WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au cameroun


par Fabien Félicien Prosper NOAH AWONO
Université de Yaoundé II - Master en Théorie et Pluralismes Juridiques 2023
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

 
 
 
 
 

REPUBLIQUE DU CAMEROUN
Paix - Travail - Patrie
********
MINISTÈRE DE L'ENSEIGNEMENT
SUPÉRIEUR
********
UNIVERSITÉ DE YAOUNDÉ
********
FACULTÉ DES SCIENCES
JURIDIQUES ET POLITIQUES
********

LE CONTRÔLE

Mémoire présenté et soutenu

DES COLLECTIVITÉS DÉCENTRALISÉES

REPUBLIC Peace -

MINISTRY

II THE UNIVERSITY

FACULTY

DE L'EXÉCUTION DU

TERRITORIALES AU CAMEROUN

en vue de l'obtention du diplôme de Pluralisme Juridiques

Par :

NOAH AWONO Fabien Félicien Prosper Titulaire d'une Licence en Droit Public

Sous la direction de :

Dr. ABENG MESSI François
Chargé de Cours

Sous la Supervision de :

Pr. PEKASSA NDAM Gérard Martin Professeur Titulaire

POLITICAL

OF CAMEROON Work - Fatherland ********

OF HIGHER EDUCATION

********

OF YAOUNDÉ

II

********

OF LAWS AND SCIENCES ********

BUDGET

Master en Théorie et

ANNÉ ACADÉMIQUE : 2023-2024

 
 
 

i

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

AVERTISSEMENT

« L'Université de Yaoundé II n'entend donner ni approbation, ni improbation aux opinions
émises dans ce mémoire. Elles doivent être considérées comme propres à leur auteur
».

II

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

DÉDICACE

À

Mes parents.

iii

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

REMERCIEMENTS

Nos infinis remerciements s'adressent à notre Superviseur, Monsieur le Professeur PEKASSA NDAM Gérard Martin pour avoir supervisé ce travail. Votre expertise, votre disponibilité et votre bienveillance ont été des piliers fondamentaux dans la conduite de ce travail.

Nous tenons à exprimer notre profonde gratitude à notre Directeur, Dr. ABENG MESSI François auprès de qui nous nous imprégnons des valeurs fondamentales de la recherche notamment : l'humilité, le travail, la rigueur et la patience. Sans réserve, il a accepté de diriger ce mémoire. Son inconditionnelle disponibilité et ses conseils à la valeur inestimable ont été déterminants pour la réalisation de ce travail. Que ces mots traduisent autant que faire se peut notre profonde et déférente gratitude à son égard.

Qu'il nous soit également permis d'exprimer notre révérencieuse gratitude au corps enseignant de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université de Yaoundé II, dont la contribution à notre formation demeure éminente. Une pensée va à l'endroit au chef de département de Théorie et Pluralisme Juridiques, Monsieur le Professeur KENFACK Pierre - Étienne. Celle-ci s'étend aux Professeurs : ONDOUA Alain Franklin, NKOT Fabien, SIMO KOUAM Francis Ampère, TAMASANG Christopher, TCHEUWA Jean - Claude, NGUELE ABADA Marcellin, BIAKAN Jacques, ABANE ENGOLO Edgard Patrick, GUESSELE ISSEME Lionel Pierre et AKONO ONGBA SEDENA.

Nos remerciements vont en outre à l'endroit de M. AKONO ESSAME Joseph pour ses conseils et orientations pour la réalisation de ce travail.

In fine, le soutien sans faille et les encouragements de mes proches, ont contribué à ce que cette année de recherche soit moins pénible :

Amour et reconnaissance à mes parents, M. AWONO BIKIE Désiré et Mme AMBOMO NOA Stéphanie, c'est au prix d'un énorme sacrifice champêtre que vous aviez dû défricher mon chemin de classe. Je vous serai éternellement reconnaissant chers parents. Amour et reconnaissance à mes frères et soeurs qui, n'ont cessé, de me soutenir depuis le début de ce travail. Je vous serai infiniment reconnaissant.

iv

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

SIGLES, ACRONYMES ET ABRÉVIATIONS

Al : Alinéa

Art : Article

ASJ : African Scientific Journal

CCAP : Contrôle citoyen de l'action publique

CDBF : Conseil de Discipline Budgétaire et Financière

CEMAC : Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale

CF : Contrôleur financier

CGCTD : Code Général des Collectivités Territoriales Décentralisées

Coll : Collection

CM : Conseil Municipal

CONAC : Commission Nationale Anti - Corruption

CONSUPE : Contrôle Supérieur de l'État

CPI : Cour Pénal Internationale

CS : Cour Suprême

CTD : Collectivités Territoriales Décentralisées

CTGPF : Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances

publiques

DESS : Diplôme d'Études Supérieures Spécialisées

DGB : Direction générale du budget

DOB : Débats d'orientation budgétaire

Éd : Édition

ENAM : École Nationale de l'Administration et de Magistrature

FFI : Finance et Finance Internationale

GBO : Gestion budgétaire par objectifs

GFP : Gestion et Finances Publiques

IMJST: International Multilingual Journal of Science and Technology

INTOSAI : International Organization of Supreme Audit Institutions

ISC : Institution Supérieure de Contrôle

ISSAI : International Standards of Supreme Audit Institutions

LGDJ : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

V

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

LOLF : Loi organique relative aux lois de finances

MINFI : Ministère des finances

OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires

ONG : Organisation non gouvernementale

Op.cit : Opus citatum

PUCAC : Presses de l'Université Catholique d'Afrique Centrale

PUF : Presses Universitaires de France

PUR : Presses Universitaires de Renne

PUQ : Presses de l'Université du Québec

RAFL : Revue Africaine des Finances Locales

RAFP : Revue Africaine des Finances Publiques

RASJ : Revue Africaine des Sciences Juridiques

RC/SJP : Revue CAMES/ Sciences Juridiques et Politiques

RDP : Revue du Droit Public

REA : Revue des Études Anciennes

RFDA : Revue Française de Droit Administratif

RFDC : Revue Française de Droit Constitutionnel

RFEAP : Régime financier de l'État et des autres entités publiques

RFFP : Revue Française de Finances Publiques

RGD : Revue Générale de Droit

RIDC : Revue Internationale de Droit Comparé

RISA : Revue Internationale des Sciences Administratives

TCS : Tribunal Criminel Spécial

TGI : Tribunal de Grande Instance

TPI : Tribunal de Première Instance

TRC : Tribunal Régional des Comptes

UE : Union Européenne

UEAC : Union Économique d'Afrique Centrale

UEMOA : Union Économique et Monétaire Ouest - africaine

UMOA : Union Monétaire Ouest - africaine

Vol : Volume

vi

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

RÉSUMÉ

Le cadre législatif des CTD au Cameroun a été renforcé par la loi no 2019/024 du 24 décembre 2019 portant Code général des collectivités territoriales décentralisées. Cette loi précise les principes de la décentralisation, les compétences transférées aux CTD, ainsi que les mécanismes de l'exécution et du contrôle budgétaire. En complément, la loi no 2009/011 du 10 juillet 2009 portant régime financier des collectivités territoriales décentralisées établit des règles spécifiques concernant l'élaboration, l'exécution et le contrôle de l'exécution du budget des CTD, ainsi que les obligations en matière de transparence et de responsabilité financière. En effet, la question du financement de la décentralisation figure en bonne place dans la loi portant Code général des collectivités territoriales décentralisées.

C'est encore conformément à l'esprit du principe de l'autonomie financière que se réalise l'exécution des opérations financières des CTD malgré les contrôles susceptibles de s'appliquer. Dès lors, nous avons privilégié la question de l'effectuation du contrôle de l'exécution du budget des CTD en mettant prioritairement en lumière la méthode juridique et accessoirement la méthode sociologique.

Au bénéfice des considérations qui précèdent, il ressort que le contrôle de l'exécution du budget des CTD est axé sur la régularité et la performance. En effet, la possibilité de sanctions en cas d'irrégularités ou de mauvaise gestion joue un rôle dissuasif important. Elle incite les gestionnaires publics à respecter les règles et à adopter des comportements responsables, sachant qu'ils peuvent être tenus responsables de leurs actes.

Mots - clés : CTD - budget - contrôle de l'exécution - régularité - performance et sanctions.

VII

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

ABSTRACT

The legislative framework for decentralized territorial authorities in Cameroon has been strengthened by Law No 2019/024 of December 24, 2019, which establishes the General Code of Decentralized Territorial Authorities. This law outlines the principles of decentralization, the competencies transferred to CTDs, and the mechanisms for budget execution and control. Complementing this, Law No 2009/011 of July 10, 2009, establishes specific rules regarding the preparation, execution and control of CTD budgets, as well as obligations concerning transparency and financial accountability. Indeed, the issue of financing decentralization is prominently addressed in the General Code of Decentralized Territorial Authorities. The enshrinement of the principle of free administration of territorial authorities, underpinned by the affirmation of their administrative an financial autonomy, embodies the legal personality of CTDs in accordance with Article 11.

It is also in line with the spirit of financial autonomy that the execution of CTD financial operations occurs despite applicable controls. Therefore, we have prioritized the issue of controlling the execution of CTD budgets, emphasizing the legal method primarily and the sociological method secondarily.

In light of the above considerations, it appears that the oversight of budget execution of decentralized local authorities is focused on regularity and performance. Indeed, the possibility of sanctions in cases of irregularities or mismanagement plays a significant deterrent role. It encourages publics managers to adhere to the rules and adopt responsible behaviors, knowing that they can be held accountable for their actions.

Keywords: Decentralized Territorial Authorities (CTD) - budget - control of execution - regularity - performance and sanctions.

viii

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

SOMMAIRE

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIÈRE PARTIE : UN CONTRÔLE FORMELLEMENT STRUCTURÉ 30

CHAPITRE I : UN CADRE INSTITUTIONNEL NON JURIDICTIONNEL

OPÉRATIONNEL 32

SECTION I : UN CONTROLE PRIORITAIREMENT CONFIE AUX ORGANES

EXTERNES AUX CTD 32

SECTION II : UN CONTROLE ACCESSOIREMENT CONFIE AUX ORGANES

EXTERNES AUX CTD 41

CHAPITRE II : UN CADRE INSTITUTIONNEL JURIDICTIONNEL INACHEVÉ 50

SECTION I : L'EFFECTIVITE DES JURIDICTIONS DE DROIT COMMUN 50

SECTION II : L'EFFECTIVITE PARTIELLE DES JURIDICTIONS FINANCIERES 58

SECONDE PARTIE : UN CONTRÔLE MATÉRIELLEMENT AMÉNAGÉ 72

CHAPITRE I : UN CONTRÔLE DE LA RÉGULARITÉ 74

SECTION I : LES DIMENSIONS DE LA REGULARITE 74

SECTION II : L'ENGAGEMENT DE LA RESPONSABILITE DES AGENTS PUBLICS

DU FAIT DES IRREGULARITES 84

CONCLUSION DU CHAPITRE I 94

CHAPITRE II : UN CONTRÔLE DE PERFORMANCE 95

SECTION I : LA MESURE DE LA PERFORMANCE BUDGETAIRE 96

SECTION II : LA PRISE DE MESURES CONTRE LES DECIDEURS LOCAUX DU FAIT

DE LA CONTRE - PERFORMANCE BUDGETAIRE 104

CONCLUSION GÉNÉRALE 112

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

1

INTRODUCTION GÉNÉRALE

2

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Constitutionnalisée et renforcée par diverses lois telles que la loi no 2004/017 du 22 juillet 2004 portant Orientation de la décentralisation et la loi no 2019/024 du 24 décembre 2019 portant Code général des collectivités territoriales décentralisées, la décentralisation vise à rapprocher l'administration des citoyens, à promouvoir le développement local et à renforcer la démocratie participative.

Dans ce cadre, les CTD, comprenant les communes et les régions, jouent un rôle essentiel dans la planification et l'exécution des politiques publiques locales. Elles disposent de compétences étendues en matière de développement économique, social et culturel, ainsi que d'une autonomie financière conséquente pour la gestion de leurs budgets.

Toutefois, cette autonomie doit être assortie de mécanismes de contrôle rigoureux pour garantir la transparence, la responsabilité et l'efficience dans l'utilisation des ressources publiques. Le contrôle de l'exécution du budget des CTD s'inscrit dans la logique de la nouvelle gouvernance financière. Dans la construction doctrinale, « la nouvelle gouvernance financière » est un modèle de gestion et de décision financière publique inspiré des modes de gouvernance du secteur marchand et caractérisé par « la responsabilisation des acteurs, leur efficacité d'action et la transparence de leurs pratiques »1. Dans le cas spécifique du Cameroun, la nouvelle gouvernance financière renvoie à la nouvelle philosophie de gestion publique, introduite par le régime financier de l'État de 2007 et confirmée par celui de 2018 caractérisée par le passage d'une logique de moyens centrée sur la recherche de la régularité budgétaire à une logique de performance intégrant les préoccupations d'efficacité de l'action publique, de transparence et de bonne gouvernance des finances publiques. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le Professeur Charles - Étienne LAKENE DONFACK la qualifie de « nouvelle orthodoxie financière »2.

Depuis le début des années 2000, la fièvre de la recherche de la performance financière qui a traversé de nombreux pays d'Afrique francophone, n'a pas laissé le Cameroun indifférent3. En effet, la décentralisation aujourd'hui mobilise beaucoup de derniers publics malgré la crise à laquelle sont encore confrontées les finances locales camerounaises4. Parallèlement, leur gestion est encore confrontée à de nombreuses difficultés qui tendent à

1 BOUVIER (Michel), « Préface », in MILEBE VAZ Christian, La nouvelle gouvernance financière publique dans les organisations du système des Nations Unies, Paris, LGDJ, 2021, p. 9.

2 LAKENE DONFACK (Charles - Étienne), « Constitution, Chambre des comptes, comptes publics en droit public financier camerounais », RAFP, no 12, 2nd semestre 2022, p. 30.

3 MÉDÉ (Nicaise), « L'Afrique francophone saisie par la fièvre de la performance financière », RFFP, no 135, 2016, p. 350.

4 AKONO OLINGA (André), L'apport de la performance au contrôle des finances locales au Cameroun, Thèse de doctorat en Droit Public, Université de Yaoundé II, 2020, p. 4.

3

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

entraver la réalisation des objectifs qui leur ont été assignés. On dénombre ainsi : des irrégularités5 au regard des normes de la comptabilité publique6 et des indélicatesses comptables, d'importantes malversations financières justifiées par la multiplication des actes de corruption7 qui tendent à y obtenir un droit de cité qui, en fin de compte, participent à une perte significative des fonds devant servir au financement des politiques publiques locales. Il apparaît donc plus qu'impératif, que la collectivité satisfasse au mieux les besoins de la population vivant sur son territoire. Cet objectif passe non seulement par l'amélioration de la gestion financière de la collectivité, mais davantage par la pratique d'un contrôle dynamique8 et efficace.

Le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun soulève plusieurs interrogations. Malgré les avancées législatives et institutionnelles, les défis majeurs subsistent en termes de gestion financière locale. Les dysfonctionnements budgétaires, la corruption, l'inefficacité administrative et le manque de transparence sont autant de maux qui entravent la bonne gouvernance locale. De plus, les mécanismes de contrôle existants, qu'ils soient internes ou externes, peinent souvent à remplir pleinement leur rôle, en raison de contraintes institutionnelles, logistiques et humaines.

L'amélioration de la gouvernance des finances publiques en général, et de celles locales particulier y reste primordiale. Elle a pour corollaires, la protection des finances publiques à travers l'impulsion d'une dynamique d'adoption des mesures économique, juridique et politique sur les principes fondamentaux de la transparence et de la bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques. À l'analyse, l'adoption de ces mesures au Cameroun constitue primo, une manifestation des réformes auxquelles notre administration publique est soumise ; secundo, une résultante de la nécessité et surtout de l'obligation

5 Nous pouvons citer :

- Les fautes de gestion ;

- Les détournements de derniers publics ;

- Le non versement des fonds au trésor public ;

- L'absence des états d'émargement. Cette incohérence managériale a par exemple été relevée dans le cas

de l'arrêt no 72/AD/CSC/CDC/S2 du 29 septembre 2011 (commune urbaine de Garoua pour l'exercice

2004) ;

- La comptabilité de fait relevée également dans l'arrêt no 118/P/S2 du 6 septembre 2012 (communauté

urbaine de Yaoundé pour l'exercice 2007) ;

- Le retard dans la production des comptes dans l'arrêt no 187/D/S2 du 22 novembre 2012, compte de

gestion de la commune urbaine de Douala pour l'exercice 2009.

6 MAGNET (Jacques), Éléments de comptabilité, Paris, LGDJ (3e éd.), Coll. Système-Finances Publiques, 1996, p. 11.

7 CHARTIER (Jean - Louis), « Les collectivités locales et la corruption », RFFP, no 69, 2000, pp. 87 - 94.

8 LEJOUR (Baptiste), Du contrôle budgétaire et financier au contrôle de gestion dans les collectivités locales, Mémoire de D.E.S.S, Institut d'Études politiques de Lyon, 2003, p. 4.

4

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

d'arrimer fondamentalement les finances publiques camerounaises aux exigences de la nouvelle gouvernance financière publique. Cette dernière est une approche managériale qui a foncièrement pour objectif la mise en place d'un système de gestion par performance.

À l'observation, les finances publiques locales camerounaises sont imbibées de cette nouvelle philosophie qui innerve la gestion publique. Elles « sont le « nerf de la guerre » en ce qu'elles conditionnent la capacité des collectivités locales à mettre en oeuvre les politiques publiques locales »9 et d'atteindre leurs objectifs10. C'est dire en effet, que les finances publiques sont à la base de toute action administrative, et aucune activité administrative ne s'exerce sans les finances publiques11.

Sur ces entrefaites, la présente étude se penche sur la question, et se propose de mener une recherche sur « Le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun ». Ainsi, pour mieux l'appréhender, il est plus que nécessaire de procéder à la construction scientifique de notre étude en mettant un point d'honneur sur les cadres théorique (I) et matériel (II), ainsi que les axes de ladite étude (III).

I- CADRE THÉORIQUE

L'étude sur le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun prend en compte un cadre théorique précis. Ce cadre théorique met en exergue la conjugaison du cadre contextuel (A) et du cadre conceptuel (B) permettant de mieux saisir les contours de notre sujet.

A- LE CADRE CONTEXTUEL

Le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun s'inscrit dans un cadre à la fois politique (1) et juridique (2). Politiquement, le Cameroun a entrepris une décentralisation pour renforcer la gouvernance locale et favoriser le développement local. Juridiquement, le foisonnement des textes relatifs à la décentralisation définit les règles de gestion financière et les mécanismes de contrôle des CTD.

9 YATTA (François Paul), « La gestion des finances locales en Afrique : Convergence et Divergence des systèmes », RAFL, éd. 2014, pp. 2 - 35.

10 OWONA (Joseph), La décentralisation camerounaise, L'Harmattan Cameroun, 2011, p. 62.

11 LAKENE DONFACK (Charles - Étienne), Finances publiques camerounaises, Paris, Berger-Levrault, mars 1987, p. 16.

5

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

1- Le contexte politique

Le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun s'inscrit dans un contexte politique marqué par la décentralisation et la gouvernance locale. Depuis les années 1990, le Cameroun a entrepris des réformes visant à renforcer le pouvoir et l'autonomie des collectivités locales, notamment en matière de gestion budgétaire. Cependant, ces réformes sont confrontées à des défis tels que la corruption, le manque de transparence et de capacités institutionnelles.

Le contrôle de l'exécution du budget est donc crucial pour garantir une gestion transparente et efficace des ressources au niveau local, dans un contexte où la gouvernance et la reddition des comptes sont des enjeux majeurs. Les lois constitutionnelles révisées des pays d'Afrique noire francophone12 ont singulièrement bouleversé la conception de l'autonomie locale en matière de décentralisation territoriale dans un État unitaire de type classique. Elles devancent en cela la révision de la Constitution française du 4 octobre 1958, dont on connaissait déjà l'ampleur de l'influence enregistrée sur le constitutionnalisme africain.

Ce constat sonne opportunément le glas d'une opinion fort répandue, bien que décriée par certains, selon laquelle « l'étendue des droits africains, en ce domaine (constitutionnel) comme en droit public en général, serait de peu d'intérêt, car ils ne représentaient que de simples prolongements des droits des pays industrialisés et plus spécialement des anciennes métropoles. Ces droits ne seraient en outre que le produit d'une influence générale et omniprésente de modèles et conceptions élaborés ailleurs, en ce sens qu'ils auraient la caractéristique d'être sans réel impact, le mimétisme contribuant à leur ineffectivité, leur principal office étant de remplir des fonctions purement symboliques13 ». Contre toute attente donc, outre son originalité sur des points tels que la protection des minorités et des autochtones, le statut des religions, le constitutionnalisme africain des années 1990 est marqué par l'existence d' « écritures de la Constitution propres à ces groupes de pays qui font que les questions constitutionnelles sont élaborées de façon identique : les Constitutions sont rédigées selon un même type de plan, les compétences sont définies selon une même grille de répartition, les institutions communes s'y retrouvent systématiquement, les mêmes absences st silences s'y répètent. Autant d'éléments qui créent entre les textes français et ceux des États

12 On peut citer la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996.

13 DU BOIS DE GAUDUSSON (Jean), « Le constitutionnalisme en Afrique », in Les constitutions africaines publiées en langue française, Bruylant, 1978, p. 3.

6

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

de succession française un effet de familiarité14 ». De ces « airs de famille, particularismes religieux, sociaux ou juridiques15 », on pourrait même dire, qu'il se dégage un ensemble cohérent tendant vers un arrimage aux normes de droit constitutionnel contemporain dans le monde.

En effet, à l'instar de la France depuis 1946, plusieurs pays d'Afrique noire francophone et Madagascar reconnaissent pour la première fois dans leurs Constitutions, l'existence des collectivités territoriales décentralisées à deux ou trois niveaux, comme entités juridiques autonomes faisant partie intégrante de leurs territoires. Certaines lois fondamentales révisées de ces pays s'ouvrent en général par une disposition liminaire commune qui proclame le caractère « unitaire et décentralisé » de la République16.

Au Cameroun, les acteurs du processus de décentralisation mettent en oeuvre leurs activités dans le respect de l'unité nationale, de l'intégrité du territoire et de la primauté de l'État. Cette première orientation législative est une donnée fondamentale de notre pays, où la tentation sécessionniste s'est parfois manifestée d'une manière plus ou moins sérieuse. L'histoire de la décentralisation au Cameroun est antérieure à l'indépendance du pays. Les premières communes de Yaoundé et de Douala ont été créées en 1941. La loi no 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972 qui a donné une impulsion nouvelle et un rôle accru et déterminant à la décentralisation pour améliorer et dynamiser le développement politique, social et économique au Cameroun. Au sens de cette loi, deux dispositions pertinentes peuvent servir d'assises normatives et précisément constitutionnelles du droit public financier local. En premier lieu, l'on peut se référer à l'article 2 du titre premier de cette loi constitutionnelle qui dispose que : « La République du Cameroun est un État Unitaire décentralisé17 ». Cette disposition constitutionnelle, ne dissimule aucune ambiguïté au sujet de la forme et du mode d'organisation administrative de l'État. Il s'agit clairement de la décentralisation administrative, à l'exclusion de la décentralisation politique.

La décentralisation administrative postule non seulement l'autonomie administrative, mais aussi l'autonomie financière des CTD. Plus loin, au terme du titre X, consacré aux CTD, le constituant camerounais détermine, non seulement la nature des collectivités territoriales, mais également, les principes fondamentaux régissant ces démembrements infra - étatiques,

14 Ibid.

15 Ces expressions sont de Martine Viallet et Didier Maus, « Préfaces », in Les constitutions africaines publiées en langue française, op.cit., p. 2.

16 Art. 2, Loi constitutionnelle du Cameroun ; Art. 1er (nouveau) de la loi constitutionnelle de la France.

17 Art. 2 de la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996.

7

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

ainsi que les missions qui leurs sont dévolues. Tel est l'objet de l'article 55 de cette loi constitutionnelle. Au Cameroun, l'autonomie financière qui constitue un versant constitutionnel de la libre administration des CTD comprend l'autonomie fiscale et l'autonomie budgétaire. L'autonomie financière constitue une condition de réalisation de la décentralisation. S'agissant particulièrement de l'autonomie budgétaire, les CTD camerounaises bénéficient depuis l'avènement de la décentralisation, d'un certain nombre de prérogatives en matière de recettes et de dépenses. Ces prérogatives ne leur confèrent pas une réelle autonomie18. Elles ne mettent en oeuvre qu'un pouvoir budgétaire que leur confère la loi19. Ce pouvoir, bien qu'affirmé par le législateur reste strictement encadré au point où l'on s'interroge sur la pertinence de la liberté des collectivités territoriales en matière budgétaire20. La gouvernance est l'un des enjeux de la décentralisation. On décentralise parce qu'il y a des problèmes de gestion au niveau central qui empêchent l'État de répondre aux besoins des citoyens. Mais, si on n'anticipe pas sur les risques d'exclusion, de corruption, de confiscation du pouvoir local, la décentralisation peut simplement signifier transférer les problèmes du niveau central vers le niveau local sans pour autant les résoudre.

Le Cameroun en général et les CTD en particulier n'ont pas échappé à cette préoccupation du contrôle car leurs finances ont été confrontées à plusieurs maux : mauvaise gouvernance et détournements de derniers publics ont sans nul doute accentué la problématique de la qualité et de l'efficacité des mécanismes de contrôle. Nous avons encore en mémoire le classement de l'ONG Transparency International, qui a classé le Cameroun deux fois champion du monde de la corruption21. Notre étude s'insère dans un contexte politique marqué par des scandales de la corruption, de détournement de derniers publics et de mauvaise gestion qui se répandent, au sein des régions et des communes comme une traînée de poudre. C'est pourquoi, le législateur camerounais consacre des modalités de contrôle de l'exécution du budget des CTD afin de « tordre le cou » aux irrégularités survenues dans le processus de l'exécution de la dépense publique locale. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle « La fonction de contrôle des finances publiques est devenue un des standards du droit et de la gestion des finances publiques dans le monde22 ». En gros, le contexte politique de cette

18 MONGBAT (Alassa), DJODA (Jean-Marc), « Recherche sur le pouvoir budgétaire des collectivités territoriales décentralisées en droit public financier camerounais », IMJST, Vol. 5, 2020, pp. 2203-2217, p. 2203.

19 Ibid.

20 Idem.

21 Classement de l'ONG Transparency International de 1998 et 1999, « https://issue.com/tranparency-international/docs »/CPI - 1998, 1999. Lire Claude Assira, « Procès et procédures : état de non droit permanent », in sous la direction de Charlie Gabriel MBOCK, L'opération épervier au Cameroun, un droit d'injustice, éd. Kiyikant, octobre 2011, p. 49 et s.

22 MÉDÉ (Nicaise), Finances publiques Espace UEMOA/UMOA, Sénégal, L'harmattan, 2016, p. 323.

8

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

étude sur le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun est marqué par les défis persistant en matière de gestion financière et de gouvernance au niveau local.

Dans un pays où la décentralisation est un pilier de la gouvernance publique, le contrôle efficace de l'exécution du budget revêt une importance cruciale pour assurer la transparence, la responsabilité et l'efficacité dans l'utilisation des ressources publiques. Le contexte politique, économique et institutionnel du Cameroun influence directement les mécanismes et les pratiques de contrôle budgétaire au niveau des CTD, et met en lumière l'urgence d'une analyse approfondie de ces processus. La dynamique complexe entre l'État et les collectivités locales, les ressources financières limitées et la pression croissante pour répondre aux besoins des populations sont autant de facteurs qui façonnent le contexte dans lequel s'inscrit cette étude. En comprenant pleinement le contexte spécifique dans lequel s'opère le contrôle de l'exécution du budget du Cameroun, cette étude vise à fournir des recommandations pragmatiques adaptées pour renforcer les mécanismes de contrôle et améliorer la gestion financière des collectivités territoriales décentralisées.

2- Le contexte juridique

Le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun est encadré par une diversité de texte juridiques, notamment la Constitution, les lois relatives à la décentralisation et à la décentralisation fiscale et financière, ainsi que les textes règlementaires et les directives émis par les autorités compétentes.

Sans prétendre à l'exhaustivité de ces textes, la Constitution Camerounaise reconnaît le principe de la décentralisation23 et établit les bases de l'autonomie financière24 des collectivités territoriales. Elle dispose également les principes de transparence, de reddition des comptes et de gestion rigoureuse des finances publiques. La décentralisation au Cameroun, inscrite dans la loi no 2019/024 du 24 décembre 2019, vise à renforcer la gouvernance locale et la participation citoyenne.

Depuis le 24 décembre 2019, la décentralisation territoriale au Cameroun est harmonisée autour d'un texte constitutif : le Code Général des Collectivités Territoriales

23 Art. 1er al. 2 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996.

24 L'autonomie financière doit « se manifester par l'exercice d'une compétence fiscale et d'un pouvoir budgétaire au niveau local », PHILIP (Loïc), « Les garanties constitutionnelles du pouvoir financier local », RFDA, no3, mai - juin 1992, p. 454.

9

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Décentralisées25. Ce texte marque la volonté des pouvoirs publics à accélérer le processus de décentralisation amorcé depuis 1996. Dans cette mouvance, on assiste à une évolution remarquable de la d'un régime financier des CTD via la consécration d'une autonomie administrative et financière. À ce titre, la fiscalité locale, les dotations et les ressources propres acquises par les CTD constituent les bases de la décentralisation financière26.

Cependant, pour assurer une gestion financière transparente et efficace, un cadre juridique solide est nécessaire. La loi no 2009/011 du 10 juillet 2009 établit ce cadre en définissant les principes budgétaires et les organes de gestion financière au niveau local. La loi no 2009/011 du 10 juillet 200927, pose les fondements des finances locales en énonçant les principes de l'équilibre budgétaire, de l'annualité, de la sincérité et de la transparence. Elle établit également la procédure budgétaire, comprenant l'élaboration, l'adoption, l'exécution et le contrôle du budget des collectivités territoriales décentralisées. Les organes de gestion financière, tels que les conseils municipaux et les conseils régionaux, sont chargés de cette gestion.

Le contrôle financier des budgets locaux repose sur plusieurs mécanismes institués par la loi no 2018/012 du 11 juillet 201828 et les textes règlementaires. Les commissions de contrôle financier, composées de représentants de l'État et des collectivités locales, sont chargées de vérifier la régularité, la sincérité et la conformité des opérations financières des collectivités territoriales décentralisées. Elles émettent des avis et des recommandations visant à améliorer la gestion financière locale. À travers des cas pratiques, il est possible d'illustrer l'application du contrôle financier des budgets locaux au Cameroun. Par exemple, des audits réalisés par les commissions de contrôle financier ont révélé des irrégularités dans la gestion des fonds publics dans certaines collectivités. Les décisions prises suite à ces audits ont souvent conduit à des mesures correctives et à des sanctions administratives, démontrant ainsi l'efficacité du contrôle financier dans la préservation des derniers publics.

Hormis le cadre contextuel, le cadre théorique de notre étude prend également en compte le cadre conceptuel.

25 Loi no 2019/024 du 24 décembre 2019, portant Code Général des Collectivités Territoriales Décentralisées.

26 YATTA (François Paul), La décentralisation financière en Afrique, Succès, problèmes et contraintes, Paris, PDM, 2000, p. 1.

27 Loi no 2009/011 du 10 juillet 2009 portant régime financier des collectivités territoriales décentralisées.

28 Loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 portant régime financier de l'État et des autres entités publiques.

10

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

B- LE CADRE CONCEPTUEL

Émile DURKHEIM affirmait que le chercheur « doit d'abord définir les choses dont il traite afin que l'on sache et qu'il sache de quoi il est question29 ». A ce titre, notre sujet repose sur certains concepts dont la compréhension mérite une définition assez précise afin de donner sens à leur usage dans le corps de nos développements. Il s'agit précisément des concepts de contrôle, de l'exécution, du budget et de collectivités territoriales décentralisées,

1- La définition du concept de « contrôle »

Le concept de « contrôle » peut être appréhendé sous une double acception, l'une littéraire (a) et l'autre juridique (b).

a- L'acception littéraire

Dans son acception littéraire, le concept de « contrôle » peut simplement signifier, la vérification ou la surveillance. Dans le cadre de la gestion, le contrôle se réfère à « l'analyse des écarts entre prévisions et réalisations »30.

Le concept de « contrôle » dans le cadre de son acception littéraire, semble moins original et moins adapté dans le cadre de notre étude. C'est la raison pour laquelle, ce concept mérite une définition juridique plus précise pour la compréhension de notre argumentaire.

b- L'acception juridique

La question du contrôle des finances publiques est un immense sujet consubstantiel à la création et la gestion des sociétés31. Elle se pose avec insistance et pertinence, qu'elle n'épargne aucun pays adhérant à l'idéologie de l'État de droit et de la démocratie.

Le contrôle de gestion financière des personnes publiques apparaît aujourd'hui comme sinon un paramètre, du moins un déterminant de la bonne gouvernance et de la démocratie. Il participe de l'efficacité et de la transparence des finances locales pour une meilleure offre de biens pour le citoyen32. Le citoyen qui demeure par ailleurs, le contribuable par excellence. Il

29 DURKHEIM (Émile), Les règles de la méthodologie, Paris, PUF, 1891, p. 34.

30 Dictionnaire Universel, Hachette (4e éd.), p. 275.

31 GRANDGUILLAUME (Nicolas), Théorie générale du contrôle, Paris, Economica, 1994, 187 p.

32 BENSOUDA (Noureddine), « Efficacité et transparence des finances publiques pour une meilleure offre de biens pour le citoyen », RFFP, no 100, Novembre 2007, pp. 333 - 336.

11

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

est alors admis à cet effet, que : « le contrôle des finances publiques tire son fondement du principe du consentement du peuple à l'impôt »33. On peut dès lors remarquer, que : « tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée »34. Encore mieux, « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration »35. Une analyse exégétique de ces dispositions suggère, qu'il s'agit là, d'une matrice fondamentale de nombre de principes qui régulent la vie financière des personnes publiques. Parmi ces principes, se trouve indubitablement l'exigence de contrôle.

En effet, le contrôle dans une appréhension préliminaire, est un examen, une vérification. Dans le cas d'espèce, c'est une vérification exercée sur la gestion des finances locales. Ces dernières s'entendent comme étant, les finances des personnes morales de droit public, notamment les CTD dans le cadre de notre étude. Elles constituent une variante des finances publiques. À ce titre, Messieurs Paul Marie GAUDEMET, et Joël MOLINIER relèvent que : « les finances publiques constituent une richesse »36 et, un « moyen d'action des collectivités publiques »37. Ces ressources sont employées par ces personnes publiques, pour la satisfaction directe ou indirecte des besoins d'intérêt général, même si à l'observation du déploiement du secteur public aujourd'hui, l'on peut avoir un sentiment de corrosion de l'intérêt général38 pourtant inébranlable39. Il faut préciser que le constituant camerounais de 1996, a consacré deux types de CTD, les régions et les communes. Contrairement à la commune40, la mise en place de la région se trouve encore dans les sentiers de la progressivité consacrée par la constitution. Par ailleurs, l'institution communale demande encore un champ d'investigation juridique particulièrement profond, même si sous d'autres cieux, certains s'interrogent sur l'avenir de cette dernière.

33 BESSALA (Alain Georges), Ajustement Structurel et Droit Budgétaire Camerounais : contribution à l'étude des Droits Budgétaires des États Africains sous Ajustements Structurel, Thèse de Doctorat PhD en Droit Public, Université de Yaoundé II, 2013 - 2014, p. 431.

34 Art. 14 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789.

35 Ibid., Art. 15.

36 GAUDEMET (Paul Marie), MOLINIER (Joël), Finances publiques, Paris, budget / trésor, Tome 1, Montchrestien (6e éd.), 1992, p. 16.

37 Ibid., p. 17.

38 PONTIER (Jean - Marie), « L'intérêt général existe-t-il encore ? », Recueil Dalloz, 1998, pp. 327 et suivantes.

39 RANGEON (François), « Peut-on parler d'un intérêt général local ? » in La proximité en politique : Usages, rhétoriques, pratiques, Rennes, PUR, 2005, pp. 45 - 46.

40 PEKASSA NDAM (Gérard Martin), « La classification des communes au Cameroun », RASJ, no 1, Vol. 6, 2009, pp. 229 - 266.

12

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Le contrôle en clair, renvoie à la vérification des actes et des documents. M. Gérard CORNU entend par contrôle, une « opération consistant à vérifier si un organe public, un particulier ou un acte respectent ou ont respecté les exigences de leurs fonctions ou des règles qui s'imposent à eux. Ex. contrôle fiscal, contrôle de la régularité d'un compte »41. Dans son acception juridique plus large, le concept de « contrôle » renvoie à la « vérification de la conformité à une norme, d'une décision, d'une situation, d'un comportement, etc. »42.

Pour l'éminent auteur Michel BOUVIER, contrôler c'est faire des investigations et mener des recherches sur la sincérité et l'exactitude d'un fait, d'une pièce ou d'une situation43. Poursuivant son propos, il précise, qu'il s'agit des opérations de recherches et d'analyses44. Il parle à cet effet, d'un « contrôle vérification »45. Sous ce rapport, il faut relever, que la logique de l'assimilation du contrôle à la vérification semble rencontrer l'adhésion de M. Jean - François FABRE cité par M. Cheickna TOURE46. Le chercheur l'appréhende comme une mesure dont la finalité est de s'assurer qu'une chose est bien, telle qu'on l'a déclarée, ou telle qu'elle doit être par rapport à une norme donnée47. Eu égard à la clarification du concept de « contrôle », le contrôle de l'exécution du budget peut donc être appréhendé comme un processus par lequel les autorités compétentes vérifient si les dépenses prévues dans le budget d'une collectivité territoriale décentralisée sont effectivement réalisées conformément aux priorités et aux normes établies. Souvent qualifié de « contrôle de gestion », celui-ci trouve ses fondements au lendemain de la seconde guerre mondiale suite aux efforts menés par les États-Unis d'Amérique de conduire la guerre à moindre coût et de maîtriser l'avenir des entreprises48. Aussitôt, il va s'affirmer comme un véritable outil d'aide à la performance au sein des entreprises et se répandre dans le monde capitaliste.49

Parallèlement, la nouvelle culture managériale résultant des réformes internationales au sein des États, appréhende le contrôle de gestion comme un outil d'aide à la performance qui viendra contribuer à l'efficacité des politiques publiques50. KHEMAKHEM (1976) met

41 CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, p. 236.

42 Ibid.

43 BOUVIER (Michel), Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l'impôt, Paris, LGDJ (6e éd.), 2004, p. 1.

44 BOUVIER (Michel), Les finances locales, Paris, LGDJ (12e éd.), 2013, p. 4.

45 Idem.

46 TOURE (Cheickna), « Le système de contrôle des finances publiques au Mali », Afrilex, no 4, https://www.afrilex.u-bordeaux4.fr.

47 FABRE (Jean-François), Le contrôle des finances publiques, Paris, PUF, 1968, p. 8.

48 TCHATCHOUA NYA (Magloire), NJIKE NGOMESSE (Désirée), KETCHANKEU (Pierre), « Perception des enjeux du contrôle de gestion dans les municipalités au Cameroun : une approche par le cadre théorique de l'acteur stratégique ? », FFI, Vol. 1, no 25, 2013, pp. 1 - 24., p. 3.

49 Ibid.

50 Idem.

13

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

l'accent sur la mobilité des énergies et des ressources pour atteindre les objectifs fixés par l'entité. De cette réflexion découle la définition suivante : « le contrôle de gestion est le processus mis en oeuvre au sein d'une entité économique pour s'assurer d'une mobilisation efficace et performante des énergies et des ressources en vue d'atteindre l'objectif que vise cette entité51 ». Qu'il s'agisse d'une organisation publique ou privée, le contrôle de l'exécution du budget est un processus qui vise à surveiller et à évaluer la mise en oeuvre des dépenses prévues dans le budget d'une entité.

Ce processus comprend différentes activités telles que la vérification des dépenses effectuées par rapport aux prévisions budgétaires, l'évaluation de la conformité aux règles et aux réglementations en vigueur, et l'analyse de l'efficacité et de l'efficience des dépenses réalisées. En d'autres termes, le contrôle de l'exécution du budget permet de s'assurer que les fonds alloués dans le budget sont utilisés de manière transparente, responsable et conforme aux objectifs fixés. Il contribue également à détecter les écarts éventuels entre les prévisions budgétaires et la réalité, ce qui permet d'identifier les problèmes potentiels et de prendre des mesures coercitives si nécessaire.

Le contrôle de la gestion des finances publiques est un mécanisme indispensable à la bonne au niveau local. Cela est d'autant plus important, que l'évolution de la situation financière des CTD se conjugue à la complexification du secteur local52. Le secteur local en pleine métamorphose, s'apparente progressivement à un système dont le contrôle et la régulation deviennent particulièrement malaisés à assurer53.

En marge du concept de « contrôle », le mot exécution qui apparaît dans l'intitulé de notre thème de recherche mérite d'être défini.

2- La définition du concept d'« exécution »

Le concept d'exécution peut être défini sous un double angle. Il peut être défini sous l'angle littéraire (a) et sous l'angle juridique (b).

51 KHEMAKHEM (Abdellatif), La dynamique du contrôle de gestion, Dunod (2e éd.), 1976, 587 p.

52 AKONO OLINGA (André), L'apport de la performance au contrôle des finances locales au Cameroun, Thèse de doctorat en Droit Public, op.cit., p. 5.

53 BOUVIER (Michel), Les finances locales, op.cit., p. 20.

14

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

a- L'acception littéraire

L'exécution fait référence à une « action d'exécuter, d'accomplir »54. L'exécution renvoie en quelque sorte à « l'accomplissement d'une obligation, d'un jugement »55. Cette définition ne semble pas suffisante pour cerner les contours de notre étude. C'est pourquoi, pour plus de clarté et de précision, une acception juridique est extrêmement importante.

b- L'acception juridique

Dans son acception juridique, le mot « exécution » renvoie à l' « accomplissement, par le débiteur, de la prestation due ; fait de remplir son obligation (impliquant donnée au créancier) »56. Compte tenu de la définition du mot « exécution », l'exécution du budget dans le cadre de notre analyse, fait référence à la mise en oeuvre des dépenses et des recettes prévues dans le budget public d'une entité administrative ou gouvernementale. Cela comprend la réalisation des dépenses autorisées pour différents programmes et projets, ainsi que la collecte des recettes fiscales et autres sources de financement prévues.

Cette phase de l'exécution budgétaire implique également le suivi et le contrôle des dépenses effectuées pour s'assurer qu'elles sont conformes aux autorisations budgétaires et aux règles financières en vigueur. Elle peut également impliquer des ajustements ou des réallocations de fonds en cours d'exercice budgétaire pour répondre aux besoins changeants ou aux situations d'urgence. L'exécution du budget comporte donc deux phases, qu'il s'agisse de la dépense ou de la recette publique : la phase administrative et la phase comptable. Mais avant de parler d'une quelconque exécution, il sied de rappeler que celle-ci fait, traditionnellement intervenir deux grandes catégories d'acteurs : les ordonnateurs qui décident de l'opération en recette ou en dépense et les comptables publics qui, procèdent au recouvrement ou au paiement de ces opérations.

Afin d'assurer un contrôle de régularité le plus étendu possible dans la gestion financière publique, les fonctions d'ordonnateur et de comptable public sont confiées à des autorités différentes dont les compétences sont strictement délimitées. L'un et l'autre bénéficient, également, d'une indépendance réciproque. Une finalité et des exigences qui se confondent au sein de ce que l'on nomme le principe de séparation des ordonnateurs et des

54 Dictionnaire Universel, op.cit., p. 459.

55 Dictionnaire Larousse, p. 163.

56 CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, p. 384.

15

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

comptables publics57. Les ordonnateurs disposent d'une compétence particulièrement large dans la mesure où les trois premières opérations de chaque phase budgétaire relèvent de leurs prérogatives. Seul le maniement des derniers publics leur est interdit, car réservé aux comptables publics. Ces derniers sont donc les seuls agents autorisés à manier les fonds publics, aussi bien en recette qu'en dépense. À ce titre, ils ont la charge de contrôler les ordres de recouvrer et de payer transmis par les ordonnateurs.

Le terme « exécution dans le cadre des finances publiques locales ne se suffit pas. Il y a lieu de se demander ce que l'on exécute. C'est pourquoi ce terme mérite d'être complété par la définition du concept de « budget ».

3- La définition du concept de « budget »

Le concept de « budget » est un mot polysémique qui peut être entendu non seulement sous l'angle littéraire (a), mais aussi sous l'angle juridique (b).

a- L'acception littéraire

Sous l'angle littéraire, le budget peut être défini comme un « état de prévision des recettes et des dépenses d'un pays, d'un département, d'une famille, d'un particulier, etc. »58. Il ressort de cette définition une typologie de budget. Non seulement cette définition du budget fait référence au budget général de l'État, ce qui a été qualifié de « recettes et dépenses d'un pays », mais aussi au budget des collectivités locales, au budget familial et au budget d'une personne physique. Cette définition littéraire du budget semble plus large, c'est pourquoi, il est judicieux de l'appréhender sous l'angle juridique.

b- L'acception juridique

Dans le cadre juridique, le concept de « budget » peut, être défini au sens formel et au sens matériel. Formellement, le budget est un « acte par lequel sont prévues et autorisées les recettes et les dépenses des organismes publics »59. Au sens matériel du terme, il peut être appréhendé comme l'« ensemble des recettes et dépenses d'un organisme public, autorisées et effectuées au titre d'une année »60. Le budget peut encore être défini comme un « état prévisionnel et limitatif des dépenses et des recettes à réaliser au cours d'une période donnée

57 Ibid.

58 Dictionnaire de Français Larousse, p. 53.

59 CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, idem., p. 124.

60 Idem.

16

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

par une unité économique »61. L'établissement d'un budget implique des choix, puis le respect de ceux-ci lors de l'exécution, mais au préalable, une information sur l'avenir plus satisfaisante possible est nécessaire62. La qualité de cette information dépend de la nature de l'unité économique, de l'horizon temporel dans lequel s'inscrit le budget.

Chaque année, les gouvernements préparent et rendent publics les documents budgétaires qui vont définir leur action économique et financière63. Ces documents sont repris par les médias qui les dissèquent, en font une présentation simplifiée et recueillent les commentaires de nombreux spécialistes. Des groupes d'intérêt divers vérifient si les mesures annoncées correspondent aux demandes qu'ils ont faites et prennent position sur la place publique. S'ils ont une telle couverture de presse et si l'opinion publique est interpellée par les documents budgétaires, c'est qu'ils expriment clairement le programme d'action d'un gouvernement, avec les contraintes qui sont les siennes. C'est d'ailleurs ce que soulignait un premier ministre Québec, René LÉVESQUE : « Un budget réussi, pourvu qu'on sache le lire, c'est chaque année, la photo la plus précise qu'on peut tirer d'une société, avec tout son pain et tout son beurre64 ».

En fait, le budget est sans doute l'ensemble de documents le plus important publié annuellement par un gouvernement. Il indique ses priorités, puisque les ressources étant rares, des choix ont dû être effectués par rapport à de multiples possibilités. Il s'inscrit, ce faisant, dans une démarche d'imputabilité car les choix étant explicites, une reddition de comptes devra s'ensuivre. Mais à travers ces documents, il est également possible de voir apparaître tout le fonctionnement d'un État et la dynamique des rapports entre ses différentes composantes. De même, si le budget permet de mieux comprendre l'environnement concret de la gestion publique, il est aussi le reflet de la part de la richesse collective consacrée à la production de biens et de services publics65.

À la suite du législateur communautaire, à travers les directives du 19 décembre 2011, le législateur camerounais prend le soin d'internaliser et de s'approprier, la programmation budgétaire comme une nouvelle logique ou stratégie d'élaboration des budgets des personnes publiques. Cette stratégie nouvelle, qui ne répudie pas totalement la teneur de l'annualité budgétaire, consacre désormais la programmation budgétaire. Celle-ci postule l'élaboration des activités et actions des personnes publiques au-delà d'une année budgétaire, mais dans

61 SILEM (Ahmed), ALBERTINI (Jean-Marie), Lexique d'économie, Dalloz, (11e éd.), 2010, p. 118.

62 Ibid.

63 CLICHE (Pierre), Gestion budgétaire et dépenses publiques, Québec, PUQ, 2009, p. 13.

64 LEVESQUE (René), Attendez que je me rappelle, Montréal, Québec-Amérique, 525 p.

65 CLICHE (Pierre), op.cit.

17

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

une limite n'excédant pas trois (3) ans. De même, en dépassement du principe de l'équilibre budgétaire consacré par l'article 3566 de la loi du 10 juillet 2009 portant régime financier des CTD, le législateur camerounais du 11 juillet 2018, consacre désormais un principe de soutenabilité budgétaire. En effet, tandis que l'équilibre budgétaire se résume autour de l'interdiction de déficit ou excédent budgétaire, le principe de soutenabilité budgétaire quant à lui, autorise les personnes publiques à exécuter les budgets déficitaires à condition de pouvoir assumer les dépenses prioritaires inscrites dans les programmes budgétaires.

Avant même de parler de l'exécution et du contrôle de l'exécution, le budget des CTD au Cameroun est mis en oeuvre par l'étape préalable qu'est l'élaboration. L'élaboration du budget, du latin « Laborare », qui signifie « travailler », l'élaboration du budget des CTD est une étape qui désigne l'ensemble des opérations ou des activités juridiques préalables à l'exécution du budget des personnes publiques. À cet effet, l'élaboration du budget des CTD au Cameroun se déroule en trois phase67 à savoir : la préparation, le vote ou l'adoption et l'approbation.

La préparation du budget local est une notion qui met en exergue deux approches complémentaires : l'une classique et l'autre moderne. Dans son approche classique, la préparation du budget des personnes publiques consiste à déterminer les prévisions de recettes et de dépenses d'une personne publique. En revanche, la conception moderne consacrée en droit positif camerounais par les lois no 2007/006 du 26 décembre 2007, portant régime financier de l'État, et la loi no 2018/011 du 11 juillet 2018, portant régime financier de l'État et des autres entités publiques, consacrent l'élaboration des programmes comme articulation nouvelle de l'élaboration du budget des personnes publiques. Il s'agit, au-delà des prévisions de recettes et de dépenses, de déterminer les projets, activités et action à réaliser par les pouvoirs publics au cours du prochain exercice budgétaire ou encore durant une période triennale.

L'adoption du budget communal ou régional quant à elle, est une phase qui incombe à l'organe délibérant de chacune des CTD ci-dessus évoquées. Telle est la teneur de l'article 422 alinéa 1er du CGCTD68.

En ce qui concerne l'approbation du budget des CTD, elle en mise en oeuvre

66 L'article 35 de la loi no 2009/011 du 10 juillet 2009, portant régime financier des collectivités territoriales décentralisées dispose à cet effet que : « le budget est voté en équilibre en recettes et en dépenses ».

67 Les phase de l'élaboration du budget des CTD au Cameroun sont : la préparation, le vote ou l'adoption et l'approbation.

68 L'article 422, al. 1er du CGCTD dispose à cet effet que : « le budget de la collectivité territoriale, est voté, par l'organe délibérant, au plus tard le 15 Novembre de chaque année ».

18

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

par les organes d'approbation tels que, les organes délibérants des CTD et les autorités de tutelle des CTD. En effet, « le budget de la Collectivité Territoriale est approuvé par arrêté du représentant de l'État dans un délai de quinze (15) jours suivant la date de sa réception par celle-ci. Passé ce délai, le budget est réputé approuvé69 ».

Hormis le concept de « budget », le concept de « collectivité territoriale décentralisée » qui, apparaît dans l'intitulé de notre thème de recherche mérite à son tour d'être défini.

4- La définition du concept de « collectivité territoriale décentralisée »

Au sens du Vocabulaire juridique de Gérard CORNU, une collectivité territoriale décentralisée ou locale, corollaire de la « décentralisation administrative » renvoie à un « ensemble d'habitants d'une même partie du territoire ayant des intérêts communs gérés par des organes administratifs qui lui sont propres70 ». Autrement dit, les CTD renvoient donc à des entités administratives locales dotées d'une certaine autonomie qui est à la fois administrative et financière permettant de gérer les affaires locales dans un cadre défini par la loi. C'est dans cette perspective que, la loi no 2004/017 du 22 juillet 2004 portant loi d'Orientation de la Décentralisation définit les collectivités territoriales comme des personnes morales de droit public71 jouissant d'une autonomie administrative et financière pour la gestion des intérêts régionaux et locaux.

Au Cameroun, cela peut inclure les communes, les régions et autres entités territoriales. Eu égard à cette définition, il ressort qu'au sein d'un État unitaire dont l'organisation est décentralisée72, comme c'est d'ailleurs le cas du Cameroun, les CTD sont des circonscriptions administratives dotée de la personnalité morale et de l'autonomie administrative et financière73. En définissant l'autonomie financière, Monsieur André ROUX martèle qu'elle « revêt une double dimension. En premier lieu, c'est la reconnaissance d'une capacité juridique de décision qui, en matière de recettes, implique un véritable pouvoir fiscal, le pouvoir de créer et, de lever l'impôt et, qui en matière de dépenses implique la liberté de décider d'affecter les ressources à telle ou telle dépense. En second lieu, c'est la possibilité pour les collectivités régionales ou locales d'assurer le financement de leurs

69 Art. 426 du CGCTD.

70 SILEM (Ahmed), ALBERTINI (Jean - Marie), Lexique d'économie, op.cit., p. 171.

71 Art. 4 (4) de la loi no 2004/017 du 22 juillet 2004 portant loi d'Orientation de la Décentralisation.

72 AVRIL (Pierre), GICQUEL (Jean), Lexique de droit constitutionnel, PUF (4e éd.), p. 23.

73 Ibid.

19

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

dépenses par des ressources propres en volume suffisant74 ». Pour cet auteur, le pouvoir fiscal local est d'abord un pouvoir normatif, c'est-à-dire le pouvoir de créer les recettes fiscales. Or, ce pouvoir de création de recette appartient au Parlement en vertu du principe de la légalité fiscale. Ensuite, le pouvoir fiscal local est budgétaire, c'est-à-dire le pouvoir de percevoir l'impôt et de l'utiliser librement. Cette conception extensive du pouvoir fiscal local ne fait pas l'unanimité en doctrine. La raison semble être simple. Doter les collectivités locales du pouvoir de créer les recettes fiscales serait une atteinte au principe de la légalité fiscale dans un État dont la forme revêt un caractère unitaire et décentralisé. C'est pourquoi l'autonomie financière s'entend pour certains « comme la situation d'une collectivité locale disposant d'un pouvoir propre de décision et de gestion de ses recettes et des dépenses regroupées en un budget nécessaires pour l'exercice de ses compétences75 ». Autrement dit, « l'autonomie implique un pouvoir fiscal local, accompagné d'un pouvoir budgétaire autonome dotant les collectivités locales de la capacité de disposer d'un budget propre, distinct du budget général de l'État, et dont l'exécution se fait indépendamment de toute contrainte extérieure ou précisément de toute influence étatique76 ». Cependant, le pouvoir fiscal local ne serait qu'un élément du pouvoir budgétaire. L'on peut soutenir cet avis par le fait que le fiscal constitue un élément du budgétaire. En droit budgétaire, l'impôt constitue une matière budgétaire et une recette permanente du budget. A l'analyse, l'étude sur le pouvoir budgétaire des collectivités territoriales se situe dans le vaste champ de la décentralisation financière. En effet, finances publiques et décentralisation ne s'excluent pas l'une de l'autre. La première constitue la condition sine qua non de réalisation de la décentralisation. La seconde quant à elle ne peut être effective que si les collectivités territoriales décentralisées disposent des moyens nécessaires pour financer le développement local. Pour ce faire, elles ont besoin d'un véritable pouvoir budgétaire qui constitue une condition de l'autonomie financière77 et permet la réalisation de la décentralisation78 . En vertu du principe de subsidiarité79, le législateur leur

74 ROUX (André), « L'autonomie financière des collectivités locales en Europe », Rapport introductif, AIJC, 2006, p. 499 ; du même auteur, « Le principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales », RFDA, 1992, Vol. 8, no 3, pp. 435-452.

75 ESSONO OVONO (Alexis), « L'autonomie financière des collectivités locales en Afrique noire francophone. Le cas du Cameroun, de la Côte-d'Ivoire, du Gabon et du Sénégal », REA, Bordeaux 4, pp. 1 - 24, p. 2.

76 MONEMBOU (Cyrille), « Le pouvoir règlementaire des collectivités locales dans les États d'Afrique noire francophone (les cas du Cameroun, du Gabon et du Sénégal) », RC/SJP, no 002/2015, pp. 79 - 111, p. 97.

77 PHILIP (Loïc), « L'autonomie financière des collectivités territoriales », CCC no 12, Dossier : le droit constitutionnel des collectivités territoriales - mai 2002, in www.conseil-constitutionnel.fr consulté, le 30 décembre 2023 à 14h59 min.

78 OLIVA (Éric), « La conception de l'autonomie locale, quel contenu ? quelle effectivité ? », G&FP, 2017/no 2, pp. 13 - 24, p. 13.

79 Comme on l'a expliqué, « principe d'origine ancienne ayant trouvé son premier essor dans la pensée sociale catholique, le principe juridique de subsidiarité implique une double obligation qui découle directement de sa

20

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

accorde un certain nombre de compétences en matière financière pour gérer les affaires publiques locales80. C'est au regard de ce principe qu'il est reconnu aux CTD d'exercer certaines compétences au niveau local dans l'optique de limiter l'intervention de l'État sans toutefois l'effacer81.

Les CTD qui bénéficient de cette autonomie financière au Cameroun sont de deux types à savoir les régions et les communes82. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle Georges VEDEL affirme que : « Ce n'est pas l'État qui a changé la vieille société ; c'est la nouvelle société qui a changé l'État83 ». Nous ne pouvons envisager aborder ce sujet sans avoir saisi la notion même de décentralisation qui est au coeur du droit budgétaire des collectivités territoriales décentralisée, même si elle n'est pas un terme clé de notre sujet.

Le concept de décentralisation n'est certes pas identifié dans l'intitulé de notre mémoire, mais il revêt un intérêt fondamental pour la compréhension de notre argumentaire.

La décentralisation, elle peut être entendue comme un processus par lequel certaines responsabilités gouvernementales et administratives sont transférées des autorités centrales à des entités locales, telles que les collectivités territoriales décentralisées, l'objectif étant de rapprocher la prise de décision des citoyens et de promouvoir le développement local. Autrement dit, la décentralisation est le « fait de donner le pouvoir de décision, dans la gestion administrative, à des collectivités territoriales ou à des personnes publiques distinctes de l'État »84. L'opération constituante amorcée depuis quelques années au Cameroun et qui s'est achevée avec la promulgation par le Président de la République, de la Loi no 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 2 juin 1972, n'a donné naissance ni à un

double origine étymologique. Provenant à la fois du terme subsidium, signifiant "renfort, ressource"(idée de secours), et du terme subsidiarius, signifiant "en réserve"(idée de secondaire), ce principe oblige, d'une part, le niveau supérieur de compétence à demeurer "en réserve"et donc de laisser intervenir le plus possible les niveaux inférieurs, et impose d'autre part, à ce niveau supérieur de venir "en renfort"et donc au secours des niveaux inférieurs dès lors que ceux-ci ne sont plus en mesure d'intervenir », DEROSIER (J.-P.), « « Et au milieu coule la rivière » : la subsidiarité et la frontière rhénane. Signification juridique, implication possibles et portées positives de deux articles 72, alinéa 2 : la subsidiarité, entre principe et objectif », in BRISSON (Jean-François) (dir.), Les transferts de compétence aux collectivités locales, Paris, L'Harmattan, 2009, pp. 91 - 108, pp. 93 - 94.

80 DELCAMP (Alain), « Principe de subsidiarité et décentralisation », RFDC, n° 23, 1995, pp. 609 - 624.

81 PONTIER (Jean - Marie), « La subsidiarité en droit administratif », RDP, 1986, pp. 1515 - 1537.

82 Art. 2(1) de la loi no 2019/024 du 24 décembre 2019 portant CGCTD ; Art. 55 Al. 1 de la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996.

83 VEDEL (Georges), « Décentralisation et finances locales : clés pour la réflexion », RFFP, no 38, 1992, pp. 9 - 13, p. 10.

84 RUDELLE (Christian), Dictionnaire des termes juridiques, Édimages, 1992, p. 83.

21

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

État fédéral ni à un « État régional »85.

Le constituant a marqué sa préférence pour un « État unitaire décentralisé86 ». S'il n'y a pas révolution, il faut cependant reconnaître qu'une évolution significative a été opérée. L'article 1er al. 2 de la Constitution du 2 juin 1972 disposait que « la République du Cameroun est un État unitaire ». Le constituant du 18 janvier 1996 y a ajouté le qualificatif « décentralisé ». Il s'agit d'une solution de compromis qui renvoie dos-à-dos les tenants du fédéralisme et ceux de l'État unitaire centralisé. Mais c'est un choix qui est loin d'être accepté par tous, en particulier par les tenants du fédéralisme87. Quoi qu'il en soit, cette option a pour corollaire la constitutionnalisation de la décentralisation territoriale au Cameroun. L'histoire constitutionnelle du Cameroun enseigne que la constitutionnalisation de la décentralisation en 1996 n'est pas une opération nouvelle. Le constituant avait inséré, pour la première fois, dans le texte constitutionnel du 4 mars 1960, en son article 46, une disposition qui faisait des provinces et des communes des « collectivités locales de l'État du Cameroun ». Celles-ci devaient s'administrer librement par des conseils de élus, être dotées de la personnalité morale et jouir de l'autonomie financière88.

Pour mieux mener notre analyse, il est judicieux de joindre au cadre théorique, le cadre matériel.

II- LE CADRE MATÉRIEL

Le cadre matériel intègre l'objet de l'étude, la matière essentielle ou plutôt la substance de la recherche. Dans le cadre de cette recherche, il prendra corps à partir de la précision de la revue critique de la littérature (A), l'objet de l'étude (B), de l'intérêt et de la méthode d'analyse (C) et des axes de l'étude (D).

A- LA REVUE CRITIQUE DE LA LITTÉRATURE

La revue critique de la littérature est une prospection intelligente et évaluative qui favorise l'émersion et la circonscription de l'objet de l'étude. Cette prospection est intimement liée à la détermination de la problématique. Autrement dit, « il ne saurait y avoir

85 GUIMDO DONGMO (Bernard - Raymond), « Les bases constitutionnelles de la décentralisation au Cameroun (Contribution à l'étude de l'émergence d'un droit constitutionnel des collectivités territoriales décentralisées) », RGD, no 1, décembre 1998, Vol. 29, pp. 79 - 100., p. 81.

86 Art. 1er de la Loi constitutionnelle no 96/06 du 18 janvier 1996.

87 Ibid.

88 Idem.

22

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

de problématique pertinente sans une solide revue de la littérature89 ». À cet effet, réfléchir sur le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun nous a conduit inéluctablement à nous interroger sur les orientations et options des réflexions de certains auteurs qui, à n'en point douter, ont constitué un gouvernail à notre question de recherche.

La décentralisation budgétaire au Cameroun a été un sujet d'intérêt croissant pour les chercheurs.

Dès lors, toutes les structures au sein d'un État, usant des derniers publics, sont soumises au contrôle90, qui, est gage de la préservation de l'intérêt général. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle M. André BARILARI estime que « l'action publique en général et la gestion du dernier public en particulier doit faire l'objet d'un contrôle particulier afin de non seulement de prévenir ou sanctionner les détournements à des fins privées ou étrangère à l'intérêt général, mais aussi de garantir qu'elle exerce conformément aux décisions prises par les instances légitimes qui expriment la souveraineté des citoyens. La démocratie exige, plus que tout autre régime, contrôle et transparence dans le domaine des finances publiques »91. Ainsi, un contrôle correctement effectué constitue le corollaire indispensable et logique d'un régime qui entend oeuvrer dans le sens de l'intérêt général92, pour la réalisation du bien commun. Face à « un constat généralisé de stagnation de l'action publique, de malversations financières, d'opacité administrative et surtout de corruption dans la gestion des affaires publiques »93, le Cameroun s'est engagé dans un vaste processus de modernisation de sa gestion publique94. L'objectif étant la recherche d'une plus grande efficacité de l'action publique et la transparence pour une meilleure offre des biens et services aux citoyens.

Dans la même logique, Christian DESCHEEMAEKER pense que, la transformation des mécanismes de contrôle a pour fondement les principes généraux du droit et est manifestée par un alourdissement des procédures et une modernisation des méthodes de

89 OLIVIER (Lawrence), BEDARD (Guy), FERRON (Julie), L'élaboration d'une problématique de recherche, Paris, l'Harmattan, 2005, Coll. Logiques sociales, pp. 10 - 11.

90 YAMPILI ABDOURAHMANOU, « Le contrôle de l'exécution des budgets des établissements publics spéciaux au Cameroun : Le cas de la CNPS et de la CAA », IMJSTP, no 1, Vol. 9, Janvier 2024, p. 6959.

91 BARILARI (André), « La nouvelle gouvernance financière de l'État et l'évolution des dispositifs de contrôle », La revue du trésor, no 6, juin 2005, p. 275.

92 HASSANA (Barnabas), « L'évolution des finalités du contrôle de la dépense publique au regard des nouvelles réformes de finances publiques camerounaises », IMJST, no 7, Vol. 5, Juillet 2020, p. 1227.

93 AKONO OLINGA (André), « La codification de la transparence et de la bonne gouvernance dans les finances publiques des États de la CEMAC », Annales africaines, Vol. 1 no 18, avril 2023, p. 42.

94 SADOA (Arnaud Claude), L'adaptation du contrôle des finances publiques à la nouvelle gouvernance financière au Cameroun, Mémoire de master en Droit Public, Université de Strasbourg, 2022 - 2023, p. 1.

23

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

contrôle95. Michel PRAT et Sylvie CHAIGNAU PEYROUX96, n'en disent pas autrement en assimilant la transformation à la modernisation97. Ils rejoignent ainsi Michel BOUVIER et Jean-Marie PONTIER qui expriment une idée semblable en opinant respectivement, que la recherche de l'efficacité est devenue un impératif, justifie à certains égards, les transformations du contrôle des finances locales98 ; et « si les finalités du contrôle (...) demeurent les mêmes qu'auparavant, le sens de ce contrôle a profondément changé, et il est possible de parler de transmutations »99. Restant dans la même logique, Michel BOUVIER, Marie - Christine ESCLASSAN et Jean - Pierre LASSALE, semble marquer son adhésion à cette appréciation. Ils se montrent favorables à la thèse de la transformation du contrôle avec la complexification du secteur public local qui se présente aujourd'hui en forme satellitaire100.

Ensemble, ces travaux offrent un aperçu approfondi de la décentralisation budgétaire et de ses implications pour la gouvernance locale et la gestion des finances publiques au Cameroun. Ils soulignent l'importance de renforcer la transparence, la responsabilité et la participation citoyenne pour garantir l'efficacité et l'efficience des CTD dans la fourniture de services publics. C'est à la lumière de ces travaux que l'objet de notre étude sera structuré.

B- L'OBJET DE L'ÉTUDE

L'objet de l'étude s'articule autour de la construction de la problématique ou la question de recherche (1) conjuguée à la formulation de l'hypothèse de recherche (2).

1- La problématique

La question de recherche ou problématique s'entend de « l'ensemble construit autour d'une question principale, des hypothèses de recherche et des lignes d'analyse qui permettront de traiter le sujet choisi »101. Dans cette perspective, la personnalité morale ainsi que l'autonomie administrative et financière concédée par l'État aux CTD explique que ces

95 DESCHEEMAEKER (Christian), « La transformation des contrôles. L'alourdissement des procédures », RFFP, no 87, Septembre 2004, pp. 203 - 217.

96 PRAT (Michel), CHAIGNAU - PEYROUX (Sylvie), « La modernisation des méthodes de contrôle », RFFP, no 87, Septembre 2004, pp. 219 - 230.

97 PRAT (Michel), CHAIGNAU - PEYROUX (Sylvie), « La modernisation des méthodes de contrôle », op.cit.

98 BOUVIER (Michel), Les finances locales, op.cit., p. 146.

99 PONTIER (Jean - Marie), « Les transmutations du contrôle sur les collectivités territoriales décentralisées », La semaine juridique. Administrations et Collectivités territoriales, no 44, 5 Novembre 2012, p. 6.

100 BOUVIER (Michel), ESCLASSAN (Marie - Christine), LASSALE (Jean - Pierre), Finances Publiques, Paris, LGDJ, Montchrestien (18e éd.), 2019 - 2020, p. 961.

101 BEAUD (Michel), L'art de la thèse, Paris, éd. La découverte, 2006, p. 55.

24

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

entités infra - étatiques possèdent ou disposent des ressources et exécutent des dépenses en toute liberté à côté, ou en dehors de l'État. Il s'agit là de l'implication financière d'un principe fondamental du droit de la décentralisation : le principe de la libre administration des CTD. C'est encore conformément à l'esprit de ce principe que se réalise l'exécution des opérations financières des CTD malgré les contrôles susceptibles de s'appliquer à ces dernières. Comme le souligne Hans KELSEN, « le droit positif ne reconnaît que la centralisation et la décentralisation partielles »102. C'est dire qu'en matière de décentralisation, l'autonomie des structures décentralisées doit toujours être relative et non absolue. C'est ce qui découle même de la règle de subsidiarité.

Cependant en matière de finances publiques locales, l'on constate que la décentralisation financière rime avec une certaine centralisation qui parait excessive. En effet, l'intention du législateur de doter les CTD d'un certain nombre de pouvoir en matière budgétaire ne serait qu'apparente voire trompeuse au regard de l'encadrement strict dudit pouvoir. D'où la question la question du contrôle de l'exécution du budget des CTD. Dès lors, comment s'effectue le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun ?

2- L'hypothèse de recherche

Dans le domaine du droit budgétaire des collectivités territoriales décentralisées, la question du contrôle de l'exécution du budget des CTD est un sujet qui soulève des enjeux fondamentaux en matière de bonne gestion et gouvernance locale. À ce titre, le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun s'effectue de manière particulière.

C- L'INTÉRÊT ET LA MÉTHODE DE L'ÉTUDE

Traditionnellement, tout travail scientifique présente nécessairement un intérêt et une méthode d'analyse. À cet effet, notre étude ne déroge pas à ces exigences scientifiques et mérite de mettre en exergue un intérêt (1) qui peut être varié, et une méthode (2) qui est à la fois prioritaire et complémentaire.

102 KELSEN (Hans), Théorie générale du droit et de l'État, Paris et Bruxelles, LGDJ et Bruylant, 1997, p. 355.

25

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

1- L'intérêt de l'étude

L'étude sur le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées revêt un intérêt varié, c'est-à-dire un intérêt théorique (a) et un intérêt pratique (b).

a- L'intérêt théorique

Au plan théorique, le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun vise la transparence, la bonne gestion des finances publiques locales. La notion de transparence est de plus en plus l'une des notions les plus usuelles de la gestion publique moderne et gage de la bonne gouvernance financière. Définie comme « la mise en oeuvre satisfaisante de l'ensemble des mécanismes destinés à assurer la production, la fiabilité, l'accessibilité et l'intelligibilité de l'information budgétaire des personnes publiques - sous réserve des secrets légitimement protégés -, à temps et pour la durée utile103 », la transparence est un principe qui irrigue toute la vie financière publique.

La transparence est l'exigence de contrôle, d'information et d'intégrité des acteurs d'exécution du budget des entités publiques. Elle suppose aussi la lisibilité, l'accessibilité et l'intelligibilité de la législation financière104. Prévu par la loi n° 2018/012 portant RFEEP, la loi n° 2018/011 du 11 juillet 2018 portant CTGFP et la loi n° 2019/024 portant CGCTD, l'impératif de transparence exige désormais du contrôleur financier spécialisé la vérification exhaustive et fiable des informations sur les activités passées, présentes et futures des collectivités locales ou des établissements publics afin de contribuer à une meilleure prise des décisions des acteurs de l'exécution du budget (ordonnateurs, régisseurs, comptables). Une fois que la transparence et la bonne gouvernance financière sont remplies par la fonction de contrôle de l'exécution du budget, on assiste au processus de décentralisation qui constitue l'axe fondamental de promotion du développement de la démocratie et de la bonne gouvernance au niveau local105. L'intérêt du contrôle de l'exécution du budget des CTD réside dans la volonté de mettre en oeuvre des mécanismes de gestion saine des finances publiques locales afin de promouvoir notamment mais non exclusivement le développement local. Autrement dit, au plan théorique, l'intérêt du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun est multiple et revêt une importance capitale pour plusieurs raisons.

103 SY (Aboubakry), La transparence dans le droit budgétaire de l'État en France, Paris, LGDJ, 2017, p. 6.

104 Art. 2 Al. 2 de la loi no 2018/11 du 11 juillet 2018 portant CTGFP.

105 Art. 5(2) de la loi portant CGCTD.

26

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Le contrôle de l'exécution du budget permet de garantir la transparence dans la gestion des fonds publics au niveau local. En rendant compte de l'utilisation des ressources financières, il renforce la redevabilité des autorités locales envers les citoyens. En surveillant les dépenses et en identifiant les éventuelles irrégularités, le contrôle budgétaire contribue à prévenir la corruption et la fraude au sein des CTD. En analysant l'efficacité et l'efficience des dépenses, le contrôle de l'exécution du budget permet d'identifier les domaines où des améliorations peuvent être apportées, et d'optimiser ainsi l'utilisation des ressources disponibles. Un contrôle efficace de l'exécution du budget renforce la gouvernance locale en favorisant des processus décisionnels transparents et responsables, et en renforçant la confiance des citoyens dans leurs autorités locales. En garantissant que les fonds utilisés conformément aux priorités définies, le contrôle budgétaire contribue à améliorer la qualité des services publics fournis aux citoyens au niveau local.

Un contrôle rigoureux de l'exécution du budget contribue à assurer la stabilité financière des CTD en évitant les déficits budgétaires et en garantissant une gestion prudente des ressources. En résumé, au plan théorique, l'intérêt du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun réside dans sa capacité à promouvoir la transparence, la responsabilité, l'efficacité et la gouvernance démocratique au niveau local, tout en garantissant une utilisation optimale des ressources financières pour répondre aux besoins des citoyens.

Hormis l'intérêt théorique, notre étude repose également sur un intérêt pratique.

b- L'intérêt pratique

Au plan pratique, le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun permet non seulement de constater des irrégularités administratives (faute de gestion, gestion de fait) et des infractions pénales (détournement de derniers publics locaux, corruption) dans la gestion du budget local, mais aussi de faire endosser la responsabilité financière aux acteurs de ladite exécution, coupables des irrégularités susmentionnées. Cette responsabilité financière a une double dimension. Elle revêt une dimension administrative, c'est-à-dire, la prise des sanctions administratives à l'encontre des acteurs de l'exécution du budget des CTD. La responsabilité financière revêt également une dimension juridictionnelle, c'est-à-dire, la prise des sanctions par la juridiction financière spécialisée (Chambre des comptes de la Cour suprême) ou par les juridictions répressives à l'encontre desdits acteurs.

Eu égard aux différents intérêts, notre étude sera menée sous l'angle d'une méthode précise qui, permettra d'atteindre des résultats fiables.

27

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

2- La méthode de l'étude

Traditionnellement, « la première obligation d'un scientifique [...] est de décrire sa méthode, la manière dont il perçoit l'objet de son étude et la mesure dans laquelle sa propre subjectivité affecte l'objet de celle-ci106 ». Nous ne dérogeons pas à cette exigence scientifique dans le cadre de notre travail, car la question de la méthode est justement au coeur de toute oeuvre scientifique107. D'après Madeleine GRAWITZ, la méthode d'analyse est appréhendée comme « une démarche intellectuelle essentielle pour parvenir à la vérité, et de prouver cette vérité le cas échéant. Elle permet d'expliquer le processus d'établissement du résultat obtenu108 ». Ainsi, notre travail sera prioritairement abordé sous l'angle de la méthode juridique ou du positivisme juridique (a) et éventuellement sous l'angle de la méthode sociologique (b).

a- La méthode prioritaire : la méthode juridique

À la vérité, la méthode juridique ou positivisme juridique appelle à la conjugaison concomitante de la dogmatique et la casuistique. La première convoquée, c'est-à-dire, la dogmatique juridique ou la méthode exégétique est « un exercice d'exploitation des fonds et des tréfonds de la pensée dont les moindres nuances doivent être busquées et explicitées109 ». Cette méthode consiste à interpréter les dispositions pertinentes des instruments normatifs c'est-à-dire, Constitution, codes, lois, actes règlementaires régissant de manière générale le cadre règlementaire de la décentralisation au Cameroun et en particulier le contrôle de l'exécution du budget des CTD. C'est dans cette logique que Marie-Anne COHENDET soutient à propos de la dogmatique juridique qu' « il s'agit du domaine de la science du droit consacré à l'interprétation et à la systématisation des normes juridiques. Elle consiste pour l'essentiel dans la discipline, l'interprétation et la tentative de compléter les règles de droit en comblant des carences de la législation110 ».

Dans le même sens, Jean-Louis BERGEL affirme que : « la recherche juridique est effectivement une recherche scientifique et se caractérise par l'examen des phénomènes

106 SALMON (Jean), Le droit international à l'épreuve au tournant du XXIe siècle, Cours Euro-méditerranéens, Bancaja de droit international, Valencia, Vol. VI, 2002, pp. 35 - 363, p. 53.

107 KAMTO (Maurice), Pouvoir et droit en Afrique noire francophone : Essai sur le fondement du constitutionnalisme francophone, Paris, éd. LGDJ, 1987, p. 47.

108 GRAWITZ (Madeleine), Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz (11e éd.), 2000, p. 71.

109 KAMTO (Maurice), TCHEUWA (Jean-Claude), Manuel de méthodologie et exercices corrigés de droit international, éd. PUCAC, 2010, p. 85.

110 COHENDET (Marie - Anne), Méthodes de travail : droit public, Paris, Montchrestien (3e éd.), 1998, p. 209.

28

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

sociaux, la doctrine, les textes et la jurisprudence111 ». A travers la casuistique, il sera question d'observer et de discuter les règles et solutions jurisprudentielles régissant le contrôle de l'exécution du budget consacrées par le juge financier Camerounais, saisi d'une question relative aux opérations financières des CTD. La méthode sociologique, bien qu'accessoire, sera d'une importance cruciale dans le cadre de notre étude.

b- La méthode complémentaire : la méthode sociologique

Accessoirement à la méthode juridique, la méthode sociologique ou positivisme sociologique est utilisée car comme le dit Michel VIRALLY, « nul ne saurait contester, en effet, que le contenu du droit, son niveau de développement technique, la façon dont il s'applique dépendent directement de celui auquel est parvenue la société qu'il ordonne du point de vue économique, culturel, éthique, religieux... »112. En effet, la science du droit ne se limite pas à l'analyse exégétique ou logico-conceptuelle des normes juridiques, elle intègre selon elle, les aspects sociologiques qui permettent de sortir du formalisme113. Dans le cadre de notre travail, elle permet de scruter concrètement des influences de l'environnement sur le comportement des acteurs de contrôle, mais également sur le comportement des acteurs d'exécution de la dépense publique locale.

Une fois la méthode d'analyse mise en oeuvre, notre sujet sera davantage structuré autour de deux techniques de recherches à savoir : la recherche documentaire et la recherche numérique. S'agissant de la recherche documentaire, elle consiste à consulter différents ouvrages et autres publications de la doctrine qui traitent d'une manière générale le régime financier de l'État et d'une manière particulière le régime financier des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun afin de parvenir à des résultats envisagés. La recherche numérique quant à elle, sera pour nous, un complément à la recherche documentaire à travers l'actualisation des données et de nouvelles informations nécessaires relatives au contrôle de l'exécution du budget des CTD. C'est à la lumière de cette approche méthodologique que l'on étudiera l'efficacité du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun. Compte tenu de la question et de l'hypothèse de recherche, l'étude du contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisé sera structurée autour de deux grands axes.

111 BERGEL (Jean - Louis), Méthodes de droit et théorie générale du droit, Dalloz, (2e éd.), p. 35.

112 VIRALLY (Michel), Le phénomène juridique, LGDJ, 1966, p. 37.

113 VIRALLY (Michel), Le phénomène juridique, op.cit.

29

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

III- LES AXES

Eu égard à la démarche méthodologique adoptée, il apparaît que le contrôle de l'exécution du budget des CTD est formellement structuré (Première partie), et matériellement aménagé (Seconde partie).

30

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

PREMIÈRE PARTIE : UN CONTRÔLE
FORMELLEMENT STRUCTURÉ

31

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun est un processus formellement structuré, essentiel pour assurer la transparence et la responsabilité dans la gestion des finances publiques locales. Ce contrôle commence dès l'élaboration du budget, où les prévisions de recettes et de dépenses sont établies selon les besoins et les priorités des collectivités territoriales. Une fois le budget approuvé par les autorités compétentes, le contrôleur financier veille à son exécution en respectant strictement les lignes budgétaires définies. Il s'assure que les dépenses engagées correspondent aux crédits votés et que les recettes prévues sont effectivement recouvrées.

Pendant l'exécution du budget, le contrôleur financier exerce une surveillance continue pour garantir que les fonds publics sont utilisés de manière efficace et conformément aux objectifs fixés. Cela inclut la vérification des engagements de dépenses, l'examen des pièces justificatives et l'autorisation des paiements. Le contrôleur financier s'assure que toute ces opérations financières respectent les procédures règlementaires et les principes de la comptabilité publique. Ce suivi rigoureux permet de prévenir les abus, les fraudes et les erreurs dans l'utilisation des fonds publics.

Le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun est encadré par une législation spécifique qui définit les rôles et les responsabilités des différents acteurs impliqués. La loi de finances et les textes règlementaires relatifs aux finances publiques locales fixent les procédures et les normes à respecter.

À ce titre, ce mécanisme est formellement structuré en ce qu'il repose, non seulement sur un cadre institutionnel non juridictionnel opérationnel (Chapitre I), mais aussi et surtout, sur un cadre institutionnel juridictionnel inachevé (Chapitre II).

32

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CHAPITRE I : UN CADRE INSTITUTIONNEL
NON JURIDICTIONNEL OPÉRATIONNEL

Le cadre institutionnel non juridictionnel du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun est opérationnel grâce à une structuration claire des responsabilités et des procédures, impliquant des organes internes et des organes externes des collectivités territoriales. Les organes internes des CTD incluent principalement les services de contrôle financier interne et les conseils municipaux et régionaux. Les services de contrôle financier interne, souvent intégrés aux directions financières des collectivités territoriales, jouent un rôle crucial en surveillant quotidiennement les opérations budgétaires et comptables.

Les conseils municipaux et régionaux, en tant qu'instances de délibération, examinent les rapports financiers périodiques pour suivre l'exécution du budget et adopter des mesures correctives nécessaires.

Dans ce cadre institutionnel non juridictionnel, le contrôle de l'exécution du budget des CTD est un contrôle prioritairement confié à des organes internes aux CTD (Section I), et accessoirement confié à des organes externes (Section II) aux CTD.

SECTION I : UN CONTROLE PRIORITAIREMENT CONFIE AUX ORGANES
EXTERNES AUX CTD

Les audits internes réalisés par les organes internes des CTD constituent une couche de vérification. Ces audits évaluent l'efficacité des systèmes de contrôle interne, la conformité des opérations financières, et identifient les irrégularités ou inefficacités potentielles. Les conclusions et recommandations de ces audits sont cruciales pour améliorer les pratiques de gestion financière et renforcer la transparence et la responsabilité au sein des CTD. Ces mécanismes de contrôle interne, intégrés et coordonnés, assurent une gestion budgétaire saine et conforme aux standards de bonne gouvernance.

Paragraphe I : Le contrôle diligenté par les agents de contrôle de l'exécution du budget

des CTD

Le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun peut être diligenté par deux agents publics dont le statut et les missions demeurent séparés. Il s'agit principalement

33

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

de l'ordonnateur (A) et du receveur municipal ou régional communément appelé comptable public (B).

A- L'ordonnateur

Depuis longtemps, et contrairement au Cameroun, la notion d'ordonnateur constitue un réel objet d'étude pour l'ensemble de la doctrine française114. Toutefois, la doctrine s'accorde pour reconnaître que cette notion demeure difficile à appréhender dans sa globalité du fait de son hétérogénéité115. C'est pourquoi, il est intéressant de l'envisager comme un concept, dont le contenu devrait être identifié et appréhendé sous un double angle, statutaire, c'est-à-dire, qui privilégie l'étude de ses responsabilités, et fonctionnel, qui s'attache à définir ses compétences personnelles116.

Du point de vue de la définition, l'ordonnateur est généralement appréhendé comme « une catégorie d'agent public de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics seuls compétents pour prescrire l'exécution des recettes et des dépenses publiques »117. Il s'agit d'une transposition du texte communautaire, qui aux termes de l'article 8 de la directive CEMAC no 02/11-UEAC-190-CM-22 relative au règlement général de la comptabilité public, définit l'ordonnateur comme étant « toute personne ayant qualité au nom de l'État pour prescrire l'exécution des recettes et des dépenses inscrites au budget de l'État ». Le décret no 2020/375 du 7 juillet 2020 portant règlement général de la comptabilité publique reprend la définition du législateur communautaire en définissant l'ordonnateur comme « toute personne ayant qualité pour prescrire les recettes et les dépenses publiques inscrites au budget de l'État, ou des entités concernées »118. Ces définitions corroborent celle que propose le Vocabulaire juridique, aux termes duquel l'ordonnateur « est une autorité administrative chargée de prescrire l'exécution des recettes et des dépenses des personnes publiques. Il constate les droits des organismes publics, liquide les recettes, engage et liquide

114 THÉBAULT (Stéphane), L'ordonnateur en droit public financier, LGDJ, 2007, p. 408.

115 Ibid.

116 KAMDOM DJEYA (Gabriel Yves), La responsabilité des ordonnateurs dans le système financier public contemporain : étude comparée des droits camerounais et français, Thèse de doctorat en Droit Public, Université de Lille & Université de Yaoundé II, 2019, p. 26.

117 Voir, Art. 64 (1) de la loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 portant régime financier de l'État et des autres entités publiques. Cette loi abroge la loi no 2007/006 du 26 décembre 2007 portant régime financier de l'État qui constitue la pierre angulaire de la mise en place de la budgétisation par programme axée sur la performance.

118 Voir, Art. 4, Al. 1 du décret no 2020/375 du 7 juillet 2020 portant règlement général de la comptabilité publique.

34

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

les dépenses. C'est celui qui donne les ordres aux comptables publics »119.

Au demeurant, la notion d'ordonnateur renvoie aux autorités centrales, déconcentrées et décentralisées bénéficiant d'un statut particulier leur attribuant des pouvoirs de décisions en matière d'exécution du budget120. En clair, les ordonnateurs sont aussi bien des responsables politiques que des agents publics se trouvant, du fait des fonctions qu'ils exercent, dans la situation de prendre des décisions ayant une incidence financière.

Dès lors, s'appesantir sur le nouveau statut de l'ordonnateur après la réforme introduite par le nouveau régime financier de l'État de 2018 s'impose.

Traditionnellement, l'ordonnateur est chargé de l'exécution des recettes et des dépenses inscrites au budget de l'État ou des entités concernées. À ce titre, en matière de recettes, il constate les droits de l'État et des organismes publics, liquide et émet les titres de créances correspondants. Et, en matière de dépenses, il juge de l'opportunité conformément aux objectifs visés par la loi de finances et aux budgets votés, les engage, les liquide et les ordonnance dans les limites des crédits disponibles. Mais avec le nouveau régime financier de l'État, l'ordonnateur s'est vu attribuer une nouvelle fonction. Il s'agit de la fonction managériale qui confère à ce dernier le statut de manager public. À cet effet, il convient de ressortir le contenu de cette nouvelle attribution afin d'indiquer en quoi consiste la fonction managériale de l'ordonnateur, ainsi que les implications de cette fonction sur le statut de l'ordonnateur. Cette fonction découle de la mise en oeuvre du budget programme. Ainsi, l'ordonnateur est chargé de :

? Définir les objectifs et les priorités sur lesquels se fondent les programmes indicatifs ; ? Sélectionner et adopter les programmes indicatifs ;

? Préparer, négocier et conclure les marchés ;

? La coordination, la programmation et le suivi de la mise en oeuvre des programmes ; ? Assurer une exécution adéquate, rapide et efficace des programmes121.

En clair, la fonction managériale exige des ordonnateurs les qualités de managers publics. Car, il est non seulement tenu de fixer les objectifs généraux, mais surtout de mobiliser les moyens pour atteindre les objectifs initialement fixés et les résultats escomptés. Il va sans dire

119 GUINCHARD (Serge), DEBARD (Thierry), Lexique des termes juridiques, Paris Dalloz (25e éd.), 2017 - 2018, p. 1449.

120 LAKENE DONFACK (Charles - Étienne), Finances publiques camerounaises, op.cit., p. 216.

121 NGUIMFACK VOUFO (Théophile), BANA (Lucy), « La rénovation du statut de l'ordonnateur dans la loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 portant régime financier de l'État et des autres entités publiques », IMJST, Vol. 6, no 9, septembre 2021, pp. 4082 - 4091, p. 4084.

35

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

qu'avec cette fonction managériale, l'ordonnateur associera à sa fonction administrative, celle de bonne exécution des programmes122 et de production du rapport annuel de performance123.

Dans ce contexte, il a semblé utile pour des besoins opérationnels, que l'ordonnateur puisse désigner un responsable pour la coordination des actions, des activités et des tâches de chaque programme, à savoir le responsable de programme. À en croire le Professeur Gérard Martin PEKASSA NDAM, ce dernier est « une personne physique à qui incombe l'obligation légale de faire bon usage des crédits publics qui lui sont affectés dans le cadre de l'accomplissement d'une mission de service public »124. Sa mission principale réside dans pilotage125 et la coordination126 de l'ensemble du programme et trouve son fondement dans le nouveau régime financier de l'État qui dispose : « sur la base des objectifs généraux fixés par le ministre, le responsable de programme détermine les objectifs spécifiques, affecte les moyens et contrôle les résultats des services chargés, sous sa responsabilité de la mise en oeuvre du programme. Il assure du respect des dispositifs de contrôle interne et de contrôle de gestion »127. Il faut pourtant rappeler que le responsable de programme est d'office désigné ordonnateur délégué. En ce sens, il reçoit une délégation de compétence limitée que l'on ne saurait classer dans la catégorie des délégations de pouvoirs qui dessaisissent le déléguant.

L'ordonnateur n'est donc pas le seul agent à pouvoir effectuer le contrôle du budget local, le comptable public est également concerné par ce dernier, puisque c'est lui qui détient le monopole du maniement des fonds publics au sein de la collectivité locale.

B- Le comptable public

Le comptable public ou le receveur municipal ou régional, peut être appréhendé comme un « agent nommé par le ministre des finances et placé sous son autorité dont la mission est d'assurer le maniement (perception, versement) des fonds des organismes publics, de tenir la comptabilité des opérations qu'ils effectuent et de conserver les pièces justificatives de ces opérations (...) »128. À la différence de l'ordonnateur qui, dans le cadre de la décentralisation financière est, une personnalité élue (cas du maire ou du président du

122 Voir l'article 51 (1) de la loi no 2007/006 du 26 décembre 2007 portant régime financier de l'État.

123 Voir le manuel de pilotage et d'exécution du budget programme, janvier 2013, p. 13.

124 PEKASSA NDAM (Gérard Martin), « La dialectique du responsable de programme en finances publiques camerounaises : recherche sur les nouveau acteurs budgétaires », in MÉDÉ Nicaise. (dir.), Les nouveaux chantiers des finances publiques en Afrique, Mélange en l'honneur de Michel BOUVIER, Dakar, L'Harmattan, 2029, p. 308

125 Voir, Manuel de pilotage et d'exécution du budget programme, op.cit., p. 23.

126 Ibid.

127 Voir, Art. 69 de la loi de 2018 précitée.

128 CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, op.cit., pp. 192-193.

36

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Conseil régional), le comptable quant à lui, est généralement un agent public, nommé, désigné ou préposé auprès d'une CTD pour assurer la vérification des dépenses et le suivi des recettes.

Les comptables publics placés auprès des Collectivités Territoriales Décentralisées sont dénommés : Receveur Régional, lorsqu'ils sont placés auprès des Régions ; Receveur Municipal, lorsqu'ils sont placés auprès de la Commune, de la Communauté Urbaine ou de la Commune d'Arrondissement129. Ceux-ci sont des agents publics régulièrement préposés aux comptes et habilités à effectuer, à titre exclusif au nom de la Collectivité, des opérations de recouvrement des recettes et de règlement des dépenses ou de maniement de titres, soit au moyen des fonds et des valeurs dont ils ont la garde, soit par virement interne d'écriture, soit par l'intermédiaire d'autres comptables130. Le comptable public, au moment de la phase comptable d'exécution du budget, exécute toutes les opérations de recettes et de dépenses du budget de la Collectivité, ainsi que toutes les opérations de la trésorerie et de financement.

Avant de procéder aux opérations de d'encaissement et de décaissement, le receveur régional ou le receveur municipal effectue un contrôle de régularité des opérations budgétaires de la collectivité. À ce titre, le comptable public, qu'il s'agisse du receveur régional ou du receveur municipal, a une double fonction : la fonction de caissier et la fonction de payeur. En tant que caissier, le comptable public a le monopole de la manutention des derniers publics de la collectivité, soit directement, soit par l'intermédiaire d'agents sous son contrôle et de sa responsabilité.

En tant que payeur, le comptable public a la charge de faire les vérifications sur la régularité des opérations décidées par l'ordonnateur. Cela signifie qu'il revient au comptable public de vérifier que l'ensemble des pièces qui lui ont été fournies au regard de la nomenclature, soient complètes, précises et cohérentes au regard de la catégorie de la dépense, de sa nature et de son objet131. En cas de pièces manquantes ou d'irrégularité flagrante, telle l'absence de contrat obligatoire au regard du droit des marchés publics, le comptable devra suspendre le paiement et interpeller l'ordonnateur sur l'insuffisance des pièces sans toutefois lui imposer une certaine marche à suivre132. Autrement dit, le comptable

129 Art. 2 du décret no 2023/475 du 7 novembre 2023 précisant certaines attributions et fixant les avantages des

avantages des comptables publics placés auprès des Collectivités Territoriales Décentralisées.

130 Op.cit., Art. 5, al. 1.

131 « Le contrôle de légalité, limite de la compétence du comptable public », Disponible en ligne sur

https://www.atd13.fr/le-controle-de-legalite-limite-de-la-competence-du-comptable-public, Consulté lundi, 20 mai 2024 à 16h31 min.

132 Ibid.

37

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

public doit s'abstenir de payer une dépense mandatée sur des crédits irrégulièrement ouverts, une dépense mandatée sur des crédits insuffisants, en cas de mauvaise imputation budgétaire.

Cette solution permet au comptable public d'une part de se protéger tout en demeurant dans les limites de son contrôle, et d'autre part de laisser à l'ordonnateur assumer seul la responsabilité de l'absence d'éventuelles pièces justifiant le paiement d'une dépense.

Toutefois, l'ordonnateur peut passer outre le refus du comptable et lui adresser un ordre de réquisition, auquel il doit se conformer. Dans ce cas, il engage sa propre responsabilité qui va se substituer à celle du comptable public.

À la différence de l'ordonnateur qui, conformément à l'esprit du principe de la séparation de l'ordonnateur et du comptable est juge de l'opportunité, le comptable public quant à lui est juge de la régularité. Tel est l'esprit de l'article 16 alinéa 1 du décret no 2023/475 du 7 novembre 2023 qui dispose que : « le comptable public est implicitement considéré quitte de sa gestion si l'arrêté définitif du compte constate la régularité des opérations exécutées »133. À ce titre, le comptable public vérifie les différents éléments financiers des titres de paiement (pour la dépense). Ces vérifications portent sur la qualité de l'ordonnateur, l'imputation budgétaire de la dépense, la disponibilité budgétaire des crédits, l'exactitude des calculs de liquidation de la dépense, la justification du « service fait », le caractère libératoire du règlement et la prescription quadriennale.

Le receveur municipal ou régional a également pour mission de contrôle de surveiller le flux de la trésorerie. Dans le cas d'espèce, surveiller de près les entrées de la trésorerie provenant des différentes sources de recettes locales, telles que les impôts, les taxes, les frais de services, etc., ainsi que les sorties de trésorerie pour les dépenses prévues dans le budget. Le comptable public doit également élaborer les prévisions de la trésorerie régulières pour anticiper les besoins de trésorerie à court et à moyen terme, et identifier les périodes de surplus ou de déficit de la trésorerie. Le receveur municipal ou régional doit comparer régulièrement les flux de trésorerie réels avec les prévisions et les budgets pour identifier les écarts et les raisons sous-jacentes, et ajuster les plans de gestion de trésorerie en conséquence.

Hormis le contrôle effectué par l'ordonnateur et le comptable public en tant qu'agents de l'exécution du budget local, celui-ci s'opère également par les organes délibérants.

133 Art. 16, al. 1 du décret no 2023/475 du 7 novembre 2023 précisant certaines attributions et fixant les avantages des avantages des comptables publics placés auprès des Collectivités Territoriales Décentralisées.

38

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Paragraphe II : Le contrôle opéré par les organes délibérants

Le Cameroun, comme de nombreux pays, a mis en place un système de décentralisation pour rapprocher la gestion publique des citoyens et améliorer l'efficacité administrative. Le contrôle par l'organe délibérant est une innovation de la loi de 2019134. Ce contrôle porte sur l'exécution du budget ainsi que sur les programmes et projets y afférents135.

Ce nouveau type de contrôle peut apparaitre comme un moyen pour les collectivités locales de prendre en charge leurs affaires locales et s'autogérer, mais ne permet pas de garantir une spécificité pour les collectivités à statut spécial, en raison de son application à toutes les CTD136. Les CTD au Cameroun sont principalement les régions et les communes. Les organes délibérants, pour assurer le contrôle de l'exécution du budget des CTD sont : soit désignés directement par le peuple (A), soit indirectement désignés par le peuple (B).

A- Les organes délibérants directement désignés par le peuple

Au Cameroun, les CTD comprennent les régions et les communes. Les organes délibérants de ces collectivités sont le Conseil Municipal et l'Exécutif Communal137 pour ce qui est des Communes, et le Conseil Régional et l'Exécutif Régional pour ce qui est des Régions.

Cependant, les organes délibérants directement désignés par le peuple sont les Conseillers Municipaux, élus à un mandat de cinq (5) ans138 renouvelables139. Cet organe délibérant (Conseil Municipal) exerce des missions de contrôle dans le cadre du budget communal. Tel est l'objet de l'article 104 de la loi no 2009/011 du 11 juillet 2009, qui dispose en effet que « lors de l'examen du budget ou du compte administratif, l'organe délibérant exerce un contrôle sur l'exécution du budget, ainsi que les programmes y afférents140 ».

L'organes délibérant exerce un contrôle a priori, dans la mesure où, il a le pouvoir d'approuver le budget des CTD. Avant son adoption, le budget est examiné et débattu au sein du conseil. Cette étape permet aux conseillers de contrôler les dépenses prévues et de

134 La loi no 2019/024 du 24 décembre 2019 portant CGCTD.

135 Ibid., art. 482.

136 YAMTCHEU KAYE (Estelle Audrey), « Le régime financier des collectivités territoriales décentralisées à statut spécial au Cameroun », RAFP, no 2 (10), pp. 1 - 22, p. 14.

137 L'article 164 (1) de la no 2019/024 du 24 décembre 2019 portant CGCTD dispose à cet effet que : « Les organes de la Commune sont : le Conseil Municipal et l'Exécutif Communal ».

138 Telle est la teneur de l'article 169 (1) de la loi no 2012/001 du 19 avril 2012 portant code électoral modifiée et complétée par la loi no 2012/017 du 21 décembre 2012, qui dispose que : « Les conseillers municipaux sont élus pour cinq (05) ans au suffrage universel, direct et secret ».

139 Ibid., Art. 169 (2), qui dispose qu' : « Ils sont rééligibles ».

140 Art. 104 de la loi no 2009/011 du 10 juillet 2009 portant régime financier des collectivités territoriales décentralisées.

39

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

s'assurer de leur cohérence avec les priorités et les besoins de la population locale. Les organes délibérants sont chargés de suivre l'exécution du budget des CTD tout au long de l'année. Ils examinent régulièrement les rapports financiers et les comptes rendus d'exécution budgétaire pour évaluer la réalisation des objectifs fixés et pour détecter d'éventuelles irrégularités ou anomalies. Les organes délibérants exercent un contrôle sur les dépenses engagées par l'exécutif local. Ils veillent à ce que les dépenses soient effectuées conformément aux priorités établies dans le budget approuvé et qu'elles respectent les règles et les procédures en vigueur. Les organes délibérants peuvent décider de réaliser des audits ou des évaluations spécifiques sur certains aspects de la gestion financière de la CTD. L'exigence de Ces audits permettent de vérifier la conformité aux normes comptables et aux règlements en vigueur, ainsi que d'identifier les domaines nécessitant des améliorations.

L'article 105 de la loi no 2009/011 du 10 juillet 2009 ajoute en effet que « l'organe délibérant peut constituer des commissions ad hoc sur des sujet intéressant la gestion financière de la collectivité territoriale, les rapports de cette commission, sont soumis à l'appréciation de l'organe délibérant141 ».

De ce qui précède, l'on peut retenir que les organes délibérants directement désignés par le peuple jouent un rôle majeur dans la prise de décisions ayant une incidence budgétaire, mais ceux désignés indirectement par le peuple exercent également des missions budgétaires.

B - Les organes délibérants indirectement désignés par le peuple

Les organes délibérants indirectement désignés par le peuple sont le Président de l'Exécutif Communal pour ce qui est des Communes, et les Conseillers Régionaux et le Président du Conseil Régional pour ce qui est des régions.

En ce qui concerne le Président de l'Exécutif Municipal, il est placé à la tête de l'exécutif communal. Il s'agit généralement le maire. Ce dernier est élu au scrutin uninominal majoritaire à deux (2) tours. L'élection est acquise au premier tour à la majorité des suffrages exprimés142. Pour ce qui est des Conseillers Régionaux, il en existe quatre - vingt - dix (90), élus pour un mandat de cinq (05) ans143. Le Conseil Régional, en tant qu'organe délibérant des régions comprend les délégués des départements élus au suffrage universel

141 Art. 105 de la loi no 2009/011 du 10 juillet 2009 portant régime financier des collectivités territoriales décentralisées.

142 Voir Art. 200 (1) de la loi portant CGCTD.

143 Art. 275 (2) de la loi portant CGCTD.

40

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

indirect et les représentants du commandement traditionnel élus par leurs pairs144. Elles s'assurent que toutes les opérations financières respectent les lois et règlements en vigueur, ainsi que les directives budgétaires adoptées par l'organe délibérant. Cela inclut la vérification des procédures de passation des marchés publics, la conformité des dépenses aux autorisations budgétaires, et la régularité des recettes. Les commissions évaluent également l'efficacité et l'efficience de l'utilisation des fonds publics, en analysant si les objectifs budgétaires sont atteints et si les ressources sont utilisées de manière optimale.

En cas de détection d'irrégularités ou de dysfonctionnements, ces organes proposent des mesures correctives à l'exécutif local et peuvent recommander des ajustements budgétaires. Elles jouent un rôle consultatif en formulant des avis et des recommandations pour améliorer la gestion budgétaire.

Le contrôle concomitant opéré par les commissions ad hoc de l'organe délibérant, permet de détecter rapidement des anomalies. À cet effet, grâce à un suivi continu, les commissions peuvent identifier et corriger les écarts budgétaires avant qu'ils ne deviennent des problèmes majeurs. Ces commissions peuvent également améliorer la gouvernance, en assurant une gestion rigoureuse et responsable des ressources publiques, ce contrôle contribue à une meilleure gouvernance locale et à la confiance des citoyens dans les institutions publiques.

En somme, les commissions ad hoc de l'organe délibérant jouent un rôle indispensable dans le contrôle concomitant de l'exécution budgétaire, garantissant une gestion financière saine, transparente et conforme aux intérêts de la collectivité.

Puisqu'on parle d'un cadre institutionnel non juridictionnel opérationnel, le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun va au-delà des organes internes des collectivités territoriales décentralisées. Ce contrôle est également effectué par les organes externes des collectivités territoriales décentralisées.

144 Ibid., Art. 275 (3).

41

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

SECTION II : UN CONTROLE ACCESSOIREMENT CONFIE AUX ORGANES
EXTERNES AUX CTD

Outre le contrôle par les organes internes des CTD qui permet de prévenir les irrégularités, les fraudes et les inefficacités dans l'utilisation des fonds publics au niveau local, le contrôle effectué par les organes externes des CTD est d'une importance capitale pour renforcer le cadre institutionnel non juridictionnel. Ce contrôle inclut d'une part, le contrôle diligenté par les organes dépendant de la Présidence (Paragraphe I) et d'autre part, le contrôle effectué par le contrôleur financier (Paragraphe II) en tant qu'organe dépendant du MINFI.

Paragraphe I : Le contrôle diligenté par les organes dépendant de la Présidence de la

République

En matière de contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun, les organes dépendant de la présidence jouent un rôle important dans la supervision et la régulation des activités financières desdites CTD.

Leur action vise à garantir une gestion financière transparente, efficace et responsable au niveau local, contribuant ainsi à renforcer la bonne gouvernance et la confiance des citoyens au sein des CTD.

En tant qu'organes dépendant de la Présidence, le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun est amorcé par les services du ministère délégué à la Présidence de la République chargé du Conseil Supérieur de l'État (CONSUPE) (A) et poursuivi par le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière (CDBF) (B).

A- Le contrôle amorcé par les services du ministère délégué à la Présidence de la
République chargé du contrôle supérieur de l'État

Institution Supérieure de Contrôle des Finances publiques, Le CONSUPE est l'auditeur gouvernemental externe145, car placé en dehors du gouvernement. Il relève de l'autorité Président de la République de qui il reçoit les instructions. Il rend compte à travers le Secrétariat Général de la Présidence de la République. Ses agents sont en théorie indépendants vis-à-vis de l'organe audité, mais pas de leur hiérarchie. Réorganisé par décret

145 L'article 2 (1) du décret no 2013/287 du 04 septembre 2013 portant organisation des services du Contrôle supérieur de l'État dispose à cet effet que : « Les services du Contrôle supérieur de l'État constituent l'institution supérieure de contrôle des finances publiques (ISC) du Cameroun. Ils sont chargés de l'audit externe (...) ».

42

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

présidentiel no 2013/287 du 04 septembre 2013, il joue un rôle central dans la protection de la fortune publique146. Il audite les CTD, les établissements, entreprises publiques et parapubliques, les établissements et associations confessionnels ou laïcs bénéficiant des concours financiers, avals ou garanties de l'État, les autres personnes morales publiques sur le plan administratif, financier et stratégique147. Son champ d'action va au-delà de la barrière des structures étatiques ou subventionnées par l'État. Il peut sur instruction du Président de la République, effectuer des contrôles spécifiques auprès des organismes privés d'intérêt public présentant un caractère stratégique pour le Cameroun148.

Ses missions consistent à l'appréciation de la qualité de la gestion des services et organismes contrôlés. Il constate les irrégularités, les entorses à la règlementation, la mesure et l'appréciation de l'efficacité, de l'efficience et de l'économie de la gestion. Il statue aussi sur la sincérité et la fidélité des états financiers produits par la structure auditée. Il prend connaissance de l'organe à auditer, détermine ses besoins en information, recense les actes administratifs de portée générale, les textes, arrêtés, circulaires et autres actes administratifs censés encadrer les comportements des agents et mis au point dans l'organe à auditer conformément à la loi.

En ce qui concerne la gestion des crédits publics, il détermine les manquements énumérés par la loi du 5 décembre 1974, modifiée par celle du 8 juillet 1978. On distingue les irrégularités mentionnées aux articles 3, 4 et 5 pour ceux relatifs à la gestion de l'État et des collectivités publiques et celles citées aux articles 6 et 7 relatifs à la gestion des entreprises de l'État.

Est considérée comme irrégularité au sens de la présente loi, toute faute commise préjudiciable à la puissance publique, ne ressortissant pas nécessairement de la compétence des tribunaux répressifs ou de commerce. Le CONSUPE interagit aussi en amont de la gestion des structures auditées en vue du renforcement des capacités des managers et du

146 BAKITI BA MBOG BINYET (Joseph Olivier), « Effet de l'action du contrôle supérieur de l'État sur l'offre des services publics au Cameroun », ASJ, no 8, Vol. 3, 2021, pp. 157 - 186, p. 161.

147 Ibid.

148 Telle est la teneur de l'article 2 (2) du décret no 2013/287 du 04 septembre 2013 portant organisation des services du Contrôle supérieur de l'État qui dispose que : « Les services du Contrôle supérieur de l'État peuvent, sur instruction du Président de la République, effectuer des contrôles spécifiques auprès des organismes privés poursuivant un objet ayant un lien avec le service public, et présentant un caractère stratégique pour l'économie ou la défense nationale ».

43

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

personnel par des actions de formation continue et de sensibilisation149. Le Conseil Supérieur de l'État (CONSUPE) au Cameroun, joue un rôle fondamental dans l'audit et le contrôle de l'exécution du budget des CTD. En tant qu'organe externe de contrôle, le CONSUPE assure la vérification de la conformité, de la régularité et de l'efficience des opérations financières des CTD150.

Le CONSUPE, créé pour garantir la bonne gouvernance financière, a pour mandat d'effectuer des audits et des contrôles sur les finances publiques au niveau national et local. Ses compétences s'étendent à : l'audit des comptes et des opérations financières des CTD, la vérification de la conformité des dépenses publiques par rapport aux lois et règlements en vigueur, l'évaluation de l'efficacité et de l'efficience dans l'utilisation des ressources publiques et la détection et la prévention des fraudes et des irrégularités financières.

Tout comme le CONSUPE, le CDBF, en tant qu'organe dépendant de la présidence exerce le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun.

B- Le contrôle poursuivi par le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière

Au Cameroun, le contrôle de l'exécution du budget des CTD est également assuré par le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière. Ce conseil est chargé de veiller à la régularité des opérations financières et comptables des CTD, en garantissant notamment le respect des règles budgétaires et financières établies.

Le CDBF peut être saisi pour examiner des cas de non-conformité aux règles budgétaires, de mauvaise gestion financière ou d'autres infractions relevant de sa compétence. Il peut alors mener des enquêtes, prendre des mesures correctives et, recommander des sanctions en cas de manquements avérés151. En collaboration avec d'autres organes, le CDBF

149 BAKITI BA MBOG BINYET (Joseph Olivier), « Effet de l'action du contrôle supérieur de l'État sur l'offre des services publics au Cameroun », op.cit., p. 162.

150 Tel est l'objet de l'article 2 (3) du décret no 2013/287 du 04 septembre 2013 portant organisation des services

du Contrôle supérieur de l'État qui dispose que : « Dans l'exercice de leurs attributions, les services du Contrôle

supérieur de l'État effectuent :

- Un contrôle de conformité et de régularité ;

- Un contrôle financier ;

- Un contrôle de performance ;

- Un contrôle de l'environnement ;

- Un contrôle des systèmes d'information. ».

151 Telle est l'esprit de l'article 1er (1) du décret no 97/049 du 5 mars 1997 portant organisation et fonctionnement du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière qui dispose que : « Le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière est chargé de la sanction des responsabilités des ordonnateurs et gestionnaires des crédits publics et entreprises publiques. À ce titre, il sanctionne les irrégularités et fautes de gestion commises par :

44

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

contribue à renforcer le dispositif global de contrôle administratif visant à assurer une gestion transparente, légale et efficace des ressources publiques par les CTD au Cameroun. Son action est essentielle pour promouvoir la responsabilité et la bonne gouvernance au niveau local.

Le CDBF peut exercer des actions conjoncturelles avec les juridictions répressives au Cameroun dans le cadre du contrôle de l'exécution du budget des CTD. Cette collaboration vise à garantir que les infractions détectées lors des enquêtes menées par le CDBF soient traitées de manière appropriée sur le plan judiciaire152.

Lorsque le CDBF identifie des cas de mauvaise gestion financière, de détournement de derniers publics ou d'autres infractions graves, il peut transmettre ces dossiers aux juridictions compétentes pour enquête et poursuites judiciaires. Les preuves recueillies par le CDBF peuvent ainsi servir de base à des actions judiciaires visant à sanctionner les responsables des actes répréhensibles.

Cette action conjoncturelle entre le CDBF et les juridictions répressives renforce l'efficacité du contrôle de l'exécution du budget des CTD, assurant que les cas de violation de la loi soient traités de manière rigoureuse et que les acteurs des infractions soient tenus responsables de leurs actes. La conjugaison des actions dans la collaboration entre le CDBF et les juridictions répressives contribue à promouvoir la transparence, la responsabilité et la bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques au niveau local.

Hormis les organes dépendant de la présidence, le contrôle de l'exécution du budget des CTD est également assuré par l'organe dépendant du ministère des finances à savoir : le contrôleur financier.

- Les ordonnateurs et gestionnaires de crédits de l'État, les collectivités territoriales décentralisées, des

entreprises et organismes publics ou parapublics et toute autre personne agissant en cette qualité ; - Les commissaires aux comptes, censeurs et commissaires du Gouvernement auprès des entreprises

publiques et toute autre personne agissant en cette qualité. ».

152 Le CDBF peut exercer une action conjoncturelle avec les juridictions répressives. C'est d'ailleurs le sens de l'article 18 (3) du décret no 97/049 du 5 mars 1997 portant organisation et fonctionnement du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière qui dispose que : « Si l'instruction fait apparaître des faits susceptibles d'être qualifiés de crimes ou délits, le Président du Conseil transmet le dossier à l'autorité judiciaire compétente. Cette transmission vaut plainte au nom de l'État, de la collectivité publique ou de l'entreprise concernée contre le mis en cause ».

45

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Paragraphe II : Le contrôle effectué par le contrôleur financier

Le contrôleur financier est nommé par le Ministre des finances auprès des ordonnateurs. Il est chargé d'effectuer un contrôle a priori sur la liasse de chaque opération financière de recettes ou de dépenses pour s'assurer de la conformité au budget et à la règlementation en vigueur.

Il effectue donc une vérification sur la régularité de l'opération financière. Il vérifie notamment la bonne imputation de la dépense, la disponibilité des crédits, l'évaluation correcte de la dépense, l'existence d'un acte d'engagement préalablement visé. Il contrôle et apure les caisses d'avance et les mises à disposition des fonds. Il a ainsi un rôle d'appui-conseil de l'ordonnateur au sens de la circulaire no 00003672/C/MINFI/SG/DGB/DCOB du 23 mai 2019 précisant les attributions des contrôleurs financiers à la lumière des dispositions de la loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 portant RFEAP.

En effet, il convient d'abord d'analyser le statut du contrôleur financier (A), avant de s'appesantir sur ses missions (B).

A - Le statut du contrôleur financier

Au Cameroun, le contrôleur financier est un agent dans la chaîne d'exécution de la dépense publique. Agent nommé153 par le ministre des finances, son statut lui confère une autorité et une responsabilité spécifiques en matière de supervision des dépenses publiques au niveau local. Il bénéficie généralement d'un statut officiel, souvent défini par des décrets ou des arrêtés ministériels, qui lui confèrent des prérogatives juridiques et administratives pour mener à bien ses missions de contrôle.

C'est une innovation dans la loi no 2018/012 du 11 juillet 2018154 : il a existé des contrôleurs en droit financier camerounais dans le cadre des décrets, mais aucune loi portant droit financier ne faisait mention de leur substance jusqu'à ce dernier texte.

En tant que fonctionnaire de l'État, le contrôleur financier peut bénéficier de certains avantages et de protections liés à son statut, tels que la sécurité de l'emploi, des garanties en

153 Tel est l'esprit de l'article 115 alinéa 1er du décret no 2020/375 du 07 juillet 2020 portant règlement général de la comptabilité publique qui dispose à cet effet que : « un contrôleur financier est nommé auprès des ordonnateurs principaux, ainsi qu'auprès des ordonnateurs secondaires placés à la tête des services déconcentrés ».

154 Loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 portant régime financier de l'État et d'autres entités publiques.

46

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

matière de rémunération et d'avantages sociaux, ainsi que des possibilités de formation et de développement professionnel. Son statut peut également lui conférer une certaine indépendance dans l'exercice de ses fonctions, lui permettant d'opérer de manière impartiale et objective dans ses évaluations et recommandations.

Le statut du contrôleur financier peut en outre inclure des obligations spécifiques en termes de déontologie et d'éthique professionnelle, visant à garantir l'intégrité et la fiabilité de son travail. Ces obligations peuvent inclure des restrictions en matière de conflits d'intérêts, des règles de confidentialité et de discrétion, ainsi que des normes de comportement professionnel. Le contrôleur financier se présente alors comme un conseiller de l'ordonnateur. Toutefois, il exerce ses missions propres.

B - Les missions du contrôleur financier

Partis du cadre général de la gestion des finances publiques, du rôle et des modalités d'intervention du contrôleur financier dans la chaîne PPBS ( Planification - Programmation - Budgétisation - Suivi/Évaluation), de son rôle dans la contractualisation publique, son devoir de maîtrise de la Nomenclature Budgétaire de l'État en passant par des procédures budgétaires et le reporting des activités du CF, les travaux initiés par la Division du Contrôle Budgétaire, de l'Audit et de la Qualité de la dépense ont également porté l'attention du CF sur la place des impôts et taxes dans les procédures budgétaires.

En tant qu'agent désigné par le ministre des finances pour garantir en ses lieux et place, l'orthodoxie dans l'exécution des budgets publics à travers des avis et visas, le contrôleur financier, assure à cet effet, la centralisation des opérations budgétaires des ordonnateurs auprès desquels il est placé, par une bonne tenue des fiches de suivi des engagements et des ordonnancements155. Une action vaste enrobée de règles déontologiques spécifiques avec pour socle des normes internationales et nationales156. Il s'agit des règles déontologiques de l'INTOSAI s'adressant aux contrôleurs du secteur public157. Des règles respectivement édictées par les normes ISSAI 130 et ISSAI 140. D'un autre côté, il s'agit de la loi no 2018/011 du 11 juillet 2018 portant code de transparence et de bonne gouvernance en

130 « Le contrôleur financier : juge de la régularité et acteur essentiel dans la chaîne d'exécution du budget de l'État », Disponible en ligne sur https://www.dgb.cm/le-controleur-financier-juge-de-la-regularite-et-acteur-essentiel-dans-la-chaine-dexecution-du-budget-de-letat, op.cit.

156 Ibid.

132 Idem.

47

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

son article 52 (1) 158. Ainsi, le contrôleur financier a pour mission d'apposer son visa budgétaire159 préalable à l'exécution de toute dépense publique. L'absence de visa du contrôleur financier est un cas de suspension absolue de paiement pour le receveur municipal. Le délai prévu pour l'apposition dudit visa est de 72 heures. Ce principe peut être atténué lorsque ce dernier a adressé une demande d'informations ou de documents complémentaires. Dans ce cas, le délai est suspendu jusqu'à la production des informations et documents sollicités.

Sous peine d'être taxé de fantaisiste, le refus de visa doit être motivé. Il faut noter que si le visa du contrôleur financier ne peut être outrepassé que sur l'autorisation du ministre des finances160 (visa budgétaire préalable, visa de validation, accord pur et simple du visa, visa avec observation, visa de réserve...), son avis quant à lui prend la forme d'une lettre motivée qui ne lie pas l'ordonnateur et n'a aucun effet contraignant dans la gestion quotidienne. Concernant par exemple l'apposition du visa relativement à la question des impôts et taxes locaux dans les procédures budgétaires, il est convenu que les outils de sécurisation des recettes fiscales, la maîtrise des règles fiscales par les acteurs de la chaîne de la dépense représentent un enjeu majeur pour la bonne exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées. Ceci exige la vigilance de la part des contrôleurs financiers dans les procédures de liquidation et de retenues des impôts et taxes sur l'ensemble des actes dont ils sont appelés à contrôler la régularité, ainsi que la conformité. Ainsi, le contrôleur financier exerce un contrôle a priori161 et un contrôle a posteriori162 des opérations budgétaires.

133 L'article 52 alinéa 1er de la loi no 2018/011 du 11 juillet 2018 portant code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques au Cameroun dispose à ce titre que, « Les obligations des agents de l'État sont régies par des règles déontologiques claires et largement connues de tous ».

159 Telle est la teneur de l'article 70 alinéa 2 de la loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 portant régime financier de l'État et des autres entités publiques qui dispose que : « le contrôleur financier est chargé des contrôles a priori par l'apposition d'un visa préalable des opérations budgétaires, les propositions d'acte de dépense qui luis sont transmises par le ministre ou ses ordonnateurs délégués selon les modalités définies par le ministre chargé des finances ».

160 Tel est le sens de l'article 70 alinéa 3 du même texte qui dispose que : « il ne peut être passé outre au refus de visa que sur autorisation écrite du Ministre chargé des finances. Dans ce cas, la responsabilité du Ministre chargé des finances se substitue à celle du Contrôleur Financier ».

161 Tel est l'objet de l'article 116 alinéa 1er du décret no 2020/375 du 07 juillet 2020 portant règlement général de la comptabilité publique qui dispose que : « les contrôles a priori exercés par les contrôleurs financiers portent sur les opérations budgétaires. Tous les projets d'actes des ordonnateurs portant engagement de dépenses, notamment les marchés publics ou contrats, baux administratifs, arrêtés, mesures ou décisions émanant d'un ordonnateur, sont soumis au visa préalable du contrôleur financier ».

162 Voir l'article 119 alinéa 1er du même texte, qui dispose que : « les contrôles a posteriori sont inopinés ou non, sur pièces ou sur place, sur les actes des ordonnateurs et des comptables. Ces contrôles ont pour objet de vérifier la bonne application des lois et règlements en vigueur en matière de gestion des finances publiques ».

48

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Il convient de souligner que, le régime financier de l'État et des autres entités publiques, retient la responsabilité du contrôleur financier pour des visas qu'il appose, tout particulièrement lorsqu'une faute identifiée a été occasionnée par la défaillance du contrôle qu'il aurait dû effectuer.

Il faut par ailleurs mettre en exergue la nécessité d'une remontée de données fiables et leur archivage qui s'alignent désormais au système de dématérialisation des supports physiques, l'archivage électronique de supports de la dépense, leur uniformisation et la sécurisation desdites données163. Toute chose qui concourt à relever qu'en tant qu'acteur d'exécution du budget, le contrôleur financier doit connaître toutes les procédures, afin de mieux assurer d'une part le contrôle des dépenses engagées, et de bien exercer d'autre part, ses fonctions de centralisateur des opérations budgétaires, d'informateur du ministre au travers du reporting.

Le contrôleur financier effectue également un contrôle de la solde et des pensions. À ce titre, il est chargé de mettre en oeuvre les techniques de contrôle des effectifs et des rémunérations, des éléments constitutifs d'un bulletin de solde et des pensions, les cas de fraudes, irrégularités et anomalies régulièrement rencontrés à la lecture d'un bulletin de solde ou de pension, et les solutions pour y remédier164.

Son action devrait permettre un meilleur suivi des positions des personnels de l'État dans les ministères, les Établissements publics et les CTD, en vue de l'assainissement du fichier de solde165. À ce titre, le CF joue un rôle crucial dans la supervision des paiements de solde et des pensions.

163 « Le contrôleur financier : juge de la régularité et acteur essentiel dans la chaîne d'exécution du budget de

l'État », op.cit.

164 Ibid.

165 Idem.

49

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CONCLUSION DU CHAPITRE I

Au terme de ce chapitre qui portait sur un cadre institutionnel non juridictionnel opérationnel, il ressort que, ce cadre n'est opérant qu'avec la conjugaison des organes internes et externes de contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun.

Le contrôle par les organes internes des CTD est d'autant plus important qu'il favorise une gestion financière optimale en corrigeant rapidement les erreurs et en améliorant les processus budgétaires. Il permet aussi aux dirigeants des CTD de rendre compte de leur gestion, renforçant ainsi la culture de la reddition de comptes. En assurant une utilisation efficiente des ressources, le contrôle interne contribue directement au développement économique et social des collectivités locales, en alignant les dépenses avec les priorités locaux.

Cependant, le contrôle par les organes internes, bien qu'important, demeurent insuffisant pour renforcer la bonne gouvernance et la bonne gestion des ressources publiques au niveau local. C'est dans cette perspective que, le contrôle par les organes externes des CTD est non négligeable, car ces organes externes apportent une expertise indépendante qui permet de détecter les anomalies et les abus que les organes qui effectuent le contrôle interne du budget des CTD pourraient négliger.

50

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CHAPITRE II : UN CADRE INSTITUTIONNEL
JURIDICTIONNEL INACHEVÉ

Le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun représente un pilier essentiel pour assurer une gestion transparente et efficace des finances publiques locales. Cependant, malgré les avancées réalisées dans la décentralisation et la mise en place des institutions de contrôle, le cadre institutionnel juridictionnel demeure incomplet. Cette situation entraîne des défis significatifs dans la reddition de comptes et la transparence des opérations financières au niveau local, compromettant ainsi l'atteinte des objectifs de bonne gouvernance. L'absence des juridictions financières spécialisées pour les CTD limite l'efficacité du contrôle budgétaire. Actuellement, les tâches de vérification sont principalement attribuées à la Chambre des comptes de la CS dont le mandat couvre une vaste gamme d'entités publiques. À ce titre, le cadre institutionnel juridictionnel inachevé est la résultante de l'effectivité des juridictions de droit commun (Section I), et de l'effectivité partielle des juridictions financières (Section II).

SECTION I : L'EFFECTIVITE DES JURIDICTIONS DE DROIT COMMUN

L'effectivité des juridictions de droit commun dans le cadre du contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun est un sujet complexe qui révèle plusieurs lacunes et défis. Bien que ces juridictions jouent un rôle crucial dans la régulation et la supervision des finances locales, leur efficacité est souvent entravée par des contraintes institutionnelles et opérationnelles, ce qui impacte la transparence et la gestion des fonds publics au niveau local.

Même si l'efficacité de ces juridictions demeure entravée, il convient tout de même de les analyser, car, elles font partie des institutions qui protègent la fortune publique. Ces juridictions sont entre autres : les juridictions inférieures (Paragraphe I), et les juridictions supérieures (Paragraphe II).

51

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Paragraphe I : Les juridictions inférieures

Les juridictions inférieures jouent un rôle essentiel mais souvent sous-estimé dans le cadre du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun. Ces juridictions comprennent principalement les juridictions de premier degré (A), et le Tribunal criminel spécial (B), chargées de protéger la fortune publique au niveau local.

A- Les juridictions de premier degré

Les juridictions de premier degré dans le cadre du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun sont le Tribunal de Première Instance et le Tribunal de Grande Instance. Il convient donc d'analyser la composition desdites juridictions avant d'identifier leurs attributions.

En ce qui concerne le TPI, l'article 14 de la loi no 2006/015 dispose : « Le Tribunal de Première Instance comprend :

? Au siège : un Président, un ou plusieurs juges, un greffier en chef, des greffiers ; ? À l'instruction : un ou plusieurs juges d'instruction, un ou plusieurs greffiers ;

? Au parquet : un procureur de la République, un ou plusieurs substituts du procureur de la République. ».

Toute affaire soumise à ce tribunal est tranchée par un seul magistrat. Exceptionnellement, en matière sociale, le TPI est complété par des assesseurs conformément à l'article 133166 du code du travail.

Ainsi, le TPI a une double dimension en ce qui concerne sa compétence : territoriale ou ratione loci et matérielle ou ratione materiæ167. Relativement à sa compétence territoriale, d'après l'article 13 de la loi de 2006 précitée, il est créé un TPI par arrondissement168. Toutefois, suivant les nécessités de service, le ressort du tribunal peut comprendre plusieurs arrondissements169. Le TPI siège au Chef - lieu de l'arrondissement.

166 L'article 133 (1) du code du travail dispose que : « Les tribunaux statuant en matière sociale se composent :

d'un magistrat, président ; d'un assesseur employeur et d'un assesseur travailleur choisis parmi ceux figurant sur les listes établies conformément à l'article 134 ; d'un greffier ».

167 KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », in Répertoire quinquennal

OHADA, 2006 - 2010, pp. 93 - 122, p. 98.

168 Ibid.

169 Idem.

52

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

En ce qui concerne sa compétence matérielle, et conformément l'article 15 de la loi de 2006, le TPI est compétent en matière civile, commerciale et sociale et en matière pénale. Mais dans le cadre de notre sujet, il convient d'insister exclusivement en matière pénale. Car, les irrégularités avérées lors du contrôle de l'exécution du budget des CTD par le TPI, et qualifiées d'infraction sur le plan pénal peuvent faire l'objet de sanction par ladite juridiction si celles-ci (les infractions) relèvent de sa compétence.

Autrement dit, en matière pénale, le TPI est compétent pour le jugement des infractions qualifiées de délits ou de contraventions, des demandes de mise en liberté formées par toute personne détenue et poursuivie devant lui, pour une infraction de sa compétence ; il statue aussi en matière de délinquance juvénile, pour des crimes commis par des mineurs sans coauteur ou complice majeur170.

Tout comme l'organisation du TPI, celle du Tribunal de Grande Instance a été revue par la nouvelle loi portant organisation judiciaire du Cameroun en ses articles 16 et suivants. L'article 17 de la loi no 2006/015 du 29 décembre 2006 dispose que : « Le Tribunal de Grande Instance comprend . Au siège . un Président, un ou plusieurs juges, un greffier en chef, des greffiers ; À l'instruction . un ou plusieurs juges d'instruction, un plusieurs greffiers ; Au parquet . un Procureur de la République, un ou plusieurs substituts du procureur de la République. ».

Le Président, les juges d'instruction, les juges, les greffiers en chef, les greffiers du TPI du siège d'un TGI peuvent cumulativement avec leurs fonctions respectives être nommés aux mêmes fonctions au TGI171.

Toute affaire soumise au TGI est jugée par un seul magistrat ; toutefois, le tribunal peut siéger en formation collégiale composée de trois membres, sur ordonnance du Président prise d'office ou sur réquisitions du ministère public ou à la requête d'une partie. Exceptionnellement, en matière sociale, le TGI est composé conformément aux dispositions du code du travail.

En ce qui concerne ses attributions, la compétence territoriale du TGI doit être distinguée de sa compétence matérielle.

170 KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », op.cit., p. 98.

171 Ibid.

53

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

En ce qui concerne sa compétence territoriale, d'après l'article 16 de la loi de 2006, il est créé un TGI par département172. Toutefois, suivant les nécessités de service, le ressort d'un TGI peut, être étendu à plusieurs départements173. Le TGI siège au Chef - lieu du département. Pour ce qui concerne sa compétence matérielle, conformément à l'article 18 de la loi de 2006, le TGI est compétent en matière civile, commerciale et sociale, et en matière pénale. Mais comme nous l'annoncions dans le cadre du TPI, nous préférons insister sur sa compétence en matière pénale174.

En matière pénale, le TGI est compétent pour des crimes et délits connexes, les demandes de mise en liberté formées par toute personne détenue et renvoyée devant lui, pour toute infraction relevant de sa compétence.

Bien que les juridictions de premier degré soient compétentes de certaines infractions tendant à vicier la bonne exécution du budget des CTD, il n'en demeure pas moins de mener une analyse su le tribunal criminel spécial, qui lui aussi, contribue à la protection de la fortune publique.

B- Le Tribunal criminel spécial

L'évocation de son nom seul fait sursauter bon nombre de gestionnaires des fonds publics. Le Tribunal criminel spécial, est devenu un véritable cauchemar pour certains hauts cadres de l'administration. On se souvient pourtant qu'à sa création, une bonne tranche de la population ne vendait pas cher la peau de cette juridiction, au regard de nombreuses critiques dont elle avait fait l'objet. L'un des reproches que les citoyens faisaient à ce tribunal était la discrimination basée sur le critère financier175. Aux termes de la loi mettant sur pied le TCS en effet, ne sont justiciables de cette juridiction que les justiciables suspectés d'avoir détourné les derniers publics à hauteur de cinquante millions (50 000 000) de FCFA au moins. Ceux au passif de qui sont mis des atteintes à la fortune publique inférieures à ce montant ne méritent pas l'attention du TCS. C'est le TGI et le TPI qui sont compétents pour juger ces « petits » présumés voleurs.

172 Idem.

173 Idem.

174 Idem.

175 TAKAM (Dieudonné), « Le Tribunal criminel spécial au Cameroun », Disponible en ligne sur https://www.cabinettakam.com/index.php/le-cabinet//publications/165-le-tribunal-criminel-special-au-cameroun, Consulté jeudi le 6 juin 2024 à 20h17 min.

54

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Avant l'entrée en vigueur de la loi instituant le TCS, toutes les affaires inhérentes aux indélicatesses avec la gestion de la fortune publique relevaient de plein droit de la compétence du TGI176. Certains n'ont pas compris où se trouvait la nécessité de créer un autre tribunal pour lutter contre les détournements de derniers publics. D'autres estimant que si l'efficacité de la protection des biens publics passait par la naissance d'une juridiction spéciale, il fallait alors que tous les cas de malversations financières publiques soient renvoyés devant cette nouvelle juridiction177. L'une des particularités du TCS est qu'il s'agit d'un tribunal statuant en premier et en dernier ressort. Ce qui signifie que ses jugements sont sans appel. Autrement dit, lorsque le TCS a rendu une décision, aucune voie de recours ordinaire n'est possible178. Ce qui constitue le principal reproche que bon nombre de spécialistes du droit pénal, et notamment les Avocats, font à cette juridiction. Dans l'ordonnancement juridique classique en effet, toute décision rendue par un tribunal doit pouvoir normalement faire l'objet d'appel. Cette voie de recours fondamentale en droit permet à celui qui, étant partie au procès, n'est pas satisfait du jugement rendu par le tribunal de porter l'affaire devant la Cour d'Appel territorialement compétente. C'est ce qu'on appelle le principe du double degré de juridiction179.

En vertu de ce principe, l'affaire portée devant la juridiction d'appel, qui est une juridiction supérieure au tribunal, est à nouveau examinée, afin de voir si l'appel est fondé ou non. Avec cette particularité, qu'en appel, le dossier est jugé par les magistrats ayant plus d'expérience que ceux officiant au tribunal. Et non pas par un seul juge, mais par un collège d'au moins trois juges. Ce qui diminue sensiblement les risques d'erreurs judiciaires180. Et c'est probablement conscient de la réalité de ce risque que le législateur camerounais a prévu dans la loi régissant le TCS que toutes les affaires y soient jugées en collégialité. Étant entendu qu'après le verdict, aucun appel n'est recevable.

Que faire donc si l'on n'est pas satisfait d'un jugement prononcé par le Tribunal criminel spécial ?

176 TAKAM (Dieudonné), « Le Tribunal criminel spécial au Cameroun », op.cit.

177 Ibid.

178 Idem.

179 Idem.

180 Idem.

55

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

La loi en interdisant l'appel a néanmoins autorisé le pourvoi en cassation181. C'est une voie de recours ouverte contre toutes les décisions rendues en dernier ressort. Et qui permet à la partie ayant perdu le procès de porter l'affaire devant la Cour suprême. Cette voie de recours est extraordinaire, en ce sens qu'elle est sans effet sur la sentence prononcée, laquelle doit être exécutée malgré tout. De plus, le pourvoi en cassation ne doit pas être fondé sur les faits, mais essentiellement sur le droit. En d'autres termes, pour que le pourvoi soit recevable, il faut avoir indiqué clairement la disposition légale qui a été violée par la décision attaquée. C'est malheureusement la seule voie de recours dont disposent les justiciables du TCS. Il en résulte que la loi créant ce tribunal veut que ses décisions soient acceptées même si on n'est pas d'accord de l'appréciation que le tribunal a donnée aux faits. Toute chose qui contribue à faire craindre le TCS.

Compte tenu du principe de double degré de juridiction, il ressort que les parties déboutées insatisfaites des jugements rendus par les juridictions inférieures, peuvent soit faire appel, soit pourvoir devant les juridictions supérieures.

Paragraphe II : Les juridictions supérieures de contrôle

Les juridictions supérieures concernées par le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun sont : la Cour d'appel (A), qui intervient contre les jugements des juridictions inférieures telles que le TPI et le TGI ; et la Cour Suprême (B), qui officie en cassation contre les décisions de la Cour d'appel et même des jugements du TPI et du TGI en matière financière.

A - La Cour d'appel

La Cour d'appel est une juridiction supérieure devant laquelle, peuvent être contestés des jugements rendus par les juridictions inférieures à l'occasion des infractions constatées lors du contrôle de l'exécution du budget des CTD.

Il existe actuellement sur le territoire camerounais dix Cours d'appel calquées sur l'organisation administrative par régions. Une Cour d'appel est créée au niveau de chaque région et a son siège au Chef - lieu de la région182.

181 TAKAM (Dieudonné), « Le Tribunal criminel spécial au Cameroun », op.cit.

182 KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », op.cit., p. 103.

56

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

En ce qui concerne sa composition, l'article 19 de la loi de 2006 mentionne que la Cour d'appel comprend :

? Au siège : un Président, un ou plusieurs vice - présidents, un ou plusieurs conseillers, un greffier en chef, des greffiers ;

? Au parquet : un Procureur général, un ou plusieurs avocats généraux, un ou plusieurs substituts du Procureur général, un ou plusieurs attachés183.

Pour exercer ses attributions, la Cour d'appel peut désormais revêtir deux formations : les chambres et l'assemblé.

La Cour d'appel est matériellement compétente pour statuer sur les appels à l'encontre des décisions rendues par les juridictions de premier degré184, les appels formés contre les ordonnances du juge d'instruction, le contentieux de l'exécution de ses décisions et sur tout autre cas prévu par la loi. La Cour d'appel est également compétente pour statuer, par renvoi de la Cour suprême sur les arrêts ayant fait l'objet de cassation. Ces arrêts peuvent porter sur des litiges de droit moderne ou de droit traditionnel. Sur le plan territorial, la Cour d'appel est compétente à l'égard de tous les tribunaux qui ont leur siège dans son ressort. Les décisions rendues par les Cour d'appel peuvent faire l'objet d'un pourvoi devant la Cour suprême.

B - La Cour suprême

La Cour suprême est la plus haute juridiction du Cameroun qui statue sur les décisions qui peuvent avoir une dimension financière, rendues par la Cour d'appel185. Son siège est à Yaoundé, la capitale du Cameroun et son ressort couvre tout le territoire de la République. L'organisation et le fonctionnement de la Cour suprême sont désormais fixés par la loi de 2006. À ce titre, il convient d'examiner d'une part sa composition et d'autre part, ses compétences.

À la lecture de l'article 4 de la loi de 2006, la Cour suprême est composée :

? Au siège : d'un Premier Président, président de la Cour suprême, de présidents de chambres ; de conseillers, de conseillers maîtres, de conseillers référendaires, du greffier en chef de la Cour suprême, de greffiers en chef de chambres, de greffiers ;

183 KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », op.cit., p. 103.

184 Tribunal de première instance, tribunal de grande instance, tribunal de premier degré, tribunal coutumier, « Alkali courts » et « customary courts ».

185 KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », ibid., p. 104.

57

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

? Au parquet : d'un Procureur général, d'un premier avocat général, d'avocats généraux.

Par ailleurs, la Cour suprême comprend une chambre judiciaire, une chambre administrative, une chambre des comptes, une formation des chambres réunies, une assemblée générale, un bureau, un secrétaire général, un greffe186. Chaque chambre comprend des sections et une formation de sections réunies. En outre, chaque chambre est composée d'un président, de conseillers, d'un ou de plusieurs avocats généraux, d'un greffier en chef, des greffiers. Toutefois, chacune de ces chambres à également une composition propre187.

De manière générale, la Cour suprême statue sur des pourvois formés à l'encontre des décisions entachées d'incompétence, de la dénaturation des faits de la cause ou des pièces de la procédure, du défaut, de la contradiction ou de l'insuffisance des motifs, du vice de forme, de la violation de la loi, de la non réponse aux conclusions des parties ou aux réquisitions du ministère public, de détournement de pouvoir, de la violation d'un principe général du droit et du non - respect de la jurisprudence de la Cour suprême ayant statué en Sections Réunies d'une chambre ou en Chambres Réunies188.

Tout acte juridictionnel des juridictions inférieures devenu définitif et entaché de violation de la loi peut être déféré à la Cour suprême par le Procureur Général de ladite Cour.

De manière spécifique, les trois chambres de la Cour suprême ont chacune une compétence qui lui est propre189. La chambre judiciaire est compétente pour connaître190 :

Des décisions rendues en dernier ressort par les Cours et tribunaux en matière civile, commerciale, pénale, sociale et de droit traditionnel ;

Des actes juridictionnels émanant des juridictions inférieures et définitifs, dans tous les cas où l'application du droit est en cause ;

Des demandes de mise en liberté en cas de pourvoi recevable ;

De toute autre matière qui lui est expressément attribuée par la loi191.

186 KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », op.cit.

187 Ibid.

188 Art. 35 de la loi no 2006/016 du 29 décembre 2016 fixant l'organisation et le fonctionnement de la Cour suprême.

189 Sur les compétences des chambres administratives et de comptes, voir plus loin.

190 KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », ibid., p. 105.

58

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Même si les juridictions de droit commun sont effectives, leur efficacité demeure limitée en raison de l'effectivité partielle des juridictions financières.

SECTION II : L'EFFECTIVITE PARTIELLE DES JURIDICTIONS FINANCIERES

Le Cameroun dispose de plusieurs textes régissant le contrôle de l'exécution du budget des CTD. Malgré la création des juridictions financières spécialisées par ces textes, il ressort que certaines d'entre elles ne sont pas encore effective sur le territoire national : on parle de l'effectivité partielle des juridictions financières. Cette effectivité partielle implique non seulement, l'absence des juridictions financières spécialisées (Paragraphe I) et l'existence d'une juridiction de substitution : la Chambre administrative de la Cour suprême (Paragraphe II).

Paragraphe I : L'absence des juridictions financières spécialisées

L'absence des juridictions financières spécialisées dans le cadre du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun pose de nombreux défis et limites à la gouvernance locale efficace. Cette absence se traduit par l'absence des tribunaux régionaux des comptes (A) et l'absence de la Cour des comptes (B).

A - L'absence des tribunaux régionaux des comptes

Au Cameroun, l'absence de mise en place effective des tribunaux régionaux des comptes a des implications significatives pour la gouvernance financière et la gestion des ressources publiques des collectivités territoriales décentralisées. Même si ces tribunaux ont été créés par la loi no 2006/017 du 29 décembre 2017 fixant l'organisation, les attributions et le fonctionnement des tribunaux régionaux des comptes, leurs missions sont provisoirement dévolues à la Chambre des comptes de la Cour suprême.

Malgré l'absence d'une mise en place effective des tribunaux régionaux des comptes au Cameroun, il existe une loi fixant l'organisation, les attributions et le fonctionnement des tribunaux régionaux des comptes à savoir : la loi no 2006/017 du 29 décembre 2006.

191 KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », op.cit.

59

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Au sens de l'article 41 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996, les tribunaux régionaux des comptes sont des juridictions inférieures192.

D'après l'article 3 de la loi no 2006/017, le tribunal régional des comptes est composé :

Au siège : d'un Président, de Présidents de section, de juges, de greffiers, de greffiers en service extraordinaire, de juges en service extraordinaire, d'auditeurs, d'auditeurs

stagiaires ; Au parquet : du Procureur Général près de la Cour d'appel du siège du tribunal,
des substituts du Procureur Général près de ladite Cour, des substituts du Procureur Général en service extraordinaire.

En ce qui concerne sa compétence, elle est aussi bien territoriale que matérielle. Relativement à sa compétence territoriale, d'après l'article 2 alinéa 2 de la loi no 2006/017, il est créé un tribunal régional des comptes par région et son siège est fixé au Chef - lieu de ladite région. Toutefois, suivant les nécessités de service, le ressort d'un TRC peut être étendu à plusieurs régions193.

Pour ce qui est de sa compétence matérielle, il ressort à l'article 9 de la loi précitée que le TRC est compétent194 pour contrôler et statuer sur les comptes publics des collectivités territoriales décentralisées de son ressort et de leurs établissements publics ; il est également compétent pour connaître des comptes qui lui sont attribués par la chambre des comptes de la Cour suprême ; enfin, il connaît de toute autre matière qui lui est expressément attribuée par la loi195.

Autrement dit, Le contrôle de l'exécution du budget des CTD par les TRC repose sur un cadre juridique rigoureux. Ce cadre est défini par plusieurs textes législatifs dont la Constitution et les lois spécifiques sur le régime financier des CTD, qui établissent des règles de transparence et de responsabilité financière. Les TRC ont été institués pour s'assurer que les comptes publics des CTD sont gérés de manière régulière et sincère, contribuant ainsi à une meilleure gouvernance locale.

Les TRC jouent un rôle central en tant que juridictions inférieures, dans ce processus en examinant et en jugeant les comptes des CTD. Leur mission inclut la vérification de la

192 L'article 41 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 dispose à cet effet que : « (...) Elle statue souverainement sur les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions inférieures des comptes... ».

193 KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », op.cit., p. 114.

194 Sous réserve des attributions de la chambre des comptes.

195 Ibid., p. 114.

60

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

régularité des comptes, l'évaluation de la gestion des comptables publics, et la sanction des irrégularités. C'est dans cette perspective que les comptabilités de fait sont, outre l'administration, l'audit interne ou externe, l'audit de l'Institution Supérieure de Contrôle des Finances Publiques, découvertes par le tribunal régional des comptes196.

Les procédures de contrôle commencent par la transmission des comptes annuels des CTD aux TRC, suivi d'un examen préliminaire pour vérifier leur complétude. Les comptes sont ensuite instruits en détail, avec des auditions et des enquêtes complémentaires si nécessaire. Les TRC délibèrent ensuite sur les comptes et rendent des jugements197 qui peuvent inclure des recommandations ou des sanctions198. Ce processus détaillé garantit que chaque étape de la gestion financière des CTD est scrutée et corrigée si besoin.

Tout comme les tribunaux régionaux des comptes, la Cour des comptes, juridictions financière prescrite par la directive CEMAC de 2011 est jusqu'à nos jours non effective sur le territoire camerounais, pour apporter son expertise dans le cadre du contrôle budgétaire.

B - L'absence de la Cour des comptes

Si l'on en croit à Jean BODIN, « les finances publiques sont le nerf de la république »199. De ce point de vue, elles constituent le point névralgique de la chose publique, doivent être sécurisées et faire l'objet d'une gestion saine. Signe des temps, aujourd'hui, même le législateur communautaire est conscient de la nécessité d'une gestion orthodoxe des fonds publics. Cela étant, à la fin de son ouvrage relatif au contrôle de l'État sur le continent africain, (J.M) BRETON suggérait que les organisations sous régionales

196 Telle est la teneur de l'article 29 (1) de la loi no 2006/017 du 29 décembre 2017 fixant l'organisation, les attributions et le fonctionnement des tribunaux régionaux des comptes qui martèle en fait que : « Les comptabilités de fait sont découvertes, soit par l'administration, soit par un audit interne ou externe, soit par une mission d'audit de l'Institution de Contrôle Supérieure des Finances Publiques, soit par le Tribunal Régional des Comptes ».

197 En tant que juridiction inférieure, juridiction financière de premier degré, le tribunal régional des comptes rend des jugements qui peuvent être provisoires ou définitifs conformément à la loi no 2006/017 du 29 décembre 2017 fixant l'organisation, les attributions et le fonctionnement des tribunaux régionaux des comptes.

198 Ainsi, le comptable public peut être l'objet de la sanction des responsabilités comme l'indique l'article 35 (1)

de la loi no 2006/017 du 29 décembre 2017 fixant l'organisation, les attributions et le fonctionnement des

tribunaux régionaux des comptes dispose à cet effet que : « Le comptable public est présumé responsable

personnellement et pécuniairement :

- des défauts comptables constatés dans ses comptes ;

- de l'exercice des contrôles par la loi et les règlements ;

- du recouvrement des recettes et du paiement des dépenses régulièrement justifiées ;

- de la conservation des fonds et valeurs ;

- du maniement des fonds et mouvements de disponibilités ;

- de la tenue de la comptabilité de son poste. ».

199 Cité par BUISSON (Jacques), Finances publiques, Dalloz (15e éd.), 2012, p. 3.

61

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

puissent jouer un rôle appréciable dans l'ancrage institutionnel des principes de contrôle des finances publiques200. C'est dans cette optique que le législateur communautaire a instauré des mécanismes de surveillance multilatérale des politiques budgétaires aux niveaux de la CEMAC201 et de l'UE. Faisant spécifiquement sienne la suggestion de (J.M) BRETON, le législateur communautaire CEMAC adopta deux générations de directives en matière de finances publiques. Les directives de première génération sont adoptées en 2008. L'adoption des directives de la seconde génération interviennent en 2011 pour remédier aux incohérences et insuffisances de celles de 2008 susvisées, et les abroger. Ces directives de 2011 prises en exécution de celle portant Code de transparence adoptée le 19 décembre 2011, sont au nombre de cinq (5) :

? La Directive no 01/1/11-UEAC-190-cm-22 relative aux lois de finances ;

? La Directive no 02/08-UEAC-190-CM portant Règlement général sur la comptabilité

publique ;

? La Directive no 03/03-UEAC-190-CM portant nomenclature budgétaire ;

? La Directive no 04/08-UEAC-190-CM-17 relative aux opérations financières de

l'État ;

? La Directive no 05/08-UEAC-190-CM-17 relative au plan comptable de l'État.

Au-delà du souci de l'harmonisation du droit public financier dans la zone CEMAC, l'adoption des directives précitées, visait en filigrane la promotion d'une gestion financière responsable au sein des États de cet espace communautaire. Il s'ensuit que l'éradication des maladies infantiles des finances publiques africaines202 : la corruption, le détournement des derniers publics et la gabegie, est l'un de ses objectifs primordiaux.

La directive CEMAC de 2011 relative aux lois des finances, compte tenu des innovations remarquables qu'elle recèle, aura particulièrement retenu l'attention de l'opinion publique nationale203. Sans être exhaustif, ces innovations sont : le renforcement du contrôle parlementaire des derniers publics, la consécration du budget programme, la démocratisation

200 OUEDRAOGO (Djibrihina), L'autonomisation des juridictions financières dans l'espace UEMOA : Étude sur l'évolution des Cours de comptes, Thèse pour le doctorat, Université de Montesquieu de Bordeaux IV, p. 43.

201 Pour des développements sur la question, lire (Daniel) AVOM et (Désiré) GBETNKOM, « La surveillance multilatérale des politiques budgétaires dans la zone CEMAC : bilan et perspectives », Monde et développement, no 123, 2003, pp. 107 - 125.

202 DIARRA (Éloi), « Pour un observatoire des finances publiques africaines », Afrilex, p. 2.

203 KOUA (Samuel Éric), « La prescription de la CEMAC pour la création d'une Cour des comptes : le cas du Cameroun », G&FP, 2020/6 no 6, pp. 113 - 122., p. 114.

62

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

des processus budgétaires et la prescription de la Cour des comptes comme ISC204.

Indéniablement, la prescription de la Cour des comptes comme ISC aux États membres de la CEMAC, est l'innovation la plus saisissante dans le domaine du contrôle des finances publiques. Cette prescription procède de l'article 72 de la Directive no 01/1/11-UEAC-190-CM-22 du 19 décembre 2011. Cet article dispose en effet que : « Le contrôle juridictionnel des opérations budgétaires et comptables des administrations est assuré par une Cour des Comptes qui doit être créée dans chaque État (...). Elle est l'Institution Supérieure de Contrôle dans chaque État ».

Afin que nul n'en ignore, on entend par ISC, l'organe de nature juridictionnelle ou non, indépendant et autonome des trois pouvoirs, qui, au sein d'un État, assure au niveau le plus élevé le contrôle de la gestion des finances publiques, et coordonne l'activité des autres organes de contrôle. Pour faire bref, « Les ISC sont des organes supérieurs qui veillent à ce que les actes financiers de l'administration fassent l'objet de suivi selon les normes comptables »205. Traditionnellement, chaque État a le droit de choisir librement sa forme d'ISC. C'est pourquoi il existe une diversité d'ISC dans le monde. La nature de l'ISC peut varier d'une culture juridique à l'autre. Classiquement, la doctrine distingue trois modèles d'ISC : le modèle juridictionnel ou latino206, le modèle anglo-saxon207 et le modèle allemand (mixte)208. En marge de ces trois modèles précités, il existe le modèle administratif en vigueur notamment au Cuba, au Mali et au Cameroun. Ici, ce sont les services du CONSUPE209/l'inspection générale de l'État qui tiennent lieu d'ISC.

Parallèlement à ces considérations, l'État de droit et la démocratie constituent les prémisses essentielles pour le contrôle indépendant des finances publiques210. Toute ISC ne peut prétendre être du niveau, que si elle est consacrée par une législation. L'existence

204 KOUA (Samuel Éric), « La prescription de la CEMAC pour la création d'une Cour des comptes : le cas du Cameroun », op.cit.

205 GONZALE (B), ALLII, « Les ISC et leurs stratégies de communication », RISA, no 3, Vol. 4, 2008, p. 463.

206 Qui a pour ISC la Cour des comptes. Pratiquent ce modèle, la France, l'Espagne, le Portugal, le Bre2sil et la plupart des États francophones d'Afrique, etc.

207 Ici, l'ISC renvoie à un organe généralement rattaché au parlement, mais vis-à-vis duquel il est inde2pendant. Comme exemples d'ISC relevant de ce modèle, on peut citer : le National Audit Office (NAO) en Angleterre, le Vérificateur Général au Canada, Le Government Accountability Office (GAO) en Corée du Nord, l'Office National d'Audit en Chine et l'Auditeur Général en Inde.

208 Modèle mixte en ce qu'il combine des éléments d'ordre administratif et juridictionnel. Comme les juges fédéraux allemands, ses membres sont nommés à vie.

209 Au Cameroun, les services CONSUPE tiennent lieu d'ISC. Tel est l'objet de l'article 2 alinéa 1er du décret no 2013/287 du 04 septembre 2013 portant organisation des services du Contrôle supérieur de l'État qui dispose que « les services du Contrôle supérieur de l'État constituent l'institution supérieure de contrôle des finances publiques (ISC) du Cameroun. Ils sont chargés de l'audit externe ».

210 Déclaration de Lima cité par BATIA EKASSI Sandrine dans sa thèse de doctorat,

63

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

d'institutions opérationnelles faisant l'objet d'une sécurité juridique devient donc un impératif, voire une nécessité dans les démocraties où prévaut « l'État de droit »211.

La déclaration de Lima précise à cet effet que « l'établissement des Institutions supérieures de contrôle des finances publiques et le niveau d'indépendance qui leur est nécessaire doivent être précisés dans la Constitution. Les modalités peuvent être détaillées dans les textes de loi »212. L'existence d'un cadre constitutionnel et législatif approprié et l'application des dispositions de ce cadre sont donc des exigences formelles pour toute ISC qui se veut efficace213.

Au Cameroun, l'institution qui se rapproche réellement de ces exigences textuelles et qui semble vêtir la carrure d'une ISC, n'est que la Chambre des comptes de la Cour suprême214. On relèvera que la Cour des comptes prescrite par le droit communautaire CEMAC aura deux types de missions : les missions juridictionnelles et les missions non juridictionnelles. La directive CEMAC de 2011 met en exergue les missions de contrôle de la Cour des comptes. À ce titre, la Cour devra exercer deux types de mission de contrôle à savoir : les missions juridictionnelles et les missions non juridictionnelles.

En ce qui concerne les missions juridictionnelles, il faut noter que la Cour assurera le jugement et l'apurement des comptes publics, et sanctionnera les irrégularités constatées durant ses investigations sur le compte apuré215. Selon DESHEEMAEKER, pour la Cour, juger un compte c'est vérifier que le comptable public a rempli correctement sa tâche216.

D'évidence, si lors du jugement d'un compte, des irrégularités y sont constatées, la Cour doit par un jugement, mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire du contrôlé217. Bien entendu, « Ce jugement ne tranche pas un litige, mais s'assure de

211 NGUELE ABADA (Marcellin), État de droit et démocratie : Contribution à l'étude de l'évolution politique et constitutionnelle au Cameroun, Thèse de doctorat en Droit Public (NR), Université de Paris 1 - Panthéon Sorbonne, janvier 1995, p. 4. (Une définition usuelle de l'État de droit entendu comme « soumission de l'État au droit »), cité par BATIA EKASSI Sandrine, p. 46.

212 Art. 3 de la Section 5 de la déclaration de Lima, p. 7. Citée par BATIA EKASSI Sandrine.

213 BATIA EKASSI (Sandrine), L'Institution supérieure de contrôle des finances publiques au Cameroun, Thèse de doctorat en Droit Public, Université de Yaoundé II, 2015 - 2016, p. 46.

214 Ibid.

215 KOUA (Samuel Éric), « La prescription de la CEMAC pour la création d'une Cour des comptes : le cas du Cameroun », op.cit., p. 114.

216 DESHEEMAEKER (Christian), « Changer les procédures juridictionnelles de la Cour : une réforme attendue et de grande ampleur », G&FP, no 10, octobre 2009, p. 700.

217 Les sanctions dont ils sont passibles devant cette Cour sont : les déchéances et les amendes (débets).

64

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

l'accomplissement parfait d'une obligation répétitive »218. Un litige suppose la présence de deux parties devant le juge : le demandeur et le défendeur. Or, tel n'est pas le cas en matière d'apurement des comptes publics par le juge des comptes. En l'espèce, le comptable public défère juste ses comptes à ce dernier afin qu'il les juge.

A contrario, des procédures contentieuses des autres juridictions, il n'y a pas de débat contradictoire dans le contentieux devant le juge des comptes. Quoi qu'il en soit, après avoir jugé le compte, la Cour sous analyse, rendra un arrêt déclarant le compte contrôlé quitte, en avance ou en débet.

Fait notable, la Cour des comptes, objet de cette étude, est compétente pour contrôler y compris au plan juridictionnel les ordonnateurs219, et sanctionner les fautes de gestions commises par ceux-ci220. De la sorte, elle s'éloigne de la Cour des comptes française et de l'actuelle Chambre des comptes de la Cour suprême du Cameroun, qui ne peuvent contrôler au sens juridictionnel du terme les ordonnateurs, ni sanctionner les fautes de gestions commises par eux. En France, ces fautes sont sanctionnées par la Cour de discipline budgétaire et financière. Au Cameroun, si la loi portant régime financier de l'État précitée, à travers son article 76, élargit la compétence de ladite chambre en lui permettant notamment de juger les fautes de gestion des ordonnateurs, en l'état actuel de la pratique du contrôle de l'exécution du budget dans ce pays, réprimées par le CDBF221.

C'est dire que la Cour des comptes prescrite au par le législateur CEMAC au États membres, au plan fonctionnel, s'assimile à une forme de fusion entre la Cour des comptes française et la Cour de discipline budgétaire et financière de l'hexagone.

218 VACHIC (J - P ), « La sauvegarde des droits de l'hommes en matière de jugement des comptes », in (Dir. Alexis DIPANDA MOUELLE et Maurice KAMTO), Justice, Procédures juridictionnelles et Protection des droits de l'homme en Afrique, p. 82.

219 En matière de dépense publique, les ordonnateurs principaux sont : les chefs des départements ministériels et des institutions constitutionnelles (Sénat, AN, Conseil économique et social, CC, etc.). En matière de recettes, le Ministre des finances est l'ordonnateur principal de l'État alors que les autres chefs de départements ministériels sont des ordonnateurs secondaires.

220 Ainsi qu'il ressort de l'article 74 de la Directive no 01/1/11-UEAC-190-CM-22 du 19 décembre 2011 : « Toute personne appartenant au cabinet d'un membre du gouvernement, tout fonctionnaire ou agent d'un organisme soumis à un titre quelconque au contrôle de la Cour des comptes et toute personne à qui est reproché un des faits énumérés à l'article 75 de la présente directive, peut être sanctionné pour faute de gestion ».

221 Fonctionnellement parlant, il est l'équivalent de la Cour de discipline budgétaire et financière au Cameroun.

65

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

La Cour des comptes est avant tout juge de la sincérité des comptes publics222. Contrairement au juge pénal qui statue in rem et in persona, le juge des comptes se limite à la stricte appréciation des actes du comptable public. Il ne saurait, lors de l'appréciation de la responsabilité de ce dernier, tenir compte de sa personnalité au moment où il concevait le compte scruté. On dit alors que devant le juge des comptes, on a à faire à un contentieux subjectif223. C'est un truisme, la fonction sanctionnatrice de la Cour sous analyse la particularise des modèles d'ISC ne relevant pas du modèle latin. En effet, la Cour a le pouvoir de sanctionner les irrégularités avérées lors de ses investigations sur les comptes à lui déférés. Or, les modèles d'ISC allemand, anglo-saxon et de type CONSUPE n'ont pas de pouvoir sanctionnateur. Ils constatent juste des irrégularités et formulent des observations y afférentes224. À charge pour les organes sanctionnateurs compétents de tirer les conséquences de droit et de prononcer les sanctions le cas échéant. À titre d'exemple, l'ISC actuelle du Cameroun (CONSUPE) se limite à la constatation des irrégularités commises, lors de l'exécution du budget, par les ordonnateurs et autres agents publics hormis les comptables, dont la responsabilité disciplinaire et financière relève de la compétence de la Chambre de comptes de la Cour suprême225. Il incombe au CDBF de les sanctionner.

Au vu de sa fonction sanctionnatrice, sus relevée, la Cour risque bousculer certaines habitudes en matière de gestion des finances publiques. En fait, jusque-là en France et dans les États francophones d'Afrique, les ministres sont irresponsables sur le plan de la discipline budgétaire et financière. Note un auteur : « Il est couramment admis que les ministres ordonnateurs principaux doivent disposer d'une certaine latitude, d'une marge de manoeuvre pour décider de l'opportunité des dépenses à engager ; il sera donc inutile de les incomber de règles paralysantes et leur responsabilité est d'autant plus atténuée »226. Or, au regard de la Directive no 01/1/11-UEAC-190-CM-22 du 19 décembre 2011 : « En cas de faute de gestion telle que définie à l'article 75 de la présente directive, tous les ordonnateurs encourent, en raison de l'exercice de leurs attributions, les responsabilités que prévoit la constitution de chaque État, sans préjudice des sanctions prononcées par la Cour des comptes ».

222 Pour Christophe NYOBE NLEND, Chef de la Division de la Magistrature et des greffes à l'ENAM : « Le

juge des comptes est le juge de la sincérité des écritures comptables » (Cours d'Éthique et Déontologie du Magistrat, (Année académique 2012 - 2013).

223 PHILIP (Loïc), Finances publiques, les dépenses, le droit budgétaire et financier, Paris, Cujas, 2000, p. 353.

224 KOUA (Samuel Éric), « La prescription de la CEMAC pour la création d'une Cour des comptes : le cas du

Cameroun », op.cit., p. 115.

225 Ibid.

226 TOURE (Cheickna), « Le système de contrôle des finances publiques au Mali », Afrilex, no 4, 2004, p. 156.

66

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

En marge des missions juridictionnelles de contrôle, la Cour des comptes devra exercer des missions non juridictionnelles de contrôle budgétaire. À ce titre, les missions non juridictionnelles de la Cour s'articulent autour de la fonction de conseil ou d'assistance des pouvoirs publics, d'information227, de contrôle de gestion, d'audit228, d'évaluation des performances ainsi que de certification de la régularité, de la fidélité et de la sincérité des comptes publics229. Le contrôle de gestion concerne l'ordonnateur. Il porte sur la qualité de la gestion de derniers publics. Il vise spécifiquement à s'assurer de l'utilité de la dépense publique qui a été prescrite par l'ordonnateur.

L'amélioration de la qualité de la dépense publique est l'une des finalités primordiales du juge financier. La future Cour des comptes, pour rationaliser la dépense publique, devra, au-delà des audits de régularité, réaliser des audits de performances. Ces derniers ont pour objet la vérification des écarts éventuels existants entre les moyens déployés et les objectifs atteints pour s'assurer que l'entité auditée a économisé ou non. Ce type d'audit s'assure donc du respect de la loi des trois « E » (efficacité, économie et efficience) par l'opération de la dépense scrutée230.

Malgré l'absence des tribunaux régionaux des comptes et de la cour des comptes, la chambre des comptes de la cour suprême officie en tant que juridiction de substitution.

Paragraphe II : L'existence d'une juridiction de substitution : la Chambre des comptes
de la Cour suprême

Contrairement à la chambre judiciaire et administrative de la Cour suprême qui n'ont pas de textes d'application et sont régies par une loi générale, la chambre des comptes est régie par une loi spéciale, la loi no 2003/005 du 21 avril 2003231 ses attributions, son organisation et son fonctionnement.

Elle est considérée comme une juridiction de substitution en raison l'ineffectivité des tribunaux régionaux des comptes et de la Cour des comptes sur le territoire national.

227 À travers la publication de ses rapports, elle informera les pouvoirs publics et l'opinion nationale sur les irrégularités commises lors de l'exécution du budget.

228 Il s'agit de l'audit de conformité, de l'audit de performance et de l'audit financier. Ce dernier consiste à déterminer si les états financiers sont fidèles.

229 À l'instar du compte général de l'État.

230 KOUA (Samuel Éric), « La prescription de la CEMAC pour la création d'une Cour des comptes : le cas du Cameroun », op.cit., p. 116.

231 Loi no 2003/005 du 21 avril 2003 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême.

67

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Puisqu'elle exerce provisoirement des missions des juridictions susmentionnées, il convient d'analyser son organisation (A), avant de s'appesantir sur ses attributions (B).

A - L'organisation de la Chambre des comptes de la Cour suprême

La chambre des comptes de la Cour suprême, en tant que juridiction de substitution comprend :

- Une section de contrôle et de jugement des comptes des comptables des collectivités territoriales décentralisées et de leurs établissements publics, sous réserve des attributions dévolues aux juridictions inférieures des comptes ;

- Une section de contrôle et de jugement des comptes des entreprises du secteur public et parapublic ;

- Une section des pourvois232.

La chambre des Comptes est composée d'un siège, d'un Ministère Public et d'un greffe233.

En ce qui concerne le siège, il comprend : le Président de la Chambre ; les Présidents de section ; les conseillers ; les conseillers maîtres ; les conseillers référendaires ; les Auditeurs et les Auditeurs stagiaires234.

Les fonctions du Ministère Public sont exercées par le Procureur Général près de la Cour suprême235.

Le greffe de la chambre des comptes de la Cour suprême comprend : le greffier en chef de la Chambre des Comptes ; les greffiers des sections ; les greffiers236.

Toutefois, en dehors de son organisation, la Chambre des comptes de la Cour suprême a également des attributions en matière de contrôle budgétaire d'une manière générale, et particulièrement le contrôle de l'exécution du budget des CTD.

232 Art. 13 de la loi no 2003/005 du 21 avril 2003 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême.

233 Art. 14 de la loi no 2003/005 du 21 avril 2003 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême.

192 Ibid., Art. 15.

235 Loi no 2003/005 du 21 avril 2003 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême, op.cit., Art. 17.

236 Ibid., Art. 16.

68

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

B - Les attributions de la Chambre des comptes de la Cour suprême

La juridiction des comptes présente au Cameroun est la structure constituée de tribunaux régionaux des comptes et de la Chambre des comptes de la Cour suprême. Encore non effectifs jusqu'à nos jours, les tribunaux régionaux des comptes consacrés par la loi du 29 décembre 2006, voient leurs attributions provisoirement exercées par la Chambre des comptes de la Cour suprême237. Cette dernière, assure conformément à la loi du 21 avril 2003 la certification des comptes des comptables publics de l'État, des établissements publics, des CTD et des entreprises publiques.

Dans ce sillage, la Constitution du 18 janvier 1996 de la République du Cameroun ordonne que la Cour suprême, est la plus haute juridiction en « matière judiciaire, administrative et de jugement des comptes». Elle prévoit l'existence d'une Chambre des comptes au sein de cette juridiction. En vertu de l'article 41 de la Constitution, « la Chambre des comptes est compétente pour contrôler et statuer sur les comptes publics de l'État et de tous ses démembrements notamment : les entreprises et les établissements publics ainsi que les collectivités territoriales décentralisées ». Elle statue souverainement sur les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions inférieures des comptes238.

Il convient d'abord de rappeler les attributions de la Chambre des comptes telles qu'elles figurent dans la Constitution, et d'analyser les transformations apportées par la loi de 2003, la loi de 2006, la loi de 2007 sur le régime financier de l'État ainsi que le décret de 2013 sur le Règlement Général de la Comptabilité Publique.

Ceci étant, le cadre juridique est posé par la loi no 2003/005 du 21 avril 2003 relative aux attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des comptes de la Cour suprême, précise en substance que la fonction juridictionnelle de contrôle des comptes est son activité principale239. L'examen de la gestion, autre attribution traditionnellement reconnue à toute juridiction financière n'est malheureusement pas de son ressort.

237 « La juridiction des comptes : un acteur au service de la sincérité dans la gestion des finances publiques », Disponible sur https://rfp.cm/la-juridiction-des-comptes--un-acteur-au-service-de-la-sincerite-dans-la-gestion-des-finances-publiques/, Consulté vendredi, 7 juin 2024 à 15h42 min.

238 Ibid.

239 Idem.

69

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Structurée en sections, la Chambre des comptes est composée d'un Président, de présidents de sections, de conseillers et d'auditeurs. Le ministère public y est représenté par le Procureur Général et les magistrats sont nommés par décret du Président de la République.

Toutefois, la loi de 2003 a une compréhension restrictive, voire en recul ou en contradiction avec la Constitution. Elle réduit la compétence de la Chambre des comptes aux comptes des comptables publics patents ou de fait240. Cette malencontreuse écriture a amené certaines entreprises publiques et parapubliques ainsi que certaines sociétés d'économie mixte qui n'ont pas de comptable public à estimer qu'elles ne rentrent pas dans le champ de compétence de la Chambre des comptes241. Ce problème est aujourd'hui résolu pour la plupart des entreprises, grâce à une sensibilisation de la Chambre des comptes auprès des organes de gestion242.

La Chambre des comptes en tant que juridiction financière exerçant les missions de contrôle en lieu et place des tribunaux régionaux des comptes a donc pour mission d'assister le parlement dans le contrôle de l'exécution de la loi de finances ; de certifier la régularité, la sincérité et la fidélité du compte général de l'État ; de juger les ordonnateurs, les contrôleurs financiers et les comptables publics, de contrôler la légalité financière et la conformité budgétaires de toutes les opérations de dépenses et de recettes de l'État ; d'évaluer l'économie, l'efficacité et l'efficience de l'emploi des fonds publics au regard des objectifs fixés, des moyens utilisés et des résultats attendu ainsi que la pertinence et la fiabilité des méthodes, indicateurs et données permettant de mesurer la performance des politiques et administrations publiques.

240 « La juridiction des comptes : un acteur au service de la sincérité dans la gestion des finances publiques », Disponible sur https://rfp.cm/la-juridiction-des-comptes--un-acteur-au-service-de-la-sincerite-dans-la-gestion-des-finances-publiques/, op.cit.

241 Ibid.

242 Idem.

70

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CONCLUSION DU CHAPITRE II

Au terme de ce chapitre qui portait sur le cadre institutionnel juridictionnel inachevé, une analyse a été menée sur l'effectivité des juridictions de droit commun et l'effectivité partielle des juridictions financières. Il ressort que le cadre institutionnel juridictionnel de contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun reste incomplet, reflétant des défis significatifs qui entravent une gestion financière optimale et transparente. La décentralisation, bien que promue comme moyen d'améliorer l'efficacité et la proximité de la gouvernance, souffre encore des mécanismes de contrôle et de supervision insuffisamment développés. Les instances juridictionnelles, notamment les tribunaux régionaux des comptes et la cour des comptes ne sont pas toujours effectifs jusqu'à nos jours sur le territoire national pour offrir leur expertise, en tant que juridictions financières spécialisées, dans le cadre du contrôle de l'exécution du budget de l'État et même celui des CTD.

71

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE

Au terme de cette première partie qui portait sur un contrôle formellement structuré, il ressort que le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun présente une structure formelle bien définie, mais qui nécessite des améliorations pour garantir une gestion financière optimale et transparente. Les dispositifs institutionnels en place, incluant des organes juridictionnels et des organes non juridictionnels fournissent un cadre juridique et procédural visant à assurer la reddition de comptes et la discipline budgétaire.

Cependant la mise en oeuvre de ce cadre souffre de limitations en termes de ressources humaines et matérielles, ainsi que d'indépendance et d'impartialité opérationnelles des organes de contrôle.

L'infrastructure juridique et institutionnel prévoit des mécanismes de contrôle a priori et a posteriori, permettant une surveillance continue et une évaluation ex post des pratiques budgétaires.

En marge d'un contrôle formellement structuré, le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées s'effectue également à travers un contrôle matériellement aménagé.

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

72

SECONDE PARTIE : UN CONTRÔLE
MATÉRIELLEMENT AMÉNAGÉ

73

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun est conçu de manière à assurer une gestion optimale des ressources publiques tout en respectant les principes de décentralisation. Ce contrôle matériellement aménagé s'appuie sur une infrastructure juridique et institutionnelle robuste, visant à garantir la conformité des dépenses aux prévisions budgétaires et aux objectifs de développement local. Les mécanismes mis en place incluent des audits internes et externes et des rapports de performance, permettant une évaluation rigoureuse de la gestion financière des collectivités territoriales. Les institutions clés, telles que la Chambre des comptes de la Cour suprême, le TCS, le TGI et le TPI jouent un rôle éminemment important dans la surveillance et la protection de la fortune publique, en s'assurant que les fonds publics sont utilisés de manière efficace, efficiente et transparente.

Cette approche structurée du contrôle budgétaire permet d'identifier et de corriger les dysfonctionnements, les fraudes et les gaspillages potentiels, tout en promouvant la responsabilité et la reddition de comptes des gestionnaires publics. En outre l'aménagement matériel du contrôle inclut les objectifs dudit contrôle. Cette organisation méthodique et proactive du contrôle budgétaire vise non seulement à prévenir les irrégularités, mais aussi à renforcer la capacité des CTD à gérer leurs ressources de manière autonome et à répondre efficacement aux besoins de leur population. Ainsi, le contrôle du budget, dans sa dimension matériellement aménagée, est essentiel pour la bonne gouvernance et le développement durable des CTD au Cameroun. Ce contrôle est matériellement aménagé dans la mesure où, il est axé sur un contrôle de la régularité (Chapitre I), et sur un contrôle de performance (Chapitre II), dont l'inobservation des règles budgétaires entraîne ipso jure des sanctions qui peuvent être juridictionnelles ou non juridictionnelles.

74

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CHAPITRE I : UN CONTRÔLE DE LA RÉGULARITÉ

Ce qui caractérise les opérations budgétaires en général, c'est l'existence d'un certain nombre de règles que les acteurs sont tenus de respecter243. Car, l'utilisation des ressources collectives par les gestionnaires publics élus ou non doit s'inscrire dans le respect rigoureux de principes et procédures établis et les informations y relatives doivent être portées à la connaissance du citoyen, aussi bien par ces gestionnaires que par une instance de contrôle indépendante244. D'ailleurs, le respect des lois est une expression de l'État de droit245. Le citoyen ne supporte les prélèvements que s'il a une garantie que les fonds qui se sont soustraits à sa décision sont utilisés de manière transparente, conforme aux règles de droit et aux décisions des assemblées délibérantes qui adoptent les budgets246 : c'est un contrôle de la régularité.

Ce contrôle met à cet effet en exergue, les dimensions de la régularité (Section I), ainsi que l'engagement de la responsabilité des agents publics du fait des irrégularités (Section II).

SECTION I : LES DIMENSIONS DE LA REGULARITE

La régularité dans le cadre du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun revêt une importance capitale pour la gouvernance financière locale. Cette régularité se manifeste par l'application stricte des lois et règlements en vigueur, visant à garantir que chaque dépense soit justifiée, validée et conforme aux objectifs budgétaires prédéterminés.

En effet, le contrôle de l'exécution budgétaire local implique plusieurs dimensions, notamment la conformité juridique, qui veille à ce que les procédures financières respectent les cadre législatif et règlementaire ; la régularité comptable, assurant une tenue rigoureuse des comptes et des rapports financiers ; et l'efficience des dépenses publiques, qui mesure

243 HASSANA (Barnabas), « L'évolution des finalités du contrôle de la dépense publique au regard des nouvelles réformes de finances publiques camerounaises », IMJST, Vol. 5, no 7, juin 2020, pp. 1227 - 1240, p. 1228.

244 Ibid.

245 Idem.

246 Idem.

75

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

l'utilisation optimale des ressources disponibles pour atteindre des résultats escomptés. Autrement dit, la régularité implique non seulement la conformité (Paragraphe I), mais aussi la règle du service fait (Paragraphe II).

Paragraphe I : La conformité

La conformité dans le cadre de la régularité des opérations budgétaires locales implique que les dépenses et les recettes des CTD soient strictement alignées sur les lois, les règlements et normes établis, garantissant ainsi une utilisation appropriée et justifiable des fonds publics. Cette conformité est surveillée par divers mécanismes de contrôle. Les agents et organes de contrôle de régularité jouent un rôle déterminant pour assurer la conformité formelle (A) et la conformité matérielle (B).

A- La conformité formelle

La conformité formelle dans le cadre du contrôle de régularité est l'objectif poursuivi par les agents comme le comptable public et le contrôleur financier. Ces acteurs vérifient la régularité des opérations budgétaires, notamment le contrôle de la qualité de l'ordonnateur, le contrôle des pièces justificatives, etc.

Le coeur du contrôle de la qualité de l'ordonnateur par le comptable public ne fait pas de difficulté : ainsi que l'indique la lettre de l'article 19 du décret de 2012, il s'agit de contrôler la qualité de l'ordonnateur qui a signé l'ordre de payer, adressé au comptable public, le « mandat » qui constitue l'ordonnancement247. Ce contrôle comprend trois points bien identifiés : d'abord, vérifier que le mandat est signé et par qui ; ensuite vérifier si le signataire a bien été nommé ordonnateur de la CTD ; si ce n'est pas le cas, vérifier si le signataire a reçu délégation de l'ordonnateur et si le mandat entre dans le champ de sa délégation248.

La vérification de ce que l'engagement juridique a été pris par la personne juridiquement compétente pour engager la CTD ou un établissement peut en revanche, sembler pertinente et consistante : on peut estimer qu'il est du rôle du comptable public de bloquer une dépense correspondant à une subvention, un contrat, un recrutement, une prestation résultant d'un acte pris incompétemment.

247 DUTHEILLET DE LAMOTHE (Louis), « Étendu du contrôle de la qualité de l'ordonnateur par le comptable », G&FP, 2018/4, no 4, pp. 94 - 99, p. 94.

248 Ibid.

76

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Mais un tel contrôle nous semble impossible : il se heurte frontalement au principe selon lequel les comptables : « n'ont pas le pouvoir de se faire juges de la légalité » des actes administratifs249.

Le comptable public doit donc en principe tenir pour légaux les justificatifs qui lui sont donnés par l'ordonnateur, qu'il s'agisse de normes générales ou de décisions administratives non règlementaires. Le reste regarde le respect des contrôles prévus par la nomenclature, ce qui n'interdit pas d'ailleurs au comptable d'interpréter les actes qui lui sont fournis et de vérifier que les justificatifs sont précis, complets et cohérents.

Les opérations de liquidation sont effectuées en principe à la demande des créanciers. Les ordonnateurs - liquidateurs, au vu des pièces justificatives, procèdent à la liquidation après vérification de ces pièces.

Au Cameroun comme en France, le contrôle de la loi de finances repose sur le contrôle des pièces relatives aux opérations budgétaires250. Il ne s'agit pas ici de vérifier la juridicité ou la légalité des opérations financières, mais plutôt procéder au contrôle des pièces relatives aux opérations c'est - à - dire au recouvrement251. C'est ainsi que toute proposition d'engagement de la dépense par exemple quelle que soit sa nature (décret, arrêté, lettre de commande, contrat, etc.), doit être soumis au contrôleur avec des pièces justificatives. À ce titre, en tant qu'agent désigné par le ministre des finances pour garantir en ses lieux et place, l'orthodoxie dans l'exécution des budgets publics à travers des avis et visas, le contrôleur financier, assure à cet effet, la centralisation des opérations budgétaires des ordonnateurs auprès desquels il est placé, par une bonne tenue des fiches de suivi des engagements et des ordonnancements252.

L'absence de visa du contrôleur financier est un cas de suspension absolue de paiement pour le receveur municipal. Le délai prévu pour l'apposition dudit visa est de 72 heures. Ce principe peut être atténué lorsque ce dernier a adressé une demande d'informations

249 CE, Sect., 1971 - 02 - 05, Ministre de l'économie et des finances c/ Sieur BALME, p. 105, « (...) qu'il

résulte de ces dispositions que les comptables doivent exercer leur contrôle sur la production des justifications mais alors même qu'il leur appartient, pour apprécier la validité des créances, de donner aux actes administratifs une interprétation conforme à la règlementation en vigueur, ils n'ont pas le pouvoir de se faire juges de leur légalité ».

250 HASSANA (Barnabas), « L'évolution des finalités du contrôle de la dépense publique au regard des nouvelles réformes de finances publiques camerounaises », op.cit., p. 1229.

251 Ibid.

247 « Le contrôleur financier : juge de la régularité et acteur essentiel dans la chaîne d'exécution du budget de l'État », Disponible en ligne sur https://www.dgb.cm/le-controleur-financier-juge-de-la-regularite-et-acteur-essentiel-dans-la-chaine-dexecution-du-budget-de-letat, op.cit.

77

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

ou de documents complémentaires. Dans ce cas, le délai est suspendu jusqu'à la production des informations et documents sollicités. Concrètement, le contrôle est rendu possible du fait de la transmission au contrôleur financier, de toutes les pièces justifiant l'engagement de la dépense.

C'est ainsi que le contrôleur se livre alors à l'examen de la régularité juridique c'est-à-dire imputation des crédits et disponibilité des crédits. Ici, le contrôle est nécessairement plus formel que celui exercé au stade de l'engagement de la dépense253. Le contrôleur financier et comptable qui, sont les principaux intervenants dans le circuit se soucient accessoirement si la dépense engagée ordonnancée est légale, leur souci premier porte sur l'existence de certaines pièces précises qui sont des conditions sine qua none de la suite à donner a1 l'opération.

C'est ainsi que le contrôleur vérifie certes la régularité du dossier de l'engagement de la dépense, de l'accréditation du gestionnaire du crédit, du niveau des prix dans la mercuriale lorsqu'il s'agit d'un marché public, de l'existence des crédits, mais surtout il assure que les pièces y relatives sont conformes. Dans d'autres pays, le visa d'engagement de la dépense publique est une exigence et par conséquence constitue la pièce maîtresse sur laquelle porte le contrôle financier à cette étape de la dépense du droit commun. Pour ce qui est des comptables par exemple, ils ne s'attèlent qu'à vérifier les pièces sanctionnant le passage dans les étapes précédentes d'engagement, de la liquidation et de l'ordonnancement.

Outre la conformité formelle, la régularité budgétaire implique également la conformité matérielle.

B- La conformité matérielle

Les bonnes pratiques imposent la conformité de la pratique budgétaire aux principes, règles et procédures consacrées par la loi et règlement. Autrement dit, dans un État de droit, l'ensemble des activités politiques, sociales et financière est régi par des règles et principes juridiques254. C'est bien - sûr pour répondre à cette exigence d'État de droit que le système de contrôle de conformité est instauré. Ce contrôle a pour objectif de vérifier l'exacte application des règles et principes dans un but préventif et répressif. Pour le faire, les organes ou institutions de ce contrôle doivent s'appuyer sur des règles et principes budgétaires255.

253 HASSANA (Barnabas), « L'évolution des finalités du contrôle de la dépense publique au regard des nouvelles

réformes de finances publiques camerounaises », op.cit., p. 1229.

254 Ibid.

255 Idem.

78

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Le droit financier est innervé par un ensemble des règles et principes. L'exercice du contrôle de conformité doit reposer avant tout sur l'exploitation des données contenues dans la loi de finances de l'année et dans les documents comptables des administrations financières. Son efficacité suppose une véritable implication des organes et le souci d'un examen scrupuleux des règles et principes qui peuvent être comme des véritables boussoles pour ces derniers256. Autrement dit, les principaux acteurs intervenant dans les différentes étapes ou qui interviennent lors de la collecte des recettes et d'engagement des dépenses publiques doivent respecter les règles et principes qui encadrent ces processus. C'est d'ailleurs l'occasion pour les contrôleurs de s'assurer le respect par les principaux intervenant dans les processus de l'autorisation accordée par le paiement, même si celle - ci n'a qu'une valeur habilitative257 et non impérative par rapport à l'ordonnateur de crédit qui est, aucunement obligé d'effectuer la dépense autorisée telle quelle258.

Ainsi, l'appréciation de l'opportunité de la dépense par exemple revient à l'ordonnateur, seulement celui - ci n'a pas la faculté de franchir la barre de crédit autorisée par la loi de finances. La dépense autorisée n'est pas potentielle, elle n'est pas encore réelle encore faut - il engager. Et bien plus, la conformité matérielle en dépit de dysfonctionnement pratique propre à la procédure camerounaise de contrôle de la dépense publique qui, pour les différents organes de contrôle d'insister sur les formalités259, la régularité matérielle porte tout de même sur le fond des règles elles - mêmes. En principe il s'agit de vérifier l'exacte application des différents instruments juridiques qui gouvernent les finances publiques. Ces instruments juridiques sont entre autres les lois et règlements et éventuellement la constitution voire les conventions intégrées dans l'ordre juridique financier interne260. Ces acteurs doivent également vérifier la conformité des opérations aux principes telles que le principe d'annualité, le principe d'équité, le principe de la spécialité, le principe d'unité, le principe de l'universalité.

Les contraintes relatives à la bonne exécution des budgets des CTD imposent le respect des règles, principes et procédures par tous les intervenants dans la chaîne de l'exécution budgétaire. Il en est de même des projections effectuées en amont de l'exécution

256 Idem.

257 BIDIAS (Benjamin), Les finances publiques et l'Économie financière de la République fédérale du Cameroun, 1ere éd., 1971, p. 69.

258 BILOUNGA (Steve - Thiery), La réforme du contrôle de la dépense publique au Cameroun, op.cit., p. 324.

259 Ibid.

260 CONAN (Mathieu), La non obligation de dépenser, Thèse de doctorat en Droit Public, Paris II, 2004, pp. 48 et suivantes.

79

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

afin de satisfaire aux exigences de crédibilité et de sincérité des budgets et des comptables publics. Autrement dit, les bonnes pratiques imposent la conformité budgétaire aux principes, règles et procédures consacrées par la loi et règlements.

Nous pouvons ainsi dire non sans quelques raisons, que l'un des soucis majeurs du contrôle de conformité réside dans l'optique de préserver cette égalité financière qui est d'ailleurs gage de l'État de droit financier. En réalité, la conformité dont il est question c'est la conformité de ce qui est prévu par les textes et ce qui est finalement, ou entrain d'être réalisé. À titre illustratif, il s'agit entre autres :

- Le strict respect de la séparation des fonctions d'ordonnateur et de comptable afin de garantir la sécurité des fonds publics et assurer une division rationnelle du travail ;

- Le respect du calendrier budgétaire par divers intervenants261 ;

- Le respect de la règlementation en matière de commande publique ;

- Le respect par des divers acteurs budgétaires de leurs rôles respectifs ; - Le respect des différentes étapes de la dépense publique262.

La préservation de la légalité financière a pour conséquence l'usage normal des derniers des CTD toute chose qui concourt à l'amélioration des conditions de vie des CTD, ou mieux de sa population. En matière financière, le principe de légalité suppose que toutes les opérations financières réalisées par les personnes publiques doivent être encadrées et contenues dans les textes juridiques en emportant toutes les conséquences possibles à tout acte juridique. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la conformité est un moyen de concrétisation du principe de la légalité financière. Que ce soit une vérification des règles de fond ou un contrôle des règles de forme, l'objectif final est d'assurer une opération légale des recettes ou des dépenses263.

Par contrôle de conformité, la sécurité et même l'intégrité des opérations escomptées en fin de compte par le principe de la légalité sont garanties, au bénéfice de l'intérêt général. C'est ce qui justifie le besoin de renforcer ces contrôles dans le circuit de réalisation de la dépense au Cameroun et ceci dans l'optique de parvenir à une bonne maîtrise de cette opération financière que le principe de la légalité financière recherche264. La conformité est

261 BILOUNGA (Steve - Thiery), op.cit., p. 326.

262 BOUVIER (Michel) et autres, Finances Publiques, Paris, LGDJ, 1993, p. 289.

263 HASSANA (Barnabas), « L'évolution des finalités du contrôle de la dépense publique au regard des nouvelles réformes de finances publiques camerounaises », op.cit., p. 1229.

264 Les étapes dont il est question sont : engagement, liquidation, ordonnancement et paiement.

80

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

l'une des exigences de la régularité, mais il ne faut pas perdre de vue que la règle du service fait également partie intégrante des dimensions de la régularité.

Paragraphe II : La règle du service fait

La règle du service fait revêt une importance capitale dans le cadre du contrôle de la régularité des opérations budgétaires. Cette règle, qui régit les relations entre l'administration publique et ses fournisseurs ou prestataires de services, constitue un pilier essentiel de la gestion transparente et efficace des ressources publiques au niveau local.

Cependant, cette règle est non absolue dans la mesure où elle est assortie de quelques dérogations. C'est la raison pour laquelle nous examinerons la consistance de la règle du service fait (A), et les exceptions (B) à ladite règle.

A - La consistance de la règle du service fait

La règle du service fait, édictée par le seul règlement général de la comptabilité publique, interdit, en principe, les paiements des dépenses publiques avant que les bénéficiaires aient exécutés les prestations qui en sont les contreparties265. Comme on n'ose pas la qualifier de principe général de droit - ce qu'elle n'est pas - on appelle la règle du service fait, dans la littérature administrative, « règle fondamentale de la comptabilité publique », « pilier fondamental du droit de la comptabilité publique »266, « pièce maîtresse du droit public financier »267, etc. Les expressions ne manquent pas pour dire son importance, même si cela ne dit rien sur sa portée ni son insertion dans la hiérarchie des normes.

Naturellement, aucun texte ne définit ce qu'est le « service fait ». Mais la notion même de « service fait » trahit l'origine de cette expression : le service dont il est question est celui du fonctionnaire, ou plus généralement l'agent public : c'est une « règlementation déjà ancienne et confirmée par le statut général comme par les principes de la comptabilité publique »268. Le fonctionnaire fait son service, on le paie, il ne le fait pas...en principe, on ne le paie pas. C'est d'ailleurs en matière de fonction publique que la règle de service fait donne lieu à l'essentiel de la jurisprudence et des écrits doctrinaux. Mais, même en matière de

265 CLAMOUR (Guylain), TERNEYRE (Philippe), Financement et contrats publics, éd. Cream, p. 32.

266 LEFEBVRE (Barbara), Une règle d'or de la comptabilité publique : le paiement après service fait, Rev. Trésor, 1995, p. 667.

267 AMSELEK (Pierre), Une instruction en clair - obscur : la règle du service fait. Mélanges en l'honneur de P - M. GAUDEMET, Economica, 1984, p.421.

268 PLANTEY (Alain), La Fonction Publique, Traité Général, Litec, 2e éd., 2001, no 1235.

81

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

fonction publique, la règle est tout sauf simple : le service partiellement fait, le service mal fait, le service impossible, etc., donnent lieu à des discussions montrant que la notion de service fait n'est pas aussi manichéenne qu'il paraît. Le Professeur AMSELEK a pu parler à son sujet d' « institution en clair - obscur ».

Toute théorique, quel que soit sa pertinence, n'a de réelle importance qu'une fois traduite dans la réalité concrète quotidienne269. C'est ainsi que la régularité formelle tire toute sa pertinence lorsqu'elle est traduite sur le plan matériel ou lorsqu'elle est effective.

Et comme la précision en vaut la règle, il n'est pas exagéré de préciser que, le contrôle de l'effectivité a toujours existé au Cameroun contrairement à ce beaucoup le faisaient remarquer. Ce contrôle n'était pas seulement trop développé. Les récentes réformes des finances publiques270 engagées par les autorités camerounaises ont davantage milité dans le sens de renforcement du contrôle de l'effectivité de la dépense publique. Autrement dit, le contrôle de la régularité substantielle ou matérielle n'était pas trop ressenti jusqu'à une date récente. En dépit de la forte concentration du système de contrôle des finances publiques camerounaises au contrôle de la régularité, les récentes réformes ont pu instaurer plus que par le passé, un mariage assez serré entre le contrôle de la régularité formelle et le contrôle de la régularité matérielle271 ou d'effectivité. C'est d'ailleurs une bonne homogénéité entre le formel et le matériel dans la mesure où, le respect des règles de forme n'exclut pas la violation de celles de fond. Pour dire autrement, le respect des règles formelles peut mettre un pan de voile sur des irrégularités dans la réalisation physique272 de la dépense.

L'effectivité matérielle ou le service fait, est donc une investigation qui vise pour le contrôleur de se rassurer que la prestation qui a présidé à l'initiative de la dépense publique a été bel et bien réalisé273. Ainsi, les contrôleurs doivent, avant toute certification ou liquidation, s'assurer que les prestations et les livraisons constituent l'équivalent réel des sommes à décaisser et qu'elles ont été effectivement exécutées selon les règles de l'art274. Le contrôle de conformité matérielle vise donc une proportionnalité entre les prestations et les sommes à

269 HASSANA (Barnabas), « L'évolution des finalités du contrôle de la dépense publique au regard des nouvelles réformes de finances publiques camerounaises », op.cit., p. 1231.

270 Voir à cet effet l'article 2 de la loi no 2007/006 du 26 décembre 2007 portant régime financier de l'État du Cameroun (dont le régime de 2018 n'a pas explicitement abrogé).

271 BILOUNGA (Steve - Thiery), op.cit., p. 320.

272 Ibid.

273 Idem., p. 341.

274 Idem.

82

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

décaisser. Mais en sus de cela, ce contrôle a aussi pour objectif le respect des standards qualitatifs.

La règle du service fait ne voudrait pas tout simplement signifier la réalisation physique d'un ouvrage ou d'une prestation. Autrement dit, la livraison d'un bien ou la prestation de service à elles seules ne suffisent pas pour parler d'effectivité275. Il y a effectivité si et seulement s'il existe une équivalence entre le service rendu et la quantité ou le montant des crédits à sortir de la fortune publique276. Ainsi donc, contrôler l'effectivité signifie tout d'abord, s'assurer que les prestations ou services réalisés sont équivalents des sommes que l'on apprête à sortir des caisses de l'État ou des CTD.

Ainsi, le but n'est pas d'appauvrir l'agent qui rend service à l'État ou à la collectivité territoriale par la réalisation des prestations, ni de l'État ou de la CTD qui bénéficie des prestations et paie la créance ainsi générée. Mais qu'il y a une sorte d'égalité ou équivalence entre les sommes et les prestations afin qu'aucune des parties ne soit lésée.

Le contrôle du respect des standards qualitatifs se justifie par le fait que, dans certaines situations et qui est d'ailleurs récurent au Cameroun, d'importantes sommes d'argent étaient décaissées sans une quelconque prestation en contrepartie277. On dira alors que le contrôle de l'effectivité a un double objectif. En dehors du fait qu'il doit veiller à l'équivalence, il doit également assurer que les prestations ont été physiquement réalisées selon les règles de l'art278. Notamment en respectant les critères et standards qualitatifs en rapport avec la réalisation des ouvrages ou des services des CTD.

Même si la règle du service fait est prise en compte par le comptable public, celle - ci demeure cependant assortie de dérogation.

B- Les exceptions à la règle du service fait

La règle du service fait dans le cadre du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun stipule que les paiements ne peuvent être effectués que pour des services réellement fournis, des travaux effectivement réalisés, ou des biens effectivement livrés. Cependant, il existe des exceptions à cette règle pour répondre à certaines situations

275 HASSANA (Barnabas), op.cit., p. 1231.

276 Ibid.

277 Idem., p. 1232.

278 Guide Pratique du contrôle budgétaire élaboré par la Direction Générale du Budget, version de mars 2002, p.

40.

83

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

spécifiques. Si la règle du service fait était aussi simple que d'aucuns le prétendent et si elle avait la valeur quasi - constitutionnelle (puisqu'il est question de protection des derniers publics) que les comptables publics lui prêtent sans le dire, alors on n'y toucherait qu'avec stupeur et tremblements279. On le fait au mieux par voie règlementaire - qui est effectivement le niveau, dans la hiérarchie des normes, auquel cette supposée « règle d'or » se situe - mais aussi et surtout par de simples circulaires et autres directives émanant de la direction de la comptabilité publique ou visées par elle280.

Au titre des aménagements textuels, on trouve naturellement le régime des avances du Code des marchés publics281, les acomptes, les dépenses d'urgence et les indemnités et autres dépenses obligatoires.

En ce qui concerne les avances, elles peuvent être accordées aux prestataires, fournisseurs, ou entrepreneurs dans le cadre des marchés publics pour faciliter l'exécution des travaux, la fourniture de biens ou de services. Ces avances sont généralement prévues dans les termes du marché et sont remboursables sur les paiements futurs.

S'agissant des acomptes, ils peuvent être versés en cours d'exécution des marchés publics, sur la base des prestations partiellement réalisées, après vérification et certification par les services compétents.

En cas d'urgence ou de force majeure, des dépenses peuvent être engagées et payées avant la réalisation complète du service ou la livraison des biens. Cela inclut les situations d'urgence, les catastrophes naturelles, ou tout autre évènement nécessitant une intervention rapide282.

Concernant les indemnités et autres dépenses obligatoires, certaines dépenses comme les indemnités, les pensions, et les traitements des agents publics peuvent être payées sans exigence préalable de service fait283.

Cependant, lorsque les règles régissant la régularité des opérations budgétaires ne sont pas respectées, la responsabilité des agents publics (agents publics internes aux CTD) chargés de l'exécution et du contrôle budgétaire local peut être engagée.

279 CLAMOUR (Guylain), TERNEYRE (Philippe), Financement et contrats publics, op.cit., p. 36.

280 Ibid.

281 Idem.

282 Idem.

283 Idem.

84

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

SECTION II : L'ENGAGEMENT DE LA RESPONSABILITE DES AGENTS
PUBLICS DU FAIT DES IRREGULARITES

L'engagement de la responsabilité des agents publics en raison des irrégularités budgétaires constitue un sujet d'une importance capitale dans le domaine de la gestion des finances publiques. Cette question soulève des enjeux majeurs en termes de transparence, d'intégrité et de bonne gouvernance. Fondée sur des principes juridiques stricts, cette responsabilité est encadrée par des mécanismes de contrôle rigoureux et peut entraîner des conséquences sévères pour les agents fautifs.

Ainsi, il convient d'analyser d'une part, la responsabilité financière et budgétaire des agents publics des CTD (Paragraphe I), et d'autre part, la responsabilité pénale des agents publics du contrôle de l'exécution du budget des CTD (Paragraphe II).

Paragraphe I : La responsabilité financière et budgétaire des agents publics des CTD

La responsabilité financière et budgétaire des agents publics des CTD s'inscrit dans le cadre de la bonne gouvernance et de la gestion transparente des ressources publiques. Celle - ci revêt, une importance particulière dans un contexte ou la décentralisation est présentée comme un levier majeur pour le développement local et la participation citoyenne.

L'examen de la responsabilité financière et budgétaire des agents publics des CTD consiste à analyser la responsabilité financière de l'ordonnateur (A), ainsi que la responsabilité budgétaire du comptable public (B).

A - La responsabilité financière de l'ordonnateur

La responsabilité financière des ordonnateurs s'inscrit dans la problématique plus globale de la modernisation des finances publiques ou, si l'on veut, de la gouvernance financière284. Elle marque un saut qualitatif vers la recherche de la performance dans les administrations publiques. Faut - il le rappeler, l'ordonnance no 62/OF du 7 février 1962 portant régime financier de la République Fédérale du Cameroun avait consacré un budget de moyens285. Celui - ci se caractérisait par le manque de prévisibilité à moyen terme, surtout, par un manque de contrôle de performance. Mais avec la raréfaction des ressources, la

284 ENGOUTOU (Jean - Luc), NGUECHE (Sylvie), MBALLA ELOUNDOU (Aimé Christel), « La responsabilité financière des ordonnateurs en droit public camerounais », RFFP, no 157, 2022, p. 95.

285 ENGOUTOU (Jean - Luc), NGUECHE (Sylvie), MBALLA ELOUNDOU (Aimé Christel), « La responsabilité financière des ordonnateurs en droit public camerounais », op.cit.

85

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

démocratisation et la diffusion de la culture de la performance au sein des couches socio - économiques, le budget de moyen a montré des signes d'essoufflement286.

La responsabilité financière de l'ordonnateur dans le cadre du contrôle de régularité est un sujet crucial pour assurer la bonne gestion des ressources publiques. Tout d'abord, l'ordonnateur, qui peut être le maire ou le président du conseil régional est chargé de l'exécution du budget de la collectivité locale. Il doit veiller à ce que les dépenses respectent les orientations budgétaires et les règles de la comptabilité publique. Ensuite, l'ordonnateur est tenu de rendre des comptes sur l'utilisation des fonds publics. Cela signifie qu'il doit fournir des justificatifs de toutes les dépenses engagées et garantir la transparence dans la gestion financière de la collectivité locale.

Par ailleurs, la responsabilité financière de l'ordonnateur implique également une obligation de gestion rigoureuse des fonds publics. À ce titre, il doit s'assurer que les dépenses sont effectuées dans le respect des règles de la comptabilité publique et dans l'intérêt général.

Tout manquement à ces obligations peut être qualifié de faute de gestion et, par voie de conséquence, entraîner des sanctions.

Contrairement à l'État de droit antérieur, la faute de gestion fait désormais l'objet, depuis 2018, d'une définition expresse dans la législation portant régime financier de l'État et des autres entités publiques. Il s'agit réellement d'une définition si l'on s'en tient, sur le plan formel, aux termes de l'article 87 suivants lesquels287 : « En cas de faute de gestion telle que définie à l'article 88 (...) ». Sur le plan substantiel, l'article 88 (1) de la loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 procède à une déclinaison des éléments qui permettent de reconnaître ou d'identifier la faute de gestion288. En plus de cette innovation, le nouveau régime financier de l'État et des autres entités publiques apporte plus de clarté et d'intelligibilité dans l'appréhension de la faute de gestion, comme pour remédier a1 l'insécurité juridique et judiciaire jusqu'alors prégnante289. En effet, l'article 88 (1) de la loi de 2018 précitée, définit la faute de gestion comme : « tout acte, omission ou négligence commis par tout agent de

286 Ibid.

287 Idem.

288Idem.

289 En se contentant d'énoncer, en son article 51 (1) que : « L'ordonnateur a la responsabilité de la bonne exécution des programmes [...] ». Cette disposition a son pendant au niveau local dans la loi de 2019 portant CGCTD. Il s'agit en effet de l'article 466 aux termes duquel : « Les ordonnateurs sont tenus de rendre compte de l'exécution des programmes et projets ».

86

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

l'État, d'une Collectivité territoriale décentralisée ou d'une entité publique, par tout représentant, administrateur ou agent d'organismes, manifestement contraire à l'intérêt général ».

»290.

Pour mesurer toute la portée de l'innovation de cette disposition, il convient de rappeler aux souvenirs la définition antérieure de la faute de gestion, telle que posée par l'article 3 de la loi no 74/18 du 5 décembre 1974 relative au contrôle des ordonnateurs, gestionnaires et gérants des crédits publics et des entreprises de l'État, modifiée par la loi no 76/4 du 8 juillet 1976 : « Est considérée comme irrégularité au sens de la présente loi, toute faute de gestion préjudiciable aux intérêts de la puissance publique (...)

Chef de la structure administrative pour le fonctionnement de laquelle ont été affectés des crédits, la responsabilité de l'ordonnateur ne se limite pas aux aspects strictement financiers291. Elle couvre aussi tous les actes de sa gestion tant administrative que politique, et est engagée dès la commission d'une faute de gestion292. En matière financière en général et comptable en particulier, les articles 3 et 6 de loi du 5 décembre 1974 relative au contrôle des ordonnateurs, gestionnaires de crédits publics et des entreprises d'État, modifiée par la loi du 8 juillet 1976 ont dégagé, de manière non exhaustive, les différentes irrégularités constitutives de la faute de gestion, c'est - à - dire, préjudiciable aux intérêts de la puissance publique293. Il s'agit de l'engagement d'une dépense sans avoir qualité pour le faire, sans crédits disponibles ou sans pièces justificatives ; de l'engagement d'une dépense sans visa ou réquisition de l'autorité compétente ou sans justification du service fait ; de la passation des marchés ou des recrutements en violation de la règlementation en vigueur en la matière ; de la modification irrégulière de l'affectation des crédits ou de l'utilisation à des fins personnelles des agents ou des biens de l'État294.

Sans préjudice des poursuites susceptibles d'être engagées devant les juridictions répressives compétentes lorsque la faute de gestion tend à se muer à un détournement de derniers publics, la responsabilité financière de l'ordonnateur est engagée au Cameroun

290 Cette définition et cette catégorisation sont reprises par les articles 4 (1), 10 et 12 du décret no 2020/375 du 7

juillet 2020 portant règlement général de la comptabilité publique.

291 BILOUNGA (Steve Thiery), « Les relations entre l'ordonnateur et les comptables à la lumière de la loi du 26 décembre 2007 portant régime financier de l'État du Cameroun », G&FP, 2017/3, no 3, pp. 109 - 116, p. 110.

292 Ibid.

293 Idem.

294 BILOUNGA (Steve Thiery), « Les relations entre l'ordonnateur et les comptables à la lumière de la loi du 26 décembre 2007 portant régime financier de l'État du Cameroun », op.cit., p. 111.

87

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

devant le CDBF qui, manifestement officie en tant que juge de gestion alors qu'il n'en est pas un en principe, eu égard de son essence administrative295.

En tranchant cette question, née du conflit des lois, l'institution supérieure de contrôle s'affirme comme le seul organe compétent en la matière au Cameroun, à l'exclusion de tout autre organe administratif, notamment le CDBF rattaché aux services du CONSUPE. La loi portant régime financier de l'État et d'autres entités publiques du 11 juillet 2018 a transféré cette compétence à la juridiction des comptes, pour se conformer aux standards internationaux et aux directives communautaires. C'est en application de ces nouvelles dispositions que la Chambre des comptes de la Cour suprême a été saisie d'une dénonciation de mauvaise gestion visant le Maire et le Receveur municipal de la commune de NGOMEDZAP.

Sur la question d'un éventuel conflit de loi et de compétence entre le CDBF et la Chambre des comptes de la Cour suprême, la juridiction financière a apporté une réponse sans équivoque dans son arrêt affirmant : « que l'exclusivité du contrôle juridictionnel des entités publiques et autres entités publiques étant constitutionnellement dévolue à la Chambre des comptes, la sanction des irrégularités et fautes de gestion ressortit logiquement de la compétence de cette juridiction »296. De cet arrêt, il découle que le CDBF ne saurait conserver sa compétence en matière de sanction de la faute de gestion. L'institution supérieure de contrôle du Cameroun confirme ainsi, sa compétence exclusive en matière de sanction juridictionnelle de la faute de gestion. À ce titre, cette juridiction peut prononcer en fonction des cas, des amendes spéciales, des mises en débet ou des déchéances. Les premières sanctions sont infligées en fonction de la valeur du préjudice subi par la personne publique. Leur montant varie entre 200 000 et 2 000 000 FCFA. Les mises en débet, quant à elles, sont mises à la charge de l'agent fautif pour le montant du préjudice réel subi par la personne publique. Les déchéances, enfin, sont constituées par des interdictions momentanées d'assumer certaines fonctions publiques.

L'ordonnateur n'est pas le seul responsable devant la juridiction financière, le receveur municipal, peut également voir sa responsabilité engagée du fait des irrégularités.

295 C'est un organe administratif à fonctionnement quasi juridictionnel rattaché au ministère délégué à la présidence de la République chargé du contrôle supérieur de l'État. Il est chargé de prendre des sanctions à l'encontre des agents publics posant des actes en violation de l'orthodoxie financière publique.

296 Arrêt no 01/CDC/CSC/SR/DBF de la Chambre des comptes de la Cour suprême du 15 février 2024 Commune de NGOMEDZAP c/ Mme TSOUNGUI BLEUE REGINE EPSE BOAMA et M. EKANG EKANG Jules.

88

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

B - La responsabilité financière et budgétaire du comptable public

Les receveurs municipaux et régionaux, comptables publics, sont soumis aux règles de discipline, de tenue de comptes et de comptabilité, de recouvrement des recettes, de paiement des dépenses et de responsabilités applicables aux comptables du Trésor297. À ce titre, ils ont qualité de comptable principal et sont par conséquent astreints à la production d'un compte de gestion298. Les receveurs municipaux et régionaux sont ainsi tenus de rendre compte de leur gestion à raison de la sacralité des derniers publics299, dont ils détiennent l'exclusivité du maniement. En effet, les derniers publics sont des biens publics qui ne peuvent faire l'objet d'utilisation privative et sont de ce fait, dotés d'une protection particulière. Cette protection réside dans l'obligation de reddition des comptes, imposée aux comptables publics. Manier les derniers publics, en dépense ou en recette, expose paraît - il à la tentation300. L'obligation de répondre des irrégularités (faute de gestion, gestion de fait) constatées dans leur gestion, passe par la mise en jeu de leur responsabilité.

Rendant compte personnellement et pécuniairement des opérations financières dont ils ont la charge durant l'exercice de leurs fonctions, les comptables publics voient leur responsabilité engagée lorsqu'un préjudice est causé à la personne publique suite à des irrégularités relevées à l'article 42 du règlement général de la comptabilité publique. Il en est ainsi des déficits de caisse ou des manquants en derniers et valeur ; de défaut de recouvrement de recettes ordonnancées, de paiement irrégulier d'une dépense suite à un défaut de contrôle ou de l'imputation d'une dépense indue à l'État. Le comptable public est alors mis en débet administratif par le ministre des Finances, ou en débet juridictionnel à l'issue d'une procédure devant la Chambre des comptes de la Cour suprême301.

Conformément à l'article 35 alinéa 5 de la loi du 21 avril 2001 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de cette juridiction, lorsque les comptes sont en débet, la Chambre des comptes constitue le comptable débiteur. Le MINFI procède alors au

297 Art. 4 du décret no 94/232 du 5 décembre 1994 précisant le statut et les attributions des receveurs municipaux.

298 AMOUGOU MBETOUMOU (Estelle Delphine), « Aspects de la responsabilité des receveurs municipaux en droit public financier camerounais », IMJST, Vol. 7, no 7, Juillet 2022, pp. 5081 - 5096, p. 5082.

299 Ibid.

300 DUFRESNOY (Philippe), « La responsabilité des comptables publics : une assurance raisonnable de la régularité des comptes », G&FP, 2018/2, no 2, pp. 102 - 104, p. 102.

301 Il convient toutefois de relever la non - conformation jusqu'à ce jour de l'État camerounais au droit communautaire dans le cadre de la CEMAC. En effet, les articles 91 et 92 de la Directive no 02/11 - UEAC - 190 - CM - 22, relative au règlement général de la comptabilité publique nécessite pour sa concrétisation que chaque État membre se dote d'une Cour des comptes. Malgré sa position de proue dans cette communauté, le Cameroun ne s'est pas encore doté de cette juridiction des comptes et se contente encore d'une simple Chambre des comptes.

89

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

recouvrement des sommes dues qui sont réservées, le cas échéant, à la personne morale concernée. Les arrêtés de débets, quel qu'en soit le type, sont exécutoires dès leur notification au comptable concerné et susceptibles de recours devant le juge des comptes sans effet suspensif302.

En ce qui concerne la responsabilité personnelle des comptables publics, elle est mise en oeuvre au travers d'un ensemble des sanctions qui lui sont infligées à titre personnel et qui visent à sanctionner son indiscipline au sein de l'administration, ou alors réprimer toute violation de la loi pénale. Sur le plan disciplinaire, les receveurs municipaux et régionaux sont soumis au pouvoir hiérarchique du Ministre des finances et du Ministre de la décentralisation et du développement local, qui ont le pouvoir d'engager leurs responsabilités disciplinaires. Ainsi, chaque fois qu'ils ont omis d'exécuter leurs missions, ils peuvent voir leur responsabilité être engagée sur le plan disciplinaire. Cette responsabilité permet à l'autorité hiérarchique de prononcer une sanction non pécuniaire contre un agent qui aurait commis une faute de service.

Pour ce qui est de la responsabilité pécuniaire, il s'agit de l'obligation de réparer sur ses fonds propres, le préjudice que le receveur municipal ou régional a causé à la collectivité territoriale. À ce titre, les manquements du comptable public à son obligation de contrôle des actes émis par l'ordonnateur303, son inobservation des règles de la comptabilité publique, bref des irrégularités constatées dans sa gestion, causent à la collectivité locale un préjudice304.

Au regard des irrégularités telles que les fautes de gestion et les gestions de fait, le comptable public peut être l'objet de sanctions par la juridiction des comptes. Ces sanctions peuvent être des amendes, des débets et même des déchéances.

Toutefois, lorsque le préjudice financier est qualifié d'infraction par le CONSUPE, le CDBF ou même la Chambre des comptes de la Cour suprême, le comptable public et l'ordonnateur peuvent voir leur responsabilité pénale engagée.

302 BILOUNGA (Steve Thiery), « Les relations entre l'ordonnateur et les comptables à la lumière de la loi du 26 décembre 2007 portant régime financier de l'État du Cameroun », op.cit.

303 CHOUVEL (François), Finances publiques, Gualino (23e éd.), 2020, p. 160.

304 DUTHEILLET DE LAMOTHE (Olivier), VANDENDRIESSCHE (Xavier), « La notion de préjudice financier en dépenses », GFP, Vol. 100, no 2 - 2020/ Mars - Avril 2020, p. 112.

90

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Paragraphe II : La responsabilité pénale des agents publics du contrôle de l'exécution
du budget des CTD

La responsabilité pénale des agents publics impliqués dans l'exécution du budget des CTD au Cameroun, en raison des irrégularités, est régie par le droit pénal camerounais. En général, les agents publics peuvent être tenus responsables pénalement pour des infractions ayant une incidence financière ou budgétaire.

Il convient donc d'examiner au préalable des faits générateurs de la responsabilité pénale des agents publics internes des CTD (A), avant de s'appesantir sur la mise en oeuvre de cette responsabilité (B) proprement dite par des juridictions répressives.

A - Les faits générateurs de la responsabilité pénale des agents publics internes aux

CTD

Le comptable public voit sa responsabilité engagée lorsqu'il se comporte comme un délinquant, c'est - à - dire que dans la réalisation de ses missions, il commet un acte expressément interdit par la loi305. Dès lors, il tombe sous le coup de la sanction pénale. En effet, le Vocabulaire juridique appréhende la responsabilité pénale comme une obligation de répondre des infractions commises et de subir la peine prévue par le texte qui les réprime306. On déduit donc de cette définition de la responsabilité pénale que, les faits générateurs de celle - ci sont des infractions ayant, dans le cadre des finances publiques locales une incidence financière. La sanction pénale désigne l'ensemble des peines prévues par le Code pénal, qui ont pour objectif de sanctionner l'auteur des infractions pénales telles que la concussion, l'enrichissement illicite, le détournement de derniers publics et la corruption.

Au Cameroun, certains textes précisent les hypothèses suivant lesquelles le comptable public ou l'ordonnateur serait responsable de violation de la loi pénale307. Sans prétendre à l'exhaustivité, l'on peut par exemple mentionner le décret no 94/232 du 5 décembre 1994 précisant le statut et les attributions des receveurs municipaux, en son article 13 qui relève que « Tout receveur municipal qui ne peut établir de distinction entre les fonds et valeurs qu'il détient ès - qualités et ceux qu'il possède à titre personnel, est présumé coupable de concussion ». Or la concussion est réprimée à l'article 137 du Code pénal. Dans le même ordre d'idées, le dictionnaire encyclopédique de finances publiques présente la concussion

305 AMOUGOU MBETOUMOU (Estelle Delphine), « Aspects de la responsabilité des receveurs municipaux en

droit public financier camerounais », op.cit., p. 5084.

306 Ibid.

307 Idem.

91

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

comme une infraction aux règle du droit budgétaire et de la comptabilité publique, et la définit comme le fait d'ordonner l'établissement ou la perception d'impôts, droits ou taxes non autorisées par la loi, ou encore le fait de consentir sans autorisation de la loi, à des exonérations d'impôts, droits ou taxes ou encore le fait de délivrer gratuitement des produits de l'établissement public de l'État308.

En outre, l'on peut par exemple mentionner la Convention interaméricaine de lutte contre la corruption qui définit l'infraction d'enrichissement illicite comme « une augmentation significative du patrimoine d'un fonctionnaire qu'il ne peut raisonnablement justifier par rapport aux revenus perçus légitimement dans l'exercice de ses fonctions »309. Le propre dans cette infraction est qu'une personne voit son patrimoine croître, mais ne peut pas s'appuyer sur ses revenus légitimes pour en justifier raisonnablement la légitimité et la légalité des sources. Ce qui entraîne un allègement, un contournement, ou un renversement de la charge de la preuve. La personne est ainsi, appelée à s'expliquer sur les sources et les moyens d'accroissement de sa fortune, sans que personne ne puisse prouver qu'elle a commis une infraction.

C'est après constatation des infractions susmentionnées (concussion, enrichissement illicite, détournement de derniers publics, corruption...etc.) par les juridictions répressives que, la responsabilité pénale des agents publics internes des CTD chargé de l'exécution et du contrôle budgétaire est mise en oeuvre.

B - La mise en jeu de la responsabilité pénale des agents publics internes aux CTD

Les irrégularités dans l'exécution du budget des CTD peuvent inclure des actes tels que la mauvaise gestion des fonds, le non - respect des procédures légales, l'octroi des contrats sans appel d'offres, entre autres. Lorsque de telles irrégularités sont découvertes, les agents publics responsables peuvent faire l'objet d'enquête et de poursuites pénales.

Au plan pénal, les juridictions répressives ne sont compétentes que si la faute reprochée (faute de service ou personnelle) à l'ordonnateur et au comptable public est constitutive de crime ou de délit, en vertu du principe du droit pénal selon lequel il n'y a pas

308 PHILIP (Loïc), Dictionnaire encyclopédique de Finances publiques, Economica, 1991, p. 1344.

309 Art. IX de la Convention interaméricaine de la lutte contre la corruption du 29 mars 1996.

92

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

d'infraction, pas de sanction sans texte qui les prévoie : « nullum crimen nulla poena sine lege ».

La responsabilité pénale des ordonnateurs, des gestionnaires de crédits et des comptables publics peut être mise en oeuvre dans le cadre des fautes de gestion qui constituent en même temps des infractions pénales.

Compte tenu du développement des poursuites pénales, introduites le plus souvent par les victimes, se constituant partie civile et en déclenchant l'action publique, la responsabilité pénale de ces agents publics se trouve engagée à l'occasion des actes de détournement de derniers publics, de concussion, de la corruption...etc. Il est crucial de noter que la responsabilité pénale nécessite généralement la preuve d'une intention criminelle ou de grave négligence de la part des agents impliqués. Les sanctions peuvent aller de peines d'amende à des peines privatives de liberté, en fonction de la gravité des infractions commises et des circonstances spécifiques de chaque cas.

En ce qui concerne les actes de détournement de derniers publics, ce sera essentiellement l'oeuvre du TCS, du TPI et du TGI. Le TCS sera compétent pour connaître des irrégularités et des fautes de gestion qualifiables de crimes ou de délits, et portant sur des infractions de détournement de derniers publics et des infractions connexes lorsque le préjudice est d'un montant minimum de cinquante millions (50 000 000) FCFA310. Le TPI sera compétent pour connaître des irrégularités et fautes de gestion qualifiables de délits lorsque le préjudice est d'un montant inférieur ou égal à dix millions (10 000 000) FCA. Le TGI quant à lui sera compétent pour connaître des irrégularités et fautes de gestion qualifiables de crimes ou de délits connexes, lorsque le préjudice est d'un montant supérieur ou égal à dix millions (10 000 000) FCFA. L'infraction de détournement de derniers publics par un agent public de l'État ou des CTD est punie d'un emprisonnement à vie311 au cas où la valeur des biens détournés excède cinq cent mille (500 000) francs ; d'un emprisonnement de quinze (15) à vingt (20) ans312 lorsque cette valeur est supérieure à cent mille (100 000) francs et inférieure ou égale à cinq cent mille (500 000) francs et au cas où cette valeur est égale ou

310 Telle est la teneur de l'article 2 de la loi no 2011/028 du 14 décembre 2011 portant création d'un Tribunal Criminel Spécial qui dispose que : « Le Tribunal est compétent pour connaître, lorsque le préjudice est d'un montant minimum de 50 000 000 F CFA, des infractions de détournement de derniers publics et des infractions connexes prévues par le Code Pénal et les Conventions Internationales ratifiées par le Cameroun ».

311 Art. 184, Al. 1 (a) de la loi no 2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code pénal.

312 Ibid., Art. 184, Al. 1(b).

93

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

inférieure à cent mille (100 000) francs, l'emprisonnement est de cinq (05) à dix (10) ans et d'une amende de cinquante mille (50 000) francs à cinq cent mille (500 000) francs313.

En ce qui concerne l'infraction de concussion, elle est prévue par les articles 137 et 142 du code pénal. La concussion est punie d'un emprisonnement de deux (2) à dix (10) ans et d'une amende de vingt mille (20 000) à deux millions (2 000 000) de francs CFA. La juridiction compétente pour connaître de cette infraction est le TGI.

Pour ce qui est de l'infraction de corruption, la CONAC exerce une activité remarquable314. À travers ses rapports, on voit des avancées dans le cadre de la lutte contre cette infraction en général, et d'une volonté dynamique de remplir les missions assignées. La CONAC exerce donc une action conjoncturelle avec les juridictions répressives, en enquêtant sur les cas de corruption et en traduisant les responsables en justice dans le but de promouvoir la transparence dans l'administration publique au Cameroun. L'infraction de corruption est réprimée par les articles 134315 et 134 - 1316 du code pénal camerounais.

313 Idem., Art. 184, Al. 1 (c) de la loi portant code pénal.

314 NDJIE MGBA (Marc Stéphane José), « La lutte contre la corruption au Cameroun : un effort inachevé », RIDC, 2018/70 - 1, pp. 159 - 185, p. 183.

315 En ce qui concerne la corruption active, en principe, l'alinéa 1 de l'article 134 de la loi no 2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code pénal dispose que : « Est puni d'un emprisonnement de cinq (05) à dix (10) ans et d'une amende de deux cent mille (200 000) à deux millions (2 000 000) de francs, tout fonctionnaire ou agent public national, étranger ou international qui, pour lui - même ou pour un tiers, sollicite, agrée ou reçoit des offres, promesses, dons ou présents pour faire, s'abstenir de faire ou ajourner un acte de sa fonction ».

316 En ce qui concerne la corruption passive, en principe, l'alinéa 1 de l'article 134 - 1 de la loi no 2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code pénal dispose à cet effet que : « Quiconque, pour obtenir soit l'accomplissement, l'ajournement ou le refus d'accomplissement d'un acte, soit des faveurs ou des avantages tels que prévus à l'article 134 ci - dessus, fait des promesses, offres, dons, présents ou cède à des sollicitation tendant à la corruption, est puni des peines prévues à l'article 134 alinéa 1 ci - dessus, que la corruption ait ou non produit son effet ».

94

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CONCLUSION DU CHAPITRE I

En conclusion, le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun est axé sur la vérification de la régularité des dépenses et des recettes. Cette approche vise à garantir la conformité des actions financières des collectivités locales avec les lois et règlements en vigueur.

Cependant, pour renforcer l'efficacité du contrôle de la régularité des opérations budgétaires, il est impératif de mettre en place des mécanismes de suivi et d'évaluation plus robuste, permettant une analyse plus approfondie de la performance financière et l'impact des dépenses sur le développement local. Le contrôle de la régularité des opérations budgétaires est essentiel pour assurer la bonne gestion des ressources publiques et maintenir la confiance des citoyens dans leurs institutions locales. En cas de non - conformité aux règles et règlementations en vigueur, des sanctions de nature juridictionnelle ou non juridictionnelle peuvent être appliquées aux agents fautifs des CTD.

Le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun n'est pas exclusivement axé sur la régularité des opérations budgétaires. Celui - ci prend également en compte le contrôle de performance.

95

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CHAPITRE II : UN CONTRÔLE DE PERFORMANCE

Relever le défi de la rationalisation de la gestion publique317 implique de profondes mutations au niveau local, et davantage la revue du système de contrôle des finances locales de façon à le réorienter vers un nécessaire contrôle de performance318. De ce fait, inhérent en toute activité humaine, et encore plus en tout exercice d'un mandat confié, « les contrôles doivent permettre de s'assurer du respect des normes et de l'atteinte des objectifs »319. C'est à ce stade que se trouve le sens du contrôle de performance.

La question de la performance de l'action publique continue à se poser avec acuité dans les stratégies de gouvernance que ce soit sous la pression des idéologies ou sous celle des opinions publiques, nationales ou internationales, de plus en plus éduquées et attentives à l'usage fait de leurs ressources320. En outre, l'exigence de la performance est aussi le fait des bailleurs de fonds vis - à - vis de ceux qui reçoivent des crédits dans le cadre du financement des programmes de développement321. Il y a donc un mouvement généralisé qui amène les administrations à se préoccuper de rendre des comptes de l'usage des derniers publics, et ce, bien au - delà de la question des montants dépensé, au - delà même de la régularité de l'emploi des fonds, pour prouver l'efficacité et l'utilité de la dépense publique322.

En toute évidence, l'appropriation de cette exigence managériale justifie la mesure de la performance budgétaire (Section I) et la prise de mesures contre les décideurs locaux du fait de la contre - performance budgétaire (Section II).

317 À notre sens, cette ambition passe par la maîtrise des dépenses de plus en plus croissantes face à une

raréfaction des ressources publiques, et l'instauration d'une bonne gouvernance financière avec la mise en place de bonnes pratiques de gestion.

318 AKAKPO (Maxime), « Le contrôle de performance : comment et avec qui ? », in MÉDÉ Nicaise., (dir.), La

LOLF dans tous ses états, pp. 153 - 168, cité par AKONO OLINGA André dans sa thèse de doctorat

319 Ibid.

320 AKONO OLINGA (André), op.cit., p. 323.

321 Ibid.

322 Art. 83, al. 2, de la loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 portant régime financier de l'État et des autres entités publiques.

96

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

SECTION I : LA MESURE DE LA PERFORMANCE BUDGETAIRE

La mesure de la performance budgétaire occupe une place centrale dans la gestion financière moderne, offrant un cadre essentiel pour évaluer, ajuster et optimiser l'utilisation des ressources financières au sein des collectivités locales. Ce processus complexe et stratégique dépasse largement la simple comparaison des résultats réels par rapport aux prévisions budgétaires ; il englobe une série de méthodologies sophistiquées et d'indicateurs clés visant à fournir une vue d'ensemble précise et dynamique de la santé financière des collectivités territoriales décentralisées.

Quoi qu'il en soit, la mesure de la performance budgétaire s'effectue par le contrôle des indicateurs de performance (Paragraphe I), et par la densification des procédés de contrôle de performance (Paragraphe II).

Paragraphe I : Le contrôle des indicateurs de performance

Le contrôle de performance de la gestion publique est une option de vérification, qui milite en faveur de la consolidation de la culture de reddition des comptes dans les administrations publiques.

Le contrôle de performance est une « activité permettant de s'assurer de la réalisation des objectifs avec efficacité, efficience et économie, sur la base d'indicateurs prédéfinis, après mise en oeuvre des stratégies, des programmes et des actions de l'administration avec l'allocation conséquente des ressources publiques ».

Le contrôle des indicateurs de performance est conditionné par le choix des objectifs (A) et indicateurs (B).

A - La prédéfinition des objectifs budgétaires des CTD

La gestion budgétaire par objectifs (GBO) est une nouvelle approche de gestion du budget de l'État et même des CTD323. Elle propose de gérer les ressources financières et humaines de façon efficiente et efficace pour réaliser des objectifs précis et apporter une plus grande transparence dans l'exécution des politiques publiques324. Elle s'articule autour d'un budget présenté sous forme programmatique et d'une démarche de performance325.

323 « Comprendre la GBO - Gestion du Budget par Objectifs », Disponible en ligne sur

https://www.gbo.tn/fr/comprendre-la-gbo, Consulté lundi, 17 juin 2024 à 19h26 min.

324 Ibid.

325 Idem.

97

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Le programme est la pierre angulaire de cette approche de gestion du budget, « il traduit une politique publique déterminée relevant d'une même mission et regroupe un ensemble homogène de sous - programmes et d'activités contribuant directement à la réalisation des objectifs de la politique publique dudit programme »326.

La définition des objectifs budgétaires des CTD est crucial dans la gestion financière et opérationnelle de ces entités. Ces objectifs servent à orienter les efforts des CTD vers l'atteinte des résultats escomptés, tout en assurant leur alignement avec les objectifs globaux de ces entités infra - étatiques327. Pour ce faire, le processus commence par une analyse approfondie des besoins financiers spécifiques de chaque CTD, incluant les prévisions de revenus, les coûts fixes et variables, ainsi que les investissements requis pour soutenir les activités opérationnelles.

La fixation des objectifs budgétaires se fait en utilisant le cadre SMART (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et Temporellement défini), ce qui permet de garantir que les objectifs sont clairs et réalisables. Il est également crucial d'impliquer les responsables des CTD et d'autres parties prenantes dans ce processus pour assurer une compréhension commune et un engagement envers les objectifs définis. Cette consultation favorise une meilleure acceptation des objectifs et encourage une approche collaborative pour leur réalisation.

L'utilisation de données historiques et d'analyses de tendances est une pratique courante pour établir des prévisions budgétaires réaliste et précises328. Cela permet aux décideurs d'anticiper les besoins futurs et d'ajuster les objectifs en conséquence. De plus, les objectifs budgétaires doivent être suffisamment flexibles pour s'adapter aux changements imprévus dans l'environnement externe et interne de la collectivité329. Cela nécessite une révision régulière des objectifs pour refléter les ajustements nécessaires et maintenir la

pertinence des objectifs fixés. Une fois définis, les objectifs budgétaires sont mis en
oeuvre à travers une communication claire et une allocation appropriée des ressources nécessaires à leur réalisation. Le suivi rigoureux des performances est assuré à l'aide d'indicateurs clés de performance qui permettent d'évaluer régulièrement les progrès vers

326 « Comprendre la GBO - Gestion du Budget par Objectifs », Disponible en ligne sur

https://www.gbo.tn/fr/comprendre-la-gbo, op.cit.

327 Ibid.

328 Idem.

329 Idem.

98

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

l'atteinte des objectifs. Les résultats obtenus sont ensuite analysés pour identifier les écarts éventuels par rapport aux objectifs et de prendre des mesures correctives si nécessaire330.

Dans le cadre du contrôle des indicateurs de performance, la prédéfinition des objectifs budgétaire des CTD vaut autant que la prédéfinition des indicateurs de performance.

B - La prédéfinition des indicateurs de performance

La prédéfinition des indicateurs de performance est une étape critique dans la planification stratégique des CTD, visant à évaluer efficacement ses progrès et ses résultats. Ce processus commence par une analyse des objectifs des CTD, permettant ainsi de déterminer les domaines clés où la performance doit être mesurée. Chaque indicateur de performance doit être aligné avec les objectifs spécifiques, ce qui nécessite une définition claire et précise de ce que l'on souhaite mesurer. Les indicateurs doivent être pertinents, c'est- à - dire qu'ils doivent véritablement refléter la performance dans le domaine concerné et être significatifs pour les décideurs et les parties prenantes impliquées.

En clair, un bon indicateur doit être pertinent, c'est - à - dire, simple, compréhensible, produit annuellement à un coût raisonnable, mesurable, fiable et vérifiable331. C'est un outil d'évaluation et d'aide à la décision grâce auquel, on va pouvoir mesurer une situation ou une tendance de façon relativement objective, à un instant donné, ou dans le temps et l'espace332. Cette appréhension semble rencontrer l'adhésion de M. Raphaël POLI. Il pense à juste titre, que : « un indicateur doit être pertinent, synthétique ou sélectif, clair et immédiatement interprétable, bien défini et disponible au cours du temps à un coût compatible avec l'usage que l'on attend de son usage »333.

La prédéfinition des indicateurs de performance implique également une sélection judicieuse des données à collecter et des méthodes de mesure à utiliser. Cela inclut souvent l'établissement de benchmarks ou de références pour évaluer la performance actuelle par rapport à des normes ou à des objectifs précédemment définis.

330 Idem.

331 AKONO OLINGA (André), op.cit., p. 325.

332 SOHINTO (David Mahouna), « Les indicateurs de performance vus par un contrôle des finances publiques », in MÉDÉ Nicaise., (dir.), La LOLF dans tous ses états, pp. 243 - 254.

333 POLI (Raphaël), « Les indicateurs de performance de la dépense publique », RFFP, no 82, 2003, pp. 107 - 114.

99

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Une fois les indicateurs définis, il est essentiel d'établir des mécanismes de collecte, de suivi et de rapport des données de manière régulière et systématique. Cela garantit que les informations pertinentes sont disponibles pour évaluer la performance en temps réel et prendre des décisions éclairées.

En fin, la prédéfinition des indicateurs de performance est un processus itératif qui nécessite une révision périodique pour s'assurer que les mesures utilisées restent pertinentes et alignées sur les objectifs organisationnels en constante évolution. Cela permet aux collectivités locales de maintenir sa capacité à répondre aux défis du marché et à saisir les opportunités de croissance tout en assurant une performance optimale à tous les niveaux.

À l'analyse, les indicateurs constituent la représentation de mesures d'un certain nombre de réalités comme : la quantité, la qualité, le temps, au - delà des trois (03) « E »334. Sous ce rapport, les indicateurs de performance participent des exigences de la logique de la gestion par la performance335. Ainsi, il convient de rappeler que cette logique est à l'origine de la réforme du cadre de la gestion publique en vue de l'orienter vers les résultats et la recherche de l'efficacité. Le budget des CTD passe ainsi d'un modèle structuré par nature des moyens avec pour seul contrôle, la conformité avec les autorisations de dépenses, à un modèle structuré par les finalités des politiques publiques, contrôlé par les résultats obtenus ou encore par l'effectivité336. C'est ainsi que le cadre de gestion devient indiqué pour la mise en oeuvre du contrôle de performance par la vérification de ses indicateurs.

Outre le contrôle des indicateurs de performance de la gestion publique, la mesure de la performance prend également en compte la densification des procédés de contrôle de performance.

Paragraphe II : La densification des procédés de contrôle de performance337

La densification des procédés de contrôle de performance représente une évolution cruciale dans la gestion financière moderne. Ce processus complexe et essentiel vise à optimiser la surveillance et la gestion des ressources financières au sein des CTD quelle que soit leur taille ou leur secteur d'activité.

334 AKONO OLINGA (André), op.cit., p. 325.

335 Ibid.

336 EYEBIYI (H. G), GARBA (T), « Finances locales et LOLF : La performance jusqu'au niveau décentralisé ? », in MÉDÉ Nicaise, (dir.), La LOLF dans tous ses états, pp. 203 - 234.

337 AKONO OLINGA (André), Ibid., p. 327.

100

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

En effet, face à un environnement économique de plis en plus compétitif et volatil, les CTD doivent non seulement assurer une gestion rigoureuse de leurs budgets mais aussi pouvoir anticiper et réagir efficacement aux changements et aux défis financiers. Eu égard à ces considérations, la densification des procédés de contrôle de performance se justifie non seulement par la survivance du contrôle de gestion (A), mais aussi par l'émergence de l'évaluation des politiques publiques (B).

A - La survivance du contrôle de gestion338

S'il y a faute de gestion, alors la gestion a été contrôlée, donc l'on peut parler de contrôle de gestion dans la gestion budgétaire locale au Cameroun339. C'est un contrôle qui permet s'intéresse à la performance. À cet esprit, le contrôle de performance est considéré comme « un système de pilotage mis en oeuvre par un responsable de programme dans son champ d'attribution en vue d'améliorer le rapport entre les moyens engagés et soit l'activité développée, soit les résultats obtenus dans le cadre déterminé par une démarche stratégique préalable ayant fixé les orientations »340. À l'analyse, cette définition est celle qui nous est proposée par le rapport de WEISS341. En France, elle a été retenue par la circulaire interministérielle du 21 juin 2001 ayant pour objet, le développement du contrôle de gestion dans les administrations publiques. Le contrôle de gestion devient ainsi, « une impérieuse obligation avec la démarche de performance »342. Il a pour objectif : « d'analyser et de mettre en évidence les sources potentielles d'amélioration de l'efficacité de la gestion »343. Toute chose qui semble être partagée à travers l'affirmation selon laquelle : le contrôle de gestion « a pour but de comparer des résultats par rapport aux objectifs donnés afin de corriger les actions et de rapprocher les résultats des objectifs »344.

En toute évidence, le contrôle de gestion est exercé suivant des spécificités propres à chaque organe qui l'exerce dans une administration, même locale fût - elle. En clair, « il n'existe pas un modèle de contrôle de gestion unique pour toutes les organisations, mais des

338 Idem.

339 Idem.

340 Cette définition est tirée du site officiel du ministère du budget de France : www.performance-publique.budget.gove.fr.

341 Il s'agit du rapport de travail produit par le groupe « amélioration de la gestion publique », encore appelé rapport WEISS d'octobre 2000.

342 MORDACQ (Frank), La LOLF : un nouveau cadre budgétaire pour reformer l'État, Paris, Dalloz, 2006, p. 253.

343 Ibid., p. 254.

344 COURBET (Gérard), « Le contrôle de gestion dans les collectivités territoriales », Politiques et Management Public, no 3, Vol. 20, 2002, pp. 201 - 207.

101

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

modèles multiples de ce contrôle de gestion qui doivent tenir compte des spécificités des administrations pour lesquelles il est développé »345. En outre, le contrôle de gestion est appelé à s'adapter aux caractéristiques des missions, leurs objectifs et davantage le contexte de son implémentation. Les éléments constitutifs du contrôle de gestion sont donc : l'analyse des coûts, l'analyse comparative, les techniques de planification, les outils budgétaires et les indicateurs couplés aux tableaux de bord.

Le développement du contrôle de gestion est fondamental, voire indispensable dans le cadre de la réforme de la gestion publique. Le système de contrôle de gestion vise le contrôle de la mise en oeuvre de la stratégie. Il est distinct du contrôle opérationnel. Le contrôle opérationnel s'appréhende alors comme « le contrôle indissociable des opérations quotidiennes »346. Ce dernier, si son objectif n'est pas de vérifier la réalisation de la stratégie, il constitue néanmoins un préalable quelques fois incontournable à la bonne tenue du contrôle de gestion, dans la mesure où « il permet de créer les éléments fondamentaux du système d'information qui vont être utilisés pour alimenter les outils de contrôle »347. Le contrôle de gestion dans le secteur public apparaît aujourd'hui avec beaucoup de spécificités à côté de son modèle originel. C'est un contrôle qui doit intégrer les réalités selon lesquelles, d'abord, les administrations contrôlées ne sont pas soumises à la concurrence quoiqu'orientées à la logique de performance. Ensuite, c'est un contrôle qui doit dorénavant s'appliquer aux activités de service, différentes de celles industrielles sur lesquelles le contrôle s'abattait déjà. Enfin, ce contrôle doit s'adapter aux spécificités et missions fondamentales des administrations publiques, notamment : les missions régaliennes, les missions de service public et davantage la quête de l'intérêt général.

Au regard des analyses qui précèdent, l'on peut se donner la liberté d'affirmer, que « la performance et le contrôle de gestion sont fortement liés »348. Le contrôle de gestion agit comme un outil de pilotage de la performance. La mesure cde cette dernière se base sur les

345 ZUGUETTA (Stéphane), Le contrôle de la gestion dans les administrations de l'État. Éléments de méthodologie, Paris, Jouve Imprimeur, 2003, p. 18.

346 Ibid., p. 22.

347 Idem.

348 ZAHED (Mahrez), La démarche de performance dans la gestion locale, L'Harmattan, 2017, p. 108.

102

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

outils de la gestion, et ce pour une plus grande transparence dans la gestion349, et donc on ne peut dissocier les deux350.

En tout état de cause, l'intégration de la performance dans la gestion budgétaire locale au Cameroun, légitime la survivance du contrôle de gestion dans l'administration publique en général, et son émergence dans la sphère des services et non concurrentielle.

Hormis la survivance du contrôle de gestion, l'émergence de l'évaluation des politiques publiques constitue également un attribut du contrôle de performance.

B - L'émergence de l'évaluation des politiques publiques351

L'exigence d'un contrôle de performance dans la gestion budgétaire locale, a fait naître la pratique de l'audit et de l'évaluation des politiques publiques au niveau local. Ainsi, « évaluer une politique publique, c'est rechercher si les moyens juridiques, administratifs, financiers mis en oeuvre permettent de produire les effets attendus de cette politique et d'atteindre les objectifs qui lui ont été fixés »352. En bonne logique, une bonne évaluation est une opération spécifique, menée dans le cadre d'une méthodologie précise pilotée par des spécialistes suivant une période bien déterminée. Elle se conclut par la production d'un rapport.

En effet, l'évaluation des politiques publiques s'effectue par la réalisation des audits externes dans ce cadre. Elle s'intéresse le plus souvent, en terme d'efficacité socio - économique, aux impacts lointains des politiques impliquant plusieurs acteurs dont les CTD, et sans se limiter aux actions financées sur crédits budgétaires, alors que la mesure de la performance s'attache à apprécier l'impact de l'action de l'État ou des CTD. Une évaluation permet donc de guider ou réviser le choix des objectifs d'efficacité socio - économiques à retenir en vue de contribuer de manière efficace a1 un impact lointain recherché. Elle permet également d'éclairer les décideurs sur les choix des modalités de mise en oeuvre de politiques susceptibles de les aider à atteindre les objectifs de performance353. L'évaluation apparaît alors, comme « l'activité de rassemblement, d'analyse et d'interprétation de l'information concernant la mise en oeuvre et l'impact de mesure visant à agir sur une situation sociale,

349 GUENOUN (Marcel), Le management de la performance publique locale, Thèse de doctorat en Sciences de

gestion, Université Paul CEZANNE, 2009, p. 217.

350 Ibid.

351 AKONO OLINGA (André), op.cit., p. 329.

352 Décret du 22 janvier 1990 relatif à l'évaluation des politiques publiques en France.

353 MORDACQ (Frank), La LOLF : un nouveau cadre budgétaire pour reformer l'État, op.cit., p. 369.

103

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

ainsi que la préparation de mesures nouvelles »354. Cette réalité n'est pas étrangère dans la gouvernance locale en général, et des collectivités locales en particulier. C'est justement à ce niveau que l'on perçoit une montée en puissance de l'évaluation des politiques publiques. Cette dernière représente un champ particulier d'intervention, une démarche nouvelle pour les collectivités locales et les acteurs propres au secteur local. En effet, ce moyen d'action publique activement vulgarisé par les thèses du New Public Management, « se distille progressivement dans les discours politico - administratifs et s'instillent doucement dans les pratiques au niveau territorial ».

De manière générale, le développement de l'évaluation de politiques publiques au niveau territorial, s'inscrit dans la logique de la décentralisation, qui contribue sans doute à remettre en cause la tradition jacobine du pouvoir hiérarchisé et vertical.

En toute évidence, la pratique de l'évaluation dans la gouvernance locale au Cameroun est émergente355. Cette caractéristique procède de la progressivité qui demeure substantielle à toute réforme. Seulement, cet état de chose ne constitue pas un obstacle à ce que, les évaluations doivent permettre de porter un jugement sur les politiques publiques développées, de s'interroger sur leur adaptation au contexte et aux besoins, sur le niveau des moyens globaux à mettre en oeuvre, sur les opérateurs et les leviers d'action les plus efficaces356. Elle permet alors de redéfinir les objectifs stratégiques et les ressources à mobiliser pour l'atteinte des objectifs fixés.

En dernière analyse, la standardisation de l'objet du contrôle administratif participe à des mesures de rationalisation de ce dernier au Cameroun. De ce fait, cette standardisation se manifeste non moins par la consolidation du contrôle de régularité, qu'à travers la construction d'un système de contrôle de performance dans la gestion publique locale. Ce décor nous offre l'efficacité et de l'efficience dans la gouvernance financière locale357.

Cependant, une fois que les objectifs budgétaires fixés ne sont pas atteint, des mesures peuvent être prises à l'encontre des décideurs des CTD en vue d'une meilleure gouvernance à venir.

354 LECA (Jean), « L'évaluation dans la modernisation de l'État », Politiques et Management Public, no 2, Vol. 11, 1993, pp. 161 - 172.

355 AKONO OLINGA (André), op.cit., p. 331.

356 Ibid.

357 Idem.

104

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

SECTION II : LA PRISE DE MESURES CONTRE LES DECIDEURS LOCAUX DU
FAIT DE LA CONTRE - PERFORMANCE BUDGETAIRE

La prise de mesures contre les décideurs locaux en raison de contre - performances est un processus complexe visant à assurer la responsabilité financière et la transparence dans la gestion des collectivités territoriales. Les contre - performances budgétaires se manifestent par des écarts significatifs entre les prévisions budgétaires et les réalisations effectives, peuvent entraîner des déséquilibres financiers graves, mettant en péril les services publics et le développement local.

Cependant, pour faire face à ces situations, plusieurs mesures sont susceptibles d'être prises contre les décideurs locaux. Mais, nous n'insisterons que sur deux à savoir : la prise de mesures par les organes délibérants des CTD (Paragraphe I), et la prise de mesures par les citoyens des CTD (Paragraphe II).

Paragraphe I : La prise de mesures par les organes délibérants des CTD

La prise de mesures contre les décideurs locaux par les organes délibérants des CTD en cas de contre - performance budgétaire est un processus essentiel pour garantir la bonne gestion des finances publiques au niveau local. Les organes délibérants, tels que les conseils municipaux et régionaux jouent un rôle central dans ce mécanisme de contrôle. En tant qu'entités responsables de l'adoption et de la surveillance des budgets, ils possèdent plusieurs leviers pour intervenir en cas de dérives budgétaires.

Ces interventions incluent la réduction des futurs budgets des CTD (A), et la non - reconduction des candidatures des décideurs locaux défaillants (B).

A - La réduction des futurs budgets des CTD

La réduction des futurs budgets des CTD par les organes délibérants est un sujet complexe, influencé par divers facteurs économiques, politiques sociaux. Les CTD, entités clés dans la gouvernance locale, dépendent fortement des transferts de l'État et de leurs propres ressources fiscales pour financer les services publics essentiels.

105

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Cependant, plusieurs raisons conduisent à la réduction de ces budgets à savoir : la non- atteinte des objectifs budgétaires fixés358, la constatation des irrégularités359, etc.

La réduction de futurs budgets comme mesure par les organes délibérants, est une mesure potentiellement efficace pour promouvoir la gouvernance et la gestion responsable des ressources publiques au sein des CTD360. Les organes délibérants, possèdent le pouvoir de décider des allocations budgétaires361 en fonction des critères de performance et de conformité. Lorsqu'une CTD ne respecte pas les règles de bonne gouvernance, telles que la transparence financière, l'efficacité dans l'utilisation des fonds, ou lorsqu'elle est impliquée dans des scandales de corruption, ces organes peuvent décider de réduire ses futurs budgets comme forme de sanction. Cette décision est souvent motivée par la nécessité de garantir que les fonds publics sont utilisés de manière appropriée et de dissuader les comportements inappropriés362.

Hormis la réduction des budgets futurs en cas de non atteinte des objectifs fixés, l'organe délibérant peut également ne plus reconduire le mandat des élus locaux qui se sont montrés défaillants dans le cadre de leurs missions budgétaires.

B - La non - reconduction des candidatures des décideurs locaux défaillants

La non - reconduction des candidatures des décideurs locaux défaillants en matière budgétaire par les organes délibérants est une mesure visant à renforcer la responsabilité et la transparence des élus locaux en matière de gestion des finances publiques locales. Cette approche se fonde sur l'idée que les élus ayant failli à leurs responsabilités budgétaires ne devraient pas être reconduits dans leurs fonctions afin de protéger les intérêts des citoyens et d'assurer une gestion rigoureuse et efficace des ressources publiques.

Les décideurs locaux jouent un rôle crucial dans l'allocation des ressources financières de leurs collectivités. Ils sont responsables de la préparation et de l'exécution des budgets locaux, de la gestion des dépenses et des recettes, ainsi que de la surveillance des projets de

358 La non - atteinte des objectifs fixés peut inciter l'organe délibérant à ne plus reconduire le mandat de l'élu local qui s'est montré défaillant dans le cadre de l'exécution du budget.

359 Tel est également le cas des irrégularités constatées par l'organe délibérant.

360 La réduction des futurs budgets est une mesure potentiellement efficace, qui permet de promouvoir la bonne gouvernance et la bonne gestion des ressources publiques au niveau local.

361 L'on comprend qu'avec la DOB, l'organe délibérant est un maillon important de la procédure de l'élaboration du budget local en fonction des critères de performance et de conformité.

362 Le fait pour l'organe délibérant de réduire les futurs budgets permet de dissuader les comportements inappropriés afin de garantir une utilisation appropriée des fonds publics.

106

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

développement. Lorsqu'ils échouent dans ces responsabilités, les conséquences peuvent être graves, entraînant des déficits budgétaires, une augmentation de la dette publique locale, et une diminution de la qualité des services publics offerts aux citoyens.

La non - reconduction des mandats constitue donc une sanction politique visant à éviter la perpétuation des pratiques budgétaires inadéquates363. Elle envoie un message clair aux autres élus locaux quant à l'importance de la rigueur financière et de la transparence. Cette mesure est généralement prise par les organes délibérants, tels que les conseils municipaux et régionaux, qui ont le pouvoir de valider ou de rejeter les candidatures pour les élections locales.

En outre, cette approche peut avoir un effet dissuasif, incitant les décideurs locaux à adopter des pratiques budgétaires plus prudentes et transparentes pour éviter d'être écartés de la vie politique. La crainte de ne pas être réélu peut encourager une gestion plus responsable, un meilleur contrôle des dépenses publiques, et une plus grande attention à l'équilibre budgétaire364. Cela peut également renforcer la confiance des citoyens de leurs élus, sachant que ceux - ci seront tenus responsables de leurs actions financières.

Cependant, la mise en oeuvre de cette mesure nécessite une évaluation rigoureuse et impartiale des performances budgétaires des élus365. Il est essentiel d'établir des critères clairs et objectifs pour déterminer les défaillances budgétaires afin d'éviter toute politisation ou instrumentalisation de ce processus. Des mécanismes de contrôle et de vérifications indépendants peuvent être mis en place pour garantir l'objectivité de l'évaluation.

Une fois que les objectifs budgétaires ne sont pas atteints, des mesures peuvent également être prises par les citoyens pour exprimer leur mécontentement.

Paragraphe II : La prise de mesures par les citoyens des CTD

La prise de mesures par les citoyens des collectivités territoriales décentralisées est une réponse directe aux défis et aux besoins spécifiques rencontrés au niveau local. Ces

363 La non - reconduction des mandats est une sanction politique qui permet à l'organe délibérant de protéger les intérêts de la collectivité afin de fournir un meilleur service public aux citoyens. C'est dans cette perspective que l'alinéa 2 de l'article 14 du CGCTD dispose que : « Il peut toutefois, en début d'exercice budgétaire, mandater le chef de l'Exécutif à l'effet de défendre les intérêts des Collectivités Territoriales concernées en toute matière ».

364 La non - reconduction des mandats constitue une mesure dissuasive permettant d'assurer la bonne gestion des ressources publiques et la bonne gouvernance au niveau local.

365 L'organe délibérant doit évaluer impartialement les performances budgétaires des élus locaux afin de garantir la transparence dans l'utilisation des ressources publiques.

107

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

mesures peuvent revêtir plusieurs formes et visent généralement à améliorer la gouvernance, à renforcer la transparence et à promouvoir le développement durable.

Les citoyens des CTD peuvent ainsi, prendre des mesures contre les acteurs d'exécution et de contrôle budgétaire qui se montrent défaillants aux objectifs fixés dans le cadre du vote du budget. Ces mesures sont entre autres les manifestations pacifiques (A) et le non - renouvellement des mandats des élus locaux défaillants en matière budgétaire (B).

A - Les manifestations pacifiques

Les manifestations pacifiques des citoyens des collectivités territoriales décentralisées en raison de la contre - performance budgétaire locale expriment souvent le mécontentement face à la gestion financière inadéquate ou aux décisions politiques qui affectent leur qualité de vie. Ces manifestations visent généralement à attirer l'attention sur les besoins non satisfaits, à demander des comptes aux responsables politiques locaux et à encourager des réformes pour améliorer la transparence et l'efficacité de la gestion des fonds publics au niveau local.

L'implication du citoyen dans le contrôle des finances publiques peut, à n'en point douter, booster la gouvernance366. En effet, bien que n'ayant pas de pouvoir de sanctions au sens pénal ou administratif du terme, les citoyens ont la possibilité d'attirer l'attention des autorités administratives, ou judiciaires sur les dérives éventuelles constatées367. Ces dernières peuvent alors prendre leurs responsabilités qui d'ailleurs se manifestent sous différentes formes : pour les autorités administratives, il s'agit d'une prise de sanctions disciplinaires si tant est que les faits sont avérés368; pour les autorités judiciaires, l'ouverture d'une information judiciaire et éventuellement, le prononcé de sanctions conformément à la loi369.

Les manifestations pacifiques constituent des réponses à la contre -performance budgétaire des élus locaux mettant en lumière plusieurs aspects clés. Les citoyens protestent souvent contre une mauvaise gestion financière, incluant des dépenses non justifiées, une mauvaise allocation des ressources, et un manque de transparence dans l'utilisation des fonds publics. Ils peuvent également manifester en raison de la mauvaise qualité des services

366 MANSARE (Augustin), « L'émergence d'un contrôle citoyen des finances publiques en Afrique francophone », Note d'Analyse Politique, no 87, Avril 2020, pp. 1 - 7., p. 6.

367 Ibid.

368 Idem.

369 Idem.

108

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

publics. Lorsque ces irrégularités sont avérées, les citoyens peuvent décider de ne plus reconduire les mandats des élus locaux défaillants en matière budgétaire.

B - Le non renouvellement des mandats des élus locaux défaillants en matière

budgétaire

Le non - renouvellement des mandats des chefs des exécutifs locaux défaillants en matière budgétaire peut être une mesure de responsabilité importante. Cela signifie que les dirigeants locaux qui ne parviennent pas à gérer efficacement les finances publiques pourraient être remplacés à la fin de leur mandat, d'autant plus que, « la fonction de contrôle des finances publiques est devenue un des standards du droit et de la gestion des finances publiques dans le monde »370. Si le contrôle effectué par les organes de l'État, qu'ils soient administratifs, politiques ou juridictionnels, est ancré dans la pratique institutionnelle, le contrôle citoyen, quant à lui, est relativement nouveau.

Ce contrôle émanant de la culture démocratique qui a investi en Afrique le domaine public, donne au citoyen toute la légitimité pour veiller à l'utilisation du budget de l'État dont il est le contribuable371. Les origines de ce contrôle sont lointaines et peuvent être trouvées dans la déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789372.

En Afrique francophone, à l'instar des pays occidentaux et dans une certaine mesure des pays africains non francophones, on assiste à une implication croissante des citoyens dans la gestion de la chose publique373. Si par le passé, le citoyen semblait détaché et désintéressé de la chose publique, motivé par la pensée que tout ce qui est public n'est à personne - aujourd'hui, cette perception a largement changé et tend à être supplantée par un regard bienveillant, voire exigeant sur la res publica374. Ainsi, les pouvoirs publics sont-ils tenus d'ouvrir leur gouvernance à l'oeil citoyen.

En finances publiques locales, c'est plutôt le concept de contrôle citoyen de l'action publique (CCAP) qui est utilisé. Celui-ci « renvoie au processus qui vise à renforcer la performance des collectivités locales à travers un engagement civique et une participation

370 MÉDÉ (Nicaise), op.cit., p. 323.

371 MANSARE (Augustin), « L'émergence d'un contrôle citoyen des finances publiques en Afrique francophone », op.cit., p. 2.

372 En effet, l'article 15 de la déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que : « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ».

373 MANSARE (Augustin), ibid., p. 2.

374 Idem.

109

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

active des citoyens afin d'instaurer une culture de la transparence et de l'inclusion et d'amener les élus et les organes de gestion des collectivités locales à rendre compte de leurs décisions »375. Le citoyen est ainsi mis en capacité de comparer les autorisations budgétaires accordées par le parlement avec les réalisations des CTD, en vue d'apprécier par lui-même, les écarts éventuels, les imperfections, voire les dérives qui pourraient en résulter376.

Ce mécanisme assure au citoyen un suivi plus clair de l'action publique et lui donne la possibilité d'appliquer des sanctions à l'égard des autorités si ces dernières se montraient défaillantes dans l'accomplissement de leur mission377. Les sanctions dont il est question ici ne peuvent qu'être envisagées dans le cadre d'un régime démocratique où les citoyens, à travers des élections libres et transparentes, peuvent décider de ne pas reconduire leurs élus (élus locaux) au pouvoir pour cause d'insuffisance de résultats378. Cependant, l'analphabétisme en Afrique francophone reste une barrière à la participation active des citoyens dans le processus politique, car ce facteur conditionne la capacité du citoyen - électeur à congédier ceux de ces représentants qui ne répondraient pas à leurs engagements et leur devoir379.

375 https://www.iedafrique.org/la-fiche-d-evaluation-par-la.html, cité par MANSARE Augustin.

376 MANSARE (Augustin), ibid., p. 3.

377 Idem.

378 MANSARE (Augustin), « L'émergence d'un contrôle citoyen des finances publiques en Afrique francophone », op.cit., p. 3.

379 Ibid.

110

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CONCLUSION DU CHAPITRE II

Le contrôle de performance dont il était question dans ce chapitre revêt une importance cruciale pour assurer une gestion financière efficace et transparente dans les CTD. Ce processus vise à garantir que les ressources publiques sont utilisées de manière optimale pour répondre aux besoins des citoyens et promouvoir le développement local durable. À travers des mécanismes tels que les audits réguliers, le reporting financier détaillé et l'évaluation de la performance, les autorités locales peuvent surveiller l'exécution budgétaire, détecter les irrégularités et améliorer la responsabilité des gestionnaires publics.

La performance possède autant de facettes qu'il y a d'observateurs d'une CTD et de rationalités présentes dans ladite CTD. On peut ainsi identifier une performance financière, mais aussi sociale, environnementale, opérationnelle, etc. De ce fait, la performance ne peut être définie d'un seul point de vue (opérationnel, social, financier, etc.), mais comme un dosage de toutes ces dimensions. La difficulté majeure tient au fait que les champs de la performance ne se recoupent pas forcément et qu'il peut même y avoir des antagonismes entre ces différentes facettes.

111

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE

Au terme de cette seconde partie de notre devoir qui, portait sur un contrôle matériellement aménagé, le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun présente à la fois des avantages substantiels et des défis significatifs. Ce type de contrôle favorise la transparence et la responsabilité dans la gestion des finances publiques locales, en permettant une vérification détaillée des dépenses et des recettes. De plus, il offre la possibilité de détecter précocement des irrégularités financières, ce qui est essentiel pour prévenir la corruption, les détournements de derniers publics, la concussion, bref, la mauvaise gestion financière au niveau local.

Cependant, les défis persistent, notamment en termes de ressources humaines et

financières limitées pour assurer un contrôle uniforme et efficace au niveau local. Le
contrôle matériellement aménagé du budget des CTD au Cameroun doit être ancré dans le respect rigoureux des principes et règles en vigueur pour assurer une gestion financière transparente, responsable et équitable. Cela nécessitera des efforts concertés pour surmonter les défis existants et pour promouvoir une gouvernance financière durable et efficace, répondant ainsi aux attentes des citoyens au niveau local. On peut retenir d'une manière générale que la finalité du contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun se caractérise d'une part, par la régularité380, et d'autre part, on assiste à l'introduction de la performance381.

380 HASSANA (Barnabas), « L'évolution des finalités du contrôle de la dépense publique au regard des nouvelles

réformes de finances publiques camerounaises », op.cit., p. 1238.

381 Ibid.

CONCLUSION GÉNÉRALE

112

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

113

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

La gestion et le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun représente un défi majeur dans le cadre de la décentralisation administrative et financière. Ce travail explore en profondeur les mécanismes et les effets du contrôle de l'exécution du budget des CTD.

La décentralisation budgétaire est essentielle pour renforcer la gouvernance locale et promouvoir la démocratie participative. Au Cameroun, elle vise à autonomiser les CTD en leur donnant la responsabilité de gérer leurs propres affaires, notamment à travers la planification, l'élaboration et l'exécution de leurs budgets. Cette approche est considérée comme un levier potentiel pour stimuler le développement local en permettant une meilleure adaptation des politiques publiques aux réalités locales.

Autrement dit, la décentralisation est un mode d'organisation de l'État et de partage de pouvoir dans l'État qui implique autant une nouvelle conception, qu'une configuration rénovée du système financier justifiée par le développement des finances locales382. De ce fait, les finances locales sont aujourd'hui traversées par la philosophie de la nouvelle gouvernance financière publique383. Elle constitue une réalité dans le système financier camerounais en général, et dans le régime financier des CTD en particulier384. Elle constitue une véritable révolution financière par l'introduction d'une logique de performance dans la gestion des finances publiques non seulement de l'État, mais aussi et surtout des collectivités infra - étatiques comme les CTD385. L'objectif de la nouvelle gouvernance financière publique était de faire passer la philosophie managériale logique de moyens à une logique de résultats386. L'exécution du budget des CTD est encadrée par plusieurs mécanismes de contrôle. Sur le plan juridique, les lois et règlements définissent les procédures à suivre tout au long du cycle budgétaire, depuis la préparation jusqu'au contrôle postérieur. Le contrôle interne joue un rôle éminemment important en établissant des systèmes et des procédures pour assurer la transparence, la régularité et la conformité des opérations financières. Parallèlement, le contrôle externe est assuré par la juridiction financière spécialisée telle que la Chambre des comptes de la Cour suprême, chargée de vérifier la régularité des comptes et la légalité des dépenses.

382 AKONO OLINGA (André), op.cit., p. 382.

383 Ibid.

384 Idem.

385 Idem.

386 Idem.

114

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Malgré les efforts déployés, plusieurs défis persistent dans la gestion et le contrôle de l'exécution du budget des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun. Les capacités administratives limitées au niveau local entravent souvent une gestion financière efficace, tandis que la complexité des procédures et la lourdeur administrative peuvent ralentir la mise en oeuvre des projets locaux. De plus, la dépendance financière des CTD vis - à - vis du pouvoir central limite leur autonomie et leur capacité à répondre aux besoins locaux de manière proactive. En outre, la persistance de la corruption et des pratiques opaques, compromettent la bonne utilisation des ressources publiques et sapent la confiance des citoyens au sein des collectivités locales.

Cependant, pour améliorer la gestion et le contrôle de l'exécution du budget des CTD au Cameroun, plusieurs perspectives clés doivent être explorées. Il est crucial de renforcer les capacités administratives locales par le biais de formations continues et du développement des compétences. La promotion de la transparence et de la reddition des comptes est essentielle, impliquant la publication régulière des informations budgétaires et l'adoption de mécanismes de contrôle robustes. Il est également nécessaire de renforcer les organes de contrôle externe pour assurer une supervision efficace et impartiale. En parallèle, la promotion d'une véritable décentralisation fiscale et le renforcement des ressources propres des collectivités locales sont indispensables pour accroître leur autonomie financière.

Les principes de la libre administration, d'autonomie locale et de la personnalité juridique réaffirmés dans le CGCTD, démontrent bien la volonté des pouvoirs publics à maintenir les Régions et les Communes au centre de leur propre gestion. Cependant, elles exercent leurs activités dans le respect de l'unité nationale, de l'intégrité du territoire et de la primauté de l'État387. Les ressources propres des Régions et des Communes et celles qui sont transférées par l'État constituent des derniers publics, dont la gestion doit obéir aux procédures et mécanismes officiels en vigueur et est soumise aux contrôles de tutelle et des institutions spécialisée.

Même si nous l'avons pas évoqué, l'autorité de tutelle joue un rôle très important dans le registre du contrôle administratif du budget des CTD. D'une manière générale, les actes et les délibérations des collectivités territoriales sont en principe soumises à l'approbation du

387 Tel est le sens de l'article 2, alinéa 2 de la loi du 24 décembre 2019 portant CGCTD qui dispose que les Régions et les Communes sont les CTD de la République, « Elles exercent leurs activités dans le respect de l'unité nationale, de l'intégrité du territoire et de la primauté de l'État ».

115

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

représentant de l'État388. L'approbation est un procédé de tutelle qui s'exerce sur les délibérations et les décisions des collectivités territoriales389. Selon ce procédé, « l'acte pris par l'autorité « sous tutelle » ne peut entrer en vigueur tant que n'est pas survenue l'approbation qui, selon les textes, peut être expresse - l'autorité de tutelle manifeste clairement sa volonté d'approuver le texte (ou de le désapprouver) - ou tacite - le silence de l'autorité de tutelle, pendant un délai dont la durée peut varier, vaut approbation »390.

En finances publiques locales, le pouvoir d'approuver le budget voté par l'organe délibérant est reconnu au représentant de l'État. L'article 426 du CGCTD dispose à cet effet que « le budget de la Collectivité Territoriale est approuvé par arrêté du représentant de l'État dans un délai de quinze (15) jours suivant la date de sa réception par celle-ci. Passé ce délai, le budget est réputé approuvé ». Il s'agit du Préfet en ce qui concerne les budgets des communes, et du Gouverneur en ce qui concerne les budgets des régions. L'article 76 du même texte précise que cette autorisation est préalable. Toute chose qui atteste que les budgets locaux ne peuvent être exécutés sans l'approbation du représentant de l'État. Ces dispositions renforcent le pouvoir de la tutelle dans le processus budgétaire local391. Il se pose en effet un problème de légitimité392. En effet, comment un représentant de l'État, de surcroit nommé détient le pouvoir de suspendre un organe élu ?393 Ce pouvoir reconnu au représentant de l'État est en contradiction avec les exigences de la démocratie394. Bien plus, le représentant de l'État qui approuve le budget, peut le modifier « d'office ». Cette modification intervient lorsque le budget voté n'est pas conforme à la législation. Dans, ce cas, le représentant de l'État adresse une mise en demeure à l'organe délibérant. Au cas où ce dernier ne réagit pas, le budget est modifié d'office395.

La loi consacre ainsi une autre forme de tutelle qu'est le pouvoir de substitution d'action396. La substitution d'action est définie par le Dictionnaire de droit administratif

388 BIPELE KEMFOUEDIO (Jacques), « La tutelle administrative dans le nouveau droit camerounais de la décentralisation », ASFJP/Uds, Tome 9, 2005, pp. 83 - 110.

389 MONGBAT (Alassa), DJODA (Jean - Marc), « Recherche sur le pouvoir budgétaire des collectivités territoriales décentralisées en droit public financier camerounais », op.cit., p. 2210.

390 VANG LANG (Agathe), GONDOUIN (Geneviève), INSERGUET - BRISSET (Véronique), Dictionnaire de droit administratif, Paris, Sirey (7e éd.), 2015, 515 p., pp. 38 - 39.

391 MONGBAT (Alassa), DJODA (Jean - Marc), ibid., p. 2211.

392 Idem.

393 Idem.

394 Idem.

395 Art. 422 (1) de la loi du 24 décembre 2019 portant CGCDT.

396 PLESSIX (Benoît), « Le pouvoir de substitution d'action », in COMBEAU (Pascal) (dir.), Les contrôles de l'État sur les collectivités territoriales aujourd'hui, Paris, L'Harmattan, 2007, pp. 67 - 88 ; du même auteur :

116

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

comme « un procédé très rigoureux permettant notamment à une autorité de tutelle de prendre une décision à la place de l'autorité décentralisée »397. Ce pouvoir de modification du budget reconnu au représentant de l'État constitue une véritable arme redoutable lui permettant de défaire le budget selon ses intérêts personnels398. Pouvant se substituer à l'organe délibérant, le représentant de l'État serait tenté de modifier les budgets dans lesquels il n'y trouve aucun intérêt399. Ainsi, la tutelle dans le droit budgétaire des CTD constitue une atteinte à la liberté locale et s'apparente à une sorte de « fonction maudite »400.

En réalité, le pouvoir d'approbation du budget reconnu au représentant de l'État limite les pouvoirs de l'organe délibérant en matière budgétaire. En conséquence, les sessions budgétaires sont devenues des sessions de fête pour les conseillers. Ils y vont tout simplement pour approuver le projet de budget auquel ils n'ont pas participé à l'élaboration et percevoir leurs perdiems401.

En fin de compte, l'approbation apparaît ainsi comme un autre mécanisme de contrôle qu'exerce la tutelle sur les collectivités en matière budgétaire. L'autorité de tutelle vérifie notamment le respect des ratios fixés aux termes de l'article 38 de la loi no 2009/011 du 10 juillet 2009, portant fiscalité locale. Il faut ajouter que le pouvoir d'approbation du budget des collectivités locales par l'autorité de tutelle, est également un contrôle de performance, car l'autorité de tutelle a également vocation à vérifier la cohérence des programmes de la collectivité locale avec les politiques publiques nationales.

« Une prérogative de puissance publique méconnue : le pouvoir de substitution d'action », RDP, no 119, 2003, pp. 579 - 629.

397 VANG LANG (Agathe), GONDOUIN (Geneviève), INSERGUET - BRISSET (Véronique), op.cit., p. 456.

398 MONGBAT (Alassa), DJODA (Jean - Marc), op.cit., p. 2211.

399 Ibid.

400 RUFFAT (Jocelyne), « La tutelle, une fonction maudite », Politiques et Management Public, no 1, Vol. 7, 1989, pp. 113 - 146.

401 KANKEU (Joseph), « L'autonomie des collectivités territoriales décentralisées : quelle autonomie », Juridis Périodique, no 85, 2011, pp. 90 - 99., p. 97.

117

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

BIBLIOGRAPHIE

I. OUVRAGES

> BEAUD (Michel), L'art de la thèse, Paris, éd. La découverte, 2006, 216 p.

> BERGEL (Jean - Louis), Méthodes du droit et théorie générale du droit, Dalloz (2e éd.),

1989, 342 p.

> BIDIAS (Benjamin), Les finances publiques et l'Économie financière de la République

fédérale du Cameroun, Yaoundé, IUCAT (1ere éd.), 1971, 411 p.

> BOUVIER (Michel), Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l'impôt, Paris,

LGDJ (13e éd.), 2016, 272 p.

> BOUVIER (Michel), Les finances locales, Paris, LGDJ (12e éd.), 2013, 239 p.

> BOUVIER (Michel), ESCLASSAN (Marie - Christine), LASSALE (Jean - Pierre),

Finances Publiques, Paris, LGDJ, Montchrestien (18e éd.), 2019 - 2020, 1024 p.

> CHOUVEL (François), Finances publiques, Gualino (23e éd.), 2020, 248 p.

> CLICHE (Pierre), Gestion budgétaire et dépenses publiques, Québec, PUQ, 2009, 328 p.

> COHENDET (Marie - Anne), Méthodes de travail : droit public, Paris, Montchrestien (3e

éd.), 1998, 227 p.

> DURKHEIM (Émile), Les règles de la méthodologie, Paris, PUF, 1891, 160 p.

> FABRE (Jean - François), Le contrôle des finances publiques, Paris, PUF, l'Économiste,

1968, 204 p.

> GAUDEMET (Paul Marie), MOLINIER (Joël), Finances publiques, Paris, budget / trésor,

Montchrestien (6e éd.), Tome 1,1992, 565 p.

> GRANDGUILLAUME (Nicolas), Théorie générale du contrôle, Paris, Economica, 1994,

72 p.

> GRAWITZ (Madeleine), Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz (11e éd.), 2000,

1040 p.

> KAMTO (Maurice), Pouvoir et droit en Afrique noire francophone : Essai sur le

fondement du constitutionnalisme francophone, Paris, LGDJ, 1987, 546 p.

> KAMTO (Maurice), TCHEUWA (Jean - Claude), Manuel de méthodologie et exercices

corrigés de droit international, PUCAC, 2010, 158 p.

118

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

> KELSEN (Hans), Théorie générale du droit et de l'État, Paris et Bruxelles, LGDJ et Bruylant, 1997, 517 p.

> KHEMAKHEM (Abdellatif), La dynamique du contrôle de gestion, Dunod (2e éd.), 1984, 587 p.

> LAKENE DONFACK (Charles - Étienne), Finances publiques camerounaises, Paris, Berger-Levrault, mars 1987, 490 p.

> MAGNET (Jacques), Éléments de comptabilité, Paris, LGDJ (3e éd.), Coll. Système-Finances Publiques, 1996, 174 p.

> MÉDÉ (Nicaise), Finances Publiques Espace UEMOA/UMOA, Sénégal, L'harmattan, 2016, 548 p.

> MORDACQ (Frank), La LOLF : un nouveau cadre budgétaire pour reformer l'État, Paris, Dalloz, 2006, 412 p.

> OLIVIER (Lawrence), BEDARD (Guy), FERRON (Julie), L'élaboration d'une

problématique de recherche, Paris, l'Harmattan, 2005, Coll. Logiques sociales, 99 p. > OWONA (Joseph), La décentralisation camerounaise, L'Harmattan Cameroun, 2011, 169

p.

> PLANTEY (Alain), La Fonction Publique, Traité Général, Litec, 2e éd., 2001, no 1235, 826 p.

> SY (Aboubakry), La transparence dans le droit budgétaire de l'État en France, Paris, LGDJ, 2017, 438 p.

> THÉBAULT (Stéphane), L'ordonnateur en droit public financier, LGDJ, 2007, 408 p. > VIRALLY (Michel), Le phénomène juridique, LGDJ, 1966, 64 p.

> ZAHED (Mahrez), La démarche de performance dans la gestion locale, L'Harmattan, 2017, 360 p.

> ZUGUETTA (Stéphane), Le contrôle de la gestion dans les administrations de l'État. Éléments de méthodologie, Paris, Jouve Imprimeur, 2003, 426 p.

II. THESES DE DOCTORAT ET MEMOIRES
1- Thèses de doctorat

> AKONO OLINGA (André), L'apport de la performance au contrôle des finances locales au Cameroun, Thèse de doctorat en Droit Public, Université de Yaoundé II, 2020, 495 p.

119

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

> BATIA EKASSI (Sandrine), L'Institution supérieure de contrôle des finances publiques au Cameroun, Thèse de doctorat en Droit Public, Université de Yaoundé II, 2015 - 2016, 445 p.

> BESSALA (Alain Georges), Ajustement Structurel et Droit Budgétaire Camerounais : contribution à l'étude des Droits Budgétaires des États Africains sous Ajustements Structurel, Thèse de Doctorat en Droit Public, Université de Yaoundé II, 2013-2014, 591 p.

> GUENOUN (Marcel), Le management de la performance publique locale, Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Université Paul CEZANNE, 2009, 417 p.

2- Mémoires

> LEJOUR (Baptiste), Du contrôle budgétaire et financier au contrôle de gestion dans les collectivités locales, Mémoire de D.E.S.S, Institut d'Études politiques de Lyon, 2003, 98 p.

> SADOA (Arnaud Claude), L'adaptation du contrôle des finances publiques à la nouvelle gouvernance financière au Cameroun, Mémoire de master en Droit Public, Université de Strasbourg, 2022 - 2023, 132 p.

III. ARTICLES ET CONTRIBUTIONS

> AKAKPO (Maxime), « Le contrôle de performance : comment et avec qui ? », in, La LOLF dans tous ses états, pp. 153 - 168.

> AKONO OLINGA (André), « La codification de la transparence et de la bonne gouvernance dans les finances publiques des États de la CEMAC », Annales africaines, Vol. 1 no 18, avril 2023, pp. 37 - 78.

> AMOUGOU MBETOUMOU (Estelle Delphine), « Aspects de la responsabilité des receveurs municipaux en droit public financier camerounais », IMJST, Vol. 7, no 7, Juillet 2022, pp. 5081 - 5096.

> BAKITI BA MBOG BINYET (Joseph Olivier), « Effet de l'action du contrôle supérieur de l'État sur l'offre des services publics au Cameroun », ASJ, no 8, Vol. 3, 2021, pp. 157 - 186.

> BENSOUDA (Noureddine), « Efficacité et transparence des finances publiques pour une meilleure offre de bien pour le citoyen », RFFP, no 100, Novembre 2007, pp. 333 - 336.

120

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

> BILOUNGA (Steve Thiery), « Les relations entre l'ordonnateur et les comptables à la lumière de la loi du 26 décembre 2007 portant régime financier de l'État du Cameroun », G&FP, 2017/3, no 3, pp. 109 - 116.

> BIPELE KEMFOUEDIO (Jacques), « La tutelle administrative dans le nouveau droit camerounais de la décentralisation », ASFJP/Uds, Tome 9, 2005, pp. 83 - 110.

> CHARTIER (Jean - Louis), « Les collectivités locales et la corruption », RFFP, no 69, 2000, pp. 87 - 94.

> COURBET (Gérard), « Le contrôle de gestion dans les collectivités territoriales », Politiques et Management Public, no 3, Vol. 20, 2002, pp. 201 - 207.

> DELCAMP (Alain), « Principe de subsidiarité et décentralisation », RFDC, no 23, 1995, pp. 606 - 624.

> DESCHEEMAEKER (Christian), « La transformation des contrôles. L'alourdissement des procédures », RFFP, no 87, Septembre 2004, pp. 203 - 217.

> DUFRESNOY (Philippe), « La responsabilité des comptables publics : une assurance raisonnable de la régularité des comptes », G&FP, 2018/2, no 2, pp. 102 - 104.

> DUTHEILLET DE LAMOTHE (Louis), « Étendu du contrôle de la qualité de l'ordonnateur par le comptable », G&FP, 2018/4, no 4, pp. 94 - 99.

> DUTHEILLET DE LAMOTHE (Olivier), VANDENDRIESSCHE (Xavier), « La notion de préjudice financier en dépenses », GFP, Vol. 100, no 2 - 2020/ Mars - Avril 2020, pp. 107 - 127.

> ENGOUTOU (Jean - Luc), NGUECHE (Sylvie), MBALLA ELOUNDOU (Aimé Christel), « La responsabilité financière des ordonnateurs en droit public camerounais », RFFP, no 157 - Février 2022, pp. 95 - 107.

> ESSONO OVONO (Alain), « L'autonomie financière des collectivités locales en Afrique noire francophone. Le cas du Cameroun, de la Côte d'Ivoire, du Gabon et du Sénégal », REA, Bordeaux 4, pp. 1 - 24.

> GUIMDO DONGMO (Bernard - Raymond), « Les bases constitutionnelles de la décentralisation au Cameroun (contribution à l'étude de l'émergence d'un droit constitutionnel des collectivités territoriales décentralisées) », RGD, no 1, décembre 1998, Vol. 29, pp. 79 - 100.

> HASSANA (Barnabas), « L'évolution des finalités du contrôle de la dépense publique au regard des nouvelles réformes de finances publiques camerounaises », IMJST, Vol. 5, no 7, Juillet 2020, pp. 1227 - 1240.

121

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

> KALIEU ELONGO (Yvette Rachel), « Organisation judiciaire du Cameroun », in Répertoire quinquennal OHADA, 2006 - 2010, pp. 93 - 122.

> KANKEU (Joseph), « L'autonomie des collectivités territoriales décentralisées : quelle autonomie », Juridis Périodique, no 85, 2011, pp. 90 - 99.

> LAKENE DONFACK (Charles - Étienne), « Constitution, Chambre des comptes, comptes publics en droit public financier camerounais », RAFP, no 12, 2nd semestre 2022, PP. 7 - 39.

> LECA (Jean), « L'évaluation dans la modernisation de l'État », Politiques et Management Public, no 2, Vol. 11, 1993, pp. 161 - 172.

> MANSARE (Augustin), « L'émergence d'un contrôle citoyen des finances publiques en Afrique francophone », Note d'Analyse Politique, no 87, Avril 2020, pp. 1 - 7.

> MÉDÉ (Nicaise), « L'Afrique francophone saisie par la fièvre de la performance financière », RFFP, no 135, 2016, pp. 349 - 357.

> MONEMBOU (Cyrille), « Le pouvoir règlementaire des collectivités locales dans les États d'Afrique noire francophone (le cas du Cameroun, du Gabon et du Sénégal), RC/SJP, no 002/2015, pp. 79 - 111.

> MONGBAT (Alassa), DJODA (Jean - Marc), « Recherche sur le pouvoir budgétaire des collectivités territoriales décentralisées en droit public financier camerounais », IMJST, Vol. 5, 2020, pp. 2203 - 2217.

> NDJIE MGBA (Marc Stéphane José), « La lutte contre la corruption au Cameroun : un effort inachevé », RIDC, 2018/70 - 1, pp. 159 - 185.

> NGUIMFACK VOUFO (Théophile), BANA (Lucy), « La rénovation du statut de l'ordonnateur dans la loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 portant régime financier de l'État et des autres entités publiques », IMJST, Vol. 6, no 9, septembre 2021, pp. 4082 - 409.

> OLIVIA (Éric), « La conception de l'autonomie locale, quel contenu ? quelle effectivité ? », G&FR, 2017/no 2, pp. 13 - 24.

> PEKASSA NDAM (Gérard Martin), « La classification des communes au Cameroun », RASJ, no 1, Vol. 6, 2009, pp. 229 - 266.

> PHILIP (Loïc), « L'autonomie financière des collectivités territoriales », CCC, no 12, Dossier : le droit constitutionnel des collectivités territoriales- Mai 2002, in www.conseil-constitutionnel.fr.

> PLESSIX (Benoît), « Le pouvoir de substitution d'action », in Les contrôles de l'État sur les collectivités territoriales aujourd'hui, Paris, L'Harmattan, 2007, pp. 67 - 88.

122

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

> PLESSIX (Benoît), « Une prérogative de puissance publique méconnue : le pouvoir de substitution d'action », RDP, no 119, 2003, pp. 579 - 629.

> POLI (Raphaël), « Les indicateurs de performance de la dépense publique », RFFP, no 82, 2003, pp. 107 - 114.

> PONTIER (Jean - Marie), « L'intérêt général existe - t - il encore ? », Recueil Dalloz, 1998, pp. 327 - 339.

> PONTIER (Jean - Marie), « La subsidiarité en droit administratif », RDP, 1986, pp. 1515 - 1537.

> PONTIER (Jean - Marie), « Les transmutations du contrôle sur les collectivités territoriales décentralisées », La semaine juridique. Administrations et Collectivités territoriales, no 44, 5 Novembre 2012, pp. 44 - 45.

> PRAT (Michel), CHAIGNAU - PEYROUX (Sylvie), « La modernisation des méthodes de contrôle », RFFP, no 87, Septembre 2004, pp. 219 - 230.

> ROUX (André), « Le principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales », RFDA, Vol. 8, no 3, 1992, pp. 435 - 452.

> RUFFAT (Jocelyne), « La tutelle, une fonction maudite », Politiques et Management Public, no 1, Vol. 7, 1989, pp. 113 - 146.

> SOHINTO (David Mahouna), « Les indicateurs de performance vus par un contrôle des finances publiques », in La LOLF dans tous ses états, pp. 243 - 254.

> TAKAM (Dieudonné), « Le Tribunal criminel spécial au Cameroun », Disponible en ligne

sur https://www.cabinettakam.com/index.php/le-cabinet//publications/165-le-tribunal-
criminel-special-au-cameroun.

> TCHATCHOUA NYA (Magloire), NJIKE NGOMESSE (Désirée), KETCHANKEU (Pierre), « Perception des enjeux du contrôle de gestion dans les municipalités au Cameroun : une approche par le cadre théorique de l'acteur stratégique ? », FFI, Vol. 1, no 25, 2013, pp. 1 - 24.

> TOURE (Cheickna), « Le système de contrôle des finances publiques au Mali », Afrilex, no 4, https://www.afrilex.u-bordeaux4.fr

> VEDEL (Georges), « Décentralisation et finances locales : clés pour la réflexion », RFFP, no 38, 1992, pp. 9 - 13.

> YAMPILI ABDOURAHMANOU, « Le contrôle de l'exécution des budgets des établissements publics spéciaux au Cameroun : Le cas de la CNPS et de la CAA », IMJSTP, no 1, Vol. 9, Janvier 2024, pp. 6959 - 6971.

123

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

> YAMTCHEU KAYE (Estelle Audrey), « Le régime financier des collectivités territoriales décentralisées à statut spécial au Cameroun », RAFP, no 2 (10), pp. 1 - 22.

> YATTA (François Paul), « La gestion des finances locales en Afrique : Convergence et Divergence des systèmes », RAFL, éd. 2014, pp. 2 - 35.

IV. LEXIQUES ET DICTIONNAIRES

1- Dictionnaires littéraires

> Dictionnaire Universel, Hachette (4e éd.), 1507 p.

> Dictionnaire de Français Larousse, 455 p.

2- Lexiques et dictionnaires juridiques

> AVRIL (Pierre), GICQUEL (Jean), Lexique de droit constitutionnel, PUF (4e éd.), 155 p. > CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, (8e éd.), 2007, 986 p.

> GUINCHARD (Serge), DEBARD (Thierry), Lexique des termes juridiques, Paris Dalloz (25e éd.), 2017 - 2018, 1200 p.

> PHILIP (Loïc), Dictionnaire encyclopédique de Finances publiques, Economica, 1991, 2 Tomes, 1700 p.

> RUDELLE (Christian), Dictionnaire des termes juridiques, Édimages, 1992, 221 p.

> SILEM (Ahmed), ALBERTINI (Jean-Marie), Lexique d'économique, Dalloz, (11e éd.), 2010, 855 p.

> VANG LANG (Agathe), GONDOUIN (Geneviève), INSERGUET - BRISSET (Véronique), Dictionnaire de droit administratif, Paris, Sirey (7e éd.), 2015, 515 p.

IV. TEXTES JURIDIQUES

> Constitution camerounaise du 18 janvier 1996

> Loi no 2003/005 du 21 avril 2003 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême

> Loi no 2004/017 du 22 juillet 2004 portant loi d'Orientation de la décentralisation

> Loi no 2006/017 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation, les attributions et le fonctionnement des tribunaux régionaux des comptes

124

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

> Loi no 2009/011 du 10 juillet 2009 portant régime financier des collectivités territoriales décentralisées

> Loi no 2011/028 du 14 décembre 2011 portant création d'un Tribunal Criminel Spécial

> Loi no 2012/001 du 19 avril 2012 portant Code électoral modifiée et complétée par la loi no 2012/017 du 21 décembre 2012

> Loi no 2006/016 du 29 décembre 2016 fixant l'organisation et le fonctionnement de la Cour suprême

> Loi no 2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code pénal

> Loi no 2018/011 du 11 juillet 2018 portant Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques au Cameroun

> Loi no 2018/012 du 11 juillet 2018 portant régime financier de l'État et des autres entités publiques

> Loi no 2019/024 du 24 décembre 2019 portant Code général des collectivités territoriales décentralisées au Cameroun

> Décret no 97/049 du 5 mars 1997 portant organisation et fonctionnement du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière

> Décret no 2013/287 du 04 septembre 2013 portant organisation des services du Contrôle supérieur de l'État

> Décret no 2020/375 du 7 juillet 2020 portant règlement général de la comptabilité publique > Décret no 2023/475 du 7 novembre 2023 précisant certaines attributions et fixant les

avantages des comptables publics placés auprès des Collectivités Territoriales

Décentralisées

125

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

TABLE DES MATIÈRES

AVERTISSEMENT I

DÉDICACE II

REMERCIEMENTS III

SIGLES, ACRONYMES ET ABRÉVIATIONS IV

RÉSUMÉ VI

ABSTRACT VII

SOMMAIRE VIII

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIÈRE PARTIE : UN CONTRÔLE FORMELLEMENT STRUCTURÉ 30

CHAPITRE I : UN CADRE INSTITUTIONNEL NON JURIDICTIONNEL

OPÉRATIONNEL 32
SECTION I : UN CONTROLE PRIORITAIREMENT CONFIE AUX ORGANES

EXTERNES AUX CTD 32
Paragraphe I : Le contrôle diligenté par les agents de contrôle de l'exécution du budget

des CTD 32

A- L'ordonnateur 33

B- Le comptable public 35

Paragraphe II : Le contrôle opéré par les organes délibérants 38

A- Les organes délibérants directement désignés par le peuple 38

B - Les organes délibérants indirectement désignés par le peuple 39

SECTION II : UN CONTROLE ACCESSOIREMENT CONFIE AUX ORGANES

EXTERNES AUX CTD 41
Paragraphe I : Le contrôle diligenté par les organes dépendant de la Présidence de la

République 41

A- Le contrôle amorcé par les services du ministère délégué à la Présidence de la

République chargé du contrôle supérieur de l'État 41

B- Le contrôle poursuivi par le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière 43

Paragraphe II : Le contrôle effectué par le contrôleur financier 45

A - Le statut du contrôleur financier 45

B - Les missions du contrôleur financier 46

126

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

CONCLUSION DU CHAPITRE I 49

CHAPITRE II : UN CADRE INSTITUTIONNEL JURIDICTIONNEL INACHEVÉ 50

SECTION I : L'EFFECTIVITE DES JURIDICTIONS DE DROIT COMMUN 50

Paragraphe I : Les juridictions inférieures 51

A- Les juridictions de premier degré 51

B- Le Tribunal criminel spécial 53

Paragraphe II : Les juridictions supérieures de contrôle 55

A - La Cour d'appel 55

B - La Cour suprême 56

SECTION II : L'EFFECTIVITE PARTIELLE DES JURIDICTIONS FINANCIERES 58

Paragraphe I : L'absence des juridictions financières spécialisées 58

A - L'absence des tribunaux régionaux des comptes 58

B - L'absence de la Cour des comptes 60

Paragraphe II : L'existence d'une juridiction de substitution : la Chambre des comptes de

la Cour suprême 66

A - L'organisation de la Chambre des comptes de la Cour suprême 67

B - Les attributions de la Chambre des comptes de la Cour suprême 68

CONCLUSION DU CHAPITRE II 70

CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE 71

SECONDE PARTIE : UN CONTRÔLE MATÉRIELLEMENT AMÉNAGÉ 72

CHAPITRE I : UN CONTRÔLE DE LA RÉGULARITÉ 74

SECTION I : LES DIMENSIONS DE LA REGULARITE 74

Paragraphe I : La conformité 75

A- La conformité formelle 75

B- La conformité matérielle 77

Paragraphe II : La règle du service fait 80

A - La consistance de la règle du service fait 80

B- Les exceptions à la règle du service fait 82

SECTION II : L'ENGAGEMENT DE LA RESPONSABILITE DES AGENTS PUBLICS

DU FAIT DES IRREGULARITES 84

Paragraphe I : La responsabilité financière et budgétaire des agents publics des CTD 84

A - La responsabilité financière de l'ordonnateur 84

B - La responsabilité financière et budgétaire du comptable public 88

127

Le contrôle de l'exécution du budget des Collectivités Territoriales Décentralisées au Cameroun

Paragraphe II : La responsabilité pénale des agents publics du contrôle de l'exécution du

budget des CTD 90

A - Les faits générateurs de la responsabilité pénale des agents publics internes aux

CTD 90

B - La mise en jeu de la responsabilité pénale des agents publics internes aux CTD 91

CONCLUSION DU CHAPITRE I 94

CHAPITRE II : UN CONTRÔLE DE PERFORMANCE 95

SECTION I : LA MESURE DE LA PERFORMANCE BUDGETAIRE 96

Paragraphe I : Le contrôle des indicateurs de performance 96

A - La prédéfinition des objectifs budgétaires des CTD 96

B - La prédéfinition des indicateurs de performance 98

Paragraphe II : La densification des procédés de contrôle de performance 99

A - La survivance du contrôle de gestion 100

B - L'émergence de l'évaluation des politiques publiques 102

SECTION II : LA PRISE DE MESURES CONTRE LES DECIDEURS LOCAUX DU FAIT

DE LA CONTRE - PERFORMANCE BUDGETAIRE 104

Paragraphe I : La prise de mesures par les organes délibérants des CTD 104

A - La réduction des futurs budgets des CTD 104

B - La non - reconduction des candidatures des décideurs locaux défaillants 105

Paragraphe II : La prise de mesures par les citoyens des CTD 106

A - Les manifestations pacifiques 107

B - Le non renouvellement des mandats des élus locaux défaillants en matière

budgétaire 108

CONCLUSION DU CHAPITRE II 110

CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE 111

CONCLUSION GÉNÉRALE 112

BIBLIOGRAPHIE 112

TABLE DES MATIÈRES 112






La Quadrature du Net

Ligue des droits de l'homme