Perceptions de l'ethnicisation politique au Cameroun: cas dans l'arrondissement de Dschangpar Jonias KAMWA KAMDE Université de Dschang Cameroun - 2019 |
1.1 Distanciation entre les peuplesV NGOUYAMSA et T FOBASSO 82(*) se demandaient en remarquant que les populations camerounaises font toujours l'objet de replis identitaires et d'exclusion si : « les mécanismes de redistribution des richesses et répartition des places selon les distinctions ethno-régionales sont celles qu'il fallait afin de faciliter l'intégration de tous et ainsi d'impulser le développement tant attendu. » plus loin, ils renchérissent en disant : Les particularismes, les différences, les divisions socioculturelles étant entretenus et légitimées au nom de la défense de son identité et de la quête des suffrages, le climat social qui se dessine au Cameroun, au lendemain des élections présidentielles, n'est pas nécessairement celui d'un vivre ensemble avec les différences et les conflits nés de ces différences, mais celui de la cohabitation de groupes autoproclamés différents, par murs symboliques interposés.83(*) L'un des éléments permettant de constater le désenchantement de la communion entre les populations de l'arrondissement de Dschang est la distanciation, une démarcation symbolique84(*). Les groupes sont de plus en plus distant les uns des autres. Au nom des appartenances ethniques, de l'attachement des uns et des autres à leur groupe ethnique, les peuples arrivent à ériger des barrières entre eux brisant ainsi toute possibilité de communion et d'échange mutuel. Le vivre ensemble qui est proclamé se trouve ainsi fragilisé car son sort est hypothéqué au nom des fractions claniques. Notons que la distance qui se crée entre les groupes ethniques n'est pas forcement physique et palpable mais même de manière ontologique et psychique, le blocage est là. Au vue de la multi culturalité de la société camerounaise, nous sommes condamnés à nous voir, à cohabiter, à nous côtoyer dans nos activités quotidiennes. Cependant, un blocage psychique demeure : celui du « je » et du « tu » ; du « nous » et du « eux ». Ayant conscience que nous sommes différents culturellement des autres, nous émettons toujours des réserves dans la collaboration avec autrui. À la lumière de quelques discours de terrain, nous pouvons remarquer cette distanciation entre les peuples. Tableau 10: Discours synthétiques sur la distanciation entre les peuples
Source : résultat des entretiens, 2019. Ce tableau est une esquisse de ce que pensent les populations de l'Arrondissement sur le vivre ensemble face à l'ethnicisation politique, à savoir que c'est une source de distanciation, de dislocation et d'éloignement entre les peuples. Cette distance est psychique mais parfois, elle brise les barrières qui la gardent interne pour être physique, réelle et palpable. La distance est d'avantage présente avec les stéréotypes de « tontinards » et de « sardinards. » Certes il ne faut pas prendre cela pour acquis mais ce qui captive est le fait selon lequel ces notions aient gagné en importance et arrive même à structurer la vie en société. Vue sous cette angle, ces notions contribuent à la formation des comportements radicalistes débouchant sur des replis identitaires qui sont des véritables freins au vivre ensemble. C'est d'ailleurs ce que pense l'une des personnes enquêtées quand elle affirme que : « on a eu un débat tontinard et sardinard sur les réseaux sociaux du coup l'alliage de ces deux peuples est presque impossible, les clivages tribaux vont naitre »85(*). * 82 NGOUYAMSA Valentin & FOBASSO GUEDJO Trésor., « Élection présidentielle au Cameroun : entre liberté d'expression et revendications ethniques », colloque international pluridisciplinaire du LAASSE, Université Félix Houphouët-Boigny, 6ème Edition, Février 2019. P.7. * 83 NGOUYAMSA Valentin & FOBASSO GUEDJO Trésor., « Élection présidentielle au Cameroun : entre liberté d'expression et revendications ethniques », colloque international pluridisciplinaire du LAASSE, Université Félix Houphouët-Boigny, 6ème Edition, Février 2019, P. 12. * 84 Idem. * 85 Propos de l'enquêté n°14, 20 -4- 2019. |
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