2 ESPACES VERTS URBAINS ET ECHELLES DE
TRAVAIL
Cette problématique doit être
développée afin de décider d'une sélection d'un
cadre analytique pertinent, rendant compte des phénomènes
liés aux espaces verts urbains. Pour ce faire nous nous arrêtons
sur leurs fonctions. Une catégorisation simple en avait
été faite, entre fonctions issues de la fréquentation et
fonctions propres. Chacune d'entre elles, s'opère à des
échelles diverses. De plus, l'aspect spatial de quelques études
sur le besoin des espaces verts urbains nous permet d'enrichir notre base de
décision quant à la définition de nos cadres de
travail.
2.1 FONCTIONS ISSUES DE LA FRÉQUENTATION
De prime abord, les espaces verts urbains renvoient à
la notion de tranquillité. Ainsi une des fonctions principales des parcs
et autres squares est principalement la recherche de quiétude,
typiquement pour des personnes seules. Tranchant avec le minéral urbain,
la fréquentation des espaces verts urbains trouve sa raison d'être
dans le besoin sociologique de sortir du stress engendré par la
densité et le dynamisme présent dans la ville construite. En
effet, «l'espace vert *...+ se présente comme la
contrepartie idéalisée des conditions de vie en milieu
urbain» (Merlin 2009 : 361). Le détachement mental de l'urbain
fonctionnel suppose un environnement vide ou inattendu ; c'est l'une des
particularités du monde végétal inséré dans
un contexte bâti que de créer des conjonctions fortuites. Plus
précisément, «le square et encore plus le parc sont des
espaces publics perçus comme des havres de paix et de liberté,
des refuges à l'abri des turbulences urbaines» (Boutefeu, 2005
: 8). Ils apportent «une réponse aisée à la
dualité calme-sécurité/risque, que recherche l'homme dans
son développement» (Merlin, 2009 : 361). Techniquement ce sont
les effets de protection contre le vent, le soleil, et l'accès à
une certaine intimité visuelle, qui l'explique. Psychologiquement,
l'effet de bulle protectrice, soit la moindre intensité
d'interactions humaines, offre une protection salvatrice dans des contextes
urbains où la densité des contacts entre individus est
fréquemment source de stress voire de mal-être. Les prises
urbaines entre un individu et un espace vert urbain sont d'un tout autre tenant
que celles qu'il peut explorer avec la ville minéralisée. Ainsi,
la ville bâtie, riche de structures, invite à développer
des chemins de pensée liant sa propre personne à la
société et à des pratiques
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définies par l'essence même de ces structures. La
présence d'autres individus suppose, elle, l'échange verbal ou
visuel. A contrario, le rapport entre soi-même et le
règne végétal offre des prises urbaines
différentes, où la quiétude des lieux et la
simplicité de l'environnement aide à la réflexion, mais
également où l'appropriation potentielle de l'espace est
radicalement autre que dans le reste de la ville. Autrement dit, et pour
simplifier le raisonnement, ce sont les valeurs que promeut l'idée de
se mettre au vert que nous entendons ici comme fonction. Les champs
nécessaires à des analyses comprenant ces
phénomènes relèvent de compétences en sociologie et
en psychologie, que nous ne saurions aborder. L'analyse se veut
également efficace à des micro-échelles, sans exclure des
méthodologies comparatives. Ainsi ces premières fonctions des
espaces verts urbains invitent à une sélection rigoureuse
comprenant les plus petits d'entre eux.
Les équipements des parcs et squares induisent des
fonctions spécifiées. Théâtres des joutes
enfantines, les espaces verts urbains munis ce type de mobilier urbain sont
fréquents. Incontournables, les bancs permettent d'inviter le passant
à s'approprier les lieux autrement que par son passage. Bien que la
répartition des espaces verts urbains puisse être plus pertinente
en pondérant leur valeur d'après leur équipement utile, ce
travail de précision est irréalisable dans le cadre de
mémoire.
Une autre fonction des espaces verts urbains est d'aider
à la lisibilité de la ville. Les formes que peut prendre le
végétal lorsqu'il est regroupé sont parfois massives, en
raison de la hauteur, la largeur et de l'effet de couverture qui peuvent
être atteintes par un arbre. Au-delà de la fonction de
repère, ces véritables structures peuvent canaliser les usagers
de l'espace public. Ainsi, une paire d'arbre fait figure de symbole de
franchissement ; une voûte végétale inspire à
être franchie. Comme le souligne Lévy et Lussault (2007 : 528) :
«Le jardin, en effet, territorialise le parcours, la promenade, la
déambulation». Grâce à sa liberté de
mouvement, le piéton est le premier concerné par ces effets.
Quant aux transports motorisés, les alignements en bordure de route
peuvent donner l'impression de contenir ce flux et de libérer ainsi
l'espace alentours. Par espace vert urbain nous n'entendons pas de telles
structures puisque le sol n'est en principe pas en herbe mais bien
minéral. Néanmoins, il est relevable que plus la masse de
végétal regroupé est importante, plus son impact est grand
sur la lisibilité urbaine. Ainsi, cette fonction peut être
incorporée dans des analyses avec de grandes échelles de
travail.
Les déplacements de personnes sont un flux permettant
la fréquentation des espaces verts. Le sol de ces derniers
présente l'avantage de ne pas être aménagé pour la
mobilité polluante, qui lui ôterait une partie de son
caractère naturel, mais d'être présent en abondance et de
pouvoir être recouvert
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de divers matériaux ne lui conférant pas moins
d'aspect végétal. Chemins de terre, d'écorces, de
graviers, cailloutés, sentiers à même la terre et
même bétonnages étroits permettent la déambulation.
À l'heure où les transports individuels motorisés sont
tentés d'être réduits au mieux, dans la plus grande partie
des projets urbains visant à augmenter la qualité de vie du
citoyen, les espaces verts offrent une alternative attractive. De par leur
capacité à contenir un flux de piétons, cyclistes et
autres modes de transports non polluants, ils sont devenus incontournable dans
la planification urbaine, ne serait-ce que pour la symbiose créée
avec la mobilité douce. Bien que des petites échelles de travail
puissent mieux rendre compte de l'accessibilité réelle des
espaces verts urbains, la surface totale par ville de ces derniers est un
indicateur déjà intéressant.
Jean Cabanel dans sa préface de l'urbanisme
végétal (Stefulesco, 1993 : 9), nous relate que les
«jardins, parcs, squares, ensembles
végétaux...constituent des éléments essentiels de
la qualité du champ de vie en ville, encore faut-il qu'ils soient bien
disposés, bien choisis et bien plantés pour créer des
volumes et des ambiances qui répondent aux aspirations des
habitants». En effet, si tous les espaces verts d'une ville sont
regroupés dans quelques quartiers, les autres portions de ville n'en
profitent pas. La surface totale des espaces verts urbains par métropole
ne suffit pas à décrire les répartitions intraurbaines de
la nature en ville. Le degré d'homogénéité de la
localisation des espaces verts est donc important. La création de
cartographies par métropole permet de l'estimer, il en découle
que les cartes créés doivent être suffisamment grandes pour
ce faire.
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