INTRODUCTION GENERALE
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Dans la zone tropicale humide, les régions de contact
entre les forêts denses humides et les savanes limitrophes ont connu au
cours du temps, de profondes modifications de leurs aires de distribution. Ces
variations ont été lié aux variations climatiques au cours
du Quaternaire récent. Les savanes qui couvraient de vastes zones au
cours de l'Holocène ont amorcé un mouvement de recul grâce
au retour de conditions climatiques favorables. D'après les
études de pollens et de diatomées contenus dans les
sédiments lacustres, la savane s'est largement étendue entre 4000
et 2500 BP du fait d'un assèchement du climat. Mais, Une phase
climatique humide qui a débuté après 2000 ans BP a permis
à la forêt un mouvement de reconquête sur les savanes
limitrophes (Reynaud-Farrera et al., 1996 ; Nguetsop, 1997 ; Schwartz,
1997 ; Schwartz et al., 1997). Autrement dit, depuis environ 1500 ans
BP, une phase humide plutôt favorable à l'expansion de la
forêt s'est mise en place et se poursuit jusqu'à nos jours.
Aujourd'hui pourtant, l'opinion commune au sujet de la
dynamique des formations végétales en Afrique subsaharienne est
celle d'un recul rapide de la forêt laissant place à la savane.
Les régions tropicales humides d'Afrique subsaharienne sont
caractérisées par la réduction de la surface des massifs
forestiers (Aboubacar et al., 2012). Par exemple, le taux annuel de
déforestation nette du bassin du Congo entre 1990 et 2000 a
été évalué à 0,2 % de la surface totale de
la forêt par De Wasseige et al. (2009) et 0,4 % par la FAO
(2001). Pour cette même période, la FAO a estimé ce taux de
déforestation nette à 0,5 % en Guinée et 3 % en
Côte-d'Ivoire. Les interprétations de
télédétection ainsi que les enquêtes et
relevés de terrain démontrent que de nos jours, à
l'échelle locale, dans une région comme celle du Mbam et Kim, le
mouvement d'expansion de la forêt continue vigoureusement (Youta Happi,
1998). L'accélération de la dynamique forestière par la
mise en culture a été localisée dans le sud des savanes
baoulé (Côte-d'Ivoire) par Aboubacar et al. (2012) et dans la
région de Béoumi (Nord-Ouest du V baoulé, à la
latitude de Bouaké). Grâce aux analyses des relevés
floristiques et à la photo-interprétation Lassailly et Spichiger
(1981) détectent des régénérations. Ils concluent
que «l'extension des brousses forestières mésophiles est
favorisée par la mise en culture de certaines zones
privilégiées de savanes, notamment par l'intermédiaire de
la culture du café, du cacao et des cultures vivrières ».
Au Centre-Cameroun en région habitée par les
populations Yambassa dans la zone du confluent entre la rivière Mbam et
le fleuve Sanaga, il est probable que les mises en valeur agricole de parcelles
de savanes aient conduit aux mêmes effets. Ou alors, les dynamiques ne
s'opéraient pas de la même façon, compte tenu des
spécificités d'ordres naturels et humains
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de cette région. C'est justement à ce titre que
cette étude vise à établir les implications des
systèmes de mise en valeur agricole et foncière du site sur le
double plan économique et écologique.
I. DEFINITION DU SUJET
Depuis les années 1970, de nombreux travaux ont
montré la progression des peuplements ligneux dans les savanes des
régions de contact forêt-savane d'Afrique centrale et occidentale
comme c'est le cas au Centre de la Côte d'Ivoire (Avenard et al.,
1974 ; Blanc-Pamard et Spichiger, 1973 ; Blanc-Pamard et Peltre, 1979).
Les agriculteurs ont joué un rôle important dans la «
reforestation» de ces milieux notamment en développant des cultures
pérennes comme le caféier et le cacaoyer ou en suspendant les
feux dans les champs de cultures vivrières implantés dans les
savanes. Ces pratiques ont été étudiées en
Guinée et au Cameroun par des agronomes et des ethno écologues
(Dounias, et Hladik, 1996 ; Filipski et al., 2007 ; Jagoret et
al., 2011 ; Correia et al., 2010).
La présence des savanes dans les régions
tropicales humides africaines a étonné les botanistes durant la
première moitié du 20e siècle. Ils
considéraient en effet que ces peuplements végétaux soumis
à une pluviométrie abondante devaient être totalement
couverts par la forêt. Ces chercheurs, à l'instar
d'Aubréville (1949) évoquaient une origine anthropique de la
savane dans ces régions. Les agriculteurs défricheraient la
forêt pour cultiver et se nourrir, et le retour fréquent des
cultures sur les mêmes espaces à l'origine forestiers,
combiné à l'usage du feu entraînait un processus de
savanisation. Aujourd'hui, les scientifiques expliquent la présence de
ces savanes par l'existence dans le passé des périodes
sèches, en particulier durant l'Holocène entre 4000 et 2000 ans
BP (Schwartz, 1992 ; Giresse et al, 1994). Ces savanes se sont maintenues
ensuite malgré une pluviométrie plus abondante dans les
situations de sols pauvres, cuirassés ou sableux et lorsque les feux
favorisés par la présence d'une biomasse importante de
graminées, se répétaient quasiment chaque année.
Mais dans toutes ces situations dans la region du Centre-Cameroun, la
forêt développerait à l'heure actuelle une nette tendance
à la progression sur les savanes (Youta Happi, 1998).
En pays yambassa, Beauvilain et al (1985) ont décrit
les remparts végétaux constituant des haies vives atteignent des
dimensions impressionnantes. Ici, l'ossature défensive est fournie par
un arbre, le kapokier (Ceiba pentandra), qui peut atteindre 30
à 40 mètres de haut. Les Yambassa ont ainsi bouturé des
«murs vivants» de kapokiers sur des kilomètres de long.
Toutefois, ces murs constitués par des alignements serrés de
grands arbres délimitaient et défendaient l'espace d'une
communauté villageoise, mais ils créaient véritablement le
terroir
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Yambassa. Installées dans des savanes herbeuses, ces
lignes ceignaient les positions hautes et jouaient le rôle de pare-feu,
mais aussi de bouclier naturel derrière lequel les populations se
postaient pour surveiller les ennemis. À l'arrière, l'homme
pouvait entretenir des massifs forestiers dont l'essence dominante était
le palmier à huile.
La question est celle de savoir quelle est la contribution de
ces « Systèmes défensifs végétaux» du
« pays» yambassa dans la distribution et la dynamique de la
biodiversité floristique et partant, dans l'évolution actuelle
des contacts forêt-savane de cette région du centre Cameroun.
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