1-3-4- ÉTUDES EMPIRIQUES SUR LA RELATION ENTRE
INFRASTRUCTURES PUBLIQUES ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE
Des arguments théoriques et des données
historiques ont révélé l'existence d'un lien étroit
entre les investissements réalisés dans l'infrastructure et la
productivité économique. Mais il a fallu attendre la fin des
années 80 pour que les économistes commencent à
élaborer des mesures quantitatives de ce lien en construisant des
modèles macro-économétriques.
En 1989, Aschauer a amorcé ce mouvement dans une
série d'études. Ces travaux, qui font oeuvre de pionnier dans ce
domaine, ont suscité de nombreuses études sur ce sujet au cours
des vingt dernières années. Aschauer (1989) emploie une fonction
de production Cobb-Douglas et utilise des données de séries
chronologiques agrégées nationales américaines pour
examiner la relation entre le capital d'infrastructure publique et la
production agrégée du secteur privé. Il observe un lien
très grand et très fort entre ces deux variables.
L'élasticité estimée de la production par rapport au
capital public est de 0,39, autrement dit une augmentation de 1 pour cent du
stock de capital se traduit par une augmentation de la production du secteur
privé de 0,39 pour cent. L'élasticité par rapport à
l'infrastructure « de base », qui comprend les routes, le transport
en commun, les aéroports, etc., est d'environ 0,24.
Munnell (1990) utilise aussi des données de
séries chronologiques agrégées et une fonction de
production Cobb-Douglas et suppose aussi des rendements d'échelle
constants pour tous les intrants, mais, au lieu du ratio production/capital
Analyse de l'impact des investissements en infrastructures
publiques sur la production agricole au Benin
privé, elle utilise la productivité du travail
plus connu (c'est-à-dire le ratio production/travail) comme variable
dépendante. Elle confirme le résultat d'Aschauer selon lequel le
capital public a vraiment sa place dans la production.
Les études effectuées après 1989 par
Conrad et Seizt (1992), Shah (1992), Lynde et Richmond (1993), Nadiri et
Manuneas (1994,1996), Morrison et Schwartz (1996) et Khanam (1999) qui
utilisent une fonction de coût convergent dans une grande mesure vers la
même conclusion, selon laquelle l'investissement dans l'infrastructure
publique contribue de façon importante à réduire le
coût de production dans le secteur privé. Les résultats
obtenus par les études faites dans le contexte canadien font voir
à peu près le même profil que les études
américaines. Les études utilisant des séries de
données chronologiques agrégées indiquent, par rapport au
capital public, une élasticité de la productivité de
l'ordre de 0,40.
En déterminant l'effet des dépenses publiques
d'éducation sur la croissance sur un vaste échantillon de pays,
Barro et Sala-i-Martin(1992) parviennent à la conclusion selon laquelle
les dépenses d'éducation ont un effet positif sur la croissance
:Une augmentation de 1% du ratio des dépenses publiques
d'éducation au PIB durant la période 1965-1985 aurait
augmenté le taux de croissance moyen de cette période de 0,3% par
an.
Le rapport du programme des Nations Unies pour le
développement sur le développement humain durable (PNUD, 1994),
indique que le développement des infrastructures hospitalières et
le niveau de l'éducation ont fait reculer la mortalité infantile,
entrainant une augmentation de l'espérance de vie des populations.
Par ailleurs, il y a d'importantes études qui tendent
à montrer que l'état de santé des individus est un facteur
déterminant de la productivité. L'un des obstacles au
développement de la productivité des adultes en Afrique reste
leur état défectueux dû généralement au
manque de soins de santé. Selon Fogel cité par Schultz (1998), au
moins un tiers des gains de productivité réalisés en
Europe
Analyse de l'impact des investissements en infrastructures
publiques sur la production agricole au Benin
occidentale au cours des derniers siècles est imputable
à l'amélioration de la santé et de la nutrition qui passe
par les services rendus aux individus.
Dans une étude importante consacrée aux
dépenses d'éducation, de santé et de réduction de
pauvreté en Afrique, Morrison et al (2002), montre que l'Etat devrait
investir davantage dans la construction des écoles en zones rurales afin
de permettre à tous d'accéder aux services d'éducation
,plutôt que d'investir dans des programmes ciblés plus couteux,
qui ne bénéficient pas aux pauvres. Ils soulignent que la
cohérence et la coordination doivent être des
nécessités absolues, afin d'éviter de construire des
écoles qui resteront sans enseignants.
Les auteurs comme Anand et Ravillon cités par
FADONOUGBO et KOBA (2008) soutiennent que les dépenses publiques en
matière des services de santé ne sont pas trop nécessaires
à certains niveaux. Ils insistent que l'investissement dans la
construction des centres de santé universitaires contribue à
développer les recherches afin de soigner davantage les populations. De
ce fait, la construction des centres de santé devient un indicateur
important dans la relation existant entre la santé et la croissance.
Les travaux de FADONOUGBO et KOBA (2008) au Bénin,
relatifs aux effets des infrastructures sur la croissance économique ont
montré qu'une augmentation de 1% des investissements dans le transport
accroit la production intérieure de 0,33%. Quant à la
santé et l'éducation, une augmentation de 1% induit
respectivement une croissance de 0,009% et de 0,013% de la production
intérieure. Il est donc retenu qu'à court terme les
infrastructures de transport et d'éducation ont un effet positif et
significatif sur la production intérieure alors que les infrastructures
de santé ne déterminent pas significativement la production au
Bénin.
Céline KAUFFMANN (2008), notait également que la
faiblesse des infrastructures en Afrique a des répercussions humaines
directes et indirectes importantes et constitue un frein au
développement des entreprises. Bien qu'il ne
Analyse de l'impact des investissements en infrastructures
publiques sur la production agricole au Benin
soit pas explicitement inclus dans les Objectifs de
Développement du Millénaire (à l'exception notable de
l'accès à l'eau et à l'assainissement), le
développement des infrastructures contribue incontestablement à
leur réalisation.
La Banque Mondiale, dans son rapport publié en 2009,
montre que "l'état déplorable des infrastructures dans l'Afrique
subsaharienne (...) freine la croissance économique des pays de deux
points, chaque année, et limite jusqu'à 40 % la
productivité des entreprises". L'étude a porté sur les
infrastructures en matière d'électricité, d'eau, de
routes, de communications et de technologies de l'information dans vingt-quatre
(24) pays, dont onze (11) francophones (MIDRAND, 2009).
|