La distribution des dividendes en droit des sociétés commerciales ohada( Télécharger le fichier original )par Marc Rostel KANA KENGNI Université de Dschang - Master en droit des affaires et de l'entreprise 2013 |
2- La nécessité de la décision de distribution et de l'acte de répartition des dividendes fictifsLa distribution des dividendes fictifs commence effectivement par la décision de distribution326(*). Mais la seule décision ne suffit pas à constater l'infraction. Le délit n'est donc pas constitué après la décision de répartition prise par l'assemblée générale sur proposition des administrateurs327(*). En l'absence de décision de répartition, l'infraction ne peut être constituée.C'est ce qui ressort de l'affaire M.P.328(*)et Crédit Foncier du Cameroun contre BOOTO A NGON, EDOU et autres329(*). Il ressort des faits qu'à la suite d'une mission conjointe du MINEFI330(*)et du contrôle supérieur de l'Étateffectuée de mai à décembre 2002, et ayant porté sur le contrôle général de la gestion du Crédit Foncier du Cameroun, des poursuites ont été déclenchées contre les responsables de ladite structure. Parmi les mis en cause, les sieurs KOOH II Charles et CÖME TIENTA qui exerçaient dans ladite structure en qualité de commissaires aux comptes ont été cités à comparaître devant la juridiction d'instance pour complicité de distribution des dividendes fictifs. Pour leur défense, ils relevèrent que les éléments constitutifs de l'infraction n'étaient pas réunis puisque l'absence d'une décision de l'assemblée générale portant répartition des dividendes, comme c'était le cas en l'espèce, ne permettait pas d'établir l'infraction. Le tribunal décida alors à bon droit que la distribution des dividendes fictifs suppose une répartition faite dans les conditions régulières, faute de quoi l'infraction ne saurait être constatée. Il faut donc dire que le délit n'est pas consommé lors de l'approbation du bilan ou du seul fait du vote de l'acte car à ce stade, aucun droit privatif n'existe au profit des associés. Il faut que la répartition soit effective. La tentative n'est donc pas punissable331(*). Il faut un acte qui met le dividende à la disposition des associés de telle sorte que la perception ne dépend plus que de leur volonté. Peu importe la période de la perception individuelle. L'infraction sera par exemple constituée en cas de décision du conseil d'administration ou des gérants ordonnant le paiement. En outre, le dividende versé doit être fictif332(*). En réalité, ce n'est pas le dividende qui est fictif car, il est réellement distribué. Ce sont les biens qui devraient le justifier qui sont fictifs. Le caractère fictif résulte du non respectdes exigences de l'article 144 de l'AUSCGIE. Le caractère fictif sera alors lié au non respect des règles de forme etaux irrégularités du bénéfice à partager333(*).Dans ce cas, le bénéfice est prélevé sur le capital ou sur les réserves légales ou facultatives.À ce niveau, on se demande si le dividende est fictif lorsque la société fait voter ce dividende en le prélevant sur un poste de bilan qu'il ne révèle pas aux associés. Autrement dit, y-a-t-il fictivité si en l'absence de bénéfice,le conseil d'administration fait voter par l'assemblée un dividende qu'il lui présente, à l'aide d'un bilan inexact commeprovenant du bénéfice de l'exercice alors qu'il provient en réalité des réserves ?La jurisprudence répond par l'affirmative334(*).Auparavant, il était admis qu'il n'y avait pas distribution des dividendes fictifs lorsque les dividendes avaient leur contrepartie dans les réserves occultes335(*). Cette solution ne peut plus être appliquée. Il est clairement stipulé que la société désireuse de prélever les dividendes sur les réserves doit expressémentpréciser les postes de réserve sur lesquels elle procèdera au prélèvement336(*). La distribution des dividendes fictifs est une infraction intentionnelle. À côté des éléments susmentionnés, les auteurs doivent avoir agi sciemment. * 326 Pour la décision de distribution, voir supra p.44. * 327Crim, 14 mars 1936, D. H., 1936, 270. * 328 Ministère Public. * 329 TGI de Yaoundé, jugement n° 270/crim du 11 Juillet 2008, MP et Crédit Foncier du Cameroun c/ BOOTO ANGON et autres, inédit. * 330 Ministère de l'Économie et des Finances. * 331 MUANDA NKOLE wa YAHVE Don José, « Droit pénal des sociétés issu de l'OHADA » p. 19. * 332 Voir NDOKO Nicole Claire et YAWAGA Spener, « Infractions relatives à la gestion des sociétés », in encyclopédie du droit OHADA (Sous la direction de POUGOUE Paul-Gérard), Lamy, 2011, p.971 et s. * 333 SOCKENG Roger, Droit pénal des affaires OHADA, op.cit., p. 92. * 334Crim, 22 janvier 1937, D., 1937, 1, 71. * 335Crim, 17 juin 1942, J.C.P., 1943, 2, 212.Certaines sociétés constituent parfois de réserves occultes qui n'apparaissent pas à l'inventaire et au bilan. * 336 Art. 143 (2) de l'AUSCGIE. |
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