Les nouvelles organisations et transformations du travail: Les metiers face aux nouvelles technologies de l'information et de la communication( Télécharger le fichier original )par Michel Matthieu SUNGU MUANDA NTELA Université Protestante au Congo - Licence 2007 |
CHAPITRE II LA RECOMPOSITION DES METIERSL'émergence de métiers totalement nouveaux est rare. Les nouvelles professions naissent le plus souvent de l'hybridation de compétences relevant de champs professionnels initialement distincts. Certains métiers existants se transforment de façon radicale, mais l'identité de la plupart des vieux métiers résiste à l'arrivée de nouveaux outils qui n'invalident pas les savoirs de base. En revanche, les nouveaux outils modifient les pratiques et les représentations pour les professionnels comme pour les utilisateurs finaux. L'opposition entre anciens et nouveaux métiers est réductrice. Aux TIC peuvent être associés de nouvelles logiques professionnelles mais aussi le renforcement de logiques professionnelles existantes ou la modification de ces logiques. L'émergence de nouvelles logiques professionnelles peut être suivie par leur développement et leur maturation. La maturation est un moment où une nouvelle logique professionnelle s'institutionnalise en tant que profession ; les carrières se stabilisent tandis que les rôles se modifient. La capacité des personnes à être des acteurs de leur parcours professionnel ou à participer au montage de logiques professionnelles dépend de leurs ressources. Section 1 Evolution et diversification des métiers NTICIl n'existe pas de nomenclature unique et reconnue pour tous les métiers liés aux TIC. Les études qualitatives disponibles font état d'une multitude de fonctions et de métiers. Les métiers de la nouvelle économie sont peu définis et les fonctions et les libellés varient selon les entreprises. Dans les petites structures, les tâches de développeur, animateur, webmestre, peuvent être confondues... La hiérarchisation implicite est liée aux compétences et au niveau de responsabilité12(*). Plusieurs tentatives de classification des "métiers TIC" ont pourtant été faites, en France comme à l'étranger. Elles émanent de grandes entreprises, de syndicats professionnels, d'acteurs ou d'intermédiaires du marché de l'emploi. Les approches diffèrent en fonction de la source observée et selon le champ retenu. Certaines études s'intéressent aux seules fonctions informatiques et télécommunication, d'autres étendent la définition des métiers TIC à des domaines où ces technologies servent essentiellement de support. Rares sont celles qui prennent en compte les métiers des constructeurs de matériels, qui, s'ils sont rarement nouveaux, connaissent souvent des difficultés de recrutement. §1 Quelques métiers ayant évolués sous l'influence NTICCes évolutions peuvent être illustrées par une étude de cas réalisée dans une entreprise du secteur des télécommunications, elle-même très fortement engagée vers la « nouvelle économie » à base de produits et services marqués par les NTIC, et sur des marchés sensiblement transformés. Quels sont les métiers types les plus touchés ? Les secrétaires. Ces emplois et plus largement ceux qui sont des supports des tâches administratives doivent se servir de ces outils dans leur métier direct (ils prolongent là des évolutions déjà largement entamées avec la bureautique), mais surtout dans la dimension collective de leur travail. Les nouvelles technologies renforcent les interrogations et les doutes de certains sur les fonctions futures des secrétariats. Elles apparaissent dans un contexte où les organisations collectives du travail deviennent plus flexibles, avec le développement du travail distant et des communications asynchrones. Elles peuvent alors permettre de concilier cette désynchronisation des collectifs avec le maintien du rôle de coordination collective que jouent les secrétaires. Cependant, elles peuvent aussi accentuer le phénomène de brouillage de la division du travail. Ainsi, l'usage de l'e-mail influence la gestion et le partage de l'information. C'est donc les pratiques des responsables, les règles collectives dans les entités et leur respect qui déterminent l'impact réel du multimédia sur le métier de secrétaire. L'avenir de la fonction semble alors indéterminé, entre un renforcement, selon des modalités nouvelles à inventer, du rôle de coordination collective, ou le déplacement vers de nouvelles fonctions de gestion, en s'appuyant sur la maîtrise des outils qu'offrent les nouvelles techniques. Ces évolutions sont largement dépendantes des choix qui sont faits dans les entreprises. Les fonctions commerciales. Dans ces métiers, les NTIC interviennent d'abord par de nouvelles conditions de mise à la disposition des commerciaux des informations et de l'expertise nécessaires à la vente et à l'accroissement des savoir faire. Ainsi, dans le cas de cette entreprise, l'Intranet modifie les circuits antérieurs (formation, animation par la hiérarchie, documentation) du soutien à la vente, dans une période où le nombre de services commercialisés et l'évolution tarifaire s'accélère. La nature de l'information « en ligne » évolue. Alors que dans le système d'information traditionnel, il s'agissait de traiter des procédures administratives rigides liées à la vente, avec l'Intranet les modalités d'usage sont beaucoup plus interactives et impliquent un apprentissage qui est réalisé de manière différentielle entre les personnes. Comme les NTIC se retrouvent de plus en plus dans les produits et services commercialisés, impliquant une connaissance au moins partielle de ces outils, cela peut donc conduire à une certaine spécialisation à l'intérieur d'un métier organisé jusque-là sur une base généraliste. Là encore, l'évolution de la profession se lit difficilement dans la seule transformation actuelle des usages qu'apportent ces nouvelles techniques. Elle est largement la conséquence de la politique de l'entreprise. Dans les métiers techniques. Ici, les outils comme l'Intranet ou l'e-mail restent aujourd'hui peu utilisés au coeur même de l'activité. Les communications entre entités restent largement tributaires du téléphone (pour les situations d'urgence). Dans les rapports aux clients aussi, les NTIC sont encore peu employées. Elles jouent souvent un rôle limité au téléchargement de notices techniques ou de mises à niveau d'applications logicielles. Une plus grande utilisation dans le cadre de la documentation sur l'activité commence à se développer dans certains secteurs (constitution de bases de données). Cependant, l'arrivée des NTIC se déroule surtout dans une période où des changements techniques et organisationnels d'envergure sont en cours par ailleurs, transformant ces métiers. Le volume global de l'emploi et la division des tâches est appelé à connaître de grosses évolutions, déstabilisant une grande partie de ces fonctions techniques et impliquant des redéploiements importants de personnel. L'impact des NTIC sur ces professions est donc largement dépendant des mutations plus importantes que connaît l'entreprise. Si la diversification des produits intègre plus de NTIC, cela n'assure pas facilement des débouchés à ce redéploiement d'effectifs. Les métiers liés à la gestion des ressources humaines. Ils sont aussi potentiellement concernés par l'explosion des NTIC. Un certain nombre de procédures de cette gestion sont appelées à être automatisées à travers des « workflows » (automatisation de procédures administratives et de gestion par le biais de l'Intranet). Cela aura des conséquences sur l'emploi (par la suppression de tâches d'interface), mais aussi sur l'évolution des missions de l'encadrement de proximité. La généralisation de la décentralisation vers ce niveau de fonctions autrefois assurées par des unités fonctionnelles (gestion des budgets, achats...) peut modifier profondément les manières de travailler dans les entités. Pour sa part, le secteur de la formation professionnelle apparaît comme l'une des activités de gestion des ressources humaines les plus adaptées à une insertion rapide des NTIC. Celles-ci peuvent jouer un rôle sur le contenu de la formation (par la numérisation des cours), sur le développement d'une pédagogie à distance (faisant évoluer celle existante en alliant animation et auto-formation), enfin sur la gestion de l'offre et du suivi administratif de la formation. Des évolutions rapides sont à prévoir. Toutefois l'analyse des usages réels chez les formateurs, les et les utilisateurs montre que cette offre grandissante ne rencontre encore qu'une demande limitée. Le statut de la formation dans la vie de travail et sa place par rapport aux autres formes de montée en compétence explique largement ces réticences des différents acteurs concernés13(*). * 12 «Les effets de l'introduction des TIC sur le travail, les professions et les qualifications"Le Point Magazine, mai 2003, pp.37-40. * 13 BENGHOZI (P.) Relations inter-entreprises et nouveaux modèles d'affaires» paru dans la «Sociologie Économique», volume 52, octobre 2001. |
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