UNIVERSITE DE KINSHASA FACULTE DE
DROIT Département de Droit pénal et de
criminologie
Année Universitaire 2018-2019
LA PROTECTION SPECIALE DES ENFANTS
EXPOSES A LA MENDICITE. Etat des lieux et
perspectives
Par
Timothée KITAMBALA EPI Gradué en
Droit
Mémoire présenté et défendu en vue de
l'obtention du titre de licencié en Droit.
Option : Droit privé et judiciaire
Directeur : Irénée MVAKA
NGUMBU Professeur
Encadreur : Albert MBOKOLO NTIKALA Chef de
travaux
II
DEDICACE
A nos parents Willy KITAMBALA et Martine EPI, eux qui ont
consenti tant d'efforts pour que notre licence s'achève
en beauté ;
Enfin, à tout le monde qui nous a tendu la main sur le
plan matériel que scientifique afin d'achever notre
deuxième cycle.
Timothée KITAMBALA EPI
III
REMERCIEMENTS
Ce mémoire que nous avons l'honneur de présenter
à vous tous épris d'esprit de science et de recherche, est le
fruit d'une longue haleine ;
La formation dont nous jouissons aujourd'hui n'est pas
seulement le résultat de notre effort personnel, mais aussi et surtout
de tous ceux qui nous ont transmis leurs connaissances depuis nos études
primaires jusqu'au jour où nous achevons notre deuxième cycle
d'études supérieures à l'Université de Kinshasa.
C'est ainsi que nous adressons notre obligeance à tous ceux qui ont
contribué à notre formation ;
Nos civilités et respect s'adressent
particulièrement à tout le corps professoral, scientifique et
administratif de l'Université de Kinshasa ;
Nous remercions vivement nos maitres de la Faculté de
Droit de l'Université de Kinshasa, plus spécialement Madame le
Professeur Irénée MVAKA NGUMBU, pour avoir accepté la
direction de cette monographie; nous sommes reconnaissant du temps et de
l'attention qu'elle nous a généreusement accordé pour
l'encadrement de notre mémoire ;
Nous nous offrons cette occasion pour remercier d'une
manière particulière Monsieur le chef de travaux Albert MBOKOLO
NTIKALA qui nous a éventuellement tendu la main et encouragé pour
que ce mémoire puisse bien s'achever ;
A nos oncles et tantes Médard EFOTO, Moise EPI,
Floribert KITAMBALA, Bollène KITAMBALA, Crispin EPI, Franck EPI,
Constantine KITAMBALA et Mankoko EPI ;
A nos frères et soeurs Gloire KITAMBALA, Flori
KITAMBALA, Médard KITAMBALA, Clémence KITAMBALA, Ruth KITAMBALA,
Bénie KITAMBALA et Anne-Marie KITAMBALA, envers qui nous avons beaucoup
d'affection ;
A notre très chère Esther KEKE, celle pour qui nous
avons beaucoup d'estime ;
iv
A nos amis et compagnes de lutte Christian LANDA, Samuel
BATULUKISI et Israël LONGO ;
Enfin, à tous ceux qui, d'une manière ou
d'une autre ont apporté leur pierre à la construction de cet
édifice et dont les noms ne sont pas cités ici, qu'ils se sentent
concernés par ces remerciements et que ce mémoire de
licence soit pour eux un motif de fierté.
Timothée KITAMBALA EPI
V
LISTE DES ABREVIATIONS
A.S. : Assistant social
AGR : Activités génératrices de
revenus
ART. : Article
BSESP : Bureau de signalement des enfants en
situation-problème
CAJP : Centre d'assistance judiciaire et psychosocial
CDE : Convention relative aux droits de l'enfant
CF : Code de la famille
D.A.E. : Direction de l'aide à l'enfant
DFID : Ministère britannique du développement
international
DISPE : Direction des interventions sociales pour la
protection de l'enfant
ED : Edition
ESR : Enfant en situation de rue
IBIDEM : Au même endroit, dans le même passage.
IDEM : De même, du même auteur.
LIZADEEL : Ligue de la zone Afrique pour la défense des
droits des enfants et des élèves
LPE : Loi portant protection de l'enfant
MINAS : Ministère des affaires sociales et actions
humanitaires
N° : Numéro
ODD : Objectif de développement durable
ONG : Organisation non gouvernementale
OPJ : Officier de police judiciaire
PE : Protection de l'enfance
P.S. : Protection sociale
P.V. : Procès-verbal
RDC : République démocratique du Congo
SESP : Signalement des enfants en situation-problème
SS : Service social
T.E : Tribunal pour enfants
UNICEF : Fonds des nations unies pour l'enfance
UNIKIN : Université de Kinshasa
US : United States
VIH : Virus immunodéficience humaine
1
INTRODUCTION
Comment rendre effective la protection spéciale de
l'enfant exposé à la
mendicité ?
La loi portant protection de l'enfant a été
saluée par nombreux au lendemain de sa promulgation car elle garantit
notamment une protection sociale à certaines catégories des
enfants. Les enfants exposés à la mendicité
bénéficient d'une protection spéciale. Cependant, beaucoup
d'enfants exposés à la mendicité ne sont pas toujours pris
en charge par les pouvoirs publics conformément à la loi.
I. POSITION DE PROBLEME
Dans le cadre de notre objet de recherche tel que
précisé ci-dessus, il convient d'expliciter que les enfants sont
des êtres vulnérables, des êtres qui peuvent être
blessés facilement parce qu'ils manquent de maturité physique et
même intellectuelle. Au cas où, il y a un souci de santé,
d'éducation, de logement, et surtout d'alimentation, ils peuvent
facilement se laisser manipuler, selon qu'il s'agit de leurs besoins
fondamentaux qui ne sont pas pris en compte par les parents ou par les autres
personnes responsables d'eux.
Cela étant, ils sont donc des êtres
malléables. Leur malléabilité se constate, au point qu'ils
peuvent facilement être influencés soit dans le bien, soit dans le
mal, donc à tout vent qui pourrait se présenter devant eux.
Certains des enfants exposés à la mendicité que nous
avions rencontrés, se sont lancés dans ce phénomène
tout simplement parce qu'il y a leurs camarades qui les ont entrainés
dans cette vie, compte tenu de leurs propres besoins bien entendu qui
n'étaient pas satisfaits.
Les enfants sont des êtres de nature faibles
nécessitant un encadrement et des soins spécifiques, car arrivant
dans la rue, ces enfants ne supportent pas certaines pressions de leurs
camarades ou des adultes et, qu'en cas de rapport de force, ils se fragilisent
rapidement. Il s'en suit du climat de paix qui pousse ces enfants à se
retrouver dans la rue, un climat de violence résultant de quelques
confrontations auxquelles ils rencontrent, ces confrontations outrepassent
l'intégrité physique de ceux qui sont plus jeunes donc, ceux qui
nagent entre six à quatorze ans, le conduisant ainsi à se blesser
; c'est pourquoi la communauté internationale
2
a accordé une place importante à la protection
de l'enfant. Cet engagement de la communauté internationale se manifeste
par la mise en place des instruments juridiques internationaux qui tendent
à protéger la personne de l'enfant.
En effet, pour le cas de notre pays, la République
démocratique du Congo qui a ratifié la plupart de ces instruments
juridiques internationaux et, s'est sentie obligée d'adapter sa
législation nationale au standard international, en mettant en place la
loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant qui a
été adoptée et promulguée.
Par ailleurs, cette loi portant protection de l'enfant dans le
contenu de ses dispositions protège l'enfant socialement, judiciairement
et pénalement. Par ricochet, sur le plan social, l'enfant
bénéficie d'une protection ordinaire, spéciale et
exceptionnelle.
Cependant, parmi les enfants bénéficiant de la
protection spéciale, il y a également l'enfant mendiant ou
exposé à la mendicité. Il y a lieu de noter que
malgré cette protection consacrée dans la loi de 2009 ci-haut
citée, pendant nos descentes sur terrain, nous avons constaté la
présence de beaucoup d'enfants qui continuent toujours d'être
exposés à la mendicité. Pour certains d'entre ces enfants,
c'est la condition des souffrances de leurs responsables qui les
inquiète et les pousse à se débrouiller autrement, en se
lançant à la mendicité. Pour les autres, c'est parce
qu'ils sont issus de parents qui n'ont aucune instruction sur la prise en
compte des petits besoins de leurs enfants. Il y en a parmi ces enfants qui,
presque chaque jour se séparent de la famille temporairement, en
quête de moyens de survie pour rentrer à la maison le soir et, il
y en a d'autres qui finissent à la longue par ne plus rentrer en
famille. La présence de ces enfants dans la rue est vraiment remarquable
au point que toute personne attentionnée sur les mineurs ne peut manquer
de constater ce phénomène. C'est très dangereux pour ces
enfants car ils ne trouvent pas et ne pourront jamais trouver une
sécurité sûre dans la rue.
C'est un élément qui démontre qu'il y a
un écart considérable entre les prescrits de la loi et la
pratique telle que vécue par ces enfants en ce qui concerne la
protection de l'enfant. Puisque, dans leurs habitudes de se diriger vers les
différentes rues, en train de s'exposer à la mendicité, il
n'y a aucun agent émanant des organes étatiques de protection de
l'enfant qui les appréhendent pour les identifier, les interroger sur
les raisons qui les poussent à s'exposer dans la rue pour mendier, et
qu'ensuite chercher à les apporter la protection qui
3
leur est due. La condition de ces enfants nous semble
très inquiétante et nous préoccupe le plus.
Il est à remarquer avec NOUTSOUGAN que la
mendicité des enfants est le fait pour ceux-ci de demander
l'aumône en vue de satisfaire leurs propres besoins, ceux de leur
famille, d'un tuteur ou d'un maître. Le problème des enfants
mendiants constitue un phénomène social préoccupant. Elle
est caractérisée par diverses mutations récentes et
apparaît d'autant plus compliquée en raison de la
dégradation des conditions de vie, du tissu social et de la
culture.1
C'est pour cela, nous nous posons de questions ci-après
: pourquoi est-ce qu'il est établi la protection spéciale de
l'enfant qui s'expose à la mendicité ? Et pourquoi y a-t-il un
écart entre la loi et la pratique dans la protection de l'enfant ?
Toutes ces questions ont fait l'objet des réponses
provisoires.
II. HYPOTHESES
Selon Guigue Durring qui cite Lalande, l'hypothèse est
« une conjecture douteuse mais vraisemblable, par laquelle
l'imagination anticipe sur la connaissance, et qui est destinée à
être ultérieurement vérifiée ». Luc
Albarello décrit que l'hypothèse « se présente
généralement sous la forme d'une proposition à tester,
proposition mettant en relation deux types de variables (de faits sociaux) :
les variables indépendantes ou explications et les variables
dépendantes (c'est-à-dire le fait social que l'on tente de mieux
comprendre) ». Elle est alors appelée, au cours de l'étude
ou de la recherche, à être testée dans le sens de sa
confirmation ou dans le sens de son infirmation2.
1 NOUTSOUGAN A.K., la réinsertion des enfants
mendiants à Niamey : Situation et perspectives, p. 4, disponible
sur :
http://www.Cerahgeneve.ch/files/3513/9506/6890/
Mémoire MASAH_NoutsoungaAK_La
rereinsertiondesenfantsmendiantsaNiamey_VF.pdf consulté le
15/07/2019.
2 KIENGE-KIENGE INTUDI R., Droit de la protection de
l'enfant, Université de Kinshasa, faculté de droit,
2016-2017, p. 26
3 MWANZO IDIN'AMINYE E., Cours de
méthodologie juridique, Université de Kinshasa,
faculté de droit, 2015, p. 65
4
Nous avions démontré dans le point
précédent, dans quelle condition se trouve au jour d'aujourd'hui,
les enfants exposés à la mendicité, laquelle condition ne
facilite pas leur survie. En effet, à la question de savoir, pourquoi
est-ce qu'il est établi une protection spéciale des enfants qui
s'exposent à la mendicité, nous répondons que
contrairement à la protection générale, qui vise
l'ensemble de la population infantile sans distinction, la protection
spéciale est établi pour couvrir les mesures à
caractère individuel destinées aux enfants dont la santé,
la sécurité, la moralité ou l'éducation sont mises
en danger du fait soit de certains handicaps physiques, soit du contexte
familial ou social de vie d'une part et d'autre part destinées aux
enfants dont l'alimentation n'est pas complètement assurée. Donc
de façon brève, la protection spéciale est établie
en vue de faire respecter les besoins fondamentaux des enfants en situation
difficile, en l'occurrence les enfants exposés à la
mendicité.
Par ailleurs, nous pensons qu'il y a un écart entre la
loi et la pratique dans la protection de l'enfant parce que ce domaine de la
protection de l'enfant est encore et toujours négligé en
République démocratique du Congo et particulièrement dans
la ville de Kinshasa. Compte tenu des multiples actions qui peuvent rendre
effective cette protection sociale spéciale mais qui ne font que tarder
de s'accomplir.
Les hypothèses ainsi décrites nous conduisent
à déterminer l'intérêt du sujet.
III. INTERET DU SUJET
Il est important de faire ressortir les intérêts
pratiques et théoriques de question à traiter. Non seulement
c'est un bon moyen d'animer le travail, mais c'est souvent l'occasion de
dégager des idées éclairant le sujet.3
Parler des enfants exposés à la mendicité
à l'heure où beaucoup d'enfants sont plongés dans la
délinquance juvénile s'avère très important.
Ce sujet revêt un intérêt qui est à la
fois personnel, théorique que pratique.
Le sujet ainsi délimité, nous allons cette
fois-ci détailler nos méthodes et technique de recherche.
5
Sur le plan personnel, ce travail nous permet d'approfondir
nos connaissances en droit de la protection de l'enfant car c'est notre domaine
de recherche de prédilection.
Sur le plan scientifique, il contribue à
l'évolution du droit de la protection de l'enfant qui est censé
prendre en compte certaines réalités de la vie sociale.
Sur le plan pratique, il milite pour l'effectivité de
la protection spéciale des enfants mendiants ou exposés à
la mendicité. A cet effet, il interpelle, le gouvernement pour la mise
en oeuvre des mécanismes susceptibles de faciliter cette protection.
Après avoir précisé l'intérêt,
il convient alors de dégager la délimitation du
sujet.
IV. DELIMITATION DU SUJET
Un travail qui se veut scientifique doit être
délimité dans le temps, dans l'espace et dans la
matière.
En ce qui concerne la délimitation dans le temps, notre
étude s'étend de 2009 jusqu'à nos jours car l'année
de 2009 est celle de la promulgation de la loi no 09/001 du 10
Janvier 2009 portant protection de l'enfant.
En ce qui concerne la délimitation dans l'espace, il
est nécessaire que les lecteurs se situent dans l'espace
géographique où notre étude a été
menée. Notre étude s'est déroulée dans la ville de
Kinshasa particulièrement, les communes de Lemba, Mont-Ngafula et de
Masina. Le choix de ces communes se justifie entre autre pour les raisons de
faisabilité.
Concernant la délimitation dans la matière, les
lecteurs doivent connaitre que notre étude découle du Droit de la
protection de l'enfant, particulièrement sur la protection sociale
spéciale des enfants exposés à la mendicité.
6
V. METHODES ET TECHNIQUES DE RECHERCHE
Les techniques et les méthodes nous ont
été très indispensables pour l'élaboration de la
présente recherche. Parlons d'abord des méthodes avant de dire un
mot sur les techniques.
En fonction des méthodes de recherche, la
méthode, pour L. ALBARELLO « est d'origine grecque, le
mot méthode signifie chemin. C'est l'ensemble de processus mis en
place pour parvenir à un résultat. Une méthode,
poursuit-il, répond à une question pratique : comment faire et
quoi entreprendre pour atteindre un but donné »4
Pour PAUL DELNOY qui se réfère à la philosophie, où
la méthode est définie comme la marche rationnelle de l'esprit
vers la vérité, la méthode est « une
manière de conduire la pensée, un ensemble de démarches
raisonnées, suivies, pour parvenir à un but
».5
Tout familier des recherches qualitatives en conviendra :
chaque chercheur tend fréquemment à développer sa propre
méthode en fonction de son objet de recherche, de ses objectifs, de ses
présupposés théoriques ou d'autres facteurs contingents.
Les méthodes et démarches d'analyse apparaissent dès lors
multiples.6
Dans le cadre de cette étude, nous avons opté
pour le choix de deux méthodes, la méthode juridique et la
méthode sociologique.
En ce qui concerne la méthode juridique, elle
découle de la démarche de l'exégèse
systématique, elle est également appelée « logique
» ou « structuraliste ». Elle consiste aussi à
dégager le sens d'un texte juridique à l'aide de son contexte
juridique ou législatif.7 Cette méthode nous a permis
de consulter les textes juridiques, les documents, et autres supports en
rapport avec notre étude.
4 ALBARELLO L., Apprendre à chercher.
L'acteur social et la recherche scientifique, Bruxelles,
2e édition De Boeck & Larcier, 2003, p. 14. Cité
par KIENGE-KIENGE R., op. cit., p. 25
5 DELNOY P., Eléments de
méthodologie juridique, coll. de la faculté de droit de
l'Université de Liège, Bruxelles, Larcier, 2005, p.
21.
6ALBARELLO L. et al., Pratiques et
méthodes de recherche en sciences sociales, Paris, éd.
Armand Colin, 1995, p. 83
7 DELNOY P., op. cit., pp. 163-164.
7
En rapport avec la méthode sociologique, elle consiste
à faire les descentes sur terrain. Cette méthode nous a permis de
faire des entretiens avec différentes personnes parmi lesquelles il y a
également les enfants exposés à la mendicité, en
vue d'obtenir les informations en rapport avec notre objet d'étude. Le
terme « sociologique », explique DELNOY, c'est pris ici dans une
acception très large, comme désignant tout ce qui fait
l'état d'une société à un moment donné : les
courants idéologiques, les courants sociaux, l'état des moeurs et
de la culture, la conception des rapports économiques,
etc.8
Ces faits sociologiques, qui constituent les sources
matérielles du droit, sont parfois contenus aussi dans l'exposé
des motifs. La mobilisation de cette méthode sociologique est
généralement rendue nécessaire par la considération
selon laquelle le droit ne s'autodétermine pas. Il suit les faits
sociologiques. Ceux-ci doivent être observés selon la
démarche des sciences sociales.9
S'agissant des techniques,10 Au sens, de notre
recherche, nous avions opté pour les techniques de l'observation directe
et celle de l'entrevue de recherche.
L'observation en situation est plus qu'une technique passive.
Elle consiste à prélever des informations qualitatives ou
quantitatives de manière systématique. On observe des individus
ou des groupes.11 Avant d'observer, on se doit de définir de
manière opérationnelle le comportement ciblé.12
Et dans le cadre de cette recherche, notre cible était les enfants qui
s'exposent à la mendicité.
Donald LONGD, décrit qu'on observe de deux
façons : en participant à la vie des sujets qu'on observe ou en
demeurent en retrait de leur vie. On observe, pour ainsi dire, de
l'intérieur ou de l'extérieur d'un groupe. Cet auteur poursuit
que pour retirer des informations
8 DELNOY P., op. cit., p. 175.
9 KIENGE-KIENGE INTUDI R., Op. cit., p. 38.
10 D'après Donald LONGD, en sciences
humaines, il y a six techniques de recherche ou moyens d'investigations. On
obtient de donner par l'une ou l'autre de ces techniques, qui peuvent aussi
être regroupés en deux classes selon les types de données
qu'elles produisent. Chacune de ces techniques de recherche libère soit
des données primaires, soit des données secondaires. Les
données primaires sont les nouvelles données obtenues au cours de
la recherche, alors que les données secondaires sont celles qui existent
déjà. Les six techniques de recherche sont : l'observation en
situation, l'entrevue de recherche, le questionnaire ou sondage,
l'expérimentation, l'analyse de contenu et l'analyse de statistiques.
Les deux dernières techniques sont classées dans les
données secondaires.
11 LONGD D., Introduction à la recherche,
Université de Moncton, Centre de Recherche et de Développement en
Education, p. 2, disponible sur
http://Longd@umoncton.ca
consulté le 12/08/2019
12 Idem, p. 3
8
pertinentes lors de sessions d'observation participante, vous
utiliserez des techniques de recherche complémentaires qui visent la
compréhension profonde du groupe étudié. Vous ferez appel
par exemple, à l'entrevue individuelle, entrevue de groupe et à
l'analyse des documents théoriques.13
L'entrevue de recherche est une technique d'interrogation. On
peut interroger un seul individu ou un groupe. Cette technique est souvent
utilisée pour connaître un sujet encore inconnu ou pour
approfondir un sujet méconnu. Ces entrevues visent à
établir des faits par rapport à un sujet, mais aussi à
comprendre ce que représentent ces faits pour les individus
interrogés.14 En guise de cette étude, notre entrevue
de recherche s'est opérée avec les enfants de la rue qui
sollicitent la générosité des passants, avec des
assistants sociaux, avec les responsables des structures privées de
prise en charge afin de mieux comprendre ce phénomène d'enfants
exposés à la mendicité.
Les données reçues de la recherche documentaire
et des entrevues nous ont permis de mettre en place le plan suivant.
VI. PLAN SOMMAIRE
Le présent travail comprend deux chapitres qui sont
précédés d'une introduction.
Le premier chapitre porte sur le cadre légal de la
protection spéciale de l'enfant exposé à la
mendicité et, subdivisé en deux sections dont la première
est axé sur le cadre normatif et la deuxième axée sur les
mécanismes de protection spéciale.
Le deuxième chapitre est axé autour de la
situation actuelle des enfants exposés à la mendicité et,
comprend deux sections dont la première consacrée sur
l'ineffectivité de la protection de l'enfant exposé à la
mendicité et la deuxième consacrée sur les défis
à relever pour l'effectivité de la protection spéciale de
l'enfant exposé à la mendicité.
Une conclusion met naturellement fin à ce travail.
13LONGD D. op.cit., p. 3 14 Idem, p.
4
9
CHAPITRE I. CADRE LEGAL DE LA PROTECTION SPECIALE DE
L'ENFANT EXPOSE A LA MENDICITE
Au sens de ce chapitre, il importe de dégager le cadre
normatif (section 1) et de déterminer les mécanismes de
protection spéciale (section 2)
Section 1 : CADRE NORMATIF
Aux termes de cette section, nous allons dégager ce
cadre normatif dans les instruments juridiques internationaux (§1) et dans
les instruments juridiques nationaux (§2)
§1. Au plan international
Au plan international, s'il faut décrire les
instruments juridiques qui abordent ou profitent à la protection
spéciale de l'enfant exposé à la mendicité, nous
relevons la Convention relative aux de l'enfant (A) et la Charte des droits et
du bien-être de l'enfant (B).
A. La Convention relative aux droits de l'enfant
1. De la responsabilité des parents et de la
protection spéciale
Les Etats parties s'emploient de leur mieux à assurer
la reconnaissance du principe selon lequel les deux parents ont une
responsabilité commune pour ce qui est d'élever l'enfant et
d'assurer son développement. La responsabilité d'élever
l'enfant et d'assurer son développement incombe au premier chef aux
parents ou, le cas échéant, à ses représentants
légaux. Ceux-ci doivent être guidés avant tout par
l'intérêt supérieur de l'enfant. Pour garantir et
promouvoir les droits énoncés dans la présente Convention,
les Etats parties accordent l'aide appropriée aux parents et aux
représentants légaux de l'enfant dans l'exercice de la
responsabilité qui leur incombe d'élever l'enfant et assurent la
mise en place d'institutions, d'établissements et de services
chargés de veiller au bien-être des enfants».15
De cette disposition s'ensuit la compréhension selon
laquelle l'Etat doit se rassurer que les parents puissent assumer leur
responsabilité vis-à-vis de leurs enfants ; or le fait pour les
enfants de se retrouver dans la rue et mendier prouvent à suffisance que
les
15 Article 18 point 1 et 2 de la Convention relative
aux droits de l'enfant
10
parents ont manqué à cette obligation de
responsabilité et, si cela est dû à leur incapacité
d'assurer la survie de leurs enfants faute de moyens, il faut alors une
assistance matérielle.
C'est pourquoi l'article 20 de la CDE dispose que «
Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de
son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut
être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une
aide spéciales de l'Etat.
Les Etats parties prévoient pour cet enfant une
protection de remplacement conforme à leur législation
nationale.
Cette protection de remplacement peut notamment avoir la
forme du placement dans une famille, de la kafalah de droit islamique, de
l'adoption ou, en cas de nécessité, du placement dans un
établissement pour enfants approprié. Dans le choix entre ces
solutions, il est dûment tenu compte de la nécessité d'une
certaine continuité dans l'éducation de l'enfant, ainsi que de
son origine ethnique, religieuse, culturelle et linguistique ».
En fonction de cette disposition, s'il faut tenir compte des
enfants qui s'exposent à la mendicité, déjà, l'on
note que les lieux auxquels ils mendient très souvent, ce n'est pas dans
leur milieu familial, ils s'exposent à cette mendicité en se
séparant de leurs responsables ; il y en a qui se séparent en vue
de solliciter la générosité des passants de façon
temporaire et d'autres se séparent de façon définitive,
c'est pourquoi, la Convention relative aux droits de l'enfant voudrait que ces
enfants jouissent d'une protection de remplacement. C'est pour cela l'Etat
congolais doit être toujours présent afin de coordonner ou
superviser cette protection spéciale de l'enfant.
B. La Charte africaine des droits et du bien-être de
l'enfant
En fonction de notre objet de recherche, il s'ensuit de notre
lecture de cette Charte deux éléments essentiels, à savoir
: la responsabilité des parents (1) et, la protection et assistance
spéciales (2)
11
1. De la responsabilité des
parents
Les Etats parties à la présente Charte assurent,
dans toute la mesure du possible, la survie, la protection et le
développement de l'enfant.16 Donc l'on comprend que la
République démocratique du Congo qui est aussi un des Etats
parties de cette Charte doit rendre stable en fonction de ses moyens la
protection de l'enfant.
Par ailleurs, l'article 20 point 1 de cette même Charte
prescrit que « Les parents ou autres personnes chargées de
l'enfant sont responsables au premier chef de son éducation et de son
épanouissement et ont le devoir :
a) de veiller à ne jamais perdre de vue
l'intérêt supérieur de l'enfant ;
b) d'assurer, compte tenu de leurs aptitudes et de leurs
capacités financières, les conditions de vie indispensables
à l'épanouissement de l'enfant ;
c) de veiller à ce que la discipline domestique soit
administrée de manière à ce que l'enfant soit
traité avec humanité et avec le respect dû à la
dignité humaine. »
De cette disposition, l'on comprend que les parents ou autres
personnes chargées de l'enfant sont tenus de veiller à ce que
l'intérêt supérieur de l'enfant soit respecté de
façon à ne pas pousser l'enfant un jour, à s'exposer
à la mendicité, ils sont cependant tenus également
d'assurer les conditions de vie qui facilitent l'épanouissement de
l'enfant et l'empêchent à se placer dans une situation qui
pourrait le conduire à solliciter un secours ailleurs.
2. De l'assistance et de la protection
spéciale
S'agissant de l'assistance et de la protection
spéciales, les Etats parties à la présente Charte, compte
tenu de leurs moyens et de leur situation nationale, prennent toutes les
mesures appropriées pour :
a) assister les parents ou autres personnes responsables de
l'enfant, et en cas de besoin, prévoir des programmes d'assistance
matérielle et de soutien, notamment en ce qui concerne la nutrition, la
santé, l'éducation, l'habillement et le logement ;
16 Article 5 point 2 de la Charte africaine des droits et du
bien-être de l'enfant
12
b) assister les parents ou autres personnes responsables de
l'enfant pour les aider à s'acquitter de leurs tâches
vis-à-vis de l'enfant, et assurer le développement d'institutions
qui se chargent de donner des soins aux enfants.17
De ce qui précède, il est fait mention
d'assister les parents ou autres personnes responsables de l'enfant, en
établissant des programmes d'assistance sur les besoins
élémentaires de l'enfant, une obligation qui incombe aux Etats
parties, de telles dispositions, lorsqu'elles sont prises en compte en aidant
les parents de s'acquitter de leurs tâches, diminueraient le nombre des
enfants qui s'exposent à la mendicité, tout simplement parce que
les parents sont butés par le contexte de précarité.
L'article 25 de la Charte dispose que « 1. Tout
enfant qui est, en permanence ou temporairement, privé de son
environnement familial pour quelque raison que ce soit, a droit à une
protection et une assistance spéciales.
3. Les Etats parties à la présente
Charte s'engagent à veiller à :
a) ce qu'un enfant qui est orphelin ou qui est
temporairement ou en permanence privé de son milieu familial, ou dont
l'intérêt exige qu'il soit retiré de ce milieu,
reçoive de soins familiaux et remplacement, qui pourraient comprendre
notamment le placement dans un foyer d'accueil, ou le placement dans une
institution convenable assurant le soin des enfants ;
b) ce que toutes les mesures nécessaires soient
prises pour retrouver et réunir l'enfant avec les parents là
où la séparation est causée sur un déplacement
interne et externe provoqué par des conflits armés ou des
catastrophes culturelles » .
De cet article sus-évoqué, la mention est faite
sur la protection et l'assistance spéciales dont tout enfant est
censé jouir lorsqu'il est privé de son environnement familial
pour quelque raison que ce soit, or les enfants qui s'exposent à la
mendicité, vont chercher du secours dans la rue, en se séparant
également de leur famille. Donc dans la compréhension de cette
disposition, ils ont également droit à une protection et
assistance spéciales. Par enchainement, il faudra alors que l'Etat
congolais qui a également ratifiée cette Charte puisse faire de
son possible pour accorder des soins familiaux adéquats et remplacements
nécessaires
17 Article 20 point 2 de la Charte africaine des droits et du
bien-être de l'enfant
13
soit dans un foyer d'accueil, soit dans une institution
convenable pour assurer selon notre objet de recherche, des soins qu'il faut
pour un enfant qui pour une raison ou une autre s'est séparé de
ses parents ou des autres personnes qui lui sont responsables pour aller
s'exposer à la mendicité.
De façon claire, la Charte parle de la mendicité
des enfants, seulement lorsqu'ils sont utilisés, dispose l'article 29
point b en ces termes : « Les Etats parties à la
présente Charte prennent les mesures appropriées pour
empêcher l'utilisation des enfants dans la mendicité.
»
Ayant découvert ce qui est prévu au niveau
international sur la question de cette protection spéciale, passons
alors au cadre normatif au plan national.
§2. Au plan national (dans les instruments
juridiques nationaux)
Dans ce paragraphe, nous allons comme nous l'avions fait au
paragraphe précédent, indiquer les instruments juridiques
nationaux qui profitent à la personne de l'enfant exposé à
la mendicité, d'abord nous avons la Constitution (A) et la Loi
n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant (B).
A. La Constitution
La Constitution de la République démocratique du
Congo telle que modifiée par la Loi n°11/002 du 20 janvier 2011
portant révision de certains articles de la Constitution de la RDC du 18
février 2006 consacre dans son article 123 point 16 que « sans
préjudice des autres dispositions de la présente Constitution, la
loi détermine les principes fondamentaux concernant la protection des
groupes vulnérables ».
Cette disposition constitutionnelle est claire qu'il revient
à la loi de déterminer les principes fondamentaux des groupes
vulnérables, nous signalons que par groupes vulnérables l'on peut
entendre l'ensemble des personnes, voire des animaux qui peuvent être
blessés aisément, or les enfants également, en vertu de
leur immaturité physique et même intellectuelle peuvent facilement
être blessés. Voilà pourquoi, il y a une législation
qui les protège.
14
Il s'agit alors de la loi portant protection de l'enfant qui
consacre les mesures relatives à un des groupes vulnérables en la
personne de l'enfant.
B. La Loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant
protection de l'enfant
Au regard de l'article 62 point 1 de la loi n°09/001 du
10 janvier 2009 portant protection de l'enfant voici ce qui est disposé
: « Est considéré comme en situation difficile et
bénéficie d'une protection spéciale, notamment : 1.
l'enfant rejeté, abandonné, exposé à la
négligence, au vagabondage et à la mendicité ou
trouvé mendiant, vagabond ou qui se livre habituellement au vagabondage
ou à la mendicité ».
Or, au sens de la présente loi, il faut en entendre par
enfant en situation difficile, comme dispose l'article 2 point 4 «
l'enfant qui ne jouit pas de ses droits fondamentaux et qui n'a pas
accès aux services sociaux de base tels que la santé, le
logement, l'alimentation et l'éducation ».
En effet, il ressort de l'article 63 alinéa
1er de cette loi que « La protection spéciale se
réalise à travers les mécanismes de tutelle de l'Etat tels
que prévus par la loi, le placement social et autres mécanismes
de prise en charge appropriés. »
Et dans le cadre de notre recherche, après avoir
interrogé certains de ces enfants qui s'exposent à la
mendicité, les réponses qui nous ont été
donnés sur les raisons qui les poussent à mendier, nous ont
conduit à réaliser que plus souvent c'est le contexte de
précarité de leurs parents ou autres personnes responsables d'eux
qui les entraine dans ce mode de vie, pourtant l'article 69 de la loi portant
protection de l'enfant dispose que « Les parents incapables d'assurer
la survie de leur enfant bénéficient d'une assistance
matérielle ou financière de l'Etat. Un arrêté
interministériel des ministres ayant dans leurs attributions, la
famille, l'enfant et les affaires sociales fixe les conditions d'intervention
de l'Etat. »
Il est évident de signaler qu'un enfant qui s'expose
à la mendicité en tant qu'enfant en situation difficile, comme
tout autre enfant, il a des droits fondamentaux parmi lesquels nous pouvons
citer :
1. Le droit à la vie de l'enfant (article 13 de la
loi)
2. Le droit de l'enfant à un milieu familial (article 17
de la loi)
3. Le droit de l'enfant à jouir du meilleur
état de santé possible (article 21 de la loi).
4. Le droit de l'enfant de bénéficier de la
sécurité sociale (article 22 de la loi)
15
5. Le droit de l'enfant à un niveau de vie suffisant
pour permettre son développement intégral (article 23 de la
loi)
6. Le droit de l'enfant à l'éducation (article
24 de la loi)
7. Le droit de l'enfant à la pension alimentaire
(article 25 de la loi)18
Nous venons de citer dans le paragraphe ci-dessus certains
mécanismes de protection spéciale de l'enfant exposé
à la mendicité, au point suivant, il est donné une
description de chaque mécanisme de protection spéciale.
Section 2 : LES MECANISMES DE PROTECTION SPECIALE
En rapport avec les mécanismes de protection
spéciale, nous distinguons selon qu'il s'agit de mécanismes
institutionnels (§1) et de mécanismes non institutionnels
(§2)
§1. Mécanismes institutionnels
En fonction de notre objet de recherche les mécanismes
institutionnels comprennent la tutelle de l'Etat (A) et le placement social
(B)
A. De la tutelle de l'Etat
La tutelle est une charge civile déférée
à une personne par loi en vue d'administrer gratuitement la personne et
les biens d'un mineur.19
La tutelle de l'Etat est entendue comme la dévolution
à l'Etat de l'autorité sur la personne et sur les biens d'un
mineur, alors que l'article 237 du Code de la famille se contente de dire que
la tutelle de certains mineurs est déférée à
l'Etat. Ces mineurs sont appelés « pupilles de l'Etat
» (article 237 CF).
Au point suivant nous nous décrit les conditions
d'ouverture de la tutelle de l'Etat.
18 KIENGE-KIENGE INTUDI R., op. cit., p. 120.
19 NGWABIKA FUNDA J., Droit civil : les personnes,
Kinshasa, première édition ABCPrint, 2015, p. 151.
16
1. Condition d'ouverture de la tutelle de
l'Etat
Conformément à l'article 239 du Code de la
famille, cette tutelle n'est ouverte qu'en faveur des mineurs dont les
père et mère sont inconnus, des mineurs abandonnés, des
mineurs orphelins sans famille et, le cas échéant, des mineurs
dont le ou les auteurs sont déchus de l'autorité parentale. Ils
sont placés sous la tutelle de l'Etat conformément aux
dispositions des articles 246 à 275.
Sont considérés comme mineurs de père et
mère inconnus, les enfants trouvés ainsi que les mineurs dont la
filiation n'est établie envers aucun de leurs deux auteurs, sauf s'ils
ont été adoptés ou s'ils ont un père juridique.
2. Composition de la tutelle de
l'Etat
Il est créé un Conseil de tutelle dans chaque
commune, secteur ou chefferie. Toutefois, le Gouverneur de Province ou de la
Ville de Kinshasa peut soit créer deux ou plusieurs conseils de tutelle
par territoire ou commune, soit regrouper deux ou plusieurs communes, secteurs
ou chefferies sous un seul conseil de tutelle. Il détermine alors la
composition de ces conseils par voie d'arrêté pouvant
déroger au prescrit de l'article 263 ci-dessous. Il désigne le
Tribunal pour enfant compétent pour connaître de litiges se
rapportant à la tutelle des pupilles. (Art 262 CDF). Le conseil de
tutelle est l'organe essentiel dans la tutelle dévolue à l'Etat.
Au regard de l'article 263, le conseil de tutelle est composé :
1. Du bourgmestre, du chef de secteur ou de chefferie, ou de
leur représentant, président de droit ;
2. D'un officier du Ministère public ou de son
représentant;
3. De cinq personnes ci-après ou leurs
suppléants désignés par le Gouverneur de
province ou de la ville de Kinshasa :
- Un délégué de la division provinciale ou
de la ville de Kinshasa ;
- Un délégué de la division provinciale en
charge des affaires sociales ;
- Un délégué de la division provinciale en
charge de la justice ;
- Un délégué de la confession religieuse la
plus représentative du milieu ;
- Un délégué de la division provinciale de
la santé.
20 LAPRISE Y., Cadre de référence
sur le retrait et le placement d'un enfant, p. 4, disponible sur
http://observatoiremaltraitance.ca/.../Cadre_...
Consulté le 15/07/2019
17
Le mandant des personnes visées au point 3 de
l'alinéa 1er du présent article, dure aussi longtemps
qu'il n'y a pas été mis fin par décision de
l'autorité qui les a désignées.
B. Du placement social
Placer un enfant dans un milieu de vie substitut, c'est
confier une partie plus ou moins importante de la responsabilité de son
éducation à des substituts parentaux. Dans le contexte de
l'intervention en centre jeunesse, le placement d'un enfant constitue un choix
d'orientation et son but reste le retour dans le milieu familial. Cette
activité exige donc une décision réfléchie,
planifiée et préparée qui ne peut se faire qu'avec la
contribution des principaux acteurs impliqués dans le devenir de
l'enfant soit, le jeune lui-même (dans la mesure de ses
capacités), ses parents, la famille élargie, les
différents intervenants engagés dans la démarche. Lorsque
le retour dans le milieu familial apparaît impossible, le projet de vie
de l'enfant placé doit rapidement être
clarifié.20
L'arrêté ministériel n°
RDC/0248/GC/CABMIN/
AFF.SAH.SN/O9 du 19 novembre 2009
portant règlementation du placement social des enfants en situation
difficile règlemente le placement social des enfants en situation
difficile nécessitant une protection spéciale conformément
à l'article 62 de la loi de la protection de l'enfant. On entend par
« placement social » : une décision prise par ordonnance du
juge pour enfants à la requête de l'Assistant Social (A.S) de
garder l'enfant soit dans sa famille biologique ou d'accueil, soit en milieu
alternatif sous le contrôle et le suivi régulier du juge et de
l'A.S., aux fins de réaliser le motif déclaré (art. 5).
Le placement social des enfants en situation difficile a pour
objectifs :
- de faire bénéficier à l'enfant en
situation difficile d'une protection spéciale ; - de faciliter le
processus de la réinsertion socio-familiale (art. 2)
18
L'Assistant Social quant à lui est défini comme
toute personne appartenant au corps des Assistants sociaux tel que
défini à l'article 76 de la Loi n°09/001 du 10 janvier 2009
portant protection de l'enfant.21
La prise en charge de l'enfant en dehors de la famille, son
milieu naturel de croissance, doit être toujours considérée
comme une alternative momentanée aux défaillances de la famille
(restreinte ou élargie). Elle a pour objectif de restaurer la
sécurité, le bien-être et le développement complet
et harmonieux de l'enfant, en attendant qu'une solution permanente et durable
(réinsertion sociale) puisse intervenir.
La structure d'accueil doit respecter les normes de
qualité dans le processus de prise en charge éventuelle. Lorsque
la solution la meilleure est le placement dans une maison de transit ou une
famille d'accueil, la prise en charge de l'enfant doit se faire le proche de
son environnement habituel. Malgré cela, toutes les actions à
entreprendre doivent viser à terme, la réunification familiale
et/ou la réinsertion sociale comme le but ultime.
Tout en évitant de placer l'enfant au-dessus du
standard des conditions supportables par un ménage moyen de son
environnement habituel, le Centre d'hébergement doit assurer à
l'enfant les conditions minimales de prise en charge. Quelle que soit la nature
de l'institution ou du lieu de placement de l'enfant en situation difficile, le
placement social demeure une mesure provisoire dont la finalité est la
protection, la récupération, la rééducation, la
préparation et l'orientation de l'enfant vers sa famille pour la
réunification et la réinsertion sociale.22
1. Principaux intervenants ou organes
compétents de placement social
Le placement social se réalise avec le concours des
principaux intervenants ci-
après :
a. L'enfant bénéficiaire de la
décision du placement social
L'enfant qui fait l'objet de la demande du placement social
doit être considéré comme acteur principal dans la mesure
où cette mesure vise en tout état de cause son
intérêt supérieur. Tenant compte de son degré de
maturité, son avis sera sollicité et prise en compte.
21IDZUMBUIR ASSOP J., La loi de la
protection de l'enfant en RD Congo, analyse critique et perspectives,
Kinshasa, édition CEDESURK, 2013, p. 85.
22 MINAS (RDC), Protocole national de placement social,
DEP/SGAS/MINAS, Janvier 2017, pp. 11-12
19
La connaissance parfaite de sa situation sera
réalisée notamment par des entretiens et des enquêtes
sociales autour de son problème en tant qu'enfant en situation
difficile, en vue d'une documentation individuelle fouillée. Les
données individuelles (identités, histoire de l'enfant,
données médicales, familiales et sociales, scolarité,
fratrie, aspirations...) doivent être notées et consignées
dans un dossier individuel qui sera tenu régulièrement par
l'assistant social et gardé dans un endroit sécurisé. Sa
collaboration est requise dans l'avancée de son dossier au risque
d'aboutir à des échecs, au motif d'absence de collaboration ou de
divergence d'intérêts entre les intervenants de la protection de
l'enfant.23 C'est souvent le cas des enfants trouvés en
rupture familiale ou sans responsable direct.
b. L'Assistant social
L'assistant social est la plaque tournante dans le processus
du placement social des enfants en situation difficile. C'est le professionnel
de l'Etat autour de qui gravitent toutes les opérations de placement
social en collaborant tour à tour avec tous les autres intervenants pour
l'intérêt supérieur de l'enfant. Il constitue le dossier de
l'enfant, décide de son placement social après écoute et
étude du dossier, sollicite l'homologation de sa décision de
placement auprès du juge pour enfants. Il conçoit, de
façon participative, le plan de placement, choisit le lieu de placement
selon le degré de maturité de l'enfant, mène les
entretiens et enquêtes sociales de suivi en vue d'une
réunification familiale et/ou d'une réinsertion sociale et
transmet régulièrement les rapports auprès du juge pour
enfants pour une décision finale ou la révision de la mesure.
C'est donc lui, l'acteur essentiel dans ce processus.
c. Le Juge pour Enfants
Le juge pour enfants est celui qui prend en définitive
l'ordonnance de placement social. Il décide de la révision ou, le
cas échéant, de la sortie de l'enfant du lieu de placement, sur
base des rapports de suivi de l'assistant social.24
d. Les organes de protection sociale en
général et les structures locales de protection de
l'enfant
Tous les organes de protection sociale de l'enfant tels que
reconnus par l'article 74 de la Loi portant protection de l'enfant (LPE), plus
précisément les organismes et institutions agréées
publiques ou privées agréées du secteur de l'enfant et
toutes les initiatives
23 MINAS (RDC),, op.cit., p. 29
24 Idem, p. 30
20
locales tels que les réseaux communautaires de
protection de l'enfant sont tenus de collaborer dans ce processus. Ces
différents organes sont, pour les uns, la porte d'entrée qui
décèle l'enfant en situation difficile et qui l'oriente vers
l'assistant social pour une prise en charge pouvant aboutir à un
placement social ; pour les autres, ils interviennent dans la prise en charge
comme lieu de placement social de ces enfants. Outre la tenue et la garde en
lieu sûr du dossier individuel de l'enfant, ils doivent élaborer
un plan de prise en charge de l'enfant ou projet individualisé,
régulièrement suivi par l'assistant social.25
Selon la professeure IDZUMBUIR ASSOP, on apprend des mesures
de mise en oeuvre que « Seul le juge naturel pour enfants,
c'est-à-dire : le juge du ressort où évolue
régulièrement l'enfant, peut ordonner le placement social »,
que seul l'A.S. tel que défini par l'arrêté
ministériel n° RDC/0248/GC/CABMIN/
AFF.SAH.SN/09 du 19 novembre 2009
portant règlementation du placement social des enfants en situation
difficile, peut saisir le juge des enfants (art. 19, 20, 21). Pour ce qui est
de la procédure, « tout enfant trouvé en situation
difficile nécessitant une mesure de placement est orienté vers
l'A.S. du ressort qui réalise le placement social en
considération de l'opinion de l'enfant » (art. 16). L'article
11 va plus loin en indiquant que, outre le consentement de l'enfant, il faut
aussi celui de sa famille d'origine.
Lorsque le placement concerne un enfant en rupture familiale,
la décision est prise par l'A.S. qui en fait rapport au juge pour
enfants du ressort en vue d'obtenir l'homologation (art. 11). Mais si l'enfant
intéressé se trouve entre les mains de ses parents ou tuteurs, la
décision du placement social est prise par le juge pour enfants sur
requête de l'assistant social. Le placement sera exécuté
par le même assistant social du ressort du T.E. C'est alors, encore une
fois, que l'on pourrait se poser les questions ci-après : Quid, lorsque
le juge refuse d'homologuer la décision du placement
décidé par l'assistant social ? Quid, lorsque l'enfant et/ou sa
famille d'origine refuse d'exécuter la mesure du placement ?26
Par ailleurs, l'on constate que le législateur s'est
appesanti uniquement sur le placement de l'enfant en rupture familiale. Or,
l'article premier de l'arrêté sous examen édicte que «
le présent arrêté règlemente le placement social
des enfants en situation difficile nécessitant une protection
spéciale ». Ces enfants ne sont autres que ceux
énumérés à l'article
25 MINAS (RDC),, op.cit., p. 31
26 IDZUMBUIR ASSOP J., op. cit., p. 85.
21
62 de la LPE et qui ne sont pas tous en rupture familiale
(exemples : l'enfant handicapé, l'enfant orphelin).27
2. Des lieux et conditions de placement a. Lieux de
placement
Aux termes de l'article 64 de la LPE, les lieux de placement des
enfants en
situation difficile en République démocratique du
Congo sont :
- La famille élargie de l'enfant ;
- Une famille d'accueil ;
- Un foyer autonome ;
- Une institution publique à caractère social ;
ou
- Une institution privée agréée à
caractère social.
Alors que l'article 10 des mesures d'application du placement
social sous examen
énumère comme lieux de placement :
- La famille biologique de l'enfant,
- La famille élargie,
- La famille d'accueil et,
- L'institution publique ou privée agréée
à caractère social, ou encore
- Dans un foyer autonome.
Les structures de placement ci-dessus
énumérées sont définies par des articles 64
à 68 de la LPE. Cependant, on s'arrêtera quelque peu sur « le
foyer autonome » qu'on appelle dans d'autres cieux foyer
d'hébergement pour jeunes-adultes.
A ce sujet, on note quelques contradictions entre les
dispositions de la LPE et les mesures d'application. Pour la loi, «
est appelé foyer autonome, une structure composée et
entretenue par un groupe d'enfants placés sous la supervision d'une
institution publique ou privée agréée à
caractère social » (art. 66), tandis que la
règlementation portant mesures d'application traite des enfants
âgés de plus de 15 ans, regroupés par l'Assistant Social,
en tenant compte de leur âge, sexe et niveau de maturité. Un
couple référant pour l'accomplissement et le suivi des enfants
est attaché à la structure (art. 12). Notez que cette formule est
la meilleure. Comme conditions communes aux lieux de placement, l'article 7
des
27 IDZUMBUIR ASSOP J., op. cit.,, pp. 85-86
22
mesures d'application apprend qu'aucun lieu de placement ne
peut accueillir plus de trois enfants sauf, en cas de fratrie.28
b. Conditions de placement social
Généralement en RDC, elles varient d'un lieu
à un autre mais toutes conditionnent la réussite de
l'opération par ailleurs, ces conditions doivent garantir à
l'enfant les droits à la survie, à la protection, au
développement et à la participation.
1) Placement au sein de la famille
élargie
Généralement en RDC ; les démarches du
placement des enfants en situation
difficile, chez les parents proches ou dans une famille
élargie, passent par les entretiens et la
médiation de l'Assistant social avec la famille. Les
critères d'éligibilité pour les proches
parents ou famille élargie sont les suivants :
- Etre un couple marié depuis au moins 5 ans ;
- Jouir d'une bonne moralité, d'une bonne santé
mentale, physique et psychologique ;
- Justifier d'un minimum vital et matériel à
accueillir un enfant ;
- Jouir d'un bon témoignage dans sa communauté de
résidence et dans son milieu
professionnel ;
- Manifester l'intérêt d'accueillir l'enfant sans
intérêt professionnel ;
- Etre d'accord d'accepter les inscriptions de suivi à
domicile ;
- Avoir l'opinion des enfants ;
- Accepter de traiter l'enfant accueilli à tous
égards comme étant votre propre enfant ;
- Accepter de participer à des séances de
renforcement des capacités (échanges
d'expériences, mentorat, formations...) dans le cadre de
droits, de la protection et du
bien-être des enfants ;
- Ne pas accueillir plus de deux enfants, sauf en cas de
fratrie.29
2) Placement en famille d'accueil
Les conditions requises pour ce type de placements sont les
suivants :
- Avoir signé au préalable un contrat de
partenariat avec le MINAS ou le Ministère de tutelle ;
28 IDZUMBUIR ASSOP J., op. cit., p. 87.
29 MINAS (RDC), op. cit., p. 32
23
- Etre un couple marié depuis au moins 5 ans ;
- Disposer de la photocopie de l'acte de mariage ;
- Justifier d'un minimum vital ;
- Jouir d'un bon témoignage ;
- Etre en bonne santé mentale, psychiatrique et
psychologique ;
- Disposer d'un certificat d'aptitude physique ;
- Manifester le désir d'accueillir l'enfant sans
intérêt personnel tel que stipulé dans le
contrat de partenariat pré rappelé ;
- Traiter l'enfant avec tous les égards comme étant
l'enfant de la famille ;
- Disposer de la copie de la carte d'identité de la
mère (ou de son tuteur) et de du père
(le cas échéant) ;
- Disposer d'autres documents à fournir par le demandeur
et son conjoint ci-après :
extrait de naissance, photocopie de la carte d'identité
nationale, certificat médical de
bonne santé attestant que le demandeur (la conjointe) est
apte à accueillir un enfant en
placement familial, attestation de salaire, 2 photos
d'identité, une évaluation de la
situation sociale et économique et un rapport d'aptitudes
psychologiques des
demandeurs rédigé par un assistant social et un
psychologue.30
3) Placement en foyers autonomes
Le placement en foyers autonomes exige les conditions
ci-après :
- Tenir compte de la maturité des enfants ;
- Etre des enfants de même sexe et presque de même
âge ;
- Etre âgé de 15 ans et plus ;
- Tenir compte de l'évaluation des moyens de survie ;
- Etre sous supervision d'une institution publique ou
privée agréée à caractère social ;
- Le couple référant, désigné par le
MINAS, doit accepter de travailler en collaboration
avec l'assistant social ou l'institution de protection de
l'enfant.
4) Placement dans une institution publique à
caractère social
Actuellement, les institutions publiques à
caractère social opérationnelles sont très rares en RD
Congo. Néanmoins, pour celles qui les sont encore, les conditions
reprises dans le document des normes et standards de prise en charge des
enfants vulnérables en RDC doivent
30 MINAS (RDC), op. cit.,, pp. 33-34
24
être mutatis mutandis réunies, sinon
jugées satisfaisantes avant d'y placer les enfants en situations
difficile nécessitant une protection spéciale.
Les conditions sont les suivantes :
- Avoir deux catégories de personnel en son sein :
personnel qualifié revêtu de la qualité
d'assistant social et un autre technique ; - Disposer d'une
autorisation d'ouverture/fonctionnement délivrée par
l'autorité
compétente et tous les autres documents
d'enregistrement,
- Disposer d'une infrastructure viable.31
5) Placement dans une institution privée
agréée à caractère social
Il s'agit ici des structures de prise en charge des enfants en
situation difficile mises en place par des agences de coopération, des
organisations non gouvernementales, de confessions religieuses ou de organismes
privée et autres personnes de bonne volonté en vue de soulager
leurs peines (enfants en situation difficile). Il s'agit, notamment et non
exclusivement des refuges pour placement d'urgence, de centre de transit dans
les situations d'urgence et tous les autres établissements d'accueil
à cout ou à long terme, y compris les centres
d'hébergement.
Ces structures sont aussi tenues de réunir, sinon
atteindre le seuil de satisfaction des conditions reprises dans les documents
des normes et standards de prise en charge des enfants vulnérables en
RDC avant d'y placer les enfants en situation difficile nécessitant une
protection spéciale.
Les conditions requises sont les suivantes :
- Avoir à son sein deux catégories des personnes
: personnel qualifié revêtu de la qualité d'assistant
social et/ou d'éducateur social spécialisé et un autre
technique ;
- Disposer d'une autorisation d'ouverture/fonctionnement
délivré par l'autorité compétente et tous les
documents d'enregistrement ;
- Disposer d'une infrastructure viable.32
31 MINAS (RDC), op. cit., pp. 34-35
32 MINAS (RDC), op. cit.,, p. 35
25
L'article 8 impose l'obligation chaque enfant placé,
d'avoir un dossier contenant des fiches portant des renseignements sur
l'identité, l'enquête sociale, l'information d'ordre
médical et une fiche de suivi.
En ce qui concerne le placement familial proprement dit, outre
le consentement de la famille d'origine de l'enfant et de l'enfant
lui-même, la famille d'accueil doit être un couple marié
depuis au moins cinq ans ; justifier d'un minimum vital ; jouir d'un bon
témoignage ; être en bonne santé mentale et physique ;
manifester le désir d'accueillir l'enfant sans intérêt
personnel accepter le contrôle par des inspecteurs ; avoir l'opinion des
enfants de la famille d'accueil.33
D'après le professeur KIENGE-KIENGE comme prévu
par la loi, le placement se réalise selon les deux modalités
suivantes :
- Placement social réalisé par
l'assistant social et homologué par le juge des
enfants (article 63, alinéa 2)
Si l'enfant en situation difficile n'est pas entre les mains
de ses parents ou de son tuteur, son placement social est réalisé
directement par l'Assistant social. Il doit prendre en compte l'opinion de
l'enfant concerné selon son degré de maturité et son
âge. Et après l'avoir placé, il doit faire rapport
immédiatement au juge des enfants qui doit prendre une décision
(ordonnance) d'homologation de ce placement social.34
Placement ordonné par le juge des enfants sur
requête de l'assistant social (article 63, alinéa 3)
Si l'enfant intéressé est entre les mains de ses
parents ou tuteur, la décision de placement social est ordonnée
par le juge pour enfants, saisi par une requête de l'assistant
social.35
Ayant décrit les mécanismes institutionnels,
nous allons maintenant aborder les mécanismes institutionnels.
33 IDZUMBUIR ASSOP J., op. cit., p. 88.
34 KIENGE-KIENGE INTUDI J., op cit., p. 126.
35 Idem.
36 KIENGE-KIENGE INTUDI J., op cit., p. 126.
37 MUKENE P, BARANYIZIGIYE R. et all, La prise en charge
des enfants de la rue au Burundi, Bujumbura, Février 2014, p. 20.
disponible sur https : //www.confemen.org-docs-treaties-crc.40 consulté
le 15/07/2019
26
§2. LES MECANISMES NON INSTITUTIONNELS
Dans ce paragraphe nous avions repartis ces mécanismes
en deux, selon qu'il s'agit des autres mécanismes de prise en charge (A)
et des mécanismes d'identification et d'accueil (B)
A. Les autres mécanismes de prise en
charge
Dans cette rubrique, on pourrait mentionner la prise en
charge d'une enfant qui est devenue enceinte avant d'avoir achevé son
cycle d'études secondaires (les filles mères). La loi consacre
à l'article 68, le droit de cet enfant de reprendre les études
compte tenu de ses aptitudes individuelles.36
B. Les mécanismes d'identification et
d'accueil
Dans les activités réalisées par Pascal
MUKENE, Rodolphe BARANYIZIGIYE et les autres, en ce qui concerne les
mécanismes d'identification et d'accueil des ESR, ils ont voulu savoir
comment se fait l'identification de ces enfants. Dans certains cas, ce sont les
enfants de la rue qui se déplacent pour frapper à la porte des
centres d'accueil, dans d'autres cas, ce sont les responsables des centres
d'accueil qui vont sur le terrain (dans la rue), de jour comme de nuit, pour
identifier les bénéficiaires éventuels de la prise en
charge. Dans les deux cas, une période d'échange et
d'écoute est nécessaire pour établir les modalités
d'accueil et de prise en charge.37
Les structures privées identifient les enfants en
situation difficile à travers les organes chargés d'exercer cette
fonction. Lors de notre descente dans la structure de la LIZADEEL de
MONT-NGAFULA, l'assistante sociale responsable de cette structure nous a
révélé ce qui suit : « cette structure a neuf
bureaux de proximité et, que c'est à partir de centre
d'assistance judiciaire et psychosocial (CAJP) que l'on répertorie les
enfants en situation difficile, en l'occurrence les enfants qui s'exposent
à la mendicité, lesquels enfants sont identifiés dans les
marchés, les rues, les boulevards, dans des endroits retirés
que
27
certains enfants vont s'installer. Par après,
intervient la phase de décision qui permet aux responsables de CAJP de
décider où ils vont orienter ces enfants, s'il faut les prendre
en charge ou pas. La prise en charge se fait d'un commun accord avec la famille
de l'enfant si celle-ci est connue et, elle s'effectue au respect de la loi.
Une fois que les enfants sont identifiés, on les remet à la
disposition des spécialistes tels que les psychologues, les psychiatres
etc. qui les accompagnent pendant quelques séances, en vue de les
comprendre et savoir leurs besoins. Ensuite, ils procèdent
à leur encadrement. »38
Ayant ainsi décrit la prévision légale de
la protection spéciale de l'enfant exposé à la
mendicité, nous passons maintenant au second chapitre de notre
mémoire qui porte sur la situation actuelle de ces enfants.
38 Agent de LIZADEEL, communication personnelle, commune de
Mont-Ngafula à 11 heure.
28
CHAPITRE II. SITUATION ACTUELLE DES ENFANTS EXPOSES A
LA
MENDICITE
Dans un contexte national où les familles deviennent de
plus en plus pauvres et vulnérables et où la solidarité
traditionnelle est en perdition (perte des valeurs traditionnelles d'entraide,
de solidarité et de communautarisme), il apparaît que les familles
sont sous tensions et certains parents n'arrivent plus à assumer toute
leur responsabilité auprès de leurs enfants en vue du respect des
droits élémentaires. La mauvaise gestion de ces tensions conduit
plusieurs enfants dans la rue, en rompant dans de nombreux cas, totalement ou
partiellement les liens avec leurs familles.39
Ce chapitre comprend deux sections en vertu duquel nous
parlerons de l'ineffectivité de la protection de l'enfant exposé
à la mendicité (section 1) et de défis à relever
pour l'effectivité de la protection spéciale des enfants
exposés à la mendicité (section 2)
Section 1 : Ineffectivité de la protection de
l'enfant exposé à la mendicité
Nous disons que la protection de l'enfant exposé
à la mendicité est ineffective parce que nous ne voyons pas les
effets réels de cette protection d'autant plus que les enfants sont
régulièrement dans les lieux publics, en train de pratiquer la
mendicité qui d'après KELLENS et BIHAIN, est le fait de demander
un secours pour soi-même ou pour ses proches, sans contrevaleur
appréciable.40 Et dans ce secours que les enfants recherchent
aux passants, cela les expose en même temps au danger.
C'est pourquoi, dans cette section nous allons porter notre
attention sur les formes d'oppressions subies par les enfants exposés
à la mendicité (§1) et les conséquences de ces
oppressions (§2)
39 MINAS (RDC), « Normes et standards de prise en
charge des enfants vulnérables en République Démocratique
du Congo » septembre 2014, p. 13.
40 KELLENS G. et BIHAIN L., Protection de la jeunesse,
Université de Liège, faculté de droit, 1995, p. 133
29
§1. Les formes d'oppressions subies par les enfants
exposés à la mendicité
Nous pouvons distinguer généralement deux formes
d'oppression, d'après les effets qu'elles entrainent sur les jeunes :
les formes d'oppression physique et les formes d'oppression morale. Mais il
faut auparavant décrire un peu le mode de vie de ces enfants de la rue,
en vertu de quoi, notre regard a été porté sur ceux qui
s'exposent à la mendicité.
Yves MARGUERAT et Danièle POITOU donnent la description
exacte de ces enfants de la rue comme nous les avions également
trouvés lors de notre descente sur terrain. Il importe de signaler
qu'à ce niveau l'attention est plus donnée à
l'égard des enfants qui se sont séparés de façon
définitive de leurs parents ou leurs personnes responsables.
La vie quotidienne des enfants et jeunes de la rue se
déroule dans une insécurité permanente. Cette situation
semble être à l'origine de leur solidarité, qui aboutit
à la formation de bandes. Chaque matin, ils se dispersent pour vaquer
à leurs multiples occupations. La journée, ils se regroupent
momentanément pendant les temps de repos. Le soir, ils forment des
attroupements importants, pour se raconter leur journée et chercher
ensemble les lieux de sommeil. Les enfants de la rue sont deux
catégories.
Les premiers sont sans activité lucrative : oisifs,
vagabonds et mendiants, ou voleurs. Les seconds, par contre, exercent des
activités régulières : nettoyer, vider les poubelles,
faire la vaisselle, porter des colis et des vivres, cirer les souliers, pousser
des charrettes, etc. (non sans recours eux aussi, parfois, à la
mendicité ou au vol). Une de leurs plus grandes difficultés, dans
la rue, c'est le manque de logement. Ils dorment sous ou sur les hangars, sous
les vérandas, dans des bâtiments inachevés ou
abandonnés, etc.
Souvent, ils passent la nuit dehors, parfois sous le froid et
la pluie, et dans la crainte des agents des forces de l'ordre, des bandits etc.
Ces enfants sont parfois particulièrement sales, de la tête aux
pieds, dans l'habillement comme dans l'hygiène corporelle, et sentent
mauvais. Il y a parmi eux des galeux, des malingres, et chacun a au moins une
plaie. Ils sont soit échevelés, soit le crâne mal
rasé. Cet état général de santé
30
montre que non seulement ils manquent de moyens, mais aussi
qu'ils se sous-estiment et se négligent.41
A. Les formes d'oppression physique
Les formes d'oppression physique sont les contraintes qui
portent atteinte à l'intégrité physique de l'individu.
Elles utilisent la violence comme arme de base. L'oppression est « un
acte par lequel on impose à quelqu'un ou on le contraint d'agir contre
sa volonté, en employant la force ou l'intimidation »42
Les formes de contrainte portant atteinte à
l'intégrité physique des enfants de la rue sont nombreuses et
variées.
1. L'application de produits nocifs
Les produits nocifs en usage dans la rue sont le poivre et le
machacha, utilisés dans le but de nuire.
- La pratique du poivre
C'est une technique qui consiste à faire mâcher
et avaler un ou deux grains de poivre, ou à les frotter sur les yeux, la
bouche, les oreilles, le sexe ou le recrum de la victime. Le remède
contre le chatouillement du poivre est, disent les jeunes, de mâcher ou
de frotter de la poussière de braise partout où a
été appliqué le poivre.43
Voici ce qui a été recueilli à ce sujet :
« pour la première fois qu'on m'a frotté ces grains de
poivre aux yeux, je ne pouvais imaginer que ça pouvait me faire aussi
mal, je pleurnichais car c'était parmi mes premiers jours dans la rue,
j'avais autant pensé à ma famille mais je ne pouvais pas
retourner là en ce moment parce qu'à la maison, mes parents ne
sont même pas là, mon père est au Kasaï et ma maman
n'est pas très souvent présente,
41 MARGUERAT Y. et POITOU D., A l'écoute des
enfants de la rue en Afrique noire, Université catholique de
Louvain, faculté de droit, Fayard 1994, pp. 361-362
42 Idem, p. 364
43 Ibidem.
44 Enfant exposé à la mendicité
X, communication personnelle, lieu d'entretien à Lemba (UNIKIN),
à 11 heures
45 Enfant exposé à la mendicité
Z, communication personnelle, lieu d'entretien à Lemba, (UNIKIN),
à 10 heures
31
quand je rentre le soir, je ne vois que ma
grand-mère maternelle avec d'autres membres de la famille élargie
».44
- La pratique de machacha
Employé moulu, il suffit d'en souffler une petite
poussière en direction de celui qu'on veut châtier ou de la lui
frotter sur le corps, provoquant des démangeaisons et des
chatouillements qui peuvent disparaître en se formant avec du sable.
Voici ce qui a été recueilli à ce propos
: « vivre dans la rue, il faut être vigilant. C'est seulement
dans la rue que j'ai appris à supporter la douleur, même si je
pleure qui va m'écouter ? - il n'y a pas de pitié ici dans la
rue, il faut seulement être prudent à certains moments.
Moi-même par mon imprudence, j'ai été victime plusieurs
fois de frottement de machacha dans le corps. Oups ! une fois c'était
sur mon dos, ça me chauffer comme pas possible, pour que ce
chatouillement s'arrête, il me fallait enlever vite le polo et commencer
à tourner au sol pendant que mes amis étaient là en train
de me rire »45
2. Les brulures
Beaucoup de plaies vues sur le corps de jeunes sont des
brulures. Plusieurs techniques sont utilisées, souvent exercées
pendant les heures de repos ou de sommeil. Le but visé serait de punir
les oisifs, les paresseux, ou seulement de satisfaire son sadisme, qui a pour
base la haine, la jalousie ou la vengeance. Ces pratiques sont :
a. L'usage du corps de la victime comme cendrier,
c'est-à-dire éteindre une cigarette sur sa peau nue ;
b. Fixez entre les lèvres d'un jeune endormi la bouche
entrouverte un mégot de cigarette (dont on a détaché le
filtre). Dans ce cas, ce sont les lèvres qui se brûlent,
c. Enfoncer une allumette allumée dans la bouche d'un
jeune endormi la bouche ouverte. Ici, on se brûle l'intérieur de
la bouche ;
d. Appliquer un tison ou une braise allumée sur le
corps de quelqu'un.
Voici quelques propos recueillis à ce sujet : «
j'éteins souvent ma cigarette sur les jeunes mendiants. Quand les
autres travaillent, eux dorment ou jouent pour enfin aller
32
mendier. Alors qu'ici chacun doit vivre de son effort
» « cette brulure sur le dos, c'est le feu de la cigarette
éteinte par D. quand je dormais, alors que j'étais malade.
Après son acte, il s'est mis à rire. Je me serais vengé si
j'avais été plus fort que lui » « actuellement, je suis
devenu sage, je dors comme le boa un oeil ouvert, un oeil fermé. Car je
risque encore une brulure aux lèvres. »46
3. Autres formes de torture
- Le pincement de nez ou d'oreilles
Cette forme de torture consiste à pincer le nez ou les
oreilles d'un enfant pendant une durée déterminée, allant
d'une à cinq minutes. Tous les jeunes interrogés à ce
sujet reconnaissent avoir subi cette forme de torture et ses
conséquences : « les oreilles chauffent et bourdonnent, et
entrainent les maux de tête. On peut en devenir fou » « quand
on m'a pincé le nez, le sang a coulé, les yeux ont rougi, et
j'avais mal à la tête »47.
- Donner des coups contre les objets durs
Cette pratique consiste à imposer aux enfants de
« faire la boxe avec l'environnement matériel », tel
qu'administrer des coups de tête ou de poings aux murs ou aux arbres.
« La tête me fait toujours mal depuis que l'on m'a obligé
de la cogner contre un mur, il y a deux ans »48
- Faire le landoi
C'est obliger un enfant à enfoncer un doigt dans un
petit trou dans le sol, incliner la tête au sol, puis tourner sur place
en vitesse, en décrivant un mouvement de rotation autour de
soi-même, pendant une à cinq minutes. Cette pratique est
dénommée « la danse zekete-zekete » par les jeunes.
« Un jour, j'ai tournoyé de vertige. En voulant me redresser,
j'ai cogné la tête contre le coin d'un mur. Voici les cicatrices
»49
46 Enfant exposé à la
mendicité Z, communication personnelle, lieu d'entretien à Lemba,
(UNIKIN), à 10 heures, p. 365-366
47 Enfant exposé à la mendicité E,
communication personnelle, lieu d'entretien à Lemba super, à 11
heures
Enfant exposé à la mendicité K,
communication personnelle, lieu d'entretien à Lemba super, à 11
heures
49 Enfant R, communication personnelle, lieu
d'entretien à Lemba
48
51 Enfant M, communication personnelle, lieu
d'entretien à Lemba
52 Enfant W, communication personnelle, lieu
d'entretien à Lemba
50 MARGUERAT Y. et POITOU D., op. cit., p.
367
33
Notons que toutes les formes de torture décrites
ci-dessus ont été observées chez les jeunes entre eux. Ce
sont les jeunes adultes et les plus forts qui les exercent sur les cadets et
les faibles. Les circonstances qui peuvent être à l'origine de ces
tortures sont nombreuses : la désobéissance, l'entêtement,
la revendication des droits etc. Ceux qui en sont les auteurs les font subir
par haine, jalousie ou sous l'effet de la toxicomanie50.
4. Faire manger des mouches
Quand certains enfants dorment la bouche ouverte la
journée, les oppresseurs tuent des mouchent ou prennent d'autres
saletés pour les leur enfoncer dans la bouche. Puis on les
réveille brutalement en leur révélant ce qu'ils ont
avalé. Cette pratique remplace certaines formes de brulures. «
J'en ai déjà avalé une fois. Et puis j'ai eu une
diarrhée durant trois jours... on m'a dit que ce sont les asticots des
mouches qui s'étaient développés et qui me rongeaient les
intestins et l'estomac »51.
1) Les coups
Certains de ces enfants qui s'exposent à la
mendicité sont battus. Il s'ensuit de notre observation dans une
descente sur terrain, deux groupes d'enfants exposés à la
mendicité, parmi eux les uns étaient un peu âgé que
les autres. Cherchant de parler avec l'un de ces groupes qui était
déjà sur le lieu, l'autre groupe n'était pas content,
d'après lui, les enfants du premier groupe avaient occupé la zone
qui n'était pas la leur, après quelques instants ils ont
commencé de se quereller le lieu. A la suite de ces querelles, au moment
que nous cherchions à les calmer, un garçon du deuxième
groupe lança un coup de poings dans le corps de garçon du premier
groupe. Après avoir réussi à les calmer le deuxième
groupe des enfants quitta le lieu car tout le monde parler en mal d'eux. L'un
des garçons dit : « nous vivons ce genre de lutte presque
chaque jour et si nous sommes moins forts, il arrive que nous soyons tous
battus et, c'est pire encore quand je suis surpris seul sans mes amis. Nous
sommes obligés de marcher en vue de trouver des gens qui vont nous
donner quelque chose, sinon, nous crèverons de faim, nous manquerons de
quoi s'acheter des petits trucs à manger pendant la journée
»52
34
B. Les formes d'oppression morale
En contraste avec l'oppression physique, les formes
d'oppression morale sont exercées verbalement ou passivement, par
certains actes et comportements, sans toutefois toucher au corps. Certains ont
cependant des conséquences sur le corps.
1. Les menaces
Les menaces sont une forme de violence morale fondée
sur des paroles et des gestes, sans toutefois toucher au corps. Ce sont des
admonestations et des brimades accompagnées d'injures et de
révélations méchantes des défauts d'un individu.
Les enfants et jeunes de la rue en sont
régulièrement victimes de la part de leurs agresseurs. Ceux-ci
utilisent parfois des moyens matériels (bâton, couteau) pouvant
faire peur aux victimes. Verbalement, ils profèrent des menaces et des
malédictions à l'endroit de ces jeunes. L'objectif visé
est d'intimider, de frustrer ou de traumatiser l'adversaire. Les menaces
peuvent être une source de disputes, voire de bagarres. La plupart des
actes violents s'accompagnent en général de menaces.
C'est surtout par des menaces que les adultes expriment leur
sentiment de rejet vis-à-vis des jeunes. Mais le sentiment de rejet peut
s'exprimer aussi par des actes muets, des gestes ou des regards
dédaigneux.53
Voici quelques observations faites sur le vif. Un adulte
déposant un plat de riz au marché chasse ainsi les jeunes qui le
précédaient à cet endroit. « Disparaissez tous,
je ne peux pas manger à côté des animaux. Faites vite,
sinon je vous tape dessus. Qui vous a dit de rester parmi les hommes, vous
? »54
Une autre fois, lors de notre descente sur terrain, à
la recherche de ces enfants qui s'exposent à la mendicité,
pendant notre pause, dans un petit espace, où on vendait certains plats
des spaghettis accompagnés des poissons fumés, j'ai vu un groupe
d'enfants en train de mendier à cet endroit, comme ils étaient
ceux pour qui je cherchais, je les ai appelés. Mais la vendeuse qui
était sur le lieu cria sur eux, « quittez ! sorciers ! Sinon,
je vais vous jeter de l'eau », en suite j'ai répliqué,
« non maman ! ne les chassait pas, c'est moi qui les ai
53 MARGUERAT Y. et POITOU D., op. cit., pp.
372-373
54 Enfant N, communication personnelle, lieu
d'entretien à Lemba
35
appelés », elle dit : « papa,
attention ce sont des sorciers, regardez, comment ils sont bizarres
». Ceci est une illustration des menaces que subissent ces enfants et
une preuve d'un manque de protection qui découle d'un mauvais regard
auquel les gens ont sur ces petits.
Par ailleurs, toutes ces oppressions que rencontrent les
enfants ne manquent ne manquent jamais de conséquences, que nous allons
décrire dans le paragraphe suivant.
§2. Les conséquences
Généralement, les conséquences de
l'oppression peuvent s'observer à trois
niveaux.
A. Sur le plan physiologique
L'oppression physique laisse des traces sur le corps du jeune
opprimé ; celle exercée sur le plan moral comporte
également des conséquences néfastes, dont voici celles que
nous avons constatées :
- Les maladies, dont les plus visibles sont les
fièvres, les blessures, les gonflements, les foulures, les entorses, les
brûlures, l'asthénie, etc. ;
- De multiples infirmités de certaines parties du
corps (oeil crevé, doigt courbé, oreille coupée, dents
cassées, etc.),
- Les cicatrices sur l'ensemble du corps ;
- Les malades imaginaires dues à la peur des
malédictions.55
B. Sur le plan psychologique
Quelles que soient les formes d'oppressions, physique ou
morale, leurs répercussions atteignent immédiatement le psychisme
des jeunes opprimés et perturbent leur personnalité. L'oppression
traumatise les enfants et les jeunes et les rend timides et passifs. Elle
développe chez les enfants :
- Les sentiments d'insécurité, d'où le
recours au fétichisme, à la magie, à la toxicomanie, aux
sports violents,
- Le complexe d'infériorité,
55 MARGUERAT Y. et POITOU D., op. cit., p.
374
36
- Le sentiment de rejet et la méfiance vis-à-vis de
la société en général (non-conformité aux
normes sociales : indiscipline, injures, etc.).
Notons que tous ces conflits vécus par les enfants et
jeunes de la rue rendent de plus en plus difficile l'action
éducative.56
C. Sur le plan social
L'oppression cultive en eux le climat de méfiance
vis-à-vis du monde adulte. Cela mène à de rapports de
tension qui engendrent un rejet mutuel entre adultes et jeunes.
Devant l'oppression, les jeunes développent des
mécanismes de défense qui consistent à répondre la
violence par la violence.
Ces réactions se manifestent par des disputes, des
bagarres, le vol, le viol, l'escroquerie, les coups et blessures volontaires,
la destruction de biens, l'abus de confiance, la saleté, etc. en
réplique à ces actes, la société adulte intervient
de nouveau par d'autres formes d'oppression, enclenchant ainsi un cycle sans
fin.57
De toutes ces formes d'oppressions, de conséquences qui
en résultent s'ensuit l'idée selon laquelle, en tant que
chercheur nous dégageons certains défis à relever pour
rendre effective cette protection spéciale de l'enfant.
Section 2. Défis à relever pour
l'effectivité de la protection spéciale des enfants
exposés à la mendicité
En ce qui concerne cette section, nous avions regroupé
ces défis en deux. Les défis d'ordre juridique (§1) et
d'autres défis (§2)
§1. Défis d'ordre juridique
La loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de
l'enfant semble être programmatique et exprime la politique de l'Etat
congolais dans le domaine de la
56 MARGUERAT Y. et POITOU D., op. cit., p.
375
57 Idem.
37
protection de l'enfant. Les structures prévues ainsi
que les textes règlementaires d'application sont à mettre en
place ou à élaborer. Il y a donc d'énormes défis
à relever pour la mise en application effective de la loi portant
protection de l'enfant. Parmi ces défis, nous avons les défis
d'ordre pratique (A) et les défis d'ordre réglementaire (B).
A. Les défis d'ordre pratique
Quelques défis d'ordre pratique sont :
1. [a formation des assistants sociaux et leur affectation
dans les tribunaux pour enfants ;
2. [a création ou la réhabilitation des
structures de prise en charge des enfants en situation difficile (placement
dans une institution) ;
3. L'installation effective des unités
spécialisées de la Brigade de protection de l'enfant et la
formation des éléments qui y oeuvrent ;58
4. L'installation effective du Conseil de tutelle. Car,
s'agissant de cet organe, il y a de véritables soucis quant à ce,
parce qu'il n'y a aucun bourgmestre, ni aucun délégué qui
se mobilise sur base de cette charge dévolue à l'Etat de
protéger les enfants de la rue qui s'exposent à la
mendicité.
De tous ces défis d'ordre pratique, s'ensuit
l'idée selon laquelle, il faut que des structures de protection de
l'enfant soient établies en vue d'identifier ces enfants de la rue
exposés à la mendicité, découvrir ceux qui sont en
rupture familial et voir, dans la mesure du possible comment les placer dans
une quelconque institution de prise en charge, avec comme objectif, la
réinsertion de l'enfant au sein de son milieu familial.
C'est ainsi que l'article 39 de la Convention relative aux
droits de l'enfant dispose que « les États parties prennent
toutes les mesures appropriées pour faciliter la réadaptation
physique et psychologique et la réinsertion sociale de tout enfant
victime de toute forme de négligence, d'exploitation ou de
sévices, de torture ou de toute autre forme de peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants, ou de conflit armé. Cette
réadaptation et cette réinsertion se déroulent dans des
conditions qui favorisent la santé, le respect de soi et la
dignité de l'enfant ».
58 KIENGE-KIENGE R., op. cit., p. 118
38
C'est pourquoi, le retour dans sa famille biologique est, en
principe, la meilleure solution qui s'offre à l'enfant placé en
institution. Les services compétents doivent lancer le processus
dès le placement de l'enfant dans un établissement
approprié. Le processus de réinsertion doit notamment :
· Localiser les membres de la famille biologique de
l'enfant, y compris ceux de sa famille élargie et, en particulier, ses
grands-parents, en recourant au besoin à une enquête de police
· Analyser les problèmes spécifiques de la
famille et de l'enfant
· Fournir, selon les besoins, un soutien financier,
social ou psychologique à la famille, dont une thérapie familiale
(par exemple, une psychothérapie ou une désintoxication des
drogues ou de l'alcool)
· Identifier les familles au sein desquelles la
réinsertion semble possible
· Prévoir, si nécessaire, le placement
temporaire de l'enfant dans une famille d'accueil ou une institution pour
donner à la famille le temps de résoudre ses problèmes; et
pendant cette période, encourager et faciliter les contacts entre
l'enfant et sa famille. Dans tous les cas, l'enfant doit être
préparé au changement; il faut également lui permettre de
participer, dans la mesure où c'est possible et opportun, à
l'élaboration du plan de réinsertion établi en
consultation avec la famille. Une fois la réinsertion effectuée,
fournir un appui à la famille et à l'enfant.59
Des programmes devraient être élaborés et
mis en oeuvre qui permettraient d'offrir aux enfants séparés de
leur famille l'aide dont ils ont besoin pour réintégrer leur
famille, si c'est possible, ou, à tout le moins leur communauté.
Cette aide devrait notamment comprendre:
· Un hébergement temporaire et, si
nécessaire, une assistance pour renouer les contacts avec leur
famille
· La réintégration dans le système
scolaire, si c'est possible, ou l'inscription à d'autres programmes
conçus pour alphabétiser les enfants, les préparer
à la vie active et accroître leur confiance en soi
· Des activités rémunératrices, des
stages d'apprentissage ou une formation leur permettant de gagner leur vie
59 DANIEL KATZ J., La protection de l'enfant, guide
à l'usage des parlementaires, Genève, les presses
de SRPRO Kundig, 2004, p. 135.
61 IDZUMBUIR ASSOP J., les lois de protection de
l'enfant en République démocratique du Congo,
Difficultés de mise en oeuvre, Kinshasa, Droit
et Société « DES », 2017, p. 115
60 DANIEL KATZ J. op.cit., p. 168.
39
Il faudrait également concevoir des programmes visant
à modifier l'attitude des familles et du public face aux enfants
victimes, en particulier ceux qui ont été victimes de
sévices sexuels et d'exploitation, «étant donné que
leur stigmatisation ... constitue un sérieux obstacle à leur
réadaptation et à leur réinsertion»60.
Ayant décrit les défis d'ordre pratique, passons
maintenant aux défis d'ordre réglementaire.
B. Les défis d'ordre réglementaire
La loi de 2009 a prévu neuf arrêtés
d'exécution et quatre décrets du premier ministre
délibéré en conseil des ministres, parmi lesquels, il y a
certains de ces arrêtés tendant à rendre effectif la
protection spéciale des enfants exposés à la
mendicité qui ne sont pas encore en vigueur, il s'agit de :
a. Les arrêtés ministériels et
interministériels
1. L'arrêté interministériel
(Ministère de la Femme, Famille et Enfant et du Ministère des
Affaires Sociales) sur l'assistance de l'Etat aux parents incapables d'assurer
la survie de leurs enfants (article 69). Il n'est pas encore en vigueur.
2. L'arrêté du Ministre de l'Intérieur
portant organisation et fonctionnement de la Brigade spéciale de
protection de l'enfant (article 77). Il n'est pas encore en vigueur
Il s'ensuit des points soulevés sur les défis
d'ordre juridique que les difficultés de l'application des lois
protectrices de l'enfant en RDC sont liées particulièrement au
contexte de leur mise en oeuvre, c'est-à-dire : de l'ensemble des
circonstances dans lesquelles elles s'appliquent et dont nous retenons
essentiellement, l'insuffisance des structures d'une part et d'autre part, le
peu de connaissance de la loi et de l'enfant bénéficiaire
particulièrement par les acteurs de mise en oeuvre.61 Ayant
dit un mot sur les défis d'ordre juridique, le paragraphe suivant aborde
d'autres défis.
40
§2. D'autres défis à
relever
Dans ce paragraphe il est évoqué les autres
défis à relever l'effectivité de la protection
spéciale de l'enfant exposé à la mendicité.
A. Les défis à relever dans la
prévention de la délinquance juvénile
[a « rue » est une expression neutre, purement
topographique, qui part de la constatation d'une présence dans l'espace
urbain. Elle permet de fonder une anthropologie descriptive
élémentaire, que l'on pourra ensuite nuancer de situation en
situation, de villes en ville. En gros, deux catégories se sont
imposées à tous : les enfants et les jeunes DANS la rue ou DE la
rue, dont on n'a plus besoin maintenant de reprendre les
définitions.62
[a « prévention » consiste donc non seulement
à agir au sein de chacune de ces catégories, pour en sortir les
enfants (ce qui peut signifier, parfois, qu'il faut d'abord les y stabiliser),
mais surtout à éviter les dérives de l'une à
l'autre, de l'enfance ordinaire (la maison, l'école, l'atelier) vers les
tentations de la rue, de la rue temporaire à la rue permanente, de la
marginalité à l'asocialité. C'est là que s'impose
la notion de niveaux d'intervention emboités, ce que les criminologues
qualifient de prévention primaire, secondaire ou tertiaire : agir
à la fois à chacun des niveaux et à l'articulation entre
ces divers niveaux.63
1. Prévenir le glissement vers les tentations
de la rue
A l'échelle la plus globale, c'est un truisme de dire
qu'un développement général harmonieux résoudrait
bien des problèmes : des villes heureuses dans des campagnes
prospères, une scolarisation adaptée aux aptitudes de chacun et
aux nécessités d'un vaste marché de l'emploi... moins
d'exode rural vers les lumières de la ville, moins de
déracinement culturel, moins de frustrations devant des formations
inadéquates... chacun doit, à son niveau, se battre pour que cela
advienne, mais - outre que la richesse ne résout pas tous les
problèmes (les pays industrialisées ne sont certes pas en manque
de marginalités juvéniles) - on ne peut trop escompter la
réalisation d'un tel programme dans l'avenir immédiat.
Jusqu'à preuve du contraire, les politiques de prévention en
Afrique devront
62 MARGUERAT Y. et POITOU D., op. cit., p.
562
63 Idem, p. 562
41
longtemps encore se penser dans un contexte de
pauvreté, de chômage, de malnutrition, de familles incapables de
subvenir aux besoins de leurs enfants, de dévalorisation du travail
humain, de faiblesses des ressources publiques... les acteurs de la
prévention ne devront qu'être plus acharnés à
défendre les enfants à risque contre les dangers de rejet (par
l'école) et d'exploitation (dans le monde du travail).
Là où la source essentielle de la fuite des
enfants vers la rue se trouve dans la dislocation des familles, il doit
être envisageable de mobiliser contre celle-ci les ressources de la
société africaine morale des vieux...) ou les structures du
pouvoir local moderne (chef de quartier, cellules politiques...), en sachant
bien que la simple contrainte n'obtiendra jamais ce que l'on peut
espérer de la pression d'une écoute amicale et des conseils
judicieux de quelqu'un en qui l'enfant a placé sa
confiance.64
2. Prévenir le dérapage vers la rue
comme mode de vie permanent
Pour éviter que les enfants qui vivent dans la rue
au-delà de ce que la société considère comme normal
ne finissent par s'y installer pour de bon, on ne peut que tolérer que
ceux que l'on ne peut remettre entièrement à la charge de leur
famille y exercent leurs activités (non répréhensibles)
sans trop de difficultés. Cela signifie, concrètement, repenser
la place des « petits métiers » dans la ville, en particulier
adapter des réglementations qui n'ont pas été
conçues pour ces cas-là (patentes, droits de place, prohibitions
inapplicables), qui ont pour effet de rendre encore plus précaire la
position de l'enfant, de l'exposer à tous les arbitraires et donc de
l'inciter à se réfugier dans la véritable
illégalité. Mais permettre à l'enfant de vivre dans la rue
ne doit pas le contraindre à y rester : tout statut doit être
conçu comme transitoire, comme une étape vers un retour à
ce que chacun considère comme une vie « normale
».65
3. Prévenir le basculement dans les
institutions de contrôle
Pour éviter la chute dans la délinquance
institutionnalisée, il faut , dans la mesure du possible, sortir de la
rue ceux qui y ont vraiment élu domicile, ce qui est - expérience
faite - en général beaucoup moins difficile qu'on ne le croit :
la plupart de ces enfants (et même des plus âgés, les 18-20
ans ...) aspirer évidemment au retour à une vie conforme au
modèle
64 MARGUERAT Y. et POITOU D., op. cit.,pp.
562-563
65 Idem, pp. 563-564
42
qu'ils ont de la société : aller à
l'école, apprendre un métier, fonder plus tard une famille et
s'occuper de leurs enfants mieux qu'on ne l'a fait pour eux... rares parmi eux
sont les vrais asociaux, même si leurs bonnes inventions sont
entravées par des perturbations psychologiques dont leur vie de la rue
est, en général, plus cause que conséquence :
l'instabilité, l'agressivité, la violence, un mélange
d'irresponsabilité et de cynisme, qui cachent (tantôt bien,
tantôt mal) les plus grands besoins de tendresse...
Le retour réussi dans la famille reste souvent bien
difficile ; avoir choisi à 8, 10, 12 ans de fuir dans la rue
révèle en général des cassures difficilement
réparables. Il faut donc imaginer autre chose ; par exemple des
structures d'accueil pour les plus jeunes (les plus vulnérables et les
plus réadaptables), des formules très souples pour les plus
grands66, en sachant que l'abandon de la liberté et des
habitudes de la vie de la rue se fait rarement d'un seul coup. Toute une action
en « milieu ouvert » doit être menée, avec du personnel
formé, motivé, outillé pour agir dans la rue auprès
de plus jeunes dont on ne voit que trop quel est l'avenir prévisible ;
la vraie délinquance, celle de ces « grands » qui les
rackettent plus ou moins durement (avec, parfois, des raffinements de sadisme)
et qui ne sont que leurs anciens, désormais enfermés dans une
marginalité sans retour.67
4. Prévenir le naufrage dans la vraie
criminalité
Les institutions de contrôle social pour mineurs
(police, justice, centres de rééducation...) doivent tout d'abord
exister concrètement. Trop d'exemples montrent la catastrophe que
représente l'emprisonnement d'enfants avec les adultes ; c'est la
meilleure « école du crime ». Elles doivent, cela sans dire,
fonctionner de façon satisfaisante, avec les moyens matériels et
humains, la continuité et les coordinations nécessaires. C'est
dire qu'il a encore beaucoup à faire pour rendre tout cela adapté
aux besoins et aux réalités des sociétés
concernées.
Bien des législations doivent être
repensées en faveur des catégories de jeunes les plus
menacés et, surtout, être mises effectivement en application, dans
leur lettre et plus encore dans leur esprit, qui est que la seule
répression (si nécessaire soit-elle) ne saurait suffire.
66 MARGUERAT Y. et POITOU D., op. cit., p.
564
67 Idem, p. 565
43
Les qualités humaines des hommes et des femmes qui
s'attellent à la réhabilitation morale des enfants perdus doivent
être exceptionnellement. Mais être éducateur est aussi un
métier, qui doit être pérennisé par des conditions
décentes de carrière et de statut (matériel et social).
A chacun de ces niveaux se retrouve un problème
permanent ; l'atmosphère de mépris, voire d'hostilité,
dont l'opinion publique entoure ces enfants, perçus comme un danger qui
appelle une seule réponse la répression. Tant qu'il en sera
ainsi, ils ne peuvent qu'être toujours plus refoulés
au-delà des lisières de la société. Il faut donc
impérativement s'efforcer de neutraliser cette force centrifuge,
c'est-à-dire faire comprendre à l'opinion que ces enfants sont
des victimes, et non des ennemis. Pour cela doivent être mobilisés
tous les moyens d'information disponibles (presse, radio,
télévision...) et surtout les grands canaux qui façonnent
l'esprit public (partis politiques, corps enseignant, associations de parents
ou de résidents.)68
B. Défis à relever dans les stratégies
de la protection de l'enfance
Les principales stratégies de la protection de l'enfant
dans les programmes de soin et de soutien sont : donner aux enfants les moyens
de se protéger, améliorer la capacité de familles à
protéger leurs enfants, accroître la capacité des
communautés à protéger les enfants et appuyer les
gouvernements dans le renforcement de leurs systèmes de protection de
l'enfance.
1. Donner aux enfants les moyens de se
protéger
En raison de leur immaturité physique et mentale, les
enfants sont particulièrement vulnérables à la
maltraitance et ont donc besoin de soins et de protection particuliers.
Cependant, ils peuvent jouer un rôle actif dans leur propre protection
s'ils ont les informations, les connaissances, les compétences et la
confiance en soi qu'il faut pour le faire. Il s'agit bien plus que de la
lecture et du calcul qu'ils apprennent à l'école. Les enfants ont
besoin de connaître leurs droits, de savoir quels sont les services et
les mécanismes de soutien disponibles, d'apprendre comment éviter
et réagir face aux risques, d'apprendre comment adopter des
comportements sains et comment défendre leurs intérêts dans
le monde des adultes. Pour arriver à cela, des activités qui
renforcent les aptitudes pour la vie quotidienne, les connaissances et la
participation des enfants sont essentielles. Ces activités
s'inscrivent
68 MARGUERAT Y. et POITOU D., op. cit., pp.
565-566
44
dans le cadre des actions de riposte, de prévention et
de création d'un environnement protecteur.69
C'est pour cela, nous pensons que pour le cas de notre pays la
République démocratique du Congo, les efforts devraient
être déployés à tous les niveaux, qu'il d'agisse au
niveau de la législation congolaise ou au niveau du gouvernement
congolais, avec l'implication de toute la société en passant par
tous les moyens possibles notamment les écoles, les églises, les
médias qui ont également une ampleur aujourd'hui en vue de
renseigner les enfants sur leurs droits fondamentaux. C'est un
élément important qui donnera à l'enfant congolais les
connaissances possibles, l'accordant des moyens de pouvoir se défendre
lui-même, tout en inculquant dans son esprit qu'en cas de
problème, il y a certains mécanismes et services disponibles qui
peuvent lui venir en aide.
En effet, dans les rues de Kinshasa, il y a de plus en plus
une présence massive des enfants parmi lesquels, l'on retrouve
évidemment ceux qui se livrent à la mendicité, les ayant
interrogés pendant nos entrevues, ils avancent la pauvreté, la
misère comme raison de leur mendicité. Et, en étant dans
la rue, comme il a été démontré dans de ce travail,
ils s'exposent en même temps à des formes de violence. Par
ailleurs, si l'on arrive à sensibiliser ces enfants sur leurs droits, en
les montrant qu'en cas de besoin, à défaut de la famille
voilà les organes étatiques ou privés de protection
auxquels, il faut se diriger pour trouver une aide ou une assistance, cela
diminuera le nombre de ces enfants dans la rue ; en tout cas pour ceux qui
sollicitent la générosité des passants à cause du
contexte de précarité que se retrouve leurs responsables.
Par conséquent, en vertu des formes d'oppressions que
ces enfants subissent lorsqu'ils mendient, s'ils sont vraiment
sensibilisés également sur les services disponibles qui les
protègent socialement et pénalement, ils peuvent s'y diriger
facilement pour se recouvrer leurs droits remis en cause, au lieu de continuer
de subir par exemple des oppressions et sans dire un mot aux agents de l'ordre,
qui d'après ces enfants les prennent pour des parasites de la
société et ne peuvent les accorder aucune attention
particulière.
69 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., Lignes directrices et
Options de Programmation pour la Protection des enfants
vulnérables dans les programmes de soins et d'appui communautaires
; Boite à outils sur la Protection de l'enfance de FHI
360, Research Triangle Park, NC : FHI 360 ; 2012, p. 13.
Disponible sur
https://www.fhi360.org
consulté le 15/07/2019
45
Il faudra mobiliser l'enfant dans le renforcement de ses
aptitudes à participer et à défendre ses
intérêts.
? Renforcer l'aptitude des enfants à participer et
à défendre leurs intérêts
Donner aux enfants l'occasion de participer et d'exprimer
leurs points de vue sur les questions les concernant ainsi que de
défendre eux-mêmes leurs droits et leurs intérêts
respecte non seulement leurs droits humains mais leur donner également
l'occasion de mettre en pratique leurs aptitudes à la vie quotidienne.
La participation des enfants doit être soigneusement planifiée
pour éviter de les exposer à davantage de risques. Les
différences de genre et les capacités de discernement des enfants
selon leur âge et leur degré de maturité doivent être
prises en compte. Lorsqu'elles planifient et mettent en oeuvre des
activités de participation des enfants, les organisations doivent
veiller à ce que les filles et les garçons aient les mêmes
chances de prendre part.
- Les enfants peuvent participer de différentes
manières à différents niveaux. Au niveau des programmes,
les enfants devraient participer aux activités de conception, de mise en
oeuvre et d'évaluation du programme.
- Au niveau communautaire, les enfants peuvent identifier et
soutenir d'autres enfants vulnérables. Par exemple, ils peuvent
être membres de comités de protection de l'enfance, servir de
mentors aux enfants plus jeunes ou créer leurs propres groupes de
protection de l'enfance. Les programmes peuvent aussi créer ou soutenir
des forums de discussion pour donner aux enfants l'occasion de discuter entre
eux et avec des responsables communautaires adultes des questions qui les
touchent ou les concernent.
- Au niveau national, les programmes peuvent plaider pour
qu'il soit donné aux enfants des rôles dans l'élaboration
et la mise en oeuvre de politiques, de plans, de normes et de lignes
directrices du gouvernement visant les enfants. Les programmes peuvent
également aider les enfants à parler directement aux responsables
nationaux des problèmes relatifs à la protection de l'enfance et
à être admis dans les instances ou réseaux nationaux et
régionaux de coordination.
- Même les enfants très jeunes peuvent participer
à travers des méthodes appropriées pour leur âge,
telle que la thérapie par le jeu qui aide des enfants aussi jeunes
qu'à deux ans d'âge à exprimer leurs
préoccupations.70
70 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., op.cit., p. 14.
46
L'application de ces lignes directrices et options de
programmation pour la protection des enfants vulnérables, en
l'occurrence les enfants exposés à la mendicité est d'une
importance que l'on ne doit pas négliger en République
démocratique du Congo car il est de l'intérêt de l'enfant
pour sa protection, d'entendre aussi ses propres pensées sur ce qu'il
faut accomplir pour lui, en vue qu'il puisse vivre de façon qui favorise
son épanouissement. A ce point nous touchons le cas des parents ou des
autres responsables d'enfants qui ont des moyens pour vivre comme il se doit
normalement mais que les enfants recourent au secours des passants dans la
rue.
Pour ce cas d'enfants, ils ne sont pas
préoccupés au contexte de précarité des parents ou
autres personnes responsables d'eux. L'on comprend dans cette étude que
leur souci, c'est parce qu'on ne réalise pas leurs besoins
élémentaires et qu'on ne les laisse pas s'exprimer sur les
questions de leurs droits ou intérêts d'une part et d'autre part,
même après les avoir écoutés, l'on ne tient pas
compte de leurs points de vue. D'où, il faut que la capacité des
familles soit améliorée dans la protection de l'enfant.
2. Améliorer la capacité des familles
à protéger leurs enfants
Il est à noter que les rapports familiaux offrent les
meilleurs soins et le meilleur soutien aux enfants. Dans toute la mesure du
possible, les enfants devraient rester au sein de leurs propres familles.
Cependant, beaucoup de familles ont besoin d'aide et de soutien pour pouvoir
bien prendre soin de leurs enfants. Par conséquent, « l'axe
principal d'une stratégie visant à répondre aux besoins
des orphelins et des enfants vulnérables doit être de renforcer la
capacité des familles à prendre soin de, et à
protéger, leurs enfants. » Les programmes de soin et de soutien
devraient travailler avec, et soutenir, les familles pour faire face aux
facteurs qui rendent les enfants vulnérables à la maltraitance,
tels que la pauvreté, le stress, le manque de compétences
parentales et l'isolement social.71
En République démocratique du Congo, il est
prévu dans la loi portant protection de l'enfant une assistance
matérielle et financière de l'Etat, laquelle assistance profite
aux parents incapables d'assurer la survie de leur enfant72 mais
malgré cela, cette disposition souffre encore d'application, c'est pour
cela du jour le jour, dans la ville de Kinshasa
71 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., op.cit., p. 15.
72 Article 69 de la loi portant protection de
l'enfant
47
particulièrement dans les communes dont nous avions
effectué notre observation directe sur la vie des enfants qui s'exposent
à la mendicité, en fonction de quoi, nous avions également
passé nos entrevues, il est à signaler qu'un effort doit
considérablement être déployé dans ce domaine de
l'assistance ou aide spéciales au plutôt possible avant que ce
phénomène s'amplifie davantage et perturbe
l'intégrité de la nation aux jours à venir.
Puisque déjà, nous signalons que la
précarité diminue l'autorité parentale et peut à la
longue fragiliser l'autorité même de l'Etat. Cela se
démontre par le fait que pour les enfants qui se séparent
temporairement de leurs familles pour aller s'exposer à la
mendicité, il y en a qui ne demandent même plus l'autorisation de
leurs responsables avant de sortir de la maison.
En effet, les souffrances que vivent ces enfants quand ils
mendient et ne trouvent pas quelque chose après s'être
exposés à la mendicité, les poussent à
développer une indiscipline vis-à-vis des adultes, pendant les
instants de nos entrevues, il nous est arrivé de croiser un enfant qui
sollicitait quelque chose pour s'acheter à manger, nous lui avons dit de
s'approcher, en lui signifiant que nous avions avant tout quelques questions
à lui poser, cet enfant réagit brutalement, chose
étonnante pour son âge vraiment plus jeune nageant dans de sept
ans, et inconcevable à comparer avec l'attitude qu'il avait avant, quand
il demandait l'argent, à force de l'appréhender nous avons
réalisé, qu'il avait répondu de la sorte parce qu'il
pensait qu'il n'aura rien en retour de sa demande et que ses idées
étaient dirigées sur les menaces qu'il croyait subir de nous.
C'est tout simplement, un détail, qui prouve à
suffisance que seule la famille peut bien protéger les enfants et
veiller même à leur éducation, d'où, il importe
d'améliorer la capacité des familles à protéger les
enfants et de les assister dans la mesure du possible de manière qu'en
tant que cadre essentiel de la protection de l'enfant qu'elles puissent assumer
sa responsabilité.
La plupart des interventions qui peuvent être mises en
oeuvre au niveau de la famille sont décrites ci-après et font
partie des mesures de protection de l'enfance.
? Renforcer les connaissances et les compétences
parentales
Compte tenu de renforcement des connaissances et
compétences des parents sur base de ce qui contribue pour le
développement de leurs enfants, nous pensons que l'on doit se concentrer
sur les paramètres qui laissent la supervision de l'éducation des
parents en
48
matière de la protection de l'enfant par le
gouvernement, cet aspect est un détail convenable, dont l'application
s'avère nécessaire en République démocratique du
Congo.
Il serait souhaitable que le gouvernement congolais, par ses
ministères des affaires sociales et, du genre famille et enfant, puisse
mettre en place des organes sociaux dans la ville de Kinshasa et dans chaque
province tendant à éduquer les parents sur la prise en compte des
besoins de leurs enfants afin de les éviter à se tourner vers la
rue pour solliciter la générosité des personnes
inconnues.
Dans le cas de la ville de Kinshasa, il faut alors laisser la
supervision de cette éducation parentale sous l'autorité des
bourgmestres des communes avec d'autres délégués choisis
par l'Etat. Et pour le cas des provinces, laisser cette supervision sous le
contrôle des chefs de secteurs ou chefs de chefferies. Ces organes
sociaux de l'éducation parentale apprendront aux parents de savoir
répondre aux exigences des enfants qu'ils mettent au monde, en portant
un regard particulier sur les besoins fondamentaux de l'enfant qui demandent
régulièrement des soins appropriés.
Il faudra à cet effet, que l'Etat congolais puisse
engager un personnel qualifié comprenant des experts en Droit de la
protection de l'enfant pour assurer ces enseignements qui renforceront les
connaissances et compétences des parents. Et de temps en temps, les
parents qui auront des suggestions peuvent également aller les soumettre
aux agents de ces organes sociaux de l'éducation de l'enfant en vue de
se renseigner davantage et de soumettre également des
préoccupations auxquelles le gouvernement serait censé monter des
techniques qui assurent l'effectivité de la protection de l'enfant.
Dans cette optique, MEDRANO et TABBEN-TOUSSAINT
décrivent que « l'éducation des parents ou des personnes
responsables d'enfants sur des questions essentielles telles que le
développement de la petite enfance et le rôle parental les aide
à comprendre et à mieux répondre aux besoins en
matière de développement de leurs enfants ainsi qu'à
être mieux préparés pour faire face aux problèmes et
aux défis posés par l'éducation des enfants. Elle peut
aussi être une manière de promouvoir un plus grand engagement des
hommes dans le rôle de parents et de pourvoyeurs de soins.
L'éducation parentale sera particulièrement utile à ceux
nouvellement responsables d'enfants, très jeunes ou âgés,
qui habituellement n'y sont pas bien préparés. Dans les
programmes d'éducation
49
parentale, un accent particulier doit être mis sur
le développement intégré de la petite enfance chez les
enfants d'âge préscolaire avec pour axes l'alimentation et la
nutrition, la santé et le développement, les besoins
psychosociaux et autres domaines clés. Les parents et les responsables
d'enfants devraient également être éduqués sur les
droits des enfants et la protection de l'enfance et devraient être
informés des services de protection de l'enfance disponibles dans leurs
communautés et sur les procédures d'accès à ces
services ». Ils poursuivent que « cette éducation
peut être dispensée individuellement par le personnel ou les
volontaires communautaires durant des visites à domicile ou durant des
séances de groupe tenues dans des locaux communautaires tels que les
écoles ou les églises ».73
Nous insistons sur tout ça parce que, le
développement de l'enfant se fait à travers différentes
étapes consécutives à son âge. A chacune de ses
étapes, l'enfant a des besoins, des réactions et des
capacités/caractères spécifiques. Ainsi, pour qu'un enfant
se développe bien, il a besoin d'être dans un environnement de
confiance, stable qui prend soin de lui.74
? Renforcer les moyens de subsistance des
familles
Les interventions de renforcement économique et de
diversification des moyens de subsistance augmentent les revenus et les avoirs
des ménages et enlèvent aux parents et aux responsables d'enfants
le stress associé au fait de ne pas pouvoir répondre aux besoins
fondamentaux de leurs enfants. Ces interventions sont préventives de
nature parce qu'elles réduisent le stress qui contribue à la
violence domestique et à la maltraitance; diminuent le risque que les
enfants soient séparés de leurs familles ou soient
abandonnés par celles-ci à cause de l'extrême
pauvreté; et préviennent que les enfants ne soient poussés
au travail des enfants ou à toute autre forme d'exploitation par leurs
parents ou leurs tuteurs en vue d'aider à la subsistance du foyer. Ces
interventions sont aussi de riposte dans la mesure où elles peuvent
aider à ramener les enfants dans leurs familles et à les sortir
de situations d'exploitation.
Les programmes ne peuvent pas être d'un modèle
unique, applicable à tous les cas. Les interventions à mettre en
oeuvre doivent être adaptées à la situation
socioéconomique particulière de chaque famille. Par
conséquent, les programmes doivent pouvoir offrir un
73 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., op. cit., p. 15.
74 MINAS (RDC), op. cit., p. 15
50
large éventail d'interventions de renforcement
économique qui répondent aux besoins des familles selon leurs
situations. Avant de lancer ces types d'intervention, les programmes de soins
et de soutien devraient évaluer et analyser les programmes d'assistance
et de protection sociale existant dans le pays et collaborer avec ceux-ci, dans
la mesure du possible, afin de maximiser l'efficacité et l'impact des
interventions.75
Ayant décrit ces stratégies à monter au
niveau de familles, il convient de monter cette fois-ci au niveau de la
communauté.
3. Accroître la capacité des
communautés à protéger les enfants
Nous signalons que quand les familles sont déjà
sensibilisées sur la protection spéciale de l'enfant, notamment
les enfants qui s'exposent à la mendicité, c'est
déjà un pas vers le développement, mais un souci se fera
remarquer pour les parents qui sont éduqués en cette
matière de protection de l'enfant mais qui, pour une raison ou une autre
n'ont pas assez des moyens pour assurer la survie de leurs enfants. Dans le
contexte actuel des choses, auquel, nous avons démontré une
ineffectivité dans le champ de la protection spéciale de l'enfant
exposé à la mendicité, il faudra néanmoins que la
communauté congolaise se mobilise dans la protection de l'enfance en vue
de palier à certaines lacunes que rencontrent d'autres parents dans le
respect des besoins élémentaires de leurs enfants,
procédant alors par un système d'assistance communautaire.
MEDRANO et TABBEN-TOUSSAINT soulignent que les
communautés ont un rôle vital à jouer dans la protection de
l'enfance, en particulier dans les pays où les systèmes de
protection de l'enfance sont encore faibles. Lorsque les familles ne sont pas
capables de satisfaire les besoins fondamentaux de leurs enfants ni de les
protéger, la communauté est le filet de sécurité
suivant.
En pratique, cela signifie habituellement que la
communauté fournit une assistance aux familles pour assurer qu'elles
puissent donner à leurs enfants les soins et la protection
appropriés, ce qui permet aux enfants de rester dans leurs familles.
C'est seulement dans les situations extrêmes où il n'y a pas de
membres de la famille ou de familles disposés à accueillir un
enfant que la communauté doit prendre soin directement de ces
enfants.
75 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., op. cit., p. 16.
76 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., op. cit.,, p. 17.
77 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., op. cit.,, p. 18.
51
Il est essentiel pour les programmes de soins et de soutien de
travailler avec, et de soutenir, les communautés dans leur
responsabilité de protection de l'enfance. L'appropriation des
initiatives de protection de l'enfance par la communauté en est le
commencement.76
En effet, pour cela il faudra également informer et
sensibiliser les acteurs communautaires sur les droits des enfants et la
protection de l'enfance afin de créer un environnement protecteur
où la maltraitance n'est pas tolérée et où les
violations sont traitées de manière efficace, les organisations
devraient appuyer la formation des responsables locaux et des principales
parties prenantes au sein des communautés sur les droits des enfants et
sur les manières de prévenir, reconnaître et réagir
face aux cas d'abus, de négligence et d'exploitation d'enfants. Ces
responsables et parties prenantes pourraient inclure les prestataires de
services (agents de santé, travailleurs sociaux, enseignants, agents de
police), les journalistes et le personnel d'organisations communautaires
locales.
Cette formation devrait viser à accroître la
compréhension par la communauté des conséquences de la
maltraitance des enfants, des moyens de la détecter (reconnaître
les signes d'alerte), des différentes mesures de riposte à la
maltraitance (rétablissement et réinsertion), et des lois,
politiques et règlements nationaux qui protègent les enfants,
ainsi que des services existants. La production et la diffusion de versions
simplifiées en langues locales des lois et des politiques nationales
seront importantes durant ce processus.77
Madame Joséphine IDZUMBUIR ASSOP décrit que face
au mouvement d'acculturation, les liens familiaux et sociaux se transforment et
s'effritent. Plus particulièrement en milieu urbain, la famille moderne
a perdu de son volume et de son poids. La pauvreté qui l'assaille lui
retire toute ascendance sur ses membres, au point que la prise en charge de ces
membres est de plus en plus fictive au lieu d'être réelle.
Ce qui est dit de la famille peut aussi s'appliquer à
la communauté sociale. Si jadis on disait que : «
l'éducation de l'enfant est une affaire de toute la communauté
», il n'en est plus le cas aujourd'hui où les enfants vivent dans
l'anonymat des villes et adoptent avec engouement les modes culturels
d'emprunt. La communauté est tombée dans le piège du
52
mouvement de l'individualisme qui s'accentue et de la crise
économique permanente qui dénature son idéal
d'hospitalité et de solidarité sociale. Elle ne joue plus son
rôle de relais comme milieu de remplacement en cas de déficiences
familiales (au sens étroit) ou structure d'application des mesures de
rechange. La coopération avec la communauté en matière en
matière de protection de l'enfance est indispensable si l'on veut
appliquer de façon efficace les directives organisées dans ce
domaine. L'apport des volontaires et des bénévoles est une grande
richesse qu'il faut exploiter.
C'est dans la communauté qu'on pourra trouver des
solutions authentiques pour résoudre les problèmes des jeunes
congolais. Ce n'est pas vers l'Etat providence, aujourd'hui en
liquéfaction ni vers la bureaucratie qu'il faut se retourner, mais vers
les ressources propres du groupe social qui permettent la faisabilité de
la mise en oeuvre des lois de protection de l'enfant.
Plus particulièrement en cette période de crise
économique, les Etats africains gagneraient en faisant recours à
la communauté et aux relais qu'elle organise, ils veilleront à
soutenir le système de solidarité sociale et familiale en vue
notamment de faciliter l'application des alternatives à la peine ou
mesures de rechange qui évitent aux enfants en situation-problème
d'être traduits en justice ou placés dans des
institutions.78
Pour sauvegarder le système de solidarité face
à la pauvreté et à l'acculturation sauvage qui nuisent
à ses valeurs ancestrales, l'Etat congolais devra se conformer à
l'article 69 de la loi de 2009/LPE qui l'oblige de venir en aide par une
assistance matérielle, financière ou éducative aux parents
incapables d'assurer la survie de leurs enfants.79
Un autre aspect que MEDRANO et TABBEN-TOUSSAINT insistent sur
ça c'est de soutenir les comités de protection des enfants. Ces
comités forment un maillon important dans les systèmes nationaux
de protection de l'enfance parce qu'ils permettent aux communautés de
participer à la protection de l'enfance et d'en assumer une part de la
responsabilité. Ils peuvent identifier les enfants à risque et
les mettre en rapport avec les services de prévention, de riposte, de
rétablissement et de réinsertion. Les comités de
protection de l'enfance du niveau communautaire sont souvent les premiers
points de contact
78 IDZUMBUIR ASSOP J., op. cit., p. 116
79 Idem
53
en cas de violation des droits de l'enfant, en particulier
là où il n'y a pas de services et de mécanismes de
recours.80
Ces comités peuvent entreprendre diverses activités
telles que:
- Identifier les enfants et les familles vulnérables
- Référer les cas aux services localement
disponibles
- Faire pression sur les pouvoirs publics au niveau local et
national pour de
meilleurs services, des réformes de politique, des
améliorations et la mise en
application des lois et des programmes de protection de
l'enfance
- Offrir des soins et un soutien aux enfants victimes de
maltraitance par la
médiation, l'éducation informelle et d'autres
actions pratiques
- Sensibiliser et mobiliser les communautés sur les
questions de droits des
enfants, de protection de l'enfance et de soins ainsi que sur
les avantages de la
participation des enfants
- Renforcer les aptitudes pratiques des enfants pour la vie
quotidienne par la
formation dans ce domaine
- Assurer la surveillance et agir comme agents d'alerte sur les
violations de la
protection de l'enfance
- Entreprendre la recherche et l'évaluation des
familles
- Assurer la médiation au sein de la communauté
pour une bonne réinsertion des
enfants
- Assurer le suivi des enfants réinsérés et
leur fournir un soutien continu81
Un autre détail à prendre en compte c'est de
soutenir la protection de remplacement des enfants dans une structure
familiale, d'où le personnel des programmes de soins et de soutien
devrait travailler avec les professionnels locaux de la santé et de la
protection sociale pour garder les enfants qui ont été
séparés de leurs familles dans des structures informelles
placement familial et l'adoption devraient être guidés par une
législation, des lignes directrices et des procédures nationales
bien claires.
Les programmes de soins et de soutien devraient renforcer la
capacité des acteurs locaux à surveiller le bien-être des
enfants placés dans des structures de prise en charge
80 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., op. cit., p. 18,
81 Idem.
82 Idem, p. 21.
54
formelle, à reconnaître les signes de
maltraitance, à identifier les enfants à risque et à
signaler aux autorités compétentes les cas de suspicion d'abus et
d'exploitation. Il est important de mettre en place des structures qui soient
en relation avec et soient soutenues par les autorités locales de sorte
qu'en cas de violation de la protection un suivi juridique approprié
puisse avoir lieu.82
4. Appuyer les gouvernements dans
l'amélioration de leurs systèmes de protection de
l'enfance
En République démocratique du Congo, en fonction
de toutes ces difficultés liées à l'effectivité de
la protection sociale spéciale de l'enfant, l'Etat devra s'ouvrir
à la société civile en vue de recevoir un appui tendant
à mettre en oeuvre la loi portant protection de l'enfant. En effet,
depuis 2009 que cette loi a été promulgué, il n'y a aucune
mesure d'assistance qui a été constatée de la part du
gouvernement congolais aux parents qui rencontrent des inquiétudes
économiques pour protéger leurs enfants. S'il ne faut tenir
compte que de la situation économique de ce pays, il sera difficile que
quelque chose soit faite de la part du gouvernement pour venir en aide aux
parents incapables d'assurer la survie de leurs enfants.
C'est pourquoi, dans le souci de voir les enfants en situation
difficile rétablis dans leur droits, vivant de façon qui
contribue à leur épanouissement, nous suggérons que le
gouvernement puisse solliciter la coopération et le partenariat de tout
le monde qui peut lui tendre la main dans la mesure du possible, de
façon de rendre effectif cette protection spéciale prévu
dans la loi dans le but d'assurer le développement de l'enfant qui
s'expose à la mendicité.
En réalité, soutenir les gouvernements dans le
renforcement de leurs systèmes nationaux de protection de l'enfance est
une des stratégies les plus rentables et les plus durables de protection
de l'enfance que les programmes de soins et de soutien aux enfants
vulnérables peuvent mettre en oeuvre. Les systèmes nationaux de
PE varient d'un contexte à l'autre mais il existe un certain nombre
d'éléments communs entre eux:
- Leadership, volonté politique et engagement du
gouvernement en faveur de la protection de l'enfance
55
- Existence d'un cadre juridique et de politiques de protection
de l'enfance
- Allocations budgétaires suffisantes et investissement
durable dans les services et
groupes de protection de l'enfance
- Coordination, approche multidisciplinaire et
responsabilité
- Services de haute qualité pour les enfants, les familles
et les responsables d'enfants
- Personnel et ressources humaines hautement qualifiés
- Promotion d'attitudes et de valeurs de non-violence (par des
campagnes de
sensibilisation et des campagnes médiatiques, par
exemple)
- Disponibilité de connaissances, de données et de
statistiques
- Monitoring indépendant (par exemple, par la mise en
place d'un médiateur pour les
enfants)
- Partenariat entre l'Etat et la société civile.
L'appui à apporter aux gouvernements dans le
renforcement des systèmes nationaux de protection de l'enfance doit
être basé sur les besoins et les priorités locales qui
seront cernés par une évaluation des besoins ou une analyse de
situation. Les interventions peuvent prendre plusieurs formes, dont les
suivantes:83
Sans le leadership et la volonté politique de l'Etat,
l'élaboration et l'application de lois sur la protection de l'enfance
sont vouées à l'échec. Il est vital de renforcer
l'engagement du gouvernement par rapport à la protection de l'enfance
dans les pays où les gouvernements ne reconnaissent pas leur obligation
de protéger les enfants, où les gouvernements eux-mêmes
profitent des pratiques d'exploitation (telles que le travail des enfants)
et/ou n'ont pas la capacité, l'expertise technique et les ressources
nécessaires pour mettre en oeuvre les politiques et faire appliquer les
lois.
Il s'en suit qu'il faut promouvoir la mise en oeuvre de plans
nationaux de protection sociale. La protection sociale vise à
prévenir, gérer et surmonter les situations qui affectent le bien
être des personnes. Elle consiste en des politiques et des programmes
destinés à réduire la pauvreté et la
vulnérabilité par la promotion de marchés du travail
efficaces et l'emploi, par la réduction de l'exposition des individus
aux risques socioéconomique. La protection sociale réduit la
pauvreté et permet aux ménages vulnérables
83 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., op. cit., p. 22.
84 MEDRANO T., TABBEN-TOUSSAINT A., op. cit., p. 22
85 UNICEF, la situation des enfants dans le monde, un
défi pour le développement de l'Afrique, p. 97 disponible
sur http : pubdoc@
unicef.org, consulté le
15/07/2019
56
de satisfaire leurs besoins élémentaires -
s'attaquant ainsi aux facteurs de vulnérabilité qui mettent les
enfants à risque de maltraitance.
Les gouvernements doivent élaborer et mettre en oeuvre
des plans nationaux de protection de l'enfance dotés de budgets
suffisants, qui devraient être intégrés aux plans et aux
budgets nationaux de développement. Si de tels plans n'existent pas, les
ONG devraient plaider pour leur élaboration. En aidant
financièrement les ménages, ces mesures réduisent la
vulnérabilité des enfants.84
De tout ce qui précède, nous allons cette
fois-ci décrire le défis à relever dans le domaine
d'investissent à la protection de l'enfant.
C. Le défi à relever dans l'investissement de
la protection spéciale
Nous signalons qu'en rapport avec les enfants qui se
séparent généralement de leurs responsables et s'exposent
à la mendicité ; sur base de quoi, certains de ces enfants
avancent le manque de moyens économiques, lequel manque constitue un
obstacle pour que leurs besoins soient pris en compte comme il se doit.
Voilà pourquoi, la protection spéciale de l'enfant
nécessite un investissement considérable, il faudra pour cela que
le budget du gouvernement congolais puisse allouer des sommes importantes en
vue de la réalisation effective de cette protection.
Allant toujours dans le sens de l'investissement à la
protection spéciale, l'UNICEF rapporte qu'investir en faveur des enfants
et des communautés les plus défavorisés est plus qu'une
obligation morale. C'est un investissement stratégique et sensé
qui permet d'atteindre des résultats de façon plus efficace et
rentable, et qui contribue en même temps à rompre le cycle
intergénérationnel du dénuement et à renforcer les
sociétés.
L'inverse est également vrai ; lorsque nous
négligeons l'investissement en faveur des enfants et des familles les
plus marginalisés, nous négligeons aussi leurs
sociétés. Les disparités d'accès à l'aide et
aux services essentiels coutent des centaines de milliards de dollars chaque
année, au niveau mondial.85
86 UNICEF, la situation des enfants dans le monde,
un défi pour le développement de l'Afrique, p. 97
disponible sur http :
pubdoc@unicef.org,
consulté le 15/07/2019, p. 97
57
Il souligne également qu'accroitre les
opportunités pour les enfants les plus défavorisés devrait
être une priorité dans l'élaboration du budget et des
dépenses publiques. Le budget d'un pays reflète la façon
dont ses engagements politiques sont traduits en actions directes visant
à bénéficier aux enfants les plus marginalisés. Ces
dépenses jouent un rôle crucial dans le financement des
systèmes qui font le lien entre les enfants défavorisés,
leurs familles et les services d'assistance et de soutien, notamment les
systèmes de sécurité sociale qui protègent les
familles en période de crise. Mais il ne suffit pas d'accorder la
priorité aux enfants dans les budgets nationaux. Tous les gouvernements
- que ce soit dans les pays à revenu faible, intermédiaire ou
élevé - ont aussi besoin d'analyser l'impact de leurs
décisions budgétaires sur les enfants les plus
vulnérables.
Plusieurs pays ont mis en place des mécanismes
permettant de suivre l'impact des dépenses publiques sur la
pauvreté des enfants. Le Bangladesh, par exemple, a mis au point un
cadre budgétaire axé sur les enfants qui est utilisé par
le Ministère des finances pour examiner l'impact potentiel sur cette
population. En Afrique du Sud, le Children's Institute surveille les
allocations budgétaires destinées à mettre en application
les dispositions de la législation nationale sur l'enfance de 2005
(Children's Act). Dans le même temps, les gouvernements peuvent
améliorer le retour sur investissement en adoptant des approches de
planification et de budgétisation plus intégrées.
Malgré l'insuffisance des financements et la concurrence croissante
autour de l'aide publique au développement et de l'aide humanitaire, les
pays à revenu faible et intermédiaire et leurs partenaires de
développement trouvent de nouvelles façons de combler les lacunes
financières et de garantir des sources de financement plus
prévisibles et diversifiées.86
Pour le cas de la République démocratique du
Congo, les efforts devraient également être fournis en cette
matière, en faisant appel à tous les congolais qui sont à
l'intérieur du pays, même à ceux qui sont à
l'extérieur du pays ainsi qu'à toute personne
étrangère qui peut porter un plus, dans l'objectif de
déployer des fonds pour que les organes étatiques de protection
sociale soient effectivement installés et que le budget de l'Etat
congolais soit augmenté au point qu'il n'y ait plus de soucis dans la
mise en oeuvre effective de la loi portant protection de l'enfant.
87 UNICEF, la situation des enfants dans le monde, un
défi pour le développement de l'Afrique, p. 97 disponible
sur http : pubdoc@
unicef.org, consulté le
15/07/2019 p. 98
58
Dans ses observations, l'UNICEF fait remarquer que : «
Alors que les investissements à court terme ciblés peuvent
souvent faire sauter les obstacles qui empêchent les enfants et les
familles d'avoir accès à des aides et des services essentiels,
ces avancées ne peuvent être pérennisées en
l'absence de sources de financement plus durables. Aujourd'hui, de nouveaux
partenariats permettent de mobiliser et de cibler les financements publics et
privés directement vers les plus démunis - depuis les dons en
espèces pour les familles pauvres afin qu'elles puissent accéder
aux soins et à l'éducation pour leurs enfants, jusqu'au
financement des programmes de formation des agents de santé
communautaires et de première ligne, pour soutenir des programmes
d'éducation étendus aux minorités ethniques et aux
communautés autochtones. Certains de ces nouveaux partenariats les plus
prometteurs ont trouvé de nouvelles façons de financer le
développement et la mise à disposition de fournitures
essentielles telles que les vaccins, moustiquaires imprégnées
d'insecticide et suppléments nutritionnels aux enfants et
communautés les plus démunis. Par exemple, le partenariat Power
of Nutrition vise à lever 1 milliard de dollars US pour la nutrition
grâce à un mécanisme innovant qui multiplie jusqu'à
six fois chaque dollar de financement privé au moyen d'un nouveau
financement garanti par d'autres investisseurs. De même, UNITLIFE a
recours à des micro taxations sur les industries extractives pour
accroître les ressources destinées à la lutte contre la
malnutrition en Afrique subsaharienne : par exemple, la République du
Congo contribuera à hauteur de 0,10 dollar US par baril de
pétrole vendu par sa compagnie pétrolière nationale. Et
UNITAID, l'initiative mondiale pour la santé qui combat le VIH/sida, la
tuberculose et le paludisme, a levé plus de la moitié de ses
fonds au cours des cinq dernières années grâce à des
taxes sur les voyages aériens ».87
Dans le cadre de trouver de quoi renforcer le budget de l'Etat
congolais, le gouvernement national pourrait cependant, se lancer à la
recherche de partenaires voire des opérateurs économiques
étrangers pour venir investir au Congo. En outre, d'aucun n'ignore que
la RDC a des atouts considérables, c'est juste question de mettre ces
atouts dans les industries qui vont concourir au développement de la
population en général et en particulier des enfants qui
constituent l'avenir du Congo.
59
Car, il est inquiétant de constater que la
République démocratique du Congo qui possède des grandes
richesses naturelles qui sont reconnues au monde entier puisse se retrouver
dans des conditions désolantes, parmi lesquelles, l'on retrouve beaucoup
de ses enfants être dans la rue en train de chercher un secours aux
passants, demandant de l'argent à tout le monde qui passe ; en allant
même jusqu'à fuir ou se séparer de leurs responsables parce
qu'ils n'ont pas de quoi les vêtir, les nourrir et/ou les éduquer
etc.
Il est à noter que la nécessité d'un
financement plus prévisible et d'un investissement durable est de la
plus haute importance lorsqu'il est question d'urgence humanitaire. Les besoins
humanitaires ont augmenté de façon exponentielle à mesure
que les conflits sont devenus plus longs et les crises plus fréquentes
et intenses. Avec un déficit de financement croissant, les donateurs,
les gouvernements et les organisations internationales cherchent de nouvelles
façons de financer l'action humanitaire.
En investissant dans l'anticipation des situations d'urgence
avant qu'elles ne surviennent, les gouvernements et les organisations
internationales améliorent leur capacité à y
répondre - avec un retour sur investissement élevé. Faire
en sorte que les ressources soient plus efficaces pour les enfants les plus
défavorisés - en assurant un investissement plus équitable
- revêt une importance croissante dans le cadre des objectifs de
développement durable. En encourageant les gouvernements à ne
laisser personne de côté, les nouveaux objectifs mondiaux exigent
des changements délibérés dans les politiques,
l'élaboration des budgets et les dépenses publiques pour
bénéficier à ceux qui en ont le plus
besoin.88
De défis à relever dans l'investissement
à la protection spéciale, il nécessitera que la
République démocratique du Congo élargisse sa protection
sociale, l'élément à étudier au point suivant.
D. Le défis à relever dans
l'élargissement de la protection sociale et perspectives
d'avenir
Tous les pays du monde possèdent au moins un
système de sécurité sociale. Des régimes
spécifiques d'allocations familiales sont légalement
établis dans 108 pays. Toutefois,
88 UNICEF, la situation des enfants dans le monde, un
défi pour le développement de l'Afrique, p. 97 disponible
sur http :
pubdoc@unicef.org,
consulté le 15/07/2019, p. 98
89 UNICEF, la situation des enfants dans le monde, un
défi pour le développement de l'Afrique, p. 97 disponible
sur http :
pubdoc@unicef.org,
consulté le 15/07/2019, p. 85
60
ils ne concernent parfois que de petits groupes de population,
et 75 pays ne disposent même pas de ce type de programmes
ciblés276. Il est capital d'étendre la protection sociale pour
atteindre les objectifs du Programme 2030.
D'ailleurs, ces objectifs comprennent une cible
spécifique sur la mise en oeuvre de systèmes de protection
sociale appropriés à l'échelle nationale, ainsi que sur
les mesures à prendre pour couvrir largement les populations pauvres et
vulnérables, d'ici 2030. Adopter une approche universelle pour
étendre la protection sociale permettrait non seulement de renforcer la
couverture, mais réduirait aussi la probabilité d'exclure
à tort des ménages présentant les conditions requises pour
en bénéficier, tout en favorisant la solidarité sociale et
en réduisant la stigmatisation qui touche parfois les
bénéficiaires de programmes ciblés.
Cependant, les pays peuvent aussi choisir d'élargir la
protection sociale, en fonction de leurs ressources et de leurs
capacités ainsi que du cadre de leur politique économique et
sociale, jusqu'à atteindre la couverture universelle.89
Nous signalons que la République démocratique du
Congo possède également un système de
sécurité sociale qui est établi par la loi n°16/009
du 15 juillet 2016 fixant les règles relatives au régime
général de la sécurité sociale mais lequel
système ne protège que les personnes qui sont dans le secteur du
travail, tel que disposé à l'article 7 point 21 de la
présente loi en ces termes : « on entend par, régime
général de sécurité sociale, l'ensemble des
dispositions légales et réglementaires de la
sécurité sociale concernant les travailleurs salariés et
les retraités du secteur privé, certains fonctionnaires, et d'une
manière générale, toutes les personnes non attachés
à un régime spécial ou particulier, du fait de leur statut
professionnel », donc, seules les personnes qui travaillent
bénéficient d'une sécurité sociale, or aux termes
de notre recherche, nous avons découvert que dans la plupart des enfants
qui mendient leurs responsables n'ont pas d'emploi. Ce sont des enfants des
parents ou des responsables chômeurs. Cela étant, dans un pays
comme le nôtre auquel ne sont sécurisés que ceux qui
exercent une activité professionnelle, pourtant beaucoup des parents ou
responsables de ces enfants ne travaillent pas, c'est une preuve qui
démontre que ceux derniers sont écartés dans le
système congolais de sécurité social.
90 UNICEF, la situation des enfants dans le monde, un
défi pour le développement de l'Afrique, p. 97 disponible
sur http :
pubdoc@unicef.org,
consulté le 15/07/2019,, p. 85
61
D'où, il faudra encore, que la République
démocratique du Congo puisse élargir son système de
sécurité social impliquant toute la population sans une
quelconque restriction, distinction et partialité quant aux prestations
sociales. De façon que même les parents des enfants exposés
à la mendicité puissent bénéficier d'une
sécurité sociale, laquelle sécurité est
définie à l'article 7 point 26 de la loi fixant les règles
relatives au régime générale de la sécurité
sociale comme « une protection que la société accorde
à ses membres, grâce à une série des mesures
publiques, contre le dénuement économique et social où
pourrait les plonger, en raison de la disparition ou la réduction
sensible de leur gain, la maladie, la maternité, les accidents du
travail et les maladies professionnelles, le chômage,
l'invalidité, la vieillesse et le décès ; à cela
s'ajoutent la fourniture de soins médicaux et l'octroi de prestations
aux familles avec enfants ».
L'UNICEF souligne à ce propos que pour les pays riches,
le défi immédiat consiste à rétablir et à
renforcer les filets de sécurité et les prestations qui ont
été érodés suite à la crise
financière mondiale. Pour de nombreux pays à revenu
intermédiaire, l'architecture des programmes de transferts en
espèces existants offre déjà une base pour poursuivre
l'élargissement de la protection.
Les gouvernements des pays à faible revenu sont
confrontés à des choix plus limités. Avec des budgets
restreints et des niveaux élevés de pauvreté chez les
enfants, ils sont tiraillés entre les approches ciblées
axées sur les transferts et les approches universelles. Ces distensions
doivent être traitées au cas par cas. Cependant, en
définitive, les programmes de protection sociale ne sont qu'un simple
outil parmi tant d'autres pour traiter le problème de fond de la
pauvreté des enfants.
À travers l'adoption des objectifs durables pour le
développement (ODD), les dirigeants du monde entier ont reconnu
l'importance cruciale de ce problème. L'objectif 1 vise à
éliminer complètement l'extrême pauvreté d'ici 2030
(cible 1.1) et à réduire de moitié au moins la proportion
d'hommes, de femmes et d'enfants de tout âge qui vivent dans la
pauvreté sous tous ses aspects, telle que définie par chaque pays
(cible 1.2). Les ODD soulignent également qu'aucun pays n'est à
l'abri des effets de la pauvreté, ce qui renforce l'argument voulant que
la lutte contre la pauvreté des enfants est un enjeu
universel.90
62
Dans leurs efforts pour atteindre les objectifs du Programme
2030, les gouvernements sont appelés à reconnaître les
défis particuliers associés à la pauvreté des
enfants sous toutes ses formes et à prendre des engagements explicites
pour y mettre fin. S'ils échouent aujourd'hui, les coûts humains,
sociaux et économiques retomberont sur les générations
futures.91 C'est pourquoi, le gouvernement congolais est tenu de se
lancer dans l'élargissement de son système de protection sociale,
en atteignant par exemple, ces enfants de la rue qui sont sans espoir et ne
font que s'exposer à la mendicité.
91 UNICEF, la situation des enfants dans le monde, un
défi pour le développement de l'Afrique, p. 97 disponible
sur http :
pubdoc@unicef.org,
consulté le 15/07/2019, p. 85
63
CONCLUSION
Notre étude a porté sur « la protection
spéciale des enfants exposés à la mendicité. Etat
des lieux et perspectives », elle découle du
phénomène des enfants de la rue qui selon le cas quittent le
milieu familial temporairement pour solliciter la
générosité des passants pour des raisons de leurs besoins
qui sont parfois insatisfaits par leurs parents ou autres personnes
responsables d'eux et rentrent le soir en famille d'une part et d'autre part,
il y a des enfants toujours de la rue en rupture familiale exposés
à la mendicité.
Pour ce dernier cas d'enfants, il en est des enfants qui ont
fait de la rue leur résidence et lieu d'exposition à la
mendicité. Ces enfants, le jour comme la nuit s'exposent en même
temps à toute sorte de danger qui peut compromettre leur vie.
Traversant, la ville de Kinshasa, dans les endroits publics, les rues, les
marchés, les arrêts de bus, devant les universités en
l'occurrence au sein de l'Université de Kinshasa, la présence de
ces enfants en train de mendier paraît très remarquable. C'est
pourquoi nous avons posé comme question de recherche : « quels sont
les mécanismes de protection spéciale prévus à
l'égards des enfants qui s'exposent à la mendicité ?
»
Pour répondre à cette question de recherche,
nous avions opté pour la méthode exégétique
systématique qui a consisté à dégager le sens d'un
texte juridique à l'aide de son contexte juridique ; cette
méthode a été complétée par la
méthode sociologique qui nous a permis d'effectuer de descentes sur
terrain afin d'observer de plus près l'exposition de ces enfants
à la mendicité, de les interroger sur leur mode vie, de relations
qu'ils entretiennent avec des personnes responsables d'eux, d'interroger
également les assistants sociaux oeuvrant dans le secteur de la
protection sociale spéciale.
En effet, il ressort de la prévision légale de
la protection spéciale des enfants exposés à la
mendicité, l'intérêt de protéger l'enfant compte
tenu de certaines situations qu'il pourrait traverser, lui mettant dans une
condition un peu particulière nécessitant l'intervention de ses
parents ou autres personnes responsables de lui, sous la garantie de protection
de l'Etat. Alors au cas où, ces parents ou responsables des enfants
seraient incapables d'assurer la survie de l'enfant, qu'ils puissent
bénéficier d'une assistance matérielle ou
financière de l'Etat.
64
Malheureusement, malgré le fait que pour renforcer la
protection de l'enfant la RDC a adhéré à la Convention
relative aux droits de l'enfant et la Charte africaine des droits et du bien de
l'enfant, et que sur le plan national, le Congo a promulgué une loi
portant protection de l'enfant depuis 2009 mais la condition des enfants en
situation difficile, par ricochet la situation des enfants qui sollicitent le
secours des passagers ne semble pas changer.
Il ressort des données puisées sur terrain que
les enfants exposés à la mendicité demeurent dans une
insécurité car ils vivent certaines oppressions qui portent
atteinte à leurs intégrités physique et/ou morale
entrainant des conséquences physiologiques, psychologiques et même
sociales sur les enfants. Ces enfants considérés comme les
enfants en situation difficile selon que leurs droits ne sont pas pris en
compte soit par volonté de leurs responsables, soit à cause du
contexte de précarité de leurs responsables nécessitent
une intervention à tous les niveaux de la société
congolaise.
Par conséquent, face à cette situation de
violation des droits des enfants de la rue exposés à la
mendicité, beaucoup des défis doivent être relevés
en vue d'assurer l'effectivité de la protection spéciale des
enfants exposés à la mendicité.
Parmi ces défis, nous avons des défis qui
résultent de la charge du gouvernement congolais de mettre en place les
textes d'application de la Loi portant protection de l'enfant d'une part et
d'autre part l'installation effective des organes de protection de l'enfant.
Toujours dans la rubrique des défis à relever il faut
protéger ces enfants ayant fait l'objet de notre étude pour les
prévenir de basculer dans la délinquance juvénile, dans
tout ça il faut alors monter des stratégies de la protection de
l'enfance que nous avions proposé dans ce travail, il faut aussi
investir dans le domaine de la protection de l'enfance, d'où, il faut
élargir la protection sociale en collaborant avec d'autres nations du
monde en vue de mettre en place des perspectives d'avenir tendant à
lutter contre la précarité des enfants, lequel
phénomène peut prendre de l'ampleur au jour à venir et
déstabiliser ou perturber même l'intégrité de la
nation congolaise car, comme il a été signalé dans le
rapport de l'Unicef cité dans ce mémoire que c'est un
phénomène qui frappe non seulement la RDC mais également
les autres pays du monde dans presque tous les continents, et même dans
les pays dits émergents.
65
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68
TABLE DES MATIERES
DEDICACE ii
REMERCIEMENTS iii
LISTE DES ABREVIATIONS v
INTRODUCTION 1
I. POSITION DE PROBLEME 1
II. HYPOTHESES 3
III. INTERET DU SUJET 4
IV. DELIMITATION DU SUJET 5
V. METHODES ET TECHNIQUES DE RECHERCHE 6
VI. PLAN SOMMAIRE 8 CHAPITRE I. CADRE LEGAL DE LA PROTECTION
SPECIALE DE L'ENFANT
EXPOSE A LA MENDICITE 9
Section 1 : CADRE NORMATIF 9
§1. Au plan international 9
A. La Convention relative aux droits de l'enfant 9
1. De la responsabilité des parents et de la protection
spéciale 9
B. La Charte africaine des droits et du bien-être de
l'enfant 10 En fonction de notre objet de recherche, il s'ensuit de notre
lecture de cette Charte deux éléments essentiels, à savoir
: la responsabilité des parents (1) et, la protection et assistance
spéciales (2) 10
1. De la responsabilité des parents 11
2. De l'assistance et de la protection spéciale 11
3. Les Etats parties à la présente Charte
s'engagent à veiller à : 12
§2. Au plan national (dans les instruments juridiques
nationaux) 13
A. La Constitution 13
B. La Loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de
l`enfant 14
Section 2 : LES MECANISMES DE PROTECTION SPECIALE 15
§1. Mécanismes institutionnels 15
A. De la tutelle de l'Etat 15
1. Condition d'ouverture de la tutelle de l'Etat 16
2. Composition de la tutelle de l'Etat 16
B. Du placement social 17
1. Principaux intervenants ou organes compétents de
placement social 18
a. L'enfant bénéficiaire de la décision du
placement social 18
b. L'Assistant social 19
c. Le Juge pour Enfants 19
d. Les organes de protection sociale en général et
les structures locales de
protection de l'enfant 19
2. Des lieux et conditions de placement 21
a. Lieux de placement 21
b. Conditions de placement social 22
1) Placement au sein de la famille élargie 22
2) Placement en famille d'accueil 22
3) Placement en foyers autonomes 23
4) Placement dans une institution publique à
caractère social 23
5) Placement dans une institution privée
agréée à caractère social 24
§2. LES MECANISMES NON INSTITUTIONNELS 26
69
A. Les autres mécanismes de prise en charge 26
B. Les mécanismes d'identification et d'accueil
26 CHAPITRE II. SITUATION ACTUELLE DES ENFANTS EXPOSES A LA
MENDICITE 28
Section 1 : Ineffectivité de la protection de l'enfant
exposé à la mendicité 28
§1. Les formes d'oppressions subies par les enfants
exposés à la mendicité 29
A. Les formes d'oppression physique 30
1. L'application de produits nocifs 30
2. Les brulures 31
3. Autres formes de torture 32
4. Faire manger des mouches 33
1) Les coups 33
B. Les formes d'oppression morale 34
1. Les menaces 34
§2. Les conséquences 35
A. Sur le plan physiologique 35
B. Sur le plan psychologique 35
C. Sur le plan social 36 Section 2. Défis à
relever pour l'effectivité de la protection spéciale des enfants
exposés à la
mendicité 36
§1. Défis d'ordre juridique 36
A. Les défis d'ordre pratique 37
B. Les défis d'ordre réglementaire 39
§2. D'autres défis à relever 40
A. Les défis à relever dans la prévention de
la délinquance juvénile 40
1. Prévenir le glissement vers les tentations de la rue
40
2. Prévenir le dérapage vers la rue comme mode de
vie permanent 41
3. Prévenir le basculement dans les institutions de
contrôle 41
4. Prévenir le naufrage dans la vraie criminalité
42
B. Défis à relever dans les stratégies de la
protection de l'enfance 43
1. Donner aux enfants les moyens de se protéger 43
2. Améliorer la capacité des familles à
protéger leurs enfants 46
3. Accroître la capacité des communautés
à protéger les enfants 50
4. Appuyer les gouvernements dans l'amélioration de leurs
systèmes de protection
de l'enfance 54
C. Le défi à relever dans l'investissement de la
protection spéciale 56
D. Le défis à relever dans l'élargissement
de la protection sociale et perspectives
d'avenir 59
CONCLUSION 63
BIBLIOGRAPHIE 65
TABLE DES MATIERES 68
70
Ce mémoire a porté sur l'étude de la
protection spéciale des enfants exposés à la
mendicité. Etat des lieux et perspectives. Compte tenu du contexte de
précarité des enfants qui s'amplifie du jour le jour et les
conduit à se placer dans la rue sollicitant le secours des passants, que
nous avions préféré d'en faire l'objet de notre
étude. Cette catégorie d'enfants exposés à la
mendicité dite enfants en situation difficile, subit de fois
différentes formes d'oppressions pouvant porter atteinte à leur
intégrité tant physique que morale. Face à ce danger
qu'encourent ces enfants, rien de façon pratique les protège,
malgré le fait qu'il soit prévu beaucoup des mesures au niveau
international et même national afin de protéger la personne de
l'enfant. C'est pourquoi dans cette monographie, nous avions essayé de
proposer certains défis à relever dans le domaine juridique et
autres en vue que la protection spéciale de l'enfant soit effective.
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