'espace géographique, espace sur lequel
se confrontent de nombreuses logiques telles que celles que nous venons de
développer et de mettre en évidence. Jusqu'aux années
1960, et depuis plusieurs siècles, le maillage politico-administratif
français n'existait que par et pour le pouvoir en place (l'État),
dont le but était de gérer, de contrôler et d'organiser
l'espace (français). Instrument et outil donc du pouvoir, il se
décomposait en quatre niveaux hiérarchiques (avant que ne soit
formée la région) emboîtés dont nous allons
décrire maintenant la formation.
II - La formation des communes, des cantons, des
arrondissements et des départements.
La formation des communes, des cantons, des arrondissements et
des départements, tels que nous les connaissons actuellement, est le
fruit de la Révolution Française. Reprenant les anciens cadres
territoriaux en les modifiant plus ou moins selon leurs volontés et
leurs idéaux, les constituants ont d'abord créé les
départements et les communes, les cantons et les
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arrondissements constituant les divisions ultérieures du
département.
A) - La formation des départements
français.
Succédant plus ou moins aux vieilles provinces de la
France d'Ancien Régime qui constituaient les divisions essentielles du
royaume depuis l'époque féodale, les départements sont
créés par l'Assemblée Constituante en 1789-1790. Ils
résultent de la volonté de redécouper l'espace national
sur des bases plus égalitaires, c'est-à-dire de mettre fin aux
privilèges (des différents territoires présents en
France), auxquelles s'ajoute aussi une volonté d'unification et de
centralisation. Il s'agit donc, pour les Constituants, de briser les anciens
cadres de vie établis depuis de nombreux siècles, formant de
véritables territoires géohistoriques.
Le support de l'élaboration de la carte de ces
départements est principalement la carte de Cassini au 1/86400
ème (de la dynastie Cassini en réalité), et qui constitue
le document cartographique de référence en cette période
de Révolution Française.
A l'origine, le nouveau maillage administratif devait être
purement géométrique et égalitaire. Les circonscriptions
ainsi obtenues "devaient être les ressorts d'un système
d'assemblées emboîtées suivant une hiérarchie
à trois degrés (départements, districts et cantons) et
suivant une progression par multiple de 9 (81 départements, 9 districts
par département, 9 cantons par district), chaque instance
inférieure étant étroitement subordonnée à
l'instance supérieure. Chaque département devait être un
carré de 18 lieues de côté, contenant 9 districts
carrés de 6 lieues de côté chacun, ceux-ci étant
eux-mêmes composés de 9 cantons de 2 lieues sur 2 chacun".
Ce découpage géométrique s'oppose ainsi
radicalement aux anciens pays et provinces géohistoriques, dont les
limites (ou frontières), plus ou moins floues, étaient le
résultat d'une lente évolution qui s'était
opérée au fils des siècles. Sieyès est d'ailleurs
l'un de ce hommes pour qui "la France ne doit point être un
assemblage de petites nations qui se gouverneraient séparément en
démocraties".
Finalement, les Constituants décident "d'accorder un
assez large respect aux convenances locales, aux anciennes limites et
réalités géographiques (topographie, répartition de
population, moeurs, etc...) dans les délimitations nouvelles ;
cependant, la nécessité de fractionner les provinces en
circonscriptions de moindre étendue et à peu près
égales est maintenue. La rigidité du modèle
géométrique se trouve donc nuancé sur le plan des
tracés, mais non pour ce qui est de l'extension des
circonscriptions".
Cependant, l'Assemblée Constituante et le Comité de
Constitution (des départements) posent une règle importante et
à respecter, celle de l'accessibilité aux chefs-lieux : chaque
chef-lieu de département doit être accessible de n'importe quel
point de ce département, et cela en moins d'une journée de
voyage. Or cette règle ne tient pas compte du réseau urbain
préexistant. En effet, à l'époque
considérée, la ville inspirait de la méfiance et de
l'hostilité, d'où le faible intérêt qu'on lui a
d'abord porté dans le découpage des départements.
Finalement, l'afflux massif de revendications urbaines pour tenir compte du
rôle des villes dans la polarisation de ces (futurs) espaces
départementaux, contrebalance alors l'idée de départ.
D'une géométrie absolue nous passons ainsi à une
géométrie relative, plus respectueuse des pratiques
socio-spatiales en vigueur, de la mobilité des hommes et des biens.
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Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
"La départementalisation apparaît finalement
comme le résultat d'un compromis entre plusieurs logiques, ce qui
conduit à reconsidérer le reproche d'arbitraire qui lui a souvent
été adressé". La part du local a donc
été aussi importante que celle du national dans la mise en place
de ces découpages. Les mailles de ces nouveaux départements (83
en 1790, et 96 aujourd'hui) retrouvent ainsi souvent celles des anciennes
provinces auxquelles ils succèdent, d'où une appropriation et une
légitimation relativement rapide de ces espaces, autant par les
populations locales que par le pouvoir désormais centralisé.
Par la suite, deux lois de l'an VIII (1799) et l'an IX
créent les arrondissements et les cantons. L'arrondissement est ainsi
une division du département, sans budget ni assemblée
élue, mais dans laquelle l'État est représenté par
un sous-préfet (il y en a 329 actuellement). Quant au canton (il y en a
3828 en 1990, selon le R.G.P. de 1990), il constitue une division de
l'arrondissement créée notamment en vue des élections
à l'assemblée départementale, et aussi un niveau
organisationnel de base destiné à la gestion du
département (gendarmerie, collège, E.D.F., etc...). Pour chaque
canton un conseiller général est élu pour six ans. Le
canton est généralement un regroupement de plusieurs communes
entières, mais il y a parfois des exceptions (par exemple, les communes
urbaines et les grandes villes sont souvent découpées en
plusieurs cantons).
B) - La formations des communes françaises.
Le maillage communal français date légalement du 22
décembre 1789. L'Assemblée Constituante créa 44000
communes, premier niveau de l'administration locale française, qui
reprennent pour l'essentiel les limites des paroisses d'Ancien Régime et
même parfois celles des grands domaines gallo-romains. Succédant
ainsi aux paroisses de la période médiévale et moderne,
les communes forment la plus petite division administrative française,
possédant un budget et étant administrée par un conseil
municipal élu pour six ans qui désigne en son sein le maire et
ses adjoints. Elles sont aujourd'hui, au recensement I.N.S.E.E. de 1990, au
nombre de 36551.
L'institution des communes est donc révolutionnaire.
Ainsi, comme le fait remarquer Jean- Louis Guigou,
"nation, départements, communes sont des institutions à "sang
chaud" qui ont été instituées en période
révolutionnaire. Elles renvoient à des territoires historiques,
là où il y a eu des morts, de la vie et des traditions. C'est
surtout vrai pour la nation et les communes. Les départements
apparaissent plus comme des déclinaisons arbitraires de l 'Etat, mais
ils sont riches de traditions forgées par deux siècles
d'histoire".
Le second Empire et le début de la III ème
République parachèvent la définition des pouvoirs et de
l'organisation des communes et des départements, qui resteront
pratiquement identiques jusqu'aux lois de décentralisation de 1982. De
même, les découpages (le maillage donc) des départements et
des communes ont peu varié depuis la Révolution Française.
C'est d'ailleurs ce maillage qui a permis, jusqu'aux années 1960, au
pouvoir central de contrôler et de gérer la quasi-totalité
du territoire national, cela en pratiquant une politique où l'essentiel
des décisions partaient du centre pour se diriger vers la
périphérie.
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III - Pour une gestion et un contrôle optimaux du
territoire national par le pouvoir central.
Jusqu'aux années 1960, période où de
nombreuses remises en cause se manifestent (politiques, administratives,
économiques, sociaux), le maillage politico-administratif
français constitue un relais et un instrument au service du pouvoir
(centralisé à Paris), permettant ainsi une gestion et un
contrôle optimaux (et/ou quasi-absolus) du territoire national.
Fruit de la Monarchie et de plusieurs siècles
d'évolution, le centralisme parisien se caractérise par une
concentration accrue du pouvoir politique, administratif et de décision,
par un poids démographique et économique sans commune mesure avec
le reste de la France. Modèle monocentrique (du pouvoir) par excellence,
forte hiérarchie et armature urbaine, le pouvoir central et
centralisé "a façonné son territoire pour l'adapter
à ses modes d'organisation administrative, politique et
économique".
Durant cette période, les trois niveaux d'administration
(commune, département, État) ont pour but, parmi d'autres, de
résoudre les conflits et de créer l'unité, sachant que les
relations verticales (ou inter-actions) sont prédominantes, suivant une
logique descendante hiérarchique, allant donc de Paris vers le reste de
la France. En effet, les relations horizontales (ou inter-relations) sont peu
favorisées, l'organisation fonctionnelle du territoire étant
dominée par quatre types de hiérarchies :
* hiérarchie urbaine (cf l'étoile de Legrand,
1831), * jacobinisme industriel,
* centralisme administratif,
* élitisme culturel.
Ces hiérarchies, ce jacobinisme, organisent et structurent
ainsi l'espace français suivant un autre modèle théorique
géographique, aussi de type dialectique, à savoir celui du
"centre" et de la "périphérie", mais avec des
rapports de force très inégaux. Partant de cette logique,
l'État jacobin est "le type même d'un État à
forte cohésion et à faible cohérence : deux
départements voisins n 'y avaient (n 'y ont) strictement rien d'autre en
commun que le fait d'envoyer chacun leurs représentants à une
même assemblée et d'être soumis aux même lois que
cette assemblée aurait votées".
Dans cette perspective, la fonction de préfet (de
département, sans oublier les sous-préfets qui
représentent l'État dans le cadre des arrondissements),
créée en 1800 par Bonaparte et qui fait suite à celle des
intendants de la royauté, est le symbole le plus évident du
principe centralisateur qui motive l'État, puisqu'elle se maintiendra
avec le pouvoir impérial, royal puis républicain, au cours du
XIX° siècle, comme pendant la quasi-totalité du XX°
siècle. Le maillage politico-administratif constitue donc, durant la
période considérée (grosso-modo de 1789, et même
avant, jusqu'aux années 1960), le support de base et l'instrument de
l'application du pouvoir de gestion, de contrôle et de décision de
l'État français.
Ainsi, "cette organisation spatiale répondait à
la volonté politique d'organiser la nation en un État unitaire
promoteur du développement économique. On retrouve ici
l'idée d'une adéquation entre le fond (le marché,
l'administration, les frontières) et la forme
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Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
(l'architecture du territoire), qui a montré son
efficacité en faisant de la France une grande puissance
économique et politique". De même, comme le fait remarquer
Violette Rey, "toute organisation politico-territoriale
sur une base étendue doit, en effet, répondre à une double
nécessité : découper le tout en parties, "diviser pour
gérer... et régner" ; rassembler des parties pour créer un
tout, coordonner d'authentiques forces territoriales pour construire
l'entité d'un État durable. De cette dialectique émerge un
équilibre dynamique qui asseoit la base spatiale de l'État, avec
un partage des compétences et des pouvoirs entre chaque niveau".
Or actuellement, et depuis les années 1960,
l'équilibre dynamique émergeant de la dialectique
développée par l'auteur n'est plus équilibré du
tout (la contradiction sémantique de notre part est volontaire). De
nombreux éléments remettent en cause l'autoritarisme et le
centralisme parisien (l'État français ayant maintenant des bases
spatiales très solides, pour reprendre les termes de Violette
Rey), tels que l'émergence des revendications régionales
(les volontés d'un État plus girondin, décentralisé
et d'esprit plus fédéral) et la régionalisation elle
même, le début de la décentralisation qui accompagne cette
dernière, ainsi que les nombreuses modifications et évolutions de
l'espace socio-économique français avec lequel le maillage
politico-administratif s'adapte (ou s'articule) de plus en plus mal. En effet,
quand le pouvoir central ne s'occupait que de la justice, de la police et de
l'armée, le maillage politicoadministratif s'adaptait relativement bien
aux prérogatives, aux compétences dévolues à
l'État. Mais aujourd'hui, les compétences de
l'État sont plus nombreuses et diverses (avec une intrusion dans le
domaine de l'économique et du social, il s'agit du passage de
l'Étatgendarme à l'État-providence). Nous assistons alors
à un renversement de tendance dans lequel le maillage
politico-administratif doit tendre vers un compromis, un nouvel
équilibre, ici entre les réalités factuelles de l'espace
socio-économique (le terrain) et les prérogatives, les devoirs du
pouvoir central (donc de l'État). Le décalage volontaire entre le
maillage (ainsi que le nombre important de mailles) que nous étudions et
les nouvelles dynamiques géographiques, est à partir des
années 1960 de plus en plus controversé, ce dernier ne permettant
plus une gestion et un contrôle objectif, cohérent et correct de
l'ensemble du territoire national français.
Alors que les finalités du maillage départemental
et communal étaient essentiellement politiques et administratives,
celles qui découlent de la régionalisation et de la
décentralisation (qui touche donc les départements et les
communes), bien qu'étant aussi politiques et administratives, sont en
plus économiques et sociales. Ainsi, le passage d'une logique à
une autre permettra plus tard, peut-être, la mise en place d'un compromis
durable entre les forces centripètes (centralisme, jacobinisme) et les
forces centrifuges (régionalisme, girondins), en espérant que
nous ne passerons pas d'un extrême à l'autre.
B) - A partir des années 1960, une adaptation de plus
en plus difficile qui engendre de nombreuses remises en cause.
I - Régionalisation, aménagement du
territoire et décentralisation.
Les régions sont des circonscriptions de l'administration
nationale et territoriale. De création récente, leur
légitimité est donc fragile. L'historique de la région
peut se diviser en trois étapes.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
A) - De la Révolution Française
jusqu'à l'orée de la V° République.
C'est une période d'hostilité politique, il y a un
refus explicite de créer des circonscriptions de trop grande dimension,
même si elles ont des avantages. C'est aussi la peur permanente (de la
part du pouvoir en place) de voir resurgir en France, derrière la
région, le spectre de l'Ancien Régime (la Monarchie,
c'est-à-dire la revendication de privilèges ou de pouvoirs forts
capables de contester Paris et son influence). De plus, en cette
période, il y a toujours le souci de favoriser le centralisme
français (parisien), donc de ne pas remettre en cause la
République.
Pendant le régime de Vichy, 19 préfectures
régionales sont nées. Elles ont des attributions dans le domaine
de l'ordre et de la police, et aussi une vocation dans le domaine
économique : il s'agit d'organiser la distribution des subsistances.
Après la 2° Guerre Mondiale, différents
mouvements régionalistes (exemple, en 1952, le C.E.L.I.B. est le
Comité d'Étude et de Liaison des Intérêts Bretons)
manifestent des volontés régionalistes.
B) - De 1956 aux lois de décentralisation
(1982-1983).
L'idée de région s'impose ainsi petit à
petit en France, la nécessité économique faisant loi. La
volonté des milieux d'affaire est de délimiter des territoires
offrant une capacité d'intervention plus grande, et permettant aussi de
nouvelles stratégies pour les entreprises. Il s'agit aussi de
réduire l'influence parisienne et de créer un nouveau cadre
approprié à la mobilité des hommes (due à la
civilisation automobile). Un arrêté du 28 octobre 1956 crée
ainsi 22 régions de programme. Ces dernières constituent
cependant des regroupements de départements, afin de conserver le
même nombre d'élus. Ainsi, "La nécessité de
créer des régions apparaît d'abord liée à la
volonté de planifier et d'aménager le développement
économique", ce qui correspond bien à l'évolution des
compétences de l'État que nous évoquions
précédemment.
En 1964, le 14 mars, une réforme régionale est mise
en place. Les C.O.D.E.R. sont créées (COmmissions de
Développement Économique Régional). Elles ont un pouvoir
limité et un but essentiellement consultatif. Les préfets de
région, quant à eux, ont pour mission de coordonner
l'administration et de mettre en oeuvre la politique du gouvernement en
matière d'aménagement du territoire et de développement
économique. La région est alors une circonscription territoriale
de l'État.
"La France de 1964 reste donc directement administrée
par le pouvoir central, elle reste jacobine". Dans la même
période, la création de la D.A.T.A.R. en 1963
(Délégation à l'Aménagement du Territoire et
à l'Action Régionale) constitue aussi une émanation du
pouvoir central. Cette période 1956-1964 apparaît donc comme un
aménagement du territoire par le centre. La période suivante, de
1968 à 1972 s'apparente cependant plus à une phase
d'hésitations, entre les manifestations de mai 1968 et la réforme
de Pompidou.
En 1972, le 5 juillet, sous Pompidou, on procède à
une nouvelle réforme régionale (très timide, compte-tenu
de ce qui s'est passé auparavant avec De Gaulle). La région
change de statut juridique. Les E.P.R. apparaissent (Établissements
Publics Régionaux). Ils sont au nombre de 22. Le Conseil
Économique et Social reproduit en quelque sorte les anciennes
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
C.O.D.E.R.. Les régions restent toujours cependant des
régions croupions, placées sous la tutelle de l'État.
Si la loi de 1972 correspond à une phase de
déconcentration des pouvoirs de décision et de contrôle, la
loi de 1982 constitue au contraire une véritable phase de
décentralisation.
C) - De 1982-1983 à nos jours.
Cette troisième étape constitue ainsi le passage de
la déconcentration à la décentralisation, et la mise en
place de l'aménagement du territoire par la régionalisation, sous
l'impulsion de la Gauche, arrivée au pouvoir lors des élections
présidentielles de mai 1981 (avec François Mitterrand).
La région devient une collectivité territoriale
où siègent deux assemblées :
* le Conseil Régional (les conseillers
généraux sont élus au suffrage universel dans le cadre des
départements),
* le C.E.S. (Comité Économique et Social).
Quant aux préfets, ils deviennent les commissaires de la
République : ils "ont charge de garantir la cohérence des
décisions régionales par rapport à la politique
nationale".
Les compétences des régions demeurent encore
faibles, en rapport avec des budgets limités. Elles concernent l'action
économique, l'aménagement du territoire, la formation
professionnelle et le développement des universités. Par contre,
les départements et les communes (qui deviennent aussi des
collectivités territoriales décentralisées) voient leurs
pouvoirs et leurs compétences augmenter sensiblement (plus que la
région qui est naissante) : les élus locaux gèrent des
services départementaux et des budgets de plus en plus importants. Les
maires, par exemple, ont désormais le pouvoir de délivrer les
permis de construire.
Nous assistons ainsi à un affaiblissement du pouvoir
central et à un rééquilibrage des rapports de force entre
les collectivités territoriales et l'État, où la
région constitue un espace stratégique, un espace fonctionnel. De
création récente (la région est peu vécue,
perçue et représentée), la région a essentiellement
une dimension économique, politique et administrative (mais dans une
perspective inverse à celle développée lors de la
création des départements et des communes). Elle est un espace en
devenir, objectif et objectivée, une future maille de l'articulation
européenne.
La région est donc aujourd'hui une division administrative
de la France regroupant plusieurs départements. On y retrouve un budget
et une assemblée élue, le conseil régional, qui regroupe
des parlementaires de la circonscription et des représentants des
collectivités locales et territoriales (départements, communes,
communautés urbaines). Le président du conseil régional
assure le pouvoir exécutif, il est élu par l'assemblée
régionale au moment de son renouvellement. L'État est donc
représenté par un commissaire de le République
(anciennement le préfet de région) qui reste à la
tête de l'administration centralisée et qui gère aussi les
services extérieurs de l'État.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Circonscription administrative d'aménagement par
excellence, la région, instituée donc dès 1956 et
effective à partir des lois de décentralisation de 1982-1983,
procède ainsi d'une triple volonté :
* mettre en place un support territorial susceptible de
favoriser, via les lois de décentralisation, un développement
plus harmonieux et plus homogène de l'ensemble du territoire national
français, ce dernier souffrant en ces années après la
2° Guerre Mondiale de l'hypertrophie
politico-démographico-économique parisienne,
* donner de la matière à polariser aux
métropoles d'équilibre que l'État cherche à
favoriser, * mettre en place un interlocuteur entre le département et la
région.
Le maillage régional, regroupant les unités
départementales, offre cependant des disproportions dans la taille des
régions ainsi établies, l'espace socio-économique
étant en évolution constante et étant très
hétérogène. Il existe ainsi de grosses disparités
démographiques et économiques entre certaines régions,
comme par exemple entre le Limousin et Rhône-Alpes.
Avec la mise en place des régions et de leur renforcement
via les lois de décentralisation (ainsi que l'aménagement du
territoire qui les accompagne), nous assistons donc depuis une quarantaine
d'années à une extension des compétences de l'État
qui pose des problèmes : comment gérer ces nouvelles
compétences en gardant un maillage politico-administratif ancien mis en
place pour des compétences beaucoup plus précise et surtout plus
réduites (les trois fonctions régaliennes de l'État
étant la justice, la police et l'armée). Car en même temps,
et surtout depuis les années 1960, l'espace socio-économique
français s'est fortement modifié et a connu de nombreuses
évolutions. Comment alors un maillage établi voilà 200 ans
peut-il s'adapter à de nouvelles compétences qui concernent un
espace socio-économique en évolution constante ?...
II - Les modifications de l'espace
socio-économique.
Les remises en cause du maillage politico-administratif
français actuel sont ainsi liées aussi aux nombreuses
modifications de l'espace socio-économique de ces dernières
décennies. Parmi celles-ci, évoquons :
* l'urbanisation croissante : d'une répartition
relativement homogène de la population il y a plus d'un
demi-siècle, et même avant, nous passons progressivement à
une répartition hétérogène (concentration, exode
rural), privilégiant les villes, les espaces urbains, périurbains
et rurbains. Il y a ainsi aujourd'hui 73% de citadins,
* les transformations profondes de l'agriculture et du monde
rural,
* une mobilité accrue des hommes, des biens, des
marchandises, des capitaux, des échanges, des informations...
Grâce aux nouvelles infrastructures de transports, à la
démocratisation de l'automobile, aux Nouvelles Technologies de
l'Information et de la Communication (N.T.I.C.), et aux progrès
techniques, les distances ne jouent plus le même rôle
qu'auparavant,
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
* les nouveaux comportements des populations, des entreprises,
des industries, liés à la prise en compte des loisirs, du cadre
de vie, de l'environnement.
C'est ainsi qu'une cartographie des densités actuelles de
population en France met en évidence l'intensité du mouvement de
contraction de la population. Si au siècle dernier la population
était relativement diffuse sur l'ensemble du territoire national,
aujourd'hui elle est concentrée sur des espaces restreints. Ainsi, alors
que 1/10 ème de la population française est répartie sur
60% du territoire, 4/10 ème est répartie sur 1% du territoire
seulement. Ce faisant, aujourd'hui 80% environ des communes en France ont moins
de 1000 habitants : les densités de population sont donc très
inégales sur l'ensemble du territoire.
Autrefois, le temps nécessaire à l'acheminement des
biens, des hommes et de l'information sur de longues distances, constituait des
territoires plus petits et des territorialisations différentes que ceux
que nous connaissons actuellement. Les progrès scientifiques et
techniques (automobile, train, avion, téléphone,...) ont aboli
les frontières de ces anciens territoires, de même que les
distances ne jouent plus le même rôle. Les hommes sont ainsi
très mobiles en cette fin de siècle : en 1789, l'aller-retour au
chef lieu de département se faisait en cheval et en une journée,
en 1998, l'aller-retour au chef lieu de région se fait en voiture et
parfois en une matinée...
L'espace socio-économique s'est aussi
spécialisé avec le temps et les relations entre les
différents pôles urbains constituant l'armature urbaine
française se sont densifiées. De nombreuses mutations
qualitatives se sont donc opérées, à la fois au niveau des
villes et de la campagne.
Ainsi, depuis le 19° siècle, le changement a
été un facteur accru d'inégalités ente les
départements. Deux facteurs sont fondamentaux :
* la Révolution industrielle et urbaine,
* la Révolution tertiaire (services,
administration,...).
De ces révolutions s'est opérée une
transformation de la configuration géographique de la France ainsi qu'un
bouleversement de l'équilibre traditionnel entre les villes et les
campagnes. La géographie des villes s'est remodelée en fonction
d'un double processus :
* le développement de certaines villes plus important que
d'autres, * la complexification de la hiérarchie du réseau
urbain.
Tout cela, auquel il faut ajouter le rôle de la position
des villes à l'échelle nationale et européenne, a conduit
et conduit encore à une différenciation entre les
départements, certains étant plus dynamiques que d'autres
(peut-on comparer le Gers, le département le plus rural de france dont
la population totale est d'environ 175.000 habitants, avec, par exemple, le
département du Nord, ouvert sur l'europe du Nord et ayant une population
totale de 2.500.000 habitants ?).
Le maillage politico-administratif français s'adapte donc
de plus en plus mal avec la mise en place des nouvelles prérogatives de
l'État. Le premier, statique, semble immuable ; les secondes concernent
un espace socio-économique dynamique qui évolue
continuellement.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Cette inadaptation croissante entre l'un et l'autre conduit
à de nombreuses remises en cause, le maillage politico-administratif
ayant de moins en moins comme objectif d'asseoir le pouvoir central (en train
de se décentraliser) et par conséquent d'être
volontairement décalé et contradictoire avec les
réalités diverses, observables sur le territoire national.
Finalement, seules les fonctions régaliennes peuvent être remplies
correctement sur ces bases territoriales.
Ainsi, les logiques qui ont présidé à
l'organisation et à la mise en place du maillage politicoadministratif
français (que nous connaissons actuellement), ne sont plus celles qui se
développent aujourd'hui (même pour les régions, pourtant
d'essence récente). De même, il n'existe pas qu'un seul type
d'espace politico-administratif et/ou socio-économique (dans une
perspective qualitative), ni même une seule échelle correspondante
à ces différents types d'espaces (donc dans une perspective
quantitative). Par conséquent, l'articulation et l'imbrication de ces
deux espaces est tellement difficile de nos jours qu'il est évident
d'assister à de nombreuses remises en cause. Ce faisant, dans la partie
suivante, nous allons faire un état des lieux des différentes
critiques émises à l'encontre de ce maillage
politicoadministratif.
III - Inadaptation et remises en cause.
Avant de procéder aux remises en causes qui nous
intéressent, il nous faut définir quels sont les objectifs,
actuellement, que doit atteindre le maillage politico-administratif
français, compte-tenu des différentes évolutions que nous
avons décrites auparavant.
A) - Quelle doit être la pertinence et la
validité d'un cadre territorial actuel ?
A la lecture de nombreux ouvrages, et par l'observation des
changements qui s'opèrent autour de nous, il est évident, a
priori, que la pertinence et la validité actuelle d'un cadre
territorial (commune, département, région, etc...) est de bien
correspondre aux territoires pratiqués par la société
civile, c'est-à-dire d'accompagner et de favoriser les dynamiques et les
logiques de cette dernière. Il faut que ces cadres territoriaux (ou
mailles politico-administratives) correspondent au mieux aux multiples
territoires développés par les hommes, les biens et les
informations, tout en tenant compte de leurs échelles
géographiques respectives, afin qu'une large majorité d'entre eux
s'identifient à un espace commun, facilement repérable (dans la
mesure du possible).
Jean-Louis Guigou partage ce point de vue,
surtout lorsqu'il déclare : "Les communes, les départements,
les régions, les nations... sont des institutions qui "normalement"
régissent des espaces géographiquement, économiquement et
historiquement pertinents. Il devrait donc y avoir, dans un souci
d'efficacité, adéquation entre la "superstructure"
(l'institution) et "l'infrastructure" (l'économie réelle et
l'histoire vécue des territoires). Pour construire la France de 2015, on
peut retenir l'hypothèse que les circonscriptions établies en
1789 ne coïncident plus, ni avec l'histoire longue du Moyen-Age que les
révolutionnaires ont voulu détruire, ni avec les bouleversements
consécutifs à deux siècles de développement
économique".
Partant de là, le maillage politico-administratif
français est donc inadapté par rapport aux nouvelles
compétences de l'État et aux processus de redistribution du
pouvoir entre le national et les collectivités locales (et
territoriales). Les critiques et les remises en cause que
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
nous allons développer maintenant sont ainsi
significatives de cet état de fait.
B) - Trois échelles territoriales remises en
cause.
"La France, qui a toujours révéré ses
découpages internes historiques, constate aujourd'hui qu'ils s'adaptent
de plus en plus mal aux exigences économiques, sociales, voire
administratives. On déplore, selon les sensibilités et les
enjeux, un découpage communal archaïque, des départements
devenus trop petits et trop grands, des régions parfois sans logique, la
difficulté à faire entrer dans la réalité
institutionnelle des concepts tels que le "bassin de vie", les
réticences à créer des territoires transfrontaliers, en un
mot une forme d'exception française comme toujours aussi attachante
qu'exaspérante".
Les différents reproches formulés dans ce passage
soulignent bien le fait qu'ils sont issus de causes très
différentes : les échelles territoriales concernées
étant au nombre de trois, il est impossible d'aborder leur
résolution de la même manière d'un niveau scalaire à
un autre (effet d'échelle). En effet, ces trois niveaux territoriaux (ou
échelles territoriales) sont maintenant chargés d'avoir une
pertinence pour le citoyen, censé participer à sa gestion (cf les
lois de décentralisation), dans le cadre d'une perte de pertinence
(redistribution du pouvoir) du niveau national au profit des trois niveaux
inférieurs. Est-ce raisonnable alors de vouloir impliquer le citoyen
dans quatre niveaux à la fois (en comptant le niveau national) ?
1 - Les communes françaises.
Ainsi, par exemple, au Recensement Général de la
Population de 1990 (R.G.P. I.N.S.E.E.), les communes françaises sont au
nombre de 36551, ce qui faisait de la France en 1994 le pays qui
possédait à lui seul autant de communes que les 11 autres pays
alors constitutifs de l'Union Européenne. Ce "monument
d'archéologie administrative" constitue un record qui est souvent
critiqué, de nombreux pays européens ayant déjà
procédé à des regroupements de leurs unités locales
de base (le premier échelon de l'administration locale), le surnombre
devenant ingérable.
En effet, si au 18° siècle la majorité des
communes étaient polarisées par le chef-lieu, aujourd'hui ce
sont, entre autres, les nouveaux équipements qui polarisent l'espace et
remettent ainsi en cause les limites spatiales communales (il s'agit donc des
mailles communales), qui n'ont souvent plus de sens. Ainsi, certaines d'entre
elles coupent les tissus urbains d'importantes agglomérations urbaines
françaises, introduisant une discontinuité là où au
contraire une continuité (du bâti, par exemple) s'est
développée et établie. Les communes françaises,
considérées dans leur configuration actuelle, présentent
ainsi aujourd'hui un maillage anachronique, où le peuplement,
réduit à moins de 10 habitants parfois, leur ôte une grande
partie de leur signification.
Dans cette perspective, la pertinence des cantons est elle aussi
remise en cause. Ces derniers ne restent perçus qu'en milieu rural, et
la représentation des conseillers généraux favorise
surtout les cantons ruraux.
"Ni personnes morales, ni collectivités locales, les
cantons et arrondissements n'ont pas d'assemblée et d'administration
propres. Ils ont beaucoup perdu de leur importance. (...) Ces
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
deux unités semblent moribondes, vestiges de
l'organisation de la III ème République".
2 - Les départements français.
Les départements, quant à eux, sont accusés
d'être trop petits, compte-tenu notamment de la révolution des
transports, ainsi que d'être trop nombreux (pour les mêmes
raisons). A l'inverse, "laissant à la région son rôle
régional, il peut se consacrer pleinement à son rôle de
mise en solidarité des villes et des campagnes. Il doit pour cela avoir
une taille plus proche
de celle de nos 329 arrondissements métropolitains.
Bien des départements sont des rings ou des ménages à
trois. Pau et Bayonne, Rouen et le Havre qui ont déjà chacune
leur évêque, Montluçon, Moulins et Vichy et bien d'autres
villes peuvent devenir le coeur d'un petit département. Après
tout, le département de Belfort fonctionne très bien, et une
communauté urbaine ferait double emploi avec lui".
Jean-Pierre Worms, quant à lui, cite
quelques exemples qui remettent en cause la pertinence des découpages
départementaux (donc des mailles départementales) : "pur
artifice institutionnel de la Révolution, il ne correspond ni dans son
découpage, ni dans son mode de représentation, aux
réalités d'aujourd'hui. On ne compte plus les
agglomérations ou les "pays" qui se sont développés
à cheval sur plusieurs départements, voire sur plusieurs
régions, et dont les projets de développement posent
d'inextricables problèmes de coordination entre ces incontournables
partenaires. Parmi beaucoup d'autres, deux exemples d'inadéquation du
découpage départemental aux réalités
socio-économiques du terrain :
* le "pays de Redon" est à cheval sur trois
départements (Morbihan, Ille-et-Vilaine, Loire- Atlantique) et sur deux
régions (Bretagne et Pays de Loire) ;
* l'agglomération de Mâcon, en traversant la
Saône, passe du département de Saône-et-Loire à celui
de l'Ain et de la région Bourgogne à la région
Rhône-Alpes".
Dans la même logique, la banlieue (ou
l'agglomération) d'Avignon se développe à cheval sur le
Vaucluse et le Gard, sur les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et
Languedoc-Roussillon.
3 - Les régions françaises.
Enfin, les régions, d'essence récente, sont souvent
opposées aux autres régions européennes (cf les
länder allemands) ; elles sont souvent critiquées au niveau de leur
taille (trop petite parfois), d'être peu peuplées et arbitraires
dans leurs regroupements de départements ainsi que dans leurs limites
(leurs mailles, cf les remarques faites à l'encontre des
départements). Ainsi, le Morbihan, rattaché à Rennes,
regarde surtout vers Nantes ; à l'inverse, la Mayenne, rattachée
aux Pays de la Loire regarde vers la Bretagne. Dans la même idée,
comment se sentir appartenir à la région Centre, dont le nom et
la formation ne désigne que la position géographique de cette
dernière dans l'hexagone ? !!!
Ainsi, les nombreuses remises en cause du maillage
politico-administratif français résultent à la fois de la
modification des conceptions de l'État (et donc du pouvoir) dans la
manière de gérer et de contrôler l'ensemble du territoire
national, donc de l'espace socio-économique, et des modifications
même de ce dernier. Les années 1960 constituent par
conséquent un tournant majeur dans la logique établie depuis la
Révolution Française (et même avant), où le
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
développement, la gestion et le contrôle du
territoire part maintenant presqu'autant du bas (du local) que du haut (de
l'État). Il s'agit pour l'État (le pouvoir en place) de concilier
deux logiques a priori antinomiques, celle du jacobinisme (du centre
vers la périphérie) et celle du fédéralisme (de la
périphérie vers le centre). Nous assistons ainsi aujourd'hui
à une transition de l'une vers l'autre, transition qui s'est
amorcée dans les années 1960 et qui se poursuit actuellement.
L'objectif consiste donc à conjuguer (toujours a priori) ces
deux formes de contrôle et de gestion de l'espace socio-économique
français, et ce de la meilleure manière possible.
CONCLUSION de la première Partie.
Les remises en cause du maillage politico-administratif
français procèdent donc d'une double logique. D'abord, les
rapports de pouvoir, de contrôle et de gestion émanant de
l'État sur l'espace socio-économique ont subi une inversion de
tendance au cours de la décennies 1960, notamment avec la mise en place
des régions, de la politique de l'aménagement du territoire (pour
contrebalancer le poids politico-administratif et
démographico-économique de Paris et sa région), et des
lois de décentralisation, permettant aux collectivités
territoriales de gérer leur propre budget et de prendre en main leur
avenir.
Ensuite, et parallèlement, ce même espace
socio-économique à connu des mutations et des bouleversements
profonds dans sa structure, dans son organisation interne, ce qui s'est traduit
par des modifications spatiales très importantes remettant elles aussi
en cause la pertinence actuelle du maillage politico-administratif
français.
Les deux logiques évoquées
précédemment mettent en évidence des rapports
dialectiques, l'une étant à la fois à l'origine et le
résultat de l'autre, et inversement (malgré parfois des rapports
de force inégaux). Ainsi, en 1789-1790, les départements
français ont été créés en tenant compte, en
partie, des réalités de l'espace socio-économique
considéré. Par la suite, ces nouvelles mailles
politico-administratives ont influencé à leur tour
l'évolution de l'espace socio-économique sur lequel les
départements ont été délimités (par exemple
le recours au chef-lieu du département pour des documents
administratifs). Ce va-et-vient incessant entre infrastructure et
superstructure (=> praxis) a assuré donc l'unité, la
cohésion et la survie du système ainsi établi pendant
près de deux siècles. Cependant, depuis un quarantaine
d'années, ce fonctionnement s'affaiblit de plus en plus (il s'inverse
même, cf remarques précédentes), les logiques qui
prévalaient à la mise en place du fonctionnement de ce
système il y a 200 ans n'étant plus celles qui se
développent aujourd'hui (ou qui veulent se développer
aujourd'hui).
Ainsi, dans le cadre de la théorie dialectique,
l'infrastructure (ou espace, instance socio- économique : celle de
l'habitus) et la superstructure (ou espace, instance politicoadministrative)
forment ensemble la topique (territoriale). Ce faisant, les recompositions
territoriales et les inter-relations actuelles se développant entre
différents pôles urbains (ou d'autres types d'espaces) appartenant
à des départements ou des régions différentes,
traduisent, à notre sens, l'inadaptation du maillage
politico-administratif français à l'espace
socio-économique avec lequel il se développe.
De la même sorte, la dialectique régissant les
rapports entre le maillage politico-administratif et l'espace
socio-économique est aussi la dialectique de l'espace de
légitimité (de l'administrateur) et de l'espace d'action (des
hommes, des biens et de l'information). Cette
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
dernière met en évidence le rôle de
l'horizontal et du vertical, où aujourd'hui l'horizontal (les relations
et proximités fonctionnelles entre pôles urbains, par exemple) a
plus de poids qu'il y a quelques décennies, ce que nous allons
étudier dans cette deuxième partie.
Deuxième Partie :
Le contact Pyrénées-Atlantiques et
Hautes-Pyrénées : recompositions territoriales et
discontinuités géographiques entre Pau et Tarbes.
Le contact Pyrénées-Atlantiques -
Hautes-Pyrénées constitue pour nous un exemple concret d'analyse
et de remise en cause de la pertinence du maillage politico-administratif
français, et plus précisemment des mailles départementales
et régionales. L'observation, la mise en perspective et l'étude
de quelques exemples de recompositions territoriales entre Pau et Tarbes, vont
nous permettre, après cette première partie essentiellement
théorique, de voir comment sur le terrain s'organisent les logiques et
les faits que nous avons développés auparavant.
Nous avons choisi cet exemple de par sa proximité et son
originalité. De même, il nous semble, a priori,
représentatif d'un bon nombre de situations similaires dans l'hexagone
(ne serait-ce que par l'observation des densités de population à
l'échelle de la France entière), situations qui participent ainsi
aux nombreuses remises en cause que ce mémoire se propose
d'étudier. En effet, d'autres exemples auraient pu être
étudiés dans ce cadre. Citons, entre autres, Béziers et
Narbonne (respectivement dans l'Hérault et dans l'Aude, et distantes
d'une trentaine de kilomètres), de même certaines villes se sont
associées en réseau de villes : par exemple, Bar-le-Duc /
Saint-Dizier / Vitry-le-François (respectivement dans la Meuse, la
Haute-Marne et la Marne). Enfin, nous pouvons rappeler que certaines grosses
agglomérations françaises ont des limites qui dépassent
facilement celles de leur département d'appartenance (Paris et Lyon,
pour ne citer qu'elles).
Partant de là, le secteur d'étude que nous avons
retenu semble pertinent et représentatif des différentes logiques
retenues. Ce faisant, les deux sous-parties constituant cette étude de
cas s'organisent en fonction de la cartographie de quelques indicateurs
statistiques, et d'une enquête de terrain dont les modalités de
construction et de traitement seront exposées plus loin dans ce
mémoire. Il apparaît ainsi que le constat de l'I.N.S.E.E. (celui
d'un "espace urbain" entre Pau et Tarbes) est objectif et
représentatif de la réalité (compte-tenu des recherches
que nous avons effectuées).
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
L'objectif de cette seconde partie consiste donc à
vérifier certaines de nos hypothèses de départ, et
d'analyser plus finement, à travers cet exemple de Pau-Tarbes, les
transgressions des limites politico-administratives. Il s'agit aussi, dans le
cadre de la méthode hypothético- déductive, de
vérifier le bien-fondé des remises en causes
développées en première partie.
A) - Pau-Tarbes : une limite politico-administrative
majeure transgressée par un "espace urbain".
I - Des Z.P.I.U. au Z.A.U. : le constat de l'I.N.S.E.E.
Le Zonage en Aires Urbaines.
Issu des nouveaux découpages réalisés par
l'I.N.S.E.E. pour permettre notamment une meilleure différenciation
entre l'espace rural et l'espace urbain, le Zonage en Aires Urbaines (Z.A.U.)
associe Pau et Tarbes dans le cadre d'un "espace urbain" qui transgresse
donc parfaitement la limite politico-administrative. Ainsi, récemment
(1996-1997), l'I.N.S.E.E. a proposé de remplacer les Zones de Peuplement
Industriel ou Urbain (Z.P.I.U.) par le Z.A.U., les Z.P.I.U. étant trop
étendues. "L'obsolescence de la définition des Z.P.I. U. et
l'aspect limitatif de celles des unités urbaines on incité
l'I.N.S.E.E. à définir une nouvelle classification du territoire
: le Zonage en Aires Urbaines (Z.A. U.). Basé sur la notion de
pôle urbain et de couronne périurbaine, ce nouveau zonage
permettra d'analyser, à l'aide d'un outil plus adapté, une grande
partie des problèmes liés à l'emploi et à la
métropolisation. Utiles pour les analyses structurelles, les aires
urbaines devraient se révéler précieuses pour les
réflexions sur les politiques de développement local".
Pour permettre une meilleure compréhension des objectif
visés par l'I.N.S.E.E., une définition rapide des principaux
découpages évoqués précédemment s'impose.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Par Unité Urbaine, l'I.N.S.E.E. entend
une ou plusieurs communes sur le territoire desquelles se trouve un ensemble
d'habitations qui présentent entre elles une continuité et qui
comportent au moins 2000 habitants. Une unité urbaine constituée
de plusieurs communes est dénommée "agglomération
multicommunale". Une unité urbaine constituée d'une seule
commune est dénommée "ville isolée".
Les Z.P.I.U., quant à elles, sont les
Zones de Peuplement Industriel ou Urbain. Elles sont
constituées des unités urbaines, des communes dites industrielles
(c'est-à-dire non urbaines, mais offrant des emplois dans de grands
établissements) et des communes dortoirs.
Enfin, le Z.A.U. est donc le Zonage en
Aires Urbaines. Il permet la distinction de deux grands types
d'espaces : l'espace à dominante rurale et l'espace à dominante
urbaine. L'espace à dominante urbaine est constitué de trois
types de communes : les pôles urbains, les couronnes périurbaines
et les communes multipolarisées. Les communes n'appartenant à
aucune de ces catégories sont dites rurales.
* le pôle urbain est une unité
urbaine offrant au moins 5000 emplois sur son territoire, sous réserve
qu'elle ne soit pas sous la dépendance directe d'un pôle urbain
voisin plus important.
* la couronne périurbaine est obtenue par
un processus itératif. Sont agrégées au pôle urbain
toutes les communes qui envoient plus de 40% de leur population active
résidente travailler dans un pôle urbain. Puis, toutes les
communes envoyant plus de 40% de leurs actifs dans la zone ainsi
créée sont également intégrées dans le
périurbain, et ainsi de suite jusqu'à l'arrêt du
processus.
* l'aire urbaine est l'addition d'un
pôle urbain et de sa couronne périurbaine.
* les communes multipolarisées sont les
communes rurales et les petites unités urbaines envoyant 40% de leurs
actifs ayant un emploi vers plusieurs aires urbaines, sans atteindre ce seuil
avec une seule d'entre elles, et qui forment avec elles un espace connexe.
Les pôles urbains, les couronnes
périurbaines et les communes multipolarisées forment
l'espace à dominante urbaine.
L'espace à dominante rurale est
l'ensemble des communes n'appartenant pas aux catégories
précédemment définies.
Ainsi :
Pôle urbain + Couronne périurbaine = Aire
urbaine.
Aire urbaine + Communes multipolarisées =
Espace urbain.
=> Espace national français - Espace urbain =
Espace à dominante rurale.
Ainsi, l'I.N.S.E.E. dans le cadre de ses découpages,
montre clairement que l'espace socio- économique s'organise aussi
indépendamment des mailles politico-administratives. Les
phénomènes de mobilités géographiques (relations
domicile-travail, par exemple) sont ainsi mis en évidence, et s'appuient
donc sur la proximité des principaux pôles urbains.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Cependant, nous pouvons nous interroger sur la pertinence et la
validité du seuil retenu dans le cadre du Z.A.U. : ce seuil de 40%
abaissé à 35% ou 30% offre-t-il une cartographie comparable
à celle liée aux 40%. Pourquoi d'ailleurs 40% ?
Malgré tout, l' "espace urbain" Pau-Tarbes
représente le 20° "espace urbain" le plus peuplé de
France (= 348000 habitants en 1990), le 18° le plus dynamique (= 0,39% de
taux annuel de variation de la population entre 1982 et 1990), et le 12°
le plus attractif (= 0,18% de taux annuel de variation dû au solde
migratoire entre 1982 et 1990).
D'ailleurs, "l'intensification des liens
inter-régionaux dans cette zone est clairement démontrée
par le repositionnement de l'aire urbaine de Pau vers Tarbes entre 1982 et
1990, au détriment de la partie ouest de l'aire".
Cette typologie de la dynamique géo-démographique
de l'"espace urbain" Pau-Tarbes n'a pas pour but de classer ce dernier
dans un "hit-parade" des espaces urbains les plus dynamiques (attractifs
ou peuplés) en France, mais de montrer comment les pôles urbains
français entretiennent des relations (de tous ordres) qui se
développent indépendamment du maillage politico-administratif.
Cet "espace urbain" Pau-Tarbes nous interroge ainsi une
fois de plus sur la pertinence des mailles départementales et
régionales, dont nous allons décrire maintenant
l'établissement entre les Pyrénées-Atlantiques et les
Hautes-Pyrénées.
II - Pourquoi une limite politico-administrative majeure
?
Pau et Tarbes, respectivement préfectures des
Pyrénées-Atlantiques et des Hautes-Pyrénées, et
distantes seulement de 35 kilomètres environ, sont ainsi
séparées par une double limite politico-administrative,
départementale et régionale. Or, actuellement de nombreuses
relations s'établissent entre les deux villes moyennes, formant ainsi
pour l'I.N.S.E.E. un "espace urbain" (cf commentaire
précédent).
La limite politico-administrative qui sépare le
département des Hautes-Pyrénées de celui des
Pyrénées-Atlantiques correspond parfaitement à la
frontière ancienne entre le Béarn et la Bigorre. D'ailleurs, la
cartographie que présentent Pierre Tucoo-Chala et
Christian Desplat le précise bien : le même trait
noir correspond à la "frontière ancienne
Béarn-Bigorre" et à la "limite départementale
actuelle". Remarquons d'autre part que le tracé de la limite semble
indifférent à la topographie, même si parfois cette
dernière épouse plus ou moins fidèlement la ligne de
rupture de pente formée par le plateau de Ger et son talus oriental
(donc faisant face à la plaine de Tarbes).
Or, cette même cartographie révèle aussi
l'existence de deux enclaves bigourdanes dans le département des
Pyrénées-Atlantiques. "Ce découpage remonte à
l'époque lointaine où les vicomtes de Béarn
annexèrent le Montanérès ; au sein de cette petite
vicomté quelques paroisses étaient propriété
directe des comtes de Bigorre qui les conservèrent jalousement. Les
"enclavés", ainsi qu'aiment à s'appeler les habitants de ces
villages, ont traversé les siècles, et la Constituante respecta
scrupuleusement cet héritage de ce monde féodal dont elle voulait
pourtant abolir tous les vestiges".
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Par contre, les anciennes limites occidentales du Béarn
n'ont joué aucun rôle dans le nouveau maillage proposé, les
trois provinces basques étant rattachées au Béarn pour
former le département des Basses-Pyrénées (renommé
Pyrénées-Atlantiques en 1969). Cet assemblage surprenant
répond ici au désir d'uniformisation du territoire national de
l'Assemblée Constituante, qui ne voulait pas faire du Pays Basque un
département à part entière.
Comme nous pouvons le constater, le processus de
départementalisation a procédé d'une double volonté
: celle du niveau national (la Révolution Française), et celle du
niveau local (les revendications locales ayant été prises en
compte). Si ce nouveau maillage politicoadministratif offrait une certaine
cohérence en cette fin de 18° siècle, eu égard aux
logiques prises en compte, aujourd'hui il est souvent remis en cause, soit de
manière ponctuelle et indirecte, soit de manière plus
systématique et directe : l'observation actuelle des nombreuses
relations fonctionnelles (dues notamment à la proximité
géographique) entre Pau et Tarbes reflète en partie cet
état de fait.
Par la suite, la régionalisation a renforcé cette
rupture politico-administrative entre les deux pôles urbains, donc entre
le Béarn et la Bigorre. En effet, de même qu'en 1790 la
départementalisation sépare administrativement ces anciennes
provinces, en 1961, la régionalisation accentue la scission. Les
Pyrénées-Atlantiques (alors Basses-Pyrénées)
s'inscrivent alors dans la région Aquitaine, les
Hautes-Pyrénées dans la région
Midi-Pyrénées. Bien que se sentant plus proche de Toulouse que de
Bordeaux, Pau (et le département des Pyrénées-Atlantiques)
est quand-même rattaché à l'Aquitaine, la région
Midi-Pyrénées comptant déjà huit
départements.
III - Des cartographies d'indicateurs statistiques qui
confortent le constat de l'I.N.S.E.E.
A) - Les densités de population en
1990.
A travers cette cartographie, nous allons vérifier le
principe évoqué en première partie, selon lequel la
population française est actuellement concentrée sur des espaces
relativement restreints, notamment dans le cadre d'une urbanisation et d'une
périurbanisation croissantes, générant ainsi un mouvement
de contraction de cette population.
L'observation attentive de la cartographie
présentée ici montre qu'il y a bien un rapprochement entre Pau et
Tarbes, rapprochement qui s'effectue par la coalescence de leurs couronnes
périurbaines et rurbaines respectives. Le phénomène est
d'autant plus flagrant que pour Tarbes (et ses différentes couronnes),
les densités de population sont plus fortes à l'ouest qu'à
l'est, ainsi que le long de l'Adour.
Le rapprochement entre Pau et Tarbes est favorisé par
plusieurs facteurs. Ne pouvant pas tous les énumérer (car tous ne
sont pas connus, et parce que nous n'avons pas procédé à
un recensement exhaustif de ces derniers), nous citerons seulement les plus
connus et les plus importants à nos yeux. Ainsi, la faible distance
entre les deux villes joue un rôle fondamental et majeur dans la
formation de cet "espace urbain" (35 kilomètres séparent
seulement les deux préfectures), ce qui est renforcé par la
présence d'infrastructures routières, favorisant le
développement des espaces interstitiels (logique aréolaire ; la
R.N. 117, par exemple) et autoroutières, favorisant surtout les espaces
inter-urbains (logique réticulaire ; l'A. 64, par exemple). De
même, les processus de périurbanisation et de rurbanisation
évoqués auparavant
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
ont aussi participé (et participent encore) à cette
logique de mise en place d'une (relative) continuité urbaine entre Pau
et Tarbes. En effet, la périurbanisation (et la rurbanisation) joue ici
un rôle important. "Désormais, l'originalité du
processus réside moins dans sa nouveauté que dans
généralisation à tous les espaces compris dans un
périmètre dont les contours s'éloignent sans cesse de la
limite traditionnelle des villes, quelle que soit leur taille et quelle que
soit leur rang dans la hiérarchie urbaine".
Enfin, les zones d'emplois de Pau et de Tarbes sont
étendues et contiguës (ce qui favorise encore plus les
rapprochements), quant aux bassins de vie (toujours de Pau et de Tarbes), ils
forment, pour l'I.N.S.E.E., un réseau de villes (ce qui constitue un
autre exemple de relations inter-départementales et
inter-régionales).
Or, nous n'observons pas le même phénomène
entre Pau et le district Bayonne-AngletBiarritz (B .A.B.), ce dernier
étant pourtant inscrit dans le département des
Pyrénées- Atlantiques. La distance plus importante entre les deux
pôles (un peu moins d'une centaine de kilomètres) est à
l'origine de cette situation, où à partir d'Orthez (un peu
après en fait) les densités de population sont inférieures
à 40 habitants par kilomètre carré, et ce sur une dizaine
de kilomètres environ. Certes, cette situation peut être imputable
en partie aux effets de seuil liés à la discrétisation des
données cartographiées en quatre classes, mais cependant il est
évident que la distance joue un rôle essentiel.
Ainsi, à travers cet exemple, nous vérifions (en
partie) le phénomène de concentration de la population sur des
espaces relativement restreints, notamment au niveau des principaux pôles
urbains (français), ce qui contribue à créer des
agglomérations multipolaires quand ces dernières sont proches les
unes des autres.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
B) - L'évolution de la population entre 1962 et
1990.
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Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
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limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
L'analyse de ces quatres cartographies, dans une perspective
diachronique, montre relativement bien le rapprochement démographique
(ou la synchronie dans l'évolution de la population) entre Pau et
Tarbes, et ce sur une période de 28 ans. En effet, nous observons sur
les deux premières cartographies, l'existence d'une "vallée
bleue" entre ces deux villes moyennes, le bleu traduisant une
évolution négative de la population entre les deux
périodes considérées. Le phénomène est
surtout perceptible dans la deuxième cartographie, où se
dégage un cordon (de quelques kilomètres) plus ou moins
rectiligne de communes subissant un baisse de population ; il est à
remarquer d'ailleurs que ce cordon se situe à-peu-près à
mi- chemin de Pau et de Tarbes, sa partie est retrouvant localement la double
limite départementale et régionale, cette dernière
épousant plus ou moins fidèlement le rebord oriental du plateau
de Ger.
A partir de la période 1975-1982 et surtout 1982-1990, la
tendance s'inverse. La "vallée bleue" évoquée
précédemment se comble progressivement, ce que la
discrétisation des données en six classes traduit bien. En effet,
à partir de ces deux périodes, la majorité des communes
connaissent une évolution positive de leur population. Nous n'observons
alors plus de vide entre Pau et Tarbes, mais au contraire une continuité
urbaine (ou connurbation), favorisée, semble-t-il, par les mêmes
raisons avancées pour le la cartographie précédente.
Démographiquement ces deux villes moyennes se sont donc
rapprochées depuis 1975, ce que la cartographie des densités de
population analysée auparavant souligne bien.
Or, si à partir de 1975 nous observons un rapprochement
(dans les comportements démographiques) entre Pau et Tarbes, les quatres
cartographies que nous présentons ici ne montrent pas de
phénomène similaire entre Pau et le district
Bayonne-Anglet-Biarritz. En effet, toujours à partir d'Orthez il demeure
sur une douzaine de kilomètres une bande où l'évolution de
la population entre chaque période de recensement est constamment
négative (d'où une densité de population beaucoup plus
faible qu'entre Pau et Tarbes). Une fois de plus nous estimons que le
rôle de la distance est fondamental dans la compréhension du
phénomène analysé. Cette dernière, quand elle est
trop importante, limite les processus de périurbanisation et de
rurbanisation liés au développement des principaux pôles
urbains que constituent respectivement Pau, Bayonne-Anglet-Biarritz et Tarbes.
En effet, les aires d'influences de chacun de ces pôles sont sensiblement
les mêmes, mais la distance importante entre Pau et le district B .A.B.
ne permet pas la coalescence et le rapprochement que nous observons entre Pau
et Tarbes. Il y a donc un effet de seuil lié à la distance qui
rend ainsi impossible la répétition du même
phénomène Pau-Tarbes entre Pau et le B.A.B.
A travers cet autre exemple, nous vérifions (toujours en
partie, notre analyse se focalisant volontairement sur un secteur
d'étude précis) que les processus d'urbanisation et de
périurbanisation (de rurbanisation aussi, mais dans une moindre mesure)
tendent à accentuer le caractère hétérogène
de la répartition de la population sur l'ensemble du territoire national
français.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
C) - Les migrations domicile-travail hors de la
région en 1990.
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politico-administratif français ? - Exemple de la
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Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
A l'inverse des deux cartographies concernant l'évolution
de la population entre 1962 et 1975, la cartographie présentée
ici met en évidence un "plateau rouge-marron" qui
témoigne
de déplacements domicile-travail hors de la région
d'appartenance relativement élevés. Le fait majeur à
souligner est que la majorité des communes concernées par ces
migrations se situent surtout dans le département des
Pyrénées-Atlantiques. L'explication est relativement simple : la
limite régionale passe beaucoup plus près de Tarbes et de Lourdes
que de Pau. Ce faisant, les habitants des communes limitrophes ont tendance
à travailler dans la zone d'emploi la plus proche (Tarbes,
associée à celle de Lourdes). Le plateau de Ger traduit donc ici
physiquement, du moins dans sa partie centrale et orientale, l'augmentation du
nombre de communes connaissant un pourcentage relativement élevé
de personnes travaillant dans la région voisine (ne serait-ce que par
rapport aux communes voisines).
Cette dernière cartographie constitue un
élément supplémentaire de mise en évidence des
relations de complémentarité et de proximité
s'établissant entre Pau et Tarbes, entre le Béarn et la Bigorre.
Elle est ainsi complémentaire du constat établi par l'I.N.S.E.E.
(le Z.A.U.).
De même, elle souligne bien que la mobilité des
hommes génère des territorialisations différentes de
celles qui se développaient avant que l'automobile ne se
démocratise (et que les emplois ne deviennent de plus en plus en
rares).
Ainsi, de nombreuses dynamiques géographiques se
développent indépendamment du maillage politico-administratif (en
l'occurrence ce sont ici des mailles départementales et
régionales), ce dernier constituant une discontinuité statique
majeure. Les processus d'expansion urbaine graduelle (périurbanisation
et rurbanisation), de mobilité géographique croissante (de type
domicile-travail, qui génèrent des mouvements pendulaires
journaliers), et les relations de proximités fonctionnelles et
d'échanges (entre pôles urbains), mettent en évidence un
espace socio-économique dont les logiques d'organisation et de
structuration (toujours dans le secteur d'étude qui nous
intéresse) sont relativement indifférentes aux logiques
politico-administratives de gestion et de contrôle du territoire. Dans
cette perspective, la limite politico-administrative majeure entre Pau et
Tarbes semble a priori obsolète, en séparant deux
agglomérations que les pratiques spatiales des habitants tendent
à réunir.
Finalement, au regard des nouvelles cartographies
présentées précédemment, le constat de l'I.N.S.E.E.
paraît pertinent et objectif. Entre Pau et Tarbes s'opére donc un
rapprochement résultant de causes locales, par rapport au secteur
d'étude considéré (proximité géographique et
spatiale, rôle des infrastructures de transport, par exemple), et aussi
de causes générales (phénomène de
périurbanisation et de rurbanisation favorisées, entre autres,
par la démocratisation de l'automobile).
Cette transgression croissante de la limite soulignée par
l'I.N.S.E.E. ("espace urbain") est donc le fruit de la logique qui veut
que la proximité géographique favorise les proximités
fonctionnelles et les stratégies d'alliances territoriales (bien
entendu, il y a des exceptions à la règle...). Les mailles
départementales et régionales sont donc ici inadaptées aux
réalités (factuelles) du terrain. Ces quelques cartographies
témoignent de logiques qui transgressent ces limites
politico-administratives, posant ainsi le problème de la pertinence de
ces dernières qui ne sont plus cohérentes par rapport aux
nouvelles compétences dévolues à l'État.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
La deuxième sous-partie, en l'occurrence, va montrer
comment cette règle s'applique relativement bien au secteur
d'étude qui nous intéresse.
B) - De la proximité géographique aux
proximités fonctionnelles : exemples de recompositions territoriales
entre Pau et Tarbes.
Dans le cadre d'une enquête effectuée cette
année, nous nous sommes intéressés aux recompositions
territoriales qui s'opérent actuellement, ou qui se sont
déjà opérées, entre Pau et Tarbes. Nous avons ainsi
procédé à quelques entretiens avec les personnes
responsables des services de communication des entreprises et des organismes
retenus, en leur posant des questions sur différents points concernant
la structure de l'entreprise ou l'organisme auquel ils appartiennent.
Cependant, notre enquête est loin d'être
exhaustive : en tout, 26 structures (ou organismes) ont été
enquêtées et étudiées. Ces quelques recompositions
territoriales, que nous estimons pour autant représentatives d'un plus
large phénomène se développant à différentes
échelles géographiques entre les principaux pôles urbains
français, nous permet ainsi d'étudier et de comprendre de plus
près les logiques d'organisation et de structuration de l'espace socio-
économique entre deux préfectures de département,
très proches spatialement, mais qui sont séparées par une
limite politico-administrative majeure.
I - Exemples de recompositions territoriales entre Pau et
Tarbes.
Les recompositions territoriales de développant entre Pau
et Tarbes que nous allons étudier ici, constituent un exemple
supplémentaire de mise en évidence de l'évolution des
rapports de l'homme à l'espace, soulignant une fois de plus que l'espace
socio-économique s'organise aussi (et souvent) indépendamment du
maillage politico-administratif français. Ces entreprises et ces
organismes, par leur structure et par leurs pratiques quotidiennes, confortent
leur constat de l'I.N.S.E.E. selon lequel entre Pau et Tarbes s'opère un
phénomène d'intégration (de rapprochement), tendant
à créer (ou créant déjà) un "espace
urbain". Les transgressions nombreuses de la limite départementale
et régionale posent directement le problème de la coordination
des différentes forces en présence, tant la frontière
politicoadministrative entre les deux pôles urbains peu parfois
inférer lourdement sur les structures en place (surtout pour les
entreprises et les services publics). Il s'agit ainsi de vérifier ici en
partie notre hypothèse de départ, selon laquelle le maillage
politico-administratif français est inadapté à une gestion
et un contrôle performant et objectif de l'espace
socio-économique.
Ce faisant, trois échelles géographiques de
recompositions territoriales émergent de cette enquête, mais
souvent, bien que transgressée facilement, la limite
politico-administrative constitue parfois et encore un élément de
rupture. Ces trois échelles d'analyse soulignent des logiques
différentes dans le développement des recompositions
territoriales, mais qui toutes s'inscrivent dans une remise en cause plus
générale des limites politico-administratives.
"Pour une remise en cause du maillage
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A) - Les recompositions territoriales qui transgressent
localement la limite politicoadministrative.
Entre le Béarn et la Bigorre (donc entre les
Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées), il y
a peu de collectivités locales dont les limites transgressent la limite
politico-administrative. Voici celles qui nous ont été
communiquées par la "Direction des collectivités locales"
de la Préfecture de Pau (avec une confirmation au siège des
collectivités locales concernées) :
* la communauté de communes du "pays de Vic-Bigorre -
Montaner" (1993), * le S.I.Vo.S. du "C.E.G. de Maubourguet" (date de
création inconnue),
* le syndicat d'adduction en eau potable (S.A.E.P.) "des
enclaves" (1975),
* le syndicat intercommunal des transports scolaires de
l'ensemble "Vic-Bigorre" (1984).
Toutes ces collectivités locales sont d'essence
bigourdane et relativement récentes (maximum 20 ans
d'ancienneté), quelques communes béarnaises rejoignant par la
suite le groupe ainsi formé (quand elles n'en font pas partie dés
le début). Ce faisant, les transgressions locales auxquelles nous
assistons sont récentes, les maires des communes béarnaises
souhaitant adhérer à une structure intercommunale leur
permettant, via le regroupement de communes qu'elle implique, de faciliter la
gestion de telles ou telles compétences que seuls ils ne pourraient
assumer.
L'explication la plus simple de ces rapprochements est
incontestablement la proximité géographique. Mais la limite
départementale et régionale constitue encore une barrière
à la mise en place de telles structures intercommunales, car les
communes concernées appartiennent à des régions
différentes, et qu'il est plus facile (institutionnellement) de se
rattacher à un structure intercommunale mais d'inscription
intra-départementale.
B) - Les recompositions territoriales associant les
Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-
Pyrénées.
Quatre entreprises et organismes ont été retenus
dans ce cadre, les deux premiers sont des services publics nationaux
(Le centre E.D.F. - G.D.F. services
"Béarn-Bigorre" et les ASSEDIC des "Pays de
l'Adour"), les derniers étant des mutuelles (s'inscrivant
dans le domaine privé). Ces quatres ensembles associent dans leur
structure les deux départements qui nous intéressent
(Pyrénées-Atlantiques et Hautes-Pyrénées), soit
depuis quelques décennies, soit de manière plus récente.
Ils traduisent ainsi, par leur fonctionnement, la nécessité de
dépasser le cadre politico-administratif actuel afin d'optimiser les
moyens disponibles et de procéder à une meilleure gestion des
forces en présence.
- Le centre E.D.F. - G.D.F. services
"Béarn-Bigorre".
L'appellation services
"Béarn-Bigorre" est récente (1992), mais le
fonctionnement est plus ancien (1946) ; il s'agit ici des entités
historiques que constituent le Béarn et la Bigorre). Le fait
exceptionnel ici est que généralement il y a un centre par
département, ce qui ne
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
correspond pas avec ce que nous observons actuellement entre les
2B (2B = Béarn + Bigorre). Pau gère ainsi le Béarn et
Tarbes la Bigorre.
La proximité géographique entre Pau et Tarbes,
d'une part, les proximités fonctionnelles entre les deux
préfectures départementales, d'autre part, et enfin la
volonté de rapprochement entre le Béarn et la Bigorre sont
à l'origine de cette association ancienne entre les 2B.
C'est ainsi que le centre de Billère (avant il s'agissait
de celui de Pau) gère l'ensemble Béarn- Bigorre, Tarbes
étant donc sous la tutelle de ce dernier. Cependant, les communes de Ger
et de Pontacq sont dépendantes de Tarbes en raison de leur
proximité avec cette dernière ville moyenne, alors qu'en
réalité elles appartiennent au département des
Pyrénées-Atlantiques. Le rôle de la distance est donc ici
important (effet de seuil).
Depuis juin 1998, la gestion des services aux particuliers est
dissociée de celle des services aux gros consommateurs (entreprises,
industries par exemple). La direction régionale est ainsi
localisée à Toulouse (effet d'échelle), ce qui ne change
rien pour les petits consommateurs comme nous : nous dépendons en effet
toujours du centre E.D.F. - G.D.F. services "Béarn-
Bigorre".
- Les ASSEDIC des "Pays de l'Adour".
Les ASSEDIC des "Pays de l'Adour"
associent le département des Pyrénées-Atlantiques à
celui des Hautes-Pyrénées depuis le 1er janvier 1959, date de
leur création. Cette structure traduit ainsi "le refus commun des
organisations syndicales et patronales de se placer dans la dépendance
des métropoles régionales. Il est vrai que leur création,
en 1959, coïncidait avec la période d'incertitude d'une
région "Adour"".
La faible distance et les proximités fonctionnelles entre
Pau et Tarbes sont aussi et toujours à l'origine de cette union
décidée au niveau national, et qui cristallise en 1959 des
complémentarités déjà nombreuses entre les deux
départements.
Le siège principal de l'ensemble ainsi formé est
à Pau (qui s'occupe des Pyrénées- Atlantiques), Tarbes
constituant donc une sous-direction (s'occupant ainsi des Hautes-
Pyrénées). De même, cette union entre les deux
départements appartenant actuellement à deux régions
différentes, ne représente pas en France un cas particulier. En
effet, il existe d'autres associations (ou unions) comparables dans le
territoire national (toujours au niveau des ASSEDIC) qui
résultent des mêmes logiques évoquées auparavant.
Ces deux exemples de services publics nationaux traduisent, par
leur inscription spatiale, la nécessité et la volonté de
s'émanciper des cadres territoriaux établis par le pouvoir, afin
d'optimiser les moyens mis à leur disposition, cela en tenant compte des
réalités (démographique, par exemple) de l'espace
socio-économique. La complémentarité entre Pau et Tarbes
et plus largement entre les deux départements, permet ainsi un meilleur
fonctionnement des services fournis à la population.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
- Adour Mutualité.
L'appellation date de 1987, avant il s'agissait de la
"Caisse Chirurgicale du Bassin de l'Adour", datant de 1933.
Cette "Caisse Chirurgicale du Bassin de l'Adour" s'inscrivait
à la fois dans les départements 64 et 65, car les
personnalités politiques, les initiateurs de cette caisse étaient
originaires des deux départements. Cependant l'implantation est plus
forte en Béarn (Pyrénées-Atlantiques) qu'en Bigorre
(Hautes-Pyrénées), du fait même que les adhérents
étaient (et sont encore pour certains) plus souvent implantés
dans les Pyrénées- Atlantiques que dans les Hautes-
Pyrénées.
Cependant, l'aire d'influence d'Adour
Mutualité ne se limite pas qu'aux deux départements
précédemment cités. En effet, Adour
Mutualité gère aussi des porte-feuilles de clients
situés dans les autres départements limitrophes. Malgré
cela, l'implantation de cette dernière est surtout béarnaise
(corrélativement au nombre de clients concernés), P.A.M.
(Pyrénées- Atlantiques Mutualité) s'occupant
plutôt de la partie ouest (Pays Basque) du département.
Le siège central est ainsi à Pau. Le
développement récent (et son renforcement) en Bigorre, par
l'implantation à Tarbes en 1992 d'une agence, puis à Lourdes en
1997 d'une autre agence, a pour but de répondre aux besoins des
adhérents, de mieux satisfaire leurs demandes, d'être plus proches
d'eux. De ce fait, la proximité géographique entre Pau et Tarbes
et leurs proximités fonctionnelles, constituent un plus et l'une des
raisons à ce rapprochement renforcé récemment entre les
deux départements. Il se crée ainsi une "synergie" entre
les différents ensembles.
- Sud-Ouest Mutualité.
A l'origine, le groupe est implanté à Tarbes depuis
1948 sous le nom de "Pyrénées- Bigorre".
L'implantation d'un autre siège à Pau (le seul ici) remonte
à 1994. En effet, le développement récent sur les deux
départements de leur concurrent direct Adour
Mutualité, a incité les dirigeants de Sud-Ouest
Mutualité a créer sur Pau un nouveau siège. De
plus il faut souligner aussi "la volonté d'apprendre à vendre
en dehors de son département d'action". Les proximités
géographiques et fonctionnelles entre Pau et Tarbes jouent elles aussi
encore une fois un rôle très important, associées au
phénomène de concurrence qui se développe dans le cadre
des mutualités.
Le siège central est à Tarbes, et actuellement, il
y a quelques accords de partenariat et de principe avec les Landes. Cependant,
malgré un rapprochement favorable avec ce département, rien de
très important n'a été réalisé à ce
moment.
Les deux derniers exemples que nous venons de développer
mettent en avant le rôle primordial de la faible distance entre Pau et
Tarbes, la nécessité d'agréger des ensembles de grande
taille (en l'occurrence des départements) pour permettre un
développement plus large de l'organisme ou de l'entreprise
concernés, et surtout les effets de la concurrence qui poussent ici les
mutualités à s'implanter de l'autre côté de la
limite régionale, afin que le concurrent direct ne prennent pas une
avance trop importante.
Ainsi, la proximité géographique entre Pau et
Tarbes favorise les rapprochements fonctionnels, que les
nécessités économiques, sociales encouragent de plus en
plus. L'association Béarn-Bigorre dans le cadre du centre
E.D.F.-G.D.F. services "Béarn-
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Bigorre" et
Pyrénées-Atlantiques - Hautes-Pyrénées dans celui
des ASSEDIC des "Pays de l'Adour" (rôle de
services publics nationaux), traduit donc une intégration Pau-Tarbes
relativement ancienne. Il s'agit donc d'un héritage historique dû
à des rapprochements plus anciens, de quelques décennies.
Concernant Adour Mutualité et Sud-Ouest
Mutualité, c'est la nécessité économique
qui fait loi, la concurrence (et toujours la proximité
géographique) obligeant des implantations en dehors de son
département d'appartenance (cf le rôle aussi des économies
d'échelles).
Dans ces deux derniers cas, ce sont donc à des
recompositions territoriales que nous assistons, mais qui ne traduisent pas ici
de véritables rapprochements entre Pau et Tarbes. Il s'agit plus d'une
logique de marché (perspective économique) que d'une logique
d'intégration des deux villes moyennes, qui traduirait ainsi une
véritable remise en cause de la limite politicoadministrative.
Ces recompositions territoriales, qui remettent en cause
indirectement la pertinence et la validité de la limite
politico-administrative, en l'occurrence départementale et
régionale, soulignent aussi l'importance de la métropolisation et
de la polarisation de Pau sur Tarbes, les sièges de direction
étant le plus souvent implantés à Pau. De même, ces
rapprochements, en rapport avec les structures des entreprises et des
organismes concernés, ont des origines très diverses et une
ancienneté plus ou moins accentuée.
Ainsi, le centre E.D.F.-G.D.F. services
"Béarn-Bigorre" et les ASSEDIC des "Pays de
l'Adour" témoignent d'une articulation
inter-départementale et inter-régionale relativement ancienne
(respectivement 1946 et 1959), et traduisent par conséquent une
intégration Pau- Tarbes beaucoup plus affirmée que pour les
autres ensembles d'essence plus récente. Le fait est cependant
qu'à l'époque, les régions de programmes n'étaient
pas encore mises en place, la limite politico-administrative à franchir
n'étant alors que départementale. Pour les mutuelles, il s'agit
d'une intégration plus récente mais qui s'appuie des bases plus
anciennes.
C) - Les entreprises et les organismes engendrant des
aires d'influences.
Quatre autres exemples sont développés ici, ils
vont nous permettre de montrer que la polarisation et la métropolisation
des villes (des pôles urbains) remet en cause fortement la taille et la
pertinence des mailles départementales (et régionales, dans une
moindre mesure). Les aires d'influences qui se dégagent, se
développent souvent (eu égard à l'entreprise où
à l'organisme pris en compte) très largement en dehors du
département où s'inscrit le centre à partir duquel la
polarisation s'amorce.
- Le Parvis d'Ibos : "Scène National
Tarbes-Pyrénées".
La mission du Parvis d'Ibos est double :
diffusion de spectacles et animation culturelle. Depuis 1993 (date du 20°
anniversaire du Parvis), le taux de fréquentation et la qualité
des spectacles sont constants, sachant que l'année 1993 a
constitué une forte et bonne saison, en raison même de
l'anniversaire. De plus, depuis 1996, il n'y a plus de concurrence avec le
théâtre de Tarbes, le Parvis d'Ibos assurant
aussi depuis cette date les représentations à Tarbes. 50 à
60 spectacles sont ainsi proposés chaque année, ce qui
représente environ plus de 70 représentations par an.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Sur les 2000 abonnés du Parvis d'Ibos
(1996-1997), 25% viennent de Tarbes (la ville- centre), 25% du bassin de
population de Tarbes, 25% du reste du département des Hautes-
Pyrénées, 20% des Pyrénées-Atlantiques (à
l'est d'une ligne passant par Orthez-Oloron). Quant au pourcentage restant
(5%), il correspond aux individus venant du sud du Gers et de l'ouest de la
Haute-Garonne.
- Le Parvis de Pau.
Le Parvis de Pau étant géré
par celui de Tarbes, il entre par conséquent dans l'aire d'influence de
ce dernier. Entre ce dernier et celui d'Ibos, il s'agit donc plus d'une
"situation de complémentarité que de concurrence".
- l'Élan Béarnais Pau-Orthez
(E.B.P.O.).
Ayant déménagé d'Orthez pour s'installer
à Pau le 12 janvier 1991, le club de Basket-Ball de Pau-Orthez
évolue en Pro. A, nom du championnat de première division
nationale. Chaque année (en 1995 ici) le club attire environ 6500
spectateurs en moyenne par match, dans l'enceinte du Palais des Sports de Pau,
construit à cet effet. "La zone de chalandise du club (selon les
dirigeants) recouvre les Pyrénées-Atlantiques, la moitié
ouest des Hautes-Pyrénées et la moitié sud des Landes,
auquel on peut ajouter un potentiel ponctuel dans les agglomérations de
Bordeaux et de Toulouse". De même, "la portée de l 'E.B.
P. O. pour les abonnements, va du gave d'Oloron et de l'Adour à l'ouest,
à la limite est du département à l'est, Bordeaux, Toulouse
et la Côte Basque ne sont que des points détachés. Dans la
mesure où un match est important, l'aire d'attraction du public se
développe surtout en direction de la Côte Basque, vers le sud des
landes et englobe, dans une moindre mesure, Bordeaux et Toulouse".
- l'Aéroport
"Pau-Pyrénées".
L'aire d'influence (ou la zone de chalandise) de
l'Aéroport "Pau-Pyrénées"
(anciennement Pau-Uzein) correspond, grosso-modo, à un
cercle dont le rayon est constitué des espaces situés à
moins d' 1 heure 30 minutes de l'aéroport (il s'agit ici du temps de
trajet maximum pour accéder à l'aéroport). A
l'intérieur de cercle, 75% des gens concernées sont à
moins de 45 minutes de l'aéroport, les 25% restants à plus de 45
minutes et moins d' 1 heure 30 minutes.
600000 personnes par an (590000 exactement pour 1997) prennent
l'avion à l'Aéroport
"Pau-Pyrénées". D'années en années,
nous observons une progression des effectifs, qui se décomposent ainsi
:
* 76% sont des Pyrénées-Atlantiques, * 17% sont des
Hautes-Pyrénées,
* 5% sont du Gers,
* 2% sont des Landes.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Entre l'aéroport de Pau et celui de
Tarbes-Ossun-Lourdes, il s'agit plus actuellement d'un rapport
de complémentarité que de concurrence. Cependant il est difficile
de prévoir les rapports futurs... Le fait est que la clientèle
n'est pas la même entre les deux aéroports (elle est à 80%
internationale et à 20% nationale à
Tarbes-Ossun-Lourdes, du fait de la proximité de
Lourdes).
Ce qu'il est intéressant de remarquer aussi, c'est que
l'aire d'influence de l'aéroport de PauUzein retrouve presque
parfaitement le cadre des Pays de l'Adour. En effet, elle s'étend
jusqu'à Tarbes (même un peu plus loin), dans les Landes,
jusqu'à Dax, Mont-de-Marsan et Aire-sur-l'Adour, dans le Gers,
jusqu'à Eauze. Enfin, les Pyrénées-Atlantiques
appartiennent complètement à l'aire d'influence ainsi
dégagée.
- l'Université de Pau et des Pays de
l'Adour.
L'aire de recrutement de l'Université de Pau et
des Pays de l'Adour (U.P.P.A.) témoigne de
l'articulation aturienne de ce service public national. En effet, il
apparaît clairement que l'U.P.P.A. développe son aire d'influence
dans les Pays de l'Adour, ce qui justifie d'autant plus son appellation. De
même, elle entretient des relations avec Tarbes, qui, bien que
dépendant d'une autre académie (celle de la région
Midi-Pyrénées) constitue une extension de cette dernière
(antennes paloises à Tarbes).
En 1996-1997, le recrutement de l'Université est ainsi le
suivant :
* 59,2% des étudiants inscrits viennent des
Pyrénées-Atlantiques (8646), * 14,9% des Landes (2172),
* 10% des Hautes-Pyrénées (1475),
* 2% du Gers (292),
* 2% de la Gironde (287).
L'aire de recrutement de l'Université de Pau et
des Pays de l'Adour s'inscrit donc parfaitement dans le cadre
territorial des Pays de l'Adour, tout comme l'aire d'influence de
l'Aéroport "Pau-Pyrénées" ou
encore celle de E.B.P.O. Notre but ici n'est pas de montrer
une régionalisation du type "Pays de l'Adour", mais plutôt
d'insister le rôle de la polarisation des pôles urbains (et de la
métropolisation dans le cadre de Pau qui, a priori, concentre
beaucoup plus de services polarisant que Tarbes) dans la mise en
évidence du manque de pertinence des mailles départementales et
régionales.
La domination de Pau sur Tarbes (le noyau urbain le plus proche)
s'accentue donc encore plus avec ces trois derniers exemples : Pau polarise et
métropolise donc un ensemble régional qui s'apparente très
fortement aux Pays de l'Adour. Cette logique de polarisation et de
métropolisation observe cependant quelques éléments de
rupture, liés notamment (et encore) à la limite
politico-administrative majeure.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
II - La persistance d'éléments de
rupture.
Si de nombreuses recompositions territoriales se
développent à cheval sur les deux départements retenus
pour notre étude, il n'en demeurent pas moins des éléments
de rupture à l'intérieur même de ces structures et
organismes, éléments de rupture que souvent la limite
politico-administrative cristallise fort bien. Ainsi, peu de
collectivités locales transgressent localement cette limite
régionale, le poids de cette dernière étant relativement
encore important à ce niveau scalaire. Dans nos enquêtes,
nombreuses sont les structures intercommunales qui ne prévoient pas
d'évolution en faveur de futurs rapprochements avec le Béarn.
De même, concernant les entreprises et les organismes
associant les deux départements, il nous a souvent été
fait remarquer le rôle des fortes identités culturelles et des
mentalités différentes entre béarnais et bigourdans, leur
confrontation aboutissant parfois à des difficultés majeures dans
l'élaboration d'un projet commun. Pour les mêmes raisons, à
l'intérieur du centre E.D.F.-G.D.F. services
"Béarn-Bigorre" "il est ainsi parfois difficile de
travailler ensemble".
La limite départementale (et surtout régionale ici)
pose des problèmes importants de coopération entre
l'U.P.P.A. et l'agglomération tarbaise. Comme le font
remarquer les auteurs du rapport T.A.D., "la coupure entre deux
départements, et surtout deux régions distinctes, avec leur
propre recteur et leur propre politique, rend difficile une meilleure
coopération entre le pôle universitaire et le pôle tarbais
(l'I. U. T. de Tarbes dépend de l'Université de Toulouse - Paul
Sabatier) : actuellement les relations sont fondées sur des rapports
humains, qui peuvent être remis en cause à chaque nouveau recteur
ou nouveau Président, entraînant ainsi la réorientation des
politiques menées".
Ainsi, il va de soi que les recompositions territoriales
auxquelles nous assistons sont encore dépendantes en partie des effets
inhérents à la présence de cette limite
politico-administrative majeure, relativement pesante pour les
collectivités locales tels que les S.I.V.O.M., Communautés de
Communes et autres regroupements intercommunaux.
Des éléments de rupture persistent encore,
soulignés par la limite politico-administrative qui cristallise donc des
mentalités et des comportements différents de part et d'autre de
cette dernière. Ils rendent ainsi souvent difficiles des rapprochements
qui pourtant seraient beaucoup plus bénéfiques que les situations
de concurrences auxquelles nous assistons régulièrement. Certes,
il y a bien des rapprochements et des recompositions territoriales entre Pau et
Tarbes, et qui remettent en cause la limite politico-administrative, mais il
demeure encore des éléments de différenciation entre ces
deux départements...
CONCLUSION de la seconde Partie.
Le constat de l'I.N.S.E.E. unissant Pau et Tarbes dans le cadre
d'un "espace urbain" est donc relativement confirmé par les
cartographies d'indicateurs statistiques tels que les densités de
population, l'évolution de la population sur les 28 dernières
années, ou encore par les migrations (journalières)
domicile-travail hors de la région. La limite politico-administrative
majeure entre les préfectures de département est souvent
transgressée dans ces nombreux cas
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
de figure, ce que l'enquête de terrain, par les
recompositions territoriales qu'elle met en évidence, souligne
relativement bien.
Cette dernière met aussi en évidence trois niveaux
scalaires de recompositions territoriales, la première étant la
transgression locale de la limite politico-administrative, la seconde
étant l'association Béarn-Bigorre et/ou
Pyrénées-Atlantiques - Hautes-Pyrénées, la
troisième faisant souvent référence au cadre territorial
des Pays de l'Adour. Ces deux derniers niveaux
scalaires sont ceux où la limite politico-administrative
majeure est la plus souvent remise en cause, avec une métropolisation et
une polarisation paloise de plus en plus accentuée (avec une influence
particulièrement forte sur Tarbes, le noyau urbain le plus proche). En
effet, dans la majeure partie des cas, Pau et son agglomération
constituent le site où le plus grande nombre de sièges centraux
de direction sont implantés, Tarbes constituant souvent une antenne
bigourdane des différents ensembles ainsi enquêtés et
étudiés.
De même, rares sont les unions anciennes entre les deux
départements, qui traduisent ainsi un héritage historique que les
processus de recompositions territoriales actuelles (à l'inverse
beaucoup plus nombreuses) confortent et légitiment de plus en plus. Nous
avons donc affaire à des processus récents, issus de la
proximité géographique et des rapprochements fonctionnels
nombreux entre Pau et Tarbes.
Les aires d'influences (ou de chalandises), quant à elles,
mettent en avant une régionalisation de type "Pays de l'Adour",
mais nous n'avons pas la prétention de discuter ici de la pertinence et
de la validité de cette région géographique. Remarquons
cependant qu'il est souvent fait référence à ce cadre
territorial. Ces aires d'influences sont aussi essentiellement liées
à la présence de l'Autoroute 64.
De tout cela, il semble que le seuil de 3 0-35 kilomètres
représente une limite au-delà de laquelle les
phénomènes d'intégration et de rapprochements semblent
beaucoup plus difficiles (distance de proximité géographique et
fonctionnelle), mais ce constat nécessite toutes les réserves que
nous pouvons apporter, tant ce dernier est simplement le fruit d'une
déduction fondée sur un travail de terrain somme toute
très modeste. Remarquons cependant que ce seuil de 30-3 5
kilomètres correspond relativement bien aux auréoles
périurbaines (et même rurbaines) habituelles des villes moyennes,
ce qui signifie que l'exemple que nous avons étudié n'est pas
l'exception qui confirme la règle. Par conséquent, les autres
résultats obtenus (de l'enquête, par exemple) peuvent alors
être extrapolés aux autres pôles urbains français de
niveau hiérarchique équivalent (même supérieur),
nous permettant ainsi de remettre en cause la pertinence de l'ensemble du
maillage politico-administratif français, et non pas uniquement la
maille départementale et régionale qui sépare Pau et
Tarbes.
Certes, il nous est difficile de dire si tous les
éléments sont réunis pour faire de Pau-Tarbes une
agglomération bipolaire, car, comme le fait remarquer une partie de
notre travail, de nombreux éléments de rupture persistent encore,
malgré une domination paloise de plus en plus soulignée.
La question qui se pose maintenant consiste donc à savoir
si une réforme française est nécessaire (au moins au
niveaux scalaires qui nous intéressent), ce que la troisième
partie va s'efforcer de développer.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Troisième Partie :
Les solutions à envisager : une réforme
française est-elle nécessaire ?
"Il faut clarifier à la fois les compétences,
les moyens financiers, les rôles de l'État, des régions,
des départements, des communes et des différentes formes
d'intercommunalité. Une tâche difficile quand de nombreux
élus ont plusieurs casquettes sur la tête du fait du cumul des
mandats. L'État doit assurer une répartition équitable des
charges et des moyens. Nous avons souhaité renforcer le rôle des
régions parce qu'elles se trouvent à l'interface entre le
processus ascendant, qui émane des mobilisations locales, et le
processus descendant, qui équilibre et intègre au nom de
l'intérêt général". (...) "Le débat porte
moins sur les principes et la place des différents niveaux que sur
l'articulation très concrète des compétences et des
financements des différentes instances. Un débat très
complexe et qui demeure non tranché à bien des
égards".
Cette citation de Dominique Voynet faite dans le
cadre de la présentation de son avant-projet de Loi d'Aménagement
(et de Développement) Durable du Territoire (L.A.D.T.
du 11 juin 1998), souligne la nécessité de procéder
à une réflexion profonde et à un
rééquilibrage (une meilleure répartition) des
différentes compétences dévolues aux principales mailles
politicoadministratives actuelles, ainsi que de mettre en place et de favoriser
les espaces projet que proposent les lois de 1990, 1992, 1995 (et de 1998).
Cette troisième partie constitue en quelque sorte la
synthèse des deux premières parties développées
dans ce mémoire. Elle va nous aider, dans le cadre de la théorie
dialectique, à dépasser les paradoxes apparents qu'offre le
développement d'espaces projet, des espaces de gestion et d'organisation
de l'espace pour l'avenir, en parallèle, et parfois sur, des mailles
politico-administratives anciennes, souvent inadaptées aux
réalités factuelles du terrain socio- économique. Il
s'agit donc pour nous de vérifier la deuxième hypothèse de
notre mémoire, celle de la nécessité de procéder en
France à une réforme du maillage politico-administratif.
Ce faisant, et en partant aussi des solutions proposées
dans le cadre du secteur d'étude qui nous intéresse, plutôt
que d'envisager une réforme globale du maillage politico-administratif
français, nous nous intéresserons à certaines mailles
précises (départementales, et régionales dans une moindre
mesure), en nous demandant aussi quel est l'avenir de ces espaces projet.
Sont-ils des solutions de transition, de vagues embryons sans avenir, ou alors
les prémices d'une réforme plus globale et plus
générale ?
Le problème est que la multiplication des niveaux
politico-administratifs augmente les coûts de fonctionnement et allonge
les délais de décision, ce qui n'est pas fait pour satisfaire le
"simple" citoyen qui est souvent perdu dans cet ensemble complexe. Comme le
disait Dominique Voynet dans sa citation, nous avons en
réalité affaire à un problème de décalage et
non pas de hiérarchie.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
A) - Les espaces projet français de la L.O.A.D.T.
de 1995 : exemples d'application entre Pau et Tarbes.
La Loi d'Orientation pour l'Aménagement et le
Développement du Territoire (L.O.A.D.T. du 4
février 1995), définit (et renforce) deux instruments en vue de
la recomposition du territoire national dans l'optique de la France de 2015.
Ces deux instruments, ou espaces projet, s'inscrivent donc sur une
période de 20 ans : il s'agit d'abord des réseaux de villes, et
ensuite des "pays".
I - Les réseaux de villes : le réseau de
villes "Pau-Tarbes-Lourdes" ou "Pyrénées
Métropole".
Après avoir retracé la genèse et les
objectifs, les nouveaux rapports de l'élu local à l'espace, et
apporté quelques critiques et limites à la notion de
réseaux de villes, nous nous intéresserons à
"Pyrénées Métropole", le réseau de villes
qui associe Pau, Tarbes et Lourdes, en retraçant ainsi les objectifs
poursuivis et les résultats obtenus.
A) - Les réseaux de villes définis par le
C.I.A.T. et la L.O.A.D.T.
- Les objectifs des réseaux de villes :
possibilités et avantages.
Définis lors du Comité Interministériel
d'Aménagement du Territoire du 5 novembre 1990
(C.I.A.T.), renforcés et consacrés par la
L.O.A.D.T., les réseaux de villes font l'objet en
France d'une politique d'État menée par la
Délégation à l'Aménagement du Territoire et
à l'Action Régionale (D.A.T.A.R.) depuis la fin
des années 1980. "Le C.I.A.T. décide que seront
élaborés : des programmes de réseaux de villes
destinés à concrétiser le rapprochement des villes
décidées, pour valoriser leurs atouts européens, à
mettre en commun leurs complémentarités pour :
-> renforcer la compétitivité
économique des territoires qu'elles irriguent, -> favoriser
leur ouverture vers l'Europe".
Les réseaux de villes s'inscrivent donc fondamentalement
dans une logique réticulaire d'organisation de l'espace, où sont
favorisées les relations et les inter-relations entre les points et les
lieux constituant cet espace. Les distances séparant les villes
constitutives des réseaux en question sont généralement
proportionnelles aux poids démographiques de ces mêmes villes, ce
qui explique que des villes parfois distantes de plusieurs dizaines de
kilomètres s'intègrent pourtant dans un tel projet.
Ce faisant, les réseaux de villes s'inscrivent aussi dans
la discontinuité géographique : "un réseau de villes
(...) peut être défini comme une alliance, sur des projets de
développement, entre des maires urbains dans une discontinuité
géographique". Le mot-clef ici est donc la
complémentarité, complémentarité qui doit permettre
aux villes "moyennes" (dans une perspective démographique,
c'est-à-dire dont la population est comprise entre 20.000 et 200.000
habitants), "intermédiaires" (par rapport aux échelons de la
hiérarchie urbaine européenne), et situées en
périphérie des grands pôles ou axes de
développement, de franchir un seuil de lisibilité, de monter dans
la hiérarchie urbaine française, et de mettre en place une
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
forme de "gouvernance locale". Les réseaux de
villes constituent ainsi une solution pour les espaces intermédiaires
qui veulent contrebalancer les poids de leurs métropoles
régionales respectives ; ils sont ainsi des leviers qui poussent
à l'alliance.
- Les nouveaux rapports de l'élu local à
l'espace.
Lors de la mise en place des réseaux de villes, le rapport
de l'élu local à l'espace (d'action et de
légitimité) s'en retrouve modifié :
Frédéric Tesson, dans sa thèse sur
"les réseaux de villes en France : recherche sur les
rapports de l'élu local à l'espace"pose comme
postulat de départ que "le rapport de l'élu local à
l'espace est un rapport lié au territoire, dans sa dimension
institutionnelle (politique, administrative, juridique et
électorale)". Son hypothèse (ou plus exactement sa
thèse) consiste à démontrer que ce rapport est en train
d'évoluer, compte-tenu notamment de la mondialisation des
échanges, des entreprises qui développent leurs stratégies
d'implantation et de développement en dehors des cadres
politicoadministratifs existants, et aussi pour les autres raisons que nous
avons développées dans les deux premières parties de ce
mémoire. Enfin, son hypothèse de terrain suppose que les
réseaux de villes peuvent nous montrer que ces relations
évoluent. Son travail lui a ainsi permis d'aboutir à plusieurs
conclusions, dont celle, primordiale, que les réseaux de villes bougent
beaucoup plus dans le discours que dans la pratique.
En effet, le discours constitue un rapport à l'espace pour
l'élu qui doit rapporter des voix en vue des futures
échéances électorales, le mode de fonctionnement de
l'élu étant conditionné par son espace de
légitimité, et non pas par l'espace d'action sur lequel repose un
réseau de villes, a fortiori quand il se développe
à cheval sur plusieurs départements ou régions (ce qui
d'ailleurs est souvent le cas). De même, le problème de
l'information (des citoyens et des habitants des villes concernées) et
la difficulté à rassembler en un lieu commun et à une date
commune des élus et des responsables dont les emplois du temps ne
coïncident pas toujours, constituent une conclusion supplémentaire
à laquelle aboutit l'auteur. Cette dernière permet d'expliquer en
partie l'échec des réseaux de villes en France, huit ans
après leur mise en place par le C.I.A.T. Car sur les 63
villes qui s'étaient associées en 19 réseaux de villes
différents (certaines appartenant même à deux
réseaux de villes contigus et/ou connexes), seule une petite
moitié fonctionne encore actuellement.
Néanmoins, "ce dernier (en parlant de
l'élu local) semble prendre conscience que l'avenir de sa commune
et, plus largement de l'agglomération que celle-ci dynamise, se joue
dans un territoire plus vaste et en tout cas non directement superposable aux
limites du territoire politico-administratif dans lequel elle s'insère.
Cette attitude le pousse à reconsidérer sa vision du territoire
pour se diriger vers une définition plus fonctionnelle, plus proche des
réalités de développement".
- Inconvénients et limites des réseaux de
villes.
Si le réseau de villes constitue un instrument, a
priori, efficace d'aménagement du territoire, il n'en pose pas
moins certains problèmes, surtout quand il se développe à
cheval sur plusieurs départements et/ou régions. Le premier
problème est directement lié à la conception même du
réseau de villes qui associe uniquement des lieux entre eux (des villes,
des agglomérations,...) : qu'en est-il alors des espaces interstitiels,
qui eux, au contraire, supposent une organisation aréolaire de l'espace.
Il ne faut pas oublier qu'en dehors des réseaux de villes, ces
dernières
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
polarisent et animent normalement une région (un espace
géographique périphérique) composée de petites
villes, de bourgs plus ou moins ruraux, d'espaces marginalisés,...
Comment concilier alors ces deux problématiques, a priori
contradictoires ?
Ensuite, il ne faut pas négliger non plus les
problèmes d'interférences avec les compétences des
départements et des régions. Un maire faisant partie d'un
réseau de villes interdépartemental ou inter-régional doit
faire face à de nouvelles compétences : "Ainsi, lorsque les
maires en réseau évoquent des dossiers tels que le tourisme ou
l'action économique, ils franchissent le cadre de leurs
compétences légales pour se positionner sur des sujets
dévolus à d'autres niveaux de la "hiérarchie territoriale
tacite" (département, région). De même, le fait de se
positionner clairement dans une problématique d'aménagement du
territoire, en s'adressant directement à l'État et à la
D.A. T.A.R., pose la question du rôle de la région,
court-circuitée ici, dans une de ses compétences
majeures".
Enfin, et cela constitue notre dernière limite, les
réseaux de villes en France n'intéressent (ou n'ont
intéressé) au maximum qu'une soixantaine de maires. Faible
proportion rapportée aux 36551 communes présentent sur l'ensemble
du territoire. Ces réseaux de villes ne sont-ils alors que le "jouet" de
quelques privilégiés, ou alors les prémices d'un futur
instrument plus large et plus global d'aménagement du territoire ?
En fait, si de nombreux maires se sont engagés il y a
quelques années dans une démarche de réseau de villes,
c'est beaucoup plus pour les apports financiers non négligeables
(émanant de la D.A.T.A.R., et utilisés par la suite à des
fins totalement étrangères au supposé réseau de
villes pour lesquels ils étaient normalement consacrés), que par
un véritable désir de s'associer à une structure dont les
objectifs (et les résultats) n'étaient alors qu'incertitudes et
suppositions. "Pyrénées Métropole" ou le
réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes" constitue à nos yeux
un exemple qui confirme cet état de fait.
B) - "Pyrénées Métropole" ou
le réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes".
Se développant à cheval sur la région
Aquitaine et Midi-Pyrénées, le réseau de villes
PauTarbes-Lourdes (ou Pyrénées Métropole) est né en
1991. Son objectif est le suivant : "Intensifier les échanges entre
les trois villes pour l'intégration progressive des bassins d'emplois
dans la perspective de l'émergence d'une métropole des
pyrénées au sein des Pays de l'Adour". Deux ans plus tard
(en juin 1993), une étude de faisabilité montre qu'il peut
s'appuyer sur des réseaux sociaux et économiques
préexistants, et met en évidence une
complémentarité possible entre ces trois villes.
Le niveau scalaire retenu et la position géographique des
trois villes à l'échelle du Sud-Ouest Français, justifient
d'autant les rapprochements et la mise en place de ce réseau de villes.
En effet, "à près de 200 kilomètres de leurs
métropoles régionales respectives, ces trois villes jouent
clairement la coopération dans une perspective aménagiste",
ce que l'on conçoit clairement au regard des densités de
relations qui s'établissent entre les trois villes. La limite des aires
d'influences de Bordeaux et de Toulouse étant prégnante, la
logique de la constitution du réseau de villes est relativement simple :
combler le vide dans l'armature urbaine de la France entre les deux
métropoles, en partant du principe que l'union, mais aussi la
complémentarité, fait la force.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
L'idée d'un réseau de villes Pau-Tarbes-Lourdes est
une idée endogène au secteur d'étude
considéré, à l'inverse de nombreux autres réseaux
de villes dont la paternité et la genèse reviennent à la
D.A.T.A.R. Cette volonté d'aménagement du territoire est
sous-tendue par l'ambition d'animer une région, celle des Pays de
l'Adour. Cependant, le réseau de villes s'excentre largement vers le
sud-est dans le cadre géographique ainsi défini, ce qui pose des
problèmes, outre ceux de sa pérennité et de sa survie. Car
aujourd'hui, ce réseau de villes ne fonctionne plus.
André Labarrère (député-maire de
Pau) déclarait il y a peu de temps : "le réseau de villes
Pau-Tarbes-Lourdes est un échec". Les mêmes propos nous ont
été tenus récemment par Xavier Piolle,
bien qu'il y ait actuellement un essai de relance...
II - Les "pays" : le "Pays de Béarn" ou
"Béarn XXI° siècle".
Deuxième espace projet issu de la
L.O.A.D.T., les "pays" constituent une deuxième forme
possible (et non contradictoire avec celle des réseaux de villes, au
contraire) d'aménagement, de développement et de recomposition du
territoire national. Le développement qui suit s'articule à
l'identique de celui concernant les réseaux de villes ; nous nous
intéresserons ensuite au "Pays de Béarn" ou
"Béarn XXI° siècle"
A) - Les "pays" définis par la loi A.T.R. et la
L.O.A.D.T.
- Les objectifs des "pays" : possibilités et
avantages.
La loi d'Administration Territoriale de la République (loi
A.T.R. du 8 février 1992, ou loi "Joxe"),
renforcée par la L.O.A.D.T., met en place, en France,
la politique de "pays". Réactivant et renforçant
l'échelle micro-régionale, le pays suppose pour se mettre en
place "une communauté locale d'intérêts
économiques et sociaux ainsi que, le cas échéant, les
solidarités réciproques entre la ville et l'espace rural".
Polysémique par essence, la notion de pays pourrait réanimer
à l'avenir les 329 arrondissements métropolitains actuels, ce qui
n'est pas sans rappeler aussi les quelques 300 pays géo-historiques
formés depuis l'époque gallo- romaine (les pagi gallo-romains) ou
médiévale.
Sans être pour autant un nouvel échelon
politico-administratif, de taille infra-départementale mais
supra-cantonale, les pays recouvrent donc grosso-modo les mailles
politicoadministratives des arrondissements, ces derniers correspondant souvent
aux bassins d'emploi définis par l'I.N.S.E.E. Le pays s'appuie ainsi
finalement sur les logiques fonctionnelles des territoires et sur les
solidarités de voisinage qui s'y développent. L'article 2 de la
L.O.A.D.T. d'ailleurs nous le confirme : les bases politiques
d'un pays peuvent être les suivantes : "un projet commun de
développement, une organisation du territoire fondée sur les
notions de bassin de vie, une constitution d'espaces cohérents et
homogènes".
Le pays, dans ses différentes configurations spatiales, se
développe parfois (mais rarement) à cheval sur plusieurs
départements (ce que n'interdit pas la loi). Citons par exemple :
-> le pays de "Redon et de Vilaine" se développe
à cheval sur l'Ille-et-Vilaine, le Morbihan et la Loire-Atlantique
(région Bretagne). Ses bases reposent sur des logiques
géo-historiques, d'où sa configuration actuelle.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
-> le pays du "Plateau de Millevaches" se
développe à cheval sur la Corrèze, la Creuse et la
Haute-Vienne (Région Limousin). Il correspond en partie à une
réalité topographique (cf la géographie physique)
associée aussi à des réalités
géo-historiques.
-> le pays des "Cévennes viganaises" se
développe à cheval sur le Gard et l'Hérault (région
Languedoc-Roussillon). Il s'agit d'un espace ayant connu la reconversion des
industries du textile et la désertification rurale.
Le pays, espace d'identité, doit permettre, entre autres,
d'optimiser la gestion des services publics sur un espace homogène et
cohérent (relativement), et de permettre un développement local
tenant compte des gens et des élus concernés par la mise en place
du projet en question. Il s'agit donc d'articuler deux logiques
complémentaires, l'une venant d'en "haut", l'autre venant d'en "bas"
(démocratie participative).
- Des territoires à "mémoire de
forme".
Cependant une question se pose : la maille du pays
constitue-t-elle une maille parfaite ? Autrement dit, existe-t-il un optimum
dimensionnel pour le pays, un idéal scalaire permettant
d'appréhender au mieux les questions de développement local et
territorial ? Il existe en fait une multitude de tailles, mais toutes se
rapprochent plus ou moins des arrondissements précédemment
cités.
Or, il ne faut pas oublier que ces territoires sont, certes,
à "géométrie variable" (ou configuration variable),
mais qu'ils sont aussi, pour reprendre un phénomène de physique
appliquée, à "mémoire de forme". Ainsi, si la
politique des pays semble, a priori, relativement bien fonctionner,
c'est aussi parce qu'elle s'appuie sur d'anciens territoires qui sont
légitimés et vécus depuis longtemps, et qui reprennent
souvent d'anciennes limites provinciales (devenues départementales pour
la plupart avec la Révolution). En conséquence, ces territoires,
dans la mesure où ils ont été objectifs et
objectivés durant des siècles, contiennent en eux les germes de
leur future renaissance. Ces territoires à "mémoire de
forme" sont donc réactivés en cette fin de XX°
siècle, à travers certains territoires "projets" comme le pays.
Actuellement, le "Pays Basque", le "Pays de Béarn" et le
"Pays de Bigorre" réactivent ainsi les mailles des provinces et
des pays d'Ancien Régime auxquelles ils correspondaient.
Certains pays développent donc actuellement des limites
qui se développent à cheval sur plusieurs départements, eu
égard aux découpages départementaux qui dans certains cas
ont eu pour but de diviser les territoires auxquels nous faisons allusion (la
Bretagne a été, par exemple, découpée en cinq
départements). Il n'est donc pas incohérent de voir se former
aujourd'hui de nouvelles entités territoriales, de taille
infra-départementale, mais d'essence inter-départementale,
compte-tenu des limites qu'ils présentaient avant la Révolution
Française. Il en est de même pour les provinces
(principautés, pays, etc...) qui ont été regroupées
à la Révolution Française pour former des
départements : le pays basque et le béarn formèrent ainsi
le département des Basses-Pyrénées. Or aujourd'hui, nous
les retrouvons sous la forme d'espaces projet, des espaces de gestion pour
l'avenir.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
- Inconvénients et limites des "pays".
Les pays recouvrent donc normalement des espaces polarisés
(pour la majorité d'entre eux), ce qui correspond bien aux
arrondissements sur lesquels ils se développent parfois. Ces derniers
sont aussi des territoires polarisés, reposant sur des bassins d'emplois
traduisant ainsi des relations de type "centre" et
"périphérie", d'où les réalités
fonctionnelles que nous observons.
Malgré tout, il n'en demeure pas moins certains
problèmes :
D'abord, comment articuler les pays (qui privilégient une
logique aréolaire) avec les réseaux de villes (qui
privilégient, au contraire, une logique réticulaire) ? Avons-nous
affaire ici à une contradiction (dialectique) supplémentaire, ou
au contraire à deux logiques, deux espaces projet complémentaires
? Dans ce dernier cas, comment mettre en place et développer cette
complémentarité ?
Ensuite, qu'en est-il des futures compétences
dévolues aux pays ? Se superposent-elles, ou autrement dit, y-a-t'il
interférence avec les compétences des principales mailles
politicoadministratives françaises, ainsi qu'avec les structures
intercommunales actuellement en place, ou y-a-t'il ici aussi
complémentarité ?
Enfin, remarquons que malgré les dispositions de la loi
à cet égard, les limites départementales et
régionales constituent encore une barrière difficile à
franchir dans le mise en place des pays ; sur les 42 pays test retenus, seuls
cinq se développent à cheval sur plusieurs départements,
alors qu'en réalité ils pourraient être plus nombreux.
Le "Pays de Béarn", que nous allons étudier
maintenant, est un projet en cours d'élaboration, ce qui suppose de
notre part et de celle du lecteur toutes les précautions
nécessaires quant à l'analyse et à l'interprétation
du développement qui suit. Néanmoins, il semble constituer,
toujours pour nous, un bon exemple de mise en évidence des
possibilités d'évolution et de modifications qu'offrent
indirectement les lois de 1992 et de 1995.
B) - "Béarn XXI° siècle" ou le
"Pays de Béarn".
Dans les Pyrénées-Atlantiques, et à
l'initiative du Conseil Général (depuis 1995-1996), une
démarche du type des pays vise à faire émerger "de
nouveaux projets sur la base d'un découpage territorial susceptible,
d'une part, de mettre en évidence les points forts et les lacunes des
différents types "d'espaces départementaux", d'autre part de
favoriser les collaborations locales en utilisant les périmètres
d'intervention comme autant d'outils d'incitation et de
développement".
L'ambition avouée des responsables est de "retrouver
et dépasser les territoires", en s'appuyant sur la base
territoriale que constitue le Béarn, dans ses limites historiques.
L'objectif est de proposer une organisation territoriale multi-scalaire,
l'agglomération paloise polarisant la quasi-totalité de l'espace
béarnais. Le pays (au sens de la loi de 1995), dans ce cadre,
"pourrait s'organiser sur la base d'un réseau de bassins de vie
".
Deux après, les initiateurs de Béarn XXI°
siècle se détournent du projet initial d'un "Pays
de Béarn" pour s'orienter plus vers un projet de "Cité
Béarn et Adour-Pyrénées", aux frontières
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
floues, à géométrie variable (les Pays de
l'Adour, par exemple), dont le but est de permettre de meilleures relations et
plus de contacts entre les acteurs locaux (idée de synergie). Ainsi, il
s'agit plus de favoriser l'organisation que la décision.
Cependant, cette idée nouvelle ne connait aucune existence
juridique et institutionnelle comme le pays. Son but est de permettre le
renforcement de la légitimité des acteurs locaux tels que les
maires, les conseillers généraux, les présidents de
syndicats intercommunaux..., plus que de renforcer celle des élus comme
François Bayrou ou André
Labarrère. La difficulté est de montrer que cette
idée de "cité Béarn et
Adour-Pyrénées" est tout aussi intéressante pour ces
deux derniers que le projet de "Pays de Béarn" qu'ils veulent
mettre en place. En fait, nous avons affaire ici à un problème de
communication et d'intérêts, François Bayrou
et André Labarrère désirant
surtout renforcer leur influence et leur pouvoir dans le cadre d'un projet qui
se développerait à l'intérieur de leurs espaces respectifs
de légitimité. C'est d'ailleurs pour cette raison que
François Bayrou déclare lors de la
conférence (en parlant du projet en question) : "Il faut un cadre
politique clair" (...) "pour savoir ce que l'on veut faire, il faut d'abord
savoir qui on est" (ce qui est incompatible avec un projet de "cité
Béarn et Adour-Pyrénées" aux frontières
floues, à géométrie variable !! !). Le projet en cours,
quant à lui, devrait se terminer d'ici fin 1998, mais compte-tenu du
retard accumulé, une prolongation est envisagée.
Si les deux exemples que nous venons de développer
constituent des espaces projet émanant d'en "haut", celui des Pays de
l'Adour procède de la logique inverse, à savoir qu'il tire
essentiellement son origine d'en "bas". De même, le niveau scalaire
retenu franchi ici un seuil par rapport à celui des pays, nous avons
ainsi affaire dans ce cadre à un méso-espace qui éprouve
de nombreuses difficultés à affirmer son existence, sa
légitimité et surtout sa reconnaissance. Peut-être est-ce
dû au simple fait que justement il émane d'en "bas" (?). Pour
autant, le "Pays de Béarn" et le réseau de villes
"Pau-Tarbes-Lourdes" sont aussi nés dans l'ambition d'animer
cette région des Pays de l'Adour...
III - Les Pays de l'Adour : espace en devenir ?
A) - Les Pays de l'Adour : entre mythe et
réalité.
Les Pays de l'Adour constituent un espace géographique
vaste de 15200 km2 qui se développe entre la boucle de l'Adour au nord,
les Pyrénées au sud, l'Océan Atlantique à l'ouest
et le plateau de Lannemezan à l'est. La région ainsi
formée, au sens géographique du terme, repose comme l'indique
l'intitulé, sur l'association de plusieurs pays qui cohabitent tous dans
le bassin hydrographique de l'Adour. Quatre pays principaux composent cet
ensemble :
* Le Béarn
* Le Pays-Basque
* La Bigorre
* La Gascogne de l'Adour
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Le Béarn est un État ancien, une principauté
qui fut indépendante politiquement et juridictionnellement à
l'intérieur du royaume de France, du X° siècle jusqu'en
1620, date de son incorporation définitive au sein du domaine royal. Les
limites du Béarn sont restées intangibles durant cette
période.
Le Pays-Basque (Français) est composé de trois
provinces, la Basse-Navarre, le Labourd et la Soule. Ces trois dernières
n'ont jamais constitué un État à part entière comme
le Béarn. En fait c'est la pratique d'une langue commune, des coutumes
et une architecture particulières qui donnent à cette
micro-région une unité culturelle forte.
"Le comté de Bigorre apparaît en 820 avec
l'organisation féodale". Ce pays ne présente pas cependant
de véritable unité, qu'elle soit culturelle, linguistique ou
autre... En fait dans l'Histoire, la Bigorre est souvent associée au
Béarn, d'où la difficulté d'individualiser facilement
cette troisième micro-région. Mais depuis la Révolution
Française, la Bigorre fait partie d'un autre département, et
récemment d'une autre région, avec une ville-centre qui lui est
propre : Tarbes.
La Gascogne de l'Adour se développe à
l'intérieur de la boucle de l'Adour, le Pays Basque, le Béarn et
la Bigorre constituant la frontière méridionale. Respectivement
d'est en ouest, le Bas-Armagnac, le Tursan, la Chalosse et le Bas-Adour forment
cet ensemble de terres gasconnes que l'on qualifie Gascogne de l'Adour.
Ainsi, alors qu'il est relativement aisé de dégager
les Pays de l'Adour de l'ensemble plus vaste dans lequel ils s'inscrivent (le
grand sud-ouest de la France ou l'Aquitaine par exemple), notamment parce que
le fleuve Adour est une limite naturelle très visible et bien
marquée, il est cependant plus difficile de déceler une
véritable unité dans cette région, tant la
diversité des ensembles (ou pays) présentés est forte.
L'unité des Pays de l'Adour dépend donc plus de ses limites
(extérieures) que de la forte cohésion de ces mêmes pays au
sein de l'ensemble préalablement défini. "Ce qui fonde les
Pays de l'Adour, c'est leur situation périphérique,
leur marginalité par rapport à l'espace
national et aux deux grandes métropoles voisines, Toulouse et
Bordeaux".
En effet, sur une carte des densités de population, les
Pays de l'Adour se manifestent par une densification propre au piémont
pyrénéen qui s'oppose aux déserts landais et gersois.
Autrement dit, c'est la Haute-Lande, entre autres, qui fait émerger
l'identité aturienne.
Réalité naturelle mais non historique, les Pays de
l'Adour émergent dans les discours (de politiques, universitaires,
etc...) à partir des années 1960. Construction sociale et
intellectuelle de cette réalité naturelle, les Pays de l'Adour
constituent aujourd'hui, pour certains, un véritable territoire,
territoire que d'autres voudraient régionaliser administrativement (et
politiquement).
B) - Les tentatives de création d'une
région "Pyrénées-Adour".
En 1994-1995, Michel Inchauspé,
député basque R.P.R., propose de découper le
département des Pyrénées-Atlantiques en deux
départements, créant ainsi un département
"Béarn" et un autre "Pays Basque-Adour", et d'associer ces
deux derniers aux Hautes-Pyrénées pour former une nouvelle
région politico-administrative, appelée alors
"Pyrénées-Adour".
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Cette idée datant des années 1960 (cf les Pays de
l'Adour) repose sur le fait que cet espace tendant à se
régionaliser (géographiquement et économiquement) est
marginal et marginalisé par rapport aux deux grandes métropoles
du sud-ouest de la France que sont Bordeaux et Toulouse. S'appuyant sur des
arguments physiques (des "barrières naturelles" telles que le
plateau de Lannemezan ou encore "le désert landais"), des
infrastructures de transports déficientes (l'absence, alors, d'un
véritable tronçon autoroutier entre Pau et Toulouse, ou encore
d'une bonne liaison routière entre Pau et Bordeaux), sur une (pseudo ?)
identité des Pays de l'Adour, etc... le député profite
aussi d'un référendum effectué à ses frais pour
remettre sur la scène ce projet dont il est le seul à vouloir
réellement voir le jour. Finalement, et sans surprise,
l'Assemblée Nationale rejette en bloc peu de temps après ce
projet, qui aura eu au moins pour mérite de relancer le débat sur
la pertinence des mailles départementales et régionales. De
même, et indépendamment des querelles politiques sous-jacentes
(François Bayrou et André
Labarrère s'étaient alors associés contre ce
projet), le projet met aussi en évidence les nombreuses
complémentarités entre Pau et Tarbes que la région ainsi
formée aurait, normalement, pu accroître et favoriser.
Il n'en demeure pas moins que "la région des Pays de
l'Adour semble adopter une géoconfiguration située entre le
réseau, composé de lieux inter-reliés, et le territoire
homogène". Ainsi, si un réseau de villes
"Pau-Tarbes-Lourdes" et un "Pays de Béarn" se
développent actuellement, même avec certaines difficultés,
c'est aussi parce que les Pays de l'Adour s'articulent donc selon une logique
de réseau (organisation réticulaire de l'espace) et une logique
de territoire, plus ou moins polarisé (organisation aréolaire de
l'espace).
Les deux premiers espaces projet que nous avons décrits
constituent ainsi des instruments complémentaires d'aménagement
et de développement de l'ensemble du territoire national. Ils sont
complémentaires car ils procèdent de deux logiques
différentes d'organisation de l'espace, l'une aréolaire (pour les
pays), l'autre réticulaire (pour les réseaux de villes), et c'est
peut-être là que résident leur force et leur
capacité à durer sur une longue période. Le
troisième exemple, celui des Pays de l'Adour, est aussi un espace
projet, mais sa régionalisation (politico-administrative) se heurte
à des conflits d'intérêts, ce qui lui confère une
place à part dans les processus de recompositions territoriales. Le
niveau scalaire appréhendé précédemment est
essentiellement infra-départemental (pour les réseaux de villes
et les pays, notamment dans le secteur d'étude qui nous
intéresse), sauf pour les Pays de l'Adour où il devient largement
supra-départemental.
Pour qu'un espace projet émanant d'en "haut" soit efficace
et qu'il dure, il faut qu'il convienne aussi aux différents
gouvernements succédant celui qui en est l'initiateur, ce qui
malheureusement difficile en France, compte-tenu des nombreux changements de
majorité. A priori, Dominique Voynet semble
vouloir conserver les propositions faites par Charles Pasqua
dans le cadre de sa L.O.A.D.T., ce qui laisse présager
de bonnes augures quant à l'évolution future et à
l'utilisation de ces espaces projet (réseaux de villes, pays et
agglomérations) d'ici les années à venir.
Il n'en demeure pas moins que ces derniers, aussi bons
soient-ils, ne constituent pas la panacée en la matière. En
effet, d'autres propositions peuvent être faites, sans pour autant
être contradictoires et antinomiques avec les propositions de 1995.
La deuxième sous-partie va s'efforcer de retranscrire
quelques unes de ces propositions, en analysant les avantages et les
inconvénients qu'elles apportent, ainsi que les possibilités
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
supplémentaires qu'elles offrent aux espaces projet de la
L. O.A.D.T.
B) - La nécessité d'une véritable
réforme.
La nécessité de recomposer le territoire national
est incontestable. Ce faisant, il faut alors associer à la
rationalité économique et sociale la représentation
politique, ce que malheureusement l'inertie des grands corps d'État et
le poids du maillage politicoadministratif actuel ne permettent pas
facilement.
L'objectif visé est de couvrir l'ensemble du territoire de
pays et d'agglomérations (ainsi que de réseaux de villes, tout
ces instruments étant complémentaires). En effet, "ceux qui
s'organisent en pays ou en agglomération seront des partenaires reconnus
de l'État et des régions dans les procédures de contrat de
plan". Ces espaces de développement doivent ainsi organiser les
milieux ruraux (pour les pays) et les milieux urbains (pour les
agglomérations ; une agglomération = une ville-centre, la
banlieue et les communes rurales qui gravitent autour). Au nombre de 400
environ pour les premiers et d'une centaine pour les seconds, ces espaces de
développement doivent favoriser la gouvernance, avoir un pouvoir
élu au suffrage universel direct (un maire d'agglomération par
exemple, le conseil général devenant le Sénat des pays et
des agglomérations), et doivent enfin favoriser la consultation directe
locale.
Comme nous l'avons indirectement souligné auparavant,
l'idée est aussi de faire coexister et coopérer ces espaces de
développement (pays, agglomérations, quartiers...) avec les
espaces d'autorité que constituent les communes, les cantons, les
départements et l'État français.
De nombreux auteurs (autres que les politiques) proposent des
découpages tenant compte aussi des nombreux espaces que pratiquent
quotidiennement les hommes, les biens et les informations. Après avoir
retranscrit leurs souhaits (nous avons retenu ici quatre auteurs parmi tant
d'autres, car leurs propositions représentent à nos yeux une
bonne synthèse de ce que nous pouvons lire actuellement dans la
littérature relative à ce sujet), nous montrerons les points de
convergence et de divergence avec les propositions de la
L.O.A.D.T., et nous conclurons sur les éventuelles
possibilités qu'offre la conjugaison de ces différentes
propositions avec celles de la loi de 1995.
I - Les propositions de Jean-louis GUIGOU.
Jean-Louis Guigou propose quatre niveaux de
recomposition des territoires, qui pourraient ainsi organiser l'espace
français d'ici à 2015 : "cette recomposition des territoires
en quatre niveaux - européen, systèmes urbains, pays et quartiers
- est admise pour la majorité des pays européens. Une
dernière question se pose : quand et comment institutionnaliser ces
niveaux, compte-tenu de la présence, voire de la résistance des
niveaux antérieurs, la nation, les départements, les communes ?
En particulier, on ne saurait délibérément ignorer une
excessive vision hexagonale et continentale même revue à l'aube de
l'Europe".
Par exemple, en Angleterre il y a ainsi 36 agglomérations
et 325 pays, en Allemagne, 86 agglomérations et 426 pays. Ce qui
signifie donc, compte-tenu du niveau scalaire retenu, que le principe
d'organisation de l'espace en pays et en agglomération est un principe
qui a fait ses preuves.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
De même, il propose de transformer les 22 régions
actuelles en cinq ou sept grandes régions (correspondant aux grands
bassins de peuplement français) et de clarifier les compétences
des communes et des départements, ces derniers ayant alors pour objectif
de mettre en solidarité les villes et les campagnes (ce qui correspond
ainsi à une bonne articulation entre les pays et les
agglomérations).
Ses propositions reprennent ainsi en partie celles faites par la
L.O.A.D.T., la seule différence c'est qu'il introduit
deux niveaux scalaires supplémentaires de recompositions territoriales,
celui des systèmes urbains et le niveau européen. Une question se
pose cependant : le niveau des systèmes urbains est-il le même que
celui des réseaux de villes ? Il s'agit en fait d'appréhender la
métropolisation des villes françaises dans sa globalité
(dans la mesure du possible), d'accompagner cette dernière, et de
permettre une meilleure gestion des zones de fortes densités de
population en France.
Il s'agit donc de tenir compte des espaces et des territoires
pratiqués par les hommes, les biens et les informations, ce qui revient
à retenir trois types de bassins, comme le suggère l'auteur :
* les bassins de vie quotidienne. Au nombre de 4000 environ, leur
taille correspond grosso- modo aux cantons français, mais leurs limites
ne se superposent pas toujours,
* les bassins d'emplois. Au nombre de 350 environ, leur taille
correspond grosso-modo aux arrondissements français, mais là
aussi leurs limites ne superposent toujours pas les unes aux autres. Ce sont
sur ces bases là que se forment normalement les pays,
* les bassins de peuplement. Il y en a cinq ou sept en France.
Ils correspondent aux grandes zones de peuplement observables sur une carte
"qui décrit le dynamisme des communes françaises depuis 40
ans". C'est à partir de ces bassins de peuplement que pourraient se
construire les grandes (ou super) régions que nous évoquions
auparavant. Ces dernières pourraient ainsi rivaliser
économiquement et démographiquement avec les länder
allemands, avec lesquels elles ont souvent été
comparées.
Les propositions de Jean-Louis Guigou sont donc
complémentaires de celles de la L.O.A.D.T., et comme
nous pouvons le constater, l'auteur tient compte surtout des
réalités factuelles de l'espace socio-économique,
privilégiant ainsi et aussi une démarche empirique.
II - Les propositions de Jean-Pierre WORMS et de Roger
BRUNET.
Jean-Pierre Worms, quant à lui, propose
de renforcer les compétences et la taille de des budgets
régionaux, ce qui n'est pas antinomique, au contraire, avec un
éventuel regroupement des régions actuelles. L'objectif
visé est le même que celui de Jean-Louis Guigou,
c'est-àdire de permettre à ces dernières une meilleure
intégration compétitive au sein de l'Europe des 15.
En effet, les régions doivent être
appréhendées doublement. D'une part, dans une perspective
uniquement française : elles constituent ainsi la maille permettant
l'articulation entre le local et le national. D'autre part, dans une
perspective européenne : elles constituent dans ce cas la maille
permettant l'articulation entre le national (le régional) et
l'européen, ce qui leur permet indirectement de faire face à la
concurrence internationale.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Cette dualité (et/ou ambivalence due à un effet
d'échelle) des régions françaises est avantageuse mais
aussi source d'inconvénients. Avantageuse car elle renforce et
légitime encore plus la place de celles-ci dans le maillage
politico-administratif français. Leur utilité s'en retrouve
renforcée. Mais elle est aussi source d'inconvénients, car ce
rôle d'interface pose des problèmes de gestion et de
compétences, ainsi que des problèmes sur le modèle de
gouvernement à adopter finalement : devons-nous alors nous diriger vers
un modèle fédéral et laisser ainsi beaucoup plus
d'autonomie aux régions ? Dans cette dernière perspective, il
faut alors complètement repenser les compétences et la taille des
régions. Mais, comme le fait remarquer justement Roger
Brunet, additionner des petites régions peu puissantes donne
pour résultat des grandes régions peu puissantes, ce qui au bout
du compte ne sert à rien... Il reste à modifier maintenant la
culture politique dominante, celle-là même qui est aussi à
l'origine de l'inertie que nous remettons en cause.
Car pour Jean-Pierre Worms, "plus que
l'inadaptation des limites géographiques, c'est la culture politique qui
retient les collectivités territoriales d'évoluer : des
siècles de soumission à l'autorité centrale et l'attrait
des pouvoirs (cumulés !) freinent, mais n'empêcheront pas,
l'apprentissage de nouveaux projets et de nouvelles pratiques
politiques".
Il considère ainsi que le problème réside
plus dans les comportements des hommes politiques (quels que soient leur parti
politique et leurs responsabilités) que dans l'inadaptation entre le
maillage politico-administratif et l'espace socio-économique.
Néanmoins, les deux problèmes sont liés, l'inadaptation
des limites géographiques conditionnant indirectement un comportement
"passéiste" des hommes politiques, comportement leur apportant beaucoup
d'avantages, et qu'une éventuelle réforme pourrait abolir (un peu
comme en 1789...). Paradoxalement, ce n'est pas tant le citoyen et/ou l'acteur
socio-économique qu'il faudrait (ré)éduquer, mais
plutôt les hommes et les acteurs politico-administratifs... Il s'agit
là d'un autre type de réforme, tout aussi dure à mener que
celle que nous étudions.
Dans un autre registre, et à un autre niveau scalaire, les
propositions de Jean-Pierre Sueur confirme la
nécessité de repenser le paysage politico-administratif
français, et plus précisément de reconsidérer
autrement le fait urbain.
III - Les propositions de Jean-Pierre SUEUR.
Jean-Pierre Sueur, dans son rapport sur "50
propositions pour l'avenir des villes" conforte l'idée qu'une
véritable réforme est nécessaire, et que celle-ci doit
prendre aussi et surtout prendre en compte l'avenir des villes. D'ailleurs, ces
propositions n°4, 5 et 6 sont explicites et renforcent ce qui a
été dit auparavant :
* proposition n°4 : "le niveau pertinent pour les
décisions structurantes concernant les espaces urbains est celui de
l'agglomération. Il est proposé de s'orienter vers
l'élection au suffrage universel direct d'une assemblée
d'agglomération",
* proposition n°5 : "l'organisation territoriale
et administrative de la France doit être revue de manière à
mieux prendre en compte le fait urbain. Cela concerne notamment la
représentation des agglomérations urbaines au sein des
départements",
* proposition n°6 : "la mise en oeuvre de
réseaux de villes doit constituer l'un des objectifs majeurs de la
politique d'aménagement du territoire. Des rapports contractuels devront
être
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
établis entre les conseils régionaux et les
conférences des maires des grandes villes (ou des présidents
d'agglomération) de chaque région".
Il s'agit donc de reconsidérer le fait urbain (les villes
en général) afin de l'intégrer plus amplement dans le
cadre des espaces projet prévus pour organiser le territoire
français d'ici 2015. En effet, compte-tenu que la population
française est (presque) à 80% urbaine, la prise en compte des
villes dans leur globalité est d'autant plus justifiée. Anticiper
et prévoir la France de 2015, c'est aussi et surtout anticiper et
prévoir l'évolution des villes, la résolution des
problèmes qu'elles posent constituant une condition nécessaire
(mais non suffisante) pour aménager la France du XXI°
siècle.
Des propositions de la L.O.A.D.T. et de celles
qui découlent des auteurs cités précédemment, nous
pouvons déduire que la recomposition du territoire national
français dans l'optique de 2015 ne nécessite pas forcément
d'effacer totalement le maillage politico-administratif actuel, pour le
remplacer directement par des espaces projet qui en sont encore à leurs
balbutiements. Au contraire, il s'agit (a priori) de mettre en place
une forme de transition qui permette la coexistence et la coopération
entre les formes anciennes d'organisation et de gestion du territoire et les
formes nouvelles, les premières servant de point d'ancrage et de
départ aux secondes.
La difficulté réside donc dans la mise en place
d'un espace projet sur un espace-substrat qui compte déjà
beaucoup de mailles politico-administratives. En fait, actuellement il s'agit
plus d'organiser le territoire que de l'administrer.
Les quatres niveaux de recomposition des territoires
proposés par Jean-Louis Guigou procèdent de la dialectique du
local et du mondial. Il s'agit d'abord d'observer ces territoires, ensuite de
les structurer et enfin de les institutionnaliser, ce qui justifie d'autant
mieux la période de 20 ans que s'est fixée la
L.O.A.D.T.
De même, aux quatres niveaux ainsi définis
correspondent quatres types d'espaces qui leur sont propres :
* au niveau européen correspond l'espace
d'intégration,
* au niveau des systèmes urbains organisés et des
grandes régions de niveau européen correspond l'espace
d'intervention,
* au niveau des districts, des pays, des bassins d'emplois et des
agglomérations correspond l'espace de développement,
* au niveau des quartiers correspond l'espace de vie.
De même, cette dialectique du local et du mondial est aussi
celle de l'espace projet et de l'espace substrat, la difficulté
étant de savoir comment adapter le plus efficacement possible l'un
à l'autre.
Quant aux propositions de Jean-Pierre Worms, de
Roger Brunet et de Jean-Pierre Sueur, elles
confortent et complètent les points de vue développés
précédemment, comme nous avons pu le constater jusqu'à
présent.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
CONCLUSION de la troisième Partie.
Cette troisième partie nous a permis de mettre en
évidence la nécessité d'une véritable
réforme du maillage politico-administratif français, ce qui en
outre vérifie aussi la deuxième hypothèse que nous avons
posée dans le cadre de ce mémoire. Les solutions
proposées, eu égard au niveau scalaire retenu (celui des
départements, et dans une moindre mesure celui des régions), que
ce soient celles de la L.O.A.D.T. ou des différents
auteurs que nous avons cités, permettent donc de dépasser les
différents paradoxes dialectiques résultant de la situation
initialement établie.
L'inadaptation et le décalage entre le maillage
politico-administratif français, la mise en oeuvre des nouvelles
compétences de l'État et la modification dans la
répartition des pouvoirs depuis les lois de décentralisation de
1982-1983, peuvent se résorber par une meilleure répartition des
compétences, la création d'un ou de deux niveaux de participation
locale (ne serait-ce que celui des pays ou des agglomérations, les
réseaux de villes procédant d'une autre logique), et par la
coexistence et la coopération des espaces projet français avec le
maillage politico-administratif actuel.
Les espaces projet français sont ainsi des solutions de
transition (sur une période de 20 ans, depuis la
L.O.A.D.T. de 1995) qui constituent les prémices, a
priori, d'une réforme plus globale et plus générale.
Reste cependant qu'ils doivent encore faire leurs preuves :
* dans le secteur d'étude qui nous intéresse, le
réseau de villes "Pau-Tarbes-Lourdes" est un échec. Il
s'agit actuellement de diagnostiquer les faiblesses et les problèmes
pour aboutir rapidement à un espace solution, puis à un espace
validation.
* le "Pays de Béarn" se détourne de son
projet initial pour tenter de réanimer les Pays de l'Adour, à la
recherche d'un second souffle.
Car les instruments d'aménagement et de
développement du territoire proposés par la
L.O.A.D.T. sont complémentaires, les réseaux de
villes devant permettre (directement ou indirectement) une articulation
cohérente de l'ensemble des pays (et des agglomérations, pour les
milieux urbains) se répartissant sur le territoire national
français d'ici 2015.
De même, les propositions des auteurs que nous avons
cités sont aussi complémentaires de celles de la
L.O.A.D.T. : il s'agit aussi de faire preuve de pragmatisme,
en associant ce qui est "ancien" (le maillage politico-administratif) avec ce
qui est récent (les espaces projet français). Dans cette
perspective, la prise en compte du phénomène urbain est
fondamentale, sachant que l'urbanisation croissante rassemble de plus en plus
de gens sur des espaces restreints. Deux niveaux de participation locale
peuvent ainsi être appréhendés, avec des limites où
le citoyen et l'acteur socio-économique se retrouvent :
* celui des quartiers (espace de vie),
* celui des pays et des agglomérations (espace de
développement).
Finalement, au lieu d'envisager tout d'abord une réforme
globale, ne vaudrait-il pas mieux commencer par certains niveaux, certaines
compétences, comme celles, par exemple, que nous avons
étudiés ?
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
CONCLUSION GÉNÉRALE.
Le maillage politico-administratif français,
élaboré il y a 200 ans, est donc inadapté aux nouvelles
logiques (politiques, administratives, économiques, sociales, etc...)
qui se développent actuellement dans l'hexagone. Il doit ainsi faire
face aujourd'hui, grosso-modo, à trois évolutions et changements
majeurs pour lesquels il n'est ni prévu, ni adapté :
* d'abord, la prise en compte par l'État de nouvelles
compétences, dans le domaine économique et social, et ce depuis
un siècle environ,
* ensuite, les modifications dans la répartition de ces
compétences entre l'État (dont le pouvoir jusqu'alors
était centralisé), les citoyens et les acteurs
socio-économiques, notamment depuis les lois de décentralisation
de 1982-1983,
* enfin, les modifications et les changements de l'espace
socio-économique, avec, entre autres, une urbanisation croissante.
Ce faisant, les deux hypothèses que nous avons
posées dans le cadre de ce mémoire sont en partie
vérifiées :
* Le maillage politico-administratif français
actuel est donc inadapté à une gestion et un contrôle
performant et objectif de l'espace socio-économique.
* Il y a par conséquent nécessité
de procéder à une réforme, une refonte de ce maillage, ou
du moins de certaines mailles politico-administratives, afin de rétablir
la cohérence dans l'articulation et l'adaptation des différentes
logiques en présence.
Néanmoins, et a posteriori, il semble que nous
n'avons pas posé les hypothèses les plus pertinentes, ce qui est
relativement compréhensible, compte-tenu du caractère
obligatoirement incertain de telles hypothèses. Finalement, le
problème n'est pas tant dans les mailles, les limites (aussi importantes
soient-elles, comme nous le pensions au début de ce mémoire),
mais plutôt dans la clarification des compétences à mieux
répartir dans les différents niveaux politico-administratifs
présents actuellement, ainsi que dans la mise en place d'un niveau (ou
deux) de participation locale, compte-tenu de la décentralisation qui
est en vigueur : à ce titre, les pays et les agglomérations (avec
les quartiers, à un niveau inférieur) constituent une solution
somme toute très intéressante.
Dépassant la simple démarche analytique,
l'utilisation de la méthode dialectique nous a permis de comprendre et
d'appréhender autrement les paradoxes soulevés par la
problématique retenue. Cependant, nous avons conscience de ne pas
l'avoir utilisé dans toute sa richesse. D'une part, cela est dû
à notre relative inexpérience face à l'utilisation de
cette théorie dont nous ne possédons pas encore toutes les
subtilités ; d'autre part, parce que l'orientation finale et
définitive de notre travail n'a été fixée que
tardivement, ce qui est normal dans le cadre de la rédaction d'un
mémoire de D.E.A.
Pourtant, et malgré les quelques limites que nous
apportons ici à notre travail, nous estimons avoir rempli notre contrat,
en répondant (tant bien que mal) aux objectifs fixés dans
l'introduction.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Ainsi, dans la première partie, la dimension historique
nous a été d'un grand secours pour l'analyse et l'explication de
certains faits, de certaines situations, ainsi que de leurs évolutions.
Il s'est agi pour nous d'étudier des faits inscrits à la fois
dans l'espace mais aussi dans le temps.
Dans la seconde partie, nous sommes partis de l'idée que
l'analyse de l' "espace urbain" Pau- Tarbes constituait un bon exemple
de remise en cause des mailles départementales et régionales.
Certes, nous n'avons abordé que certains aspects (des contraintes
temporelles et matérielles ne sont pas étrangères à
cet état de fait) ; il n'en demeure pas moins que cet exemple est
représentatif d'un plus vaste phénomène se
développant à l'intérieur du territoire national
français.
Dans la troisième partie, nous nous sommes efforcés
de faire une synthèse (modeste en non exhaustive) des alternatives
possibles face au problème retenu. Nous avons ainsi
privilégié l'analyse des réseaux de villes, des pays, dans
une moindre mesure celle des agglomérations et des quartiers,
compte-tenu du niveau scalaire qui nous intéresse, car ces instruments
constituent à nos yeux des espaces projet pertinents pour
l'aménagement et le développement du territoire dans l'optique de
2015.
Cependant, les espaces projet que nous évoquons ici n'en
sont encore qu'à leur phase prospective, ce qui mérite de notre
part et de celle du lecteur beaucoup de réserve et de prudence quant
à l'analyse des véritables résultats qu'offrent
réellement ces derniers. Nous avons juste voulus faire un état
des lieux des différentes propositions, qu'elles soient celles de la
L.O.A.D.T. ou des auteurs que nous avons retenus, afin de
montrer ce qui pourrait organiser l'espace français dans les 15 ans
à venir.
Quant au titre du mémoire, formulé sous forme
interrogative, il mérite par conséquent une
réponse. "Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ?" Effectivement, ce
dernier est à remettre en cause, mais cela ne signifie par pour autant,
compte-tenu du travail que nous avons mené cette année, qu'il
faille faire obligatoirement table-rase de celui-ci pour le remplacer par un
autre. Au contraire, les solutions proposées s'orientent plus, du moins
pour le début, vers une phase de transition permettant la coexistence et
la coopération de l'un (le maillage actuel) avec les espaces projet qui
plus tard seront peut-être institutionnalisés.
Pour les poursuites de la recherche menée cette
année, si les moyens nous en sont donnés, nous aimerions ouvrir
la problématique sur l'ensemble des niveaux scalaires remis en cause
(commune, canton, arrondissement, département, région et
même la nation), étudier avec plus de profondeur les apports et
les limites des espaces projet français (sans se focaliser
essentiellement sur les pays, les agglomérations ou encore les
réseaux de villes), et enfin aborder la dimension européenne dans
une démarche comparative, ce que nous aurions aimés faire cette
année. Mais malheureusement, l'absence de données relatives
à ce thème nous a restreint dans une dimension uniquement
française, ce qui constitue à nos yeux une limite
supplémentaire à notre travail.
Pour autant, nous espérons que ce mémoire, un
modeste travail d'étude et de recherche mené pendant un an, outre
les réponses qu'il apporte a nos hypothèses de départ,
puisse constituer aussi un état des lieux de ce qui se fait et de ce qui
se dit en matière d'aménagement du territoire et de
géographie, par rapport à la recomposition du territoire national
français dans l'optique de 2015. Nous espérons ainsi pouvoir
poursuivre cette recherche dans le cadre plus
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
large que constitue la thèse de doctorat, notamment en
nous intéressant toujours au maillage politico-administratif
français, mais dans la perspective d'une comparaison européenne,
eu égard à la construction de la Communauté
Économique Européenne qui est en cours, et aux solutions
développées en dehors des frontières françaises.
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