A. L'existence du dommage
Il sied de dire que, ce n'est pas n'importe quel dommage qui
est réparé dans le transport aérien, mais uniquement ceux
qui résultent de l'inexécution de deux obligations du
transporteur dont : la sécurité du transport des passagers, de
bagages et de marchandises et la célérité pourtant
secondaires à l'obligation de résultat, s'opposant à la
notion de retard. Et donc, les autres dommages résultant de
l'inexécution du contrat ne sont pas couverts par la Convention de
Montréal encore moins par la loi congolaise sur l'aviation civile, mais
sont régis par le droit commun36.
Parlant de la nature du dommage, la lecture de l'article 17 de
la Convention de Montréal, renvoie à la loi du for37
pour la détermination de la nature du dommage qui peut être
invoqué en justice et elle indiquera s'il y a lieu de prendre en
considération le préjudice indirect ou
36La notion de dommage est dans une large mesure la
même en matière contractuelle qu'en matière
délictuelle. Une différence notable dans ces deux domaines de
responsabilité découle, néanmoins, des dispositions de
l'article 48, selon lequel : « le débiteur n'est tenu que des
dommages intérêts qui ont été prévus ou qu'on
a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que
l'obligation n'a point été exécutée ». Comme
on peut le constater, l'article 48 pose pour principe, celui de la limitation
de la
réparation au dommage prévu ou prévisible
lors du contrat. Selon cette disposition, la réparation du dommage
subi par le créancier du fait de l'inexécution de l'obligation
contractuelle incombant au débiteur doit être limitée au
dommage prévu ou prévisible au moment de la conclusion du
contrat. La prévision dont il est question concerne, non pas la cause,
mais l'importance ou la quotité du dommage. Le principe, ainsi
énoncé, connaît, toutefois, une exception en cas de dol du
débiteur. En cas de dol, en effet, le débiteur doit
réparer intégralement le préjudice subi par le
créancier, le dol étant ici assimilé à une faute
intentionnelle ou à la mauvaise foi du débiteur. Voir A. KAHINDO
NGURU, Elément de droit civil des obligations, Notes de cours à
l'usage des Etudiants de Troisième Année de Graduat,
Faculté de Droit, ULPGL, année 2015-2016, p111, inédit.
37 La loi du for est désignée en
latin par le terme « lex fori », qui veut dire la loi
nationale du tribunal saisi. Soulignons déjà que la
particularité essentielle des relations privées internationales
est que l'autorité qui les apprécie peut décider à
priori qu'elle se fera aux seules normes (lois, jugements, décision non
juridiques, actes publics) qui constituent son propre ordre juridique,
lesquelles normes... sont appelées normes du for, lorsque
l'autorité saisi est juge. Pour dire que le juge ne peut d'emblée
décider ni qu'il n'appliquera systématiquement à une
question de droit international donnée sa propre loi,... ni qu'il ne
tiendra aucune compte des jugements et des actes publics étrangers. Voir
A. KAHINDO NGURU, Eléments de Droit international privé
Congolais, Notes de Cours à l'usage des Etudiants inscrits en
Deuxième année de licence en Faculté de Droit, ULPGL,
Goma, mars 2020, p16, Inédit.
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plutôt déterminera le préjudice direct, le
préjudice prévisible et leur étendue, le préjudice
des tiers de façon générale.
La nature du dommage peut se présenter sous
différentes formes entre autre : dommage corporel, matériel et
préjudice moral. Ce dernier peut être soit un préjudice
esthétique et préjudice de souffrance (ou pretium
doloris), dommage affectif, perte d'un animal, etc.38.
Ce sera également la loi nationale du tribunal saisi
qui, en dehors de l'appréciation du préjudice direct,
appréhendera s'il y a lieu de prendre en considération un
préjudice qui ne serait qu'indirect ou simplement prévisible, et
qui déterminera l'étendue du dommage.
En droit Congolais, pour qu'un dommage soit réparable,
il doit revêtir quatre caractéristiques, à savoir :
être certain, direct, personnel et consister dans la violation d'un
intérêt légitime.
B. Le cadre de réalisation du dommage
Pour que le préjudice subi par l'utilisateur d'un
transporteur aérien soit indemnisé, le dommage doit avoir
été causé par un accident (ou évènement) qui
s'est produit pendant une période couvrant le transport aérien,
telle que définie par les articles 17 et 18 ; 136 à 138
précités.
Pour le transport des passagers, le transporteur est
responsables des dommages survenus... lorsque l'accident qui a causé la
mort ou la lésion s'est produit à bord de l'aéronef ou au
cours de toutes opérations d'embarquement ou de
débarquement39. A ce stade le critère prise en
considération, est celle de la prise en charge des voyageurs par les
préposés du transporteur, au sens du contrôle effectif d'un
transporteur particulier sur le groupe de passagers qui lui est
assigné.
Alors que pour le transport de marchandises et bagages
enregistrés, le transporteur est responsable du dommage survenu...,
lorsque le dommage s'est produit pendant le transport aérien. Ici on
considère plus la période pendant laquelle les bagages ou
marchandises se
38 La jurisprudence congolaise admet la
réparation des dommages moraux. Toutefois, les principes de base de
cette réparation ne sont pas encore établis,
particulièrement en ce qui concerne les bénéficiaires de
l'action en réparation et la nature du dommage moral à prendre
compte. D'ores et déjà, on peut suggérer que la liste des
bénéficiaires de l'action en réparation du dommage moral
soit établie de la manière limitative. Voir Prof J-M MULENDA
KIPOKE, Cours précité, p282.
39 L'article 17 de la Convention de Montréal et
136 de la loi sur l'aviation civile
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trouvent sous la garde du transporteur, que ce soit dans un
aérodrome ou à bord d'un aéronef ou dans un lieu
quelconque en cas d'atterrissage en dehors d'un
aérodrome40.
La période du transport aérien ne couvre aucun
transport terrestre, maritime ou par voie d'eau intérieure
effectué en dehors d'un aéroport. Toutefois, lorsqu'un tel
transport est effectué dans l'exécution du contrat de transport
aérien en vue du chargement, de la livraison ou du transbordement, tout
dommage est présumé, sauf preuve du contraire, résultant
d'un fait survenu pendant le transport aérien. Si, sans le consentement
de l'expéditeur, le transporteur remplace en totalité ou en
partie le transport convenu dans l'entente conclue entre les parties comme
étant le transport par voie aérienne, par un autre mode de
transport, ce transport par un autre mode sera considéré comme
faisant partie de la période du transport aérien.
Ainsi, à titre illustratif, si le véhicule de la
compagnie Serve Air (SA), en déplaçant les marchandises de son
dépôt à l'aéroport international de Goma et vice
versa par voie routière connaissait un accident qui parvenait à
endommager les marchandises s'y trouvant, la compagnie serait tenu
responsable.
En conséquence, la Convention et la loi s'appliquent de
la prise en charge à la livraison. L'appréciation de la prise en
charge résultera de circonstances de fait indiquant que le transporteur
a, concrètement, réceptionné sans réserves les
bagages ou marchandises. Alors que, la livraison correspond, pour les bagages
enregistrés, à leur mise à disposition des passagers. Pour
le fret, tant qu'il n'y a pas retrait effectif et total de la marchandise, le
transporteur reste tenu des éventuels vols, disparitions ou
détériorations des biens sous sa garde.
Les conditions pour mettre en jeu la responsabilité
civile du transporteur aérien sont résumés en ce sens
qu'il faut d'une part que le dommage au passager ou à la marchandise
soit survenu, et d'autre part que ce dommage soit survenu pendant une
période bien définie par la Convention et/ ou la loi. Ainsi, il
s'avère indispensable d'aborder les conditions non exigées en
droit aérien pourtant observée en droit commun de la
responsabilité.
40 L'article 18 de la Convention de Montréal et
137 de la loi sur l'aviation civile
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§2 les conditions non exigées pour mettre
en jeu la responsabilité
La loi congolaise sur l'aviation civile, encore moins la
Convention de Montréal ne prévoit aucune condition de faute (A),
ou celle qui consiste à prouver que le dommage est dû à
l'accident ou un évènement affectant l'aéronef ou alors
à la nature de l'action (B).
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