La responsabilité de l'état en matiàƒÂ¨re de protection du patrimoine mondial : cas du Burkina Faso et des ruines de Loropénipar Ada Rudolph AZIKIBA Université de Limoges - Master2 2015 |
CHAPITRE II : DISPOSITIONS JURIDIQUES OPÉRATIONNELLESIl n'est pas aisé de protéger le patrimoine de l'humanité dans une sous-région qui souffre d'analphabétisme et de faiblesse dans le fonctionnement juridico-institutionnel ; tous ces facteurs sont également liés au sous-développementdont la propriété, précise le professeur Maurice KAMTO, est de dérégler le droit d'autant plus que la pauvreté même ne s'embarrasse pas des règles de protection de l'environnement. Néanmoins, nous avons jugé nécessaire de définir de nouveaux mécanismes dans le souci de rendre plus opérationnelle la protection des Ruines de Loropéni au BURKINA FASO (Section I). Une telle situation requiert en l'espèce l'effectivité de l'ordre juridique communautaire (Section II). SECTION I : LA DÉFINITION DE NOUVEAUX MÉCANISMES DE PROTECTIONDES RUINES DE LOROPÉNI Une meilleure protection des Ruines exige de la nation burkinabè une éthique environnementale et l'instauration d'une stratégie nationale de protection propre. PARAGRAPHE I : L'EFFICACITÉ D'UNE ÉTHIQUE ENVIRONNEMENTALEElle renferme deux aspects difficiles à dissocier : l'éducation citoyenne (A) et l'instruction civique (B). A- L'éducation citoyenne Le BURKINA FASO doit nécessairement oeuvrer à l'atteinte d'une citoyenneté environnementale. Cette prise de conscience est d'ailleurs affirmée dès le préambule de la constitution du 02 juin 199196(*). Le peuple burkinabè doit véritablement être éduqué à travers des pratiques prescriptives et moralisatrices sur l'importance que représente pour lui et pour l'humanité les Ruines de Loropéni. Aux termes de l'article 27 de la Convention du patrimoine mondial en effet : « Les États parties à la présente Convention s'efforcent par tous les moyens appropriés, notamment par des programmes d'éducation et d'information, de renforcer le respect et l'attachement de leurs peuples au patrimoine culturel et naturel défini aux articles 1 et 2 de la Convention. » Dans la pratique, cela nécessite trois conditions : La première est une condition préalable c'est-à-dire la jouissance de la nationalité burkinabè telle que prévue par les articles 134 et suivants du Code des Personnes et de la Famille (CPF). Cependant, cette condition semble avoir une importance seulement formelle puisque la notion de patrimoine mondial - nous l'avons souligné - est une extranéité qui implique une pluri nationalité. La deuxième est une condition nécessaire faisant du citoyen une personne politique qui participe à l'animation de la vie de sa société. La troisième condition enfin est d'ordre substantiel. Elle justifie la qualité du citoyen à être sujet de droit97(*). Il apparait dès lors que l'éducation du citoyen burkinabè dans la protection du patrimoine mondial pose le problème des acteurs ; il s'agit d'abord d'une interpellation de l'autorité publique dans ses efforts d'information et de sensibilisation sur l'existence même de ce patrimoine, des dangers qui le menacent ainsi que de la nécessité de le préserver de façon durable. Il est ainsi attendu de l'État plus de couverture médiatique notamment à travers les théâtres forums, les émissions radios et télés ou une coopération régionale dans le but de diffuser des bulletins d'information sur les sites classés au patrimoine mondial. L'État burkinabè ne peut également occulter la question de l'accompagnement de ses structures décentralisées, essentiellement en moyens financiers suffisants afin de les impliquer pleinement dans la dynamique de l'éducation citoyenne en matière de protection du patrimoine mondial. Ensuite, il est question d'interpeller le citoyen lui-même pour qu'il manifeste son attachement au bien commun tel que le recommande l'article 27 de la Convention. Pour ce faire, il doit être nourri de l'état d'esprit qui exclut l'appropriation personnelle des biens communs, qui obéit aux lois et qui accepte des responsabilités dans sa société. Le citoyen burkinabè est ainsi encouragé à participer activement dans la vie associative et en matière environnementale pour l'intérêt de toute l'humanité. Pour cela, l'instruction joue une importance assez particulière. B- L'instruction civique L'école est par excellence le socle de la formation civique. L'objectif est d'inciter les jeunes à réfléchir sur un ensemble de qualités et à les interpeller sur leurs capacités à protéger l'environnement en général et le patrimoine mondial en particulier. Au BURKINA FASO, l'instruction civique est déjà enseignée à l'école primaire et au secondaire à travers des matières comme Histoire-géographie, Sciences de la Vie et de la Terre, Français. Les finalités du système éducatif burkinabè sont clairement définies par l'article 13 de la Loi N° 013-2007/AN du 30 juillet 2007 portant Loi d'Orientation de l'Éducation : « Le système éducatif burkinabè a pour finalité de faire du jeune burkinabè un citoyen responsable, producteur et créatif. Il vise essentiellement à assurer un développement intégral et harmonieux de l'individu, notamment en : · ... ; · cultivant en lui l'esprit de citoyenneté à travers l'amour de la patrie afin qu'il soit capable de la défendre et de la développer ; · cultivant en lui l'esprit de citoyenneté, de l'unité nationale, des responsabilités et de la justice sociale ; · développant en lui l'esprit de solidarité, d'intégrité, d'équité, de justice, de loyauté, de tolérance et de paix ». Cependant il y a un réel besoin de relire les curricula afin d'impliquer tous les acteurs clés du triangle pédagogique que sont les élèves, les enseignants et les parents. Pour cette raison, les établissements scolaires devraient servir de tremplin à l'instruction civique en ce qu'ils favorisent des actions d'intégration de la notion de patrimoine commun dans leur quotidien. Il s'agira alors de rendre plus dynamiques les jumelages, les associations et clubs scolaires, les compétitions à enjeux cognitifs tels les questions à choix multiples, l'éducation par l'image, les différentes manifestations culturelles telles les conférences, sketchs, défilés de mode, théâtres, etc. Mais une fois de plus, la sensibilisation et l'accompagnement seront nécessaires afin que tous perçoivent la nécessité et le bien-fondé de ces actions. * 96 « Conscient de la nécessité absolue de protéger l'environnement ». * 97 Art.2 du CPF. |
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