Le régime de l'immigration irrégulière par voie maritime en droit international publicpar Mariette Amandine Fleur GNAMBA Université Jean Lorougnon Guédé de Daloa (Côte d'Ivoire) - Master 2 Spécialité Droit public 2017 |
Paragraphe 2. Les limites actuelles du Pacte de MarrakechLe Pacte de Marrakech a encore de nombreuses imperfections qu'il faut prendre en compte.Le pacte accorde encore une place de choix aux États pour sa mise en oeuvre (A) et son caractère non contraignant qui est son plus grand argument, est aussi une faiblesse (B). A. Une place encore prégnante des acteurs étatiques dans la mise en oeuvre du PacteLe pacte réaffirme toujours le droit souverain des États à définir leurs politiques migratoires dans le paragraphe 15 (c) :«Le Pacte mondial réaffirme le droit souverain des États de définir leurs politiques migratoires nationales et leur droit de gérer les migrations relevant de leur compétence, dans le respect du droit international. Compte tenu de la diversité des situations, des politiques, des priorités et des conditions d'entrée, de séjour et de travail des pays, les États peuvent, dans les limites de leur juridiction souveraine, opérer la distinction entre migrations régulières et irrégulières, notamment lorsqu'ils élaborent des mesures législatives et des politiques aux fins de l'application du Pacte mondial, conformément au droit international ». Le pacte ne cherche pas à réduire considérablement la place étatique dans la gouvernance des migrations. En fin de compte, l'État est toujours le premier sujet de droit international et le seul qui dispose de l'attribut de la souveraineté. Le pacte réaffirme donc que l'État a encore une place de choix dans le nouveau système qui se base sur l'ancien. Le PMM ne révolutionne pas le système même s'il tente d'inclure le maximum d'acteurs. Son caractère non contraignant fait craindre pour sa mise en oeuvre dans un système encore largement étatique. B. Un caractère non contraignantLe Pacte n'est pas la première idée d'instrument cherchant et ayant pour ambition ultime de mettre en valeur les droits de l'Homme. Dans un régime juridique actuel qui n'est pas cohérent, Alexander Aleinikoff préconise un bill of rights pour garantir dans un seul document les droits de tous les migrants366(*).Cette idée a été et concrétisée en 2010 par Aleinikoff au sein du Georgetown University Law Center qui a conçu the International Migrants Bill of Rights (IMBR)367(*). Cette initiative a pour but de protéger tous les migrants indépendamment de la cause de leur franchissement d'une frontière internationale. Il s'agit d'un instrument de soft law qui a été conçu par un ensemble de chercheurs et d'étudiants qui codifie les règles existantes en 23 principes et propose une définition du migrant international. « The term «migrant» in this Bill refers to a person who is outside of a State of which the migrant is a citizen or national, or, in the case of a stateless migrant, the migrant's State of birth or habitual residence «368(*). D'autres auteurs comme Alexander Betts ont poursuivi avec cette même idée de faire appel à un régime de soft law pour protéger les migrants369(*). Le Pacte de Marrakech ne fait en fin de compte que rappeler des obligations déjà souscrites par les États. Cependant, son grand mérite est d'être une solution « pragmatique »370(*). Il n'est qu'une simple étape vers un régime complet et contraignant.C'est un texte avant tout de compromis371(*). La soft law a pour avantage d'être flexible mais c'est aussi son plus grand inconvénient. Son manque de technicité en fait un mécanisme quelque peu facile à contourner pour des États ayant déjà mis en place des politiques se basant sur une interprétation biaisée du droit. La cause du non-respect du régime juridique en vigueur se trouve dans l'opacité du droit lui-même concernant la définition de ces termes-clés. Ce pourquoi une clarification est nécessaire. Mettre fin au débat sur la détresse en mer et sur les critères de détermination du lieu sûr et leur donner des caractéristiques objectives permettra d'éviter que les États aient recours à leur interprétation personnelle et biaisée au détriment des droits des migrants. Au niveau institutionnel, la création d'une organisation mondiale permettrait de créer un cadre de discussion concret sur ce sujet. Ce qui nous a conduits à analyser la proposition du Pacte pour des migrations, sûres, ordonnées et régulières, accord non contraignant qui propose un cadre d'action sans créer un organe spécifique et qui repose toujours sur les États pour sa mise en oeuvre. Cependant, cette proposition amorce un changement de paradigme en donnant plus de place dans le débat à d'autres acteurs de la question des migrations. La contribution du Pacte n'est qu'une étape mais une étape significative vers un traitement dépolitisé des migrations. * 366 Alexander T. ALEINIKOFF, « International Legal Norms on Migration: Substance without Architecture », loc. cit., p. 477. * 367 Ian M. KYSEL, « Promoting the Recognition and Protection of the Rights of All Migrants Using a Soft-Law International Migrants Bill of Rights », Journal on Migration and Human Security, vol. 4. Number 2 (2016), p. 29?44. * 368 Ibid., p. 36. * 369 `' - `'-`'Alexander BETTS, « Towards a `Soft Law' Framework for the Protection of Vulnerable Irregular Migrants », International Journal of Refugee Law, vol. Vol. 22. No. 2 (2010), p. 209-236. ; Alexander BETTS, « Soft Law and the Protection of Vulnerable Migrants », Georgetown Immigration Law Journal, vol. Vol. 24. (2010), p. 533. * 370 ''Baptiste JOUZIER, Une analyse critique du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, op. cit., p. 43. * 371 ''Ibid., p. 156. |
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