B. Le temps
« L'agriculteur ne dispose pas de temps »
ce l'affirmation qui ressorte à chacun des échanges lors de nos
différentes interviews.
En effet, être agriculteur est plus qu'une profession ou
un simple métier, c'est tout un style de vie. L'agriculteur est
concentré sur ces cultures et veille chaque jour à leur
croissance.
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Il n'est donc pas à la disposition des créateurs
pour être un acteur actif des innovations apportées. D'ailleurs,
nous pouvons constater que la majorité des startups agricole sont mises
en place par d'anciens agriculteurs, qui apportent dans ce cas, le
savoir-faire d'un agriculteur et applique les technologies innovantes dans ce
domaine. Ils sont donc à la fois précurseurs et garants de la
conformité de leur solution.
L'agriculteur actif dans son domaine quant à lui a
besoin de solutions finalisées qui correspondent à ces attentes.
C'est-à-dire qu'elles apportent de la valeur, tout en lui permettant de
se focaliser sur sa tâche principale, produire plus et mieux.
Le facteur temps est donc à prendre en compte dans
toute initiative qui concerne le monde agricole.
C. La facilité d'utilisation
La technologie numérique et l'agriculture sont deux
mondes diamétralement opposés en termes de compétences et
de savoir-faire. L'agriculteur n'est pas un technicien (dans le sens
technologie) et le technicien n'a pas forcément les connaissances d'un
agriculteur. Nous pouvons aisément parler de choc entre deux domaines,
en constatant que c`est plutôt le domaine agricole qui subit les
modifications apportées par la technologie.
« En effet, il faut prendre en compte le choc
culturel que l'application de l'informatique crée dans le domaine
agricole. C'est bien de mettre à disposition des outils, mais encore
faut-il que l'agriculteur sache les utiliser» nous rapporte Michel
Koutchouk, Directeur Général INFOTEL.
Nous sommes également de cet avis. En effet, comme dans
tout processus de changement, surtout quand il s'agit du numérique, le
dilemme auquel les acteurs doivent faire est celui de l'accompagnement au
changement.
D'abord, il s'agit de faire adopter les innovations
technologiques apportées par les agriculteurs. Ensuite, il faudra mettre
en place des stratégies pour convaincre les personnes qui feront de la
résistance au changement, qui seront retissant à
77
aller vers quelques choses de nouveau, même si elles
sont conscientes que cela pourrait leur être profitable.
Pour ce faire, les outils existent. En effet, il est plus que
nécessaire de s'approprier les méthodes telles que le Design
Thinking (processus de co-créativité impliquant l'utilisateur
final) ou l'UX Design (méthode pour anticiper les attentes de
l'utilisateur final).
Ces deux outils précités peuvent
énormément contribuer à proposer des solutions finies qui
auront l'approbation de leurs clients finaux, les agriculteurs.
En sommes, nous pouvons affirmer que pour qu'une solution soit
à forte valeur ajoutée dans le domaine agricole, elle doit
respecter le triangle d'or cout, temps et simplicité de l'utilisation.
Cela indépendamment du concept technologie qui est derrière, Big
data ou autre.
En observant les différentes startups qui émergent
dans le domaine agricole, nous constatons que chacune d'elle reste
spécialisée dans un domaine bien précis (cf. figure
13).
Prenant en considérant le fait avéré que les
domaines d'innovations possibles sont couverts par les nouvelles entreprises
dans le domaine agricole.
Considérant que le problème ne pas aujourd'hui une
question technologique. Mais concerne essentiellement les variables cout, temps
et facilité d'utilisation.
Nous pensons que la valeur ajoutée de notre
réflexion peut être située ailleurs.
En effet, orientant notre recherche sur la création d'un
outil d'aide à la décision pour les acteurs agricole, nous
courons le risque de reproduire et de proposer des idées
déjà exploitées ou en cours de mise en place.
La solution que nous proposons ici est un concept tout aussi
innovant et qui reste inédit dans ce qui se fait en termes d'utilisation
de la technologie dans le secteur agricole.
L'écosystème des entreprises numérique dans
le domaine agricole peut être représenté comme suit :
Périmètre d'innovation agricole
Entreprise Agricole Innovate (EAI)
EAI -- 1
EAI-4
EAI-2
EAI-5
EAI-3
EAI-6
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Fig. 16 -- Écosystème agricole
Le périmètre d'innovation étant couvert par
multitudes d'entreprises, chacune spécialisée dans son domaine
d'expertise.
Il n'est pas pertinent pour nous de rechercher à ce faire
une place (niche) dans ce marché.
Qui nous renvoie de facto dans le même modèle
stratégique des entreprises déjà existantes.
Nous avons donc opté pour une approche innovante
d'uberisation des outils d'aide à la décision pour les acteurs
agricole.
Notre solution
Périmètre d'innovation agricole
Applications d'entreprises agricoles innovantes
APP 1
APP 4
APP 2
APP 5
APP 3
APP 6
80
Fig. 17 -- notre solution
Il ne s'agit plus de développer une application
spécifique, il est ici question de mettre un environnement applicatif
permettant à tout un chacun de concevoir son application d'aide à
la décision à destination des acteurs agricoles.
Le premier avantage de cette démarche est d'avoir
toutes les applications dans un même endroit. Les innovations sont ainsi
consolidées et l'agriculteur, client final, n'aura plus besoin de sortir
d'une plateforme pour aller sur une autre. Il sera sur un seul écran et
peut en quelques clics accéder à ses applications
préférées.
La solution en question sera un environnement qui met à
disposition des concepteurs d'applications des outils modulés pour
créer leur idée dans un temps court avec des ressources humaines
limitées et à un cout moindre, voir avec un cout néant.
En effet, aujourd'hui la technique nous permet de créer
ces types d'environnement.
C'est le cas par exemple dans le domaine du web, de la
célèbre application WordPress.
Wordpress permet aux personnes non techniques de construire
leur site web en usant d'une interface intuitive en drag and drop (glisser et
déposer). Les développeurs quand eux, peuvent créer des
modules prêts à l'emploi et les
mettent à disposition des utilisateurs du logiciel soit
gratuitement ou moyennant un paiement.
Avoir une telle application orientée sur le domaine
agricole, favorisera le développement d'outils simple et accessible pour
les agriculteurs et les startups agricoles.
Elle permettra en effet, à tout un chacun de
concrétiser son idée innovante à moindre avec une
qualité exceptionnelle.
Techniquement nous pouvons présenter l'architecture de
notre solution comme
suit :
Outils de support
Compta -- RH -- ERP agricole intégré de base dans
l'application
Outils d'aide à la décision agricole
intégrés dans l'application
Outils d'aide à la décision agricole (gratuites
ou payantes) Développées par des tiers (startup
développeur indépendant
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Noyau de
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l'application /Magasin d'applicatio
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n
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Base de données de l'applicatio n
DB
Tableau de bord de l'agriculteur
Mété o
Stock
Type compatible
Fig. 18 -- architecture
Cluster Hadoop
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Intégration possible dans une architecture Big Data
par simple connexion des environnements
82
Pour être plus complète, cette application permettra
l'intégration des boitiers de réception des capteurs, afin de
traiter les informations remontées.
Noyau de l'application
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Interface physique
API Rest
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Capteur connecté placé dans le champ ou sur
un engin
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Boitier
connecté/réception des
données
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Fig. 19 - Intégration capteur
Nous pouvons observer que la solution proposée peut
englober et consolider tout type d'application d'aide à la
décision ou autre. Elle offre de ce fait une réelle
flexibilité et agilité pour le concepteur d'application.
Elle permettra de réduire considérablement le temps
de conception d'une application, d'offrir plus de qualité et
d'accessibilité, et par corolaire amoindrir de manière
considérable les couts de commercialisation.
84
Notre société connait une évolution sans
précédente dans son histoire avec l'avènement du
numérique. On parle aujourd'hui de société d'information,
une société qui pousse la population à l'utilisation des
services et outils numériques.
La numérisation de la société se traduit
par trois principaux axes à savoir :
Les réseaux sociaux, qui sont aujourd'hui des outils
puissants pour le partage de l'information, les interactions humaines se font
de plus en plus sur ces réseaux. Cela crée ensuite une
communauté virtuelle actrice et influenceurs des
évènements réels de la vie courante en s'appuyant non
seulement sur la force de l'individu, mais aussi sur celle du groupe. Cela se
voit aujourd'hui par la multiplication de plateforme revendication
(pétition, forum, etc.) sur internet et sur les réseaux sociaux.
On assiste aussi à la naissance de communauté de partage autour
de centre d'intérêt commun, des groupes qui se coordonnent
ensemble sans se connaitre réellement.
Le mobile, il y'a encore quelques années l'information
même si elle est présentée n'est accessible que sur des
outils spécialisés, l'ordinateur de maison (avec
l'avènement d'internet) par exemple.
Aujourd'hui, le mobile à travers les
téléphones intelligents notamment nous permet un accès
instantané à l'information et nous permet d'interagir avec cette
information en temps réel. Cette possibilité bouleverse le
comportement normal de la population en créant une sphère
virtuelle accessible en permanence et qui a une influence directement sur nos
habitudes quotidiennes. En effet, environ 50 % de la population mondiale
utilise un mobile et est connecté à internet. Ce qui engendre
l'apparition de nouvelles pratiques telles que le mobile commerce, achat et
vente via le téléphone ou encore un fait plus marquant, à
l'uberisation de la société dont l'exemple le plus connu est
celle de la société de transport privée UBER, cette
dernière bien qu'elle propose de conduire des usagers d'un point A vers
un point B, ne dispose en fait d'aucune voiture ni d'aucun chauffeur dans les
actifs de son entreprise. Elle rend tout cela possible grâce à la
force de la technologie et du mobile en mettant simplement en relations usagers
et chauffeurs de voiture privée.
85
Ces interactions numériques sur les réseaux
sociaux et leur intensification par le mobile conduisent à la
création de masse de données non structurée et non
maitrisée.
Ce qui a conduit à la naissance du concept de Big data
ou masse de données dont le principe est de permettre la collecte et le
stockage de cette quantité de données en vue d'en extraire de la
valeur.
Un des moyens de stockage le plus en vogue et le plus innovant
est le cloud, dernier composant de la société de
l'information.
Le cloud, est une technologie dont les origines remontent aux
années 1970, il a été initié par de grandes
entreprises telles qu'IBM, Bull ou EM.
Le principe du cloud est de permettre le stockage de
données dans un environnement virtuel distant et de manipuler ses
données via une interface web (navigateur web).
Le cloud computing a gagné aujourd'hui tous les
domaines : la collaboration, le partage de données et de ressources
informatiques, la gestion des ressources humaines et financières, etc.
Il devient de plus en plus incontournable surtout pour les entreprises. En
effet, il permet aux entreprises de se défaire de la gestion continue
d'infrastructures techniques et de se contrer sur leur coeur de
métier.
Le développement de la technologie cloud vient
renforcer la notion de Big data, il est donc possible pour une entreprise
d'amasser beaucoup de données et de les stocker dans des espaces
dédiés sans avoir la charge d'assurer la construction et la
maintenance de cet espace.
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Toutes ces données stockées, il faut trouver le
moyen de les exploiter et de sortir de la valeur à partir
d'éléments désorganisés et permettre aux
différents acteurs de disposer d'analyses fines et pertinentes qui les
aideront dans leur prise de décision. On parle d'informatique
décisionnelle.
Nous avons donc étudié les deux systèmes
qui permettent d'atteindre cet objectif : le Big data avec ses outils de
traitement et d'analyses tels que Hadoop (suite de programmes pour traiter les
masses de données non structurer) et le datawarehouse ou entrepôts
de données qui sont l'outil traditionnel de l'informatique
décisionnelle.
La différence entre ses deux technologies est que la
première, le Big data, permet de traiter des données provenant de
n'importe source et structurées de façon
désordonnée, avec la possibilité de faire des analyses
prédictives et créer de nouveaux modèles de
stratégie. La deuxième quant à elle ne peut traiter que
des données déjà connues est structurées qui
viennent le plus souvent de l'intérieure de l'entreprise (données
comptables, foncières, etc.).
Cependant, au vu des contraintes et des couts autour d'un
projet de telle envergure, des entreprises qui dispose déjà d'un
système traditionnel d'informatique décisionnelle peuvent tirer
profit des avantages offerts par le Big data en procédant par
hybridation des deux systèmes.
Le potentiel de ces technologies pouvant s'appliquer à
n'importe quel domaine de la société, nous avons pu voir comment
le Big data et les outils décisionnels peuvent impacter le domaine de
l'agriculture et conduire la révolution numérique dans ce
secteur.
Ainsi, nous avons introduit l'ampleur des enjeux de
l'agriculture aujourd'hui et les challenges auquel elle doit faire face dans un
proche futur.
En effet, dans une trentaine d'années, le nombre de la
population mondiale passera à environ 9 milliards de personnes. Cette
croissance exponentielle pose le problème de la suffisance alimentaire
dans le monde.
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On attend donc du secteur agricole qu'il apporte les
réponses à cette interrogation.
Il y'a un besoin de gagner en productivité, de produire
vite, en grande quantité et en bonne qualité. Pour cela le
numérique semble proposer des solutions pertinentes.
Ces solutions passent par l'automatisation des processus de
production des agriculteurs et par la mise à disposition des outils
d'aides à la décision pour des actions optimisées et
ciblées.
Nous avons enfin, données des exemples d'impacts
concrets et prévisionnels de l'évolution de la technologie dans
le domaine agricole.
En conclusion, nous avons pu montrer que le concept de Big
data et de l'informatique décisionnelle peuvent être
complémentaires dans le stade actuel de l'évolution de la
technologie, il ressort cependant qu'un système Big data est plus
avantageux et offre des possibilités de traitement de données
supérieures à celles de l'informatique décisionnelle
traditionnelle (datawarehouse).
Nous avons aussi mis en exergue les opportunités et les
contributions pertinentes qu'apportent le Big data et les outils
décisionnels dans l'accompagnement du secteur agricole pour relever ses
défis.
Par des exemples de cas concrets, nous avons su montrer qu'il
est possible de mettre en place un environnement unifié et d'aide
à la décision pour les acteurs agricoles.
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