Le régime de l'immigration irrégulière par voie maritime en droit international publicpar Mariette Amandine Fleur GNAMBA Université Jean Lorougnon Guédé de Daloa (Côte d'Ivoire) - Master 2 Spécialité Droit public 2017 |
B. La question du caractère coutumier du principe de non refoulementLa question du caractère ou non coutumier du principe de non refoulement est importante car elle permet de savoir si les États non parties à la Convention sont astreints à son respect. Sur ce point, deux thèses s'affrontent : la thèse du caractère non coutumier et la thèse dominante selon laquelle le principe fait partie du droit coutumier international. Le premier camp est celui de James Hathaway selon lequel, le principe n'a pas rang de principe coutumier en droit international mais la pratique internationale, le camp adverse, indique le contraire. Il n'y a pas de consensus général sur la nature coutumière du principe de non refoulement. Il existe un véritable débat doctrinal à ce sujet. Le premier camp accorde un tel caractère au principe tandis que l'autre le lui dénie109(*). James Hathaway est la principale figure du déni de ce caractère coutumier. James Hathaway est une référence en droit international humanitaire110(*). Pour qu'il y ait coutume en droit international, il faut deux éléments : l'existence d'une pratique ayant une certaine récurrence et l'opinio juris c'est-à-dire la conviction d'appliquer le droit. Selon James Hathaway, ces deux éléments manquent pour que le principe de non refoulement soit considéré comme un principe coutumier. En effet, dans son ouvrage intitulé « The Rights of Refugees under International Law » paru en 2005, il estime que l'opinio juris n'a pas été constituée. De nombreux États ont en effet retourné des réfugiés dans des pays dangereux pour leur vie et leur liberté. Il n'y a donc pas assez d'éléments de pratique et d'opinio juris, éléments essentiels pour constituer une coutume, pour affirmer que le principe est une règle coutumière du droit international111(*). Le camp du caractère coutumier prend pour appui la jurisprudence de la Cour Internationale de Justice dans son arrêt Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci112(*). Dans cet arrêt, la Cour affirme que lorsqu'un État ne respecte pas une règle reconnue et se défend en invoquant des exceptions à cette règle, cela confirme la force de la norme elle-même. Ainsi, la pratique des États peut être vue comme renforçant la force légale de la norme. Aussi, la CIJ précise que la pratique des États signifie qu'elle doit être généralisée et non strictement universelle113(*). Le camp du caractère coutumier se base également sur le Protocole de 1967 à la convention sur les réfugiés spécifiquement sur son article 1 (1) qui dispose que « Les États parties au présent Protocole s'engagent à appliquer aux réfugiés, tels qu'ils sont définis ci-après, les articles 2 à 34 inclus de la Convention » donc l'article 33 de la convention sur les réfugiés qui est la base juridique du principe de non-refoulement. Il est admis dans la pratique internationale que le principe de non refoulement est coutumier. Selon le glossaire de l'UE sur la migration,« le principe de non-refoulement fait partie du droit international coutumier et est, de ce fait, obligatoire pour tous les États, qu'ils soient ou non signataires de la Convention de Genève de 1951 ». Aussi, le comité exécutif du HCR dans sa conclusion n°25 de 1982 l'a confirmé également. Une autre polémique existe dans la pratique internationale sur l'étendue territoriale du principe de non-refoulement. Si le caractère coutumier répond à la question des États concernés par l'application du principe de non-refoulement, ici il faudra répondre à l'interrogation suivante : où s'applique le principe ? * 109 Barbara MILTNER, « Irregular Maritime Migration: Refugee Protection Issues in Rescue and Interception », Fordham International Law Journal, vol. 30. Issue 1,Article 3 (2006), p.?27. * 110 ' 'Sophie RODEN, « Turning their Back on the Law? The Legality of the Coalition's Maritime Interdiction and Return Policy », loc. cit., p. 4. * 111 ' 'James MANSFIELD, « Extraterritorial Application and Customary Norm Assessment of Non- Refoulement: The Legality of Australia's «Turn-Back» Policy », The University of Notre Dame Australia Law Review, vol. 17. (2015). * 112COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua contre États-Unis), 1986. * 113 Francesco MESSINEO, « Non-refoulement Obligations in Public International Law: Towards a New Protection Status » dans Satvinder Juss (ed), Research Companion to Migration Theory and Policy,, Ashgate, 2013, p.?17. |
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