WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Espaces de coworking - capitalisme cognitif et métamorphoses du travail

( Télécharger le fichier original )
par Nina Danet
Université Paris VIII - Master II Information & Communication spécialité Industries créatives 2014
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

1.2 Un tiers-lieu professionnel

La définition proposée par le site Creative Wallonia nous invite donc à mobiliser la notion de tiers-lieu (traduction de third place) que nous devons à Ray Oldenburg (Oldenburg, 1989). L'auteur s'est intéressé à la naissance de nouveaux lieux, intermédiaires entre le domicile et le travail, adaptés à un style de vie urbain, individualisé et mobile. D'après la classification qu'il propose, les premiers-lieux désignent le domicile et les endroits de vie privée. Les seconds lieux se caractérisent par les espaces de travail traditionnels où l'individu passe la majeure partie de son temps. Le tiers-lieu est donc une place hybride, localisée dans l'espace, qui répond selon l'auteur à quelques critères. Parmi eux : la gratuité ou le bon marché, l'accessibilité, le cadre hospitalier et confortable, accueillant des habitués mais aussi des gens de passage (Genoud, Moeckli, sd, p.4). Ces lieux sont neutres, simples, facilitent les rencontres dans un climat informel. En définitive, il s'agit d'un type d'espaces assez vaste allant du café à la bibliothèque en passant par un hall de gare, qui se positionnent comme une alternative aux deux sphères socialement structurantes que sont le domicile et le lieu de travail et dans lesquels se développent des usages hybrides.

Avec la « révolution numérique » le concept de tiers-lieu a suscité un regain d'intérêt. La numérisation des fichiers, les outils de communication en ligne, les réseaux sociaux et de manière générale la convergence des supports a permis de « délocaliser » progressivement des activités quotidiennes. D'où un nouveau regard porté sur ces lieux, qu'ils soient explicités comme tel ou non. Car en effet « ce n'est pas tant le lieu qui fait tiers-lieu mais l'usage » (Garov, 2012). C'est d'ailleurs par les usages qu'il semble intéressant de distinguer les différents types de tiers-lieux. Ainsi, la classification actuelle proposée par l'équipe de la Fondation Internet Nouvelle Génération (Fing) nous paraît convaincante puisqu'elle en distingue trois sous-catégories et permet ainsi de préciser l'inscription des EC dans le champ des tiers-lieux.

·

14

des lieux de médiations et d'accès : médiathèques, Espaces Publics Numériques (EPN), cafés wifi...

· des lieux de création et de projets : fablabs, makerspaces... 1

· des lieux de travail et entrepreneuriat : espaces de coworking, télécentres, business lounge...

Bien que les frontières ne soient en réalité pas si hermétiques (on retrouve parfois deux types de tiers-lieux au sein d'un même espace), cette catégorisation permet d'observer l'espace de coworking comme tiers-lieu formalisé, à visée professionnelle et donc comme nouvel espace alternatif de travail. Ray Oldenburg répertoriait les espaces urbains qui s'inventaient tiers-lieux sans pour autant se définir de la sorte. Il s'agissait d'avantage d'une appropriation spontanée et individuelle d'un lieu, que ce soit une librairie ou même un salon de coiffure dans certains pays, qui donnait naissance à une communauté vivante. On remarque aujourd'hui que l'utilisation de cette notion désigne des lieux qui se sont construits, ont été pensés et aménagés autour de ces nouveaux usages. Ce fut par exemple une des lignes directrices du développement de la chaîne de coffeeshops Starbucks dans le monde. Remarquant la fréquentation croissante de travailleurs occasionnels nomades qui grâce à leur équipement personnel (ordinateur portable, tablettes et autres terminaux) pouvaient exercer leur activité presque n'importe où, la chaîne Starbucks y a vu une niche à exploiter. Séduit par le concept de tiers-lieu, Howard Schlutz PDG de la marque en a fait le coeur de ce qu'il appellera « l'expérience Starbucks » : « Starbucks, c'est une atmosphère rationalisée mais décontractée, efficace mais lounge [...] Le sens de la flânerie est travaillé, de même que l'esthétique de la décoration.[...] Le but est de s'y sentir bien quelque soit la situation : en travaillant connecté, avec des amis, ou pour signer des contrats. Certains appellent cela la "classic Starbucks experience" »2. Sans rentrer plus loin ici dans le débat de la récupération marketing et marchande du concept de tiers-lieu et donc de sa potentielle dénaturation (Daix, sd), nous nous intéressons au fait que le tiers-lieu notamment professionnel semble aujourd'hui correspondre à des attentes spécifiques de la part d'une catégorie de population urbaine, mobile, connectée... Une catégorie de population qui a intégré les usages numériques au

1 En ce qui concerne la thématique spécifique des fablabs et makerspaces que nous n'aborderons pas plus en profondeur ici, je renvoie aux récents travaux de la Fing : http://www.slideshare.net/slidesharefing/tour-dhorizon-des-fab-labs (consulté le 21/07/2014)

2 DAIX, Matthieu, Le marketing selon Starbucks, le concept de third-place, http://www.brocooli.com/le-marketing-selon-starbucks-le-concept-de-third-place/ (consulté le 28/07/14)

15

quotidien et qui recompose son environnement social et professionnel de manière flexible et décloisonnée. Une catégorie de population considérée leader d'opinion, prescriptrice des tendances culturelles et des modes de vie à venir.

Le déploiement récent des EC dans les territoires urbains semble donc répondre aux attentes et aux usages mais aussi aux valeurs de plus en plus affirmées des travailleurs du XXIème siècle, que l'on retrouve dans le concept de tiers-lieu. A ce titre, Bruno Moriset nous fournit un tableau comparatif qui révèle la similarité des approches entre les lieux décrits par R.Oldenburg il y a vingt-cinq ans et les EC. Pour cela l'auteur prend appui sur Citizen Space, l'un des premiers EC basé à San Francisco, source d'inspiration pour beaucoup d'acteurs du coworking (Moriset, 2014, p.8)

Figure 1 : tableau valeurs « des tiers-lieux » et des espaces de coworking : une comparaison. (Source : Moriset, 2014, p.8)

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo