Section II : Les fondements théoriques du
commerce international
1. Les approches traditionnelles
1.1 La théorie d`Adam Smith sur les avantages
absolus
S`opposant aux thèses protectionnistes des
mercantilistes qui voyaient dans le commerce international un jeu à
somme nulle, Adam Smith23 élabore la théorie des
avantages absolus. Le principe des avantages absolus suppose la
possibilité pour un pays de produire un bien avec moins de facteur de
production par rapport au reste du monde. L`échange international serait
donc mutuellement avantageux si chaque pays se spécialisait dans la
production où il possède un avantage absolu en matière de
coût. A. Smith raisonne dans le cas de deux pays, produisant chacun deux
biens, avec un unique facteur de production - le travail - mobile sur le plan
national mais immobile internationalement. Les coûts de production
unitaires étant par hypothèse mesurés en heures de
travail, un pays dispose d`un avantage absolu dans la production d`un bien
donné lorsqu`il peut produire une unité du bien
considéré avec moins d`heures de travail que le pays
partenaire.
En vertu de ce principe, les pays doivent se
spécialiser dans les secteurs d'activité où leur
efficacité est la plus grande. En conséquence, chaque pays doit
exporter le surplus de production qui découle de cette
spécialisation et importer les biens dont la production est
laissée aux pays voisins. Pour justifier cette idée, Smith avance
l`argument qui consiste à dire que l'importation est à l'origine
d'un gain à
23 Smith A. (1776), La Richesse des
nations.
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l'échange et qu`il convient d'acheter à
l'étranger ce qui y est disponible à moindre coût.
Réciproquement, l'économie nationale exportera les biens pour
lesquels elle produit dans des conditions plus avantageuses. C'est
l'importation qui, suscitant un mouvement de spécialisation et mettant
à disposition des producteurs et des consommateurs une plus grande
variété de biens et de services, est à l'origine d'un
gain.
Notons que la théorie des avantages absolus d`Adam
Smith ne permet pas de comprendre pourquoi un pays qui serait plus efficace
dans la production de tous les biens aurait tout de même
intérêt à échanger avec ses voisins.
1.2 La théorie de David Ricardo sur les avantages
comparatifs
Reprenant la théorie des avantages absolus d`Adam
Smith, David Ricardo24 va résoudre la difficulté
interne à cette théorie, qui réside dans le fait qu`un
pays pourrait avoir des avantages absolus dans la production de tous les biens,
ou encore dans le cas où un pays ne disposerait d`avantage absolu dans
la production d`aucun bien. En effet, la théorie des avantages absolus
supposent la nécessité d'un avantage absolu de chaque pays pour
au moins un bien. En élaborant la théorie des avantages
comparatifs, Ricardo va montrer que même un pays avantagé dans
tous les biens ou, à l`inverse, même un pays
désavantagé dans tous les biens peut trouver un gain net dans
l`échange avec ses voisins.
La théorie des avantages comparatifs suppose en effet
que, même en l`absence d`avantage absolu, la spécialisation peut
se révéler avantageuse si les pays se spécialisent dans le
bien pour lequel ils disposent de la productivité relative la plus
forte. Le principe des avantages comparatifs repose sur l'idée du
coût d'opportunité combinée à celle d'un ajustement
des balances de paiements par les variations du taux de change. Le coût
d'opportunité d'une activité consiste à évaluer ce
que le même temps passé à une autre activité
pourrait rapporter. En ce sens, un pays a intérêt à
concentrer ses ressources dans les activités où il est
relativement plus
24 Ricardo D. (1817), Des principes de
l'économie politique et de l'impôt.
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efficace. Par ailleurs, la variation du taux de change peut
jouer en faveur d`un pays désavantagé dans toutes les
activités, car celui-ci verra son taux de change se
déprécier jusqu'au point où ce désavantage
systématique disparaîtra pour certaines activités, en
monnaie internationale. Après ajustement du taux de change, ce pays
pourra se spécialiser selon les avantages comparatifs que lui auront
procurés les coûts d`opportunité.
Ricardo justifie donc la nécessité d`instaurer
le libre-échange par la comparaison internationale des coûts
d'opportunité. En présence de différences internationales
de coûts d'opportunité, il est avantageux pour tous les pays de se
spécialiser et d'exporter le bien dont la production présente le
plus grand avantage absolu ou le plus faible désavantage absolu. Alors
que les avantages absolus correspondent à une comparaison des
coûts de production, les avantages comparatifs correspondent à une
comparaison des coûts d'opportunité.
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