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Cytotoxicité larvaire et activités antimicrobiennes des extraits de Adansonia digitata L., Tamarindus indica L. et de Acacia nilotica L. delile sur des souches microbiennes multirésistantes au Bénin


par Afoussatou AMADOU
Universite d'Abomey Calavi - Master en Microbiologie Moleculaire et medicale 2022
  

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3.2. Discussion

La présente étude vise à contribuer à la lutte contre la résistance aux antimicrobiens au Bénin. Il ressort de la présente étude que les extraits éthanoliques et aqueuxde toutes les plantes ont présenté des rendements à l'extraction variables selon la partie de la plante étudiée. L'activité antimicrobienne évaluée sur les souches entéropathogènes résistances aux BLSE et les souches de S. aureus et SCN méticillino-résistantes ont révélé que l'extrait éthanolique des écorces et l'extrait aqueux des fruits de Adansonia digitata ont présenté une meilleure activité sur les souches de Staphylococcus aureus et Staphylococcus à Coagulase Négative résistantes à la méticilline. En conformité avec les résultats de Lagnika et al. (2012), qui ont montré que tous les extraits de Adansonia digitata ont inhibé la croissance de S. aureus résistante à la méthicilline. Les mêmes extraits ont présenté demeilleures zones d'inhibition sur les souches de K. pneumoniae, K. oxytoca, E. coli et E. cloacae. D'après Ajiboye, A. digitata a montréune certaine activité antibactérienne contre Escherichia coli. Le résultat des activités antibactériennes de l'écorce de la tige des extraits bruts d'éthanol et d'eau de Adansonia digitata contre les isolats de Escherichia coli a révélé une résistance aux extraits à toutes les concentrations testées   (Ajiboye et al., 2020). Ces résultats sont discutables d'autant plus que l'extrait éthanolique a inhibé la croissance d'une des deux souches multirésistantes, mais est resté sans effet sur la souche de référence E. coli. Mais aussi, selon certains auteurs, l'activité de la plante varie en fonction de la partie de la plante utilisée (Jame, 2019).Sur les souches fongiques, l'extrait éthanolique des écorces de Adansonia digitata a également présenté une bonne activité antifongique sur toutes des souches résistantes et virulentes cliniques testées (C. albicans, C. glabrata, C. krusei et C. parapsilosis). L'activité antimicrobienneintéressante des extraits de Adansonia digitata pourrait être due à la présence de tanins et de flavonoïdes, car ceux-ci ont déjà été signalés à l'origine des activités antimicrobiennes   (Datsugwai et Yusuf, 2017). Les tanins sont des agents antimicrobiens connus qui pourraient inhiber la croissance des microorganismes en précipitant la protéine microbienne et en les privant ainsi des protéines nutritionnelles nécessaires à leur croissance et à leur développement (Jame, 2019). Quant aux flavonoïdes ayant également été signalés possèdent de nombreuses propriétés utiles, y compris les antimicrobiens et antioxydantes (Kumar et al., 2015). Ces propriétés confèrentà cet extrait (extrait éthanolique des écorces de Adansonia digitata), une activité antimicrobienne exploitable dans le contexte de la résistance antimicrobienne.

En ce qui concerne les extraits de Tamarindus indica, les extraits ont présenté une activité variable selon les souches testées. Les extraits des feuilles (aqueux et éthanolique), des écorces (étanolique) et des fruits (aqueux et éthanolique) ont présenté une meilleure inhibition sur toutes les souches de Staphylococcus aureus et de Staphylocoque à Coagulase Négative résistantes testées. Sur les souches entéropathogènes résistantes testées, les extraits éthanolique des feuilles et écorces ont montré une large zone d'inhibition sur les souches de K. pneumoniae et sur une souche résistante aux BLSE de E. coli et E. cloacae. Aussi, les extraits de fruit aqueux et éthanolique ont présenté une bonne activité sur toutes les souches entéropathogènes résistantes testées. Quant à l'activité sur les champignons, seule une souche de C. albicans résistante au fluconidazole a été inhibée face à l'extrait éthanolique des feuilles et l'extrait aqueux de l'écorce. Seule la souche de référence a été inhibée par la majorité des extraits. Les extraits éthanoliques de l'écorce et de fruit n'ont eu aucune activité sur les souches testées. Des études ont montré l'activité antimicrobienne de différentes parties de T. indica contre diverses souches de bactéries -''''''''''''''  (Diatta et al., 2019?; Abdallah et Muhammad, 2018?; Escalona-Arranz et al., 2010). D'après Abdallah et Muhammad, les extraits aqueux et éthanolique ont été révélés posséder une activité antimicrobienne puissante contre Staphylococcus aureus -(Abdallah et Muhammad, 2018). Ce potentiel antimicrobien des extraits de graines de la plante contre également le staphylocoque doré multirésistant à la méthicilline (MDR-MRSA) a été montré avec les extraits éthanoliques (Yang et Zezhi, 2009). D'autres études réalisées sur les extraits de feuilles et de fruits de T. indica testés contre les isolats cliniques de Escherichia coli dans les selles ont montré que l'extrait éthanolique a une activité maximale par rapport à l'extrait aqueux (Escalona-Arranz et al., 2010). Ces études réalisées en conformité avec la présente étude ont prouvé la capacité des extraits de T. indica sur les souches résistantes et surtout des extraits de fruit de cette plante. Ces résultats se justifieraient par la richesse en composés chimiques de la plante.

En ce qui concerne Acacia nilotica, les extraits aqueux des feuilles, des fruits et l'extrait éthanolique de l'écorce ont présenté de meilleures activités sur toutes les souches testées (bactéries et champignons). L'activité des autres extraits a été variable selon la souche résistante testée, mais majoritaire sur toutes les souches de K. pneumoniae, sur une souche de E. coli et une souche de E. cloacae résistantes aux BLSE. Les extraits éthanoliques bruts ont montré des activités antimicrobiennes contre les souches multirésistantes de Escherichia coli et Klebsiella pneumoniaedans l'étude réalisée par Khan et al. (2009). De même, l'extrait de la plante a réduit de manière significative l'activité du biofilm de E. coli, K. pneumoniae, des isolats multirésistants des échantillons d'urines et contenant des gènes de résistance blaTEM, blaSHV, blaCTX -  - (Elamary et al., 2020). Ces résultats sont similaires à ceux issus de la présente étude. L'utilisation d'extrait aqueux de gousses de Acacia nilotica a exposé une activité antibactérienne contre Escherichia coli et Staphylococcus aureus (Farzana et al., 2014). De la même manière, Khan et al. (2009) a exposé l'activité antifongique d'extraits éthanoliques contre des souches multirésistantes (MDR) de Candida. L'activité antimicrobienne intéressante des extraits de Acacia nilotica pourrait être due à la présence de tanins et de flavonoïdes, car ceux-ci ont déjà été signalés à l'origine des activités antibactériennes et antifongiques de ceux-ci  (Datsugwai et Yusuf, 2017).

En plus, l'activité antifongique des extraits sur les souches de Candida présentant les facteurs de virulence lécithinase, hémolysine, Biofilm, Exopolysaccharide et adhésion a été variable selon les types de facteurs de virulence en jeu. Selon Goncalves et al. (2016), ces facteurs sont à l'origine de la pathogénicité des souches. Ainsi, la capaciteì des Candida aÌ adhérer aux tissus (gra^ce aux adheìsines qui sont des reìcepteurs proteìiques situeìs sur la membrane de la levure), aÌ secréter des protéases et les phospholipases (qui dégradent les tissus eìpitheìliaux de l'ho^te pour favoriser l'invasion des levures), aÌ changer de morphologie (passage de la forme levure aÌ la forme filamenteuse), la capacitéì aÌ résister aux antifongiques par la formation de biofilm, aÌ moduler la défense de l'ho^te constituent les déterminants majeurs de leur pathogeìniciteì (Sabra, 2013). En effet, d'après nos résultats, il a été observé que les extraits aqueux de fruit et d'écorce de A. digitata n'ont présenté aucune activité antifongique sur les souches présentant le facteur lécithinase et hémolysine. Par contre, en ce qui concerne l'activité antifongique des extraits sur les souches virulentes présentant le facteur biofilm, les extraits ethanoliques des feuilles et aqueux d'écorce de A. digitata ont montré une bonne activité. Quant aux facteurs exopolysaccharide et adhésion, l'extrait éthanolique de l'écorce et du fruit de A. digitata a présenté une meilleure activité. Face aux souches présentant le facteur gélatine, tous les extraits de A. digitata ont été non actifs. Quant à l'activité antifongique de Acacia nilotica, les extraits ont présenté une bonne activité aussi bien sur les souches présentant et non le facteur lécithinase. Les résultats sur les facteurs exo polysaccharide, adhésion et gélatine sont similaires. Pour les extraits de T. indica sur les souches fongiques, une faible activité a été observée au niveau des souches présentant le facteur de virulence Adhésion. Seuls les extraits éthanoliques de feuille et aqueux de l'écorce de T. indica ont présenté une activité sur les souches présentant la virulence à la lécithinase. Aucune activité n'a été notée sur les souches présentant la virulence à la gélatine en ce qui concerne les extraits de T. indica. Ces résultats prouvent que l'expression d'un facteur de virulence dépend de la souche en cause de l'infection, car les facteurs en question peuvent être liés conduisant à la virulence de la souche. Le facteur adheìsion constitue la première étape de l'expression de la virulence des Candida. Elle contribue aÌ la persistance du microorganisme au sein de l'hôte et est essentielle dans l'établissement de l'infection. Ce facteur est lié à l'hydrophobicité des souches, car selon de nombreuses études, plus les souches sont hydrophobes, plus elles adhèrent aux cellules (Goncalves et al., 2016?; Goswami et al., 2017). Le facteur biofilm quant à lui associé à l'exopolymérase augmente la capaciteì des souches de Candida aÌ coloniser, protéger les levures contre les attaques immunologiques (Mba et Nweze, 2020), favoriser la prolifération des espèces, la diffusion des nutriments, protège les levures de la réponse immunitaire de l'ho^te et est ainsi impliquée dans la majoriteì des infections associées aux Candida.

En ce qui concerne le mécanisme d'action de ces extraits, plusieurs souches ont été utilisées pour étudier le mode d'action des extraits actifs en relation avec différentes souches bactériennes testées. Dans la présente étude, le test de perméabilité de la membrane externe des bactéries a été adopté pour évaluer le mode d'action des extraits aqueux et éthanoliques du fruit de Tamarindus indica, les extraits aqueux des feuilles et fruits de Acacia nilotica et les extraits éthanolique de l'écorce et aqueux du fruit de Adansonia digitata contre K. pneumoniae ATCC 25922, E. coli, S. aureus, SCN, E. cloacae, K. pneumoniae et K. oxytoca des souches impliquées dans les maladies infectieuses. Les données obtenues ont mis en évidence un potentiel de déstabilisation de la membrane des souches bactériennes des extraits testés avec un meilleur effet par rapport à l'imipenème utilisé comme molécule de référence. Ces observations reflètent que les extraits ont un mode d'action important sur la déstabilisation de la membrane externe des souches bactériennes testées. Aussi, la déstabilisation a été dépendante de la concentration des extraits sur la membrane des souches de S. aureus et SCN résistantes à la méthiciline, E. coli, E. cloacae mais, indépendante surla membrane des souches de K. oxytoca et K. pneumoniae. Ceci signale que les extraits pourraient être administrés à la CMI sur les souches de S. aureus et SCN résistantes à la méthiciline, E. coli, E. cloacae. Par contre elle pourrait varier entre CMI et 2CMI sur les souches de K.oxytoca et K. pneumoniae résistantes. L'effet de ces extraits sur la déstabilisation membranaire des souches pourrait être attribué à la composition phytochimique des extraits. En effet, les composés phénoliques (flavonoïdes, tanins, etc.) et terpénoïdes ont été rapportés être à l'origine de la déstabilisation et de la perturbation des interactions entre les molécules de lipopolysacharides. En effet, ces composés phénoliques sont capables de déstabiliser la membrane externe des bactéries en complexant les cations divalents qui la stabilisent (Frirdich et Whitfeld 2005?; Vaara 1992). Cette action antibactérienne résulte de l'éclatement de la membrane cytoplasmique et des modifications de l'homéostasie ionique entre les compartiments intracellulaire et extracellulaire des bactéries Gramnégatifs (Trombetta et al., 2005). Ainsi, les antigènes de la membrane responsables de la virulence des bactéries seront affectés expliquant ainsi, l'effet déstabilisant des extraits de ces plantes pour la membrane bactérienne des souches testées.

L'étude de l'innocuité des extraits a montré que tous les extraits ont une CL50 supérieure à 0,1 mg/ml à l'exception des feuilles et des fruits de Adansonia digitata qui ont présenté une toxicité modérée. Les extraits de plantes étudiés sont donc non toxiques sur les larves de Artemia salina selon l'échelle proposée par Moshi -(Moshi et al., 2004). D'après l'étude de -Abdelmageed (2019) ayant porté sur la cytotoxicité de l'extrait aqueux et d'éthanol des fruits de Adansonia digitata, il a été révélé que les composés solubles dans ces extraits sont toxiques pour les cellules dermiques. Quant aux extraits de Acacia nilotica et Tamarindus indica, non toxiques étudiés sur les différentes parties de ces plantes, les résultats sont en conformité avec ceux trouvés in vivo par Escalona-Arranz et al. (2016) et ''''''''''''Traoré, (2020) pour Tamarindus indica. Malgré la contradiction de certains auteurs ayant rapporté une toxicité aiguë chez la souris de l'extrait brute aqueux de l'écorce après quatorze jours d'étude (Escalona-Arranz et al., 2016), les résultats de la présente étude prouvent que la plante est non toxique. Acacia nilotica non toxique a été confirmé par l'étude de Mamanet al. (2019). Néanmoins, ces études mettent en doute la grande richesse en composé chimique pouvant induire des effets toxiques. Malgré la présence de ces composés chimiques, la présente étude n'a montré aucune toxicité cellulaire des extraits sur les larves de Artemia salina. Ces résultats constituent une preuve de la non toxicité de la plante. Aussi, le test de cytotoxicité constitue une présélection pour déterminer non seulement le degré de cytotoxicité d'un produit, mais aussi la présence de composés anticancéreux potentiels. Ces données prouvent qu'il y a une corrélation positive entre la mortalité des larves de Artemia et la cytotoxicité contre les cellules KB (McLaughlin et al., 1993). Malgré que certains auteurs prétendent qu'il n'y a pas de corrélation entre le test de cytotoxicité et les effets toxicologiques sur un animal entier (Lègba et al., 2018). De plus, pour des auteurs ayant étudié l'effet de 20 extraits de plantes testés in vivo (souris) et in vitro -(Parra et al., 2001), une bonne corrélation (r = 0,85, P <0,05) a été observée, ce qui suggère que le test de cytotoxicité est une alternative relativement utile du modèle de toxicité.

Les résultats issus de la présente étude sont d'un grand intérêt, car ont permis de mettre l'accent sur quelques plantes à fruit présentant une bonne activité antimicrobienne sur les souches résistantes aux antimicrobiens. D'après ces résultats, les extraits aqueux des fruits ont présenté une meilleure activité antibactérienne. L'extrait aqueux est très connu et consommé comme jus de fruit par la population (Tamarindus indica, Adansonia digitata). Cet extrait possède un grand potentiel thérapeutique démontré par la présente étude et mérite d'être valorisé pour un usage perpétué. Il serait nécessaire de modérer cet usage, car ces plantes ne sont pas exemptes de toxicité (Adansonia digitata). Néanmoins, cette étude constitue un pont pour d'autres perspectivesd'études orientées vers l'étude du mécanisme d'extraction des composés chimiques actifs sur les souches résistantes. Aussi, il serait intéressant d'envisager d'éventuelle possibilité de combinaison avec les médicaments inactifs pour la lutte contre la résistance aux antimicrobiens.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry