E) Les définitions :
Dans le questionnaire, il y avait une question ouverte qui
demandait de donner une définition de la pratique qu'est l'Aïkiryu.
Cependant, cette pratique a été présentée comme non
définissable car « définir c'est limité » et
qu'elle dépendrait du lien entre le pratiquant et son art. C'est pour
cela que l'acte de définir permettra de mettre à jour des liens
possibles entre différentes formes de travail et des
prédominances de notions propre à un ou des champs lexicaux
particuliers.
Dans un premier temps ce qui est intéressant de
relever, c'est que l'ensemble des définitions ne sont pas
uniformisées et qu'elles sont basées sur le rapport du lien
affectif qu'entretiens l'individu avec son art et les autres pratiquants. Par
exemple, on retrouve des mots tels que « amour », « liens
», « échanges », « transformation »,
« sentiments », « relation à l'autre
», « rencontre », « découverte », «
changement », « intégrer les différences », «
réconcilier le corps et l'esprit », « intégration de
l'autre », « respect du partenaire et soi-même », «
dépassement de ses limites », « liberté ».
L'ensemble de ses mots permettent d'apprécier l'ensemble des sens qu'a
cette pratique, en effet, le but de ce travail n'est pas de poser une
définition stricte de cet art mais au contraire de voir l'ensemble des
possibilités afin de mettre à jour la richesse des valeurs
véhiculées. Ainsi de respecter leur façon de concevoir
leur pratique comme faisant partie d'un ensemble plus vaste que l'on pourrait
nommer « art corporel » ou « art du geste ».
Dans un second temps, on peut observer que les pratiquants ne
définissent pas leur pratique comme un sport ou bien un art martial. En
effet, le mot « sport » apparaît une fois mais sans plus de
précision sur le sens donné. Tandis que le mot « art martial
» apparaît onze fois. Les autres définitions ne
catégorisent pas l'Aïkiryu dans l'une ou l'autre des
catégories. Concernant, la définition utilisant le mot «
sport » indique juste que l'Aïkiryu est « un sport complexe
» mais sans plus. Par contre, les définitions utilisant le mot
« art martial » présentent l'Aïkiryu comme un art qui
permet de « se transformer en lien avec les autres », mettre le
pratiquant « sur le chemin de la connaissance de soi et du
dépassement de ses limites », « recherche à ressentir
les sensations de notre corps et celui de l'autre », « un
échange avec l'autre plutôt qu'un combat », «
d'être en paix avec soi et les autres », « de travailler sur
l'espace et le mouvement », « partager de bons moments », «
de se construire », « créer un espace d'expression de cette
relation à l'autre ». On peut dégager de l'ensemble de ses
propositions que cet art permettrait d'agir à la fois sur le plan de la
relation à l'autre par un espace de libre action pour échanger,
sur le plan de l'éveil individuel par le ressentit des sensations et
enfin sur un plan d'expression par le geste qui en est le langage. Les autres
définitions indique cet art comme étant « un art de vivre
», « un art de bien être », « une gymnastique
énergétique », « un partage d'amour et de vie »,
« un mode de vie », « un moyen d'être à
l'écoute de son corps, de ses capacités et de ses
barrières », « une pratique interne », «
au-delà de la technique », « une recherche personnelle »,
« une chorégraphie martiale ». Ces caractéristiques
permettent de mettre à jour l'idée que le lien entre l'individu,
son art et les autres dépend vraiment de la réalité que
l'on en fait, donc cela amène à des approches totalement
différentes. Une notion qui revient souvent concerne la
« présence dans l'instant »,
c'est-à-dire de vivre tout ce qui peut se passer dans la vie au moment
même ou elles se produisent, c'est une vision optimiste de voir les
faits.
Le troisième temps concerne le fondateur de
l'école et les définitions. En effet, Charles Abelé est
souvent présenté comme le fondateur de l'Aïkiryu mais il n'y
a qu'une seule définition qui fait état d'« un regroupement
» autour de lui. Cela est un indicateur quant à la forme de
regroupement autour d'une seule personne car la communauté existe autour
d'un espace d'échange et non pas autour d'une personne. Cet espace
d'échange permet alors de lier les pratiquants entre eux sans pour
autant avoir besoin d'une nouvelle personne qui dirigerait l'école. Cela
recoupe l'idée de la direction collégiale mise en place
après le décès de Charles Abelé.
Par rapport aux opinions exprimées qui mettaient en
avant le fait que l'Aïkiryu est un art visant à rassembler des
individus autour d'un art corporel visant le bien être des pratiquants,
cela confirme dans l'ensemble l'orientation des définitions qui mettent
en avant cet art comme un moyen privilégié d'améliorer les
rapports entre les individus par un échange et de redonner un espoir en
la société.
L'exemple des définitions montre qu'il existe
différentes façons de voir cette pratique au sein de la
même communauté et que sa force réside dans le fait
justement de ne pas être institutionnalisé. Le cadre
légitime institutionnel a pour objectif de contenir tandis que cette
communauté soude les individus en accord avec une certaine idée
de vie et cette forme de groupement permet de légitimité la
pratique.
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