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Repenser la liberté comme mystère chez G. Marcel. une approche analytico-herméneutique de : "les hommes contre l'humain".


par Freddy KAKULE KANAMUNGOYA
Université Saint Augustin de Kinshasa (USAKIN) - Graduat 2020
  

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a) Une revendication exclusive du moi

Si quelqu'un, en faisant l'inventaire de ses biens déclare : « j'ai un chat », cette déclaration montre que ce chat n'appartient exclusivement qu'à lui seul comme sujet et par conséquent, les autres sujets ne peuvent pas revendiquer le chat qui est sien. De ce fait, Marcel souligne que toute affirmation portant sur un avoir semble bien être bâtie en quelque sorte sur un modèle de prototype où le «qui » n'est autre que moi-même40(*). Autrement dit, l'avoir ne tire sa force et sa valeur qu'à l'intérieur du « j'ai ». Le moi qui dit « j'ai » s'apparait à la fois comme point central par rapport à son avoir, en plus il nait une tension avec les autres sujets qui cherchent à revendiquer ce qu'il a.

La chose qui m'appartient existe indépendamment de moi, je peux la prendre, la manipuler à mon gré, la transmettre et même la communiquer étant donné qu'elle est extérieure à moi. Néanmoins, si on change de registre et qu'on déclare : « Ma tête m'appartient » cette déclaration parait risible d'autant plus qu'on ne peut pas imaginer que quelqu'un d'autres puisse émettre des prétentions de posséder ma tête.

Il est clair que quand il s'agit des parties du corps la question sur l'avoir se pose autrement car on ne peut pas voir quelqu'un qui peut donner à l'autre le pouvoir d'utiliser son corps comme un instrument, un outil. En effet, ce que j'ai, ne me reste pas absolument extérieur, j'essaie au contraire, de l'ajouter au moi central, de le faire entrer en moi jusqu'à être tenté de m'identifier à ce que j'ai. Aussi, plus l'accent mis sur l'avoir, sur la possession sera fort, moins il sera légitime d'insister sur cette extériorité qui caractérise l'avoir41(*). Par conséquent, notre être qui est notre liberté se trouve menacé, dégradé, bousculé et même nié par ce fait que nos possessions nous affectent et finissent par nous dévorer et nous réifier. Ceci est un grand danger pour l'épanouissement de notre liberté.

b) Le souci d'entretien

La notion de l'avoir ne s'écarte pas de celle du souci d'entretien de l'avoir. En effet, mon chat n'est à moi que si je prends soin de lui. En d'autres termes, dès que j'ai quelque chose, je m'oppose aux autres qui n'en ont pas et pourraient peut-être me le prendre. Il y a tendance à développer une intersubjectivité négative, quand l'avoir prend le primat et cherche à se transmuer en être. Marcel constate aussi que la possession implique dans la plupart de cas une relation de tension entre « moi » et les « autres »42(*). Ceci est possible dans ce sens qu'en face des autres ou du monde en général je me sens davantage « moi », alors je serre contre moi cette chose qui risque de m'être arrachée et je tente désespérément de l'incorporer, de former avec elle une unité indécomposable. Bref, chercher à valoriser l'avoir au détriment de l'être est un danger énorme pour la liberté.

De ce fait, à part l'intersubjectivité négative que peut engendre la primauté mise sur l'avoir, il faut aussi souligner que l'avoir a toujours le risque de créer pour son propriétaire une foule de craintes, d'anxiété et un état permanant de « souci ». Pour comprendre, il suffit d'observer la réaction de gens qui sont autours de nous quand il y a coupure du courant électrique ou bien quand il n'y a pas de connexion wi-fi, même quand il n'y plus l'abonnement canal+. Le constat est quasiment désolent et nous donne matière à réfléchir sur la place que nous donnons aux objets et la dépendance qui nous lie à l'avoir. Le constat est une désolation d'autant plus que la liberté authentique se distingue de l'addiction.

* 40 Cf. Ibid.

* 41 Cf. Ibid.

* 42 Cf. R. TROISFONTAINE, De l'existence à l'être, op. cit., p. 226.

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