3. Le coût des soins de
santé modernes et pauvreté financière des
ménages
Le coût des soins dans l'utilisation des services de
santé en milieu rural surtout en Afrique Subsaharienne est
d'actualité (Beninguisse ,2018). Une étude sur
l'économie de la santé en Afrique vient confirmer cette relation
en stipulant ce qui suit. « De nos jours, il n'est pas
étonnant de s'entendre dire ici les gens n'ont pas de sous, ils
préfèrent mourir avec leurs maladies » (Takam H,
2017, P 79). La généralisation du recouvrement du coût
imposé par les bailleurs de fonds dans les formations sanitaires
n'a-t-elle pas transformé celles-ci en en centre de soins payant ?
« Pas d'argent, pas de soins » au point d'en vider les
structures, les tarifs de consultation très élevés pour
59% des populations pauvres constitue la première cause de non
consultation (Keunkouo L, 2017, P56).
C'est le cas dans les zones rurales enclavées de
l'arrondissement de Mélong où les populations ne se rendent pas
immédiatement dans les formations sanitaires car ils savent que le prix
de la consultation et du traitement pourra engloutir le budget menstruel de la
famille. C'est la raison pour laquelle la majorité des ménages ne
se rendent pas dans les structures sanitaires pour des soins modernes car le
prix des soins est supérieur à leurs revenus menstruels et
annuels.
Comme le rappelle Commeyras dans son étude sur la
consommation des soins au Cameroun (2006, P110), les dépenses
d'accès aux soins sont réparties entre la consultation, les
médicaments, l'hospitalisation selon les cas, les examens et le
transport. La famille africaine pauvre ne peut supporter la totalité de
ces dépenses, ce qui limite forcément l'accès aux soins.
De même, dans le cas des ménages pauvres pour lesquels la seule
ressource est l'emploi dans le secteur informel et qui n'ont aucune
couverture sociale, il devient courant de renoncer. Les ménages pauvres
ne bénéficiant pas de couverture sociale préfèrent
l'automédication, le recours aux plantes médicinales, moins
coûteuses. Ces ménages attendent que l'état de santé
se dégrade pour recourir à un médecin spécialiste
et il devient nécessaire d'utiliser toutes les stratégies pour
payer la consultation, les analyses et les médicaments. C'est dans ce
sens que « Lorsque je suis malade, je reste à la maison et
c'est lorsque ma situation sanitaire s'aggrave que je fais des efforts pour
me rendre à l'hôpital » affirme un chef de
ménage âgé de 45 ans nommé Monsieur NGANG A.
Les ménages (90%) estiment que le coût de
traitement en cas en maladie dans les formations sanitaires modernes est trop
élevé car ils ont des revenus très bas pour couvrir les
soins de santé modernes. C'est ainsi que le tableau suivant retrace le
coût des soins :
Tableau 11: Les
dépenses des soins de santé modernes dans les
ménages
Coût de la consultation
|
Pourcentage
|
Coût d'hospitalisation
|
Pourcentage
|
Coût de traitement
|
400F-600F
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40%
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1000 F/jour
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96,67%
|
2000 F-10000F (30%)
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600F-800F
|
30%
|
2000 F/jour
|
3,33%
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10000F-20000F (10%)
|
800F-1000F
|
20%
|
|
|
20000F-50000F (12%)
|
Plus de 1000 F
|
10%
|
|
|
Plus de 50000F (15%)
|
Total
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100%
|
|
100%
|
67%
|
Source : enquête de terrain 2020
D'après ce tableau, il ressort d'une part que 80% de
ménages ont affirmé que le coût de la consultation est
compris entre 400F-600F, 10% ont affirmé avoir fait la consultation
comprise entre 600F-800 F, 8% comprise entre 800 F-1000F et enfin 2% ont
été consulté à plus de 1000 F. Ensuite, les
coûts d'hospitalisation ne sont pas en reste car 96,67 % de
ménages ont été hospitalisé à un coût
compris 400 F et 500 F par jour tandis que 3,33% de ménages ont
affirmé avoir été hospitalisés à un
coût compris entre 600 F et 800 F par jour.
D'autre part, 40% de ménages ont déclaré
avoir dépensé les frais de traitement variant de 2000F-10000F,
alors que 30% de ménages ont avoué dépenser une somme
comprise entre 10000F-20000F, 20% ont dépensé une somme comprise
entre 20000F-50000F dans le ménage, enfin 10% de ménages
dépensent plus de 50000F pour le traitement. L'accès aux
structures financières est donc limité dans les ménages
des zones rurales enclavées de l'arrondissement de Mélong. Il est
aussi à noter que le poids de l'âge des chefs de ménages
Le problème des ressources financières est un
obstacle à l'accès aux services de santé car de nombreuses
populations rurales en Afrique Sub-saharienne ont renoncé la
fréquentation des centres de santé. Cela a été
démontré par de nombreuses études empiriques : Wyss
et Nandjinger (1995) pour les cas respectifs du Tchad et du Kenya et Meuwisen
(2002) pour le cas du Niger. Ces études montrent que l'introduction de
la participation financière aux soins par les usagers
discriminés, les personnes à faibles revenus car la demande des
soins de santé est une fonction croissante du niveau de revenu. Elle est
d'autant plus forte que le niveau de revenu est élevé. Kouadio
(2012, P 280), nous prend l'exemple dans des localités
comme « Niablé et Ebilassokro, situées
à la frontière ivoiro-ghanéenne, de nombreux malades
reçoivent des soins médicaux au Ghana. Ils estiment que les soins
médicaux coûtent trop cher en Côte-d'Ivoire au regard de
leur pouvoir d'achat. Malgré les programmes de développement
sanitaire, une frange de la population rurale n'arrive pas à se soigner.
Que faire pour que la situation s'améliore ? »
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