II- Les canaux
d'action de la libéralisation financière sur la croissance
économique
Il existe plusieurs canaux à travers lesquels la
libéralisation financière agit sur la croissance
économique. On les regroupe généralement en deux
catégories : les canaux directs et les canaux indirects.
A- L'impact de la libéralisation
financière à travers les canaux directs
La libéralisation financière stimule la
croissance économique à travers la constitution et l'augmentation
de l'épargne, par une réduction du coût du capital, par le
transfert technologique, et par le développement du système
financier.
v Le canal de l'épargne
Pour réaliser la production, il est indispensable de
disposer d'un certain niveau de capital. Ce capital dépend lui aussi du
niveau de l'épargne. Dans la littérature, la constitution de
l'épargne est, en général, liée au niveau des taux
d'intérêt. Ainsi la libéralisation des taux
d'intérêt va affecter positivement l'épargne sur le long
terme. L'épargne oisive sera également drainée vers le
système bancaire. Ce qui aura pour effet d'exercer un effet positif sur
l'investissement. Par ailleurs la libéralisation des taux
d'intérêt les rend attrayant et attire l'épargne
étrangère, réduisant ainsi la contrainte de
liquidité des firmes locales. L'épargne étrangère
complète l'épargne domestique. Il est à noter que l'effet
à long terme de la libéralisation financière sur
l'épargne peut être différent de l'effet observé
à court terme (lorsque les réformes viennent d'être mises
en place). Ainsi à court terme le niveau de l'épargne peut
être encore embryonnaire, mais va progressivement se constituer de sorte
qu'à long terme il dévient important.
Boumghar (2007) élargit le raisonnement en identifiant
quatre leviers à travers lesquels la libéralisation
financière stimule l'épargne. Premièrement le taux
d'intérêt. Un taux d'intérêt (sur les
dépôts) élevé accroît l'épargne
grâce à son effet substitution. Il fait remarquer que
l'épargne des ménages peut aussi se détenir sous forme
d'actifs corporels ou physiques (logement, terrain ou même actif
boursier). De ce fait il est aussi important de tenir compte du taux de
rentabilité de ces actifs physiques dans la relation
libéralisation financière-épargne. Deuxièmement le
crédit bancaire : la présence d'une contrainte de
financement incite les agents à épargner afin de lisser leur
consommation dans le temps. Le levier de l'innovation financière fait
que l'apparition de nouveaux produits financiers rémunérateurs et
alternatifs incite les ménages à relever leur propension
marginale à épargner. Enfin dans le levier des institutions, la
multiplication des institutions de collecte de l'épargne fournit aux
ménages une offre de service plus diversifiée et moins
coûteuse grâce à la concurrence.
v Le canal de la réduction du coût du
capital par une meilleure gestion durisque
La libéralisation du marché boursier diminue le
coût du capital. Cette diminution s'explique par la baisse de la prime de
risque grâce à une meilleure diversification et une gestion
optimale du risque sur le marché financier, et une baisse des
coûts d'agence expliquée par un monitoring plus efficace des
managers et une supervision plus stricte des investisseurs (Lajili, 2015).
Grâce à la baisse du coût du capital consécutive
à la diminution de la prime de risque, on assiste à une
augmentation considérable de l'investissement domestique. Ainsi la
libéralisation financière entraine une baisse du prix de l'action
qui accroît l'investissement productif, profitable au
développement économique.
v Le canal du transfert du savoir-faire technologique
et managérial
Le transfert technologique joue un rôle important dans
le processus de développement économique, de sorte que la
croissance d'un pays dépend fortement du progrès technologique
dans les autres pays, c'est-à-dire de leur importation et de leur mise
en oeuvre. Dans les pays en développement, la technologie est
généralement rudimentaire. Elle s'importe le plus souvent des
pays développés. Or la diffusion technologique ne peut intervenir
qu'en présence d'une libéralisation du système financier
car les Investissements Directs Etrangers (IDE) sont le meilleur moyen pour les
pays en développement d'accéder aux avancées
technologiques et au savoir-faire managérial. L'augmentation de la
production dans ces pays en développement requiert une technologie que
seules les firmes étrangères peuvent offrir (Toutefois
l'écart technologique ne doit pas être trop grand). Les firmes
locales ne pourront améliorer leur procédé et les
techniques de production qu'à condition d'investir dans les
activités de recherche et développement.
En somme, la libéralisation financière, à
travers le libre mouvement des flux de capitaux, notamment les IDE, joue un
rôle crucial dans la diffusion et le transfert des innovations
technologiques et du savoir-faire managérial. Ces transferts peuvent
augmenter la productivité qui exerce à son tour un effet
favorable sur la croissance économique (Lajili, 2015).
v Le canal de la stimulation du système
financier domestique
Le système financier dans la croissance
économique joue un rôle indubitable. Pour Levine (1996), King et
Levine (1993), le développement économique et la croissance ne se
font qu'à l'aide des services financiers et bancaires de haute
qualité dont les banques étrangères des pays
développés sont le plus souvent les seules capables de fournir.
L'arrivée des banques étrangères ou leur participation
dans le capital des banques domestiques induit de nouveaux services et moyens
de paiement (carte bancaire et paiement électronique), ce qui encourage
les transactions et dynamise le commerce domestique. La concurrence se trouve
également renforcée. Dans ce climat, les banques locales seront
contraintes à diminuer leurs coûts et à innover et
améliorer leurs services. Ce qui pourrait encourager l'épargne
qui va provoquer l'investissement et la productivité, lesquels
permettront la croissance.
D'autre part, les banques étrangères sont
très efficaces dans la collecte de l'information sur les firmes et le
contrôle des dirigeants (promotion de la bonne gouvernance), rendant
ainsi service aux petits épargnants souvent incapables de suivre leurs
placements. Il en résulte une meilleure allocation des ressources de
l'épargne vers les investissements les plus productifs.
C'est à travers ce canal que nous fondons notre
première hypothèse selon laquelle H1 :
« La libéralisation financière interne influence
positivement la croissance économique au
Cameroun »
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