1.2. Impact du réchauffement climatique
Le réchauffement climatique global, induit en grande
partie par les activités humaines, marque de son empreinte tous les
compartiments ou éléments fonctionnels de
l'écosphère (Parmesan & Yohe, 2003; Root et al.,
2003; Walther et al., 2005; Parmesan, 2006 ; Rosenzweig et
al., 2008; Beaugrand & Goberville 2010). Il affecte naturellement
l'océan qui a emmagasiné près de 84% du surplus de chaleur
ajoutée au système climatique (Levitus et al., 2005).
Cette accumulation d'énergie thermique a eu pour conséquence un
réchauffement global moyen de 0,06°C concernant les premiers trois
milles mètres de l'Océan, entre 1948 et 1998.
Une des conséquences les plus spectaculaires du
réchauffement planétaire est la réorganisation spatiale
des espèces. Des preuves évidentes montrent que le
réchauffement provoque le déplacement latitudinal des
espèces (Hughes, 2000 ; Parmesan & Yohe, 2003; Deutsch et
al., 2008; Muthoni, 2010). Cette réorganisation spatiale touche
également les espèces de poissons marins, exploitées ou
non (Perry et al., 2005; Brander et al., 2003). Les cas
d'apparitions d'espèces dites « tropicales » dans
les eaux tempérées et tempérées-froides de
l'Atlantique Nord-Est (Quero et al., 1998; Stebbing et al.,
2002; Beare et al., 2004a) illustrent bien ce phénomène.
D'autres espèces, familières des eaux de la mer du Nord telles
que l'entélure (Entelurus aequoreus Linnaeus, 1758),
ont vu leur abondance exploser et leur limite méridionale
supérieure de répartition s'étendre vers le Nord
(Kirby et al., 2006; Fleischer et al., 2007; Van Damme &
Couperus, 2008). Enfin, certains poissons, déjà durement
touchés par l'activité de pêche comme la morue de
l'Atlantique, sont repoussés de leur limite sud de répartition,
zones où les eaux deviennent trop chaudes (Beaugrand et al.,
2003; Mieszkowska et al., 2007).
Les mécanismes, par lesquels le réchauffement
climatique réorganise la distribution spatiale des espèces, sont
multiples et peuvent agir de façon directe comme indirecte (Brander
2007 ; Stige et al., 2010). L'augmentation de la
température de l'environnement a des conséquences directes qui
affectent les processus de croissance, de fécondité, et de
recrutement (Brander 2007), via notamment la limitation en oxygène des
organismes (Pörtner et al., 2001 ; Pörtner & Knust,
2007). Le réchauffement climatique perturbe également la
phénologie et les migrations saisonnières de certaines
espèces de poissons (Drinkwater, 2005). Indirectement, le
réchauffement climatique exerce son impact sur les poissons via le
réseau trophique (Beaugrand & Reid, 2003; Edwards & Richardson,
2004), et la composition des assemblages d'espèces de
l'écosystème dont ils dépendent pour leurs ressources
(Beaugrand et al., 2002b ; Beaugrand et al., 2010).
Kirby & Beaugrand (2009) ont également mis en évidence la
répercussion et l'amplification de l'impact du réchauffement du
climat à travers le réseau trophique depuis le phytoplancton
jusqu'aux poissons.
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