Chapitre IV : Les Comités de Lutte contre la
Répression au Maroc
Alors que la répression bat son plein au Maroc,
l'idée de constituer une caisse de résonance en-dehors du pays en
faveur des détenus d'opinions, fit son chemin. Profitant d'une forte
présence communautaire maghrébine généralement et
marocaine plus particulièrement en Belgique, les Comités de Lutte
contre la Répression sont directement nés d'une demande
formulée par les militants marocains. Durant l'été 1970,
un projet d'un Comité de Lutte contre la Répression au Maroc
était né au Maroc. Cet embryon de CLCRM regroupait cinq
associations : l'UNEM, l'Union Nationale des Ingénieurs du Maroc,
l'Association des Jeunes Avocats, l'Union des Ecrivains du Maroc et le Syndicat
National de l'Enseignement Supérieur. Mais ce projet a été
tout de suite interdit par le régime141.
Deux ans plus tard, entre février et mars 1972, le
premier Comité de Lutte contre la Répression voit le jour
à Paris. A la demande des militants marocains provenant des plus
importants mouvements politiques de gauche vus plus haut, le bureau de Paris
apparaîtra comme la première expérimentation en termes de
dénonciation de la répression au Maroc.
A. Le Comité de Paris : Comité pionnier
1972
Suivant le contexte de la puissante répression
politique au Maroc et à l'étranger, le Comité de Paris
s'activait à constituer des dossiers sur les détenus politiques
au Maroc.
Au sein du Comité parisien, émergeront deux noms
incontournables : il s'agit de François Della Sudda et de Christine
Jouvain - Daure-Serfaty*. Directeur de publication de la revue Souffle
depuis sa censure au Maroc en 1972142, François Della
Sudda poursuivra sa tâche dans l'édition des bulletins
d'informations. Très impliquée dans la lutte contre la
répression au Maroc, Christine Jouvain - Daure-
Serfaty* multipliera ses contacts avec l'AMF, l'Association
des Travailleurs Marocains de France (ATMF), mais aussi avec Amnesty
International et la Ligue des Droits de l'Homme, par l'intermédiaire de
l'avocat Alain Martinet, pour organiser les premières missions
juridiques au Maroc. Ces missions avaient
139 I. VAN DER VALK, in N. OUALI (dir.), Trajectoires et
dynamiques migratoires de l'immigration marocaine de Belgique, Bruxelles,
Bruylant, Coll. Carrefours, N°4, 2004, pp. 339-347.
140 CEGES, Fonds Pierre Le Grève, AA 1936, Liasse
n°407, Les CLCRM - Comptes rendus et documents internes : Bilan des
activités du MAB envoyé au CCRM de Bruxelles daté du 7
mars 1979.
141 K. SEFRIOUI, La revue Souffles 1966-1973 : Espoirs de
révolution culturelle au Maroc, op. cit., pp. 396-397.
142 F. DELLA SUDDA (dir.), Souffles : revue culturelle arabe
du Maghreb, Paris, N°2 et N°3, octobre 1973-avril 1974.
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pour but d'observer la bonne marche des procès dans les
tribunaux en veillant aux respects des dispositions constitutionnelles du
régime marocain et internationales relatives aux droits de l'Homme.
a.1 Les objectifs du Comité
Les objectifs du Comité de Paris sont formalisés
en 18 points et énoncent en substance les dispositions
suivantes143: informer sur la répression au Maroc, soutenir
matériellement les victimes, assurer leur défense par l'envoi de
missions juridiques et médicales, populariser les luttes du Peuple
marocain contre la répression et pour l'obtention des libertés
fondamentales. Ces informations sur la répression sont transmises
à la presse, reprises dans un bulletin ; elles sont assemblées
dans des dossiers qui sont envoyés aux organisations internationales
(tel l'ONU, la Croix-Rouge, etc...) et aux représentants politiques
français.
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