La distribution des dividendes en droit des sociétés commerciales ohada( Télécharger le fichier original )par Marc Rostel KANA KENGNI Université de Dschang - Master en droit des affaires et de l'entreprise 2013 |
Deuxième partieL'ORGANISATION DE LA RÉPARTITION DES DIVIDENDES DANS UNE OPTIQUE DE PROTECTION DES INTÉRÊTS SOCIAUXLa fonction essentielle de la société entendue comme vêtement juridique de l'entreprise est d'assurer la créativité économique. Celle-ci consiste en la production, la création et la distribution des ressources nouvelles. Cette entreprise n'est possible qu'à travers la mobilisation des ressources qui pour la plupart proviennent des associés, qui espèrent en retour une contrepartie. Comme des droits de l'homme et du citoyen que le pouvoir politique doit respecter, l'associé a des droits que l'intérêt de la personne morale ne sauraitsupprimer ou restreindre218(*). C'est le cas du droit au dividende. Mais celui-ci ne peut se réaliser qu'en vertu d'une répartition.Répartir, c'est attribuer une part à quelque chose. Dans le cadre de la réalisation du droit au dividende, il s'agit de déterminer et d'attribuer à chaque associé sa part de bénéfice dont la distribution a été décidée. À ce propos, c'est l'AGO qui détermine la part de bénéfices à distribuer, selon le cas, aux actions ou aux parts sociales219(*). Elle fixe les modalités de paiement ou choisit de déléguer ce pouvoir aux dirigeants. Cette liberté est tempérée par certaines exigences qui sont à la fois protectrices de l'associé et de la société. Pour le premier, l'exigence d'une périodicité dans laquelle le paiement doit avoir lieu permet d'assurer que le dividende voté soit effectivement versé à l'associé. Pour la deuxième, l'interdiction des clauses d'intérêt fixe220(*), l'incrimination et la sanction de la distribution des dividendes fictifs assureront sa pérennisation. Plus importante est l'exigence de la régularité qui gouverne tout le processus de la distribution des dividendes. C'est dire de manière globale que la protection des intérêts sociaux est réalisée lorsque le législateur aménage des modalités de répartition qui garantissent les droits des associés (Chapitre 1) et organise un contrôle qui assure leur protection et celle de la société (Chapitre 2). Chapitre 1 : L'AMÉNAGEMENT DES MODALITÉS DE RÉPARTITION GARANTISSANT LES DROITS DES ASSOCIÉSLittéralement, une modalité est une forme particulière que revêt une chose, un acte ou une pensée. Juridiquement, ce terme désigne les dispositions d'un acte juridique qui aménagent son exécution. Il s'agira concrètement d'analyser comment le dividende est déterminé et attribué aux associés. En effet, l'intérêt commun de ceux-ci est la recherche et la réalisation du profit par la société en vue de les partager. Chaque associé recherche alors un enrichissement personnel procuré par le partage. Lorsque celui-ci ne profite pas à tous les associés, il y a rupture d'égalité. Ceci pourra être le cas dans les sociétés coopératives à caractère commercial. Il est en effet prévupar l'article1(3) de l'AUSC221(*)que « nonobstant les dispositions des articles 1er et 6 de l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique, les sociétés coopératives qui exercent une activité commerciale sont soumises aux dispositions du présentActe uniforme ». L'article 46 ajoute pour sa part que « Les parts sociales confèrent à leur titulaire un droit sur les excédents réalisés par la société coopérative lorsque leur répartition a été décidée conformément aux dispositions statutaires ». Aucune exigence de proportionnalité n'est prévue222(*). C'est donc une brèche ouverte aux inégalités car l'action des sociétés coopératives peut couvrir toutes les branches d'activité à l'instar des activités commerciales. Dès lors, la société coopérative qui exerce une activité commerciale estunesociété commerciale mais soustraite par le législateur au droit commercial et soumise à un régime particulier.À ce propos, il devrait être exigé aux sociétés coopératives à objet commercial une répartition égalitaire sous réserves d'une dérogation expresse par les coopérateurs. C'est d'ailleurs cette vision qui prime dans les sociétés commerciales permettant ainsi d'assurer une justice distributive. Les associés sont à cet effet libre de choisir un mode de répartition égalitaire ou non (Section 1). En plus, la diversité des modalités de paiement assure l'effectivité du droit au dividende de l'associé (Section 2). Section1 : LES MODALITÉS DE RÉPARTITION DES DIVIDENDES PRÉSERVANT L'ÉGALITÉ ENTRE LES ASSOCIÉSSauf clause contraire, les droits sur les bénéfices réalisés par la société lorsque leur distribution est décidée, sont proportionnels au montant des apports qu'ils soient faits au moment de la constitution de la société ou au cours de la vie sociale223(*). Des dispositions des articles 53 et 54 de l'AUSCGIE, il résulte que le choix du mode de répartition se fait par les associés dans les statuts. Ceux-ci doivent d'ailleurs obligatoirement énoncer dans les statuts « les stipulations relatives à la répartition du résultat »224(*).À cet effet, ils choisiront par action ou par omission un mode égalitaire (Paragraphe 1). Mais ils pourront aussi opter pour un mode inégalitaire tout en restant dans la légalité (Paragraphe 2). * 218 Voir RIPERT et ROBLO, Traité de droit commercial, T 1, 7eme éd., LGDJ, 1962, p.688 cité par MOUTHIEU DJANDEU op cit., p. 71. * 219 Art 144 de l'AUSCGIE. * 220 Il s'agit d'une clause qui assure le versement d'un intérêt à l'associé même en l'absence de bénéfices. Elle ne doit pas être confondue avec la clause des statuts qui prévoit le versement d'un premier dividende attribué sous la forme d'un intérêt calculé sur le montant libéré et non remboursé des actions. Voir infra p.78. L'interdiction n'est pas expressément prévue par le législateur mais découler de l'exigence d'un bénéfice distribuable. * 221 Acte uniforme relatif au droit des Sociétés Coopératives adopté le 15 décembre 2010 à Lomé. * 222 L'art 54 l'AUSCGIE stipule expressément que les droits et obligations attachés à chaque titre sont proportionnels au montant des apports qu'ils soient faits lors de la constitution de la société ou en cours de fonctionnement. * 223 Cette proportionnalité s'applique aux droits politiques, financiers et à la contribution aux pertes. * 224 Art 13-11° de l'AUSCGIE. |
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