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Facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue dans la commune de Ngaba


par Jérémie NGUABI KAO
Université de Kinshasa - Graduat  2023
  

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CHAPITRE 1 : CONSIDERATIONS GENERALES ET THEORIQUES

Dans ce chapitre, nous définissons les concepts de base et développons les théories explicatives.

Il sied de dire que quatre concepts méritent d'être soulignés pour mieux éclairer notre thème de recherche, à savoir : facteur, phénomène et enfant.

1.1. Facteur

1.1.1. Définition

Selon le dictionnaire, un facteur est défini comme un élément qui influe ou qui agit. (Dictionnaire Larousse, 2012).

Comprenons tout de suite que le facteur, c'est l'agent moteur de l'action, il est, celui qui joue de l'influence dans l'activité, dans la scène afin d'être motivé. Il est même le pont, le bras de soutenance pour l'accomplissement de l'action criminelle qu'on observe chez certains enfants de la rue.

Le concept facteur est aussi défini comme un élément concourant à la production des biens et des services. Toujours est-il qu'il joue un rôle de liaison, grâce à son influence (Adam Smith, 1776).

Dans le cadre de notre étude, nous nous intéressons aux facteurs explicatifs du phénomène enfant de la rue qu'on constate en République Démocratique du Congo, précisément sur toute l'étendue de la ville province de Kinshasa. La commune de Ngaba, l'une de 24 communes de la province de Kinshasa est le terrain de notre recherche.

1.1.2. Facteurs susceptibles de favoriser le phénomène enfant de la rue

Le phénomène enfants de la rue est complexe et multifactoriel. Il est influencé par une combinaison de facteurs qui peuvent varier d'un contexte à un autre. (Wikipédia).

D'une manière générale, voici quelques facteurs susceptibles de favoriser ce phénomène (Jo Boyden, 1992) :

Ø Pauvreté et inégalités économiques : Les enfants de familles défavorisées sont plus susceptibles de se retrouver dans la rue en raison de la pauvreté et du manque de ressources. Les inégalités économiques croissantes peuvent également contribuer à l'augmentation du nombre d'enfants de la rue.

Ø Instabilité familiale : Les problèmes familiaux tels que la violence domestique, les abus physiques, sexuels ou émotionnels, le divorce, la négligence ou le décès des parents peuvent amener les enfants à quitter leur domicile et à se retrouver dans la rue.

Ø Urbanisation rapide : L'urbanisation rapide dans de nombreux pays peut entraîner une augmentation de la population urbaine et une demande croissante de services de base tels que le logement, l'éducation et les soins de santé. L'incapacité des systèmes sociaux à répondre à cette demande peut entraîner l'existence d'enfants vivant dans la rue.

Ø Migration et déplacement : Les enfants qui fuient les conflits armés, les catastrophes naturelles, la pauvreté ou d'autres formes de crises peuvent se retrouver sans abri dans les zones urbaines où ils cherchent refuge.

Ø Manque d'accès à l'éducation : L'absence d'accès à une éducation de qualité peut être un facteur déterminant dans la décision d'un enfant de quitter sa famille et de vivre dans la rue. L'éducation peut offrir des opportunités d'amélioration des conditions de vie, et son absence peut perpétuer le cycle de la pauvreté.

Ø Stigmatisation sociale : Les enfants de la rue peuvent être victimes de stigmatisation sociale, ce qui peut les conduire à se sentir exclus et marginalisés. Cette stigmatisation peut rendre difficile leur réintégration dans la société et les inciter à rester dans la rue.

Ø Absence de protection sociale : L'absence de filets de sécurité sociale adéquats, tels que des programmes d'aide sociale, des services de protection de l'enfance et des institutions de soutien familial, peut contribuer à la vulnérabilité des enfants et les laisser sans protection.

Il est important de noter que ces facteurs ne sont pas exhaustifs et qu'ils peuvent interagir de manière complexe. La compréhension de ces facteurs est cruciale pour développer des approches holistiques visant à prévenir et à remédier au phénomène des enfants de la rue.

1.2. Phénomène

1.2.1. Définition

Un phénomène est défini comme un fait, ou un événement qui frappe l'imagination. En fait un phénomène est un fait social qui se produit après un lapse de temps et à une période déterminée et par un groupe d'individus donné. (Erny, 1992).

1.2.2. Phénomène social

1.2.2.1. Notions des phénomènes sociaux 

Un phénomène social c'est un fait généré par l'être humain. Il découle de l'agir conscient d'une personne ou d'un groupe d'individus confrontés à un événement quotidien (Erny, 1992).

Souvent, des phénomènes sociaux éclatent les facteurs qui oppriment ou limitent les sujets. En raison du mécontentement, des phénomènes sociaux se produisent et visent à provoquer un changement des conditions existantes.

En sociologie, les phénomènes sociaux sont compris comme tous les événements, tendances ou réactions qui ont lieu au sein d'une société humaine établie. Ils se traduisent par des modifications de comportements collectifs (Émile Durkheim, 1894).

En d'autres termes, un phénomène social est une partie du comportement conscient de la société, une manière spécifique dont elle organise et structure ses réactions. Elle est déterminée par les conditions de vie objectives et subjectives dans lesquelles les gens vivent.

Ainsi, les phénomènes sociaux peuvent être de nature différente, et répondre à certains intérêts, voire être la conséquence d'autres types de facteurs, comme l'économique. Cependant, étant de nature éminemment sociale, leur perspective se limite aux relations entre les individus qui constituent une communauté.

1.2.2.2. Caractéristiques des phénomènes sociaux

Les phénomènes sociaux se distinguent des autres types de phénomènes en ce que, liés à la manière de penser et d'agir des personnes dans le cadre d'une société, ils sont de nature subjective et relative. Dans certains cas, ils répondent même à des caractéristiques de l'imaginaire collectif (Émile Durkheim, 1894).

Ils sont différents des phénomènes organique et psychique dans la mesure où ils se focalisent sur les représentations et les actions, ils ont une existence qui n'est pas seulement dans la conscience individuelle et qui n'est pas due seulement à des consciences individuelles.

On parle de phénomènes sociaux pour tenter de comprendre de manière systémique ou contextuelle les décisions prises par un groupe. C'est-à-dire que pratiquement tout peut être un phénomène social donné.

1.3. Enfant

1.3.1. Notions

Le mot « Enfant » vient du latin « infants » qui signifie « celui qui ne parle pas ». C'est ainsi que chez les Romains, le père avait le droit de vie et de mort sur ses enfants (Encyclopédie encarta, 1993)

Lorsque l'on pose la question de savoir ce que c'est un enfant ; il existe pratiquement plusieurs réponses et cela dépend d'un pays à un autre. Dans plusieurs pays occidentaux, l'enfant est considéré adulte à l'adolescence. En Inde, par exemple, l'enfant est considéré adulte lorsqu'il atteint l'âge du mariage, et cela parfois avant 15 ans. Dans certains pays d'Afrique, les enfants entrent rapidement dans le monde des adultes et exercent très tôt des responsabilités au sein de la famille.

Ainsi, c'est la loi de chaque pays qui règlemente ce qu'un enfant, c'est-à-dire un mineur en établissant l'âge de majorité. Il s'avère important ici de rappeler qu'il est de 20 ans au Japon et 18 ans en France (code Napoléon, 1804).

Dans cette étape d'évolution humaine, la loi congolaise de 2009 définit l'enfant comme toute personne qui n'a pas atteint l'âge de dix-huit ans. Cette loi continue à définir un certain nombre de catégories d'enfant dont l'enfant à conflit avec la loi à ces termes « l'enfant à l'âge variant entre quatorze et dix-huit ans, qui commet un manquement qualifié d'infraction à la loi pénale ».

Également l'enfance délinquante est définie comme un « phénomène social pathologique qui s'observe dans le comportement de toute personne, la vigueur et le charme de la jeunesse et qui viole non seulement la loi pénale mais encore la morale et les bonnes moeurs dans une société bien déterminée ». Faudrait-il encore dire que l'enfance est conçue comme la période de la vie partant de la naissance jusqu'à la puberté (Encyclopédie encarta, année).

La convention relative aux droits de l'enfant de 1989, qui a été ratifiée par la quasi-totalité des pays du monde, a voulu harmoniser les différentes lois internes. Cette nouvelle disposition internationale précise qu'« un enfant est un être humain âgé de moins de 18 ans », sauf si son pays lui accorde la majorité plus tôt.

Notons que c'est la déclaration de Genève de 1924 qui fut, un texte international qui définit pour la première fois les droits spécifiques à l'enfant.

La R.D.C n'a pas été muette à cette matière en promulguant la loi 01/009 du 10 Janvier 2009 relative à la protection de l'enfant.

1.3.2. Loi sur la protection de l'enfant

Pourtant, la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009, portant protection de l'enfant considère que dans son article 190 le délaissement d'un enfant en un lieu quelconque est puni d'un an à cinq ans de servitude pénale principale et d'une amande de cent mille à deux cents mille francs congolais, ... En connivence, de ce qui précède, le dépliant de la MONUSCO, sur l'Aide-mémoire pour les Policiers » reconnait que « Un enfant en rupture avec le milieu familial ou dans la rue est une personne en situation difficile que le policier doit protéger » (Makuru, 2006).

1.4. Enfant de la Rue

1.4.1. Définition

Pour Susanna Agneli (2010), l'enfant ou jeune de la rue « est un mineur sans protection adéquate et qui a élu domicile dans la rue, celle-ci étant considérée au sens large du terme et incluant les immeubles inoccupés, les terrains vagues, etc. »

Cité par SavoMakuru Jolie (2006), Massiala, (1990), tire du dictionnaire encyclopédique de l'enfant de la rue, la définition suivante : « l'enfant de la rue est toute personne, fille ou garçon n'ayant pas atteint l'âge adulte, et pour qui la rue est devenue la demeure habituelle et le moyen d'existence ».

Signalons qu'en RDC les concepts « Shégués » ou « phaseurs » leur convient bien malgré que certains d'entre eux ne l'acceptent alors que cela se justifie par leurs comportements.

Les âges des enfants de la rue varient entre 5 et 16 ans, mais il y en a d'autres qui sont âgés de 3 ou 4 ans aux côtés des frères plus âgés qui assurent leurs protections. Les filles sont en effet moins visibles car moins influencées, ne quittant pas trop le toit paternel. Et si elles descendaient dans la rue, elles sont utilisées comme domestiques, prostituées ou comme ouvrières.

Ce terme « enfant de la rue » a une connotation négative et désigne les enfants qui ont choisi de leur gré d'abandonner leurs familles respectives, ou ceux délaissés par ces dernières et ont finalement élu domicile dans les rues et vivent dans le vagabondage et dans la mendicité. Ils vivent dans la méconduite et dans l'indiscipline notoire, dans la débauche, dans le jeu, dans des trafics et d'autres pratiques assimilées aux infractions telles que vol, détournement, violences sexuelles pourtant réprimés par la législation en vigueur (centre d'accueil Ndako Ya Biso, 2006).

Le terme « enfants ou jeunes de la rue » renvoie à une expression générale qui regroupe l'ensemble des enfants d'une tranche d'âge comprise entre 6 et 18 ans passant tout ou une partie de leur journée dans la rue. Ce sont des enfants qui sont en rupture totale ou quasi-totale avec leur famille et leur groupe d'appartenance, connaissant une présence permanente dans la rue.

Ils dorment dans des abris de fortune qu'offre la ville (immeubles ou bâtiments non achevés, auvents de magasins, ponts, hangars...) ou dans des espaces ouverts en plein air si les conditions climatiques le permettent. Ce sont les enfants pour lesquels la rue est devenue la demeure habituelle et la source principale de moyens de survie. Pour ces jeunes, l'accoutumance et la dépendance à la rue sont tributaires de la durée dans la rue, et de leur mode de vie.

Luc Sibiri Kabore (2000) démontrera que « Les lieux populaires tels que les grands magasins, les salles de cinéma, les bars, les marchés, les restaurants, les gares routières, les mosquées sont leurs points d'attraction, points qui leur offrent de multiples occasions de commettre des infractions ».

Généralement organisés en groupe sous « l'encadrement » et la protection d'un leader, les enfants de la rue vivent dans un monde de violences, de drogue et dans des conditions d'hygiène qui les exposent très souvent au rejet de l'entourage.

1.4.2. Rapport entre phénomène enfant de la rue et délinquance

Il y a lieu à ce stade, de préciser le rapport entre la délinquance et le phénomène enfants de la rue. Pour Gilbert Robin cité par Fernand Cortez (1998) « La délinquance est l'aboutissement d'un processus d'inadaptation sociale. Elle se décèle par le vol, le banditisme, les coups et blessures volontaires, le recel, l'abus de confiance, l'escroquerie, la drogue, les délits sexuels... En effet, le qualificatif de délinquant définit une position plus qu'une manière d'être ».

1.4.3. Type d'enfants de la rue

Les enfants de la rue sont à différencier des enfants dans la rue qui sont ceux pour qui la rue est devenue la source de moyens d'existence dans la journée, mais qui rentrent dans leurs familles en fin de journée. Leurs revenus reviennent le plus souvent aux parents, qui encouragent alors les activités de l'enfant.

Savo, Makuru Jolie  (2006) citant Beaumauk (1996) d'une manière globale distingue le jeune de la rue en quatre catégorie : « Le jeune ou l'enfant de la rue, des jeunes totalement abandonnés, des enfants partiellement abandonnés, des enfants « clés au cou » et des enfants qui travaillent »

Pour Tessier (1998), il existe trois types d'enfants qui partagent leur visibilité dans la rue : les enfants de la rue qui vivent en permanence et ont rompu tous les liens familiaux et scolaires ; les enfants de la rue qui travaillent et rentrent presque tous les soirs dans une famille ; les enfants de la rue qui sont des fumeurs, qui vivent temporairement et exceptionnellement dans les rues. L'auteur conclut que ces différentes catégories interagissent entre elles.

1.4.4. Causes du phénomène enfant de la rue

Nous avons évoqué plus haut que les enfants qui ont élu domicile dans la rue n'ont pas toujours été là, ils n'ont pas toujours été des enfants des rues. Ils le sont devenus par un concours de circonstances d'ordre macrosocial : les inégalités sociales et la situation d'injustice qui poussent les enfants à abandonner leur foyer, les facteurs économiques et politiques. Ces facteurs conduisent à la désorganisation familiale et communautaire.

Pour Lucchini (1999), « Les dures et pénibles expériences familiales, marquées en général par des relations familiales troublées, le caractère provisoire des liens, et l'abandon de la part des familles, en général en jeune âge, induisent chez ces jeunes de forts sentiments d'insécurité, d'anxiété, de méfiance, d'indifférence, de rancune et d'agressivité. Ces aspects expliquent l'échec scolaire et professionnel, la délinquance, la fugue des maisons et des foyers de substitution ». Ces enfants vont alors élaborer des stratégies de maintien et de survie. Ces stratégies peuvent être durables et évoluer vers un mode de vie.

Ils sont en « situation de rue » car c'est précisément cette situation qui doit être qualifiée, et dont les discours et comportements des enfants sont des révélateurs. Il est donc absolument indispensable de comprendre ce contexte dans lequel évoluent les enfants.

Stoecklin (1980) pense qu'il est plus respectueux de comprendre la façon dont les acteurs vivent leur situation. Ainsi, il définit la situation de rue comme la combinaison, toujours variable selon les contextes et les individus, entre, d'une part, les contraintes qui pèsent sur les enfants marginalisés et, d'autre part, les stratégies que ces enfants développent pour faire de la rue un espace de survie. Tout projet d'aide doit donc tenir compte de ces compétences, plus ou moins développées et différenciées selon les contextes.

1.4.5. Activités des enfants de la rue

L'arrivée dans la rue d'un enfant se dessine à travers un cheminement. Ce cheminement est visible surtout par les activités exercées. La pratique des activités vise la survie de ces enfants.

Beaucoup d'enfants des rues exercent une activité. Ce sont généralement de petits métiers riches dans leur diversité et pratiqués de manière quotidienne et assidue. Il s'agit en fait d'une incessante quête quotidienne pour trouver de quoi subsister non seulement pour eux-mêmes mais aussi, le cas échéant, pour leur famille. Dans cette quête de survie, les enfants embrassent toute sorte d'activités susceptibles de leur procurer des revenus : « Il y en a qui volent, il y en a qui essuient les vitres des voitures, il y en a qui gardent les véhicules.

Parmi ces activités, il y en a qui revêtent des formes relativement acceptables, mais d'autres revêtent une forme marginale, et nous les qualifions de formes de déviance. Ces comportements ne sont pas isolés mais sont renforcés par un ensemble de pratiques entretenues par les enfants et par un conditionnement social de leur milieu de vie. Nous y reviendrons dans les chapitres suivants pour analyser plus profondément les logiques qui sous- tendent cette errance.

1.4.5.1. Activités rémunératrices ou lucratives des enfants de la rue

Les activités lucratives dans la rue ne sont pas stables et presque tous les enfants ont des périodes pendant lesquelles ils n'exercent aucune activité. La finalité de l'ensemble de ces activités est la consommation. Ils évoluent dans une logique d'immédiateté (ici et maintenant) si bien que les profits de ces différentes activités disparaissent dans la consommation immédiate.

Les activités sont diversifiées suivant les intérêts et les aptitudes de chaque enfant. Cependant, il y a une catégorisation dans la pratique des activités : les plus petits et les nouveaux arrivés n'ont pas le même champ d'activités même si parfois ils sont utilisés » par les grands pour commettre des vols.

On retrouve assez souvent les plus petits et les nouveaux arrivés dans les activités suivantes :

ï La plonge : beaucoup d'enfants travaillent comme plongeurs dans les Restaurants.

ï La vente d'eau : souvent employés par les femmes pour la vente d'eau glacée.

ï Le portage des bagages : les enfants aident les vendeuses à porter leurs légumes et autres marchandises moyennant de modiques pièces d'argent.

ï Le balayage et le ramassage d'ordures aux abords des lieux publics.

ï La recherche de cuivre, de l'aluminium, des bouteilles, des boîtes usagées... à travers les poubelles, les tas d'ordures et dans les concessions. Tous ces objets seront revendus.

Une autre activité non moins importante découverte par les enfants et jugée rémunératrice, c'est le gardiennage des chaussures et les autres lieux de prière. En plus de cela, les enfants avec leur boîte de tomate procurent de l'eau aux fidèles musulmans pour les ablutions. Pour les plus grands et les jeunes qui se sont fortement enracinés on les retrouve plus dans les activités suivantes :

ï Le parking

ï Le gardiennage de véhicules

ï Le docker dans les marchés et les gares routières.

Outre ces activités valorisantes qui peuvent être considérées comme conformistes, ils existent d'autres pratiques (bien que ce soit des activités qui procurent des avantages pécuniaires) qui ne s'inscrivent pas tout à fait dans les limites de ce qui est acceptable pour la société.

1.4.5.2. Activités déficientes

Ce sont des comportements prohibés qui vont contre les principes socialement admis. La déviance s'applique à un ensemble de conduites variées ayant en commun le non-respect des normes généralement acceptées.

a. Vol et délinquance

Le vol est pratiqué par la majeure partie des enfants vivants dans la rue. Pour les plus petits, les opérations de vol sont moins organisées, mais pour les plus grands ou les aînés de la rue, ce sont des opérations bien organisées allant très souvent jusqu'à l'utilisation d'armes blanches. Les objets volés sont généralement les portables, les porte-monnaie, les rétroviseurs, les autoradios.... Le terme « volé » est usité par certains enfants sans aucune gêne (Centre d'accueil Ndako Ya Biso, 2006).

Certains affirment voler par égoïsme. Ils sont frustrés par l'inégale répartition des biens et de l'argent. Ils supportent difficilement le fait que les autres aient de l'argent et qu'eux ils n'en ont pas. Il ressort la question de la distribution inégale de richesses dans le monde et le fossé grandissant entre pauvres et riches. Les avantages certains que procurent les actes de vols contribuent à enraciner davantage certains enfants dans la rue : « Si chaque jour tu peux gagner 5000 francs par le vol et que tu es habitué à manger du bon, tu ne veux absolument plus repartir parce que quand tu es habitué à l'argent du vol, tu ne peux plus repartir (Centre d'accueil Ndako Ya Biso, 2006).

b. Pratiques sexuelles dévalorisantes

Certains jeunes, fascinés par l'argent se laissent entraîner dans des pratiques sexuelles néfastes. C'est notamment la pratique de la pédophilie qui est très fréquente dans le milieu de la rue de Ouagadougou (Luc Sibirikabore, 2000). Les pédophiles sont généralement des personnes extérieures, des adultes et parfois des étrangers qui sodomisent les enfants contre de petites sommes d'argent. Ces sommes, bien qu'elles soient modiques, contribuent à renforcer la motivation et à aiguiser l'intérêt des enfants pour la pratique de ces actes. Désormais ce sont les enfants eux-mêmes qui courent vers les exploiteurs parce qu'ils ont besoin de l'argent pour survivre. Ce ne sont pas des activités valorisantes mais elles procurent quelques avantages suffisants pour garder l'enfant aussi longtemps dans la dépendance.

Ils sont alors Victimes de l'exploitation sexuelle, mais recourent à la prostitution. Il est très difficile pour un enfant qui a vécu dans de telles pratiques de pouvoir revenir en arrière. Il est obligé dans cette situation de poursuivre sa « carrière » qui ne sera rien d'autre que l'endurcissement de son caractère, que l'installation dans la « carrière délinquante ».

c. Mendicité

La mendicité est une activité relativement plus facile. Elle est la première activité exercée par tous les enfants. Il y a peu d'enfants vivant dans la rue qui ne pratique pas la mendicité. Mais au fur et à mesure que l'enfant prend de l'âge et grandit dans la rue, il est obligé d'abandonner cette activité. Il est de plus en plus gêné de mendier, mais surtout il n'attire plus la pitié des gens. Il est grand et personne ne s'intéresse plus à lui, mais ils utilisent certains petits pour mendier à leur compte. Même étant dans l'incapacité de mendier, les plus grands se nourrissent toujours - pas uniquement - des revenus de la mendicité des plus petits.

La mendicité dans ce sens, non seulement contribue à mettre des enfants dans la rue, mais aussi et surtout contribue à les maintenir dans ce milieu aussi longtemps que leur personnalité est confrontée à une situation de complète aliénation. La relative facilitée de cette pratique, les gains qu'elle génère, et l'idée de solidarité et de pitié qu'elle suscite font qu'elle joue une fonction importante dans la relation de l'enfant à la rue. Cette fonction peut comporter deux (2) dimensions : survie et solidarité (Centre d'accueil Ndako Ya Biso, 2006 ).

1.5. Etudes antérieures

Nous ne sommes pas le premier chercheur à nous intéresser à la problématique des enfants de la rue. Ainsi, nous consacrons cette présente section à la présentation des certaines études qui ont abordé explicitement ou implicitement cette problématique avant la nôtre.

1.5.1. Etude de NsimbaNdongo (2010)

NsimbaNdongo a réalisé une étude sur l'environnement familial des jeunes délinquants à Kinshasa. Dans cette étude, il a essayé d'analyser l'état psychologique des familles des jeunes « kuluna » en établissant une relation entre leur environnement familial et leurs conduites délictueuses. Il a aussi analysé l'image des jeunes qui se livrent aux actes des vandalismes et celle qu'ils se font de l'autorité parentale.

Il a utilisé la méthode clinique et l'étude de cas, et a travaillé avec sept jeunes « Kuluna » de la commune de Kinsenso.

Son étude a abouti aux conclusions selon lesquelles la majorité des jeunes Kuluna proviennent du milieu familial dysfonctionnel, caractérisé par l'appauvrissement des rôles de responsabilités de membres. Certains jeunes ont été rejetés avant même leur naissance et d'autres ont été à la base de divorce ou séparation de leurs parents.

Aux seins de leurs familles respectives règnent des irrégularités dans le style de vie entre parents et enfants.

1.5.2. Etudes de NsumbuNansadi (2015)

Dans son étude intitulée « violence et comportement agressif des enfants dites de la rue », NsumbuNansadi a voulu vérifier l'hypothèse selon laquelle, la pauvreté, le manque d'affection et d'encadrement ainsi que la marginalisation seraient les causes de comportement agressif des enfants dits de la rue.

Le chercheur a utilisé les études de cas de cinq sujets avec la technique du test de famille.

Après analyse et interprétation des données, NsumbuNansadi a abouti aux résultats selon lesquels les enfants de la rue sont victimes de manque d'affection, d'encadrement et de la marginalisation. Et sans espoir d'un lendemain meilleur, quelques-uns se refugieraient dans la drogue, le viol, la prostitution et la violence, etc.

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