PREMIÈRE PARTIE :
L'OPÉRATION YABASSI-BAFANG 22 ANS APRÈS
SON LANCEMENT
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L'implantation d'une population sur un territoire donné
est souvent le résultat d ' un processus de conquête militaire ou
d'une simple recherche pacifique d'un espace vital plus large. Dans un cas
comme dans 1'autre, le hasard et la spontanéité soutendent
1'émigration, à moins qu'une autorité soucieuse de
précision et d'organisation, ne décide de réaliser une
oeuvre solide et durable visant non seulement à subvenir aux besoins
quotidiens des populations, mais encore à améliorer 1 '
économie générale de la nation. Tel est le cas de
· Opération Yabassi-Bafang, une opération
intégrée de colonisation agricole organisée par les
autorités camerounaises.
L'idée de cette opération a pris corps en 1963,
après plusieurs tractations entre le gouvernement et le PNUD. Une
requête est adressée à ce dernier en vue d'obtenir
l'assistance financière pour la réalisation des études et
1' établissement d 'une planification nécessaire à la
réussite de cette entreprise de colonisation rurale.
En 1964, l'Opération débute par des
études préliminaires sur les possibilités d'organisation
d'une immigration en zone forestière. Compte tenu de l'enclavement; aigu
de la région, il faut relier par route Yabassi à Bafang, et: en
1965, commencent les premiers travaux routiers. Cette colonisation agricole
conduite par la SCET-COOP, va connaître l'installation des premiers
pionniers en 1966. Dès lors, la région de Nkondjock va être
sujette à de profondes mutations socio-économique à tel
point que 1 ' évaluation de l'Opération en 1988 présentera
un bilan mitigé, mais nettement positif. Un tel succès ne peut se
réaliser que grâce à l'adéquation entre les
objectifs du projet le choix de la région.
![](Mutations-et-devenir-des-paysanneries-de-l-operation-Yabassi-Bafang-littoral-Cameroun6.png)
CHAPITRE I
UNE ZONE FAVORABLE À L'IMPLANTATION DES
IMMIGRANTS
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A- LES ATOUTS DU MILIEU PHYSIQUE.
La carte topographique (Ndikiniméki 4c) qui couvre
partiellement la région de l'Opération Yabassi-Bafang, ne
comporte pas de courbes de niveau sur toute sa surface; en plus, certains
documents7, qui font l'état du milieu physique de la
région, ne présentent le relief de façon sommaire.
Ainsi la zone de l'opération Yabassi -Bafang,
située au Sud des hauts plateaux de l'Ouest est délimitée
au Nord par la courbe 1000 m. Les altitudes varient entre 991 m en bordure du
plateau de l'Ouest, 550 mètres autour de Nkondjock, et 324 m
vers Mandia; soit une altitude moyenne de 600 m. Le relief, très
morcelé par des vallées étroites et taillée; de
petits sommets polyconvexes où les pentes supérieures à
25% ne sont pas rares; surtout aux abords des hauts plateaux. Relief
cependant moins accidenté par rapport aux hauts plateaux de l'Ouest dont
les altitudes cumulent parfois à 2000 mètres. Au, fait de cette
proximité, la région de l 'Opération subit des influences
climatiques de ces derniers.
Le climat se caractérise par une chaleur constante
(27° C), une humidité élevée et; plus de 9 mois
pluvieux par an. Ceci permet un large éventail de cultures sous pluie.
Le calendrier agricole peut s'étaler sur toute l'année permettant
aux immigrants d'adapter certaines de leurs cultures d'origine, sans tenir
compte des exigences des sols.
Les sols de la zone de l'opération sont dans
l'ensemble sablonneux, reposant pour la plupart sur du gneiss peu fertile et
convenant à certaines cultures. Toutefois, on y rencontre de
façon dispersée, des sols sur des roches éruptives
récentes, se présentant sous forme de plateaux basaltiques
(Sohock, Nkondjock, Ndockban). Les possibilités culturales sont diverses
au regard de la variété des sols et de l'étendue de la
zone. Ainsi peut-on y pratiquer les cultures des tubercules exigeantes,
(Macabo, Taro), des bananiers plantains, les arbres fruitiers et quelques
céréales (maïs, haricot).
7 Opération Yabassi-Bafang : requête
présenté au PNUD janvier 1968.
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La végétation dominante est la forêt
dense; elle couvre pratiquement toute la région do Nkondjock et regorge
plusieurs essences d'arbres. L'importance de ce bois dans la construction comme
dans la menuiserie et: L'ébénisterie n'est plus à
démontrer. Sous cette végétation dense et continue,
règne une faune abondante. De part leur nature et leur taille, on y
rencontre des oiseaux divers, les rongeurs de toutes sortes, les reptiles et
surtout plusieurs espèces de singes. Dans ce sens, La traduction du nom
Nkondjock est significative à plus d'un titre: "
village des éléphants". D'autres noms dans la
région font toujours référence aux animaux, tel
Nkongmalang qui signifie "village des
caméléons".
Sur le plan géologique, le socle granito-gneissique
affleure sur une grande partie de la région. Au cours de 1 'Histoire, ce
socle a subit une tectonique cassante, c'est ce qui explique les fractures. Le
réseau hydrographique emprunte par secteur ces failles. La région
est limitée à 1'Est par le fleuve Makombé et à
l'Ouest par le Nkam. Ceci nous permet d'affirmer que la région est bien
drainée.
Le milieu physique de 1 'Opération Yabassi-Bafang est
donc loin d'atteindre le degré de répulsion que 1'on laisse
croire.
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