UNIVERSITE LIBRE DES PAYS
DES GRANDS LACS
U.L.P.G.L/GOMA
FACULTE DE DROIT
B.P. 368 GOMA
LA RESPONSABILITE ENVIRONNEMENTALE EN DROIT CONGOLAIS
FACE AUX NOUVEAUX RISQUES :
CAS DE L'EXPLOITATION DU PETROLE
Par : MUHAMED ABDOUL Fabien
Mémoire présenté en vue de l'obtention d'un
diplôme de Licence en Droit Privé et judiciaire.
Directeur : Prof. Dr KIHANGI BINDU
Kennedy
Encadreur : CT. IRENGE BALEMIRWE Victor
Novembre 2020
EPIGRAPHE
« Dans un environnement qui change, il n'y a pas de
plus grand risque que de rester immobile. »
JACQUES CHIRAC
REMERCIEMENTS
Un travail intellectuel n'a jamais été une
oeuvre personnelle, il y a toujours eu de part et d'autre le concert d'autres
personnes qui contribuent de près ou de loin à sa
réussite.
Notre réflexion de fin cycle de licence n'est pas
à l'écart de cette réalité, elle a
été enrichie par des contributions des personnes que nous ne
saurons passer outre, sans pour autant glisser un mot de gratitude à
leur égard.
De prime abord, avec un sentiment de pleine gratitude, nous
remercions le Dieu Tout Puissant pour la santé, l'intelligence et la
sagesse qu'il a placées en nous.
Qu'il plaise à notre cher Prof. Dr KIHANGI
BINDU Kennedy de trouver ici l'expression de nos sentiments de
remerciements et de gratitude pour les directives et conseils pratiques nous
donnés dans l'élaboration de ce travail,
Il en est de même pour le CT. IRENGE BALEMIRWE
Victor pour toute disponibilité et les conseils dans le cadre
de notre encadrement tout au long de la confection de cette oeuvre
intellectuelle.
Nous ne nous empêcherons pas dans le cadre de ce
travail de présenter nos sincères remerciements à nos
parents Kennedy MATANDIKO ABDOUL et Belya
WABUNGULWA, nos frères et soeurs, pour leur soutien tant moral,
spirituel que pratique ainsi que de leur affection et accompagnement qu'ils ne
cessent de toujours nous montrer.
Que tous nos amis et connaissances qui ont contribué
à ce travail de toute manière que possible trouvent ici
l'expression de nos sentiments de gratitude et de remerciements.
MUHAMED ABDOUL FABIEN
RESUME
Dans les sociétés
humaines, le pétrole devient une matière première
indispensable à l'homme dans ses activités, cependant
l'exploitation de ce pétrole est à la base de nombreux risques
environnementaux laissant au passage des victimes qui nécessitent
réparation. Pour que cette réparation soit effective, il faut des
mesures solides de responsabilité environnementale susceptible à
faciliter les victimes dans leur démarche de réparation.
Malheureusement, les mesures classiques
de responsabilité pour faute mise en place en premier par le
législateur congolais ne répondent plus aux
nécessités de réparation des dommages environnementaux de
l'industrie pétrolière. Cela étant donné que cette
exploitation étant industrielle, elle fait courir des risques nouveaux
dus au progrès technique, obligeant une nouvelle dynamique d'adaptation
de la responsabilité civile classique.
Ainsi pour permettre aux victimes d'avoir
réparation, la responsabilité environnementale des exploitants
pétroliers devra se fonder sur les théories de
responsabilité sans faute dite objective. Il est aussi nécessaire
d'engager la responsabilité sociale des entreprises
pétrolière par l'exigence de la signature des cahiers de charge
avant toute exploitation du pétrole.
ABSTRACT
In human societies, oil becomes an essential raw material for
mankind in his domain. However, the exploitation of oil is a source of many
environmental risks leaving victims, on its way, who requires indemnisation.
For this reparation to be effective, strong environnemental liability measures
are needed that can facilitate victims in their reparation seeking process. For
this reparation to be effective, solid environmental responsibility measures
are needed, that can facilitate victims in their process of reparation.
Unfortunately the classic measures of liability for fault, set aside by the
conogolese legislator, non longer meet the needs of repairing the environmental
damage of the oil industry. This being given that exploitation being
industrial, poses new risks due to the technical progress, does not be applied.
Therefore, in order to allow victims to have reparation, the environmental
responsibility of oil operators should have to be based on the theories of
so-called objective liability. It is also necessary to engage the social
responsibility of oil companies by requiring the signing of specifications
before any oil exploitation.
PRINCIPAUX SIGLES ET
ABREVIATIONS
Al : Alinéa ;
C.T : chef de travaux ;
CSRP : commission Sous régionale de
pêche ;
CGDD : Commissariat général au
développement durable ;
Dir : directeur ;
Ed : édition ;
J.O RDC : Journal Officiel de La République
Démocratique du Congo ;
N° : Numéro ;
ONG : Organisation Non Gouvernementale ;
Op.cit. : Opere citato (réfère à un
ouvrage cité) ;
P (p) : Page ;
Prof : Professeur ;
PRCM : Programme Régional de Conservation de la
zone côtière et Marine en Afrique de l'ouest ;
RDC : République Démocratique du
Congo ;
RSE : Responsabilité Sociale des
Entreprises ;
SA : Société Anonyme ;
ULPGL : Université Libre des Pays des Grands Lacs.
INTRODUCTION GENERALE
I. ETAT DE LA QUESTION
Le pétrole est devenu aujourd'hui une
nécessité pour les sociétés humaines. Il est
inhérent aux besoins de l'homme comme source d'énergie dans ses
activités. Il est utilisé par ce dernier dans la plupart de ses
entreprises. En effet, la plupart des sources d'énergie
nécessaires au fonctionnement de nos sociétés sont
fournies par le gaz et le pétrole. Mais leur extraction
génère également une série de coûts sociaux
et environnementaux présents et futurs, directs et indirects, qui
doivent être comparés aux bénéfices qu'ils
apportent. La dépendance mondiale à l'égard du
pétrole est énorme. Le pétrole alimente nos moyens de
transport, chauffe ou refroidit des bâtiments et sert à
créer des produits chimiques industriels et domestiques. Soixante
pourcents de la production de pétrole est utilisée pour le
transport, essentiellement les voitures et les camions.1(*)
Au vu de cette dépendance de la société
au pétrole, les activités extractives pétrolières
deviennent courantes dans nos communautés de sorte qu'il est difficile
de s'en passer. Cependant, ces activités ne restent pas sans impact sur
l'environnement, elles sont à l'origine de la dégradation
environnementale et des dommages sociaux-environnementaux énormes.
L'industrie pétrolière a des impacts sur les êtres humains
et sur l'environnement, à travers le réchauffement de la
planète, les opérations terrestres et maritimes et à
travers des impacts positifs ou négatifs sur les économies
nationales. Les actions non réglementées de l'industrie
pétrolière détruisent les habitats et portent atteinte
à la biodiversité2(*).
Ces impacts du pétrole sur l'environnement ont
été démontrés au travers des accidents dus au
transport de cette matière première, dans ce contexte les
déversements de pétrole ont endommagé des forêts de
mangrove, des récifs coralliens et des pêcheries, à la
suite d'accidents graves et de fuites régulières impliquant des
pétroliers, des balises de chargement et des plateformes de forage et de
production3(*). Le transport
du pétrole est aussi impliqué dans les dommages
écologiques : par exemple, on estime à 16.000 le nombre de
déversements pendant la construction de l'oléoduc trans-alaskien.
Les accidents de navires pétroliers sont d'autres exemples bien connus
de désastres écologiques qui ont des effets à long terme
sur l'environnement.4(*)
Ceci implique que l'exploitation pétrolière est
sujette des risques sur l'environnement dans son ensemble, encore faut-il, dans
le souci d'une conséquence des dommages qui est la réparation,
circonscrire la responsabilité environnementale dans un contexte
aujourd'hui d'évolution des risques liés au progrès
techniques qui vient refonder la notion de la responsabilité.
Mais pour ce faire, même dans le contexte de
l'évolution des notions des risques, l'existence des dommages
environnementaux précis se présente comme une condition sine qua
non de cette responsabilité environnementale.
En effet, il ne suffit pas simplement qu'il y ait des
atteintes liées à l'environnement pour que soient
envisagées des réparations au sens juridique du terme. Encore
faut-il que ces atteintes remplissent certaines conditions. Au nombre des
conditions, il faut et il est nécessaire que les atteintes dont il
s'agit, entraînent des dommages qui soient constitutifs de
préjudices environnementaux5(*).
Selon Bertrand de CONINCK : « la réparation du
dommage écologique appelle une question préliminaire qui est
celle de l'établissement du dommage. Il ne s'agit pas seulement de la
preuve du dommage, mais de l'existence même de celui-ci. 6(*)».
Les risques liés au pétrole sont à cet
effet imminent sur l'environnement comme sur la population, pendant
l'extraction du pétrole, les hydrocarbures sont brulés et
décantés pour produire de l'énergie. Cela se remarque
visiblement dans les puits de pétrole d'où jaillit un
géant feu entretenu nuit et jour par une géante cheminée
visible à des kilomètres à la ronde7(*), au cours de cette
opération des milliers des polluants et autres gaz nocifs sont
rejetés dans l'atmosphère et s'incrustent dans la
sphère8(*) .
Dans cette logique des risques liés aux
activités pétrolières, le législateur congolais met
en place la responsabilité civile au chapitre 7 de la loi sur les
principes fondamentaux relatifs à l'environnement, A son article 68,
elle prévoit :
Sans préjudice des peines applicables pour infractions
à la présente loi et ses mesures d'exécution, est
responsable toute personne qui par l'exercice de ses activités, a
causé un dommage à l'environnement et à la santé en
violation de la présente loi9(*).
De ce qui précède, il sied de souligner la mise
en place par le législateur de la responsabilité civile des
exploitants pétroliers, c'est-à-dire une responsabilité
pour faute. Cependant la responsabilité civile avec faute au contact des
problématiques environnementales parait au premier abord,
perturbée par des questions environnementales. A vrai dire, loin
d'être polluée, le droit de la responsabilité civile est
sur certains aspects revérifié par les problématiques
environnementales, cela suite à l'incertitude scientifique qui domine
les problématiques environnementales.10(*)
Dans l'état des connaissances actuelles, les
scientifiques ne peuvent déterminer avec une certitude complète
la totalité des dommages susceptibles d'être causés
à la faune et à la flore par l'activité industrielle
étudiée (pétrolière), puisque l'on ne
possède pas une connaissance par faute de ces risques, la
réglementions des activités d'exploitation d'hydrocarbures n'est
pas nécessairement adaptée.11(*).
Dans le domaine de l'environnement, le fondement de la
responsabilité environnementale devrait transcender celui de la
responsabilité civile classique surtout dans le secteur pétrolier
avec tous ses risques. La responsabilité environnementale est le cadre
juridique indispensable à l'application du principe du pollueur payeur
en matière d'atteintes à l'environnement.
Il faut préciser que cette réflexion n'est pas
une première dans ce domaine d'impact de l'exploitation
pétrolière, d'autres auteurs ont mené des études
sur l'exploitation pétrolière et ses conséquences sur
l'environnement pour une responsabilisation.
En effet, OLIVIER BINGANA KUMBANA, présente une
étude sur l'impact de l'exploitation pétrolière sur
l'environnement dans le cas de la zone côtière congolaise de
MUANDA.
Il se pose une question fondamentale de savoir quelle seraient
les conséquences liées à l'activité
pétrolière et sur base de quels mécanismes juridiques
peuvent se fonder la prévention et la réparation ?
En suite ; il démontre que le problème du
pétrole est surtout l'émission dans l'atmosphère des
polluants issus de la combustion des hydrocarbures par l'oxygène de
l'aire, la plupart des gaz émis dans l'air causent des affections
respiratoires à l'homme et soulève l'idée d'un
renforcement des mesures d'atténuation d'impact prévues en Droit
congolais afin de sauvegarder l'environnement.12(*)
Antoine Mingashanga Kwete, de sa part, a mené une
étude dans le même cadre de notre réflexion sur l'impact de
l'exploitation pétrolière sur la santé des populations
locales et de l'environnement à MOUANDA : cas de la firme Parenco.
L'auteur a cherché à savoir quels sont les impacts des
activités pétrolières de la firme Parenco sur la
population de MUANDA, et quelle est sa responsabilité sur le plan du
Droit. Il a démontré que certains problèmes comme
l'augmentation des maladies des yeux, le dessèchement de certains
arbres, peuvent être provoqués par les
activités du secteur pétrolier d'où une certaine
nécessité de la responsabilisation de la firme basée sur
le non-respect des textes juridiques nationaux et internationaux
ratifiés par la RDC13(*).
Cette réflexion se démarque des
précédentes dans la mesure où, au-delà de
l'étude des risques de l'exploitation pétrolière sur
l'environnement, elle vient intégrer la question de la
responsabilité en vue de donner une voie juridique de réparation
des dommages tout en se basant beaucoup plus dans l'analyse des risques
liés aux progrès dans le domaine industriel de l'exploitation
pétrolière.
II. PROBLEMATIQUE
Dans le cadre de cette recherche,
certaines questions font état des préoccupations qui constituent
la problématique de ce travail.
Le droit congolais de l'environnement par la loi portant
principes fondamentaux relatifs à la protection de l'environnement met
en place un mécanisme de responsabilité civile qui ne correspond
pas aux risques environnementaux.
En effet comme le remarque MUSTAPHA MEKKI, les questions
environnementales ne peuvent pas se fonder sur les notions classiques de la
responsabilité civile. Le droit de l'environnement est un
précieux laboratoire et oblige les spécialistes du droit de la
responsabilité civile à repenser leur matière, à
revisiter leurs notions fondamentales, à questionner leurs principes. Le
procès de responsabilité civile n'a plus le même visage
lorsque les problématiques deviennent environnementales.
Les conditions de la responsabilité civile n'ont plus
les mêmes contours au contact des questions environnementales :
l'intégration du temps long, la prise en considération des
incertitudes scientifiques, une priorité accordée à la
précaution et à la prévention14(*).
De ce qui précède, il convient de s'interroger
en guise de problématique : le Droit congolais de
l'environnement, organise-t-il de manière effective et efficace la
responsabilité environnementale dans le secteur du
pétrole ?
A cette question principale, il appert judicieux
d'épingler deux questions secondaires, à
savoir :
- Quel est le fondement juridique de la responsabilité
environnementale en Droit Congolais ?
- Existent-ils en Droit congolais, des mécanismes de
mise en oeuvre de la responsabilité environnementale pour la
réparation des dommages de l'activité
pétrolière ?
III. HYPOTHESES
La thématique dont la quintessence
est énoncée dans la question de notre problématique
nécessite des réponses provisoires en termes d'hypothèses
afin d'avoir une compréhension sur l'ensemble de notre recherche. Ainsi
elles sont présentées en ces termes :
- En matière d'environnement, il a été
démontré que, prouver le lien causal est une tâche qui
peut être particulièrement ardue, le dommage causé à
l'environnement est un dommage souvent diffus qui ne peut pas toujours
être rapporté avec certitude à un ou plusieurs faits
générateurs lointains dans le temps et dans l'espace.15(*) La responsabilité
civile dans son appréhension classique devrait être adaptée
aux réalités qui entourent les aspects environnement chaque fois
qu'il sera de besoin. Le Droit congolais fonderait la responsabilité en
matière environnementale sur la responsabilité objective sans
faute.
- Le droit congolais devrait expressément et
efficacement organiser des mécanismes judiciaires et extra judicaires de
mise en oeuvre de la responsabilité environnementale à l'instar
des actions individuelles et collectives en matière environnementale et
la responsabilité sociale des entreprises ainsi que les cahiers de
charges des entreprises pétrolières.
IV. INTERET ET CHOIX DU SUJET
1. Choix
Le choix de ce sujet a été inspiré par le
souci d'améliorer le cadre juridique congolais en ce qui concerne la
responsabilité des exploitants pétroliers dans le contexte d'une
évolution des risques environnementaux.
2. Intérêt
Sur le plan scientifique, notre travail
poursuit un intérêt de contribution à la science juridique
sur la responsabilité environnementale. En effet, il est
d'actualité qu'on réfléchisse plus sur l'exploitation
pétrolière en RDC. Il est donc temps, dans une logique
préventive, de décortiquer les risques nouvellement liés
à cette exploitation.
Face à ces risques, il est de l'intérêt
de tout juriste moderne, de réfléchir sur le fondement de la
responsabilité en cas des dommages non pas seulement dans la logique
préventive mais aussi dans le souci d'une effective réparation
dans le cadre du droit congolais dominé par les théories
classiques de responsabilité.
Sur le plan pratique, cette réflexion
se veut être une relance des questions de responsabilité
environnementale par confrontation à la responsabilité civile en
vue d'éclairer les justiciables sur les voies juridiques de
réparation des dommages environnementaux par les activités
extractives surtout pour ce qui est de la difficulté de prouver certains
risques pétroliers sur l'environnement.
V.
METHODES ET TECHNIQUES DE RECHERCHE
Dans le souci d'aboutir aux
différents résultats sur lesquels porte notre travail, comme tout
chercheur, nous nous sommes appuyés sur un certain nombre des
méthodes et techniques pouvant nous permettre d'aboutir à des
conclusions scientifiques vérifiant la validité des
résultats de nos recherches. Ainsi donc, deux méthodes ont
été utilisées dans le cadre cette dissertation.
· La méthode Exégétique
Elle nous a permis d'examiner la
législation congolaise environnementale dans le but d'apprécier
les théories de responsabilité qu'elle prévoit et leur
efficacité sur la réparation des préjudices
environnementaux.
· La méthode comparative
La méthode comparative consiste à comparer les
types des sociétés et à les catégoriser16(*). Elle nous a été
utile dans la comparaison des mesures de responsabilité prévues
dans différentes sociétés à la nôtre. Ainsi,
nous avons parcouru les avancées du droit environnemental
français dans le souci d'influencer la réforme du cadre
légal congolais de l'environnement.
Outres ces méthodes, nous avons fait recours à
la technique documentaire qui a consisté à parcourir la
littérature consacrée aux questions de droit de la
responsabilité environnementale.
VI. DELIMITATIONS DU SUJET
La question de la responsabilité
environnementale peut être abordée de plusieurs manières,
soit en considérant la responsabilité administrative de l'Etat
(responsabilité environnementale administrative), soit en
considération des infractions commises par les entreprises extractives
(responsabilité pénale en matière environnementale), mais
dans le cadre de ce travail, notre réflexion s'est limité
à l'analyse du fondement juridique et des mécanismes de mise en
oeuvre de cette responsabilité en matière civile de
réparation des préjudices environnementaux.
VII. SUBDVISON DU TRAVAIL
Dans le souci de trouver satisfaction
à notre problématique, notre travail comporte deux chapitres avec
chacun deux sections.
Le premier chapitre porte sur le fondement juridique de la
responsabilité environnementale dans le secteur pétrolier
congolais. Il a été subdivisé en deux sections dont la
première analyse la théorie sur la responsabilité en
matière d'environnement et la deuxième aborde le cadre juridique
congolais de la responsabilité environnementale.
Le Deuxième chapitre porte sur les mécanismes de
mise en oeuvre de la responsabilité environnementale en Droit congolais.
Il est subdivisé en deux sections dont la première analyse les
mécanismes judiciaires de mise en oeuvre de la responsabilité
environnementale et la deuxième aborde les mécanismes
extrajudiciaires de mise en oeuvre de la responsabilité
environnementale.
CHAPITRE I : FONDEMENT
JURIDIQUE DE LA RESPONSABILITE ENVIRONNEMENTALE DANS LE SECTEUR PETROLIEREN
RDC
Dans ce chapitre il est question tout
d'abord d'analyser la théorie existante sur la responsabilité en
matière environnementale constituant son fondement et d'analyser le
Droit congolais de l'environnement en vue de dégager les notions mises
en place par le législateur Congolais pour fonder la
responsabilité dans le domaine de l'environnement et déboucher
aux propositions à la lumière de la théorie existante.
Section 1 :
Théorie sur la responsabilité en matière
d'environnement
Il est impérieux avant tout examen de la
responsabilité environnementale, de faire un aperçu sur
l'évolution de la responsabilité civile classique basée
sur la faute vers la responsabilité civile sans faute, qui devra, selon
nous, fonder la responsabilité environnementale.
En effet, le droit de la responsabilité civile a connu,
depuis les grandes codifications civiles du 19e siècle un
développement considérable dans le sens de l'extension des cas de
responsabilités sans fautes17(*). D'une manière générale, en
occident, le législateur a organisé, dans les lois
spéciales, un régime exceptionnel de compensation basé sur
le risque et non sur la faute, de manière à pallier l'injustice
sociale résultant de l'application du régime de droit
commun.18(*)
A ces propos, Jean-Louis Baudoin a signalé les divers
facteurs sociaux, économiques et juridiques qui ont provoqué
cette évolution, parmi lesquels il convient de citer l'accroissement des
risques d'accident, et des dommages aux biens et aux personnes dus à la
mécanisation, l'essor de la technique ainsi que le développement
de l'industrialisation qui a pour effet d'augmenter le nombre des
accidents19(*). Il faut
ainsi noter que, dans un contexte des risques accru, les théories de la
responsabilité subjective basées sur l'article 258 du code des
obligations congolais sont en train d'évoluer.
Le Professeur Tercier note que « la multiplication des
risques qui caractérise notre société ne peut qu'amener le
législateur à envisager de nouvelles responsabilités
objectives. C'est pourquoi certains auteurs ont proposé de remplacer ou
compléter le système actuel par la reconnaissance du principe
général imposant une responsabilité objective
aggravée pour quiconque crée un danger accru pour les
tiers20(*).
En Droit congolais, il faut noter cette objectivisation de la
responsabilité civile ; on sort de seule logique de la faute
délictuelle c'est-à-dire une responsabilité pour faute
basée sur les articles 258 et 259 du code des obligations vers la
responsabilité quasi-délictuelle c'est-à-dire une
responsabilité sans faute du civilement responsable basée sur les
articles 260 à 262. Il s'agit de la responsabilité pour fait
d'autrui. Il faut noter que la responsabilité du fait d'un tiers
constitue une exception au principe de la responsabilité individuelle
(délit) fondée sur la faute en ce sens que l'article 260 rend
certaines personnes responsables des dommages causés par d'autres
personnes ou par des animaux et des choses qui sont sous leur garde.
Disons qu'il était traditionnellement admis que la
responsabilité des personnes visées par l'art.260 se fondait, non
pas sur leur faute personnelle, mais sur une « présomption de
faute ». Pareille conception doit aujourd'hui être
complétée par la notion de « responsabilité
objective » introduite en droit congolais par la loi No 73-013 du 5
janvier 1973 portant obligation d'assurance responsabilité civile en
matière d'utilisation des véhicules automoteurs21(*).
Paragraphe 1 : la
responsabilité environnementale
La responsabilité environnementale est le cadre
juridique indispensable à l'application du principe pollueur payeur, en
matière d'atteinte à l'environnement. De plus, la
consécration de la responsabilité environnementale fournit une
excellente occasion de renforcer la responsabilité civile, pénale
et administrative contre les atteintes à l'environnement. La charge de
la preuve incombe alors au pollueur, qui est généralement le plus
puissant et qui devrait donc pouvoir l'assumer22(*).
L'engagement de la responsabilité environnementale
suppose, comme en droit civil de la responsabilité, la réunion de
trois conditions : le fait générateur de la
responsabilité, un dommage et un lien de causalité entre le fait
générateur et dommage23(*).
· Le fait générateur : il s'agit ici
des activités d'exploitation du pétrole. Toute personne est
responsable du dommage qu'il cause dans l'exercice de ses activités. Ici
on fait abstraction de la faute.
· Le dommage : est responsable du dommage toute
personne qui, par l'exercice de ses activités , a causé un
dommage à l'environnement et à la sante, ainsi, le droit
congolais de l'environnement limite la prise en compte de la
responsabilité environnementale à deux atteintes : les
atteintes à la sante de l'homme, qui résultent des atteintes
à l'environnement , et le dommage écologique, qui est
défini comme tout dommage causé directement au milieu pris en
tant que tel , indépendamment de ses répercussions sur les
personnes et sur leurs biens24(*).
En fait, la notion recouvre deux acceptions principales
très différentes. D'une part, le dommage causé aux
personnes ou aux choses par le milieu dans lequel elles vivent et, d'autre part
le dommage subi par le milieu naturel, indépendamment des
intérêts corporels ou matériels lésés. C'est
le dommage écologique pur25(*).
Cette position permet de distinguer les préjudices
environnementaux et les préjudices classiques (corporels et
matériels). Le droit congolais considère dans ce sens
l'environnement (les différents éléments qui le
constituent) comme bien-environnement (patrimoine collectif) juridiquement
protégé au même titre que l'homme26(*).
En matière de responsabilité environnementale,
le dommage est à mesurer sur une gravite établie, qui intervient
comme un critère déterminant de qualification, (.........), c'est
donc au regard de ce qui se situe au niveau des risques élevés ou
des atteintes les plus prononcées que peut jouer la
responsabilité dite « environnementale ». Il
faut noter que la loi congolaise prend aussi en compte les menaces ou les
risques de dommages imminents, C'est-à-dire le danger éventuel,
le droit de la responsabilité civile devient plus large. Il passe
au-delà du caractère certain et présent du
dommage27(*).
Eu égard à ce qui précède, la
responsabilité environnementale fait apparaitre des nouvelles
théories qui en constituent le fondement, dont la théorie
objective fondée sur les risques, la théorie du pollueur payeur
et la théorie de garantie, qui s'adaptent plus à la
réparation des dommages issus de l'exploitation
pétrolière. Cela étant donné que ces notions
dispensent la victime de la preuve de la faute, difficile à trouver en
matière industrielle.
A. La responsabilité environnementale basée
sur la théorie des risques (responsabilité sans
faute).
L'exigence de la preuve de la commission d'une faute dans le
chef de celui qui a causé le dommage est problématique pour les
risques issus de l'activité industrielle comme les risques
environnementaux. Il en va de même pour l'établissement de la
causalité. 28(*)
La notion de la faute a été fortement
critiquée par différents doctrinaires suites à ses limites
pour engager la responsabilité civile de son auteur. Vers la fin du
XIXème siècle, Salleilles et Josserand vont, ainsi, proposer la
théorie de la responsabilité civile objective qui repose sur la
notion du risque créé et du risque profit29(*). La théorie du risque
viserait seulement qu'aucune victime ne reste sans être
indemnisée30(*).
Cette théorie de la responsabilité objective
convient de fonder la responsabilité environnementale en matière
de l'exploitation pétrolière en considérant les risques
qui en découlent. En effet, Le contentieux de la responsabilité
environnementale se concentre souvent sur des questions de preuve. D'une
manière générale, la preuve d'un dommage environnemental
est plus complexe en raison de l'écoulement du temps, parfois
très long, et de l'incertitude scientifique qui domine. La preuve est
une question à mi-chemin entre le droit processuel et le droit
substantiel. Il s'agit d'une démarche intellectuelle qui consiste
à convaincre le juge d'une vérité et d'une démarche
matérielle puisqu'il convient de produire matériellement certains
éléments de preuve.31(*)
Cette question probatoire qui se rapporte en droit de la
responsabilité civile à la preuve d'un fait
générateur, d'un préjudice ou d'un lien de
causalité pose des difficultés majeures en droit de
l'environnement. Outre le fait que les questions environnementales
amènent souvent à manier des concepts scientifiques et des
concepts juridiques difficiles à définir, elles interviennent
surtout dans des domaines où l'incertitude règne en maître.
L'utilisation parfois faite du principe de précaution en est une
illustration topique. Cette incertitude scientifique et juridique rejaillit
directement sur le droit de la preuve tant sur la charge de la preuve que sur
les modes de preuve32(*).
De ce qui précède, des responsabilités
objectives existent donc en ce qui concerne la pollution par hydrocarbures ou
les accidents nucléaires.33(*)
Cette responsabilité objective qui dispense la victime
d'apporter la preuve de la faute, difficile à déterminer dans les
activités industrielles extractives du pétrole, parait comme
palliatif nécessaire à la réparation des dommages dans le
domaine de l'environnement pour autant qu'elle soit organisée de
manière claire et précise en droit congolais comme le veulent les
théories de base de cette responsabilité.
En effet, face à l'incertitude du risque en
matière environnementale, défini dans la langue courante comme un
danger éventuel plus ou moins prévisible34(*), et dans la langue juridique,
comme « un événement dommageable dont la survenance est
incertaine, quant à sa réalisation ou à la date de cette
réalisation 35(*)», la responsabilité objective constitue
un fondement efficace de la responsabilité environnementale surtout pour
ce qui est de l'exploitation du pétrole, contrairement à la
responsabilité civile.
Le risque environnemental que l'on souhaite gérer est
donc un événement futur dommageable pour l'environnement et
prévisible jusqu'à un certain degré. La
prévisibilité se réalise notamment par le biais du calcul
de probabilité. C'est la raison pour laquelle le risque environnemental
est, encore aujourd'hui, défini en premier lieu par les experts
scientifiques. Mais le risque environnemental concerne des équilibres
complexes entre des collectivités et leur environnement36(*).
Ainsi, la science elle-même éprouve des
difficultés croissantes à effectuer ce calcul de
probabilité pour les nouveaux risques auxquels nous sommes
confrontés.
On sait donc que telle substance peut générer
tel type de dommage à l'environnement, mais on ne connaît pas la
probabilité d'occurrence de ce dommage37(*).
Le droit a progressivement généré
plusieurs techniques de gestion du risque notamment dans les cas où les
institutions classiques de la responsabilité civile ne suffisaient pas
à assurer la réparation du dommage subi. La responsabilité
objective s'est développée notamment pour faire face aux
accidents du travail qui étaient causés par le
développement des industries. Dans ces cas la démonstration de
l'existence d'une faute était particulièrement difficile pour le
travailleur. La faute a donc été remplacée par
l'activité à risque38(*). Il est ainsi des activités à risque
pour l'environnement comme l'exploitation pétrolière.
La responsabilité objective est fondée sur
l'activité de l'agent et non sur son comportement. L'agent
générateur de risque est responsable des nuisances qu'il
occasionne, quel que soit le degré de précaution adopté
dans l'exercice de son activité. L'application de la
responsabilité objective demande simplement une preuve du dommage et de
sa cause.39(*)
Les techniques de responsabilités objectives reposent
sur les théories du risque créé et du risque profit et du
risque maitrise.
- Selon la théorie du risque-créé, celui
qui créé une activité génératrice de risque
est objectivement responsable des dommages qui en résultent, la personne
qui introduit une activité à risque dans la
société, le fait à ses risques et périls et non
à ceux d'autrui40(*).
- Une variante est la théorie du « risque-maitrise
» selon laquelle, celui qui a la direction d'une activité doit en
assumer les risques pour lui-même et pour autrui41(*).
- Selon la théorie du risque-profit, celui qui tire
profit d'une activité génératrice de risque est
objectivement responsable des dommages qui en résultent, il doit
corrélativement en supporter les charges. On fait peser la charge du
dommage sur celui qui a agi et cherché un bénéfice
plutôt que sur celui qui n'a rien fait.42(*)
En droit de l'environnement, une telle théorie
pourrait se combiner avec l'approche « deep pockets » qui consiste
à tenter de faire payer la personne dont les moyens financiers sont les
plus importants plutôt que la personne qui a introduit la pollution dans
l'environnement.43(*)
Ceci fut l'approche des communes françaises dans
l'affaire du naufrage du pétrolier l'Erika au large de la Bretagne, dans
lequel le procès s'est concentré sur l'imputabilité du
naufrage à Total en tant que producteur des hydrocarbures plutôt
qu'à l'armateur, à l'affréteur ou au capitaine. Or, le
« deep pockets » est en général également
l'entreprise qui tirera le plus de bénéfices de l'activité
à risque44(*).
Sur base du fait que, l'exploitant pétrolier par son
activité extractive, non pas seulement il crée un risque de
pollution, mais aussi il en profite financièrement et doit
nécessairement en avoir la maitrise, la responsabilité objective
est de ce fait adaptée à son activité pour le risque
créé, risque profit et pour maitrise de risque. Ce qui est
contraire à la responsabilité objective prévue par la loi
sur les hydrocarbures de manière sournoise.
Si la responsabilité subjective suppose une faute au
chef de l'auteur du dommage, la responsabilité objective ne la suppose
pas et, par conséquent, l'auteur du dommage peut être
condamné aux dommages et intérêts par le seul fait qu'il a
causé un dommage45(*)
L'un des éléments de la qualité
d'exploitant au titre de la réglementation des installations
classées est de disposer de la maîtrise opérationnelle des
installations dont il a la charge, lesquelles sont couvertes par un permis
d'exploiter. Cette maîtrise a plusieurs conséquences
vis-à-vis de la mise en cause de la responsabilité civile de
l'exploitant. Elle peut ainsi fonder une action en responsabilité du
fait des choses que l'on a sous sa garde et une action en responsabilité
du fait des troubles anormaux du voisinage.
Ces fondements sont d'ailleurs plus facilement usités
par les victimes, puisqu'ils ne nécessitent pas la preuve d'une faute et
que la responsabilité s'exerce de plein droit.46(*)
En effet, si on veut veiller à ce que des
précautions plus grandes soient prises pour éviter que
l'environnement ne subisse des dommages, l'une des solutions consiste à
déclarer formellement responsable la partie dont l'activité
risque d'occasionner ces dommages. Cela signifie que, lorsque des dommages
surviennent effectivement, c'est à la partie qui exerce le
contrôle de l'activité (c'est-à-dire l'exploitant), et qui
est donc le véritable pollueur, d'assumer le coût de leur
réparation47(*).
Telle a été la solution prise par l'union
européenne dans le livre blanc sur la responsabilité
environnementale, il s'agit d'une responsabilité objective due au risque
créé48(*).
Elle prévoit alors une responsabilité de plein
droit du gardien de la chose, sous réserve que le lien de
causalité et l'existence d'un préjudice soient seulement
prouvés par la victime. A la suite d'une jurisprudence désormais
établie, la qualité de gardien est déterminée par
l'usage, la surveillance et le contrôle de la chose en question49(*).
En matière environnementale, la jurisprudence a
toutefois précisé qu'il est nécessaire que le gardien de
la chose dispose en plus des connaissances théoriques et techniques lui
permettant de la surveiller et de la contrôler. Or ces critères
sont en réalité très proches de ceux de la qualité
d'exploitant pétrolier.50(*)
C'est pourquoi, en cas de dommages créés par
les installations (pétrolières) relevant d'un exploitant, la
responsabilité de ce dernier pourra être facilement mise en oeuvre
sur ce fondement51(*).
De ce qui précède, par le fait que les
exploitants pétroliers doivent disposer de la maitrise technique de
leurs activités, en droit environnemental congolais, leur
responsabilité peut être engagée sur base de ce fondement,
c'est-à-dire, une responsabilité de plein droit du gardien de la
chose comme nous venons de le voir ci haut.
Un autre fondement qui permet de mettre en cause la
responsabilité de l'exploitant, en raison de la maîtrise dont il
dispose sur les installations, est celui pour troubles anormaux de voisinage.
Il résulte que si le propriétaire peut jouir de sa chose, par
exemple de son exploitation industrielle, de la manière la plus absolue,
sous réserve que son usage ne soit pas prohibé. Ce droit est
limité par l'obligation que le propriétaire a de ne causer
à la propriété d'autrui aucun dommage dépassant les
inconvénients normaux de voisinage. Il s'agit aujourd'hui du principal
fondement invoqué par les victimes dans leurs actions en
responsabilité intentées pour des dommages de pollution. Cette
responsabilité est en effet particulièrement simple à
engager puisque la victime n'a pas à prouver l'existence d'une faute,
mais seulement à démontrer le caractère anormal du
trouble52(*).
B. La responsabilité
environnementale fondée sur principe pollueur-payeur
(responsabilité objective du pollueur)
À l'origine, le principe du pollueur-payeur est un
principe économique né à la suite d'une
interprétation de la théorie des externalités telle que
développée par Arthur Cecil Pigou. Une externalité est
l'impact des actions d'un agent sur le bien-être des personnes non
concernées a priori par ces actions.
Ces externalités doivent être «
internalisées », c'est-à-dire que le coût social de la
production ou de la consommation d'un bien ou d'un service doit être
intégré dans le prix de celui-ci. De principe économique,
il est devenu un principe juridique applicable à la politique
européenne de l'environnement et qui concerne tant les coûts de la
prévention que les coûts de la restauration de
l'environnement.53(*)
Le principe pollueur-payeur ne requiert pas la
démonstration d'une faute ou d'une négligence dans le chef de
celui qui pollue pour que le pouvoir public puisse lui imputer le coût de
la pollution, la responsabilité objective est donc permise par le
principe54(*).
Il s'agit ici d'identifier ceux qui disposent du «
pouvoir causal » et dont l'activité est par conséquent
à risque55(*)
Le mécanisme de responsabilité environnementale
objective permet d'éviter la démonstration de l'existence d'une
faute dans le chef du pollueur, sur qui pèse une obligation de
résultat. Le règlement des litiges est plus rapide.56(*) Il s'agit-là d'une
objectivité dans la responsabilisation du pollueur.
La responsabilité environnementale peut être
définie comme l'instrument par lequel celui qui occasionne une atteinte
à l'environnement (le pollueur) est amené à payer pour
remédier aux dommages qu'il a causés. La responsabilité
n'est efficace que lorsqu'il est possible d'identifier le pollueur, de
quantifier les dommages et d'établir un lien de
causalité.57(*)
Pour ce principe pollueur payeur il n'existe donc pas l'obligation de prouver
une faute mais seulement le lien de causalité entre l'activité de
l'exploitant et le dommage.
La responsabilité environnementale ne permet pas de
remédier à toutes les formes d'atteintes à
l'environnement. Pour que le principe de responsabilité s'applique :
- il faut un (ou plusieurs) auteur(s) identifiable(s)
[pollueur(s)] ;
- les dommages doivent être concrets et quantifiables
;
- un lien de causalité doit être établi
entre les dommages et le(s) pollueur(s) identifié(s).
Ainsi, la responsabilité environnementale peut
s'appliquer par exemple dans les cas où les dommages résultent
d'accidents industriels ou d'une pollution progressive provoquée par des
substances ou des déchets dangereux introduits dans l'environnement
à partir de sources identifiables58(*) , on établit ainsi une responsabilité
environnementale basée sur la théorie objective, sans faute
On a souvent constaté que la responsabilité
civile pour atteinte à l'environnement résulte du principe
pollueur payeur59(*).
Celui-ci prévoit que celui qui est auteur d'une pollution doit en
supporter les conséquences traduites en termes des couts de production.
Cette internationalisation des effets externes devrait refléter la
rareté des ressources et, par conséquent, représenter un
prix juste.60(*) Ce
principe du pollueur payeur est susceptible de revêtir différentes
fonctions et plus particulièrement, une fonction réparatrice et
une fonction incitative.61(*)
D'après Michel PRIEUR, le principe du pollueur payeur
vise l'imputation aux pollueurs des coûts liés à la
protection de l'environnement à tel point que ce principe, incite
ceux-ci à réduire la pollution dont leurs activités sont
la cause et à la recherche des produits ou technologies moins
polluantes62(*).
Il s'agit donc à cet effet, d'un fondement de la
responsabilité environnementale objective par le fait que l'exploitant
(ici pollueur) se voit imputé de la responsabilité de
réparation pour le simple fait d'exercer une activité polluante.
Ce principe, dans sa conception réparatrice, est un mécanisme
permettant de mettre en oeuvre la responsabilité environnementale des
exploitants pétroliers en RDC qui exercent des activités
Polluantes.
C. La responsabilité environnementale
fondée sur la théorie de la garantie (responsabilité
objective de garantie)
Boris Stack s'est appesanti sur la théorie de la
garantie comme une solution idoine à l'antagonisme des théories
de la faute et du risque. La victime retrouve ici sa place car désormais
l'intention n'est plus portée uniquement du côté de
l'auteur du dommage. La victime a des droits qui doivent être garantis
notamment le droit de réparation de toute atteinte à sa personne
ou à son patrimoine.
Dans le cas d'espèce, il n'y a pas de faute à
exiger du responsable, la faute qui, jusque-là permettait
l'identification du responsable était devenue un obstacle à
l'indemnisation de la victime. Car si la victime n'arrivait pas à
prouver la faute, elle se retrouvait sans réparation63(*). Au final le domaine de la
responsabilité subjective s'est considérablement restreint au
profit des cas de responsabilité objective qui continuent à se
multiplier64(*).
Aujourd'hui, c'est le dommage qui engendre la
responsabilité civile que le comportement du responsable. Il va alors
apparaitre le souci corollaire de ne plus faire peser le poids de la
réparation sur les seuls responsables. On va se mettre à assister
au déclin de la responsabilité individuelle parallèlement
à la socialisation des risques. Qui est la thèse défendue
par Geneviève65(*).
Cette socialisation des risques a contribué à
repartir le poids de l'indemnisation des dommages sur la collectivité
toute entière, elle s'est mise en place par les mécanismes de
l'assurance et de la socialisation des risques. Ainsi, parmi les
mécanismes de socialisation des risques on épingle le fonds de
garantie (ou indemnisation qui en vue d'éviter que les victimes
supportent le poids le poids de l'insolvabilité du responsable (lorsque
le responsable n'est pas assuré ou lorsqu' il n'est pas
identifié, ou lorsque quoique identifié, le responsable n'est pas
en mesure de supporter le poids de la réparation) ; la
sécurité sociale qui est une expression et un symbole de la
sécurité sociale. Il est envisagé ici, les
mécanismes de paiement par les tiers (assureur, un fonds d'intervention
pour l'environnement ou garantie financière), le cout
n'étant pas supporté directement par le pollueur par
exemple66(*).
Cette idée de garantie vient renforcer la
responsabilité environnementale en matière d'exploitation de
pétrole. Sur base de cette théorie de garantie, l'exploitant
pétrolier peut souscrire à une police d'assurance ou mettre en
place une garantie financière, pour qu'en cas de tout risque la victime
ait réparation.
L'incapacité du droit commun d'indemniser de
façon appropriée les victimes de dommages environnementaux
découle de plusieurs éléments dans lesquels se trouvent
les fondements de la responsabilité civile avec faute. Le fardeau de
prouver la faute du pollueur peut être exigeant ; dans le cas
où ce dernier respecte les normes auxquelles il est soumis. De plus
l'existence d'un moyen d'exonération pourra anéantir les chances
de la victime de recevoir indemnisation. Ainsi, pour tous les cas où
les règles de responsabilité laisseraient les victimes d'un
dommage environnemental sans indemnisation, un fons à cet égard
pourrait leur assurer la réparation.67(*)
D. Regard en droit comparé
Par rapport au fondement de la
responsabilité environnementale, le régime juridique du droit
français combine la responsabilité aussi bien objective sans
faute que subjective délictuelle, selon qu'il s'agit des
activités dangereuses ou pas, il s'agit d'un régime mixte de
responsabilité de droit Français, tout d'abord, une
responsabilité sans faute pour les activités professionnelles
dangereuses. L'exploitant est alors tenu financièrement responsable des
dommages environnementaux qu'il cause, qu'il ait ou non commis une faute ou
négligence, d'autre part, une responsabilité pour faute pour les
activités professionnelles (non dangereuse), les dégâts
occasionnés sont alors prévenus ou réparés
uniquement en cas de faute ou de négligence de l'exploitant68(*) .
De ce qui précède, il est à souligner que
le contexte du pétrole est une activité dangereuse et
nécessite à cet effet, qu'il soit régi par une
responsabilité environnementale objective. En effet, les hydrocarbures
et les autres substances organiques trouvées dans le pétrole
peuvent parvenir à contaminer les sols de surface, cette contamination
peut se produire lors de conditions normales de fonctionnement suivant la
disposition inadéquate des déchets de forage tels que les boues,
les sédiments et les eaux usées, ainsi qu'à la suite de
l'activité de torchage entrainant un dépôt des
contaminants.
Toutefois, la contamination des sols est principalement
causée par des déversements accidentels ou encore par des
activités industrielles à la suite desquelles les installations
sont abandonnées.69(*) Il s'agit bel et bien d'une activité
dangereuse.
Paragraphe 2 : la
responsabilité civile, pénale et administrative en matière
environnementale
A. La responsabilité environnementale
civile
Le droit à l'environnement peut ainsi être un
nouvel outil pour répondre aux dommages environnementaux, ne laissant
plus la seule responsabilité civile occuper tout le terrain.
Désormais ; en présence d'un dommage
environnemental, la victime sera capable d'opposer à l'auteur du dommage
non seulement les règles de responsabilité civile, mais
également son droit à un environnement sain. Les deux
mécanismes se rencontrent. Ils sont susceptibles d'être
invoqués concurremment dans le cadre d'un litige
environnemental70(*).
Sur le plan civil, individuellement ou collectivement, le
droit à l'environnement est à la fois un droit subjectif et
un droit objectif. Le requérant a un droit personnel à un
environnement de qualité. Ce droit subjectif, lui confère un
intérêt personnel à agir71(*). La responsabilité environnementale rentre ici
dans les éléments traditionnels d'engagement de la
responsabilité civile : les faits générateurs, le
dommage et le lien de causalité72(*).
Le droit subjectif peut être invoqué par son
titulaire sans que celui-ci ait besoin de justifier d'un dommage personnel
touchant sa personne ou ses biens. En cas d'atteinte à l'un de ses
droits subjectifs, toute action d'un sujet de droit est à priori
recevable en justice pour faire cesser cette atteinte. La seule atteinte
dénoncée par le sujet justifie la mise en oeuvre du
mécanisme protecteur offert par le droit subjectif : aucune
condition supplémentaire, ni aucune preuve de dommage personnel, n'est
exigée. On comprend dès lors l'importance de la
consécration du droit subjectif de l'environnement73(*).
La responsabilité environnementale a permis d'ouvrir
des horizons pour un mécanisme spécifique de prévention et
de réparation de certains dommages causés à certains
éléments de l'environnement. Il a été dit que le
dommage peut être personnel mais aussi collectif ; il peut toucher
le physique ou des biens, il peut être aussi écologique, touchant
à la nature.
Mais la première des choses à faire, c'est
d'appliquer à la source les mesures de cessation des troubles. Ce qui
est important pour la victime du dommage, c'est de faire cesser le trouble
à l'origine du dommage74(*).
B. La responsabilité environnementale
pénale.
Ne faisant objet d'analyse profonde de notre réflexion,
une brève compréhension du droit pénal de l'environnement
est nécessaire dans l'analyse de la responsabilité.
Le droit pénal de l'environnement contribue
effectivement à la protection de la santé et de la nature. Bon
nombre de conventions internationales recommandent aux parties prenantes
d'adopter dans leur législation interne des dispositions relatives
à la protection pénale de l'environnement75(*).
La loi portant principes fondamentaux relatifs à la
protection de l'environnement mais aussi des lois sectorielles,
protègent pénalement le cadre de vie et les
espèces.76(*)
Le droit pénal de l'environnement répond aux
principes du droit pénal général, notamment le principe de
la légalité des délits et des peines. En revanche, il faut
noter que les incriminations relèvent d'actes législatifs,
d'actes réglementaires et aussi d'actes administratifs. En droit
pénal de l'environnement, les peines concernent les sanctions
pécuniaires, la servitude pénale et des mesures spéciales
telles que, la remise en état du site.
Comme en droit pénal général ; les
incriminations en droit pénal de l'environnement sont les actes
d'omission ou les actes commis caractérisés par l'intention ou la
négligence du délinquant77(*).
La responsabilité pénale est une
responsabilité individuelle. La sanction pénale ne peut pas
être la conséquence d'une faute commise par un tiers. Le
manquement qui engage la responsabilité d'un tiers pénalement
responsable en droit pénal de l'environnement n'existe pas78(*).
De ce qui précède, au-delà du fait que
l'exploitant pétrolier peut se voir exigé la réparation
des préjudices causés dans l'exercice de ses activités
extractives du pétrole, il peut aussi engager une responsabilité
pénale au regard de la loi.
C. La responsabilité environnementale
administrative.
D'entrée de jeu, il faut noter la responsabilité
administrative relève d'un régime propre. La
responsabilité administrative est un principe général, qui
oblige l'administration à réparer les dommages qu'elle cause
à autrui. La responsabilité de la puissance publique est toujours
une responsabilité pour actes d'autrui, car en toute hypothèse,
la faute de l'administration suppose, à tout le moins, la
négligence d'un agent et elle apparait comme une responsabilité
du fait d'autrui, analogue à la responsabilité des commettants du
fait de leurs préposés79(*).
La prévention d'un risque comme la gestion des
conséquences d'un accident industriel ou technologique, suppose
nécessairement l'intervention des autorités publiques,
autorités chargées de tracer le cadre juridique de certaines
activités ou de certains établissements, et de mettre en oeuvre
les règles ainsi fixées ou d'organiser concrètement les
opérations prévues.
Au nom du régime général de la
responsabilité environnementale, tout fait quelconque de l'agent public
qui cause à autrui un dommage oblige l'administration à le
réparer. La faute de l'administration peut être un manquement
à une obligation préexistante, et peut être sous l'angle de
l'action, une faute par commission, ou par omission, sous l'angle de
l'intention, une faute intentionnelle ou non intentionnelle dans le chef de
l'administration80(*).
Ainsi, l'autorité ou qui a failli à ses
obligations , parce qu'elle n'a pas agi et/ou réagi en mesure de ce
qu'exigeaient les circonstances ou qui n'a pas respecté les textes et
les prescriptions qu'ils imposent, ou bien celle dont l'action sans
être fautive, est le selon le cas, relève de
l'illégalité de ses actes , de sa négligence, dans
l'application des réglementations applicables ou dans le contrôle
des activités des établissements sous son pouvoir et, dans
certaines conditions, des conséquences dommageables de ces actes ou
décisions irrégulières81(*).
Il faut comprendre qu'il y a lieu en matière
d'exploitation pétrolière que l'administration engage sa
responsabilité pour ses actes de négligence, ou par faute non
intentionnelle. Les activités extractives du pétrole qui
s'exercent sous le contrôle de l'Etat, en cas de défaillance de
son obligation de contrôle, on peut engager la responsabilité
administrative de l'Etat.
Section 2 : Cadre
juridique congolais de la responsabilité environnementale
L'état dans lequel se trouve
l'environnement est différent selon les pays. Les droits applicables et
les niveaux de protection effectifs ne sont pas les mêmes.
En fonction des réalités de chaque pays,
au-delà du droit positif, d'autres paramètres qui relèvent
du culturel ou parfois du religieux, peuvent avoir une incidence importante sur
le comportement des citoyens et donc sur l'état de
l'environnement82(*).
Pour cette raison, il est important d'examiner dans un
contexte analytique la responsabilité environnementale telle que
prévue en Droit congolais de l'environnement.
Pour sa part, la RDC dispose d'un cadre constitutionnel et
législatif se rapportant à la gestion des ressources naturelles
en général et les hydrocarbures en particulier.83(*)
En effet, toute volonté de protection dans le domaine
de l'environnement, comme dans tout autre domaine, doit en principe s'appuyer
sur des normes juridiques, obligatoires et donc contraignantes. Ces normes
peuvent prendre la forme de conventions internationales ou de textes juridiques
nationaux84(*).
De ce qui précède, il est impérieux de
faire un aperçu du Droit congolais aussi bien dans l'ordre juridique
national qu'international.
Paragraphe 1 : La
responsabilité environnementale dans l'ordre juridique international
Depuis plusieurs années, les
différents traités et accords signés dans le domaine de
protection de l'environnementale interpellent les gouvernements à
prendre toutes les précautions en vue de la protection
environnementale.85(*) La
mise en place de la responsabilité en cas de dommage est une de ces
précautions. Certains textes internationaux obligent aux Etats de
prévenir des dommages causés à l'environnement et d'en
organiser la responsabilité. Il en est ainsi de la :
- La convention cadre des nations unies sur le
changement climatique (CCCC)
La RDC a signé la convention des nations unies sur le
changement climatique lors du sommet de la Terre sur l'environnement et le
développement tenu à RIO de Janeiro en juin 1992 et l'a
ratifiée le 8 décembre 1994. Cette convention oblige les
gouvernements de pays membres à prendre des mesures nécessaires
à la protection environnementale.86(*) A son article 3.3, elle prévoit une mesure qui
conduit à la responsabilité environnementale en disposant
que :
Il incombe aux parties de prendre des mesures de
précaution pour prévoir, prévenir ou atténuer les
causes des changements climatiques et en limiter les effets néfastes.
Quand il y a risque de perturbations graves ou irréversibles, l'absence
de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour
différer l'adoption de telles mesures, étant entendu que les
politiques et mesures qu'appellent les changements climatiques
requièrent un bon rapport coût-efficacité, de
manière à garantir des avantages globaux au cout le plus bas
possible. Pour atteindre ce but, il convient que ces politiques et mesures
tiennent compte de la diversité des contextes socio-économiques,
soient globales, s'étendent à toutes les sources et à tous
les puits et réservoirs de gaz à effet de serre qu'il conviendra,
comprennent des mesures d'adaptation et s'appliquent à tous les secteurs
économiques. Les initiatives visant à faire face aux changements
climatiques pourront faire l'objet d'une action concertée des parties
intéressées87(*).
Cet article contraint donc les Etats parties à la
convention, dont la RDC, à prendre des mesures efficaces pour encadrer
les causes des changements climatiques.
- La déclaration de Stockholm du 16
juin 1972.
Ce texte oblige les Etats sur le plan international à
coopérer pour développer le droit international en ce qui
concerne la responsabilité et indemnisation des victimes de la
pollution. En effet, le principe 22 de la déclaration de Stockholm
prévoit que : les Etats doivent coopérer pour
développer encore le droit international en ce qui concerne la
responsabilité et l'indemnisation des victimes de la pollution et
d'autres dommages écologiques que les activités menées
dans les limites de la juridiction de ces Etats ou sous leur contrôle
causent à des régions situées au-delà des limites
de leur juridiction88(*).
Ces textes de portée internationale sont venus inspirer
le législateur congolais en matière de protection de
l'environnement. Il s'agit d'un arsenal juridique important qui constitue en
droit congolais, une base juridique de la responsabilité
environnementale, ils sont de nature à faciliter l'interprétation
des textes contraignant sur la responsabilité civile.
Paragraphe 2 : La
responsabilité environnementale dans l'ordre juridique Congolais
Sans pour autant se focaliser plus sur les
sources internationales c'est-à-dire les traités et accords
internationaux, tel que présentés ci-haut, notre analyse se
concentre plus sur les textes juridiques internes de la RDC sur
l'environnement. Il s'agit de faire un aperçu sur les notions de
responsabilité prévues par le Droit congolais en matière
environnementale.
1. Constitution de la RDC
En vertu de l'article 53 de la constitution,
« toute personne a droit à un environnement sain et
propice à son épanouissement intégral. Elle a le devoir de
le défendre. L'Etat veille à la protection de l'environnement et
à la santé des populations »89(*).
Cet article constitue une brèche pour les personnes
victimes des dommages environnementaux de défendre en justice la
protection de l'environnement et de demander réparation en cas de sa
dégradation, il s'agit d'un droit constitutionnel. Le droit de
l'environnement est un droit fondamental de l'homme qui est ainsi
constitutionnel garanti, protégé et justiciable. Son
caractère procédural sous-entend le droit d'avoir accès
à l'information environnementale, le droit de participer au processus de
prise de décision en matière d'environnement, le droit de recours
en cas de cette violation et le droit de réparation90(*).
Dans son devoir constitutionnel de veiller à la
protection de l'environnement, il a été adopté par le
législateur congolais une loi spéciale portant principes
fondamentaux relatifs à l'environnement.
2. La loi No 11/009 du 9 juillet 2011 portant
principes fondamentaux relatifs à la protection de
l'environnement
La protection de l'environnement en RDC est basée sur
la loi du 20 juillet de 2011, portant principes fondamentaux relatifs à
l'environnement. Il s'avère nécessaire pour une bonne application
de la responsabilité environnementale de parcourir cette loi en vue de
dégager le fondement de ladite responsabilité.
En effet, la loi de 2011 consacre son chapitre 7 à la
responsabilité civile, c'est-à-dire une responsabilité
pour faute. A son article 68, elle prévoit : Sans préjudice
des peines applicables pour infractions à la présente loi et ses
mesures d'exécution, est responsable toute personne qui par l'exercice
de ses activités, a causé un dommage à l'environnement et
à la santé en violation de la présente loi.
Ce chapitre 7 de par son article 68 instaure comme fondement
de la responsabilité en matière environnementale une
responsabilité civile, c'est-à-dire une responsabilité
dite subjective.
Au-delà de la loi de 2011 sur les principes
fondamentaux relatifs à l'environnement, d'autres textes juridiques
internes de droit congolais mettent en place une responsabilité pour
faute en matière environnementale pour non-respect de la loi.
3. La loi No 15/012 du 1er août 2015
portant régime général des hydrocarbures
Le secteur des hydrocarbures en RDC a d'abord
été successivement organisé par l'ordonnance-loi no 67/231
du 11 mai 1967 portant législation générale sur les mines
et les hydrocarbures et par l'ordonnance-loi no 81-013 du 2 avril 1981 ayant
même objet dont la mise en application a été assurée
par l'ordonnance no 67-416 du 23 septembre 1967 portant règlement
minier.
Ces deux textes régissaient en même temps aussi
bien le secteur de mine que celui des hydrocarbures. Mais la promulgation de la
loi No 007/2002 du 1 juillet 2002 portant code minier a abrogé, en ce
qui concerne le secteur minier, l'ordonnance-loi no 81-013 du 2 avril 1981, la
vétusté de cette ordonnance-loi et les pratiques contractuelles
dans le secteur des hydrocarbures, ont motivé la nécessité
d'adoption d'une nouvelle loi devant servir de cadre légal à ce
secteur91(*).
Ce texte juridique n'organise pas une responsabilité
environnementale de manière claire, elle précise, le contractant
ou son sous-traitant est tenu de respecter les dispositions légales et
réglementaires relatives à la protection de l'environnement et du
patrimoine culturel. Il est responsable objectivement de tout dommage
causé dans le cadre des activités d'hydrocarbures92(*).
Cependant, pour non-respect de réglementation et
prescription légale, il s'agit d'une responsabilité pour faute du
contractant. D'où la mise en place par cette loi de
responsabilité objective en contradiction avec la loi sur
l'environnement de 2011, cela de manière imprécise dans la
logique du fondement de la responsabilité environnementale.
De ce qui précède, ces deux textes juridiques de
par ces articles, mettent en place aussi bien une responsabilité civile
qu'une responsabilité objective ramassée et sournoise de
l'exploitant (pétrolier pour ce qui est du contexte de la
réflexion) en matière environnementale. Il s'agit là d'un
recul du législateur congolais en matière de
responsabilité environnementale.
Cependant, telle que nous l'avons vu ci-haut, les notions de
responsabilité pour faute ne s'adaptent pas aujourd'hui aux risques qui
connaissent de plus en plus de progrès suite à
l'industrialisation (machinisme). Il en est ainsi de l'exploitation
pétrolière. Mais aussi il est d'une nécessité
d'éclairer suffisamment cette objectivité prévue par la
loi des hydrocarbures non pas pour non-respect des mesures légales mais
pour le risque pétrolier.
En effet, il est d'avis commun que le premier fondement sur
lequel l'exploitant peut voir sa responsabilité engagée sur le
plan civil se situe sur le terrain de la responsabilité pour faute, en
vertu du principe « tout fait quelconque de l'homme qui cause
à autrui un dommage oblige à celui par la faute duquel il est
arrivé à le réparer », et « chacun est
responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais
encore par sa négligence ou par son imprudence ». Il s'agit de la
responsabilité pour faute93(*) qui est la logique du législateur congolais,
qui reste de ce fait archaïque en matière de l'environnement
surtout que les risques liés à l'exploitation
pétrolière impliquent des progrès liés à
l'évolution technique.
C'est le cas aussi de non-respect des prescriptions
légales environnementales qui constitue une responsabilité pour
faute, l'exploitant peut alors voir sa responsabilité engagée
pour faute dès lors qu'il ne respecte pas les prescriptions
environnementales imposées pour l'exploitation de son installation, qui
lui incombe en tant que titulaire du permis d'exploitation94(*). Tel que le veut la loi
congolaise sur les hydrocarbures à son article 156.
Il s'en suit qu'un titulaire du permis de l'exploitation des
hydrocarbures précisément du pétrole, engagera sa
responsabilité pour faute du fait qu'il ne respecte pas les
prescriptions légales qui lui incombent en vertu de la loi sur les
hydrocarbures.
Dans ce contexte, on note la mise en place par le
législateur congolais d'une responsabilité subjective pour faute
pour la réparation des dommages environnementaux.
Cependant, cette responsabilité civile n'est pas
adaptée aux risques qui s'attachent à l'exploitation
pétrolière avec une difficulté de preuve. A vrai dire,
loin d'être pollué, le droit de la responsabilité civile
est sur certains aspects revérifié par les problématiques
environnementales, cela suite à l'incertitude scientifique qui domine
les problématiques environnementales.95(*)
Le progrès technique caractérisant le domaine
industriel appelle le législateur à repenser la
responsabilité en matière environnementale.
Dans le cadre de l'évolution des risques,
l'exploitation pétrolière s'inscrit dans la logique industrielle
qui pèse des risques nouveaux nécessitant l'adaptation de la
responsabilité civile au droit de l'environnement.
Selon STAN Antagera l'industrie extractive appelle lors de sa
mise en place, le déploiement d'une technologie lourde et à la
pointe. C'est ainsi que, l'exploitation du pétrole dans les forêts
exige le défrichage d'importantes zones96(*).
C'est ce qui a été observé au Cameroun et
au Tchad, lors de la mise en place d'un oléoduc d'une longueur de 1070
kilomètres destiné à transporter le pétrole
foré à Doba au Tchad jusqu'aux cotes camerounaises à
Kribi. Une grande variété des plantes a donc ainsi
été décimée sur une longueur de 1070
kilomètres97(*).
Dans l'activité pétrolière offshore, le risque industriel
et conséquences environnementales se conjuguent immanquablement98(*).
· Les risques industriels liés à
l'exploitation pétrolière sont grands nécessitant une
certaine mise en oeuvre de la responsabilité environnementale
précise et rigoureuse pour réparer les dommages environnementaux.
En effet on caractérise l'impact du pétrole de deux types des
pollutions à savoir: la pollution par exploitation et transfert du
pétrole, marée noire, boue polluante et pollution acoustique.
· La pollution liée aux dérivées du
pétrole, combustion du carburant qui entraine une pollution
atmosphérique, dégradation de la faune et de la flore par les
plastiques99(*).
Avec les risques industriels sur l'environnement, si la
prévention est la clef de voute du droit de l'environnement, les
règles relatives à la responsabilité ne doivent pas pour
autant être négligées même en cas d'un régime
préventif solide. La survenance d'un dommage environnemental n'est pas
impossible, mais également car la responsabilité peut être
envisagée comme un instrument de prévention si les règles
mises en place sont suffisamment dissuasives pour inviter les industriels
à la plus grande vigilance.100(*)
Evaluer les risques liés à l'exploitation
pétrolière semble difficile avec le progrès technique,
comme l'observe Eve Marengo et Clio Bouillard, dès lors, évaluer
avec précision et exhaustivité les risques que l'activité
d'exploitation d'hydrocarbures offshore par exemple, fait courir à la
biodiversité est chose impossible101(*).
Dans l'état des connaissances actuelles, les
scientifiques ne peuvent déterminer avec une certitude complète
la totalité des dommages susceptibles d'être causés
à la faune et à la flore par l'activité industrielle
étudiée (pétrolière), puisque l'on ne
possède pas une connaissance par faute de ces risques, la
réglementions des activités d'exploitation d'hydrocarbures n'est
pas nécessairement adaptée102(*). Ainsi, une responsabilité sans faute semble
s'adapter à la responsabilité environnementale.
Il est évident que le développement
scientifique et technologique provoque des mutations dans le Droit de la
responsabilité civile, et cela parce qu'une partie transcendale de la
nature du développement scientifique est composée du
caractère incertain des conséquences dommageables103(*).
Sur base de ce qui précède on peut alors noter
que l'activité d'exploitation pétrolière est sujette des
risques imminents sur l'environnement, nécessitant donc une
réorganisation de la responsabilité en matière
environnementale par le législateur congolais.
Il en est le cas du transport, comme du forage et raffinage
du pétrole, le transport du pétrole, que ça soit par
bateau ou oléoduc, présente d'importants risques d'accidents, les
déversements sont inévitables et leurs impacts sur les
communautés touchées et leur environnement sont
dévastateurs.104(*)
Le pétrole brut nécessite des opérations
de forage parfois en haute mer, parfois tout près de nappes
phréatiques qui nous alimentent en eau potable. Il y a toujours des
risques inhérents à l'extraction du pétrole, le raffinage
nécessaire du pétrole brut donne naissance à une industrie
pétrochimique qui produit une panoplie de dérivées. Cette
industrie pétrochimique est source de pollution atmosphérique,
sans compter les produits synthétiques comme les plastiques qui exigent
des milliers d'années avant de se dégrader dans
l'environnement105(*).
Il se dégage que l'exploitation du pétrole est
une activité dangereuse impliquant de nombreux risques sur
l'environnement, nécessitant une mise en place de la
responsabilité adaptée, c'est-à-dire, une
responsabilité environnementale objective basée sur la
théorie des risques crées, profit et sur la maitrise des
risques.
En effet, l'émergence de nouveaux risques et
l'accroissement du machinisme et l'avènement de la
société industrielle suggèrent que les individus doivent
être mieux protégés. L'idée de base étant la
suivante « toute activité faisant naitre un risque pour
autrui, rend son auteur responsable du préjudice qu'elle peut causer,
sans qu'il y ait à prouver une faute à son origine »
la responsabilité environnementale s'inspire de ce principe106(*).
L'efficacité de réparation des dommages
environnementaux causés par les exploitations pétrolières
est le résultat d'une responsabilité permettant à la
victime, sans qu'il y ait nécessité de prouver une faute de
l'auteur, de bien pouvoir obtenir réparation, il s'agit de la
responsabilité environnementale sans faute.
Il faut conclure cette partie en précisant que la
responsabilité civile subjective qui repose sur l'idée de la
faute, c'est-à-dire, avant qu'elle soit engagée la victime doit
prouver le lien de causalité entre la faute et le dommage, n'est pas
convenable à la réparation des dommages environnementaux issus
surtout des activités pétrolières.
En effet, tel que cela a été vu
précédemment, l'activité pétrolière met en
place des techniques nouvelles qui rendent difficile voire impossible la preuve
de la faute de l'exploitant pour des raisons d'incertitude caractérisant
ce domaine industriel. Face à cette réalité de fait, les
victimes restent sans réparation, d'où il est nécessaire
d'alléger l'action des justiciables en mettant en place un régime
de responsabilité qui leur épargne de prouver la faute de
l'exploitant pétrolier.
Au stade actuel de la législation congolaise, surtout
dans la loi sur les principes fondamentaux relatifs à la protection de
l'environnement, la logique est celle d'une responsabilité pour faute,
bien que la loi sur les hydrocarbures ait tenté d'instaurer une
responsabilité objective mais de manière imprécise avec
une insistance sur le respect des normes environnementale à la base
d'une responsabilité pour faute. Ainsi, le droit congolais devra fonder
la responsabilité environnementale dans le secteur pétrolier, sur
les théories nouvelles de responsabilités vues ci-chaut.
En effet, tel que nous venons de le voir, la
responsabilité civile classique ne répond pas à la
nécessité de réparer les dommages environnementaux suite
à la difficulté de preuve liée au machinisme ou
industrialisation.
Dans le souci d'une efficace réparation des dommages
environnementaux, le mieux est pour le législateur congolais d'instituer
une responsabilité environnementale dans son aspect objectif de
manière claire et précise et cela par un texte juridique
spécifique à l'instar de la loi sur la responsabilité
environnementale de la France non pas seulement pour faciliter les actions
civiles des victimes qui se heurtent aux difficultés de preuve mais
aussi pour une mise en place de la sécurité juridique en
matière environnementale .
Le régime de responsabilité mixte reste un
exemple pour le Droit Congolais, en considérant la dangerosité
des activités pétrolières qui appellent à cet
effet l'application de la responsabilité environnementale dans son
aspect objectif.
En somme de ce qui précède, la
responsabilité objective s'avère adaptée à
l'environnement, non pas seulement la loi de 2011 comme fondement du droit de
l'environnement devra adapter son chapitre 7 à cette
responsabilité mais aussi la loi des hydrocarbures est appelée
à préciser de manière claire et précise les
théories à la base de la responsabilité objective qu'elle
prévoit sans la fonder sur une responsabilité pour non-respect de
la loi( restant une responsabilité pour faute) mais en mettant en place
les théories de cette responsabilité entre autre , le risque
créé, le risque profit, la maitrise du risque mais aussi le
trouble de voisinage.
CHAPITRE II :
LES MECANISMES DE MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE
ENVIRONNEMENTALE EN DROIT CONGOLAIS
La responsabilité environnementale étant
analysée dans le cadre de son fondement, il s'avère important de
réfléchir sur les mécanismes de sa mise en mouvement en
vue d'une éventuelle réparation des dommages causés
à l'environnement. Pour ce faire, ce chapitre va consister d'un
coté à analyser les mécanismes de mise en oeuvre de la
responsabilité environnementale entre autre les mécanismes
judiciaires et ceux extra-judiciaires de réparation.
Section 1 : Les
mécanismes judiciaires de mise en oeuvre de la responsabilité
environnementale.
Sous cette section, pour ce qui est des
mécanismes judiciaires, notre attention sera focalisée sur
l'action en justice en matière environnementale (paragraphe 1)
ainsi que les modes de preuve en matière de responsabilité
environnementale (paragraphe 2).
Paragraphe I : Action
en justice en matière environnementale
VINCENT CUCHE considère l'action en
justice comme étant le pouvoir de mettre en mouvement la juridiction
afin d'obtenir le respect ou la restauration du droit, autrement dit, le
pouvoir légal permettant aux agents publics et aux particuliers de
s'adresser à la justice pour obtenir le respect de la loi.107(*)
Les conditions d'exercice
En droit congolais processuel, pour
exercer une action en justice il faut exciper d'un droit, avoir un
intérêt, avoir une qualité et avoir une capacité. En
d'autres termes clairs, il faut remplir 4 conditions : posséder un
droit, justifier un intérêt, avoir la qualité et être
capable d'ester en justice.108(*) Dans le cadre de notre réflexion, l'attention
sera plus focalisée sur la qualité et l'intérêt
à agir en matière environnementale. Car, la qualité et
intérêt à agir en matière environnementale
échappent aux théories classiques de droit civil et appellent
ainsi le législateur congolais à adapter son arsenal juridique
pour permettre aux victimes des exploitations pétrolières de bien
porter leur demande en réparation devant les cours et tribunaux
congolais en toute sécurité juridique.
a. L'intérêt d'agir en justice en cas de
dommages environnementaux
L'intérêt environnemental s'entend ici au sens de
ce qui participe à la protection de l'environnement, qui lui est
bénéfique. Partant, l'intérêt à agir pour la
protection de l'environnement correspond aux actions intentées à
cet effet.109(*). En
matière environnementale, cet intérêt est d'abord
individuel.110(*)
Les dommages environnementaux sont constitutifs d'un
préjudice particulier en raison des transmissions
intergénérationnelles. Il convient de comprendre par-là
que, selon le droit français l'intérêt environnemental est
un intérêt à long terme qui induit la responsabilité
intergénérationnelle de l'être humain, et non «
simplement » un intérêt à court terme, voire ponctuel.
Cette dimension s'ajoute aux facteurs et éléments qui
légitiment toute l'attention à accorder tant à cet
intérêt, qu'au patrimoine qui doit être
préservé en vertu de celui-ci.
Si le raisonnement du droit des biens est suivi ici, par
exemple quant à l'importance accordée au droit de
propriété, il ne fait aucun doute que chacun a
intérêt, à titre individuel, à la sauvegarde de son
patrimoine, et plus encore quand celui-ci lui est vital. Il est donc tout aussi
censé de qualifier l'intérêt à agir d'individuel et
de tirer les conséquences procédurales de ladite
qualification.111(*) Il
découle de ce qui précède, que l'action en droit
environnemental peut être fondée sur un intérêt
individuel ou personnel direct comme le veut le droit congolais de
procédure civile, étant donnéque pour agir en justice en
droit congolais, il faut avoir été directement et personnellement
lésé dans ses intérêts propres112(*).
En matière environnementale, l'intérêt
peut être collectif. L'intérêt à agir pour la
protection de l'environnement s'avère en réalité pluriel,
étant donné ses différentes dimensions, et
indépendamment des variations terminologiques retrouvées, la
doctrine, pour peu que les signifiés se rejoignent113(*)
L'intérêt à agir est plus complexe et
justifie l'intervention d'autres personnes autres que la victime directe. Cela
peut se remarquer en droit constitutionnel Costaricain, à ce sujet Edgar
Fernandez note la décision No 1700 de 1993 de la Cour Constitutionnel du
Costa Rica qui justifie cet intérêt par le fait que, la protection
de l'environnement constitue un intérêt de toutes les personnes ou
même de la collectivité nationale. Malgré l'inexistence
d'un préjudice direct et clair pour le demandeur (........), tous les
habitants subissent un préjudice dans la même proportion que s'il
s'agissait d'un dommage direct114(*). Ainsi, les associations peuvent fonder leur
intérêt à agir en justice sur base de cette logique.
Somme toute, l'intérêt à agir en
matière environnementale a un caractère hybride. Il conviendrait
de retenir que l'intérêt à agir devrait être
considéré tantôt comme individuel, tantôt comme
collectif, tantôt comme universel. Il peut être individuel,
lorsqu'il est démontré que l'intérêt en cause porte
atteinte à une personne déterminée, dans sa personne ou
dans ses biens, lésant ses droits patrimoniaux ou extrapatrimoniaux. Il
peut être collectif, lorsqu'il est démontré que
l'intérêt en cause porte atteinte à un ensemble de
personnes déterminées (ou déterminables). Ici, le
collectif s'apparente à la collectivité telle qu'entendue
classiquement dans la notion de préjudice collectif ou
d'intérêt collectif, et peut être une source de
confusion. Il peut être universel, lorsqu'il est
démontré que l'intérêt en cause porte atteinte
à l'humanité tout entière, ou à certains de ses
représentants.115(*)
Le droit congolais de procédure doit s'inspirer de ces
théories pour faciliter l'accès en justice aux victimes pour
réparation. En effet, l'intérêt en matière
environnemental n'est pas seulement personnel, il peut être aussi
collectif et futur. De ce fait, le droit processuel congolais
nécessitant un intérêt personnel né et actuel n'est
pas adapté au régime juridique des actions en matière de
l'environnement. Il y a lieu ici de s'inspirer de la législation
Française pour considérer le caractère collectif et futur
de l'intérêt en matière environnementale.
b. La qualité d'agir
L'article 46 de la loi de 2011 sur les
principes fondamentaux relatifs à la protection de l'environnement ouvre
le droit à toute personne d'agir en justice par une action individuelle
ou par une action collective. Il s'agit d'un devoir de toute personne de
défendre l'environnement.
Cet article ouvre une possibilité des actions
collectives en matière environnementale comme mécanisme de mise
en mouvement de la responsabilité environnementale, donnant la
qualité à certains groupes de personnes d'agir en justice pour
le dommage causé à l'environnement. Cependant le droit congolais
des hydrocarbures reste non explicite quant à cela, ce qui va nous
conduire dans l'analyse d'autres cadres juridiques.
1. L'action individuelle en droit
environnemental
Par une action individuelle, tel que
prévu par le droit congolais, toute personne qui subit un dommage
environnemental a la qualité de demander la réparation devant les
tribunaux. En effet, tout homme a le devoir solennel de protéger et
d'améliorer l'environnement pout les générations
présentes et futures. Ce devoir de protection fixe toute action
légalement reconnue aux citoyens pour la défense de leur droit
privé et collectif. Défendre l'environnement par toutes voies de
droit en action individuelle ou collective. L'action en justice n'est qu'une
voie pour faire valoir le droit/devoir à l'environnement.116(*) Désormais en
présence d'un dommage environnemental, la victime sera capable d'opposer
l'auteur du dommage son droit à un environnement sain.117(*)
De ce qui précède, la victime directe d'un
dommage environnemental dû aux activités extractives du
pétrole, peut mettre en mouvement la responsabilité
environnementale de l'exploitant sur base d'une action judiciaire individuelle,
car il a un droit personnel à un environnement de qualité. Ce
droit subjectif lui, confère un intérêt personnel à
agir en justice118(*).
2. Les actions collectives en droit de
l'environnement
- Les associations ayant qualité d'agir
En principe pour être
réparables, les dommages doivent avoir un caractère personnel, ce
qui signifie l'atteinte doit avoir directement ou indirectement des
conséquences pour l'être humain. De prime abord, on pourrait alors
penser que les atteintes environnementales sans répercussions sur les
personnes ne sont pas réparables dans la mesure où une telle
action ne pourrait être exercée à défaut de victime
(demandeur), mais il n'en est pas ainsi, d'abord parce que certaines atteintes
au milieu naturel sont réparables sur le fondement de la théorie
du préjudice écologique pur sans avoir à prouver
matériellement les conséquences immédiates sur les hommes.
Ensuite, parce que tout bien ou toute chose qui existe dans la nature est par
nature un bien collectif de sorte que son altération a des
répercussions sur la communauté humaine. D'où, le
préjudice collectif est lui-même admis en justice au travers les
groupes de défense d'intérêts collectifs ou des
associations de défense de la nature119(*).
Selon M. Prieur, il semble pouvoir s'analyser comme une
expression ou une résultante « de la carence des pouvoirs publics
et du parquet », faisant de celle-ci une « impérieuse
nécessité de donner aux associations de véritables moyens
d'y suppléer ».
Dans ces conditions, les victimes d'une atteinte à
l'environnement peuvent se regrouper pour une action collective efficace, en
créant des associations ayant spécifiquement pour objet social de
défendre les intérêts de ses membres. Les associations
agréées de protection de l'environnement peuvent ainsi agir en
justice par le mécanisme d'action collective ou de groupe. Mais il
faut noter que l'association au-delà de l'agrément, doit avoir
pour objectif général ou spécifique, la
protection/défense de l'environnement ou des ressources
naturelles.120(*)
Cette action des associations est donc corrélativement
indispensable. C'est pourquoi les textes, portant notamment sur la condition de
l'intérêt à agir, doivent leur permettre d'acquitter au
mieux cette mission dont elles s'investissent121(*).
Certaines raisons sont à la base même de la
consécration de la qualité d'agir des associations en
matière environnementale.
Il s'agit de groupements ainsi entendus, qui agissent pour la
défense de l'environnement. Les associations ne sont pas au premier plan
de la défense de l'environnement, spécifiquement dans le cas
où elles seraient comparées aux particuliers. Néanmoins
leur rôle est indéniable.122(*)
Les associations ont beau avoir des profils très
variés, on leur retrouve des constantes communes. En effet, elles sont
caractérisées par l'engagement, voire le militantisme, de leurs
membres au service de causes collectives. Ce trait de caractère n'est
pas propre aux associations « environnementales » ou agissant en
matière d'environnement, car il caractérise le monde associatif
en général, à des degrés variables, quel que soit
l'objet social des personnes morales concernées.
De même, les associations sont des acteurs
organisés. Il est courant qu'elles se structurent en s'entourant de
personnes qualifiées. Elles mènent leurs actions en s'appuyant
sur des données généralement collectées par leur
travail de terrain. Enfin, ces acteurs sont caractérisés par
l'animus ou affectio societatis qui lient leurs membres entre eux,
c'est-à-dire la volonté ou l'intention de mettre en commun leurs
connaissances et activités dans le but qui est le leur, en
l'espèce, la protection de l'environnement123(*).
L'ouverture régulière d'une action de groupe est
soumise à des conditions, et pour agir valablement en justice, les
acteurs doivent s'y conformer. En effet en pratique, une association intente
une action, puis une fois que les juges tranchent le litige, en cas de
succès de tout ou partie des prétentions du demandeur, des
mesures de publicité sont mises en oeuvre pour que toute personne
répondant aux critères définis par le juge dans les
conditions arrêtées par celui-ci pour le cas
considéré, et souhaitant se joindre au « groupe » aux
fins d'indemnisation se fasse connaître. Un agrément est
exigé pour l'association demanderesse, qui doit notamment être
déclarée au moins cinq ans avant l'exercice de l'action, et
s'assurer que son objet social correspond aux intérêts
défendus par ladite action.
Enfin, elle doit avoir mis en demeure la personne contre
laquelle elle souhaite agir, de cesser ou faire cesser le manquement dont elle
se plaint ou de réparer les préjudices causés.124(*) Il s'agit de ce qui
précède la réalité du Droit français.
Les causes défendues par les actions dont il est
question ici sont celles tendant à protéger l'environnement
commun.125(*)
Le juge judiciaire en droit français a facilité
l'accès au prétoire des personnes agissant aux fins de
réparation des atteintes à l'environnement. Il a
été encouragé en cela par le législateur
français et plus spécialement par la loi Barnier de 1995 qui a
donné une habilitation générale « aux associations
agréées de protection de l'environnement » afin qu'elles
puissent exercer « les droits reconnus à la partie civile en ce qui
concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux
intérêts collectifs qu'elles ont pour objet de défendre
(...). A titre d'illustration, une association de défense du milieu
aquatique a été déclarée recevable à agir
dans un cas de pollution marine par hydrocarbures. Les juges de la Cour d'appel
de Rennes ont considéré que cette pollution lésait «
les intérêts défendus par l'association qui a pour
obligation statutaire de protéger la qualité de l'eau et
notamment les estuaires et rivages marins et les eaux de mer, lieux de
séjour ou de passage des espèces migratrices ». Il est
remarquable de constater ici que les juges se réfèrent à
l'objet statutaire de l'association ce qui montre à quel point la
précision des statuts est importante.126(*)
Il se dégage à cet effet que, les associations
jouent un très grand rôle en matière environnementale,
souvent ce sont les associations qui dénoncent les pollutions et
d'autres dommages à l'environnement dont provoquent les activités
pétrolières aux populations périphériques. Elles
constituent à cet effet, des acteurs majeurs de mise en oeuvre de la
responsabilité environnementale devant le juge congolais, mais pour ce
faire, encore faut- il que la qualité d'agir en justice leur soit
reconnue en matière environnementale cela de manière expresse par
une loi spécifique relative à la responsabilité
environnementale.
Ceci interpelle une fois le législateur congolais des
hydrocarbures à l'instar de celui français de doter aux
associations d'intérêt environnemental d'une législation
adaptée pour se constituer partie civile en vue de la mise en oeuvre
effective de la responsabilité environnementale. Il est ainsi de la loi
portant code forestier, en effet, l'article 134 de la loi No 011/2002 du 29
août 2002 portant code forestier de prévoir à son article
134 que « les associations représentatives des
communautés locales et les organisations non gouvernementales nationales
agréées et contribuant à la réalisation de la
politique gouvernementale en matière environnementale peuvent exercer le
droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits
constituants une infraction aux dispositions de la présente loi et de
ses mesures d'exécution, ou une atteinte, selon les accords et
conventions internationaux ratifiés par la RDC, causant un
préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs
qu'elles ont pour objet de défendre ».
Il en est ainsi de la loi congolaise sur l'eau, en vertu de
l'article 108 de la loi No 15/026 du 31 décembre 2015 relative à
l'eau« toute personne physique ou morale, toute association
représentatives des communautés locales, ou toute organisation
non gouvernementale nationale agréée oeuvrant dans les domaines
de la protection de l'environnement, de la gestion des ressources en eau ou du
service public de l'eau, peut ester en justice contre toute violation des
dispositions de la présente loi ou de ses mesures d'application, ou
toute atteinte aux dispositions des accords et conventions internationaux
ratifiées par la RDC, lesquelles causent préjudice direct ou
indirect aux intérêts collectifs qu'elles ont pour objet de
défendre »
Ces dispositions pourraient être insérées
dans la législation des hydrocarbures pour une efficacité dans la
mise en oeuvre de la responsabilité environnementale de l'exploitant
pétrolier.
- Les acteurs publics
Les acteurs publics sont identifiés
à la fois en tant que protagonistes de la responsabilité civile
environnementale et, plus largement, du droit de l'environnement. Pour ainsi
dire, ils « s'invitent » dans la sphère privée de cette
responsabilité. Les protagonistes en responsabilité civile,
qu'elle soit ou non environnementale, sont habituellement et majoritairement
des personnes privées. Ceci n'empêche pas de reconnaître que
les acteurs publics, sous une forme ou sous une autre, s'y invitent
fréquemment à l'instar de tiers intervenants à part
entière. Cette intervention est principalement due aux missions de
contrôle et d'autorisation de l'État, car la « puissance
» publique dispose de pouvoirs importants en matière
d'environnement. Les choix qui en résultent étant susceptibles
d'avoir des conséquences significatives sur la santé comme sur la
qualité de vie des personnes vivant sur son territoire127(*) .
L'action civile ouverte aux collectivités locales
permet à ces personnes morales de droit public de réclamer la
réparation de tout dommage à l'environnement survenu sur leur
territoire. En effet, une commune dont un cours d'eau situé sur son
territoire est pollué serait fondée de saisir les tribunaux pour
demander la remise en état de ce cours d'eau. Elle agirait ainsi en
représentation des intérêts de la collectivité de
jouir du droit de vivre dans un environnement sain.128(*)
Le pouvoir public, entre autre les collectivités
territoriales souvent alertées sur les activités territoriales
n'ont pas à rester inactives en matière de responsabilité
environnementale. L'Etat avec tous ses moyens peut, à cet effet, se
constituer partie civile contre les entreprises pétrolières en
vue d'obtenir la réparation des préjudices environnementaux.
L'action civile déclenchée par le pouvoir public se
démontre efficace pour la mise en oeuvre et l'aboutissement de la
responsabilité environnementale des entreprises extractives du
pétrole.
De ce qui précède, il ne doit pas seulement
s'agir de la personne victime ayant subi directement le dommage qui doit avoir
la qualité d'agir en justice contre l'exploitant pétrolier mais
aussi les associations congolaise de défense de l'environnement ainsi
que les collectivités territoriales proches des milieux
d'activités d'extraction pétrolière. Le droit de
procédure civil congolais doit alors s'adapter au droit de
l'environnement.
Paragraphe 2 : Les modes de preuve
En droit de l'environnement, pour une
réparation du préjudice environnemental, il se pose aussi un
problème de preuve dans ce domaine. En effet, l'enjeu est bien de
convaincre le juge de la vérité d'une allégation. En
raison de la complexité des litiges environnementaux, cela ne va pas de
soi suite à des incertitudes qui caractérisent le domaine
environnemental, pour ce faire deux propositions s'avèrent importantes
entre autre la facilitation et l'allègement de la preuve dans le
procès environnemental.129(*)
1. Faciliter la preuve en matière
environnementale
Dans certains systèmes juridiques dont le droit
français, c'est le droit substantiel lui-même et non le droit
processuel qui peut être source de facilitation de la preuve. En effet,
il existe certaines règles de droit qui, en décrivant
précisément les conditions de qualification d'un
élément présent au litige permettent au demandeur d'y
trouver un appui en termes de preuve. Les précisions
légales concernant la qualification d'un fait ont des implications sur
le plan processuel lorsqu'il s'agit de le prouver en ce qu'elles permettent au
demandeur de s'y référer pour « bien prouver » et ainsi
convaincre le juge.130(*)
Pour signifier que dans le souci de faciliter la preuve en
matière environnementale face à l'incertitude scientifique
liée au progrès technique, le législateur congolais doit
doter les justiciables des règles juridiques substantielles qui
déterminent les modalités de preuve en matière
environnementale.
L'exemple est éloquent en Droit français, ici en
droit de la responsabilité civile, la loi sur la Biodiversité qui
a consacré le régime de responsabilité civile pour
préjudice écologique lui apporte une définition. Selon
l'article 1247 du Code civil, « est réparable, dans les conditions
prévues au présent titre, le préjudice écologique
consistant en une atteinte non négligeable aux éléments ou
aux fonctions des écosystèmes ou aux bénéfices
collectifs tirés par l'homme de l'environnement ». Pour
démontrer ce caractère non négligeable, les demandeurs
pourraient trouver appui dans le décret d'application du 26 avril 2009
de la loi du 1er août 2008 relative à la prévention et
réparation des dommages environnementaux qui transpose la directive
2004/35 sur la responsabilité environnementale. S'il s'agit ici d'un
régime de police administratif, il n'empêche que les parties et
juges pourraient bien y trouver inspiration lorsqu'ils seront appelés
à réparer le préjudice écologique. Ce décret
manifeste une grande précision quant à la manière dont il
convient d'apprécier le degré de l'atteinte à
l'environnement en distinguant clairement les atteintes aux sols, à
l'eau, aux habitats et aux espèces.131(*)
Pour ce faire, le cadre juridique
congolais de l'environnement doit se doter de textes qui rendent facile la
preuve en matière de l'environnement, en les organisant de
manière claire et expresse par le droit substantiel étant
donné que dans le contexte actuel, le droit congolais de l'environnement
ne facilite pas la preuve du préjudice environnemental, une loi
spécifique sur la responsabilité environnementale pourrait
combler les lacunes.
2. Alléger la charge de la preuve
Une autre modalité judiciaire permettant de faciliter
la preuve en matière de préjudice environnemental dû aux
activités pétrolières est celle de l'allégement de
la charge de la preuve pour une effective mise en oeuvre de la
responsabilité environnementale.
Dans la grande majorité des procès, comme il en
est du droit procédural congolais, la charge de la preuve incombe aux
demandeurs. Ce sont eux qui doivent convaincre le juge du bien-fondé de
leur action. Il s'agit alors de trouver des solutions permettant
d'alléger cette charge en tenant compte notamment du contexte
d'incertitude scientifique.
Cela consiste généralement dans le
déplacement de l'objet de la preuve avec le recours aux
présomptions132(*).
- Le déplacement de l'objet de la
preuve
Dans un litige environnemental caractérisé par
une incertitude scientifique et donc la difficulté de prouver, le
principe de précaution, s'il ne permet pas un véritable
renversement de la charge de la preuve, invite à apprécier plus
souplement l'exigence de preuve qui incombe au demandeur.
C'est en ce sens que la Convention de Lugano sur la
responsabilité civile résultant d'activités dangereuses
pour l'environnement, sans mentionner le principe ni donner plus de
précision sur les techniques à mettre en oeuvre,
s'intéressait à la difficulté de prouver en lien avec les
activités dangereuses et prévoyait que les États
signataires devraient inviter le juge « à tenir dûment compte
du risque accru de provoquer le dommage inhérent à
l'activité dangereuse C'est le cas, à titre d'exemple, dans
l'ordre international (1) et dans l'ordre interne (2)133(*)
- Dans l'ordre international
Le niveau international nous paraît être un niveau
d'analyse pertinent, en raison du fait que les contentieux les plus
emblématiques de l'incertitude scientifique finissent par être
tranchés à ce niveau. Dans les contentieux emblématiques
de l'incertitude scientifique, les juridictions internationales
allègent généralement le fardeau de la preuve en admettant
que l'on puisse se contenter de présomptions de preuve.134(*).
C'est le cas dans l'affaire NICARAGUA, La Cour internationale
de Justice, quant à elle, dans son arrêt rendu le 2 février
2018 en l'affaire Certaines activités menées par le Nicaragua
dans la région frontalière (Costa-Rica c. Nicaragua)
reconnaît que, s'agissant des dommages à l'environnement, la
preuve du lien de causalité peut être problématique.
Parce qu'ils sont possiblement attribuables à plusieurs
causes concomitantes ou que le lien de causalité ne peut pas toujours
être démontré avec certitude, compte tenu de l'état
des connaissances scientifiques, la Cour appréciera au cas par cas les
difficultés de preuve « à la lumière des faits
propres à l'affaire et des éléments de preuve
présentés à la Cour ». La preuve probabiliste est
donc largement admise au niveau international, on présume le lien de
causalité entre le fait générateur et le dommage en
considération du caractère dangereux des activités
exercées135(*).
Il se démontre que la preuve par présomption
d'activité dangereuse est adaptée aux activités
d'hydrocarbure, le juge présumera à cet effet, que le risque de
l'extraction du pétrole sur l'environnement est imminent et
allègera ainsi la preuve.
- En droit interne comparé
Du côté de l'ordre interne, en particulier en
droit privé français, la preuve par présomption est plus
strictement encadrée. Elle consiste « pour le législateur ou
la jurisprudence à ordonner au juge de tenir pour avérer
jusqu'à preuve du contraire un fait inconnu que la preuve d'un autre
fait voisin ou connexe permet d'induire ». Comme Loïs Raschel l'a
démontré dans sa thèse sur « Le droit processuel de
la responsabilité civile », les présomptions sont largement
utilisées. Or, dans notre domaine d'étude, la
responsabilité civile environnementale n'y échappe pas avec une
forte utilisation des présomptions de fait en particulier pour
démontrer l'un des éléments les plus difficiles à
démontrer dans un contexte d'incertitude : le lien de
causalité.136(*)
Il faut comprendre ici que, l'ordre international et l'ordre
national admettent les preuves par présomption en droit de la
responsabilité environnementale, face à l'incertitudes dans le
domaine de l'environnement, le juge va présumer la responsabilité
de l'exploitant.
Ce mécanisme de preuve par présomption en Droit
français est adapté au souci de faire face à l'incertitude
scientifique à la base des activités dangereuses liées
à l'exploitation du pétrole. Pour ce faire, les actions contre
les exploitants pétroliers aboutiront à la réparation par
cette facilitation des preuves entre autre la mise en place dans le cadre
congolais d'une loi sur la responsabilité environnementale
précisant les preuves des dommages environnementaux, mais aussi la
consécration légale du principe de preuve par présomption
en matière environnementale, pour alléger les victimes de la
charge de la preuve souvent difficile dans le domaine environnemental.
Section 2 : les
mécanismes extra-judiciaires de mise en oeuvre de la
responsabilité administrative
Au-delà du procès
environnemental c'est-à dire du cadre judiciaire, certains
mécanismes extra judiciaires constituent un fondement significatif de
mise en oeuvre de la responsabilité environnementale. Dans le cadre de
cette réflexion, deux mécanismes extra-judiciaires vont
être examinés à savoir la RSE (la
responsabilité sociale des entreprises pétrolières) et les
cahiers des charges.
Paragraphe 1: La responsabilité sociale
des entreprises pétrolière
Pendant plusieurs décennies, au-delà du discours
politique, la satisfaction des besoins fondamentaux des communautés
locales africaines n'a jamais été au centre des
intérêts de l'extraction des ressources naturelles et
minérales du continent (......), aujourd'hui un changement de cap et de
vision s'impose pour s'assurer que l'extraction s'insère dans une
politique de développement intégral et durable. Cela n'est
possible que si les droits et les intérêts des communautés
locales affectées sont pris en compte par l'industrie
extractive.137(*)
À partir des années 1950, certains universitaires
et industriels ont commencé à développer l'idée
selon laquelle les entreprises ne devraient plus se concentrer uniquement sur
leurs intérêts financiers, mais également sur l'impact
qu'elles peuvent avoir sur la société afin d'en tirer un profit.
La « responsabilité sociale des entreprises » (RSE) s'est
alors construite selon une démarche volontaire des entreprises de
contribuer au développement durable de leurs secteurs. Au XXIe
siècle, le concept de RSE s'est rapidement imposé comme une
notion incontournable au sein des entreprises138(*). Les préoccupations environnementales sont au
travers de la RSE intégrées dans la gestion interne des
entreprises. Si celles-ci doivent se conformer aux instruments
législatifs pertinents, la RSE permet d'aller plus loin dans la
protection de l'environnement en permettant aux entreprises de se doter
volontairement de mesures préventives à travers l'adoption de
codes de conduites, de contrôles ou de certifications issus du secteur
industriel ou du secteur public.139(*). Selon le « Livre vert sur la promotion d'un
cadre européen pour la RSE » de 2001, la RSE est «
l'intégration volontaire par les entreprises de préoccupations
sociales et écologiques à leurs activités commerciales et
leurs relations avec leurs parties prenantes »140(*)
Ainsi, la responsabilité sociale constitue à cet
effet un mécanisme pour les communautés locales d'avoir de la
part des entreprises extractives une réparation éventuelle des
préjudices environnementaux qui déboucheront de leurs
activités d'exploitation pétrolière.
Le cadre légal congolais n'est pas resté
indiffèrent sur la responsabilité sociétale des
entreprises extractives.
En lisant l'exposé des motifs de la loi sur les
hydrocarbures, il se dégage des innovations quelle apporte dont,
La mise en place de la responsabilité sociétale des
entreprises pétrolières aux fins d'impliquer ces dernières
aux enjeux de développement durable en faveur des populations
directement affectées par les travaux pétroliers, à
travers des contributions et une provision pour les interventions sociales tant
en phase d'exploration qu'en phase d'exploitation.141(*) . Dans cet exposé des
motifs de la loi sur les hydrocarbures, on établit une
responsabilité sociale des entreprises extractives, les obligeant
à intégrer dans leurs activités les préoccupations
sociales des communautés locales, qui subissent des dommages
environnementaux dus de l'exploitation pétrolière.
Il en ainsi de l'article 77 du même code des hydrocarbures
qui dispose que:
« Le contractant tient compte des impacts sociaux sur les populations directement affectées
par les travaux pétroliers.
Il finance, chaque année, des projets sociaux et de développement durable, en phase
d'exploration par une contribution pour les interventions sociales et en phase
d'exploitation par la constitution d'une provision pour les interventions sociales. »
Cette disposition oblige tout exploitant pétrolier de
participer aux projets des communautés locales affectées par ses
activités. Ainsi la responsabilité environnementale est mise en
pratique par les provisions faites par l'exploitant pétrolier qui
peuvent contribuer à la réparation des préjudices
environnementaux.
Le code minier congolais peut servir d'inspiration en
matière de responsabilité sociétale des entreprises
extractives du pétrole, l'article 285 octies prévoit le
mécanisme de responsabilité sociétale en précisant
le pourcentage de contribution des entreprises minière, ce qui n'est pas
le cas dans le domaine pétrolier :
A son tour, l'Article 285 octies dispose:
« Conformément au principe de la
transparence dans l'industrie minière prescrit par la présente
loi, une dotation minimale de 0,3% du chiffre d'affaires pour contribution aux
projets de développement communautaire prévu par l'article 258
bis du présent Code est mise à disposition et
gérée par une entité juridique comprenant les
représentants du titulaire et des communautés locales
environnantes directement concernées par le projet .Le Règlement
minier détermine la nature juridique de l'entité chargée
de la gestion de la dotation, le nombre de membres de chaque composante ainsi
que les modalités de leur collaboration et de contrôle par les
ministères en charge des mines et des affaires sociales. Ces textes
mettent en place la responsabilité sociétale des entreprises
extractive en RDC »
De ce fait, le mécanisme de RSE est une
nécessité pour la prévention des risques environnementaux
causés par les entreprises pétrolières sur la
société comme partie prenante. Elle ouvre une
responsabilité des entreprises fondée sur leurs propres mesures
de prévention des risques des activités
pétrolières.
La démarche de responsabilité sociale des
entreprises permet l'émergence de normes complémentaires qui se
veulent « non juridiques et surtout extrajudiciaires ».
La RSE incite donc les entreprises à se doter de code
de conduite, de certifications environnementales ou de mécanismes
d'évaluation de leur politique environnementale à travers
l'affiliation à des normes publiques mais aussi à des normes
issues du secteur privé142(*) .
Il est clair, que dans le contexte de l'évolution des
risques lié à l'industrialisation, entre autre l'industrie
pétrolière, les entreprises pétrolières oeuvrant en
RDC ne doivent pas se passer des mesures de RSE. En effet, la politique
environnementale doit s'imprégner des avancées doctrinales et
législatives en matière de RSE pour une effective
responsabilité des entreprises pétrolières sur ce qui sont
les dommages environnementaux, étant donné que la RSE couvre les
préoccupations sociales et environnementales qui doivent être
intégrées dans la stratégie et les opérations
commerciales des entreprises.143(*)
En somme de ce qui précède, il se dégage
que les victimes des activités de l'industrie pétrolière
peuvent fonder la responsabilité de cette dernière sur le
mécanisme extrajudiciaire de RSE pour des dommages environnementaux
causés à l'environnement, malgré des mesures volontaires
de prévention mise en place par l'entreprise
pétrolière.
Paragraphe 2 : Le cahier des
charges des industries pétrolières
La loi sur les hydrocarbures institue par son article 56 un
mécanisme des cahiers de charges des exploitants pétroliers. Ils
disposent que :
« Le contractant, qui fournit la preuve de l'existence d'un gisement commercial
d'hydrocarbures sur le bloc couvert par le contrat d'hydrocarbures, dispose du droit
d'exploitation du gisement, conformément aux dispositions de l'article 60 de la présente
loi et aux modalités fixées par le règlement d'hydrocarbures.
Il soumet, préalablement dans un délai d'un mois, à l'approbation du Ministre ayant les
Hydrocarbures dans ses attributions un plan de développement et de production du
gisement.
Sans préjudice des autres dispositions prévues par Id présente loi, le plan de
développement et de production contient les éléments suivants :
1. les données techniques et les coordonnées géographiques du gisement ;
2. l'évaluation des réserves et des ressources en hydrocarbures et leurs qualités ;
3. l'évaluation du nombre de puits nécessaires à l'exploitation du gisement;
4. ladescription des installations de développement et de production;
5. le coût de développement et de production;
6. le profil de production;
7. la date de début de la production initiale;
8. étude d'impact environemental et social préalable, assortie de son pian de gestion
dûment approuvé ;
9. le plan de développement, de production et d'utilisation du gaz naturel associé ;
10. le plan de contribution au développement des entités et communautés locales
concernées contenu dans le cahier des charges. »
Ce dernier point de l'article 56 de la loi sur les
hydrocarbure institue donc les cahiers des charges que les entreprises
extractives doivent signer pour fixer leur engagement des contributions au
développement des communautés locales, dans le cadre
administratif, comme mécanisme de mise oeuvre de la
responsabilité environnementale.
Ces cahiers des charges devront déterminer des mesures que
prendra l'exploitant pétrolier pour pallier les dommages
environnementaux issus de ses activités à l'égard des
communautés locales. Cependant, pour une bonne appréhension du
cahier des charges, il faut s'inspirer du code minier comme du règlement
minier pour un approfondissement de la loi sur les hydrocarbures.
Sur base de l'article
285 septies du code minier congolais il est disposé
que : « Conformément
à la présente loi, le cahier des charges définit la
responsabilité sociétale des titulaires de droits miniers
d'exploitation ou de l'autorisation d'exploitation de carrières
permanente vis-à-vis des communautés locales affectées par
les activités minières.
Le cahier des charges a pour objet d'orienter et
d'organiser la mise en oeuvre des engagements des titulaires de droits miniers
d'exploitation ou de l'autorisation d'exploitation de carrière
permanente relatifs à la réalisation des infrastructures
socioéconomiques et services sociaux au profit des communautés
locales affectées par ses activités minières. Il vise
également à servir de cadre d'accord devant permettre la
concrétisation des actions du développement durable visant
à améliorer le bien-être économique, social et
culturel des populations locales affectées par les activités
minières des titulaires de droits miniers d'exploitation ou de
l'autorisation d'exploitation de carrières permanente pendant et
après l'exploitation. »
Le titulaire de droits miniers d'exploitation ou de
l'autorisation d'exploitation de carrières permanente est tenu, à
partir de la délivrance de son titre minier et/ou de carrières et
au plus tard dans les six mois avant le début de l'exploitation,
d'élaborer et de déposer le cahier des charges définissant
la responsabilité sociale vis-à-vis des communautés
locales affectées par les activités minières et d'en
obtenir l'approbation du Gouvernement provincial après avis des services
techniques. Le Règlement minier détermine les règles
afférentes aux négociations ainsi que les modalités
pratiques de l'établissement, du dépôt, de la
recevabilité, de l'instruction et de l'approbation du cahier des charges
définissant la responsabilité sociétale vis-à-vis
des communautés locales affectées par les activités
minières.144(*)
Plus clair, le règlement minier précise à
son article 414 bis que :
« Le processus de négociations conduisant
à l'élaboration du cahier des charges est réalisé
sous la supervision du Ministre provincial des Mines. Il comporte les
étapes suivantes : · la détermination de l'espace
géographique conjointement par le chef de secteur/chefferie, les
représentants du titulaire de droit minier, des communautés
locales concernées et des représentants des parties prenantes
dans le rayon d'action du projet minier suivant les conclusions de l'EIES ;
· l'identification des besoins prioritaires des communautés par
le comité local de développement composé de
l'autorité locale et des représentants des communautés
locales et du titulaire de droit minier ; · l'approbation
communautaire des besoins prioritaires identifiés par catégories
sociales à travers les réunions populaires ; · la
détermination des dates des négociations sur le contenu du projet
de cahier des charges entre le titulaire du droit minier et le comité
local de développement ; · la signature du procès-verbal
indiquant le compromis trouvé entre les membres du comité local
et les représentants du titulaire du droit minier ; · la
vérification de la conformité au plan social provincial du rayon
d'activités du titulaire ; · l'élaboration du cahier
des charges ; · la signature proprement dite du cahier par le
titulaire du droit minier, les représentants des communautés
locales ainsi que de l'autorité administrative locale ; · le
visa de l'autorité administrative locale. Les modalités de la
supervision du Ministre provincial sont déterminées dans
l'annexe définissant la directive sur le modèle-type de cahier
des charges. 145(*) ».
Il se dégage que les cahiers de charges jouent un
rôle primordial en matière de responsabilité
environnementale car ils viennent charger les intervenants dans le domaine
extractif en fin de participer à la réparation des dommages issus
de leur activités.
Au terme de tout ce qui
précède il faut souligner que pour une efficace mise en oeuvre de
la responsabilité environnementale, le droit congolais devra s'adapter
aux exigences des risques nouveaux qui nécessitent de refonder certaines
notions. En effet, le législateur congolais ne doit pas se limiter
à prévoir les actions collectives pour les dommages
environnementaux, encore faut-il mettre en place un cadre légal
spécifique organisant la compétence des associations de
défense de l'environnement comme partie civile en matière
environnementale, cela est possible si et seulement si on sortait de
l'exigence d'un intérêt personnel, né et direct comme
exigence de l'action en justice. A cet effet, il y a lieu de donner force
juridique a tout intérêt collectif indirect voir futur. Mais
aussi, de donner priorité à la preuve par présomption de
la dangerosité des activités de l'exploitation
pétrolière pour dédouaner la victime de toute preuve de la
faute en matière de préjudice environnemental, qui reste
difficile à trouver. La responsabilité sociale des entreprises
pétrolières au travers des cahiers de charges peut constituer des
voies de réparation des préjudices environnementaux subis par les
communautés locales, affectées par les activités
extractives. Etant donné que dans ces engagements, les entreprises
développent des mesures réparatrices des dommages dont peuvent
subir les communautés de base, aucune activité d'exploitation
pétrolière ne doit commencer sans avoir bien défini les
engagements de l'entreprise pétrolière en matière de
réparation des préjudices environnementaux au travers des cahiers
de charges.
CONCLUSION
L'environnement est de plus en plus menacé
aujourd'hui par les activités de l'homme, des dommages résultants
de ces activités sont de plus en plus préjudiciables. Dans le
contexte de l'industrialisation, les risques deviennent beaucoup plus nouveaux
de sorte qu'ils échappent aux notions de la responsabilité civile
classique.
L'exploitation pétrolière ne reste pas sans
conséquences à l'environnement. Ainsi, une réflexion sur
la responsabilité environnementale en droit congolais face aux nouveaux
risques : cas de l'exploitation du pétrole, nous a permis
d'analyser la mise en oeuvre ainsi que des fondements de cette
responsabilité en Droit congolais, pour circonscrire un champ des voies
juridiques et judiciaires pouvant permettre aux victimes des dommages de
l'exploitation pétrolière de pouvoir obtenir
réparation.
Cette analyse nous a permis d'apprécier aussi bien le
fondement de la responsabilité que les mécanismes de sa mise en
oeuvre organisés par le Droit congolais. Cette étude à la
base de notre réflexion s'est montrée d'un côté
critique, en vérifiant l'arsenal juridique congolais de
responsabilité civile en vue d'apprécier son efficacité en
matière environnementale, d'un autre coté, elle s'est
montrée comparative, dans la mesure où des comparaisons ont
été faites en droit français pour inspirer la
réforme du droit congolais de l'environnement.
A la base de cette étude, il s'est
avéré important de poser la question fondamentale de savoir si le
Droit congolais de l'environnement, organise-t-il de manière effective
et efficace la responsabilité environnementale des activités
extractives du pétrole.
En vue d'aboutir aux réponses à cette question,
notre attention a été focalisée sur l'examen des
fondements de la responsabilité environnementale, et d'un autre
côté, sur les mécanismes de mise en oeuvre de la
responsabilité environnementale.
De ces analyses, il s'est dégagé que le droit
congolais des hydrocarbures à ce stade, organise beaucoup plus la
responsabilité civile classique comme fondement de la
responsabilité environnementale, il s'agit, en effet, de la
responsabilité pour faute. Cependant, suite à l'évolution
des risques dus à l'exploitation pétrolière sur
l'environnement, des incertitudes scientifiques qui sévissent dans le
domaine de l'environnement, il s'est avéré que la
responsabilité pour faute n'est pas adaptée à la
responsabilité environnementale, cela constitue un obstacle aux victimes
d'avoir réparation pour autant qu'il ne soit pas aisé d'apporter
la preuve en matière des préjudices environnementaux.
Ainsi, il faut mettre en place en droit congolais relatif
à l'exploitation du pétrole, de manière claire ;
organisée et bien structurée, une responsabilité
environnementale qui décharge la victime de la preuve. Il s'agit
à cet effet de la responsabilité objective, ou une
responsabilité sans faute.
Le droit congolais de l'environnement notamment la loi
portant principes fondamentaux relatifs à la protection de
l'environnement devra instituer en lieu et place de la responsabilité
civile qu'il prévoit actuellement à son chapitre 7, une
responsabilité environnementale basée ou fondée sur la
notion de la responsabilité sans faute.
Pour dire que, les notions des risques créés,
risques profit et maitrise du risque doivent conduire au déclenchement
de la responsabilité environnementale en matière d'exploitation
pétrolière.
C'est à dire que tout exploitant pétrolier devra
être tenu responsable non du fait d'une faute commise à la base
des dommages, mais du fait d'avoir la maitrise de son activité à
la base des dommages, de profiter du risque de son activité voire du
fait d'avoir créé une activité à risque bien
qu'aucune faute ne lui soit imputable146(*). Cela étant donné que
l'activité pétrolière fait naitre des risques nouveaux
pour lesquels la faute de l'exploitant est difficile à
établir.
Une responsabilité ne reste utopique si elle n'est pas
mise en oeuvre par des actions judiciaires appropriées. Il faut ainsi
souligner l'insuffisance juridique du droit congolais en matière de
mécanismes tant judiciaires, qu'extra judiciaires de mise en oeuvre de
la responsabilité environnementale.
En effet, il est clair que le droit congolais exige que
l'action en justice remplisse un certain nombre des conditions pour sa mise en
oeuvre, à savoir : un intérêt à agir, une
qualité pour agir ainsi que la capacité, notre analyse s'est
démontrée critique des conditions relatives à
l'intérêt ainsi que à la qualité pour agir en
justice en matière environnementale.
Pour ce qui est de la responsabilité environnementale,
il est important pour le droit congolais de tenir compte du caractère
collectif de l'intérêt pour agir en justice en matière
environnementale qui n'est pas nécessairement individuel. Il peut
être aussi futur, le juge qui joue un rôle important dans la mise
en oeuvre de la responsabilité civile, ne devra donc pas débouter
les parties pour un intérêt non personnel et qui n'est pas encore
né.
Pour ce qui concerne la qualité d'agir, bien que le
droit congolais de l'environnement prévoit une possibilité pour
les associations de pouvoir ester en justice pour réclamer
réparation des dommages environnementaux, il est recommandable au
législateur congolais d'organiser cette matière de manière
précise et développée.
En effet, les associations ainsi que les ONG de
défense et de protection de l'environnement doivent jouer un rôle
important dans la mise en oeuvre de la responsabilité environnementale.
Ainsi il est encourageable au secteur privé de pouvoir créer des
associations apte à défendre l'environnement et à intenter
des actions en justice pour obtenir réparation des dommages
environnementaux.
Il est aussi nécessaire, comme mécanisme de mise
en oeuvre de la responsabilité environnementale, d'alléger la
charge de la preuve en matière environnementale, en se basant beaucoup
plus sur les présomptions, en effet, au lieu de demander aux victimes de
preuves qui sont difficiles à trouver en matière de
l'environnement. Il serait plus efficace de présumer la faute de par une
activité à risque de l'exploitant pétrolier susceptible de
créer le dommage dont réparation est demandée par la
victime.
Sur le plan extra judiciaire, il s'est dégagé
l'importance d'établir la responsabilité sociale des entreprises
ainsi que les cahiers des charges comme mécanismes de mise en oeuvre de
leur responsabilité environnementale. Cela étant donné que
l'activité pétrolière est par nature à risque.
Les sociétés pétrolières devront
avant toute activité d'exploitation adopter une politique de
socialisation de risques mais aussi signer des cahiers de charges à
l'égard des communautés locales, pour qu'à tout dommage il
y ait une base juridique de réparation du préjudice.
En somme, de tout ce qui précède, le
législateur congolais devra, au stade actuel de l'évolution des
risques en matière environnementale surtout pour ce qui est de
l'exploitation pétrolière, prendre en considération la
question de la responsabilité environnementale.
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https://id.erudit.org/iderudit/1038419ar.pdf
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TABLE DES MATIERES
EPIGRAPHE
i
REMERCIEMENTS
ii
RESUME
iii
ABSTRACT
iv
PRINCIPAUX SIGLES ET ABREVIATIONS
v
INTRODUCTION GENERALE
1
I. ETAT DE LA QUESTION
1
II. PROBLEMATIQUE
5
III. HYPOTHESES
6
IV. INTERET ET CHOIX DU SUJET
6
V. METHODES ET TECHNIQUES DE RECHERCHE
7
VI. DELIMITATIONS DU SUJET
8
VII. SUBDVISON DU TRAVAIL
8
CHAPITRE I : FONDEMENT JURIDIQUE DE LA
RESPONSABILITE ENVIRONNEMENTALE DANS LE SECTEUR PETROLIEREN RDC
9
Section 1 : Théorie sur la
responsabilité en matière d'environnement
9
Paragraphe 1 : la responsabilité
environnementale 10
Paragraphe 2 : la responsabilité civile,
pénale et administrative en matière environnementale
21
Section 2 : Cadre juridique congolais de la
responsabilité environnementale
24
Paragraphe 1 : La responsabilité
environnementale dans l'ordre juridique international
25
Paragraphe 2 : La responsabilité
environnementale dans l'ordre juridique Congolais
27
CHAPITRE II : LES MECANISMES DE MISE
EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE ENVIRONNEMENTALE EN DROIT CONGOLAIS
35
Section 1 : Les mécanismes judiciaires
de mise en oeuvre de la responsabilité environnementale.
35
Paragraphe I : Action en justice
en matière environnementale
35
Paragraphe 2 : Le cahier des charges des industries
pétrolières
50
CONCLUSION
52
BIBLIOGRAPHIE
57
* 1 Mohamet Ba,
« Pétrole et environnement », disponible
sur
https://timeforafrica-mag.com/petrole-et-environnement
, consulté le 30 novembre 2019, à 20 heures
* 2Idem.
* 3Idem.
* 4Mohamet Ba,
« Pétrole et environnement », disponible
sur
https://timeforafrica-mag.com/petrole-et-environnement
, consulté le 30 novembre 2019, à 20 heures
* 5 Aldrice Aubert DJAKPO,
La réparation des dommages environnementaux, thèse
présentée en vue de l'obtention du grade de Docteur en Sciences
Juridiques, UNIVERSITÉ D'ABOMEY-CALAVI/FACULTÉ DE DROIT ET DE
SCIENCE POLITIQUE, p.20
* 6 Bertrand de CONINCK,
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classiques du droit commun de la responsabilité aquilienne : Une
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* 7BABI Kundu et BAKULU di
Mpianda jacques, Le pétrole de Muanda au bas Congo : qui en
bénéficie ? SARW, Johannesburg, 2008, p.26
* 8BABI Kundu et BAKULU di
Mpianda jacques, op.cit., p.26
* 9 Article 68 de La loi
n0 11/009 du 9 juillet 2011 portant principes fondamentaux relatifs à
l'environnement in JORDC, numéro spécial, 52e
année ,16 juillet 2011.
* 10Mustappha
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l'environnement : vers un droit de la responsabilité
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* 11Eve Marengo et Clio
Bouillard, Quel encadrement juridique pour les activités
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2017, p.4
* 12Olivier BINGANA
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la zone côtière congolaise de MUANDA, in actes des
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* 13 Antoinne Mingashango
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santé des populations et de l'environnement à Moanda : cas
de la firme Parenco, Kinshasa, juillet 2009, p.16
* 14 Mustappha Mekki,
op.cit, p.3.
* 15 Xavier
THUNIS, « Fonctions et fondements de la
responsabilité en matière environnementale »,
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http://www.dhdi.free.fr/recherches/gouvernance/articles/thunisresponsabilite.pdf
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* 16 J. KAMABU VANGI,
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* 17 M.Robert Patry,
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* 18 Idem, p.373
* 19 Jean-Louis BAUDOIN, la
responsabilité civile délictuelle, 1985, pp.6 et s.
* 20 M.Robert Patry,
op.cit., p.375
* 21 Aristide Kahindo Nguru,
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* 22 M. Sabin Mande,
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* 23 Idem.
* 24 Van Lang Agathe, Droit
de l'environnement, PUF Paris,2007, p.260.
* 25 Idem, p.261.
* 26 M. Sabin Mande,
op.cit., 247
* 27 Idem, p.248
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* 30 R. Savatier,
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* 31 Mustapha mekki
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* 32 A. Aynès, La
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* 37 Youri MOSSOUX,
L'application du principe du pollueur-payeur à la gestion du risque
environnemental et à la mutualisation des couts de la pollution,
vol. 17.1, Lex Electronica, 2012, p.4
* 38 Voir à cet
égard les contributions doctrinales déterminantes de JOSSERAND et
SALLEILES : L. JOSSERAND, Cours de droit civil positif français, Paris,
Sirey, 1938, n° 556-558, pp. 433-439.
* 39 Valérie Castay,
opcit, p.34
* 40 J. FLOUR, J.-L. AUBERT ET
E. SAVAUX, Les obligations, vol. II, Le fait juridique, Paris, Sirey, 2009, 13e
éd., p. 79, n°70
* 41 R. SALEILLES, op.
Cit. p. 439.
* 42 J. FLOUR et AL., op.
Cit. p.79
* 43 Youri MOSSOUX,
op.cit., p.6
* 44 Idem.
* 45 Baudoin BOUCKAERT,
Responsabilité civile : subjective ou objective ?
International center of research on environnemental issues, Nantes, 2016
p.12
* 46 Marie- Axelle GAUTIER,
op.cit., p.226
* 47 Commission
européenne, Livre blanc sur la responsabilité
environnementale, office des publications officielles des
Communautés européennes, Luxembourg, 2000, p.5
* 48 Marie- Axelle GAUTIER,
op.cit., p.229
* 49 Idem.
* 50 Idem.
* 51Idem.
* 52 Marie- Axelle GAUTIER,
op.cit., p.229
* 53 Youri MOSSOUX,
op.cit., p.2
* 54 Youri MOSSOUX,
op.cit., p.6
* 55 Youri MOSSOUX,
op.cit., p.13
* 56 Youri MOSSOUX,
op.cit., p.8
* 57 Commission
européenne, Livre blanc sur la responsabilité environnementale,
Luxembourg, office des publications officielles des Communautés
européennes, 2000, p.6
* 58 Idem, p. 13
* 59 Tite Niyibizi, De la
réparation du préjudice écologique en droit positif
rwandais, mémoire de licence, université de Kigali, 2007,
p.20
* 60 HAFNER.G et PAZARI.H,
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* 61 N. DE SADELEER,
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* 63 Cours de droit,
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* 64 V. Kangulumba Mbambi,
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* 65 Geneviève Viney,
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* 66 Idem.
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* 71 Ibidem, p.23
* 72 M. Sabin Mande,
op.cit., 256
* 73 V.REBEYROL, op.cit.,
P.286
* 74 M. Sabin Mande,
op.cit., 262
* 75 M. Sabin Mande,
op.cit., p.268
* 76 Idem.
* 77 M. Sabin Mande,
op.cit., 269
* 78 M. Sabin Mande,
op.cit., p.271
* 79M. Sabin Mande,
op.cit., p.277
* 80 Idem,
* 81 Idem., p.279
* 82 Aldrice Aubert DJAKPO,
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Belgique francophone et du Bénin, Thèse
préparée en vue de l'obtention du grade de Docteur en sciences
juridique, Université de Liège, faculté de droit et de
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* 83 Kigangi Bindu Kennedy,
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* 84 Ibrahima LY, Le Droit
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* 85 Kalambay lumpungu,
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* 87 Article 3.3 de la
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* 89 Article 52 de la
constitution de la RDC, in JORDC, numéro spécial,
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* 90 Kihangi Bindu Kennedy,
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* 91 Nérée kiyoka
Biduaya, « Promulgation du nouveau code des
hydrocarbures », disponible sur
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* 92 Article 156 de La loi
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* 93 Marie-Axelle Gautier,
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* 94 Marie-Axelle Gautier,
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* 95Mustappha
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* 97 Stan Atangana,
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* 110 Idem. P.230
* 111 Flore
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Truilhé-Marengo et Mathilde Hautereau-Boutonnet, op.cit.,
p.122.
* 132 : E. Vergès, G.
Vial et O. Leclerc, Droit de la preuve, PUF/Thémis, 2015, p.
240
* 133 Eve
Truilhé-Marengo et Mathilde Hautereau-Boutonnet, op.cit.,
p.126
* 134 Sadeleer (N.), Les
principes du pollueur-payeur, de prévention et de précaution :
essai sur la genèse et la portée juridique de quelques principes
du droit de l'environnement, Bruylant, Bruxelles, 1999, p. 176
* 135 Eve
Truilhé-Marengo et Mathilde Hautereau-Boutonnet, op.cit.,
p.127
* 136 Idem,p.128
* 137
Pacifique Manirakiza, La protection de droits de l'homme à
l'ère de l'industrie extractive en Afrique, disponible sur
https://id.erudit.org/iderudit/1038419ar.pdf
,p.129, Consulté le 28 octobre 2020.
* 138
Pacifique Manirakiza, op.cit, p.129
* 139 Idem, p.3.
* 140 Livre vert sur la
promotion d'un cadre européen pour la Responsabilité Sociale des
Entreprises, 18/07/2011, COM (2001) 366 final, p. 7.
* 141 Exposé des
motifs la loi n° 2016-28 du 12 octobre 2016 portant code des
hydrocarbures, disponible sur
https://.www.droit-afrique.com/uploads/congo-code-2016-hydrocarbures
, consulté le 30 novembre 2019 à 22h
* 142 Pierre VOLONDAT,
L'engagement environnemental des industriels du secteur pétrolier
et gazier offshore, vol. 24, Neptunus, Nantes, janvier 2018, p.5
* 143 Ivana Rodiæ,
Responsabilité sociale des entreprises. Le développement d'un
cadre européen, Mémoire présenté pour l'obtention
du Diplôme d'études approfondies en études
européennes, UNIVERSITE DE GENEVE, avril 2007, p.9
* 144 Article 285 septies
de la Loi n°18/001 modifiant et complétant la Loi n°
007/2002 du 11 juillet 2002portant Code minier, in JORDC, Kinshasa - 28 mars
2018
* 145 Article 414 bis du
décret No 038/2003 du 26 mars portant règlement minier tel que
modifié et complété par le décret No 18/024 du 08
juin 2018, in JORDC, 59e année, numéro
spécial, 12 juin 2018
* 146 Baudelaire N'Guessan,
op.cit., P.29
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