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MASTER 2 FINANCE D'ENTREPRISE
ANALYSE STRATÉGIQUE INDUSTRIELLE ET
FINANCIÈRE
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Secteur publicitaire : une révolution
industrielle mise en évidence par l'échec de la fusion
Publicis-Omnicom
Mémoire rédigé par M. Thomas CHABROUD et
M. Clément MÉRILLET sous la direction de M.
Frédéric LEBON
Année universitaire 2013/2014
Nous tenons à remercier M. Frédéric
LEBON pour avoir accepté de consacrer de son temps à notre
travail.
Nous remercions toute l'équipe
pédagogique du Master 2 Analyse Stratégique, Industrielle et
Financière pour la qualité de leurs enseignements et pour nous
avoir donné les outils nécessaires à l'accomplissement de
ce mémoire.
I. ÉTAT DES LIEUX 2
INTRODUCTION : UN CURIEUX RETOURNEMENT DE SITUATION 2
A. PRESENTATION DE LA TRANSACTION 5
1) Les motivations 5
2) Objectifs stratégiques 6
3) Objectifs financiers 7
4) Caractéristiques de la « fusion entre
égaux » 7
B. QUESTIONNEMENT INITIAL SUR L'EGALITE 8
1) Remise en question des critères
d'égalité annoncés 10
2) La fusion entre égaux par contrainte 19
C. ANNONCE DE L'ABANDON DU PROJET 19
1) « Une bataille d'égos? » 22
2) « Amateurisme? » 24
II. MISE EN PERSPECTIVE DE LA PROBLÉMATIQUE
26
A. ÉVIDENCE D'UN DISCOURS DE COMMUNICATION 26
B. CROISEMENT DES DIFFERENTES SOURCES 27
III. ANALYSE SECTORIELLE 29
A. PRESENTATION DU SECTEUR PUBLICITAIRE 29
1) Principales entreprises 29
2) La chaîne de valeur du secteur 31
3) Structure du secteur 33
4) Les facteurs clés de succès 44
B. INTERNET : CHANGEMENT DE PARADIGME TECHNOLOGIQUE 44
1) Rappels théoriques 46
2) L'attractivité du marché de la
publicité sur Internet 49
IV. CONCLUSION 52
V. ANNEXES 53
2
I. ÉTAT DES LIEUX
Introduction : un curieux retournement de situation
« C'est un peu difficile de justifier
pourquoi ils ont mis dix mois à se rendre compte qu'ils ne pouvaient pas
se mettre ensemble et pourquoi ils ont dépensé quelques centaines
de millions de dollars pour le comprendre. »
Martin Sorrel, PDG de WPP1
L'échec de « la transaction de l'année
» qui devait avoir lieu entre le groupe américain Omnicom et le
groupe français Publicis est un cas d'actualité qui suscite
l'étonnement.
Tout a commencé en janvier 2013, lors d'une discussion
informelle, Maurice Lévy (PDG de Publicis Groupe) et John Wren (CEO
d'Omnicom) évoquent la possibilité d'un rapprochement entre les
deux groupes.
En juillet 2013, les deux dirigeants convoquent les
journalistes et annoncent triomphalement lors d'une conférence de
presse2 à Paris, le projet de « fusion entre
égaux » entre les deux géants de la publicité.
La nouvelle entité baptisée Publicis-Omnicom
Groupe qui compterait environ 130 000 employés répartis sur les 5
continents, est présentée comme le futur leader mondial du
secteur publicitaire en termes de parts de marché. En effet, le chiffre
d'affaires combiné du second (Omnicom) et du troisième groupe
mondial (Publicis), estimé à 17,7 milliards d'euros en 2012,
aurait permis au groupe fusionné de surpasser les 12 milliards d'euros
de l'actuel numéro un, le britannique WPP.
Le projet est immédiatement accueilli et validé par
les actionnaires de part et d'autre.
1
http://www.lemonde.fr/economie/article/2014/05/10/publicis-omnicom-le-jour-d-apres-l-echec
4414620 3234.html
2
https://www.youtube.com/watch?v=aXpghY8CLM
3
Pourtant, en mai 2014, le projet présenté
quelques mois auparavant avec tant de conviction est abandonné par
consentement mutuel. Des deux côtés, les communications publiques
mettront en avant que le projet n'était finalement qu'une
opportunité et non pas une nécessité.
Au-delà du ton sarcastique perceptible, et
compréhensible de la part du principal concurrent, la remarque de Martin
Sorrel inscrite en préambule illustre un légitime
étonnement autour de ce curieux retournement de situation, qui
vraisemblablement, au vu du temps et des sommes investies en vain, est un
échec de part et d'autre.
Cet étonnement est à l'origine de notre
réflexion : quelle est la nature des difficultés qui ont
contraint ce projet à être abandonné? De toute
évidence ces difficultés revêtent un caractère
particulier car elles n'auront pas été anticipées par deux
hommes pourtant chevronnés en matière de fusions-acquisitions.
John Wren est à la tête d'Omnicom depuis 15 ans mais a
passé en tout près de 30 ans au sein de la société.
Quant à Maurice Lévy, il dirige Publicis depuis presque 30 ans,
mais y a passé plus de 40 ans de sa carrière. Les deux hommes ont
donc participé à un nombre conséquent d'acquisitions
puisque Publicis et Omnicom se développent essentiellement par la
recherche de nouvelles compétences via la croissance externe, en ciblant
des agences de communication pour étendre leur réseau.
Nous voulons analyser et comprendre, au-delà de la
simple retranscription des communications publiques de Publicis et d'Omnicom
ainsi que de celle des opinions des principaux médias d'informations
économiques et financières, la particularité de ces
difficultés.
En tant qu'étudiants de Master en Analyse
Stratégique Industrielle et Financière, il nous est apparu qu'un
travail d'élucidation de ces difficultés donnait lieu à la
mobilisation de nombreuses connaissances en matière de théorie
financière (principes généraux des fusions-acquisitions et
finance comportementale) et d'étude sectorielle, et nous permettrait de
formuler en toute indépendance une critique rationnelle sur les causes
de l'abandon de ce projet.
4
Mais juste avant de nous y intéresser de façon plus
approfondie il convient de fixer clairement notre cadre
d'analyse.
Il semble inconcevable que l'annonce du projet ait pu
être un leurre orchestré dans la plus grande discrétion par
les équipes dirigeantes des deux groupes.
Quand bien même on voulait admettre par exemple une
complicité temporaire entre les deux entités pour que l'annonce
virtuelle de la fusion s'inscrive dans un objectif de veille stratégique
permettant d'observer la réaction des principaux concurrents du secteur.
Et quand bien même encore nous voulions admettre que les résultats
observés puissent être considérés comme retour sur
investissement des frais liés aux rémunérations d'avocats
et de banquiers d'affaires impliqués par le projet. Cette
hypothèse de complot est très certainement irréaliste car
elle exige une mise en oeuvre complexe de la part de ses instigateurs. Il
faudrait d'abord pouvoir être certain de la discrétion absolue de
chacun des membres des directoires de part et d'autre. Il faudrait par ailleurs
désigner avec justesse les collaborateurs qui seraient mis dans la
confidence afin de veiller à la synchronisation de cette orientation
secrète avec la stratégie officielle pour assurer
l'opérationnalité de chacun des groupes, tout en comptant
également sur la discrétion absolue de ces collaborateurs.
Ce type de scénario complexe engage une
probabilité trop élevée de fuite de la
confidentialité qui s'avèrerait désastreuse pour les
dirigeants. Cela aurait fait éclater au grand jour la manipulation de
l'opinion des actionnaires et aurait non seulement coûté aux
dirigeants leur poste actuel mais aussi entaché leur
crédibilité et leur carrière. Par conséquent, ce
risque est suffisamment dissuasif pour qu'ils ne s'y soient pas
aventurés. Nous excluons donc complètement cette thèse et
ne développerons pas davantage les conditions dans lesquelles un tel
complot aurait pu avoir été projeté.
Ainsi, nous établissons le postulat que la
volonté initiale était résolument de part et d'autre de
faire aboutir cette fusion et c'est à partir de ce cadre d'analyse que
nous étudierons les difficultés qui l'ont entravée.
5
Pour comprendre et analyser ces difficultés, il est
nécessaire de procéder à une décomposition
chronologique des évènements à travers laquelle nous
soulèverons premièrement les points d'interrogation qui
existaient dès le départ (partie A - présentation de la
transaction) et ensuite les points de désaccord mis en avant au moment
de la rupture (partie B - annonce de l'échec).
A. Présentation de la transaction
1) Les motivations
Rappelons tout d'abord que comme dans la majorité des
opérations de fusions acquisitions, les dirigeants sont les instigateurs
du projet, mais ce sont les actionnaires qui le valident.
Au moment de l'annonce du projet et avant validation de
celui-ci, John Wren et Maurice Lévy sont déjà en
pourparlers depuis 6 mois : ils sont parvenus à un accord de principe,
le « BCA » (Business Combination Agreement)3, qui fixe les
modalités de la fusion entre égaux.
Sur la base des communiqués officiels et en particulier
sur le document de présentation à destination des
investisseurs4, la motivation principale du projet est de
créer de la valeur pour les actionnaires, les clients et les
collaborateurs des deux groupes.
Cette création de valeur proviendrait du fait que le
groupe fusionné s'impose en leader du secteur publicitaire.
Cette position de référence permettrait à
la nouvelle entité de dégager des flux de trésorerie
futurs optimisés par rapports à ceux des sociétés
en stand alone, ce qui augmenterait les valeurs des titres et
bénéficierait aux actionnaires des deux
sociétés.
L'expertise renforcée grâce au cumul des
compétences permettrait au nouveau groupe de faire
bénéficier à tous ses clients d'un service plus pointu
ainsi que d'une disponibilité internationale renforcée.
3
http://www.sec.gov/Archives/edgar/data/29989/000089109213006547/e54781ex2-1.htm
4
http://www.publicisgroupe.com/fr/media/display/id/6954
6
Enfin, l'optimisation financière, ainsi que le cumul
des compétences bénéficierait aux collaborateurs du groupe
fusionné dans le sens où ils profiteraient de cette croissance
à travers des ; avantages en nature (il était d'ailleurs dit
qu'aucune procédure de licenciement collectif n'était
envisagée)
Ces motivations de la fusion s'inscrivent dans les motivations
classiques des opérations de croissance externe : la création de
valeur et la pérennité de cette création de valeur. Notons
toutefois que, si l'existence d'une création de valeur pour les
actionnaires semble évidente pour valider la fusion, ce n'est pas le cas
de la création de valeur pour les clients et collaborateurs puisque
ceux-ci n'ont pas de pouvoir de décision.
Nous allons désormais décrire les objectifs
poursuivis par le groupe consolidé. Ces objectifs représentent
les moyens par lesquels les créations de valeur visées seront
atteintes, et il est possible de les décomposer en deux
catégories : les objectifs stratégiques et les objectifs
financiers.
2) Objectifs stratégiques
Stratégiquement, l'ambition des deux
sociétés est de bâtir « un groupe nouveau pour un
monde
nouveau ».
Cette idée se traduit par la combinaison des forces de
deux grands groupes - des équipes au talent reconnu, des portefeuilles
clients de premier choix et une forte capacité d'innovation - pour
affirmer une position de leader dans un contexte publicitaire en pleine
mutation.
Cette ambition stratégique s'articule autour de deux
axes.
a) Le développement des compétences dans
le digital
L'objectif majeur est de former un groupe suffisamment
important pour développer des compétences dans la
publicité numérique et pallier au retard pris sur ce segment par
rapport aux nouveaux acteurs de l'Internet tels que Google, Facebook ou encore
Twitter, qui connaissent un essor important ces dernières
années.
7
b) Présence renforcée dans les pays
émergents
Par ailleurs, la fusion allait permettre d'appliquer le cumul
des compétences des deux groupes dans le monde entier à travers
plus de 100 pays et en particulier d'exploiter plus efficacement les
marchés émergents qui connaissent les meilleures croissances.
3) Objectifs financiers
Financièrement, la création directe de valeur
pour les actionnaires de chacun des deux groupes s'obtiendrait par des
synergies générées par le biais de deux leviers.
a) Les économies d'échelles
D'après la présentation, des «
économies seraient réalisées sur les prestations
externes grâce aux effets d'échelle et à
l'élimination des doublons, pour un montant total estimé à
260M$. »
b) Les optimisations internes
D'autres « économies seraient induites par la mise
en commun des ressources et des infrastructures (achats, plateformes de
production, fonctions supports), pour un montant total estimé à
240M$. »
L'impact relutif de ces synergies sur la marge
opérationnelle et sur le BPA ajusté était
évalué à 500M$, ce qui aurait porté le taux de
distribution de dividendes à 35% pour les actionnaires (contre un taux
de distribution actuel de 33% pour Omnicom et de 25% pour Publicis).
En synthèse des objectifs stratégiques et
financiers du groupe consolidé : obtenir une taille critique pour
s'imposer sur le segment du numérique tout en optimisant le profit par
la technique de rentabilité de Publicis appliquée au potentiel
des marchés émergents fournis par Omnicom.
4) Caractéristiques de la « fusion entre
égaux »
Cette "fusion entre égaux" se traduit par la
volonté d'un partage parfait du pouvoir entre les deux actionnariats et
les deux équipes dirigeantes au sein du nouvel ensemble. Dans le BCA,
figurait une clause
8
de parfaite égalité stipulant que les deux
parties s'engageraient à fournir leurs meilleurs efforts pour respecter
l'équilibre dans tous les domaines au sein du nouveau groupe.
Cette volonté est visible à travers les principales
modalités de la fusion décrites ci-dessous.
Un actionnariat égal
Le partage de l'actionnariat devait être tout à
fait égal : à travers un échange d'actions, il devait
être légèrement majoritaire pour Publicis (50,3% de la
nouvelle entité) dans un premier temps, avant que ne soit
distribué un dividende exceptionnel aux actionnaires d'Omnicom, ce qui
aurait entraîné le rééquilibrage parfait.
Une gouvernance équilibrée
Par ailleurs, la gouvernance serait équilibrée.
Au sein de la nouvelle entité, pendant les 30 premiers mois, John Wren
et Maurice Lévy auraient été tous deux « co-CEO
», avant que Maurice Lévy ne cède sa place. De même,
au sein du conseil d'Administration la représentation serait
également distribuée.
Le reste des postes n'était pas défini avec
précision, mais selon la clause de parfaite égalité
inscrite dans le BCA l'équilibre au sein de la gouvernance devait
être respecté.
Un siège basé à Amsterdam et une
cotation boursière à Paris et à New York
La domiciliation du siège devait être au
Pays-Bas, dans l'optique de transférer le pouvoir décisionnaire
du futur groupe en territoire neutre.
De même, pour conserver équitablement
l'identité à la fois américaine et française, les
deux places de cotation, Paris et New York, auraient été
conservées.
B. Questionnement initial sur
l'égalité
Il est important de noter tout d'abord que le terme de «
fusion entre égaux » ne renvoie pas à un terme technique
avec une définition précise.
9
Comme nous l'avons vu, le BCA qui définit les
modalités de la fusion entre égaux est signé avant l'avis
des actionnaires, ce qui implique que l'appréciation de
l'égalité vient initialement du point de vue des dirigeants.
Mais au moment de l'annonce, l'évaluation
détaillée sur les termes de l'égalité n'est pas
communiquée.
Dans une logique financière, le partage parfait du
pouvoir dans les modalités que nous venons de décrire, à
savoir identiquement réparti entre actionnaires et dirigeants de chacun
des deux groupes, devrait supposer l'entente préalable des deux parties
instigatrices du projet sur une évaluation qui indique que cette
égalité réponde à une certaine
réalité mathématique.
En effet, cette fusion entre égaux consiste à
céder, d'un côté comme de l'autre, 50% de son
identité ; or aucun des deux groupes n'est initialement à vendre,
ni ne se trouve en situation financière délicate, au contraire
chacun se porte très bien et menait d'ailleurs depuis de nombreuses
années une politique de croissance externe rythmée par de
nombreuses acquisitions.
Dans un tel contexte, il semble financièrement
irrationnel de part et d'autre de céder 50% de sa souveraineté
sans être parvenu à ce choix par le biais d'une justification
mathématique.
Or, l'absence de détails au moment de l'annonce (qu'il
s'agisse des conférences de presse, du BCA, ou du document de
présentation de la transaction à destination des investisseurs)
invite à s'interroger sur les bases ayant déterminé cette
égalité.
Certes, les points de convergence mis en avant dans les
déclarations des deux hommes témoignent effectivement d'un
équilibre : au moment de l'annonce du projet, la capitalisation
boursière de 13,4 milliards d'euros de Publicis n'est que
légèrement supérieure à celle de 13,1 milliards
d'euros d'Omnicom. Les résultats nets en 2012 sont eux aussi
sensiblement proches : Publicis génère 737 millions d'euros
tandis qu'Omnicom génère 777 millions d'euros de
bénéfice.
10
C'est d'ailleurs sur ces notions de capitalisation
boursière et de résultat net que John Wren formule sa
réponse lorsqu'il est questionné par un journaliste5
sur le fondement de l'expression « fusion entre égaux », en
ajoutant que « cette égalité a été
définie par des évaluateurs de banques d'affaires.»
Cependant, les divergences ne sont pas moindres puisque
Publicis génère 6,6 milliards d'euros de chiffre d'affaires alors
qu'Omnicom génère 11,1 milliards d'euros, soit près du
double!
De même, le français génère un
EBITDA de 1,2 milliards d'euros tandis que l'américain est à 1,6
milliards, ce qui induit une meilleure marge d'EBITDA pour le français :
18% contre 14,7%.
Sur la base de ces éléments financiers, Omnicom
a une part de marché nettement supérieure tandis que Publicis a
une meilleure maîtrise générale de ses coûts.
D'autres divergences se trouvent naturellement dans le
positionnement stratégique de chacun. Publicis est davantage
tourné vers le numérique par le biais de nombreuses acquisitions
d'agences spécialisées dans le digital, alors qu'Omnicom dispose
d'une présence plus significative dans les pays émergents.
Si l'on considère l'ensemble de ces
éléments, l'égalité entre les deux ne semble pas
évidente et d'ailleurs à la lumière des divergences, les
points de convergence mis en avant deviennent finalement contestables.
1) Remise en question des critères
d'égalité annoncés
Tout d'abord les deux résultats nets sont certes
sensiblement proches, mais lorsqu'ils sont rapportés au chiffre
d'affaires il ressort que Publicis dégage une marge nette de 10,6%, soit
une rentabilité plus élevée que celle d'Omnicom à
7,2%. Ce ratio n'apporte pas beaucoup plus d'information que ce que l'on avait
déjà observé à travers la marge d'EBITDA : Publicis
a une meilleure gestion des coûts. Mais ce ratio renforce l'idée
que la simple comparaison des résultats nets n'est pas une mesure
satisfaisante de l'égalité, car cela ne tient pas compte de
l'avantage de Publicis dans l'efficacité à générer
du profit. Cette capacité supplémentaire devrait être
comptabilisée et positionner Publicis non pas égal à
Omnicom, mais supérieur à Omnicom sur ce critère de
bénéfice.
5
https://www.youtube.com/watch?v=e9j4q6WCUwY
11
Le seul pied d'égalité serait alors la
capitalisation boursière des deux groupes. La capitalisation
boursière reflète la valeur de marché d'une
société à un moment précis : le cours de bourse
multiplié par le nombre d'actions. Or, le cours de bourse est variable
et dépend de la demande du titre de la société.
C'est-à-dire que la valeur de marché d'une société
est globalement déterminée par l'anticipation des investisseurs
quant à la capacité de cette société à
créer de la valeur dans l'avenir. De même, les analystes
financiers qui émettent des recommandations ont un impact important sur
l'opinion des investisseurs et en conséquence sur les choix
d'investissement de ces derniers.
Comparer deux valeurs de marché au sein d'un même
secteur semble satisfaisant au premier abord pour estimer que les deux
sociétés ont à peu près le même prix, du
point de vue des anticipations générales sur leurs
capacités respectives à créer de la valeur.
Toutefois, notons que ces valeurs de marché respectives
ne sont ni la résultante d'une seule et même population
d'analystes financiers, ni celle d'une seule et même population
d'investisseurs.
Considérons tout d'abord schématiquement les
deux populations d'analystes financiers qui conseillent l'achat et la vente de
titres : celle qui fournit l'ensemble des recommandations pour Publicis et
celle qui fournit l'ensemble des recommandations pour Omnicom. Ces deux
populations sont strictement différentes. Non seulement ce ne sont pas
les mêmes organismes de conseil qui sont représentés au
sein de chaque population, mais en plus
l'hétérogénéité (les différents types
de recommandations émises au sein d'une même population) est
répartie inégalement. L'ensemble de ces considérations
permet de catégoriser deux combinaisons de subjectivités
strictement inégales.
Quant à ce que l'on nomme la population d'investisseurs
de part et d'autre, nous pouvons appliquer le même raisonnement, en y
ajoutant qu'au-delà de l'inégalité de base, pour chacun
des deux profils d'actionnariat, il y a une répartition
spécifique des degrés de connaissance des fondamentaux
économiques et financiers (niveaux d'analyse des performances, de la
conjoncture macroéconomique, des facteurs psychologiques) ce qui induit
une différente influençabilité par les recommandations des
analystes financiers.
immatériel des entreprises.
12
De plus, avant l'annonce, Publicis est concurrent direct
d'Omnicom, c'est-à-dire que chacune des deux populations
d'investisseurs, différente, projette une anticipation sur la base d'un
profil de société différent, opérant selon la
stratégie mise place dans le cadre du contexte concurrentiel.
Ainsi, la valeur de marché semble être un
indicateur pertinent pour dire que les deux groupes ont à peu
près la même valeur du point de vue « du marché
», mais cet indicateur paraît abstrait dans la mesure où il
est formé par l'agrégation d'une multitude d'individus dont les
motivations individuelles sont diverses.
Par ailleurs, le rapport de la capitalisation boursière
à la valeur comptable des titres d'une société (le Price
to Book ou « PBR ») permet d'observer la part de la valeur de
marché liée à l'anticipation des investisseurs sur la
création de valeur future. À titre illustratif, un PBR de 1
signifie qu'une société n'a pas de valeur au-delà de sa
valeur comptable car la valeur de marché est égale à la
valeur comptable ; alors qu'un PBR de 2 signifie que la valeur de marché
est supérieure à la valeur comptable, et c'est cette part de
survaleur qui est liée aux anticipations positives des investisseurs.
À la date de l'annonce du projet, Publicis avait un PBR de l'ordre de
2,5 tandis qu'Omnicom avait un PBR de 5,56!
Selon un rapport récent7, le PBR est un
indicateur de l'existence de capital immatériel, mais ne permet pas de
traduire sa valeur de façon efficiente. Une forte présomption
existe pour que la part de survaleur de la capitalisation boursière soit
liée à l'appréciation que les investisseurs ont de la
qualité du capital immatériel d'une société (ses
clients, ses collaborateurs, son organisation...) ainsi qu'à
l'appréciation de la capacité de l'équipe dirigeante
à employer correctement ce capital immatériel dans le but de
créer de la valeur. Mais il faut toutefois considérer que cette
survaleur puisse ne pas être uniquement le fruit d'une évaluation
pertinente du capital immatériel, mais aussi le fruit d'une
irrationalité des investisseurs qui suivent le mouvement des cours dans
une logique de mimétisme ou de spéculation.
6
http://ycharts.com/companies/PGPEF/price
to book value
http://ycharts.com/companies/OMC/price
to book value
7 Thesaurus Bercy V1 (2011) -
Référentiel français de mesure de la valeur
extra-financière et financière du capital
13
Il en résulte que nous avons l'indication que la valeur
boursière d'Omnicom est davantage fondée sur une survaleur non
expliquée que celle de Publicis. Dans une optique comparative, cette
survaleur floue l'est d'autant plus d'après notre développement
sur les différences fondamentales entre les deux couples de populations
analystes/investisseurs : comment déterminer la part de survaleur due
à l'appréciation réfléchie et celle due aux
comportements irrationnels des investisseurs de part et d'autre ?
De ce fait, l'indicateur de la valeur boursière ne
semble pas suffisamment pertinent pour statuer, seul, de
l'égalité entre Publicis et Omnicom.
Ainsi sur l'ensemble des éléments
abordés, les deux groupes semblent clairement inégaux et la
non-divulgation d'une évaluation détaillée de
l'égalité nous invite à envisager deux
scénarios.
a) Une évaluation justifiant
l'égalité aurait été démontrée
Le premier scénario est que malgré sa non
divulgation publique, l'évaluation justifiant mathématiquement
l'égalité aurait été définie dans la mesure
où les deux parties envisageaient leurs différences comme des
complémentarités qui contribuaient dans des proportions
strictement équivalentes à l'atteinte des objectifs de
création de valeur poursuivis par le groupe consolidé.
C'est d'ailleurs ce qui est suggéré par le
document de présentation officiel : Publicis a une meilleure
rentabilité et est plus compétent sur le segment digital tandis
qu'Omnicom est presque deux fois plus important en part de marché et
particulièrement plus présent dans les pays émergents.
Dans une optique simpliste, chaque partie apporte deux points forts à
l'autre, et les deux semblent de ce fait contribuer de façon
équitable : atteindre une taille critique pour s'imposer sur le segment
du numérique tout en optimisant le profit par la technique de
rentabilité de Publicis appliquée au potentiel des marchés
émergents fournis par Omnicom.
Mais une telle approche n'est pas suffisamment rigoureuse dans
le sens où elle ne rend pas compte des proportions exactes dans
lesquelles les points forts de chacun contribuent à l'atteinte de
l'objectif commun.
14
Or, comme nous l'avons établi plus haut, la fusion
n'était pas une contrainte de survie et le fait de tolérer 50% de
la dilution de son identité représente une décision
suffisamment importante pour que chaque partie souhaite exiger une valorisation
exacte des savoir-faire de chacun. Sans cette valorisation exacte comment
admettre sans réserve que la dilution de son identité à
50% ne soit pas une mauvaise affaire?
À défaut d'avoir accès à cette
évaluation de la contribution égale des savoirs faire de chacun
aux objectifs communs, il est possible d'en saisir la complexité. Une
telle évaluation se traduirait par la quantification et la comparaison
des contributions de chaque savoir-faire à l'atteinte de l'objectif
commun.
Or, toute la question est : comment quantifier ces
contributions? Pour simplifier, il ressort que Publicis apporte un
modèle plus attractif et Omnicom apporte un plus grand volume
d'affaires. Cela implique des positionnements fondamentalement incomparables en
soi car compte tenu de l'environnement concurrentiel, ils reflètent deux
orientations stratégiques pertinentes dans une logique stand alone. Si
l'on voulait quantifier leur contribution à la création de valeur
finale espérée par le projet par exemple, nous pourrions retenir
l'ensemble des coûts d'opportunité induits par une position en
stand alone : combien Publicis devrait-il investir en acquisitions pour
augmenter son volume d'affaires et atteindre celui rendu possible par la fusion
avec Omnicom ? Dans le même ordre d'idées, combien Omnicom devrait
dépenser pour optimiser sa marge ? Ces coûts d'opportunité
ne se chiffrent pas uniquement en numéraire, mais en temps : combien de
temps l'un comme l'autre mettrait pour développer les compétences
visées ? Par ailleurs ce temps est très difficile à
estimer car, rappelons-le, ces compétences s'acquièrent par le
biais d'acquisitions.
Pour aller au bout du raisonnement, la somme de ces
coûts d'opportunités qui séparent une entité de la
création de valeur estimée par le projet de fusion,
représenterait la valeur de la contribution de l'entité
opposée.
Mais la difficulté d'une telle évaluation repose
sur le fait que la création de valeur finale est elle-même une
estimation.
15
L'exposé de cette complexité permet de relever
le caractère providentiel d'une parfaite égalité
démontrée entre les contributions, et nous amène à
formuler notre deuxième scénario.
b) Une évaluation justifiant
l'égalité aurait été orientée
La justification mathématique stricte de
l'égalité aurait été secondaire à la
volonté de part et d'autre de s'unir dans les conditions de la parfaite
égalité et par conséquent, quand bien même cette
parfaite égalité eut été démontrée,
elle aurait été sciemment orientée dans le but de
satisfaire cette configuration.
Dit autrement, les deux parties se seraient
considérées égales avant tout parce qu'elles souhaitaient
l'être.
Dans ce cas nous relâchons momentanément
l'hypothèse que nous suivions implicitement jusqu'ici, selon laquelle
les dirigeants ont agi prioritairement dans l'intérêt
général de leur groupe respectif. En effet la théorie
financière classique en matière de fusions-acquisitions admet
qu'au-delà des motivations liées à la création de
valeur pour les actionnaires (par la réalisation d'économies
d'échelles, la réduction du pouvoir de marché des clients
ou des fournisseurs, l'amélioration de la manière dont la cible
est gérée...), il peut y avoir la volonté de la part des
dirigeants de servir leur propre intérêt en priorité. Ce
phénomène est connu à travers la littérature
financière comme le conflit d'intérêt entre dirigeants et
actionnaires de l'entreprise initiatrice. C'est-à-dire que les
dirigeants peuvent aventurer leur société dans des
opérations de croissance externe qui ne soient pas ou peu profitables
dans la mesure où ces opérations permettront au dirigeant d'en
récolter une rémunération plus élevée ou un
surcroît de gloire personnelle. Ce phénomène est
conforté par une étude datant de 2007, qui montre que 75% des
fusions qui font perdre de l'argent aux actionnaires en font gagner au
dirigeant initiateur de l'offre.8
En l'occurrence, le niveau des rémunérations
était fixé sur les résultats du futur groupe, ce qui
élimine cette thèse.
Toutefois et surtout côté français, la
question du prestige personnel restait légitime puisque Maurice
Lévy, approchant la retraite, était depuis plusieurs mois
inquiété par la problématique de sa succession :
8 J. Harford et K. Li (2007), « Decoupling CEO
Wealth and Firm Performance : The Case of Acquiring CEOs », Journal of
Finance, 62, 917-949
16
personne au sein de Publicis ne répondait à
l'appel d'un successeur de même envergure pour diriger le groupe avec
succès. La fusion avec Omnicom dans un souci de parfaite
égalité, aurait donc résolu cette question tout en
gratifiant personnellement Maurice Lévy d'un dernier coup d'éclat
avant de mettre un terme à sa carrière. Mais cette gloire
personnelle n'aurait été durable uniquement si le projet
s'était ensuite avéré effectivement porteur, ce qui
invalide encore une fois l'idée que le dirigeant ait agit pour son
intérêt propre avant celui des actionnaires.
De plus, la fusion entre égaux par appréciation
approximative de l'égalité implique que pour satisfaire la
condition de l'intérêt des dirigeants primant sur celui des
actionnaires, il faudrait soit que l'un des deux dirigeants soit parvenu
à duper l'autre sur la véracité de
l'égalité, survalorisant ainsi artificiellement son groupe et
tirant par conséquent des avantages en rémunération et en
gloire personnelle ; soit que Maurice Lévy et John Wren aient
été complices en présentant une série d'objectifs
fictifs à leurs actionnaires dans le but de satisfaire uniquement leurs
avantages personnels respectifs.
Nous pensons qu'il est irréaliste que l'un des deux ait
pût duper l'autre sur la notion d'égalité. Comme nous
l'avons déjà évoqué, il n'y avait pas de
nécessité à fusionner en termes de performances. Quand
bien même la compétence de négociation de la partie mal
intentionnée ait été excellente, nous ne pensons pas que
la partie dupée puisse avoir été disposée à
accepter une fusion entre égaux sans justification mathématique
de l'égalité si elle n'était pas elle-même
convaincue de cette égalité.
De même et nous avons vu un cas similaire en
introduction, l'entente entre les deux hommes pour satisfaire leurs avantages
privés relève de la fiction car le risque de fuite de
l'information (il y a nécessairement d'autres individus dans la
confidence) induit un coût nettement supérieur (coût
financier et coût en image) aux espérances de gains privés,
ce qui les en décourage automatiquement.
L'ensemble de ces considérations s'ajoutent à
une autre, plus générale, de la durée de la
carrière de chacun au sein de son groupe, qui témoigne d'une
dimension affective et d'un engagement auprès des collaborateurs et des
actionnaires. Cette implication écarte définitivement
l'idée de la recherche effrénée de bénéfice
privé des dirigeants au détriment de leurs actionnaires.
17
Ainsi l'entente sur l'égalité ne proviendrait
pas d'une intention des dirigeants à tirer un avantage personnel quel
qu'il soit.
Nous fixons donc à nouveau notre hypothèse de
départ selon laquelle les objectifs poursuivis répondraient
à la motivation de création de valeur pour les groupes dans leur
ensemble (actionnaires, collaborateurs, clients). Bien sûr nous
n'excluons pas que les dirigeants ne prêtent aucune attention à
leurs intérêt privés, mais ces intérêts
seraient tout de même secondaires à l'intérêt
général.
En récapitulant, nous sommes ici dans le
scénario dans lequel les dirigeants auraient souhaité que leurs
groupes soient considérés égaux, au-delà d'une
justification mathématique stricte d'égalité, et cela dans
l'intérêt général. Dès lors, la question
à se poser est de savoir si les créations de valeur attendues
sont jugées suffisantes par les dirigeants pour justifier le recours
à une fusion entre égaux ?
Cette question se pose parce que les choses sont simples quand
il y a un acquéreur et un cédant : c'est l'acheteur qui impose sa
loi.
Mais dans le cas d'une fusion entre égaux, il faut
être ouvert à la négociation sur tous les points :
équilibre des postes, organisation interne, orientations
stratégiques futures. La fusion entre égaux représente un
processus de transition long et complexe. Il faut garder à l'esprit
qu'au-delà des chiffres, il s'agit de deux cultures et de deux
équipes différents. Non seulement le processus est assujetti
à des conditions administratives tels que l'approbation des
autorités de la concurrence de nombreux pays pour que les objectifs
visés soient possibles, mais en plus la réussite de
l'opération dépend du facteur humain, relativement
imprévisible. En somme les fusions transnationales entre égaux
sont des opérations hasardeuses. Cela se vérifie avec l'exemple
de Daimler-Chrysler9 dans le secteur de l'automobile. En 2007, dix
ans après la fusion entre égaux, le groupe se porte au plus mal
et est au bord de la faillite avant de se scinder, en particulier à
cause d'une organisation interne peu optimale s'expliquant par les
difficultés liées aux différences culturelles. Il faut
donc concevoir que la fusion entre égaux est une opération qui
implique
9
http://articles.chicagotribune.com/2007-05-15/news/0705141000
1 daimler-benz-cerberus-capital-management-carmakers
18
de nombreux coûts. Des coûts directs liés
à l'étude de la faisabilité et la mise en place du projet
(rémunérations d'avocats, de conseils financiers) et des
coûts cachés (risque d'échec de la transaction, risque de
perte de clientèle, risque de conflits internes) plus difficiles
à chiffrer ; et c'est en cela qu'il est pertinent de rapprocher
l'ensemble de ces coûts estimés aux gains espérés
pour statuer sur l'intérêt du projet.
Or, les coûts cachés que nous avons
évoqués sont exacerbés ici puisque la stricte
égalité n'est pas avérée mathématiquement et
il est alors possible de déceler un équilibre fragile : une
propension des équipes dirigeantes d'une des parties à envisager
secrètement de prendre le dessus sur l'autre partie, n'est pas exclue.
S'il n'est pas prouvé que Publicis vaille plus qu'Omnicom, l'inverse ne
l'est pas non plus. Ainsi une ouverture potentielle à la manifestation
de batailles internes pour le pouvoir est nettement prévisible
dès le départ.
Puisque nous démontrons par-là que la fusion
entre égaux implique un coût considérable, notamment
à travers un risque d'échec élevé, les gains
espérés par l'opération sont réduits à une
probabilité plus faible, et ne semblent dès lors pas suffisants
à eux seuls pour justifier le recours à un tel schéma de
transaction, qui en absence d'évaluation mathématique stricte de
l'égalité, relève donc d'un choix irrationnel.
La fusion entre égaux signifie que l'inclinaison de
part et d'autre à accepter la dilution de son identité s'inscrit
dans la limite maximale de 50%. En d'autres termes, aucun des deux n'est
disposé à se faire racheter par l'autre mais par contre, dans la
limite des 50% qui ne mettent pas en péril son autonomie, chacun est
disposé à en céder la totalité. Et dans notre
scénario actuel où il est question pour chacun d'accepter ce
schéma sans certitude mathématique que les deux groupes soient
effectivement égaux, cette observation suggère une situation de
compromis, une union égale par nécessité.
Cette nécessité aurait donc primé sur une
démonstration mathématique désintéressée de
l'égalité : chacun a besoin du consentement de l'autre ; dans
cette logique, puisque le consentement de l'autre était la condition
sine qua non à la poursuite des objectifs, il est automatiquement
établi que chacun y contribue à 50%.
19
2) La fusion entre égaux par contrainte
Nous avons établi jusqu'ici que l'ampleur de la
transaction envisagée impliquait que la volonté de départ
des deux groupes était de mener à bien le projet dans le respect
des modalités fixées et acceptées bilatéralement,
à savoir celles d'une fusion entre égaux.
La description de la transaction soulève une
interrogation quant à l'évaluation des sociétés
justifiant l'égalité. Parmi les deux scénarios possibles
induits par l'absence de détails quant à cette évaluation,
nous retenons que le scénario le plus probable ait été
celui d'une nécessité ayant orienté les groupes à
fusionner selon le schéma de la parfaite égalité.
Il convient de s'interroger sur la nature de cette contrainte,
mais avant de pouvoir aborder cette question avec précision,
penchons-nous sur le moment de l'abandon du projet.
C. Annonce de l'abandon du projet
Le 9 mai 2014, après 10 mois de pourparlers, les deux
groupes annoncent conjointement par communiqué de presse10 11
sur leur site internet respectif, qu'ils mettent un terme au projet de fusion
d'un commun accord, dans les termes suivants: « Les difficultés
encore à surmonter ajoutées à la lenteur du processus ont
créé un niveau d'incertitude préjudiciable aux
intérêts des deux groupes, de leurs salariés, de leurs
clients et de leurs actionnaires. Nous avons donc décidé ensemble
de reprendre notre route de manière indépendante. Nous resterons
bien sûr des concurrents tout en conservant l'un pour l'autre un
très grand respect ».
Sans être exhaustif, il est aisé de comprendre
dans quelle mesure la longueur du processus pouvait s'avérer
préjudiciable aux intérêts de part et d'autre.
Les salariés craignant des plans sociaux pouvaient
être sujets à une baisse de motivation pendant toute cette
période intermédiaire, ce qui occasionnerait potentiellement une
baisse de dynamisme des deux côtés.
10
http://newsflash.publicisgroupe.net/uploadedDocs/20130728
280713 Publicis Omnicom Gruop EN.pdf
11
http://newsflash.publicisgroupe.net/uploadedDocs/2013073020130730PublicisOmnicomFR.pdf
20
Les clients constatant que l'opération n'aboutissait
pas, pouvaient légitimement se poser des questions sur la
capacité des deux groupes à travailler efficacement ensemble,
notamment parce que la gestion des clients du groupe consolidé
était une question sensible nécessitant des dispositifs
particuliers. À titre d'exemple Coca-Cola étant client de
Publicis et Pepsi client d'Omnicom, la confidentialité des
stratégies de communication de chacun imposait à la nouvelle
entité la mise en place de strictes « murailles de Chine »,
qui devaient garantir l'étanchéité parfaite de la
circulation d'informations sensibles entre les différents services
(généralement par la désignation d'un nombre réduit
d'« initiés» encourant de très lourdes sanctions
dissuasives en cas de manquement ainsi que la surveillance de leurs
échanges internes).
Enfin les actionnaires pouvaient également
interpréter que l'équipe dirigeante s'investissait trop
profondément dans ce projet qui, donnant des signes de plus en plus
probables d'échec, détournait potentiellement chacun des groupes
de leurs intérêts individuels (ce qui aurait pu se
matérialiser par exemple par la perte de certains marchés pendant
cette période).
Suite à cette annonce conjointe de la rupture, l'un et
l'autre clarifient « les difficultés encore à
surmonter» parmi lesquelles l'incapacité à trouver un accord
sur le lieu de résidence fiscale, ainsi qu'à obtenir le feu vert
de l'autorité chinoise de la concurrence (la seule manquante parmi les
quinze autorisations ayant demandé un examen approfondi).
Cependant on remarque qu'à partir de cet instant les
deux parties s'expriment différemment sur les détails de
l'abandon du projet.
Alors que John Wren reste très évasif sur les
motifs de la rupture, en se limitant à une
téléconférence sur le site internet
d'Omnicom12, Maurice Lévy lui s'exprime plus durablement
à travers une téléconférence13
également, mais en plus par le biais d'interviews dans la
presse14.
12
http://edge.media-server.com/m/p/2zji54v6/lan/en
13
http://www.media-server.com/m/p/33rsofhu
14
http://www.youtube.com/watch?v=T61Mcr8j8ZU
http://www.dailymotion.com/video/x1tq57k
publicis-omnicom-projet-de-mega-fusion-renonce-maurice-levy-dans-gmb-09-05 news
21
Côté français, Maurice Lévy insiste
surtout sur le fait que le point majeur de désaccord ait
été l'incapacité à se mettre d'accord sur le choix
du directeur financier. Dans les faits, à un stade avancé de la
mise en place du projet, Omnicom souhaitait être représenté
par les trois postes les plus importants du management de la nouvelle
entité, à savoir le CEO, le CFO ainsi que le General Counsel.
Selon lui, les difficultés administratives liées au lieu de
résidence fiscale et à l'autorisation de la concurrence chinoise
étaient secondaires et auraient pu être surmontées, tandis
que celle du choix du directeur financier a été cruciale parce
qu'elle remettait en cause le principe d'égalité qui avait
été souscrit par les deux parties, et c'est sur ce
point-là qu'il n'était pas prêt à transiger.
Côté américain, John Wren est parfaitement
en ligne avec le communiqué officiel et ne s'en écarte pas, selon
lui, trois motifs résument la situation : différences de culture
d'entreprise sous-estimées, complexité et temps, sans mentionner
à aucun moment le désaccord sur les postes.
Dans le mois suivant la rupture, la mise en perspective de
l'ensemble des questions posées aux dirigeants et leurs réponses
permet de révéler un certain consensus de la part de la
communauté des journalistes. Nous relevons en effet d'après la
compilation de l'ensemble des interviews disponibles de Maurice Lévy et
de celles de John Wren à l'issue de l'abandon du projet, que parmi
toutes les questions posées, deux thématiques sont
systématiquement abordées.
La première thématique est celle d'une
hypothétique bataille d'égos à laquelle les dirigeants se
seraient heurtés en cours de route.
La deuxième est celle d'un hypothétique
amateurisme des deux hommes, du fait de ne pas avoir su évaluer et
anticiper les potentiels obstacles ayant entravé l'opération.
Nous allons ici décrire et débattre ces
thématiques.
http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2014/05/09/maurice-levy-je-n-etais-pas-pret-a-transiger-sur-l-equilibre-de-cette-fusion
4414086 3236.html
http://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/0203488208386-maurice-levy-le-jour-ou-j-ai-compris-que-la-fusion-ne-se-ferait-pas-669982.php
22
1) « Une bataille d'égos? »
Avant d'approfondir la thématique, un petit
détour s'avère nécessaire. Lorsque les deux dirigeants
présentaient conjointement le projet à l'été 2013,
Maurice Lévy déclarait avec l'approbation de John Wren : «
certains esprits chagrins disent déjà : fusion entre
égaux ou égos ? Ça va marcher ? La réponse est
simple : nous avons créé une relation suffisamment solide. Une
négociation de cette importance ne se fait pas en cinq minutes!
».
Notons juste que le jeu de mots « fusion entre
égaux ou égos ? » est largement relayé à
travers la presse. Il est intéressant de décomposer cette formule
galvaudée, car elle est employée comme un raccourci qui omet la
compréhension de plusieurs phénomènes sous-jacents.
Cette formule marque clairement une opposition des termes mais
elle sous-entend deux sens différents.
Le premier sens est que la fusion entre égaux est
irréaliste, infondée et n'est en fait qu'un prétexte
imaginé par les égos de chacun des deux dirigeants qui comptent
mener une bataille interne pour le pouvoir une fois la fusion
concrétisée. Le fait que les deux soient dans cette optique
dès le départ nous renvoie au cas irréaliste du conflit
d'intérêt entre dirigeants et actionnaires que nous avons
évoqué plus haut et que nous écartons, d'autant plus
qu'ici l'entente sur le caractère artificiel de l'égalité
porterait sur une bataille interne, soit une perspective de
bénéfice privé dont l'attractivité est très
discutable. Toutefois, nous ne pouvons pas préjuger des arrières
pensées ni de l'un ni de l'autre, et il est envisageable qu'à
travers l'entente sur l'égalité, l'un des deux, voire les deux,
aient imaginé de prendre le dessus sur l'autre par la suite. Sans
compliquer davantage la chose, il faudrait pour être tout à fait
précis, encore tenir compte du caractère évolutif des
arrière-pensées des dirigeants, à travers le temps et les
évènements.
Le deuxième sens traduit la mauvaise évaluation
de l'égalité par les dirigeants parce qu'ils auraient
été de part et d'autres aveuglés par un excès de
confiance. La littérature financière traitant des fusions
acquisitions relate souvent ce phénomène. Le
phénomène dit de « l'hubris »15 pourrait
être à l'origine de
15 R.Roll (1986), « The Hubris Hypothesis of
Corporate Takeovers », Journal of Finance, 59(2), 197-216
23
certaines transactions : un dirigeant ayant une confiance
excessive en ses capacités risque, même s'il est persuadé
d'oeuvrer dans l'intérêt des actionnaires, de se lancer dans des
acquisitions à rentabilité faible, voire négative, car il
surestime sa capacité à créer de la valeur. Cette
thèse s'appuie notamment sur les recherches en psychologie qui ont
montré que ce n'est qu'après plusieurs échecs dans un
domaine particulier qu'un individu accepte le fait que ses capacités ne
sont pas supérieures à la moyenne dans ce domaine. En
l'occurrence ce phénomène s'appliquerait aux deux hommes, dans la
mesure où ils auraient sous-estimé les difficultés de mise
en oeuvre de la fusion entre égaux.
En revenant désormais sur notre compilation des
interviews post abandon la question des égos est systématique et
ne renvoie pas au seul dirigeant, mais à l'équipe dirigeante,
dans le sens d'une bataille interne pour le pouvoir, en référence
à l'épisode du choix du directeur financier. Substantiellement la
question est : « la fusion entre égaux n'a-t-elle pas
finalement échoué pour des questions de pouvoir entre les
dirigeants ? »
En synthèse, et de façon unanime dans chacune
des interviews, Maurice Lévy déclare formellement qu'il ne
s'agissait pas de cela : il était d'ailleurs lui-même
personnellement disposé à renoncer à son poste. Il
émet toutefois un questionnement du côté d'Omnicom :
peut-être avaient-ils de leur côté des
arrière-pensées de cet ordre-là en ne souhaitant
secrètement pas réellement d'une fusion entre égaux. En
tout cas il insiste sur le fait que ce n'était pas un problème de
pouvoir, mais de principes et en l'occurrence la rupture du principe
d'égalité.
Par ailleurs, le détour que nous avons
opéré au début de ce développement montre que la
contradiction entre égalité et égocentrisme avait
été évaluée dès le départ.
Notre analyse de la situation converge vers une combinaison de
facteurs : les dirigeants auraient cherché l'intérêt
général de leur groupe et étaient convaincus par le
succès du projet, de ce fait ils étaient investis par un
excès de confiance qui les a poussé à entreprendre une
fusion entre égaux en admettant cette égalité sans recours
à la rigueur mathématique désintéressée de
celle-ci. Cet excès de confiance n'exclut
24
pas l'existence d'arrière-pensées
dirigées vers une quête de pouvoir supplémentaire au sein
du groupe fusionné.
2) « Amateurisme? »
Compte tenu de la longueur des négociations, de
l'énergie et de l'argent dépensé (sunk costs du projet
estimés à 24M€ côté Français et
32M€ côté américain), la communauté des
journalistes souligne l'échec retentissant de l'opération.
L'autre question systématiquement posée
évoque un possible amateurisme des deux hommes en tant que responsables,
à travers la question : « dans une opération d'une telle
ampleur tous les potentiels obstacles n'auraient-ils pas pu être couverts
avant l'annonce du projet ? »
Lorsque, questionné sur ce point, Maurice Lévy
laisse entendre qu'il n'y a pas eu d'amateurisme, ni d'un côté ni
de l'autre et rétorque que la répartition des postes ne pouvait
être communiquée à l'avance car les groupes devaient
continuer à fonctionner en attendant le closing, et une annonce
prématurée du nouvel organigramme aurait forcément
donné lieu à des déceptions, nuisibles à
l'activité du groupe pendant la période de transition.
Il rappelle toutefois la clause de principe de parfaite
égalité dans le document d'accord préalable - le Business
Combination Agreement - qui devait obliger les deux équipes à
leurs meilleurs efforts pour une répartition équitable des postes
clé, et qu'il n'avait donc pas d'inquiétude à ce sujet.
Par ses explication, Maurice Lévy réfute donc la
notion d' « amateurisme » compte tenu de la complexité de
l'opération de fusion entre égaux, dont ils avaient selon lui
correctement évalué les risques.
Le refus systématique de la notion d'amateurisme
n'apporte pas de preuve qu'il n'y ait pas eu effectivement un certain
amateurisme. Techniquement l'accusation est recevable, puisque même si
les difficultés avaient été évaluées au
départ, il demeure que vraisemblablement elles n'aient pas
été suffisamment étudiées puisqu'une fois
survenues, elles se sont avérées insurmontables.
Mais ici, notre analyse de la situation nous écarte de
cette notion d'amateurisme, trop facilement péjorative compte tenu de la
carrière de chacun des deux dirigeants. Nous pensons effectivement que
les difficultés de la mise en oeuvre d'une fusion entre égaux se
soient révélées insurmontables, mais nous connectons ce
choix de schéma entre égaux à notre développement
sur l'existence d'une nécessité qui l'a conditionné.
En synthèse, les deux thématiques ici
retranscrites sont finalement assez proches, elles témoignent d'une
irresponsabilité des dirigeants, cependant notre analyse réfute
cette irresponsabilité, en incluant notre notion de contrainte.
25
Nous nous rapprochons de la définition de cette
contrainte. Quelle en est sa nature ?
26
II. MISE EN PERSPECTIVE DE LA PROBLÉMATIQUE
Pour parfaire cette interrogation, il convient de mettre en
évidence un aspect important : le discours de communication des
dirigeants.
A. Évidence d'un discours de communication
D'une manière générale, Maurice
Lévy et John Wren ne partagent plus qu'une chose après l'annonce
de l'échec : l'un comme l'autre vante les mérites de son groupe
en stand alone en affirmant que la fusion était « une
opportunité et non pas une nécessité ».
Côté Publicis, les points forts
répétitivement mis en avant au cours des interviews sont mot pour
mot le discours que l'on trouve dans le rapport annuel 201316
(n°1 dans le digital, meilleure marge du secteur et d'autres projets,
notamment le plan 2018 pour lequel Publicis mène l'objectif d'atteindre
50% de son CA dans le numérique). Cette volonté de
véhiculer une image rassurante est d'autant plus flagrante lorsque,
questionné si l'abandon du projet n'était pas un échec au
vu des 70 groupes de travail ayant étudié la faisabilité
de la fusion, il rétorque que cela était « la preuve de la
vitalité et de l'énergie de Publicis Groupe pour aller de l'avant
».
Enfin, il revient systématiquement sur le fait que, ne
s'agissant ni d'égocentrisme, ni d'amateurisme, de sa part,
l'intransigeance qu'il opposait à la rupture du principe
d'égalité s'expliquait par le refus de « sacrifier
l'âme de Publicis » et le refus de « diluer
l'attractivité du modèle Publicis ».
Autant dire qu'il contourne habilement les accusations, s'en
sortant par le haut.
John Wren tient un discours similaire, en vantant les forces
de son groupe en stand alone et en réfutant fermement d'avoir perdu des
marchés pendant toute la période d'étude du
rapprochement.
Ces discours bien rôdés prouvent l'existence de
part et d'autre d'une communication officielle visant à mettre en avant
une image avantageuse de la société. Il est évidemment
compréhensible qu'admettre une
16
http://www.publicisgroupe.com/documents/instant-report-2013-fr.pdf
- page6
27
bataille d'égos ou un certain amateurisme ne donnerait
pas une image positive du point de vue des investisseurs.
C'est alors que nous comprenons l'importance de la
communication. Les discours officiels, empreints d'un message
préparé à l'avance peuvent biaiser la lecture et la
compréhension des évènements et pour être tout
à fait précis, il convient de considérer cette dimension
de communication à travers toutes les étapes du cas ; ce que nous
faisons ici par le biais d'une brève critique de nos différentes
sources d'information.
B. Croisement des différentes sources
Nous avons révélé un consensus de la part
de la communauté à travers les questions posées aux
dirigeants au moment de l'annonce de l'échec. Mais l'émergence du
discours de communication des dirigeants nous oblige à prendre des
précautions sur l'interprétation des informations
divulguées dans le domaine public.
La raison de cette prudence est compréhensible à
la lumière de la description des différentes sources
d'informations consultées : l'ensemble des documents officiels et une
part importante des articles de presse datés du moment de l'annonce du
projet jusqu'après l'annonce de l'échec.
Notre documentation sur le cas Publicis-Omnicom (que l'on peut
consulter en Annexe 1) a donné lieu à une
classification particulière. Nous y relevons trois types d'informations
différentes :
1° Les informations « officielles
unilatérales > : ce sont essentiellement les communiqués de
presse. Dans ce type d'information il n'y a qu'un seul interlocuteur : c'est la
société qui transmet publiquement l'information à
destination des journalistes et investisseurs.
2° Les informations « officielles bilatérales
> : il s'agit d'interviews des dirigeants sous forme de
téléconférences, vidéo ou article de presse. Ils
répondent à un ou plusieurs journalistes. Le fait qu'il soit
possible de relever le même type de questions dans l'ensemble des
interviews de Maurice Lévy alors qu'il répond
systématiquement avec son discours de communication permet de
soupçonner une éventuelle concertation préalable, ce qui
ferait que le choix des questions vise à faire passer un message
particulier. Cette possibilité n'est pas exclue.
28
3° L'autre source d'information est celle que l'on
qualifie comme « extra-officielle > : les interprétations
d'analystes ou journalistes dans la presse économique et
financière. Ils témoignent d'une plus grande liberté
remettant en cause les déclarations officielles.
Nous considérons donc que le seul consensus «
réel > et exempt de soupçons soit celui à travers
lequel il y a des raisons peu avouables derrières les explications
officielles et nous appliquons ce soupçon aux thématiques
généralisées de l'égocentrisme et de
l'amateurisme.
L'un et l'autre de ces dirigeants parvient à
réfuter habilement ces accusations par l'art de la communication, en
évoquant tout simplement une fatalité due à la
complexité de la mise en oeuvre des fusions entre égaux.
Peut-être alors que l'égocentrisme et l'amateurisme
supposés par les journalistes ne sont alors que des diversions pour ne
pas exposer la nature de la contrainte qui les auraient poussés au
schéma de fusion entre égaux.
Puisque nous réfutons l'irrationalité des
dirigeants, nous pensons que la contrainte qui les a poussé à un
choix si hasardeux se soit présentée sous la forme d'une menace,
et c'est pour cette raison qu'elle ne figure jamais en tant que telle dans
l'ensemble des déclarations des dirigeants.
C'est alors que tout converge pour mettre en avant la mutation
sectorielle en tant que contrainte, qui menacerait Publicis et Omnicom en tant
que sociétés stand alone. En accord avec l'ensemble des
hypothèses retenues, le choix d'une fusion entre égaux ne serait
alors plus irrationnel dès lors que la contrainte est suffisamment forte
pour le justifier.
Pour apporter une réponse sur l'importance de cette
pression du secteur, nous allons procéder désormais à une
analyse sectorielle approfondie.
29
III. ANALYSE SECTORIELLE
Pour appréhender les raisons fondamentales ayant
entraîné la décision d'une fusion entre égaux, nous
devons au préalable comprendre la dynamique sectorielle actuelle, la
place de Publicis et d'Omnicom dans le secteur ainsi que celle, potentielle,
qu'aurait eue Publicis-Omnicom Groupe (POG) si la fusion avait abouti.
Nous commencerons par décrire succinctement et
successivement la chaîne de valeur du secteur, les acteurs, le
marché, l'environnement, l'intensité concurrentielle et comment
les deux sociétés s'insèrent dans cette dynamique globale.
Au sein de cette première partie descriptive, nous intégrerons
les agrégats concernant Publicis et Omnicom : les filiales
spécialisées et la part de chiffre d'affaires associée.
Cela nous donnera ainsi une idée plus précise quant aux segments
de marchés qui se seraient retrouvés renforcés suite
à la fusion.
Nous débattrons par la suite de l'évolution du
marché à partir du constat actuel et d'éléments
plus théoriques ; pour terminer nous montrerons que les points forts du
groupe mort-né ne lui aurait pas permis de se positionner efficacement
d'un point de vue concurrentiel sur le média internet.
A. Présentation du secteur publicitaire
Pour aborder le secteur dans son ensemble nous devons
comprendre que la publicité englobe plusieurs entreprises
présentes à la fois dans les médias, la publicité
ou la communication ; et que ces activités dépendent les unes des
autres, les périmètres se chevauchent et se complètent.
Des groupes comme WPP, Omnicom ou Publicis, sont des holdings,
sociétés chargées de gérer d'autres
sociétés, organisées autour de piliers d'activités,
l'ensemble constituant le secteur.
1) Principales entreprises
Au niveau mondial, en 2012 les principaux groupes du secteur
sont présentés par ordre décroissant de chiffre d'affaires
(Annexe 2). Ce classement nous montre bien
que le groupe fusionné Publicis-Omnicom aurait eu la plus grosse part de
marché (mesurée par le chiffre d'affairesConcentration
30
Le secteur publicitaire subi un phénomène de
concentration depuis plusieurs dizaines d'années. Les fusions et les
rachats sont des pratiques de plus en plus courantes dans le
secteur17. Ce phénomène s'explique par la forte
concurrence qui s'exerce entre les trois géants du secteur que sont WPP,
Omnicom et Publicis. Régnant en maîtres sur le monde de la
communication et cherchant sans cesse à être présents sur
tous les segments, les leaders n'hésitent pas à racheter des
agences spécialisées indépendantes en perte de vitesse
dont ils sont très friands depuis l'émergence des nouvelles
technologies.
Ultime représentation de ce phénomène de
concentration, l'annonce de la fusion du numéro deux américain
Omnicom avec le numéro trois français Publicis annoncée en
Juillet 2013 aurait profondément modifié le visage du secteur.
Le marché, d'un point de vue global, s'établit
fin 2013 à environ 400 milliards d'euros. La concentration sur ce
secteur est clé. Afin de pouvoir garder des parts de marchés
conséquentes, les groupes doivent effectuer de la croissance externe ;
des acquisitions qui leur permettront également de renforcer leur
portefeuille d'activités via des rachats d'agences aux activités
complémentaires.
Le calcul de la concentration par l'Indice de
Herfindahl-Hirschmann18 nous donne un HHI égale à
2 637,8 en 2012 et à 2 740,2 en 2013. Ceci montre un secteur très
concentré et dont la concentration augmente. En effet, un HHI
supérieur à 2 000 indique une forte concentration de
marché. Le risque d'une si forte concentration est celui d'une collusion
sur les prix pratiqués par les leaders du marché. Lorsque le HHI
est ainsi élevé, un deuxième critère rentre en
compte, celui-ci de la variation de l'indice en valeur, qui doit être
inférieure à 150 selon les recommandations des autorités
de la concurrence. Cette variation est ici égale à environ 100,
ce qui nous permet de conclure que le secteur est certes très fortement
concentré ; mais que cette concentration n'est pas pour autant, et du
moins pour l'instant, problématique.
17
http://www.fusacq.com/buzz/secteur50501-agences-com-pub-marketing.html
18 Herfindahl-Hirschmann Index (HHI) :
établi comme la somme des carrées des parts de marchés ;
plus cet indice est élevé, plus la production est
concentrée autour d'un petit nombre d'acteurs. Cet indice est notamment
utilisé par les autorités de la concurrence dans la mise en place
de lois anti-trust visant à éviter une trop forte concentration
d'un secteur d'activité.
31
c) Omnicom et Publicis
Omnicom Group, né en 1986 du rapprochement19
des réseaux de publicité indépendants BBDO (Batten
Barton Durstine & Osborn), DDB (Doyle Dane Bernbach) et
Needham, Harper & Steers ; plus tard marqué par l'acquisition
de TBWA et du français BDDP, est présent sur trois principales
activités : les Services Marketing (55% du CA dans les métiers du
marketing, du digital, des relations publiques ou de l'identité de
marque) ; la Publicité (35% du chiffre d'affaires et
représenté notamment avec les trois réseaux TBWA
Worldwide, BBDO Worldwide et DDB Worldwide) ; les
Médias (10% du CA).
Groupe français fondé en 1926, Publicis SA est
aujourd'hui structuré autour de quatre pôles : la publicité
(35% du CA avec les agences Publicis Worldwide, Léo Burnett
Worldwide et Saatchi&Saatchi) ; les médias (25% du CA)
; le numérique (20%) ; les services marketing (20%).
La présence sur ces différentes activités
est globalement représentative du comportement de l'ensemble des groupes
de l'industrie. Elle nous montre que le secteur de la publicité englobe
plusieurs spécialités, plusieurs supports, qui se
complètent et se soutiennent mutuellement. De plus, comme nous l'avons
déjà vu dans la première partie relative à la
présentation de l'opération de fusion, tous les groupes n'ont pas
la même stratégie et par conséquent les poids relatifs de
chaque activité sont différents d'un groupe à l'autre. Ce
constat ainsi que la complémentarité de Publicis et Omnicom
expliquent qu'un projet de fusion entre les deux groupes ait naturellement
été envisagés. Nous présentons la chaîne de
valeur du secteur de valeur dans la partie suivante.
2) La chaîne de valeur du secteur
Une représentation de la chaîne de valeur du
secteur est fournie (Annexe 3). Nous décrivons ici de
manière très concise chaque maillon de la chaîne afin que
le lecteur puisse se faire une brève idée du rôle des
acteurs du secteur. Une description plus détaillée sortirait du
cadre de cette analyse purement descriptive qui doit nous aider à situer
les intervenants de façon simplificatrice mais toutefois très
précise. Nous
19 Pour faire face à la montée en
puissance du britannique Saatchi & Saatchi, filiale de Publicis
32
tâcherons pour ne pas nous écarter de la
problématique de ce mémoire d'indiquer un ou des exemples
relatifs à Publicis ou Omnicom.
a) Les annonceurs
En amont de la chaîne de valeur se trouvent les
annonceurs qui sont tout simplement les clients. Ceux-ci sont à
l'origine du besoin en communication vers le destinataire final du message,
destinataire que nous appelons par abus de langage le consommateur mais qui
peut tout aussi bien être un individu, un groupe d'individu, une
entreprise, un groupement d'entreprises.
Les annonceurs se scindent en deux catégories : les
annonceurs privés (entreprises, associations) et les annonceurs publics
(administrations publiques, états). Ils formulent typiquement une
demande auprès des agences de communication qui seront chargées
de la mise en forme et de la mise en place du futur projet de communication.
b) Les agences de communication
Les agences de communication forment le maillon central de la
chaîne de valeur du secteur. Nous définissons une agence de
communication comme une entité chargée d'orienter toute
organisation (entreprise, association, état, etc.) dans la mise en place
de sa communication en mobilisant tout un ensemble de compétences et de
techniques. La communication peut être orientée vers l'interne,
cela peut par exemple prendre la forme d'une communication ayant pour but de
fédérer le personnel à l'accomplissement d'un objectif
commun (vidéo d'entreprise); ou vers l'extérieur, afin
notamment de promouvoir l'image de l'organisation, d'un produit ou d'une ligne
de produits auprès de ses clients, du public, de ses fournisseurs et
partenaires extérieurs (plaquette commerciale).
Toute la valeur ajoutée du secteur est
créée au sein des agences de communication. Leurs missions sont
multiples et leurs rôles clés : conseiller les annonceurs quant
à leurs choix de communication, s'assurer que le besoin et la cible sont
parfaitement identifiées, mettre en oeuvre les moyens nécessaires
à la réalisation des projets de communication commandés.
Les agences ont des spécialisations et des tailles
différentes.
33
Nous situerons les agences principales que nous avons
déjà évoquées de Publicis et d'Omnicom dans la
partie suivante concernant les structures du marché.
c) Les prestataires de service
En aval de la chaine de valeur se trouvent tous les
prestataires avec lesquels l'agence de communication interagit pour la
réalisation du projet de l'annonceur : les imprimeurs, les graphistes,
les éditeurs, les photographes, les graphistes, etc. Les groupes
peuvent, et c'est souvent le cas, posséder leurs propres prestataires
intégrés dans la structure de groupe, ceci permet en particulier
une optimisation des coûts. Ce point important rejoint notre discussion
précédente sur la présentation de la fusion car c'est
effectivement ici que nous envisageons de possibles synergies. Les prestataires
sont spécialisés par compétences et fournissent le contenu
; c'est cette association qui doit avoir un caractère de valeur
ajoutée pour l'agence de communication et pour l'annonceur.
3) Structure du secteur
a) Historique
Dans les années 1930, Marcel Bleustein-Blanchet
(1906-1996) 20 comprend l'importance de la réclame et invente
ce qui sera appelé plus tard la Publicité. Il créé
la société Publicis dès 1926. Il utilise les moyens de
l'époque comme la radio pour toucher le plus de consommateurs ; dans les
années 1960, l'entreprise réalise les premiers spots
télévisés. Mais c'est dès les années 1950
que la publicité connait un essor incroyable porté notamment par
celui des Trente Glorieuses. Outre-manche, aux États-Unis et partout
ailleurs dans le monde la publicité connait une forte croissance
dès les années 1940.
b) Evolution à la fin du 20ème
siècle
Le monde de la communication se scinde en 4 groupes
différents que nous décrivons ci-après : les agences de
communication globales, les agences spécialisées, les
régies publicitaires et les agences médias. Les ramifications et
les interactions sont nombreuses : les agences d'autrefois se sont
concentrées en des
20 Fondateur de Publicis.
34
groupes multi-communication et multinationaux. Cette mutation
commence dès les années 1980 et s'explique par la mondialisation
des marques et la concentration des entreprises.
i. Agences de communication globale
Les agences de communication globale ont pour vocation de
proposer et de vendre des plans de communication globaux. Elles s'inscrivent
dans la dynamique de mondialisation que nous venons de décrire. Elles
sont fournisseurs de grands groupes internationaux ou de marques nationales
leader sur leur marché domestique. Ces agences proposent divers services
complémentaires dans le but de concevoir des plans de communication
très précis. Ces derniers se concentrent autour d'un cheminement
de cinq étapes distinctes : l'analyse, le conseil, la création,
la production et le contrôle.
Nous avons cité plus haut les agences globales
d'Omnicom (TBWA Worldwide - $1,517 milliard de CA en 2013, BBDO
Worldwide - $1,141 milliard et DDB Worldwide - $1,110 milliard)
et celles de Publicis (Publicis Worldwide - €875 millions,
Leo Burnett Worldwide - €777 millions et Saatchi &
Saatchi - €650 millions).
Un rapprochement de ces sociétés au sein d'un
même groupe industriel aurait donné un leader sur le marché
de la communication globale. Le chiffre d'affaires combiné de ces
sociétés, soit environ 30% du chiffre d'affaires du Groupe
né d'un rapprochement des deux sociétés21.
ii. Les agences spécialisées
Ces agences ont pour vocation de proposer, concevoir, et de
vendre des plans de communication spécifiques. Ces derniers ont des
aspects différents des plans de communication globaux. Ils sont, d'une
part, basés principalement autour de moyens
hors-médias22 et d'autre part, ont une durée de vie
maximum d'une année. De plus ces plans de communication
spécifiques résultent de la réponse d'objectifs techniques
et non pas stratégiques. Filiales de groupes de communication pour la
plupart et fournisseurs
21
http://www.publicisgroupe.com/fr/media/display/id/6880
: diapositive 16 du document de présentation du projet de fusion
Publicis-Omnicom, Juil. 2013
22 On qualifie de média les campagnes de
publicités destinées à différents supports :
télévision, radio, presse, cinéma, affichage mais
également sur internet. Ce travail est effectué par les agences
créatives de publicité. Le hors média est constitué
par des dispositifs de communication mis en place par des agences
opérationnelles directement au contact des consommateurs. On associe ce
type de campagne typiquement à de l'évènementiel où
le contact avec les consommateurs se fait via des relations publiques, du
marketing direct ou viral.
35
d'annonceurs de toutes tailles, certaines restent
indépendantes. Huit types d'agences peuvent être recensés
:
1. L'agence corporate
Ses principales missions sont de proposer des solutions de
communication qui traduisent non seulement des points forts pour les produits
mais surtout les valeurs de l'entreprise. Chez Publicis citons MSLGROUP
(effectifs de 3500 collaborateurs, présence dans 22 avec plus de
100 agences), également fortement présente dans
l'évènementiel et qui réalise fin 2012 un chiffre
d'affaires de $1.450 million soit environ 15% du chiffre d'affaires global de
sa maison mère.
2. L'agence de marketing service
Réunion de plusieurs savoir-faire, les agences qui
étaient des agences de la promotion des ventes et des agences de
marketing directe sont devenues des agences basées autour du marketing
relationnel, des relations publiques, de la stimulation et des
évènements. Par ailleurs se différenciant par leur taille
conséquente, elles sont rarement indépendantes et prennent en
charge des plans de communication spécifiques. En outre de plus-values
de conseils, leurs missions se regroupent autour d'une mise à
disposition auprès des annonceurs d'une logistique et d'équipes
spécialisées pour des évènements de plus en plus
pointus aux délais réduits. Les agences d'Omnicom sont notamment
: Integer, GMR Marketing, The Marketing Arm,
TracyLocke ou encore des noms comme Fleishman-Hillard, Ketchum, et Porter
Novelli. Ces sociétés représentent environ 12% du chiffre
d'affaires global d'Omnicom avec environ $1.7 milliards.
3. L'agence de communication santé
Organisés autour d'un pôle santé avec bien
souvent un ou plusieurs médecins, elles ont comme clients l'industrie
pharmaceutique, les hôpitaux, les assureurs mais aussi les entreprises de
biens de consommation axées sur la préservation de la
santé et du bien-être. Compte tenu de l'explosion des
dépenses de santé au niveau mondial, on ne peut s'étonner
d'une organisation spécifique au secteur. Elle touche tant les
professionnels de santé et autorités publiques que le grand
public. La spécificité de ces agences ne se résume
cependant pas à la maîtrise des limites de la communication et du
médico-
36
réglementaire. En effet, elles sont capables comme
n'importe laquelle des agences classiques de proposer des plans de
communication ingénieux. Citons pour Publicis les principales agences de
communication santé : l'agence française Publicis Healthcare
Consulting, également implantée à New-York, l'agence
allemande Digital District, les agences Elevator,
situé à Londres et Resolute Communications,
Londres/New-York, les agences chinoises U-link Business Solutions Co
LTD, acquise en 2012, et Dreams en 2011 ; l'agence indienne
Watermelon (2011) pour citer les principales. Ces agences
représentent 12% du revenu de Publicis en 2012, soit environ €800
millions. Chez Omnicom, citons : Adelphi Group, Corbett Accel
Healthcare Group, The CDM Group, Flashpoint Medica,
Harrison & Star, Health Science Communications comme
principales agences de communication orientées santé,
représentant environ10% du chiffre d'affaires global. Nous concluons
donc que le chiffre d'affaires global de l'activité santé au sein
du groupe POG se serait situé autour de 10%-12% soit environ $3
milliards.
4. L'agence digitale
Née de la nécessité de profiter du
succès d'internet, les agences ont commercialisé pendant les
premières années des plans de communication utilisant ce
média. Beaucoup d'articles traitent de pan de l'histoire de la
publicité comme d'un échec. En particulier, dès 2005, le
journal Le Monde publie un article sur le sujet23. Les
différents président des agences en faisant le triste constat :
« Aujourd'hui, les chiffres courent après la
réalité » , estime Gilles Masson, président de
l'agence Leo Burnett Paris, filiale de Publicis, avant d'ajouter : «
Même si nous rattrapons un peu notre retard, les consommateurs sont
allés plus vite que les agences et les annonceurs ». Pour
Xavier Romatet, directeur général de DDB France, filiale
d'Omnicom: « Internet en tant que média devrait capter de 4
à 5 fois plus de dépenses publicitaires. Mais il y a une
convention professionnelle ou sociale qui consiste à privilégier
les médias traditionnels ». Aujourd'hui ces agences se doivent
de proposer des plans de communication qui allient internet, réseaux
sociaux, moyens infographiques, audiovisuels, électroniques sonores,
tous transférables sur mobile. En particulier, Publicis, du moins son
PDG Maurice Levy, aime laisser entendre que son groupe possède la
plus
23
http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2005/04/04/internet-est-devenu-un-enjeu-majeur-pour-les-publicitaires6350823236.html
37
grosse part de marché sur le segment du
numérique. Le chiffre d'affaires global y est de 33% soit près de
2,2 milliards d'euros. Ce chiffre est en effet impressionnant, et même si
nous ne savons pas la répartition exacte du numérique chez
Omnicom, il est indéniable que la combinaison des deux groupes aurait
donné un chiffre d'affaires au moins supérieur et en aurait fait
un leader au sein de ses pairs. Nous montrerons dans la seconde partie que de
nouveaux acteurs, non traditionnels, axés uniquement sur le média
internet, numérique, digital ont des chiffres d'affaires colossalement
supérieurs à celui de Publicis.
5. Agence communication évènementielle
Obligation pour les marques, aujourd'hui tout annonceur se
doit de réaliser des évènements que ce soit pour un
lancement de produit, la création de sites ou les séminaires
d'information/récompenses. Organisatrice d'évènements
hier, ces agences sont devenues des partenaires qui se doivent d'être
hautement spécialisées en proposant, d'une part, conseils,
création et créativité et d'autre part,
disponibilité et professionnalisme pour répondre à un
évènement commençant à l'aube et finissant tard la
nuit. Nous avons déjà cité chez Publicis la
société MSLGROUP qui fait office de leader mondial en la
matière. Chez Omnicom, GMR Marketing et Serino Coyne LLC
font office de leader sur leur marché domestique.
6. L'agence de relation presse
Elles sont une alternative à la communication «
standard » du fait d'un public saturé par la multitude de messages
publicitaires. Cependant, elles ne sont pas utilisées lors de lancement.
En effet la crédibilité apportée par les journalistes est
souvent obligatoire dans le mix de communication. Rarement indépendantes
sauf à être spécialisées dans un domaine
précis, ces agences sont souvent filiales de grands groupes de
communication. Encore une fois la société MSLGROUP,
filiale de Publicis fait office de leader mondial.
7. 38
Les standistes
Il s'agit d'agences qui organisent de grands salons. Souvent
organisées autour de structure très courtes : 2 à 5
personnes, architectes et créatifs, qui proposent des maquettes volumes
(3D). Il existe aujourd'hui plusieurs centaines de salons.
8. Agence ou studio de production
Fournisseurs des agences hier, souvent organisé en
société unipersonnelle ou en structure très courte (2-5
personnes), ces acteurs de la communication développent des
compétences de plus en plus pointues en matière de production de
support papier et électroniques grâce à l'apport du TIC
(technique de l'information et de la communication). Au-delà des
compétences techniques, les intervenants se doivent d'apporter une
compétence en termes de conseils tout au long de la chaîne
graphique et peuvent assurer dans certains cas un suivi complet de toutes les
productions au niveau des achats, de la planification, du contrôle et de
la livraison.
iii. Les régies publicitaires
La fonction principale d'une régie publicitaire est
d'agréger l'espace publicitaire de divers éditeurs de
médias et de remplir les espaces publicitaires de ces médias avec
les publicités d'annonceurs intéressés par leur audience.
Elles se chargent pour le compte des agences conseils en communication globale
d'acheter aux meilleurs prix les plans médias proposés par les
agences dans leurs recommandations. Elles se doivent de proposer des offres
packagées et de se spécialiser sur des cibles ou secteurs
particuliers. Indépendantes juridiquement, certaines sont des filiales
de groupes de supports.
iv. Les agences médias
Véritables conseils en choix des médias, elles
travaillent soit en direct avec certains annonceurs, supprimant alors l'agence
de communication soit en collaboration ou en sous-traitance pour le compte de
l'agence insuffisamment structurée. Elles ne se chargent pas ou plus de
l'achat d'espace à proprement parler et laissent cette partie à
des régies publicitaires.
39
Il est difficile à ce stade de connaître la part
de marché de chaque entité dans chacune de ses activités
spécifiques, d'autant que certains de ces activités se «
chevauchent » en faisant appel à des compétences
complémentaires (MSLGROUP en est le parfait exemple) ; mais on
peut dès à présent statuer sur le fait que le groupe
aurait effectivement été leader mondial sur de nombreux segments
du marché de la publicité majoritairement liés à la
publicité traditionnelle. Il apparait ainsi que le groupe aurait
indéniablement eu une position de leader sur ses marchés mais que
le secteur du digital restait un segment sur lequel le groupe se serait
stratégiquement renforcé.
Poursuivons en voyant maintenant les forces qui
déterminent la structure concurrentielle de l'industrie. Nous
envisagerons cette analyse en deux parties : les forces qui prévalent en
l'absence de l'outil Internet dans un premier temps ; et son impact actuel sur
le secteur dans un second temps. Dans la partie suivante nous pourrons alors
inférer, après une introduction très théorique, que
la société vue au travers de la publicité connait
actuellement un changement radical sous-estimé par beaucoup ; et d'un
point de vue économique, beaucoup plus profond certains industriels
semblent l'avoir anticipé.
c) Evolution à partir des années 2000
Nous avons procédé à l'étude de
l'intensité concurrentielle au sein du secteur selon le modèle
des cinq forces proposé par Michael Porter en 197924
(Annexe 4). Nous ne nous intéresserons dans un premier
temps uniquement à la partie supérieure du modèle
proposé ; c'est-à-dire à l'intensité
concurrentielle actuelle, le pouvoir de négociation face aux
fournisseurs, aux clients et les entrants potentiels.
i. Intensité concurrentielle
La concurrence intra sectorielle étant très
intense, il convient de comprendre les déterminants de la concurrence.
Pour cela, une compréhension de l'environnement sectoriel est
nécessaire. Trois facteurs influencent fortement l'environnement du
secteur : l'environnement économique, sociologique et technologique.
24 Porter, M.E. How Competitive Forces Shape
Strategy, Harvard business Review, March/April 1979
40
1. L'environnement
économique
Le secteur est très sensible à la moindre
variation de conjoncture économique et en cas de crise, les
dépenses en publicité et communication sont les premières
à faire l'objet de restrictions budgétaires chez les annonceurs
qui sont de plus en plus regardant en ce qui concerne la qualité et la
rentabilité des investissements. Lors de la crise économique et
financière de 2008-2009, les dépenses publicitaires, qui
constituent les chiffres d'affaires des agences de communication, ont
baissé en moyenne de plus de 10% par an (Annexe 5). Sur
un marché global de près de 400 milliards d'euros, cela
représente environ 80 milliards d'euros. Néanmoins, à
partir de 2010, l'évolution est de nouveau positive, principalement
tirée, nous le verrons, par le média Internet. Les agences ont
toutefois été très fragilisées par la crise. Elles
doivent désormais faire face à un environnement concurrentiel
très fort avec des effectifs réduits et des budgets annonceur de
plus en plus serrés. C'est une des raisons pour laquelle les fusions
sont de plus en plus nombreuses au sein de ce secteur d'activité. De
plus, celui-ci étant très concentré, il est difficile pour
les agences indépendantes de tirer leur épingle du jeu face aux
grands leaders du marché (WPP, Publicis,...).
On observe par ailleurs que depuis quelques années, les
annonceurs font de plus en plus appel aux cabinets conseils. Comme leur nom
l'indique, ils ont pour rôle de conseiller les annonceurs quant au choix
de leur agence de communication mais ils se chargent également de
réaliser des recommandations pour leurs clients. Ces cabinets
représentent une réelle menace pour les agences puisqu'ils
risquent de les réduire au rang de creative agencies en leur
ôtant leur fonction initiale d'agence conseil en communication.
Avec l'émergence des TIC, sont nées de nouvelles
agences : les pure player. Ce sont des agences
spécialisées dans la communication numérique et expertes
dans ce domaine. Surfant sur une véritable niche, elles
représentent une réelle concurrence pour les agences de
communication globale. Le web et le numérique représentant
aujourd'hui un enjeu majeur pour les annonceurs, la plupart d'entre eux
préfèrent confier leurs projets aux pure player, gage
d'expertise, plutôt qu'aux agences traditionnelles, même si
celles-ci intègrent un service semblable aux agences pure player.
2. 41
L'environnement sociologique :
Selon le rapport de l'étude réalisée par
TNS Sofres en 201325, les français portent un regard de plus
en plus critique sur les marques, les produits et la publicité : un
tiers d'entre eux se déclarent publiphobes. Ils trouvent la
publicité envahissante, moins distrayante et moins convaincante. Pire
encore, les consommateurs français ont le sentiment que les marques ne
s'adressent plus à eux de façon respectueuse et intelligente. Ce
que veulent les français désormais c'est de la publicité
utile, informative et agréable.
Ce comportement peut se généraliser à
l'ensemble des consommateurs des pays dit développés. D'autres
études ont étés menées en Allemagne, au Royaume-Uni
ainsi qu'aux États-Unis au cours de la dernière
décennie26.
3. L'environnement technologique
Les nouvelles technologies jouent un rôle essentiel dans
l'environnement du secteur des agences de communication. Leur
compréhension et leur maîtrise sont désormais
indispensables. Les agences l'ont bien compris et élargissent
dorénavant leurs activités afin d'agir sur tous les canaux de
diffusion et de faire face à la concurrence des jeunes agences
positionnées sur ce segment.
L'émergence des TIC a également donné
naissance à de nouvelles stratégies de communication. Les
français étant de plus en plus lassés par la
publicité actuelle, une nouvelle forme de communication est en train de
voir le jour : l'advertainment27. Souvent réalisé sous
la forme de miniséries, de jeux sur internet, de Web TV ou de jeux
vidéo, l'advertainment rend la publicité plus agréable en
la transformant en divertissement.
ii. Les entrants potentiels
Parmi les principaux entrants potentiels représentant
une menace pour secteur se trouvent les nouvelles agences ultra
spécialisées qui sont de plus en plus nombreuses depuis l'essor
du média internet et des
25
http://www.tns-sofres.com/sites/default/files/2013.10.17-pub.pdf
26
http://www.inmobi.com/wp-content/uploads/2010/11/InMobi
Consumer Research Q1 2011.pdf
27 Contraction des mots anglais
advertising et entertainment, le divertissement publicitaire
cherche à « être ce qui intéresse les consommateurs
» (et non plus à « chercher à les intéresser
») en mêlant publicité et divertissement.
nouvelles technologies de l'information et de la communication
; les cabinets de conseil en choix d'agence de communication et les
géants de l'internet comme Google.
Internet s'est imposé comme un média
incontournable pour toucher toutes catégories de la population. Cette
nouvelle forme de communication, plus interactive, plus rentable et de
qualité. Les annonceurs n'hésitent plus à faire appel
à plusieurs agences spécialisées qui travailleront chacune
sur une partie de la communication.
Ces différents éléments expliquent
l'arrivée de nouvelles agences sur le marché, plus
spécialisées et expertes dans les nouvelles technologies et le
numérique. De plus, les barrières à l'entrée
étant peu nombreuses pour le secteur de la communication,
l'entrée sur le marché est facilitée. Nous pouvons dire
que la crise économique est en train d'atomiser le leadership et en
faisant naitre une multitude de petites agences qui prennent de plus en plus
d'ampleur sur le marché.
Les géants de l'internet sont bien placés pour
menacer le marché car ils effectuent désormais de la vente
d'espace et empiètent sur le territoire des agences de communication.
Pourquoi assimiler des acteurs comme Google, Facebook ou Twitter à des
groupes de publicité ? => La majeure partie de leurs revenus sont des
revenus publicitaires !
iii. Les clients
La clientèle du secteur est très large puisque
la communication est essentielle à toute organisation, qu'elle soit
publique ou privée et qu'elle dispose d'un service de communication
interne ou non.
La forte concurrence qui règne sur le marché des
agences de communication place les clients en position de décisionnaires
car désireux d'obtenir la meilleure rentabilité possible pour
leurs investissements publicitaires ; les clients ont donc un fort pouvoir de
négociation.
La principale menace pour les agences réside dans les
appels d'offre réalisés par les clients. En faisant appel
à plusieurs agences, ils font jouer la concurrence. Les agences n'ont
alors pas d'autres choix que de baisser leurs tarifs pour avoir une chance
d'être sélectionné. Le prix reste souvent un
élément déterminant pour le choix des annonceurs.
43
Les agences ont donc peu de pouvoir sur le choix des
organisations avec lesquelles elles travaillent.
iv. Les fournisseurs
Des nombreuses agences collaborent avec des prestataires pour
réaliser les tâches qu'elles ne sont pas en mesure d'effectuer en
interne.
Parmi ces prestataires se trouvent des imprimeurs, des
graphistes, des photographes publicitaires, des banques d'images en ligne, des
illustrateurs, des dessinateurs, etc.
Les fournisseurs sont indispensables à l'aboutissement
d'un projet publicitaire. Les agences ne peuvent pas toujours assurer toutes
les étapes de la réalisation et multiplient parfois le nombre de
prestataires avec lesquels elles travaillent ; et puisque c'est eux qui
réalisent une grande partie du contenu, il est nécessaire
d'assurer un suivi afin de vérifier que tout est en ordre et que le
cahier des charges est respecté. Etant indispensables à certaines
agences et étant très sollicités, les fournisseurs ont un
pouvoir de négociation fort.
v. Les concurrents
Des agences en communication globale aux agences
spécialisées, les concurrents sont nombreux : agences
évènementielles, agences marketing services, agences conseil en
communication, agences interactives, agences publicité, etc.
Le marché est propice au développement mondial
de certains domaines de communication comme l'évènementiel qui
est un segment de la communication qui attire de nombreux annonceurs et qui
affiche une santé économique plutôt bonne malgré la
crise économique. Actuellement, le budget publicitaire consacré
à l'évènementiel représente 15% des dépenses
hors média des annonceurs, soit 2.5 milliards d'euros de chiffre
d'affaires global pour ce secteur, ce qui n'est pas négligeable. Les
barrières à l'entrée étant peu nombreuses,
l'arrivée sur le marché est facilitée. Ce qui renforce le
jeu concurrence sur le secteur.
44
4) Les facteurs clés de succès
1. L'internationalisation
Dans un marché très concentré comme celui
des agences de communication, l'ouverture à l'international est un
facteur de développement pour de nombreuses agences
indépendantes.
En effet, dans un contexte économique français peu
favorable aux investissements publicitaires, l'internationalisation des agences
de communication françaises permet de relancer la croissance du
secteur.
2. L'innovation
Les français étant de plus en plus publiphobes,
il est indispensable pour les agences de communication d'innover en
matière de support et de concept publicitaire pour faire revenir la
publicité dans le coeur des français.
3. La spécialisation
Avec l'émergence des nouvelles technologies, de
nombreuses agences ont fait le choix de la spécialisation. Dans une
certaine mesure, cela peut être considéré comme un facteur
clé de succès car elle permet aux agences de se
différencier et de proposer des solutions de communication que certaines
agences de communication globale ne pourraient pas proposer.
4. La diversité des talents
La diversité des talents présents au sein du
secteur des agences de communication permet aux annonceurs de
bénéficier d'une expertise diversifiée.
B. Internet : changement de paradigme technologique
La naissance d'Internet est souvent associée à
une révolution industrielle. N'importe qui avec une bonne idée
peut de nos jours créer une entreprise en ligne et réussir. Ce
que nous appelons aujourd'hui la révolution numérique, est le
passage depuis la seconde partie du XXème siècle de l'analogique,
le
45
mécanique, l'électronique et la technologie vers
le numérique, avec l'adoption et la prolifération des ordinateurs
personnels. Implicitement, le terme désigne également les
changements radicaux apportés par la technologie de l'information et de
la communication numérique. Analogue aux révolutions industrielle
et agricole, la révolution numérique a marqué le
début de l'ère de l'information. Au centre de cette
révolution se trouve la production de masse et l'utilisation
généralisée de circuits logiques numériques ; et de
ses technologies dérivées, y compris l'ordinateur, le
téléphone cellulaire numérique et Internet.
Depuis sa création en 1990, Internet a
littéralement supprimé les frontières de la communication
et a donné naissance à une foule d'entreprises. La
publicité en ligne est un exemple, qui utilise Internet pour
commercialiser et promouvoir des produits et services aux consommateurs.
Comparé à la publicité traditionnelle
(télévision, radio, panneaux publicitaires et autres supports
physiques tels que journaux, flyers, programmes, etc.), l'objectif de l'annonce
reste le même : l'image de marque et/ou la vente directe. La principale
et majeure différence étant que la portée de l'auditoire
est pratiquement répartie dans le monde entier. La publicité
internet comprend : l'email marketing, le marketing des réseaux sociaux,
le marketing mobile, ainsi qu'un réseau de commercialisation
d'affichages tels que des bannières, pop-ups, etc.
De la même manière que la naissance de la
télévision et de ses contenus vidéo au début des
années 1960 avaient eu un impact dévastateur sur la radio du
point de vue de l'audience ; assistons-nous aujourd'hui à la « mort
programmée » des médias traditionnels et par
conséquent de la publicité traditionnelle28 ? Pour
certains, et cela est matière à des discussions
passionnées, c'est déjà le cas. Force est de constater
qu'un nombre grandissant d'acteurs, majeurs comme plus modestes, de la
publicité se sont déjà positionnés sur ce nouveau
segment. En se fondant sur des fondements purement théoriques, nous
montrerons qu'il y a bien là les éléments constitutifs
d'un changement technologique au sens économique. Nous poursuivrons pour
comprendre en quoi Internet a changé la publicité ;
c'est-à-dire la manière dont ce nouvel outil
28 Par abus de langage mais dans un souci de
simplicité, nous continuons à utiliser le terme «
publicité traditionnelle » pour désigner l'ensemble
des médias actuels, à l'exception d'Internet, utilisés
comme support de la publicité.
46
nécessite une nouvelle approche de la communication au
sens général. Nous verrons par la suite que les intervenants
traditionnels n'ont d'autre alternative que de s'aligner et de se concentrer
sur ce secteur.
1) Rappels théoriques
Economiste majeur du 20ème siècle,
les idées de Joseph Schumpeter (1883 - 1950) sont encore celles
qui prévalent lorsque l'on s'intéresse à
l'évolution économique moderne et notamment à la
thématique de croissance de l'économie capitaliste. Nous
détaillerons brièvement ici des concepts qui nous permettrons
d'inférer la naissance de l'outil Internet comme innovation
technologique importante pour le secteur des médias, de la
publicité et du marketing.
a) La Destruction Créatrice
L'expression « destruction créatrice
» a été popularisée par Joseph Schumpeter et
reste la plus associée à sa personne. Il l'a définie dans
son ouvrage intitulé "Capitalisme, Socialisme et
Démocratie» (1942)29 comme un «processus
de mutation industrielle qui révolutionne incessamment de la structure
économique de l'intérieur, détruisant sans cesse
l'ancienne, créant sans cesse une nouvelle." Déjà
dans son livre de 1939, « Le Cycle des Affaires
»30, il a tenté d'affiner les idées
novatrices de Nikolaï Kondratieff (1892-1938) et ses cycles
économiques, que Schumpeter croyait tirés par l'innovation
technologique. Trois ans plus tard, il introduit le terme «
destruction créatrice », tiré explicitement de la
pensée Marxiste et utilisé pour décrire le processus de
transformation qui accompagne toute innovation :
« L'impulsion fondamentale qui met et maintient en
mouvement la machine capitaliste est imprimée par les nouveaux objets de
consommation, les nouvelles méthodes de production et de transport, les
nouveaux marchés, les nouveaux types d'organisation industrielle - tous
éléments créés par l'initiative capitaliste.
L'histoire de l'équipement productif d'énergie, depuis la roue
hydraulique jusqu'à la turbine moderne, ou l'histoire des transports,
depuis la diligence jusqu'à l'avion. L'ouverture de nouveaux
marchés nationaux ou extérieurs et le développement des
organisations productives,
29 Schumpeter, J.A. 1942. Capitalism, socialism
and democracy
30 Schumpeter, J.A., 1939. Business Cycles: A
Theoretical, Historical, and Statistical Analysis of the Capitalist
Process
47
depuis l'atelier artisanal et la manufacture jusqu'aux
entreprises amalgamées telles que l'U.S. Steel, constituent d'autres
exemples du même processus de mutation industrielle qui
révolutionne sans cesse de l'intérieur la structure
économique, en détruisant constamment ses éléments
vieillis et en créant continuellement des éléments neufs.
Ce processus de `Destruction Créatrice' constitue la
donnée fondamentale du Capitalisme : c'est en elle que consiste, en
dernière analyse, le capitalisme et toute entreprise capitaliste doit,
bon gré mal gré, s'y adapter. »
Cette description revêt déjà des
éléments fondamentaux nous permettant d'inférer le
caractère permanent du renouvellement des produits, objets et services
au sein de nos économies capitalistes. Internet, nouvel objet de
consommation, engendrant de nouvelles méthodes de production, ouvrant de
nouveaux marchés, nécessitant de nouveaux types d'organisation
industrielle, constitue indéniablement un nouvel exemple du processus de
mutation technologique qui révolutionne la structure économique.
Internet constitue un élément nouveau, venant rendre
obsolètes certains processus industriels ou modernisant certains autres,
contient tous les éléments identifiés par Schumpeter d'un
processus de destruction créatrice. Cette identification est importante
pour le reste de notre démonstration car selon Schumpeter, tout
processus de ce type est moteur de croissance économique et toute
entreprise gravitant dans une logique capitaliste se doit d'en tirer parti pour
sa propre croissance. Dans la continuité de cette assertion, nous voyons
que l'innovation et l'action des entrepreneurs jouent un rôle clé
dans ce processus de fuite en avant.
b) Croissance économique, Innovation et
rôle des entrepreneurs
Schumpeter distingue ainsi 5 formes d'innovations :
l'innovation de produits ; l'innovation de procédés ;
l'innovation de modes de production ; l'innovation de débouchés
et l'innovation de matières premières. Dans sa vision du
Capitalisme, il voyait l'innovation au travers de l'action des entrepreneurs,
dont la force perturbatrice soutient la croissance économique,
même si elle détruit la valeur des entreprises et des travailleurs
établis qui jouissent d'un certains pouvoir de marché provenant
d'anciens paradigmes technologiques, organisationnels, réglementaires et
économiques. Schumpeter a élaboré ce concept, en en
faisant le centre de sa théorie économique et il a
été repris plus tard comme une doctrine majeure de
48
l'école autrichienne de la pensée
économique de libre marché. C'est ainsi grâce à un
« entrepreneur innovateur » qu'existe dynamique économique via
des progrès aussi bien quantitatifs (augmentation du niveau de
production) que qualitatif. L'entrepreneur, acteur fondamental de la croissance
économique, pourra au travers de l'innovation obtenir un monopole
temporaire qui pendant un certain durera et permettra au nouveau
d'acquérir une place auprès de l'ancien ; et par la suite de
dépasser l'ancien. L'existence de ces entrepreneurs va ainsi venir
bouleverser l'équilibre économie préétabli et
engendrer un comportement d'imitation qui suit l'innovation quand celle-ci
génère du profit. L'enchainement de ces deux comportements,
innovation et imitation, expliquent selon Schumpeter, l'évolution du
capitalisme selon un mouvement cyclique.
c) Une évolution économique cyclique
En définitive la croissance économique est
drivée par les entrepreneurs qui arrivent en « troupes
d'entrepreneurs », qu'une innovation n'arrive pas toute seule mais sous
forme de « grappes » d'innovations. L'idée principale est que
le changement entraîne le changement. Cela s'explique très
simplement par le fait qu'une innovation technologique va permettre à
d'autres secteurs de se développer, sous l'action d'un entrepreneur, en
utilisant cette innovation dans le procédé de fabrication
intrinsèque au secteur et ainsi innover au sein du secteur. D'ailleurs,
Schumpeter défini une innovation comme non pas quelque chose de
totalement nouveau et créée à partir de rien mais
plutôt comme une nouvelle utilisation, une nouvelle combinaison des
outils, des moyens, utilisés dans tous procédé de
production. Le graphique présenté en Annexe 6
donne une image très claire des idées de Schumpeter
vis-à-vis de la croissance économique mondiale depuis la fin du
18ème siècle. L'économie est tirée par
une série de cycle long, de durée moyenne d'environ 50 ans, les
cycles de Kondratieff, qui naissent et disparaissent avec l'innovation
technologique. Selon ce référentiel, nous sommes aujourd'hui dans
la cinquième vague de l'ère moderne. Celle-ci est
brièvement caractérisée par la naissance d'un outil majeur
: Internet.
49
2) L'attractivité du marché de la
publicité sur Internet
Comme avec les médias traditionnels, la
publicité sur Internet implique un éditeur, un annonceur et
souvent un organisme qui facilite le processus, génère le contenu
de l'annonce et place le texte de l'annonce. Ce business n'a cessé de
croître en popularité depuis la fin des années 1990. Le
taux de croissance annuel de la publicité numérique est en
moyenne de 18%, avec des entreprises qui ont dépensé près
de 43 milliards de dollars en 2013, en hausse de 15% par rapport en 2012 ; les
dépenses publicitaires en ligne représentent globalement 11,6
milliards de dollars au premier trimestre 2014, en hausse vis-à-vis des
9,3 milliards de dollars de la même période en 201331
(Annexe 7).
Avec des consommateurs qui passent effectivement de plus en
plus de temps sur Internet, les annonceurs considèrent à juste
titre indexer leurs dépenses publicitaires à cette tendance. Les
produits et services orientés vers un consommateur jeune trouvent en
particulier les plateformes et les blogs de médias sociaux plus
efficaces pour capter leur attention. Grâce à des messages
interactifs et engageants, le consommateur est en fait de plus en plus
impliqué dans le processus de publicité. En conséquence,
l'efficacité des publicités sur Internet est plus facile à
mesurer : les impressions et clicks sont directement enregistrés ; la
fréquentation d'un site devient un outil de mesure du succès de
ce site par opposition au nombre d'achat in fine, qui est de toute façon
directement proportionnel et lié à la fréquentation. Le
marketing ciblé est ainsi rendu plus efficace que dans un magasin
physique, pour ne citer que cet exemple, puisque le consommateur arrive sur le
site en ayant été conseillé par ses pairs et s'il est
satisfait, il partagera son impression vers d'autres consommateurs.
a) Avantages de la publicité en ligne
Les avantages de la publicité en ligne par rapport
à la publicité traditionnelle sont nombreux. La liste,
non-exhaustive, qui suit en sont les principaux et les plus importants.
31
http://www.iab.net/abouttheiab/recentpressreleases/pressreleasearchive/pressrelease/pr-061214
1. 50
Répercussion positive sur les coûts
Le support électronique constitue un puissant avantage
quand les coûts entrent dans l'équation. Couvrir un large public
est possible avec une dépense limitée, ce qui entraîne un
bien meilleur retour sur investissement. Ainsi ceci est la principale raison
pour laquelle un nombre grandissant de PME, en France et dans le monde, qui ne
peuvent pas supporter les coûts publicitaires des bannières
extérieure, des foires commerciales ou des annonces dans les magazines ;
considèrent maintenant le marketing en ligne comme principale
stratégie marketing et de communication.
2. Optimisation du ciblage
En raison de la nature de l'Internet, il est possible de se
resserrer sur le public cible de sorte que seul le segment qui voit
effectivement l'annonce se compose d'acheteurs potentiellement plus forts ;
c'est-à-dire ceux-là même que le produit ou service
sous-jacent est susceptible d'intéresser en particulier. De fait,
beaucoup de ciblage se font par zone géographique pour réaliser
des annonces pertinentes pour les utilisateurs. De même, l'historique de
navigation des utilisateurs peut être une base pour le ciblage
précis des préférences et éviter les
répétitions inutiles.
3. Mesurabilité facilitée
C'est l'un des facteurs les plus importants pour
décider de l'impact de la publicité en ligne. Sur Internet, il
est possible de recueillir des données précises sur le nombre de
visites, les pages visitées, le nombre de fois où l'annonce a
été consultée par le même utilisateur, comment
l'utilisateur a atteint la page de l'annonce ou le site web ; et si
l'activité a donné lieu à une vente.
4. Polyvalence
Contrairement aux médias hors ligne, la
publicité en ligne peut être très interactive. De
l'incorporation de vidéos et jeux à des messages audio et des
articles pour la saisie de requêtes, il existe de nombreuses
méthodes pour garder le consommateur vivement et constamment
engagé.
51
5. Vitesse
Une fois le texte de l'annonce prêt, la distance entre
l'annonceur et ses consommateurs peut être couverte rapidement. Le
déploiement peut être immédiat, car la plupart du temps la
livraison des calendriers publicitaires ne dépend pas de l'horaire de
l'éditeur. Même des modifications et des remplacements dans
l'annonce sont plus rapides sur internet.
b) Inconvénients de la publicité en
ligne
Il y certainement des inconvénients à la
publicité sur internet. Parmi les exemples on peut citer le «
click-fraud » ou fraude au clic est une activité qui consiste
à faire effectuer par une personne ou un programme informatique des
clics sur des publicités afin de rapidement dilapider le budget
publicitaire d'un concurrent. La publicité étant
rémunérée au nombre de clic, la système de message
publicitaire vérifie que le propriétaire d'un site ne clique pas
lui-même sur ses publicités. Il existe aussi ce que l'on appelle
le « banner blindness », c'est-à-dire le manque d'impact de
l'annonce dû à l'accoutumance par laquelle les internautes
finissent par ne plus voir les bandeaux publicitaires. On peut également
citer les problèmes d'éthique liés aux infractions de la
vie privée. Toutefois, à l'évidence les avantages de la
publicité sur internet l'emportent largement sur les
inconvénients.
52
IV. CONCLUSION
Pendant des années, les annonceurs et publicitaires ont
parlé de la « révolution numérique » et de
« l'agence numérique » par opposition à « l'agence
traditionnelle ». Ces séparations sont aujourd'hui devenues floues
et la « révolution numérique » s'est transformée
en « réalité numérique ». Les agences de
publicité et leurs clients ont évolué pour répondre
aux exigences de ce nouveau monde en pleine mutation. Ce changement est en
cours depuis de nombreuses années maintenant mais les rumeurs de la mort
des agences traditionnelles sont exagérées.
Internet proportionne un bouleversement sociétal qui
dépasse largement le domaine du marketing et de la consommation. Selon
certains, nous entrons lentement dans une nouvelle économie du partage,
qui finira par éliminer le capitalisme. Mais à l'heure actuelle,
le nombre croissant d'informations échangées et le rapport de
plus en plus intime des individus avec les nouveaux vecteurs de communication
tels que les réseaux sociaux laisse entrevoir de beaux jours pour la
publicité numérique.
Nous sommes dans une période charnière, la
mutation technologique et comportementale à laquelle nous assistons
actuellement, suggère pour le secteur de la publicité à la
fois une menace dans le sens d'un besoin d'adaptation, et une
imprévisibilité, dans le sens où les choses avancent trop
vite pour être persuadé de la stratégie à
adopter.
Cette situation incertaine coïncide avec
l'étonnant retournement de situation de la transaction avortée
entre Publicis et Omnicom : l'irrationalité dont les instigateurs du
projet pourraient être accusés, consisterait en
réalité en une parfaite rationalité, mais soumise à
un bouleversement à la fois mençant et imprévisible.
V. ANNEXES
Annexe 1 : Travail de documentation et segmentation des
sources d'informations par catégories
a) Informations « officielles unilatérales »
b) Informations « officielles bilatérales »
Date
|
Type
|
Lien
|
Contenu
|
27/07/2013
|
VIDÉO - Conférence de presse à
Paris
|
https://www.youtube.com/watch?v=aXpghY8CLM
|
Annonce officielle devant les journalistes. Dure 1 heure avec
questions.
|
|
29/07/2013
|
VIDÉO - Conférence pour Bloomberg Tv
à New York
|
https://www.youtube.com/watch?v=e9j4q6WCUwY
|
En particulier : JW est questionné sur la fusion entre
"inequals" et détaille que la fusion est bien entre égaux, du
faite de la part de marché d'Omnicom vs la meilleure maîtrise des
coûts de Publicis. Dure 7 minutes.
|
|
13/02/2014
|
Résultats annuels 2013
|
http://publicisgroupe.eurobusinessmedia.com/ceo-
|
Présentation annuelle 2013 par ML. Voir chapitre "Update
on Omnicom merger". Difficultés évoquées : simplement
administratives ; n'évoque pas le problème du CFO, à ce
stade pourtant connu.
|
direct/publicis-groupe/interview-with-ceo-maurice-levy-fy-
|
2013,2014-02-12,1095#
|
|
09/05/2014
|
"Read the note John Wren sent to Major Omnicom
Clients"
|
http://adage.com/article/agency-news/read-note-john-wren-
|
(Retranscription d'une communication non publique). Annonce de JW
aux clients d'Omnicom : sans mentionner désaccord CFO. "on s'attendait
à un délai de mise en route de 6 mois initialement, mais au bout
du 9ème mois, cela nous a semblé trop long et cette longueur
était préjudiciable.
|
major-omnicom-clients/293127/
|
|
09/05/2014
|
Conference call
|
http://edge.media-server.com/m/p/2zji54v6/lan/en
|
Annonce officielle de JW site Omnicom sur l'abandon du projet. -
Causes: "corporate culture, complexity and time".
- Aucune référence à la question du CFO.
- Analogie avec le discours de confiance de Maurice Lévy :
"Nous sommes extrêmement compétitifs seuls, pendant toute la
période où la fusion était d'actualité nous ne nous
sommes jamais détournés de nos objectifs et ce n'est absolument
pas vrai que nous avons perdu des marchés pendant cette
période."
|
|
09/05/2014
|
Conference call Publicis
|
http://www.media-server.com/m/p/33rsofhu
|
Merger Termination - PowerPoint commenté par ML +
Conclusion sur la poursuite du plan 2018 de Publicis
|
|
09/05/2014
|
VIDÉO - Interview Maurice Lévy (Europe
1)
|
http://www.youtube.com/watch?v=T61Mcr8j8ZU
|
Analyse combinée (voir ci-dessous)
|
|
09/05/2014
|
VIDÉO - Interview Maurice Lévy
(BFM Business)
|
http://www.dailymotion.com/video/x1tq57k
publicis-omnicom-
|
Analyse combinée (voir ci-dessous)
|
projet-de-mega-fusion-renonce-maurice-levy-dans-gmb-09-
|
05 news
|
09/05/2014
|
Interview: Maurice Lévy explique les raisons
de l'échec (Le Monde)
|
http://www.lemonde.fr/actualite-
|
Analyse combinée (voir ci-dessous)
|
medias/article/2014/05/09/maurice-levy-je-n-etais-pas-pret-a-
|
transiger-sur-l-equilibre-de-cette-fusion44140863236.html
|
12/05/2014
|
Interview Maurice Lévy : « Le jour où
j'ai compris que la fusion ne se ferait pas... » (Les
Échos)
|
http://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/0203488208386-
|
Analyse combinée (voir ci-dessous)
|
maurice-levy-le-jour-ou-j-ai-compris-que-la-fusion-ne-se-ferait-
|
pas-669982.php
|
|
Résultats de l'analyse combinée : le choix
du DAF a été le seul réel problème. Les autres
motifs (autorisation de l'autorité chinoise, choix de la
résidence fiscale, lenteur préjudiciable) auraient
étés surmontables. Mais à travers l'équilibre du
management, on touchait au principe d'égalité.
Questions redondantes 3 sur 4 : "problème
d'égos?" NON problème d'équilibre. "amateurisme" NON
difficulté inhérente aux fusions de ce type : risque de
départ si annonce prématurée des postes.
Discours redondant 3 sur 4 : "nous ne voulions pas
sacrifier l'âme de Publicis, diluer notre modèle, nous sommes
pleins d'énergie, nous avons le meilleur bilan du secteur, nous sommes
n°1 dans le numérique et nous avons beaucoup d'autres projets"
(Exactement le même discours que dans le rapport annuel 2013 cf. page 8)
=> mise en évidence du discours politique.
c) Liste des informations « extra-officielles »
(articles de presse)
Presse France
Date
|
Titre
|
Source
|
Lien
|
29/07/2013
|
Les marchés applaudissent l'annonce du
mariage Publicis-Omnicom (avec VIDÉO)
|
La Tribune
|
http://www.latribune.fr/journal/editi
|
on-du-3007/a-la-une/777993/les-
|
29/07/2013
|
Pourquoi le siège social de Publicis Omnicom
sera installé aux Pays Bas
|
La Tribune
|
http://www.latribue.fr/technos- arches-applaudissent-l-annonce-
|
medias/publicite/20130729trib0007
du-mriage-publicis-omnicom-htm
|
29/07/2013
|
Le méga deal entre Publicis et Omnicom
(VIDÉO)
|
BFM Business
|
http://www.youtube.com/watch?v=r
78004/pourquoi-e-siege-social-de
|
VbUaCjiEFQ nicom-sera-i
|
02/08/2013
|
Martin Sorrell (WPP) : «Les fusions entre
égaux à la Omnicom-Publicis ne marchent pas»
|
Les Echos
|
http://www.lesechos.fr/02/08/2013/
paysbashtml
|
LesEchos/21492-085-ECHmartin-
|
04/11/2013
|
Feu vert américain à Publicis et
Omnicom
|
Les Echos
|
http://www.lesecho.fr/04/11/2013/
sorrell-----les-fusions-entre-egaux-a-
|
LesEchos/21556-103-ECHfeu-vert- la-omnicom-publicisne-marchent-
|
12/02/2014
|
Publicis-Omnicom : la fusion repoussée au
3e trimestre
|
Le Figaro
|
http://www.lefigro.fr/medias/2014 americain-a-publicis-et- pashtm
|
/02/12/20004- omnicomhtm
|
22/04/2014
|
La fusion entre Publicis et Omnicom prendra plus de temps
que prévu
|
La Tribune
|
http://www.latribune.fr/technos- 20140212ARTFIG00138-publicis-
|
medias/publicite/20140422trib0008 omnicom-la-fusion-repoussee-au-3e-
|
23/04/2014
|
La fusion Publicis-Omnicom menacée par des
raisons
fiscales
|
Les Echos
|
http://www.lesechos.fr/23/04/2014/ 26366/la-fusion-entreublicis-et trimestrephp
|
LesEchos/21674-058-ECHla-fusion-omnicom-prendra-plus-e-temps-
|
28/04/2014
|
Publicis Omnicom: l'accord de fusion remis
en question (avec VIDÉO)
|
BFM Business
|
publcis-omnicom-menace-par-ds-
http://www.bfmtv.com/economie/p
queprevuhtml
|
ublicis-omnicom-laccord-fusion-sons-fiscaleshtm
|
09/05/2014
|
Omnicom et Publicis renoncent à leur fusion
(VIDÉO)
|
Challenges
|
http://www.challeges.fr/economie/
remise-question-763567html
|
20140509.REU4253/omnicom-et-
|
09/05/2014
|
Echec de la fusion Publicis-Omnicom : 3 raisons
qui font que c'est probablement une bonne chose
|
Atlantico
|
http://www.atlaico.fr/rdv/nettoye
publcis-renoncent-a-leur-fusionhtm
|
ur/echec-fusion-publicis-omnicom-3-
|
09/05/2014
|
Publicis-Omnicom : pourquoi un tel gâchis
?
|
Les Echos
|
http://blogs.lesechos.fr/david- raisons-qui-font-que-c-est-
|
barroux/publicis-mnicom-pourquoi-probablement-bonne-chose-pascal-
|
09/05/2014
|
La fusion Publicis-Omnicom tombe à
l'eau
|
Le Monde
|
http://www.emonde.fr/economie/a un-tel-gachis-a14653html emmanuelgobry08104html
|
rticle/2014/05/09/les-groupes-
|
09/05/2014
|
Publicis et Omnicom : les vraies raisons d'un divorce
à l'amiable (VIDÉO)
|
LCI
|
http://vidos.tf1.fr/infos/2014/publi
publicis-et-omnicom-renoncent-a-
|
cis-et-omnicom-les-vraies-raisons-d-leur-fusion44139103234html
|
10/05/2014
|
Publicis-Omnicom : le jour d'après
l'échec de la
fusion
|
Le Monde
|
http://www.lemonde.fr/economie/a
un-divorce-a-l-amiable-8415768htm
|
rticle/2014/05/10/publicis-omnicom-
|
28/05/2014
|
Publicis-Omnicom, récit d'une fusion
mort-née
|
Les Echos
|
http://www.lesecho.fr/tech- le-jour-d-apres-l-
|
medias/medias/020497422399- echec44146203234html
|
Presse USA
Annexe 2 : Principales sociétés
du secteur (chiffre d'affaires fin 2012)
Rang Agence
|
Siège
|
CA 2012 (M$)
|
1
|
WPP
|
Londres
|
16 459
|
2
|
Omnicom
|
social New York
|
14 219
|
3
|
Publicis
|
Paris
|
8 494
|
4
|
Interpublic
|
New York
|
6 956
|
5
|
Dentsu
|
Tokyo
|
6 390
|
6
|
Havas
|
Puteaux
|
2 287
|
7
|
Hakuhodo
|
Tokyo
|
2 184
|
8
|
Alliance Data
|
Irvine
|
1 223
|
9
|
MDC
|
New York
|
1 071
|
10
|
Experian
|
New York
|
947
|
Annexe 3 : La chaîne de valeur du
secteur de la Publicité
Annonceurs
Agence de communication
Imprimeurs Editeurs Infographistes Réalisateurs Graphistes Concepteurs-rédacteurs Agence
de communication Scénaristes Régies
publicitaires Société d'étude Etc...
Annexe 4 : Les cinq forces qui
déterminent la structure concurrentielle du secteur de la
Publicité (modèle de Porter)
Clients
Pouvoir de négociation fort
- Organismes publics - Organismes privés
Menaces fortes
Entrants potentiels
Google, cabinets de conseil, nouvelles agences
spécialisées
Concurence intra- sectorielle
Forte
-Graphistes, imprimeurs, réalisateurs,
scénaristes, infographistes, régies, etc..
Pouvoir de négociation moyen
Fournisseurs
Produits de substitution
Internet
Menace forte
Annexe 5 : Évolution des
dépenses publicitaires entre 2007 et 2012 (Etats-Unis et monde,
évolution moyenne en pourcentage mesurée par différentes
agences)
Annexe 6 : Vagues d'innovations de Schumpeter
Annexe 7 : Croissance trimestrielle du
chiffre d'affaires de la publicité sur Internet (milliards de
dollars par trimestre ; janvier 1996 - avril 2014)
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
OUVRAGES
· J.Berk et P. De Marzo (2011), Finance d'Entreprise,
Seconde édition, PEARSON
· Schumpeter J.A. (1939), Business Cycles: A
Theoretical, Historical, and Statistical Analysis of the Capitalist
Process
· Schumpeter, J.A. (1942), Capitalism, socialism and
democracy
ARTICLES ACADÉMIQUES
· R. Weber et C. Camere (2003), Cultural conflict and
merger failure : an experimental approach, Management Science
· M. Jensen (1986), Agency Costs of Free Cash Flow,
Corporate Finance and Takeovers, American Economic Review
· R.Roll (1986), The Hubris Hypothesis of Corporate
Takeovers, Journal of Finance
· J. Harford et K. Li (2007), Decoupling CEO Wealth and
Firm Performance : The Case of Acquiring CEOs , Journal of Finance
· Porter M.E. (1979), How Competitive Forces Shape
Strategy, Harvard business Review
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