Le MINEP n'est pas la seule institution à s'occuper
des préoccupations environnementales. Il est assisté dans sa
mission par le Comité Interministériel de l'Environnement (1),
les autres départements ministériels (2) et les différents
programmes de gestion de l'environnement (3).
1- Le Comité Interministériel de
l'Environnement
Institué par la Loi-cadre relative à la gestion
de l'environnement, le Comité Interministériel de
l'Environnement72 est présidé par une
personnalité nommée par le Ministre de l'Environnement et de la
Protection de la Nature et est composé de membres représentant
quatorze (14) départements ministériels. Il s'agit des
Ministères en charge de l'Environnement ; de l'Administration
Territoriale ; de
72Article 10 alinéa 2 de la loi n° 96/12
du 05 août 1996 portant Loi-cadre relative à la gestion de
l'Environnement.
l'Agriculture ; du Développement Industriel et
Commercial ; de l'Elevage, de la Pêche et de l'Industrie Animale ; de
l'Aménagement du Territoire ; des Mines, de l'Eau et de l'Energie ; de
la Recherche Scientifique et technique ; du Tourisme ; des Travaux Publics ; du
Transport ; de la Santé Publique ; de la Ville ; de la Défense
Nationale73.
Ce Comité en vertu de l'article 20 (1) de la loi-cadre
sur la gestion de l'environnement et de l'article 2 du décret portant sa
création74 émet un avis sur toute étude
d'impact sur l'environnement, préalable à toute décision
du Ministère compétent (MINEP) sous peine de nullité
absolue de cette décision, disposition qui confère au
Comité un rôle clé dans le processus d'évaluation et
d'approbation des Etudes d'Impact Environnemental.
2- Les départements
ministériels
Les autres Départements Ministériels, chacun en
ce qui concerne son secteur, notamment pour ce qui est de l'élaboration
du cahier des charges de l'étude d'impact environnemental, interviennent
dans le processus de protection de l'environnement. Il s'agit presque de tous
les départements ministériels existant et donc les projets futurs
portent ou pourraient porter directement ou indirectement atteinte à l
'environ nement.
3- le Plan National de Gestion de l'Environnement
(PNGE) et sa mise en oeuvre
Le PNGE est une invention africaine. Les premiers plans ont
vu le jour en 1987 à Madagascar, à l'Île Maurice et au
Lesotho. Il est introduit au Cameroun par la Loi-cadre relative à la
gestion de l'environnement75. C'est un instrument, un outil de
gestion efficace de l'environnement pour un développement durable. Il
privilégie d'une part une approche concertée que l'on pourrait
qualifier de « démocratie verte » associant dans un
effort commun de réflexion et d'échange les différentes
composantes de la société (Etat, collectivités locales,
chefs traditionnels, associations villageoises, experts, membres de la
société civile, les ONG et le secteur privé...) et d'autre
part sa méthode introduit un surcroît de rationalité dans
la planification en permettant d'identifier les causes et objectifs à
cours, moyen et long terme et les obstacles, puis en dégager les moyens
nécessaires à la réalisation des objectifs
cibles76.
D'après la Loi-cadre relative à la gestion de
l'Environnement, « Le Président de la République
définit la politique nationale de l'environnement. Sa mise en oeuvre
incombe au Gouvernement qui l'applique, de concert avec les
collectivités territoriales décentralisées, les
communautés de base et les associations de défense de
l'environnement. A cet effet le Gouvernement élabore des
stratégies, plans ou programmes nationaux tendant à assurer la
conservation et l'utilisation durable des ressources de
l'environnement77 »
73 Article 3 alinéa 2 du décret n° °
2001/718/PM du 3 septembre 2001 portant organisation et fonctionnement du
Comité Interministériel de l'Environnement.
74Le décret n° 2001/718/PM du
3 septembre 2001 portant organisation et fonctionnement du Comité
Interministériel de l'Environnement.
75Article 13 à 16 du Titre III portant sur la
gestion de l'environnement en son chapitre I.
76Cette méthode a été
proposée par l'ONG de développement allemande GTZ
77Article 3 de la loi n° 96/12 du 05 août
1996 portant Loi-cadre relative à la gestion de l'Environnement.
C'est donc for de tout ce qui précède qu'au
lendemain de la conférence des Nations Unies sur l'Environnement et le
Développement qui s'est tenue en juin 1992 à Rio de Janeiro au
Brésil, le Cameroun a élaboré son PNGE qui a permis de
définir les politiques de protection de l'environnement et de gestion
rationnelle de ses ressources naturelles. Ces politiques portent sur les
principaux axes suivants :
· La gestion rationnelle de l'espace, des
écosystèmes et des ressources ;
· La valorisation des matières premières
par le biais du développement industriel et des infrastructures,
notamment grâce à un développement industriel
écologiquement durable et à un impact acceptable des
infrastructures sur l'environnement ;
· L'amélioration du cadre de vie en milieu urbain
;
· Les conditions de développement des
capacités humaines, grâce notamment à l'intégration
des femmes dans les programmes d'environnement, à la prise en compte
suffisante des préoccupations de l'environnement dans les
différents secteurs.
Au regard de ces politiques, il apparaît que
l'étude d'impact environnemental est un outil pertinent pour leur mise
en oeuvre réussie78.
Ce PNGE, réactualisé tous les cinq (5) ans, est
prévu au Titre III de la loi n°96/12 du 5 août 1996 portant
Loi-cadre relative à la gestion de l'environnement, législation
de base en matière d'EIE.
CONCLUSION
Comme on peut le constater, l'intégration de l'EIE
dans l'environnement juridique camerounais s'est faite et continue de se faire
lentement mais sûrement comme le dit l'adage. Cette base juridique a
été acquise grâce à la volonté manifeste des
pouvoirs publics de prendre en compte les préoccupations
environnementales. Lesquelles préoccupations font l'objet depuis la
Conférence de Rio (1992) d'une attention particulière de
l'ensemble de la Communauté Internationale.
En effet, que l'on se trouve au Nord, au Sud, à l'Est
ou à l'Ouest, les catastrophes naturelles, écologiques ou autres
n'épargnent personne79. Ces catastrophes sont dues pour la
plupart aux effets de l'homme sur l'environnement80, ce qui
entraîne comme conséquence le réchauffement de la
planète terre. Il était donc important, voire impératif
que toute la Communauté Internationale prenne conscience du danger qui
guette la planète si rien n'est fait. La mise à l'écart
des intérêts égoïstes des uns et des autres a permis
la mise sur pied des instruments juridiques internationaux relatifs à la
protection de l'environnement adoptés lors des différentes
conférences et rencontres internationales81. Ces
différents forums ont permis la mise en oeuvre de nombreux programmes
d'action tel que celui de
78Cette énumération est donnée
en substance par le Rapport sur la pratique des EIE au Cameroun
préparé par M.TEKEU Jean-Claude pour la Commission Economique
pour l'Afrique des Nations Unies, décembre 2004.
79On peut citer à titre d'exemple
le Tsunami, les inondations dans divers pays à l'instar des
Etats-Unis.
80Exploitation anarchique des ressources naturelles,
déforestation, pollution, etc.
81Conférence de Stockholm de 1972,
Conférence mondiale sur le climat de 1979, sommet de la terre de Rio de
1992, Sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg de
2002, Conférence sur les changements climatiques de 2005, etc.
l'Agenda 2182. Ce dernier est un programme
d'action qui témoigne de la volonté de la Communauté
Internationale de s'accorder pour agir dans le sens du développement
durable pour le 21e siècle. C'est ainsi que des Agendas 21
locaux, traduction locale des engagements internationaux finalisés lors
du Sommet de Rio de 1992, ont été pris ça et la. Sa mise
en oeuvre a été réaffirmée à Johannesburg du
26 août au 04 septembre 2002.
En combinant la protection de l'environnement et le processus
de développement, la Conférence de Rio a renforcé une
nouvelle orientation du droit de l'environnement : l'application d'une
méthode intégrée83. Celui-ci ne cesse
de se renforcer. Il est devenu, en effet, de plus en plus clair que
protéger l'environnement ne pouvait être une action isolée
du contexte économique et social, national ainsi
qu'international84.
Cette protection se fait par des textes85. En
effet, le DIE, discipline nouvelle a été porteuse de nouvelles
techniques juridiques comme l'a fait d'autres disciplines86. Cette
discipline a un champ particulièrement important à ce point de
vue qu'il introduit dans le droit des objets de protection que les
systèmes juridiques n'avaient pas l'habitude de prendre directement en
compte87, voire des concepts qui étaient inconnus du droit,
comme écosystèmes ou des processus servant de fondement à
la
vie88.
Face donc à cette multitude, à cette
prolifération des textes à caractère environnemental
auxquels a adhéré pour la plupart le Cameroun, un engagement
politique national était nécessaire. C'est ainsi que le
Gouvernement a pris officiellement position en mettant sur pied un Plan
National de Gestion de l'Environnement. Lequel s'est matérialisé
par son intégration dans un texte législatif : la loi n°
96/12 du 05 août 1996 relative à la gestion de l'environnement.
Cet engagement s'est manifesté sur le cadre normatif et
institutionnel. Sur le plan normatif, les représentants du peuple ont
mis sur pied une Loi-cadre, la loi n° 96/12 du 05 août 1996. Bien
qu'elle ait été précédée par la loi n°
94/01 du 20 janvier 1994 portant régime des forêts, de la faune et
de la pêche, il n'en demeure pas moins qu'elle constitue la
législation de base en matière environnemental et plus
particulièrement des études d'impact environnemental. Elle a
été complétée par une série de lois
sectorielles ayant des dispositions spécifiques à chaque
secteur89. Des décrets d'application viennent
déterminer la mise en oeuvre de ces différents textes
législatifs.
Sur le plan institutionnel, c'est la transformation de
l'ex-MINEF en deux ministères, l'un chargé spécialement de
l'Environnement : le MINEP et l'autre chargé
82Stéphane DOUMBE-BILLE, ` les acteurs du
droit international de l'environnement', cours de Droit International et
Comparé de l`Environnement, Master, actualisation 2004/2005 p.5 .
83A-C.KISS, `Introduction générale du
droit de l'environnement : illustration par la forêt', cours de Droit
International et Comparé de l'Environnement, Master, actualisation
2004/2005.
84Ibid. p.10
85Traités, conventions, etc.
86 On peut citer entre autres, le droit humanitaire, la
protection des droits de l'homme, le droit de l'espace cosmique, etc.
87Protection des êtres vivants en dehors des humains
88A-C. KISS, `les Traités cadres : une
technique juridique caractéristique du droit international de
l'Environnement' Annuaire français de droit international, XXXIX,
édition du CNR, Paris, 1993, p.792.
89Secteurs pétrolier, eau, minier, gazier,
etc.
des Forêts et de la Faune, le MINFOF. Soulignons
toutefois que les autres institutions intervenant dans ce domaine doivent
intégrer les préoccupations environnementales dans toutes leurs
actions.
On peut donc affirmer sans risque de se tromper que «
l'ordre juridique camerounais accorde aujourd'hui une part belle aux
préoccupations environnementales (...) résultant d'une prise de
conscience née à partir du sommet de Rio de juin 1992
90>,.
En effet, cette prise de conscience « s'est
forgée pro gressivement, au fur et à mesure des exigences au plan
universel>, à tel point que la Constitution de la
Répu bl iq ue du Cameroun, charte fondamentale «
constitutionnalise l'environnement et tout son droit (...) >, en
permettant « au législateur d'adopter une approche dynamique
qui correspond parfaitement aux exigences des normes et accords intern ationaux
relatifs à l'environnement91 >,.
Le législateur a certes consacré le droit
à un environnement sain et les différents textes sectoriels y
relatif prescrivant même des sanctions, mais une étape reste
encore à franchir en reformant le Code Pénal camerounais en y
intégrant des dispositions environnementales comme faisant partie des
intérêts fondamentaux de la nation au même titre que la
sécurité, l'indépendance ou l'intégrité du
territoire comme l'a fait son homologue français depuis la
réforme de son Code Pénal en 199292. C'est sans doute
en élevant la protection de l'environnement comme tels que les
procédures et directives environnementales pourraient réellement
être prises en compte.
90 Jean-Claude TCHEUWA, «les préoccupations
environnementales en droit positif camerounais« in Revue Juridique de
l'Environnement, 1/2006, Mars 2006, p. 21
91 Ibid., p. 25
92 Article 4 10-1 Code Pénal, loi n° 92-682 du 22
juillet 1992.