PREMIERE PARTIE :
CADRE D'ANALYSE DES DETERMINANTS DE LA SECURITE ALIMENTAIRE EN
RCA
INTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE
La sécurité alimentaire est devenue une
préoccupation majeure des pays en développement, sa
corrélation avec la pauvreté lui donne une place importante dans
la stratégie de lutte contre la pauvreté, beaucoup de
décideurs politiques ainsi que les organisations internationales
aujourd'hui mettent en avant la sécurité alimentaire dans leur
politique de lutte contre la pauvreté, on peut voir que bon nombre de
personne vivant sous le seuil de l'insécurité alimentaire se
trouve dans les pays pauvres. Dans cette partie, il sera question de faire une
analyse conceptuelle de la sécurité alimentaire (la
généralité de la sécurité alimentaire) dans
le chapitre 1, dans le chapitre 2 il sera question de faire une analyse de la
sécurité alimentaire en RCA.
CHAPITRE
1: GENERALITE SUR LA SECURITE ALIMENTAIRE
INTRODUCTION
A la fin des années 60, l'instabilité de la
situation alimentaire est telle que les pays en développement n'ont pas
de disponibilité alimentaire suffisante en moyenne pour chaque
habitant. Dans les années 70, la situation n'a guère
changé, bien au contraire, elle s'est dégradée donnant
lieu 35% de la population mondiale, soit 90 millions d'individus, en
sous-alimentation. Suite à la persistance de la pauvreté, de la
malnutrition mais surtout des problèmes sévères
liés à l'autosuffisance alimentaire, c'est ce qui d'ailleurs a
poussé les Nations Unies a convoqué en 1974 le premier sommet
mondial sur la question de l'alimentation et qui a permis l'adoption de la
proclamation solennelle selon laquelle : « chaque homme, femme
et enfant a le droit inaliénable d'être libéré de la
faim et de la malnutrition afin de développer pleinement ses
facultés physiques et mentales. Depuis lors le nombre de
conférence sur la sécurité alimentaire ne cesse
d'augmenter, ce pendant la part de la population mondiale vivant sous le seuil
de la pauvreté et l'insécurité alimentaire s'est accru.
Ce chapitre se propose de faire la généralité sur la
sécurité alimentaire. Dans la première section, nous
allons nous appesantir sur l'évolution des indicateurs de la
sécurité alimentaire et dans seconde section nous allons
parcourir les différents indicateurs et indices mesuré la
sécurité alimentaire
I. EVOLUTION DES INDICATEURS DE LA
SECURITE ALIMENTAIRE
Mesurer la sécurité alimentaire est une
tâche difficile en raison de la complexité du concept (Barrett,
2002). Néanmoins, les décideurs politiques ont besoin de savoir
combien de personnes sont à risque, qui ils sont, et la meilleure
façon de les atteindre. En conséquence, des investissements
importants ont été réalisés dans
l'élaboration d'indicateurs utiles et la collecte de données pour
servir cet objectif. Même si les indicateurs disponibles sont loin
d'être parfaits, ils se révèlent utiles sur le plan
opérationnel.
Les indicateurs de sécurité alimentaire et
nutritionnelle, ont évolué avec le concept de la
sécurité alimentaire. L'analyse de l'évolution du concept
de la sécurité alimentaire a permis de mettre en évidence
trois grandes périodes de la vision de la sécurité
alimentaire et de ses déterminants. Jusqu'au début des
années 1980, une première période assimilant la
sécurité alimentaire à la disponibilité
alimentaire, a entraîné le recours principalement aux
évaluations des récoltes, et aux prévisions des volumes de
production. Une seconde période que l'on peut qualifier de post-Sen
considère la sécurité alimentaire comme une fonction des
revenus, des prix, des filets de sécurité sociale et des droits
(entitlements). Elle a conduit à des indicateurs multidimensionnels de
plus en plus complexes utilisant des prix, des revenus et des données
anthropométriques. Enfin, aujourd'hui, la sécurité
alimentaire est considérée dans une perspective de
vulnérabilité ou de risque nutritionnel et incorpore de plus en
plus des indicateurs relatifs au comportement d'adaptation des individus.
Campbell (1991) distingue quatre aspects essentiels de
l'insécurité alimentaire à tous les niveaux d'analyse: (i)
la disponibilité quantitative, (ii) les aspects qualitatifs concernant
les types et la diversité des aliments, (iii) les dimensions
psychologiques liées à des sentiments de privation, de choix
restreint , ou l'anxiété liée à la qualité
ou la quantité de nourriture disponible, et (iv) l'acceptabilité
sociale des modes de consommation, en termes de fréquence et de la
composition des repas ainsi que des modalités d'acquisition de la
nourriture: autoconsommation ou achat, mendicité ou vol.
Une série d'indicateurs reflétant des
informations sur un ou plusieurs des quatre aspects existent, bien que la
plupart des données soient principalement recueillies sur l'aspect (i),
avec beaucoup moins d'attention sur les aspects (ii) à (iv). Les
indicateurs les plus couramment utilisés se fondent sur l'observation
directe de l'insuffisance alimentaire : la faim et la malnutrition qui sont des
conditions suffisantes de l'insécurité alimentaire. Il s'agit de
rechercher des symptômes physiologiques de la privation, le plus souvent
manifestes dans les mesures anthropométriques (taille/âge,
poids/taille, circonférence du bras, ou indice de masse corporelle),
comme dans les évaluations des répondants eux-mêmes sur
l'adéquation de leur régime alimentaire, ainsi que dans les
données sur les apports en nutriments. Il existe un large
éventail de méthodes de collecte de ces données-mesures
directes, échantillonnage aléatoire, non-aléatoire ou
stratifié-avec des variations considérables dans le coût,
la rapidité, l'intrusion et la fiabilité (Babu et
Pinstrup-Andersen, 1994; Strauss et Thomas, 1998).
Les données agrégées disponibles sont
généralement celles liées à la disponibilité
alimentaire au niveau national et sont donc relatives à la
première conceptualisation de la sécurité alimentaire,
à savoir la disponibilité. Les estimations des
disponibilités énergétiques par tête basées
sur les bilans alimentaires (food balance sheets) et des hypothèses sur
la répartition de la consommation énergétique alimentaire
au sein de la population, ne donnent cependant aucune information sur
l'accès des individus à la nourriture. Ces mesures peuvent
sous-estimer ou surestimer la prévalence de l'insécurité
alimentaire (Smith, 1998).
La disponibilité de plus en plus grande de
données d'enquête ménages comme les dépenses de
consommation et l'autoconsommation permet d'avoir par extrapolation des mesures
intéressantes des niveaux de consommation, mais la fiabilité de
ces estimations varie grandement en fonction de la
représentativité de l'échantillon enquêté et
des méthodes d'extrapolation. En outre, il existe presque toujours des
erreurs de mesures dans les niveaux de consommation soit en raison de
déclarations erronées sur les dépenses soit du fait de la
non prise en compte (ou des erreurs dans l'estimation) de l'autoconsommation
(Srinivasan, 1981; Bouis, 1994) ou de la consommation de membres
extérieurs au ménage. Les variations inter et intra individuelles
des besoins en macro et micronutriments - basés sur la
génétique, les niveaux d'activité, l'état de
santé, etc. - compliquent également la définition de
seuils appropriés d'apport et donc l'estimation de l'incidence de la
faim et de la dénutrition (Payne et Lipton, 1994; Higgins et Alderman,
1997).
De plus en plus d'économistes utilisent des
données anthropométriques qui ont l'avantage d'être moins
sujettes à des erreurs de mesure systématiques (Strauss et
Thomas, 1998). Mais la grande faiblesse des mesures anthropométriques
comme indicateurs de sécurité alimentaire est que la santé
est le produit de plusieurs facteurs (et pas nécessairement liée
à la consommation alimentaire). Ces mesures peuvent par
conséquent surestimer la prévalence de l'insécurité
alimentaire.
Barrett (2002) considère qu'il y existe plusieurs
raisons de penser que la plupart des indicateurs sous-estiment la
prévalence de l'insécurité alimentaire. Tout d'abord, en
dépit de la reconnaissance que les mesures de la consommation au niveau
du ménage sont une mauvaise approximation de la consommation au niveau
de l'individu, la plupart des enquêtes sur les dépenses de
consommation s'intéressent aux ménages et non directement aux
individus. Or il est maintenant reconnu que des individus peuvent être en
forte insécurité alimentaire dans des ménages en
sécurité alimentaire. Ensuite, parce qu'une
insécurité alimentaire n'entraîne pas nécessairement
une insuffisance alimentaire, la faim ou la malnutrition, elle est probablement
plus répandue que ses trois sous-produits. Les mesures de
l'insécurité alimentaire demeurent par conséquent
imprécises.
La collecte des données sur la disponibilité
(consommation alimentaire et dépenses, données
anthropométriques) est évidemment très coûteuse,
difficile à réaliser et à analyser. Les politiques et les
partenaires techniques et financiers ont besoin d'économiser des
ressources limitées et du temps pour d'autres projets. D'autres
expérimentations de mesures alternatives de sécurité
alimentaire moins coûteuses et conformes à l'évolution du
concept ont donc vu le jour. Ces mesures concernent : la pauvreté de
revenu et de capital (asset), le nombre d'aliments uniques consommés,
les prix alimentaires, les salaires, les ratios de dépendance et la
morbidité. Lorsqu'elles sont disponibles, ces données permettent
de représenter relativement bien l'état de la
sécurité alimentaire (Chung et al., 1997).
La troisième période de la vision de la
sécurité alimentaire introduit le risque et les comportements
d'adaptation dans la mesure de la sécurité alimentaire.
L'idée est que les individus ne vivent pas passivement
l'insécurité alimentaire mais emploient une séquence
graduée de réponses au risque et à l'adversité (de
Garine, 1972). Compte tenu des difficultés pratiques à estimer
des risques inobservables et subjectifs auxquels les individus sont
confrontés, leurs comportements observables peuvent
révéler beaucoup de choses sur leur bien- être et leur
sécurité alimentaire. L'étude des stratégies
d'adaptation a l'avantage supplémentaire de permettre de saisir les
dimensions psychologiques et sociales de l'acceptabilité de
l'insécurité alimentaire (aspects (iii) et (iv) ci-dessus). En
outre, non seulement les stratégies permettent de localiser les
individus en insécurité alimentaire, mais aussi elles
reflètent l'intensité de leur insécurité. Maxwell
(1996) montre qu'il est possible d'identifier un éventail de
stratégies, et d'établir des échelles de
sévérité et de fréquences pour développer un
indice cumulatif raisonnablement fiable de la sécurité
alimentaire. Les stratégies d'adaptation tout comme leur
intensité sont cependant très contextuelles. Par exemple, la
migration de détresse peut représenter une réponse plus
grave que la vente d'un animal ou la consommation des stocks de semences, mais
il est difficile, voire impossible, même dans une zone limitée, de
généraliser une hiérarchie de réponses ex ante
(Davies, 1996).
L'évolution des indicateurs de sécurité
alimentaire s'est traduite par le passage de mesures objectives et
quantitatives à des mesures subjectives ou qualitatives. Les
premières s'intéressent généralement à des
niveaux cibles de consommation en kilocalories par tête (Siamwalla et
Valdés, 1980; Reardon et Matlon, 1989) ou à des normes de
consommation en volumes (kilogrammes par tête et par an) de
différents produits par pays, basées sur les habitudes
alimentaires (CILSS, 2004). Les secondes quant à elles sont relatives
à l'appréciation que se font les individus eux-mêmes de
leurs problèmes alimentaires : possibilité de choix entre
différents régimes alimentaires, la sensation de la privation ou
l'acceptabilité sociale de la manière d'acquisition des aliments
(Radimer et al., 1992).
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