Conclusion Générale
Aux termes de cette étude, il conviendrait donc
d'affirmer que cette étude a permis de comprendre la situation des
enfants victime du conflit armé en Centrafrique. L'étude fait
ressortir des informations sur la nature du phénomène, les
facteurs déterminants, les différentes manifestations ainsi que
les réponses et les réactions face à l'exploitation et
l'utilisation des enfants dans le conflit armé en Centrafrique. Le
déplacement des personnes en Centrafrique a eu un impact sur les
conditions de vie des enfants et de leurs parents. Les enfants victimes et
leurs parents se trouvent dans des situations vulnérables, de vie
précaire et de dépendance économique. La
précarité s'observe par le cadre physique de vie peu attrayant,
l'accès à l'éducation et à la formation
limité aux enfants des familles riches en Centrafrique. Nous pouvons
également mentionner la perte des emplois des parents, les
incapacités physiques et psychologiques, et les traumatismes nés
du conflit et parfois non traité sur les enfants et leurs familles.
Le conflit a créé des cas de
déplacés internes, qui ont eu des conséquences sur le
développement moral, mental, social, spirituel des enfants. Il a
été également observé une dislocation de la cellule
familiale qui a favorisé la naissance des enfants séparés,
des enfants orphelins et des groupes d'enfants vulnérables. Par
ailleurs, la réponse nationale n'est pas suffisante malgré tous
les efforts de solidarité qui ont été mis en place pour
porter secours aux enfants victimes ou sinistrés. Dans ce contexte de
crise, les enfants constituent pour la famille et pour les utilisateurs une
main d'ouvre abondante et bon marché. Durant les mouvements des
populations et la période transitoire et post-crise, les enfants et
leurs parents se débrouillent. Survivre en période de conflit
armé sans ressources propres et sans travail place les enfants et les
parents dans une situation vulnérable, et par conséquent, pour la
plupart, ils n'ont pas alternative que d'exercer les activités
économiques afin de subvenir aux besoins familiaux.
Les enfants, dans leur volonté de faire quelque chose,
sont souvent exposés à des formes d'exploitation
économique et sexuelle. Le conflit armé a favorisé
l'émergence de nouvelles formes d'exploitation économique. Ces
formes d'exploitation sont connues ou peu connues avant le mouvement des
personnes. En réalité, elle n'est pas une nouveauté en
tant que tel, mais elles ont été rendues visibles à la
population, à l'occasion de la crise armée. Selon les
données disponibles, au Nord du pays. Certaines formes d'exploitation
des enfants telles que la prostitution infantile, la mendicité, et
l'utilisation des enfants dans le trafic et la commercialisation des produits
prohibés ou frauduleux, les travaux dangereux ou pénibles ont
connu une forte émergence. Le travail précoce se
développe dans une dynamique existentielle. Ce phénomène
du travail précoce semble davantage toucher les enfants quel que soit la
situation et le statut des enfants. Avec une moyenne d'âge de 13 ans, le
travail précoce des enfants dans le contexte de conflit armé est
préoccupant, vue l'ampleur du phénomène.
Les conditions de travail sont difficiles pour tous les
enfants. Les enfants travaillent dans les conditions difficiles qui sont
reconnues comme tel par les employeurs et les parents d'enfants travailleurs.
Certains matériels ou équipement de travail, notamment les
produits chimiques, les objets tranchants ou lourds, etc. sont dangereux pour
les enfants, mais leurs utilisateurs et leurs parents ne se soucient pas de ces
risques. Les enfants salariés sont peu rémunérés
car la main d'oeuvre est supérieure à la demande dans un contexte
où toutes les populations touchées par le conflit armé se
débrouillent pour survivre. Le secteur informel recrute beaucoup
d'enfants. Les activités exercées sont des activités du
secteur informel. Le conflit armé a eu des impacts sur les
activités et sur les enfants eux-mêmes. Nombre d'enfants n'ont pas
eu accès aux salles de classes, et le conflit armé a
suscité des vocations économiques, des petites activités
de survie. Les réponses face au phénomène sont
insuffisantes. Cette étude a fait ressortir le fait que tous les acteurs
publics, les acteurs sociaux, les partenaires au développement ont
réagi face au phénomène de la protection des droits de
l'enfant en période de conflit armé. L'aide humanitaire s'est
mise en place progressivement. Mais elle est apparue insuffisante compte tenu
de la persistance de la crise et des moyens limités de certains acteurs.
La fourniture de l'aide humanitaire n'a pas
empêché aux populations vulnérables de se
débrouiller, par leur propre effort. Cependant, force est de constater
que les réponses n'ont pas concerné la lutte contre
l'exploitation surtout économique des enfants en période de
conflit armé. Les actions de prévention du travail des enfants et
ses pires formes, notamment le recrutement des enfants par les groupes
armés, la traite d'enfants, la prostitution, etc. ont été
insuffisantes dans le Nord et l'Est de Centrafrique (zones
enquêtées). Très peu d'information a été
véhiculée concernant l'utilisation des enfants dans le conflit
armé, en tant que soldat. Les enfants victimes, en
général, sont très peu satisfaits de la réponse
donnée à leurs préoccupations. La communauté
locale n'est pas fortement impliquée. A ce sujet, l'étude faite
montre que les communautés locales, bien que organisées,
n'interviennent pas collectivement dans la lutte contre les formes
d'exploitation des enfants. Les enfants veulent reprendre le chemin de
l'école ou apprendre un métier. Cette aspiration de vie s'inscrit
dans le contexte dans lequel les enfants et leurs parents ont effectué
le déplacement. L'école et la formation professionnelle
intéressent encore les enfants déplacés. Les défis
de la mise en oeuvre des droits de l'enfant en Afrique en général
et en Centrafrique en particulier sont énormes.
En plus du manque d'éducation et de santé, dans
ceux des pays devenus sans Etat comme le cas de Centrafrique, ou continuant
miraculeusement de subsister avec tout juste un résidu d'institutions
publiques, des générations entières d'enfants ne savent
rien d'autre de la vie que la violence à large échelle. Cette
autre particularité des misères de l'enfant centrafricain place
la question des droits de l'enfant au confluent des exigences de la
règle de droit et des contraintes de sécurité. En
Centrafrique, l'UNICEF estimait en 2014 qu'à peu près 20 %
des 60 000 combattants centrafricains étaient des enfants de moins de
dix-sept ans. Nombre de ces combattants aux dents de lait étaient
âgés de moins de dix ans au moment de leur enrôlement dans
les groupes armés. Quant à la petite fille centrafricaine
brisée par la violence armée et espérant avoir enfin
trouvé refuge dans un campement d'assistance humanitaire, elle n'est pas
du tout protégée contre la perversité de certains
individus sans scrupules et sans pitié, qui n'hésitent pas
à la réduire à l'état de chair à plaisir.
Une enquête, menée conjointement par le Haut-Commissariat de l'ONU
pour les Réfugiés (HCR) et par l'ONG britannique Invisible
Children en septembre 2014, dévoile ainsi un réseau
d'exploitation sexuelle des enfants dans les camps de réfugiés en
Centrafrique. Les petites filles sont obligées par certains
« agents humanitaires et les casques bleu de la Minusca»
d'offrir des faveurs sexuelles en échange des boites de sardines et du
pain.
S'agissant toujours du rapport de l'enfant à la
violence, demeure également entière la question de la justice
pénale et des droits de l'enfant en temps de paix ou de guerre.
L'ampleur des misères de ces enfants est telle que la distance demeure
immense entre la réalité et les règles de droit. En
adhérant à la Convention relative aux droits de l'enfant, par
exemple, « les Etats parties s'engagent » non seulement
« à respecter les droits qui sont énoncés dans
la présente Convention », mais aussi « à les
garantir à tout enfant relevant de leur juridiction ». Aux
termes de l'article 2 : « Les gouvernements et institutions
internationales doivent assumer leurs responsabilités en ce qui concerne
les initiatives qu'ils prennent pour placer la question des droits et du
bien-être des enfants au premier rang des
préoccupations ». Pour l'organisation statutairement
chargée de promouvoir et de garantir le bien-être de l'enfance,
« ceux qui ne le font pas devront rendre des comptes. Le continent
continue néanmoins d'évoluer en marge ou hors des normes et
principes auxquels il a librement et souverainement souscrit. Les questions du
droit international et d'adaptation aux circonstances nationales dans
lesquelles ce droit est appliqué, de même que celles relatives
à l'effectivité des institutions compétentes
chargées d'appliquer localement des standards juridiques universellement
définis, demeurent sans réponse pour nombre d'Etats du continent.
Quant à l'enfant centrafricain, il est progressivement en passe de
devenir le laissé-pour-compte de sociétés
végétant elles-mêmes à la limite de la survie.
Cette évolution est extrêmement
préoccupante, car c'est le destin même de tout un pays qui est en
jeu. Parce que les enfants sont l'avenir des peuples, en leur sacrifice
s'opère, de manière consubstantielle, le sacrifice même de
l'avenir. Dans des termes lourds de signification, les enfants eux-mêmes
ne cessent de nous le rappeler : « Si nous sommes l'avenir et
que nous sommes en train de mourir, alors il n'y a plus d'avenir?« If we
are the future, and we are daying, there is no future ». L'UNICEF,
qui qualifie les enfants de « semences de paix », attire
l'attention sur le fait que « le développement durable d'un
pays, la paix et la sécurité dans le monde ne sont possibles que
si les droits et le bien-être des enfants sont garantis ». Dans
ce contexte, où droits de l'enfant et progrès des nations sont
liés, « le rôle des dirigeants consiste
intrinsèquement à s'acquitter pleinement, systématiquement
et à n'importe quel prix de leur responsabilité.
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