Les déterminants de la mortalité infanto-juvénile au Tchad( Télécharger le fichier original )par Tao Vridaou Institut de Fomation et de Recherche Démographiques (IFORD) - Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées en Démographie (DESSD) 2004 |
5.4. Les effets conjugués des facteurs explicatifs.Les tableaux 22 et 23 contiennent les résultats de l'analyse explicative de la mortalité infantile et juvénile tenant compte des trois groupes de facteurs explicatifs à la fois. L'introduction de ces facteurs dans le modèle de régression se fait progressivement, en vue de permettre une bonne appréciation des effets individuels des groupes de facteurs et des variables explicatives sur le phénomène étudié. C'est le modèle le plus approprié à notre avis dans la recherche des déterminants de la mortalité des enfants des moins de cinq ans. 5.4.1. Les effets conjugués sur la mortalité infantile Les éléments du tableau 22 ci-dessous montrent que l'effet de l'âge de la mère sur la mortalité infantile ne se réalise qu'en présence d'autres facteurs (effets nets). Ceci n'est cependant pas le cas de la parité atteinte (autre variable de contrôle), dont la relation avec ce phénomène démographique reste positive et significative au brut (M0) comme au net (de M1 à M5). L'augmentation d'une unité de la parité atteinte, augmente le risque de mortalité infantile de 1.295fois plus. En ce qui concerne les facteurs culturels, leur comportement global de départ (effets bruts) se maintient jusqu'au modèle saturé (M5), mais avec des différences non négligeables au niveau des risques de la mortalité dont ils sont responsables. Ainsi, seules l'appartenance religieuse et l'appartenance ethnique de la mère demeurent les facteurs culturels pertinents dans l'explication de la mortalité infantile. Globalement, les effets nets de ces deux variables se renforcent et s'intensifient à mesure qu'ils sont contrôlés par les effets des autres groupes de facteurs et de variables intermédiaires. A ce niveau, notre seconde hypothèse spécifique selon laquelle l'impact des trois groupes de facteurs passe par les variables comportementales et biodémographique est en partie vérifiée pour la mortalité infantile. Par contre, aucune variable appartenant aux groupes des facteurs socio-économiques et contextuels n'influence significativement la mortalité des tout petits enfants. Dans la catégorie des variables intermédiaires, les plus influentes sont l'intervalle intergénésique (modèle brut et saturé) et le rang de naissance de l'enfant (modèle saturé uniquement). Tableau 22 : Les effets bruts et nets des variables indépendantes et intermédiaires sur la mortalité infantile
ns = relation non significative ; * = relation significative au seuil de 10% ; **= relation significative au seuil de 5% ; ***= relation significative au seuil de 1%. On en conclut que l'effet des facteurs culturels sur la mortalité infantile est direct, car après introduction d'autres variables dans le modèle, leur seuil de signification n'ont pas varié. Seule l'influence du niveau d'instruction de la mère passe par les caractéristiques socio-économiques du ménage. En effet, dès qu'on introduit les facteurs socio-économiques, le niveau d'instruction de la mère augmente de signification. Par contre, l'ethnie de la mère est médiatisée par les caractéristiques biodémographiques de la mère et des enfants, en particulier, le rang de naissance et l'intervalle intergénésique précédent. Donc, l'effet de l'ethnie sur la mortalité infantile est additif. Pour les variables intermédiaires, on observe qu'elles jouent la médiation entre la variable dépendante et les facteurs culturels, socio-économiques et cadre de vie. En effet, ces variables intermédiaires conditionnent l'effet des variables indépendantes sur la mortalité infantile. Car d'une culture à une autre, il y a beaucoup de chance que les pratiques d'espacement des naissances, de perception de la maladie et surtout d'allaitement qui conditionne la bonne santé de l'enfant peuvent différer, donnant lieu à un niveau de mortalité différent. Nos résultats des Tableaux n°19, 20 et 21 montrent qu'en absence des variables intermédiaires, les risques de mortalité selon les différents groupes de facteurs diminuent. 5.4.2. Les effets conjugués sur la mortalité juvénile Les résultats de l'analyse indiquent qu'aucune des deux variables de contrôle (âge de la mère et parité atteinte) n'influe pas significativement sur la mortalité juvénile (tableau 23). Tableau 23 : Les effets bruts et nets des variables indépendantes sur la mortalité juvénile
ns = relation non significative ; * = relation significative au seuil de 10% ; **= relation significative au seuil de 5% ; ***= relation significative au seuil de 1%..
Parmi les facteurs culturels, l'appartenance ethnique et le niveau d'instruction du père sont ceux qui discriminent les enfants quant à leur exposition au risque de décès. Les résultats contenus dans le tableau 23 montrent que, l'effet des facteurs culturels en occurrence l'ethnie de la mère sur la mortalité juvénile passe par les variables intermédiaires, surtout les comportements des mères. Du au fait qu'après introduction de ces variables dans le modèle, le seuil de signification de l'ethnie (1%) des mère à diminuer. Quant à la variation du risque de mortalité juvénile selon le niveau d'instruction du père, celle-ci s'accroît lorsqu'on passe du modèle brut au saturé. Par rapport aux enfants des pères du niveau secondaire ou plus, ceux des pères sans niveau ont 51% plus de chance de décéder, alors que ceux des pères de niveau primaire ont 63% plus de risque de décéder que d'autres (modèle brut). La tendance attendue est bien celle-ci, par rapport aux enfants des pères du niveau secondaire ou plus, ceux des pères sans niveau ont 2 fois plus de chance de décéder ; ceux des pères de niveau primaire ont 67% plus de risque de décéder que d'autres (modèle saturé). La mortalité juvénile diminue avec le niveau d'instruction du père. Il ressort également de l'analyse qu'aucun facteur socio-économique n'influence la mortalité juvénile. En ce qui concerne les facteurs contextuels, on note seulement le type d'aisance comme facteur explicatif effectif de ce phénomène. Son effet n'est significatif qu'avec la prise en compte de toutes les variables explicatives retenues dans cette étude. Par rapport aux enfants déféquant dans la nature, ceux utilisant de latrine moderne ou autres ont 41% plus de risque de décéder que d'autres. Comme pour la mortalité infantile, l'intervalle intergénésique et le rang de naissance se distinguent des autres variables intermédiaires par leur pouvoir explicatif significatif. On en conclut que le modèle est adéquat lorsqu'on considère dans l'ensemble l'influence des variables indépendantes sur la variable dépendante (la mortalité juvénile), la probabilité associée à la statistique de Khi deux (du dernier modèle) est significative au seuil de 1% (la statistique du modèle complet). On observe clairement, qu'une fois survécu à un an, les enfants sont beaucoup plus exposés aux facteurs externes qu'internes. En effet, entre 1-4ans révolus, les variables intermédiaires n'agissent pas plus que les facteurs extérieurs à l'exemple de la région de résidence qui apparaît ici comme la toute première variable qui détermine la mortalité juvénile. Au niveau de la mortalité infanto-juvénile, l'ordre des déterminants est le même que celui au niveau de la mortalité infantile. 5.4.3. La part des contributions des groupes de facteurs Pour hiérarchiser les variables indépendantes selon leur pertinence dans l'explication de la mortalité des enfants, nous avons utilisé la procédure « Lroc » sous STATA qui consiste à évaluer leur part de contribution au pouvoir prédictif (PP) des modèles de régression globaux. La procédure Lroc (ROC qui signifie Receiver Operating Characteristic) permet de classer les variables selon leur contribution aupouvoir prédictif. Une valeur de PP égale à 100% signifie qu'on a affaire à un pouvoir de prédiction parfait. Tandis qu'une valeur de 50% (seuil de probabilité fixé) renvoie à un pouvoir de prédiction nul. Ainsi, la part du pouvoir prédictif s'obtient par rapport à la limite inférieure (50%) et à la limite supérieure (100%). Donc, une valeur de Lroc équivalant à 0,6594 correspond à un PP de (0,6594 - 0,5)/ 0,5, soit 25,82%. L'approche adoptée à cet effet consiste à constituer un modèle de régression contenant toutes les variables indépendantes (y compris les variables intermédiaires) à en déterminer le pouvoir prédictif. Pour ce faire, on enlève tour à tour les groupes de facteurs du modèle saturé, et à chaque retrait d'un groupe de facteurs un prélèvement du PP est effectué. Le tableau 24 ci dessous donne les contributions individuelles des groupes de facteurs au pouvoir prédictif du modèle global de régression logistique. Les colonnes PP contiennent les pouvoirs prédictifs (en %) des modèles de régression ne contenant pas les groupes de facteurs correspondants. Tandis que la dernière ligne du tableau comprend les pouvoirs prédictifs des modèles saturés relatifs à la mortalité infantile, juvénile et infanto-juvénile. Pour chaque variable dépendante considérée, la contribution d'un groupe de facteurs donnée (CTR) s'obtient par la différence entre le pouvoir prédictif du modèle saturé et le PP correspondant à ce groupe de facteurs. Tableau 24 : Proportions du pouvoir explicatif (R) en pourcentage de groupe de facteurs explicatifs
Source : EDST, 1998 procédures STATA
Il en ressort de ce tableau que, l'influence des facteurs culturels est prépondérante sur la mortalité juvénile, infantile tout comme la mortalité infanto-juvénile. Les facteurs culturels expliquent à environ 8% ; 6% et 5% du pouvoir prédictif des modèles relatif à l'explication de la mortalité juvénile, infantile et infanto-juvénile respectivement. Quant à la contribution des facteurs socio-économiques, celle-ci reste faible, à raison de 2%, 1,5% et 1,3% au PP relatif à l'explication de la mortalité infantile, juvénile et infanto-juvénile respectivement. Enfin, la contribution de facteurs contextuels reste très faible. Les facteurs contextuels sont plutôt frénateurs (inhibiteurs) pour la mortalité infantile. Toutefois, ils contribuent à environ 1% aux modèles de régression correspondant à la mortalité juvénile et infanto-juvénile. Ce constat laisse affirmé que, la première hypothèse spécifique de cette étude est entièrement vérifiée. * 26 M0 : effets bruts ; M1, M2, M3, M4 et M5 : effets nets. * 27CTR est la contribution de groupe de facteurs |
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