La distribution des dividendes en droit des sociétés commerciales ohada( Télécharger le fichier original )par Marc Rostel KANA KENGNI Université de Dschang - Master en droit des affaires et de l'entreprise 2013 |
Section 2 : L'EXIGENCE D'UNE DÉCISION DE DISTRIBUTION PRÉSERVANT LA VOCATION AU DIVIDENDE DES ASSOCIÉSDans toutes les sociétés, l'affectation des résultats est l'oeuvre de la collectivité des associés. Après approbation des comptes, les associés peuvent décider de partager ; de partager partiellement et de mettre en réserve ou de mettre seulement en réserve147(*). L'associé est donc activement impliqué dans la décision de distribution (paragraphe 1). C'est lui qui est le bénéficiaire du dividende même si cette vocation n'est que partiellement réglementée par le législateur (paragraphe 2). Paragraphe 1 : L'INTERVENTION DE L'ASSOCIÉDANS LA DÉCISION DE DISTRIBUTIONTous les associés ont le droit de participer aux assemblées générales de distribution des dividendes (A). Mais la société étant le lieu de rencontre de multiples intérêts, des mesures peuvent s'avérer être préjudiciables aux droits des associés. C'est pourquoi le législateur garantit leur droit en leur donnant la possibilité de contourner ces situations (B). A- Le droit de participation de l'associé à l'assemblée générale ordinaire compétente pour la distribution des dividendesC'est l'AGO qui est compétente pour statuer sur la distribution des dividendes. Les statuts peuvent prévoir que certaines décisions seront prises par voie de consultation écrite148(*). Mais l'approbation des comptes et donc l'affectation des résultats doit nécessairement se faire en AGO annuelle. D'ailleurs, la netteté des termes utilisés et la référence aux conditions de tenue de cette assemblée montrent que les rédacteurs de l'Acte uniforme ont entendu écarter la consultation écrite en la matière149(*). À ce niveau, le droit de vote que le législateur a entendu protéger (2), est la manifestation concrète du droit de participation de l'associé (1). 1- Le droit de vote comme moyen de prise de décision de l'associéLe droit de vote doit être considéré comme le bras séculier du droit au dividende. Sans ce droit, il serait difficile pour les associés surtout minoritaires de bénéficier de la prospérité de leurs affaires. Le droit de vote est le principal droit politique que confère la qualité d'associé. C'est par ce droit que l'associé participe au gouvernement de la société150(*). À cet effet, la décision de distribution nécessite la tenue de l'assemblée générale. Celle-ci doit être convoquée dans le délai de six mois à compter de la clôture de l'exercice. Pour affirmer l'exercice de ce droit et préserver une bonne majorité, le législateur garantit à l'associé un droit à l'information occasionnel et permanent. Il lui assure une libre participation aux AGO qui est cependant limitée dans les sociétés anonymessi les statuts ont prévu un nombre minimal d'actions ne pouvant excéder dix, pour ouvrir droit de participer à l'assemblée151(*). Disposition injuste pour certains152(*), cette restriction qui ne s'applique pas aux AGE153(*), s'explique d'une part par le grand nombre d'actionnaires de certaines sociétés et l'impossibilité de les recevoir dans une salle et d'autre part, par le souci d'éviter l'intrusion de petits porteurs cherchant seulement à créer la confusion au sein de la société154(*). Les associés peuvent néanmoins se regrouper pour atteindre le minimum requis. La participation de l'associé aux AGO peut se faire personnellement ou par le biais de la représentation selon les règles prévues en la matière155(*). Le vote par procuration permet à l'associé de manifester son intérêt à la vie de la société et d'exercer ses prérogatives sans être physiquement présent156(*).Les problèmes de l'éloignement et dumanque de temps sont ainsi résolus. Cependant, la validité des assemblées dans les SNC exige la présence des associés représentant la moitié du capital. Les modalités de calcul se feront donc en considération de la majorité des associés présents. Tandis que dans les sociétés à risque limité, les modalités de calcul se font en considération d'un ensemble exprimé en actions ou parts sociales157(*). Dans tous les cas, la décision de distribution est prise à la majorité c'est-à-dire d'après un nombre minimal de voix ou de la fraction du capital nécessaire pour qu'unedélibération soit valablement prise par l'organe d'une société158(*). C'est dire que c'est la règle de la majorité qui constitue la base de toute gestion sociale159(*).À cet effet, à chaque part sociale ou action, est attaché un droit de vote proportionnel à la quotité du capital qu'elle représente. De ce fait, certains associés auront un droit de vote important. La doctrine s'est offusquée de cette situation arguant qu'elle entraine la rupture de l'égalité et porte atteinte à l'intérêt communpar le fait que l'attribution ou la possibilité laissée à certaines personnes de détenir un pourcentage important de droit de vote, permet à une même opinion représentée par une seule personne physique ou morale ou à un groupe de personnes d'être prépondérantes160(*). L'on pense qu'il n'ya pas ici rupture d'égalité. En effet, il est constant que l'une des conditions spécifiques de formation du contrat de société est la mise en commun des apports en vue de réaliser les bénéfices. Il ne faut pas perdre de vue l'éventualité de réalisation des pertes par la société. Dès lors, le risque pris est proportionnel à l'engagement souscrit. Il n'y aurait pas de rupture d'égalité si les décisions à prendre sont influencées par la personne qui risque plus. L'on peut à la limite envisager la rupture de cette égalité dans le cas contraire. Ce sera le cas si l'opinion d'une personne détenant un grand nombre de parts sociales ou d'actions n'est pas prise en compte et qu'il en résulte par la suite une décision préjudiciable aux associés. En fin de compte, il est nécessaire de protéger le droit de participation des associés aux AGO. * 147ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMB Moussa, op. cit., p.153. * 148 Art. 284 et 333 de l'AUSGIE. Les consultations écrites ne sont pas expressément envisagées pour les SA. Est-ce à dire qu'elles y sont interdites ? L'on répondrait par la négation. Le privilège étant octroyé au capital, il est possible pour des personnes ne résident pas la même ville ou le même pays de constituer une SA. Dans cette optique, la loi doit leur offrir l'opportunité malgré leur éloignement de participer à la gestion de leur société. * 149ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMB Moussa, op. cit., p.332. * 150 KADDOUCH Renee, le droit de vote de l'associé, Thèse de doctorat, université de droit d'économie et des sciences d'AIX Marseille, 2001, p.304. * 151 Art. 552 de l'AUSCGIE. * 152 NOUEMO TSASSONHOUA Adélaïde Laurence, la société anonyme avec administrateur général, Mémoire de DEA, Université de Yaoundé II- Soa, 2004, p. 42. * 153 Assemblée générales extraordinaires. * 154 NJEUFACK TEMGWA René, « la règle de la majorité dans le droit des sociétés commerciales OHADA », annales de la F.S.J.P de l'université de Dschang, Tome 6, 2006, p. 81; FAYE Amadou, « L'égalité entre associés (Acte uniforme sur le droit des sociétés et les GIE) », Ohadata D-04-10, p. 7. * 155 Art. 126, 334, 335, 336, 538 et autres de l'AUSCGIE. * 156 MOUTHIEU NJANDEU Monique-Aimée, L'intérêt social en droit des sociétés, op. cit., p. 219. * 157 NJEUFACK TEMGWA René, op. cit. p. 87. * 158 CORNU Gérard, vocabulaire juridique, PUF, 1987, p 534. * 159 NJEUFACK TEMGWA René, op. cit., p. 83; CA de Renne, 22 mai 1973, Gaz. Pal., 1973, 2. 700, note PEISSE * 160 MOUTHIEU NJANDEU Monique-Aimée, op. cit., p. 48. |
|