WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le Cameroun et la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques


par Eric Salomon Ngono
Université de Yaoundé I  - Master 2 2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B- Intensification des rencontres : le climat, un enjeu international de 1974 à 1990

Les conférences ayant posé les jalons des questions climatiques se focalisaient sur les concepts d'environnement, d'écologie ainsi que les moyens de leur protection. Mais à partir de 1974, une tendance centrée sur le climat amena la communauté scientifique internationale à une analyse profonde des variables qui sous-tendent le phénomène climatique et ses corollaires. Dès lors nous assistons à des conférences, la mise sur pied des projets sur le climat mondial, et à la création des institutions dédiées au suivi du climat à l'échelle globale.

1- La première conférence mondiale sur le climat en 1979

Après 1972, les questions climatiques prenaient une place majeure dans la vie internationale. En 1974, lors de la sixième session extraordinaire, l'Assemblé Générale des Nations Unies invitait l'OMM à entreprendre une étude du changement climatique. Immédiatement, l'OMM mit en place un Comité d'experts du changement climatique auprès de son comité exécutif33. De même, lors de la conférence internationale qui se tint en juillet 1974 à Stockholm sous le thème : "la physique du climat et sa modélisation", il fut question d'émettre des tentatives de structuration de l'étude des questions climatiques. Cette rencontre regroupant principalement Américains et Européens qui jetaient ainsi les bases de l'étude des fondements physiques de la dynamique du climat et mirent sur pied des programmes centrés sur l'étude et la recherche du climat34. Elle eut pour conséquence l'organisation en 1979 de la conférence mondiale sur le climat.

31 Ibid.

32 Ibid.

33 Zilman, "Historique des activités..."p.143.

34 Merle et al, Changement climatique...p.254.

29

La conférence mondiale sur le climat se tint du 12 au 23 février 1979 au Centre International de Conférences de Genève. Elle fut l'initiative de l'OMM en collaboration avec l'Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture (UNESCO), l'Organisation des Nations Unies pour l'Agriculture et l'Alimentation (FAO), Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le PNUE, le CIUS et d'autres partenaires35. Elle fut organisée par un comité présidé par l'Américain Robert M. White, et a réuni 350 spécialistes représentants de 53 pays et organisation internationales. Après deux semaines de délibérations, une déclaration fut élaborée et adoptée en guise d'appel aux nations.

Elle prit ainsi la mesure de l'influence du climat sur les activités humaines tout en exhortant les nations du monde entier à s'engager, sans tarder à prévoir et prévenir les changements climatiques qui seraient dus à l'activité de l'homme et dont les effets seraient néfastes pour l'humanité. Elle mit en lumière les problèmes liés aux changements climatiques. Cette conférence permit de conclure que les émissions anthropiques de dioxyde de carbone pourraient avoir un effet à long terme sur le climat36. Les participants adoptèrent une déclaration commune qui attestait que l'augmentation des concentrations de CO2, principale cause du changement climatique résulte de l'utilisation des combustibles fossiles, de la déforestation et des changements d'affection des terres. Ils demandèrent à tous les gouvernements du monde de "prévoir et prévenir les changements climatiques d'origine anthropique qui pourraient nuire au bien-être de l'humanité"37. Ils demandèrent aussi la création de trois instances internationales : le Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat (GIEC), le Programme Climatologique Mondial de l'OMM et le Programme Mondial de la Recherche sur le Climat. Ce fut la première fois que presque la totalité des représentants des Etats membres de l'OMM fut alertée par l'urgence de la prise en compte du problème climatique. Les organisateurs appelèrent toutes les nations à coordonner leurs efforts pour comprendre le changement climatique et établir des plans d'étude38.

2- Les conférences de Villach et les premiers instruments internationaux relatifs à la protection de l'atmosphère

La décennie 80 a été décisive dans le débat sur les changements climatiques. Les inquiétudes scientifiques sur la gravité des conséquences d'un changement possible du climat prenaient de l'ampleur. La recherche sur la question s'accentua pendant cette période. De 1980

35 Zilman, "Historique des activités..." p.143.

36 https://www.actualites-news-environnement.com/21729-1979-2009-histoire-trente-ans-de-lutte-changements-climatiques.html/ Consulté le 20-11-2018 à 16h40mn.

37 Ibid.

38 Merles et al, Changement climatique...p.255.

30

à 1985, deux conférences internationales d'évaluation du rôle du dioxyde de carbone et d'autres gaz à effet de serre dans les variabilités climatiques étaient organisées39. En 1985, la convention de Vienne et le protocole de Montréal venaient compléter cet engagement international.

a) Les deux conférences de Villach 1980 et 1985 : Rapport entre effet de serre, changement climatique et les écosystèmes

En écho à la prise de conscience scientifique de la gravité d'un probable changement climatique, le PNUE, l'OMM et le CIUS organisèrent à Villach en Autriche deux conférences respectivement en 1980 et en 1985. En 1980, malgré les incertitudes scientifiques encore plus grandes, les chercheurs conclurent que la menace climatique était suffisamment éminente. Pour le groupe réuni en 1980, la priorité était la connaissance et la nécessité de faire de diagnostics poussés. Ce premier rassemblement appela à la tenue d'une grande conférence plus tard40. Cet appel s'est concrétisé en 1985 par l'organisation de la deuxième conférence de Villach.

En octobre 1985, se tint à l'écart de 5 ans la deuxième conférence de Villach sous la houlette des organisateurs de la première. Elle avait pour thème : "effet de serre, changement climatique et écosystème". Les participants représentants 29 pays adoptèrent une déclaration très ambitieuse qui conclut qu'un réchauffement certain était inévitable dès la première moitié du XXIe siècle. Le monde connaitrait des augmentations de températures jamais observées par le passé. Une série de recommandations a été faite aux gouvernements qui devaient lancer dans le cas échéant le débat sur le projet d'élaboration d'une convention mondiale sur les changements climatiques.

Les conclusions étaient sans appel car : "le réchauffement climatique apparaît aujourd'hui inévitable du fait des agissements passés, le taux et le niveau du réchauffement futur pourraient être profondément dépendants de politiques gouvernementales appropriées sur la conservation de l'énergie, l'utilisation des énergies fossiles et l'émission de gaz à effet de serre"41. La conférence de Villach de 1985 a le mérite d'avoir placé la question du changement climatique sur le devant de la scène internationale et pour la première fois sur les agendas politiques des Etats.

b) La Convention de Vienne 1985 : essai de l'élaboration d'un cadre sur la protection de la couche d'ozone

La Convention de Vienne sur la protection de la couche d'ozone a été adoptée le 22 mars 1985. Cette convention détermine la nécessité d'accélérer la coopération internationale

39 Zilman, "Historique des activités...", p.144.

40 Merles et al, Changement climatique..., p.256.

41 Ibid.

31

pour limiter les risques liés aux activités humaines pour la couche d'ozone. Les Etats membres de l'Organisation des Nations Unies s'engageaient ainsi à protéger la couche d'ozone et à coopérer scientifiquement afin d'améliorer la compréhension des processus atmosphériques. Les parties prenaient des mesures appropriées conformément aux dispositions de la convention et des protocoles en vigueur auxquels elles sont parties pour protéger la santé humaine et l'environnement contre les effets néfastes résultant ou susceptibles de résulter des activités humaines qui modifient ou sont susceptibles de modifier la couche d'ozone42. A son adoption, la Convention de Vienne ne contenait aucun dispositif contraignant. Mais, elle prévoyait des protocoles spécifiques qui pourraient être annexés43.

c) Le Protocole de Montréal 1987 sur les substances appauvrissant l'atmosphère

Le protocole de Montréal est un traité international conclu à Montréal le 16 septembre 1987 relatif aux substances qui appauvrissent la couche d'ozone. Il vise à réduire et à éliminer progressivement l'utilisation desdites substances. Avec la découverte du trou dans la couche d'ozone au-dessus de l'Antarctique, et sur la base de la convention de Vienne, le protocole de Montréal a été négocié et ratifié par 24 Etats de la Communauté Economique Européenne (CEE) 44. Il impose aux parties signataires, la suppression de l'utilisation du chlorofluocarbone (CFC), de halons et de tout autre ODC "ozone depleting chemicals" synthétique selon un calendrier très précis et de nombreuses contraintes. Les parties devaient déposer un rapport statistique annuel au secrétariat du Protocole, sur leur production et leur consommation des substances réglementées, ainsi que sur leurs importations et exportations de ces substances. Le tableau suivant présente les substances règlementées par le protocole de Montréal.

Tableau n°1 : Les substances règlementées par le Protocole de Montréal

Groupe

Substance

Potentiel appauvrissement de la couche d'ozone

 

CFCl3 (CFC-11)

01,0

 

CF2Cl2 (CFC-12)

01,0

Groupe I

C2F3Cl3 (CFC-113)

00,8

 

C2F4Cl2 (CFC-114)

01,0

 

C2F5Cl (CFC-115)

00,6

 

CF2BrCl (halon-1211)

03,0

Groupe II

CF3Br (halon-1301)

10,0

 

C2F4Br2 (halon-2402)

6,0

42 Art 1 convention de Vienne, p.2.

43 https://www.actualites-news-environnement.com/21729-1979-2009-histoire-trente-ans-de-lutte-changements-climatiques.html/ Consulté le 20-11-2018 à 21h19mn.

44 Ibid.

32

Source : Protocole de Montréal, annexe 1, p.14.

3- La Conférence de Toronto et ses implications dans la structuration internationale du suivi du climat

La dimension politique de la conférence de Villach déboucha sur d'autres rencontres scientifiques. Ces rencontres se conclurent par des propositions concrètes visant la structuration institutionnelle de la question du changement climatique et la convocation de la deuxième conférence internationale sur le climat.

a) La Conférence de Toronto juin 1988

En 1988, du 27 au 30 juin, se tint à Toronto au Canada une conférence axée sur le climat. Elle fut organisée par l'OMM et le PNUE sous le thème : "l'atmosphère en évolution : implication pour la sécurité du globe". La conférence de Toronto connu la participation de plus de 300 chercheurs et décideurs. Les chercheurs invitèrent les gouvernements, l'ONU et ses institutions, les ONG, le secteur privé, les établissements d'enseignement à : "prendre des mesures spécifiques pour réduire la crise qui se profile du fait de la pollution atmosphérique"45.

A l'issue de la conférence de Toronto, les participants appelèrent à accorder des ressources accrues à la recherche et la surveillance dans le cadre du Programme Climatologique Mondial (PCM), appuyer du futur GIEC et à mettre au point une convention mondiale de grande portée, qui serve de cadre à des protocoles de protection de l'atmosphère46. Une nouvelle étape fut franchie à Toronto en matière de médiatisation et de politisation de la question du changement climatique. Au-delà de son atmosphère surchauffée, le principal acquis de Toronto fut l'engagement des Etats à réduire de 20%, par rapport à 1988, les émissions de CO2 d'ici 2005. L'autre importance de Toronto fut l'engagement de l'OMM et du PNUE de mettre en place un mécanisme intergouvernemental pour l'étude du changement climatique, ses impacts et les mesures d'adaptation. La même année le premier objectif est atteint par la création du Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat (GIEC) en anglais Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC) 47.

b) Création et rôle du GIEC

Le Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat a été créé en 1988 par deux institutions des Nations Unies que sont l'OMM et le PNUE à la demande du groupe des sept pays les plus industrialisés du monde de l'époque connu sous le nom de G7. En 1988, suite au succès de la conférence sur l'amincissement de la couche d'ozone qui s'était tenue à

45 Zillman, "Historique des activités...", p.145.

46 Ibid.

47 Merles et al, Changement climatique..., p.257.

33

Montréal l'année précédente, l'OMM et le PNUE décident la création de cette instance singulière d'expertise, chargée d'informer les gouvernements de l'état des connaissances et de passer en revue les politiques nationales ou internationales liées aux changements climatiques48. Organisme intergouvernemental ouvert à tous les pays membres de ces institutions onusiennes, le GIEC a pour mandat d'évaluer, sans parti pris et de manière méthodique et objective, l'information scientifique, technique et socio-économique disponible en rapport avec les questions de changement du climat49.

Le GIEC devait rendre les différents points de vue et des incertitudes. Il devait travailler à dégager clairement les connaissances qui relèvent d'un consensus de la communauté scientifique et à identifier les limites d'interprétation des résultats. La compréhension des fondements scientifiques du changement climatique provoqué par l'homme doit permettre d'en établir les conséquences et envisager des stratégies d'adaptation et d'atténuation50. Le GIEC fonctionne sur la base d'une assemblée générale qui se réunit une fois par an et dans laquelle chaque membre dispose d'une voix. Toutes les décisions sont prises par les représentants des gouvernements, par consensus, en assemblée plénière. Le bureau est l'organe exécutif du GIEC. Il est composé de scientifiques élus par l'assemblée plénière de manière à représenter les différentes disciplines et régions du monde. Notons que le bureau est constitué d'un président, de trois vice-présidents des bureaux de chaque groupe des trois groupes de travail et deux coprésidents de l'équipe spéciale sur les inventaires. Ces dirigeants sont élus pour un mandat de 5 à 7 ans. Le GIEC dispose d'un secrétariat à Genève, hébergé par l'OMM51.

c) Premier rapport d'évaluation du GIEC et la Deuxième Conférence Mondiale sur le Climat en 1990

Le GIEC, à sa création, avait pour objectif de disposer d'un rapport final d'évaluation vers la fin de l'année 1990. Conscient de cet objectif, le rapport de la deuxième session de juin 1989 avait tracé la voie à suivre pour les douze mois suivants52. L'accélération de la recherche dans le but d'appréhender les changements climatiques a porté des fruits avec l'élaboration du premier rapport du GIEC en 1990 couplé par l'organisation de la deuxième conférence mondiale sur le climat. Dans son mandat de mise en oeuvre des procédures d'évaluation et d'examen sur la question des changements climatiques, le GIEC devait fournir des rapports aux

48 Aykut & Dahan, "La gouvernance du changement climatique...", p.108.

49 Mieux Comprendre le GIEC, P.2.

50 Ibid., p.5.

51 Ibid.

52 D. G. Hirst, Negociating climates: The politics of climate change and the formation of the Intrgovernmental Panel on Climate Change (IPCC), University of Manchester, 2014, p.160.

34

décideurs afin d'implémenter les politiques fiables d'atténuation des émissions des gaz à effet de serre (GES). En août 1990, le premier rapport d'évaluation du GIEC fut approuvé à la quatrième session de l'institution qui se tint à Sundsvall en Suède.

Ce rapport a essentiellement produit un diagnostic du réchauffement climatique et de ses causes parmi lesquelles l'augmentation de l'effet de serre. L'activité humaine fut reconnue comme étant probablement l'une des causes principales. Il établit que "les émissions dues aux activités humaines accroissent sensiblement la concentration dans l'atmosphère des gaz à effet de serre à savoir le dioxyde de carbone, le méthane, le chlorofluocarbone et l'oxyde nitreux"53. Le rapport prévoyait une hausse maximale de 3°C de température moyenne du globe à la fin du XXIe siècle. Il faisait état de certitude quant au rôle des activités humaines sur la modification et la composition de l'atmosphère. Mais ce document rappelait de nombreuses incertitudes attachées à ces projections basées sur des modèles numériques et qu'il se gardait d'attribuer le réchauffement de 0,3 à 0,6°C observé au cours des cent dernières années54.

La deuxième Conférence Mondiale sur le Climat (CMC-2) s'est tenue sous les auspices de l'OMM, de l'UNESCO, du PNUE, du FAO et du CIUS à Genève du 29 octobre au 7 novembre 1990. Les travaux furent divisés en deux partie à savoir six jours de présentation scientifique et technique ; et de discussions auxquelles participèrent 747 représentants de 116 pays55. Après la présentation du premier rapport d'évaluation du GIEC, les deux parties s'accordèrent à l'unanimité sur la nécessité de préparer les négociations en vue d'élaborer une Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques qui devrait débuter à Washington en février 1991. Cet appel général à une action internationale en matière de changement climatique demandait aux Etats la mise sur pied d'un Système Mondial d'Observation du Climat.

II- La conception camerounaise des notions d'environnement et d'écologie de

1960 à 1992

A l'image de la configuration internationale, les questions environnementales et écologiques n'étaient pas au centre des préoccupations des gouvernants de Yaoundé jusqu'en 1992. Dès lors le jeune Etat qui venait juste d'accéder à son indépendance le 1er janvier 1960 pour la partie orientale et le 1er octobre 1961 pour la partie occidentale avait d'autres aspirations. Le pays comptait d'abord assurer le bien-être de la population et de réaliser son développement

53 https://www.lemonde.fr/article/2014/11/04/climat-5-rapports-du-giec-chiffres alarmants_4517326_4355770.html Consulté le 21-11-2018 à 22h35mn.

54 J-L. Fellous, "Le Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat à l'interface entre science et politique", p.4.

55 Zillman, "Historique des activités...", p.145.

35

économique. Après la conférence de Stockholm, le pays implémenta quelques projets et adopta des lois prônant la protection et la préservation de l'environnement et l'écosystème.

A- Le nouvel Etat indépendant face aux problèmes environnementaux : tentative d'élaboration d'une conscience climatique nationale

Au Cameroun, après l'indépendance, on ne trouve nulle part une définition du concept environnement. Dans les écrits politiques, économiques, législatifs, sociaux et même dans le domaine de la recherche scientifique, la perception des problèmes écologiques et environnementaux était encore au stade embryonnaire. Pour le définir au Cameroun à cette époque, il fallait se référer aux données relevant de certains secteurs à l'instar de la lutte contre la désertification. Ce secteur a connu la première démarche effectuée par le Cameroun en matière de protection de l'environnement, l'approvisionnement en eau potable et les campagnes d'hygiène et de salubrité publique56. La notion d'environnement était admise très lentement par les décideurs dans les politiques de planification, d'aménagement et, plus tard, dans la sphère scientifique à travers la recherche.

1- Politiques publiques et protection de l'environnement au Cameroun de 1960 à 1972

Pendant les premières années qui succédèrent son accession à l'indépendance, il existait un vide juridique en matière de protection de l'environnement au Cameroun. Les politiques camerounaises et les aménagistes se focalisaient sur le développement du pays et l'acquisition d'un sentiment patriotique dans un Etat fédéral constitué d'une diversité ethnique et culturelle. Pour les décideurs, il était impérieux de bâtir un Etat fort afin de consolider l'unité nationale.

L'analyse des discours politiques et autres écrits, de 1960 à 1972, ne fait nullement

ressortir des préoccupations spécifiquement environnementales. Au moment de l'indépendance, l'objectif majeur était d'assurer le doublement du revenu national sur une période de 20 ans. Il fallait alors garantir l'augmentation de la production agricole, l'industrialisation et le désenclavement du pays57. Pour se faire, il était question de s'entourer des techniciens chargés de la conception, la mise en oeuvre et le suivi des projets. Ces ingénieurs des spécialités variées à savoir architectes, urbanistes, cartographes et autres n'intégraient pas encore des aspects relatifs à la protection de l'environnement. Pour ces techniciens, concepteurs du développement, l'environnement n'était pas perçu comme un tout, mais de façon restrictive58.

56 Environnement au Cameroun : Perspective de l'environnement au Cameroun, CCCC, Avril 1991, P.2.

57 Ibid., p.4.

58 Ibid., p.5.

36

2- La communauté scientifique camerounaise et la question environnementale au lendemain des indépendances

Les programmes de recherche et d'étude dans les grandes écoles, instituts de recherche et à l'Université Fédérale du Cameroun créée en 1962 ne faisaient pas ressortir des thèmes ou sujets spécifiques à l'environnement. L'environnement paraissait par l'entremise des rapports qui existaient entre ce domaine et des sujets relatifs à l'écologie, la géographie, la botanique, le droit, la pédagogie, l'hydrographie, l'économie, l'agronomie etc59.

Dans le domaine de la formation et l'éducation, les programmes d'enseignement ne comportaient pas des cours sur l'environnement. Dans les cycles primaire et secondaire, la notion d'environnement pouvait être perçue à travers les disciplines telles que la géographie, les sciences de l'observation et naturelles, l'hygiène. Au supérieur, on notait une quasi absence d'un programme ou des formations spécialisées dans ce domaine, les diplômes et cours sur l'environnement étaient rares. Comme cela l'était dans le primaire et le secondaire, les connaissances sur la question se limitaient au contenu des programmes des disciplines qui lui sont apparentées comme l'écologie, la géographie, l'histoire et les sciences naturelles60. Il apparaît donc que la première décennie qui a suivi l'indépendance, les hommes de science camerounais ignoraient pratiquement les préoccupations liées à l'environnement.

3- L'opinion publique

On entend par opinion publique l'ensemble des convictions et des valeurs plus ou moins partagées, des jugements, des préjugés et des croyances de la population d'une société donnée. C'est aussi la manière de penser la plus rependue dans une société, celle de la majorité du corps social61. Avec un niveau d'instruction relativement faible lié à la rareté des établissements scolaires, l'opinion publique camerounaise regroupait ici les paysans et les citadins.

Pour les premiers, l'environnement est un espace de production agro-pastorale, piscicole et de chasse ; ensuite vient la communauté villageoise et les infrastructures de production. Les espaces sacrés étaient aussi considérés par les paysans comme partie prenante de l'environnement62. En ville, le citadin percevait l'environnement comme un tout complexe enchevêtré de bistrots, cabines téléphoniques, toilettes publiques, force de l'ordre, bâtiment administratifs, marchés, voiries, bruits, embouteillages, encombrements humains mais aussi les

59 Ibid.

60 Ibid.

61 https://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/lopinion-publique/75042.html Consulté le 23-11-2018 à 7h50mn.

62 Environnement au Cameroun..., p.6.

37

relations interurbaines. Pour le grand public, l'environnement était perçu par rapport à l'intérêt immédiat qu'il représentait.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite