2. Des
obstacles à la collecte des revenus
Malgré l'apport considérable dans la formation
du budget de la commune, d'après les autorités municipales, la
ville ne bénéficie pas au maximum de la rente frontalière.
En effet la municipalité ne disposant pas de suffisamment de moyens pour
titrer partie des potentialités de ressources.
* Moyens institutionnels
insuffisants : La commune n'est pas la seule institution
qui intervient dans la gestion des activités transfrontalières.
Elle partage ce travail avec des organes de l'Etat central qui sont
présents pour saisir les opportunités offertes par la
frontière. La commune n'a donc pas les coudées franches pour
organiser à sa guise les activités. On assiste souvent à
des conflits d'intérêt qui découlent du fait que les enjeux
sont importants.
* Difficultés liées à la
maîtrise des flux. La mairie doit en principe
prélever 500f CFA sur chaque voyageur. Seulement tous
ceux qui franchissent de la frontière à ce niveau ne payent pas
toujours la taxe. Les usagers usent de ruses pour ne point s'acquitter de ce
devoir. Il faut souligner que la mairie ne dispose pas d'instruments de
contrôle des flux sur le débarcadère. Ce problème
est lié à la vétusté de l'infrastructure et au
conflit d'intérêt entre les administrations
déconcentrées (police et douane) et l'administration locale.
* Difficultés de localisation de
certaines activités : Des activités comme
par exemples le change, sont difficilement repérables pour un
prélèvement efficace des taxes malgré leur présence
en grand nombre sur l'espace et leur rôle important dans le processus.
C'est une perte de recette énorme pour la commune.
* Le manque
d'infrastructures : La ville souffre d'un manque
d'infrastructures et d'équipements qui sont la base de tout
développement urbain. L'absence de ces dernières
ne facilite pas pour la collectivité le travail de collecte de revenu
qui est indispensable au financement de son développement.
Une politique de collecte s'impose pour la commune pour
pouvoir titrer le plus de gains de sa situation de ville frontalière.
3. Les défis posés
par les impératifs de développement municipal.
La situation de « ville frontière »
ne présente pas que des opportunités pour la commune de Rosso.
Elle pose aussi de nombreux défis à relever amenant ainsi la
collectivité à devoir répondre à des questions
spécifiques et contextuelles. La réponse à ces questions
est aussi une des voies naturelles pour impulser un développement local
durable. La promotion du développement local urbain, la
réadaptation du commerce local à la réalité
économique du milieu, la sécurité des populations, les
effets néfastes sur les efforts d'éducation etc.., sont quelques
défis majeurs auxquels fait face la municipalité.
La promotion du développement local
urbain : Depuis son érection en commune, la ville
fait face à de nouvelles responsabilités. Ces dernières
doivent être à la hauteur du rôle que doit jouer la ville
dans le contexte géopolitique dans lequel il est placé. C'est
pourquoi depuis 2004, en partenariat avec l'Agence Régional de
Développement, la commune a élaboré un Plan
d'investissement communal dans lequel sont diagnostiqués l'ensemble des
secteurs qui font la ville ; ce document fait l'état des
lieux ; définit, en rapport avec les populations, les
différentes priorités et propose un plan d'investissement qui
à terme donne à la ville un statut plus respectable de commune.
Selon les autorités de la municipalité, seule la promotion du
développement urbain changera la situation actuelle qui fait que
beaucoup de valeur ajoutée est perdue à cause de la
vétusté du cadre urbain et d' une absence notoire de politique
d'aménagement. Celle-ci passe par :
· La réalisation d'infrastructures
urbaines : Elles sont essentielles pour la ville qui en
affiche un réel déficit.
· La mise sur pied de structures
d'accueil : Pour une ville porte d'entrée et qui est
un lieu de transit bien fréquenté, Rosso ne possède pas
de structures d'accueil pouvant répondre aux besoins éventuels
d'hébergement. C'est ici une contrainte qui fait que beaucoup de
voyageurs passent leurs nuits à Richard Toll ou Saint-louis. La
définition d'une bonne politique d'assainissement afin
d'améliorer le cadre de vie. Lutter contre certains fléaux qui
sont des résultantes directes des activités se passant à
la frontière comme :
· Renforcement de la sécurité
sanitaire des populations: Les déplacements quotidiens des
populations et l'enregistrement de nouveaux venus font que la ville est le
lieu de rencontre d'individus venus de tous horizons. Le contact humain est ici
une réalité. Cette situation de carrefour fait de ville une zone
potentiellement à risque pour des maladies pandémiques : les
maladies sexuellement transmissibles (sida), le cholera.
La ville se singularise par la vétusté de ses
infrastructures sanitaires qui ont du mal à prendre en compte cette
réalité. Les populations se trouvent donc dans une situation
d'insécurité sanitaire qui est due à la place qu'occupe la
localité dans les échanges transnationaux entre le
Sénégal et ses voisins. La collectivité qui a la charge de
la santé de la population a ici un rôle important à jouer.
La lutte contre la déperdition
scolaire : Le gouvernement du Sénégal
fournit des efforts considérables pour asseoir une bonne politique
d'éducation. Dans cette politique, la généralisation de
l'éducation, la scolarisation des filles, le maintien à
l'école, figurent en bonne place dans le tableau des objectifs. Dans le
cadre de la décentralisation, l'éducation est devenue une
prérogative des collectivités de base.
La commune de Rosso se trouve confronté à un
défi majeur : celui du maintien des enfants à l'école
surtout des jeunes filles. Ces dernières sont les victimes du
phénomène de la déperdition scolaire qui est une
gangrène de l'école dans la commune.
Frappés par la pauvreté, nombre de jeunes se
lancent dans les activités de contrebande, de trafic, entrent dans le
« tieup-thieup », vont travailler en Mauritanie pour aider
des familles démunies. La commune pourra initier des campagnes de
sensibilisation pour le maintien des jeunes surtouts des jeunes filles à
l'école.
Prévention contre la délinquance
juvénile : De nombreux enfants gravitent au
niveau du débarcadère. Ils sont dans le
« thieup thieup ». La plus pars
sont dans la petite délinquance et font des victimes auprès des
usagers. La ville est aussi un lieu potentiel de passage de drogue et de
produits prohibés créant une situation d'insécurité
auprès des jeunes.
Conclusion partielle
Les défis auxquels se confrontent la
collectivité de Rosso Sénégal montrent bien que loin de
toujours constituer des opportunités de profits pour les populations,
les échanges transfrontaliers ont aussi des effets négatifs sur
quelques aspects du développent local. Toutefois, ces dommages
collatéraux ne remettent pas en question l'utilité
économique et sociale de ces échanges. Seulement ils appellent
de la part des autorités locales une meilleure prise en charge de la
réalité frontière dans l'élaboration et la mise en
place des plans et programmes de développement local. Pour se faire, les
activités qui se déroulent aux frontières doivent non pas
être considérées comme des anomalies à corriger mais
plutôt comme un potentiel à explorer pour la
collectivité.
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