2.1.3 Définition du modèle
Définition 2 Un jeu de
marchandage à deux joueurs est un couple (A, d) tel que :
A est une partie convexe et compacte de
]]82, appelée l'ensemble des
alternatives
d est un élément de A, appelé point de
désaccord
il existe x E A tel que x » d On note J l'ensemble de
ces jeux.
Dans la suite, on écrira simplement jeu pour
désigner un jeu de marchandage à deux joueurs. On note
Définition 3 Une règle
de marchandage est une application qui à tout jeu (A, d) E J associe
un unique point de A.
2.1.4 Les propriétés de Nash
Dans cette partie, on se donne une règle de
marchandage. On tentera également d'expliquer la
légitimité du choix de tels axiomes dans la construction d'une
solution.
1. L'efficacité
Définition 4 (b est dite
efficace lorsque pour tout jeu (A, d) E J , il n'existe aucun x E A
tel que x > (b(A, d).
L'efficacité de la solution semble être un
pré-requis indispensable à sa construction. L'objectif est en
effet d'améliorer la situation des deux joueurs, l'existence d'une
solution meilleure n'a donc pas lieu d'être.
2. La symétrie
Définition 5 (b est dite
symétrique lorsque pour tout jeu (A, d) E J tel que
si (x1, x2) E A alors (x2, x1) E A
d1 = d2
7
on a 01(A,d) = 02(A,d)
La symétrie sous-entend que l'arbitre ne donne de
préférence à aucun des deux joueurs lorsque le jeu est
symétrique.
3. L'invariance par transformation affine
Définition 6 0 est dite
invariante par transformation affine lorsque pour tout jeu (A, d) E J
, et pour tous a, b E R2 avec a » (0,
0),
0(aA + b, ad + b) = a0(A, d) + b
L'invariance par transformation affine signifie que l'en
modifiant de la même manière l'ensemble des alternatives et le
point de désaccord, la solution obtenue sera identique à la
solution initiale modifiée similairement.
4. L'indépendance des alternatives non pertinentes
Définition 7 0 est dite
indépendante des alternatives non pertinentes lorsque pour tout
jeu (A, d) E J et A' c R2,
(A c A' et 0(A', d) E A)
0(A', d) = 0(A, d)
Cette notion peut être illustré par le fait qu'en
retirant une alternative non pertinente à A', la
solution restera la même.
2.2 Existence et unicité de la solution de
Nash
Lemme 1 Soit (A, d) un jeu. La
fonction
f : x E R2 1--0'
x1x2.
admet un unique maximiseur sur Ad := {x -- d | x E
A, x . d}. Preuve 1 Ad est :
non vide car (A, d) est un jeu,
fermé car intersection des fermés A -- d et
{y E R2 | y . (0, 0)},
borné car inclus dans le borné A --
d.
f étant continue, elle admet donc un maximum sur
A--d. Montrons à présent que ce maximum est unique.
On suppose que f admet deux maximiseurs distincts x et y sur
Ad.x`y
2 E Ad, car Ad convexe
par intersection de d'ensembles convexes. Or on a :
f(x+y) (x1 +
y1l (x2 + y2) (1)
11\\ 2 J 2
J 2 J 1
= 4(x1x2 +
y1y2 + x1y2 + x2y2)
(2)
1
= 4(2x1x2 +
2y1y2 + (x1 -- y1)(y2 --
x2)) > f(x) (3)
Ceci contredit le fait que x est maximiseur de f sur Ad.
Justifions l'inégalité (3). D'une part, par
hypothèse, f(y) = f(x), d'où
1 1
4(2x1x2 +
2y1y2) = 4(2f(x) +
2f(y)) = f(x).
D'autre part, comme (A, d) est un jeu, il existe z E A tel
que z » d. Alors (z1 -- d1)(z2 -- d2) > 0, et donc f(x), f(y)
> f(z -- d) > 0. En particulier, x1, x2, y1, y2 > 0
et y2 = x1
y1 x2. De plus, si
y1 = x1, alors y2 = x2 et donc y = x : comme x et y sont
distincts, on doit avoir y1 0 x1. On en conclut que :
(x1 -- y1)(y2 -- x2) = (x1 -- y1)(x1
x2 -- x2)
y1
8
x2(x1 -- y1)2 y1
> 0
Théorème 2.2 Il existe
unique règle de marchandage à la fois efficace,
symétrique, invariante par transformation affine et indépendante
des alternatives non pertinentes. Elle est donnée par :
(A, d) E J argmax (x1 -- d1)(x2 -- d2)
xEA, x,,d
Preuve 2 Soit ? une règle
respectant les quatre propriétés et (A, d) un jeu. On pose m
:= argmaxxEA, x,,d(x1 -- d1)(x2 -- d2). On
va montrer que ?(A, d) = m.
Étape 1
On rappelle que m » (0, 0).
L'invariance de ? par transformation affine assure que :
?(A, d) = ?(A -- d, (0, 0))
= m?( 1 (A -- d), (0, 0))
m
Posons Amd :=
1m(A -- d). Il suffit donc de montrer que
?(Amd , (0, 0)) = (1,
1).
Étape 2 Montrons
que
sup x1x2 1. xEAd ,
x,,(0,0)
Soit x E Amd tel que x .
(0, 0). Alors il existe y E A -- d tel que x =
1my. Mais alors, y . (0,0) et il existe
z E A tel que z -- d = y. On a alors z . d et donc, d'après le lemme 1,
(z1 -- d1)(z2 -- d2) m1m2. D'où x1x2 =
m11 (z1 -- d1) m21 (z2 -- d2)
1.
Étape 3
Montrons que
dx E Amd , x1 + x2 2.
Supposons qu'il existe x E Amd tel
que x1+x2 > 2. Amd étant convexe, il
contient l'ensemble des points du segment entre (1,1) et x.
Considérons la fonction
Q : p E [0;1] f(p(1,1) +
(1 -- p)x)
où, pour rappel, f est la fonction qui à
tout élément de 1182 associe le produit de ses
composantes. On calcule :
dp E [0;1], Q(p) = (p + (1 -- p)x1)(p +
(1 -- p)x2)
= p2 + (x1 + x2)p(1 -- p) + x1x2(1
-- p)2
= (1 -- 2(x1 + x2) + x1x2)p2 +
2((x1 + x2) -- 2x1x2)p + x1x2
9
On remarque que Q est un trinôme, donc
dérivable, et que Q'(0) = 2((x1 + x2) --
2x1x2). On distingue alors deux cas :
soit x . (0, 0), auquel cas x1x2 = f(x)
1 d'après le résultat de l'étape 2 ;
soit l'une des composantes de x est strictement
négative, auquel cas l'autre doit être supérieure à
2, car x1 + x2 > 2 et alors x1x2 < 0.
Dans tous les cas, Q'(0) > 0. Q'
étant continue, il existe e > 0 tel que Q' est strictement
positive et donc strictement croissante sur [0; e]. On suppose aussi e
assez petit pour que y := f(1,1)+(1--e)x
» (0, 0). Mais alors f(y) = Q(e) > Q(0) =
1, ce qui contredit l'étape 3.
Étape 4
Amd est compact, car image du
compact A par la fonction continue x E 1I82
1m(x -- d). En particulier,
Amd est borné, et par équivalence des
normes sur 1R2,
3c > 0, dx E Amd , |x1| +
|x2| c.
On en déduit que pour tout x E Amd
, par inégalité triangulaire,
|x1 -- x2| |x1| + |x2| c
|x1 + x2| |x1| + |x2| c, et en particulier x1 + x2 .
--c.
En ajoutant le résultat de l'étape 3, on
peut dire que Amd est contenu dans R := {x E
JR2 | x1 + x2 2, |x1 -- x2| c, x1 + x2 .
--c}.
Étape 5
On vérifie que (R,(0,0)) est un jeu :
on vérifie aisément que R est convexe,
fermé et borné,
on a bien (0,0) E R,
enfin, (1,1) E R et
(1,1) » (0, 0).
Or pour tout (x1, x2) E R, on a (x2, x1) E R. Par
symétrie de ?, il existe á E 1I8 tel que ?(R,
(0,0)) = (á, á). Si á < 1,
alors (á, á) « (1,1), ce qui est exclu par
efficacité de ?. Si á > 1, alors á + á
> 2, ce qui est aussi exclu car (á, á) E R. On a donc
á = 1. On conclut grâce à l'indépendance de
? des alternatives non pertinentes : comme Amd c R et
?(R, (0,0)) = (1,1) E Amd
, alors
?(Amd , (0,0)) = ?(R,
(0, 0)) = (1, 1).
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