UNIVERSITE CATHOLIQUE DE BUKAVU U.C.B.
BP 162. BUKAVU/ SUD-KIVU R.D.C.
FACULTE DE DROIT
DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE DE LA R.D.C. SUR SES
RICHESSES ET SES RESSOURCES
NATURELLES: EXAmEN DE L'articLE 09 DE
La constitution Du 18/02/2006
Par :
Guillain Alphonse Cirhuza KOKO
Mémoire de fin du 2nd Cycle,
présenté en vue de l'obtention du Diplôme de Licence en
Droit.
Option : Droit public
Directeur : Séverin MUGANGU MATABARO
Professeur Ordinaire Rapporteur : Arnold NYALUMA
Chef des travaux.
Année académique: 2005-2006
EPIGRAPHE.
``Sentez et voyez combien l`Eternel est bon ! Heureux
l`homme qui cherche en lui son refuge.
Craignez le Seigneur, vous ses Saints, car rien ne
manque à ceux qui le craignent. Les lionceaux éprouvent la
disette et la faim, mais rien ne manque à ceux qui cherchent l`Eternel,
à lui gloire et louange !''(Psaume34 :8- 10)
Guillain Alphonse CIRHUZA KOKO.
II
A l`Eternel, Dieu pour sa fidélité
; Au coeur immaculé de Marie ; A mes vénérables
parents : mon père Alphonse MASUMBUKO et ma mère
Joséphine SARABUYE ;
A tous mes enseignants ; A mon grand
frère, G.Birindwa LUNJA, à mes grandes et petites soeurs ; A
mes nièces, neveux, cousins et cousines ; A tous mes amis,
connaissances ; A tous les nôtres, présents et à venir
;
Je dédie ce travail
. III.
REMERCIEMENTS.
Ce travail, avouons-le, n`est pas seulement le fruit de notre
effort personnel. Il a, à certains égards,
bénéficié du concours d`autres personnes. Nous tenons
sincèrement à leur exprimer ici notre profonde gratitude.
Il s`agit en premier lieu du Tout Puissant et Bon Dieu,
à la fois pour son amour, ses nombreuses bénédictions et
sa protection.
Nous citons également, et ce à juste titre, le
Professeur Séverin MUGANGU, directeur du présent mémoire,
qui malgré ses multiples occupations a daigné accepter de diriger
ce travail. Ses pertinentes remarques et suggestions nous ont été
très utiles.
Ensuite,nous demeurons très reconnaissants à
l`égard de nos vénérables parents : mon Père
Alphonse MASUMBUKO MASTAKI et à ma Mère Joséphine
SARABUYE, pour tant d`amour, de sacrifices et dévouements consentis par
eux, pour faire de nous un Homme averti, digne,instruit, responsable et sage
!
Ces mêmes remerciements s`adressent à
l'assistant Arnold NYALUMA pour ses précieux conseils et l`attention
qu`il a daigné apporté à ce travail.
De tout coeur, nous tenons également à
remercier d`une manière très spéciale, monsieur
Dieudonné MUNDI et tous les membres de l`AUCAM pour l`appui financier,
combien important, tout au long de notre second cycle, à l`UCB.
Nos chaleureux remerciements s`adressent aussi à tous
nos enseignants et au personnel de l`U.C.B. Il s`agit des professeurs
J.C.MUBALAMA, Moise CIFENDE, Bernard DUBUISSON, Pierre d`ARGENT, Evariste
BOSHAB, Gaston KALAMBAY, feu IMBAMBO L., BOMPAKA K., MIDAGU...au chargé
des cours Me Thomas LWANGO, Me Idesbld BYABUZE, Wenceslas BUSANE, KADIEBWE, aux
assistants J.P. MULUME, Richie RUKEBA, Thierry MUGISHO, J.S.MULENGEZI, sans
oublier le chef du personnel BUSHENYULA. Nos sincères remerciements
s`adressent également aux abbés J.P.KATWANI, BUKUNGUTA,Paul
KADUNDU et la soeur Pascasie R,...
On ne saurait également manquer de remercier nos
soeurs Joëlle MASUMBUKO, FAIDA, BINTU, MULANGALA, BINJA, ANUARITE, MUGOLI,
ALLIANCE, MARTHE, OLGA, MAMIE, etc.
A nos frères Guillaume BIRINDWA L., Blaise BULONZA,
Eloi NAKA, Julien KOKO, Vital AKONKWA, Michael KAMOLE, Rodrigue MATARA et
Robert BYAMUNGU
Aux familles NTAMUSHIGO, SARABUYE, MATARA, Deo MUTABESHA,
KAJANGU Paul, BISHWEKA,... Nous pensons en outre à tous nos amis :SAFA
Christophe et Guillaine MATABARO, à Romain KISIBO N, Blaise
MASTAKI,Christophe MAMBOLEO,Da ANNY et GERVAIS, Géry SELE,Willy OMBENI,
Paulin POLEPOLE, Patrick EKOFO, Robert KITUMAINI, NGUNZ et Jeff KABERA, Jonas,
Joyce K.RAMS, Hubert et JAMS, Crispin C. et NSARAZA, Dr MANNIX et ZARICK,
ADE,Justin MASTAKI et NTWALI, ADOLPHE, Tony B., Pacifique, Ernest, Murielle
etc. A tous les amis du Léo et du Lions-club.
Enfin à tous nos cousins, amis, collègues et
autres connaissances, qui de près ou de loin ont contribués
à l`heureuse réalisation du présent travail !
IV.
SIGLES ET ABREVIATUIONS
A.C.P. : Etats d`Afrique Caraïbe et Pacifique.
A.C.T. : Acte Constitutionnel de Transition.
A.G./ONU :Assemblée Générale des Nations
Unies.
A.F.D.L. : Alliances des Forces Démocratiques pour la
Libération du Congo. A.P.R. : Armée Patriotique
Rwandaise.
A.I.E. : Agence Internationale de l`Energie Atomique.
AL. : Alinéa.
A.P.D. : Aide Publique au Développement.
Art. : Article.
ANAPI : Agence National pour la Promotion des
Investissements.
A.M.R.: African Mineral Resources.
B.I.T.: Bureau International du Travail.
B.I.R.D. : Banque Internationale pour la reconstruction et le
Développement C.A. : Cour d`Appel.
C.N.U.C.E.D. : Conférence des Nations Unies pour le
Commerce l`Economie et le Développement.
C.S.J. : Cour Suprême de Justice
C.I.J. : Cour Internationale de Justice.
C.P.J.I. : Cour Permanente de Justice Internationale
C.S.K.:Comité Spécial de Katanga.
Coll.: Collection
C.: Contre
C.C.I.: Chambre de Commerce Internationale.
C.C.C.I.: Compagnie du Congo pour le Commerce et
l`Industrie.
C.D.I.: Commission de Droit International
Cf. /cfr: Confer
C.F.L.: Compagnie de Chemins de fer du Congo Supérieur
aux grands lacs. Chap.: Chapitre
C.C.C.: Code Civil Congolais.
COBELMINES : Compagnie Belge d`Entreprises
Minières.
C.I.R.D.I. : Centre International des Règlements des
différends relatifs aux investissements.
C.N.K.I. : Comité National du Katanga.
E.I.C. : Etat Indépendant du Congo.
Elis. : Elisabethville.
E.C.U.P. : Expropriation pour Cause d`Utilité
Publique.
Ed./éd. : Edition/édition
Et al. : Et alii(et les autres)etc. :et cetera.
Fac. : Faculté
FORMIRIERE : Société Internationale
Forestière et Minière du Congo.
J.I.D.C.C. : Bulletin des Juridictions Indigènes et de
Droit Coutumier Congolais. J.O.RDC : Journal Officiel de la RDC.
J.O.Z. : Journal officiel du Zaïre.
Rés. : Résolution.
R.C.D. : Rassemblement Congolais pour la
Démocratie.
R.D.C. : République Démocratique du
Congo.
O.M.C. : Organisation Mondiale du Commerce.
INTRODUCTION GENERALE
1. Problématique.
L'article 9 de la constitution1 du 18/02/2006
dispose que : « l'État exerce une souveraineté permanente
notamment sur le sol, le sous-sol, les eaux et les forêts, les espaces
aérien, maritime, lacustre et fluvial, la mer territoriale congolaise,
le plateau continental. Les modalités de gestion et de concession sont
déterminées par une loi».
De prime abord, nous relevons que cet article consacre le
principe de la souveraineté permanente de la R.D.C. sur ses richesses et
ses ressources naturelles, qui a été maintes fois proclamé
par les résolutions de l'ONU.2 (1803, 1515, 1304, 1314). Ce
principe est à la fois une norme impérative qualifiée de
jus cogens et un élément fondamental du droit des peuples
à disposer d'eux-mêmes. Il devient ainsi inscrit dans le droit
positif congolais, pour réglementer l'exploitation des ressources
naturelles qui est devenue source de conflit en RDC, comme les 2 guerres nous
l'ont démontrées. Il s'agit là d'une innovation que
comporte le premier alinéa de cet article 9. Car au cours des recherches
que nous avons menées dans le cadre de ce travail, en parcourant et en
examinant toutes les constitutions 3 que la R.D.C. a
déjà connues (constitutions antérieures), il n' y a nulle
part où nous avons retrouvé pareille disposition. Mais alors,
qu'est-ce que cela peut bien vouloir signifier ? Il s'agit-là d'un
ensemble des droits ou des prérogatives reconnus à l'État
congolais, d'exercer un contrôle permanent sur les activités
économiques se déroulant sur l'ensemble de son territoire.
1 Selon la CEI, il y a eu un taux de participation de
61,97% dont le «oui>> a recueillit 84, 31% des suffrages , contre
15,69 % pour le « non >> et 38,03 %de votes blancs ou nuls.
2Guy FEUER et Hervé CASSAN, Droit
International du Développement, 2ème
édition, Précis Dalloz, 1991,617pp. 3 Journal Officiel
de la R.D.C., Recueil des textes constitutionnels de la R.D.C., Kinshasa,
1999.
Cette disposition trouve sa justification dans le souci du
législateur congolais à vouloir protéger4, en
tout temps (temps de paix ou temps de guerre), la souveraineté de
l'État sur ses richesses et ses ressources naturelles. Son intention
n'est autre que d'éviter aux générations à venir de
connaître le pire que l'État a connu lors de la guerre de 1998
à 2003.
C'est une base juridique octroyée à la R.D.C.
pour lutter contre les atteintes portées sur ses richesses et ses
ressources naturelles, en tout temps et de lutter contre les atteintes à
sa souveraineté économique, qui découlent des contrats
léonins et autres arrangements abusifs et inéquitables, conclus
en temps de guerres de rebellions et d'y remédier.
Il est important de préciser que, l'idée
générale sur laquelle repose l'ensemble de la théorie
dudit principe est que :
- tout État dont les richesses et les ressources
naturelles se trouvent entre les mains étrangères doit pouvoir
recouvrer l'intégralité des droits normalement attachés
à sa souveraineté.
- Par une extension naturelle de cette idée, on ajoute
qu'un État souverain, la R.D.C. en l'occurrence, ne peut être
contraint de céder contre son gré, à des étrangers
les droits qu'il détient normalement sur les richesses situées
sur son territoire5.
Sur le plan juridique, ce principe a évolué dans
deux directions: son champ d'application n'a cessé de s'étendre
pour atteindre non seulement, le droit des espaces terrestres et maritimes,
mais aussi le droit des investissements et le droit des sociétés
transnationales. Sa valeur juridique a été progressivement
admise, bien qu'elle n'ait cessé de donner lieu à des vives
controverses entre pays développés et ceux en
développement6.
4 Bruno MBIANGU KAKESE, Travaux préparatoires
de la constitution de la 3ème République:
débats et discussions autour de l'art.9, inédit, Kinshasa, 2005,
p.3.
5 Dominique ROSENBERG, La souveraineté
permanente des États sur ses richesses et ses ressources naturelles,
LGDJ, Paris, 1983, p.123.
6 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit.,
p.216.
Une précision mérite d'être
apportée ici, c'est celle de distinguer le titulaire de l'exercice du
droit de souveraineté. A l'article sous examen, le législateur
parle de l'État. Tandis que les résolutions 626 (VII) 1952 et
celle 1803, on rencontre7 indistinctement les expressions droits des
peuples, droits des nations ou encore droits des États d'exercer leur
souveraineté. L'emploi simultané de ces termes ne résulte
cependant pas d'une simple confusion de langage. Il vient de la conception
même que l'on se fait du droit de souveraineté, la « summa
potestas ».
Nous retenons donc que la souveraineté dont question ici,
appartient au peuple qui en confie l'exercice à l'Etat congolais.
Quant à l'épithète «
permanente» collée au mot souveraineté, ce n'est même
ni par un effet du hasard, ni une invention de la part du législateur
congolais, car ce principe a existé depuis 1952 et c'est seulement
à partir de la résolution 1314 que cette épithète
apparaît et sera utilisée.
Il signifie « inaliénable», qu'on ne peut
vendre ou qui ne peut s'interrompre ni en temps de paix ni en temps de guerre.
Ce qualificatif marque à la fois l'essence et la portée du droit
revendiqué8.
Déclarer cette souveraineté permanente et
inaliénable signifie d'une part, qu'aucune aliénation ou
concession n'est valable sans le consentement de l'État congolais qui
est ici l'État territorial. D'autre part, que cet État, la R.D.C.
en l'occurrence a à tout instant, le droit de reprendre le
contrôle de richesses et ressources aliénées.
Dans cette perspective, il ne peut y avoir aliénation
qu'à titre précaire. C'est-à-dire toujours
révocable dès lors que le gouvernement considère qu'elles
ne répondent plus aux intérêts du pays,
intérêts dont il est à la fois le juge et le
gérant9.
7 D. ROSENBERG, op. cit., p .123.
8 Dominique ROSENBERG, op. cit., p.124 a
222.
9 Bruno MBIANGU KAKIESSE, op. cit., p.3.
On touche ici au coeur du problème aux yeux de nombreux
gouvernements, dans les pays du Tiers-Monde en général, et
à ceux du gouvernement congolais en particulier. La détention par
des étrangers du droit de propriété sur des richesses
considérées comme nationales constitue une atteinte à la
souveraineté de l'État10.
Cela est d'autant plus vrai que la résolution
1803(XVII) insiste avec force sur le fait que :
1. Le droit de souveraineté permanente de peuple et
des nations sur leurs richesses et leurs ressources naturelles doit s'exercer
dans l'intérêt du développement national et du bien
être de la population de l'État intéressé.
2. La prospection, la mise en valeur et la disposition de ces
ressources ainsi que l'importation des capitaux étrangers,
nécessaires à ces fins devraient être conformes aux
règles et conditions que le peuple et les nations considèrent en
toute liberté comme nécessaire ou souhaitable pour ce qui est
d'autoriser, de limiter ou d'interdire ces activités.
3. Dans le cas ou une autorisation11 sera
accordée, les capitaux importés et les revenus qui en proviennent
seront régis par les termes de cette autorisation, par la loi nationale
en vigueur et par le droit international. Les bénéfices obtenus
devront être répartis dans la proportion librement convenue dans
chaque cas entre les investisseurs et l'État, étant entendu qu'on
veillera à ne pas restreindre pour un motif quelconque, le droit de
souveraineté dudit État sur ses richesses et ses ressources
naturelles.
4. La nationalisation, l'expropriation ou la
réquisition devront se fonder sur des raisons ou des motifs
d'utilité publique, de sécurité ou d'intérêt
national, reconnu comme primant les simples intérêts particuliers
ou privés tant nationaux qu'étrangers. Dans ce cas, le
propriétaire recevra une indemnisation adéquate,
conformément aux règles en vigueur dans l'État qui prend
ces mesures dans l'exercice de sa souveraineté et en conformité
au droit international. Dans tous les cas où la question de
l'indemnisation donnerait lieu à une controverse, les voies de recours
nationales de l'État qui prend lesdites mesures devront être
épuisées.
10 Joe VERHOEVEN, Droit International Public,
Larcier, Bruxelles 2000.P.1234.
11 Alain PELLET et Eric DAVID, Code du Droit
International Public, Larcier, Bruxelles, 2002
Toutes fois, sur accord des États souverains et autres
parties intéressées, le différend devrait être
soumis à l'arbitrage ou à un règlement judiciaire
international.
5. L'exercice libre et profitable de la souveraineté
des peuples et des nations sur leurs richesses et ressources naturelles doit
être encouragé par le respect mutuel des États,
fondés sur leur égalité souveraine.
6. La coopération internationale en vue du
développement économique des pays en voie de
développement, qu'elle prenne la forme d'investissement des capitaux
publics ou privés, d'échanges des marchandises ou services,
d'assistance technique ou d'échanges des données scientifiques,
doit favoriser le développement national indépendant de ces pays
et se fonder sur le respect de leur souveraineté sur leur richesse et
leurs ressources naturelles.
7. La violation des droits souverains des peuples et des
nations sur leurs richesses et leurs ressources naturelles va à
l'encontre de l'esprit et du principe de la charte12 des Nations
Unies et gêne le développement de la coopération
internationale et le maintien de la paix.
8. Les accords relatifs aux investissements étrangers,
librement conclus par les États souverains ou entre des tels
États seront respectés de bonne foi ; les États et les
Organisations Internationales doivent respecter strictement et
consciencieusement la souveraineté des Peuples et des Nations sur leurs
richesses et leur ressources naturelles, conformément à la charte
et aux principes énoncés dans la présente
résolution13.
Cependant, force est de constater que la réalité
observée sur le terrain semble pratiquement s'écarter de la
théorie ci-haut évoquée.
Faute d'une vulgarisation suffisante et efficace de la
constitution, on l'a vu lors du référendum constitutionnel, il
existe une controverse d'opinion14 sur la portée et le sens
méme de l'article 9 de ladite constitution.
12 Art.2. Charte de l'ONU, Cfr. Eric David et Alain
PELLET, op. cit., p 946 et 947. 1194 séances
plénières, 14/12/1962.
13 Résolution 1803(XVII) sur la proclamation du
principe de la Souveraineté Permanente. Cette Résolution a
été adoptée par 87 voix dont la Belgique, contre 2, avec
12 abstentions et 9 non-votants.
14 Remarquons ici que ce qui pose problème pour
beaucoup, c'est le changement de l'ancienne formulation à
l'alinéa 1er de l'art.9, l'alinéa
2ème est resté inchangé.
Pour les uns, l'article 9 est contraire à la loi du
20/7/73, car il abolit le monopole de l'État congolais sur son sol et
son sous-sol, en consacrant ainsi la privatisation15 de la
propriété foncière ; pour les autres ils reprochent
à l'article 9 d'être une astuce, un lifting juridique par lequel
on veut vendre le sol, le sous-sol et autres richesses et ressources naturelles
de l'État congolais, aux étrangers (firmes internationales,
États puissants, ..) en rendant la R.D.C. un territoire
d'exploitation.
Les droits souverains des peuples sont violés, car les
revenus tirés des exploitations de ressources naturelles ne profitent ni
pour le bien être de la population, ni pour le développement de la
RDC.
Au mépris des codes miniers, fonciers, forestiers, ~les
groupes rebelles ont pillé et exploité illégalement les
ressources naturelles16, qu'elles soient minérales,
écologiques, agropastorales, industrielles, financières ou
humaines. Ils sont à la base des pratiques mafieuses dont les trafics
d'armes, blanchissements d'argents sale, fabrication de la fausse monnaie et
criminalisent ainsi l'économie congolaise.
Selon le rapport de la commission LUTUNDULA, il s'est
passé au cours de cinq dernières années des transactions
et accords commerciaux, économiques et autres sur les concessions
minières, forestières et foncières comportant des clauses
léonines17, attentatoires à la souveraineté
nationale.
Face à un tableau paradoxal ci-haut décrit, un
certain nombre de questions se posent avec acuité :
- Quel rapport juridique existe-t-il entre la loi dite
BAKAJIKA, l'art.53 de la loi du 20/07/73 et l'article 9 de l'actuelle
constitution ?
Autrement dit, la substitution aux concepts «
propriété » et « plénitude des droits » de
celui de « souveraineté permanente » implique-t-elle une
complémentarité, une contradiction ou une équivalence ?
- Quelles sont les modalités d'exercice de la
souveraineté permanente et en cas de violation de ce principe, comment
établir le mécanisme de responsabilité ?
15 Séverin MUGANGU, La gestion
foncière rurale au Zaïre, reformes juridiques et pratiques
foncières locales, cas du Bushi : thèse de doctorat,
Louvain-la-Neuve, Belgique,1995.
16 http : //www.un.int/drcongo/rapport1.htm
considérations du gouvernement sur les rapport du panels.
17 Extrait du rapport publié par la commission
LUTUNDULA
Quelle en est la sanction, la procédure ainsi que la
juridiction compétente à saisir pour trancher le litige ?
Voilà autant de questions auxquelles nous nous proposons
de répondre au cours du présent travail.
2. Hypothèses
La formulation actuelle de l'article 9, al.1er ne
contredit ni la loi BAKAJIKA, ni l'article 53 de la loi du 20/07/73, ni
méme l'article 34 de l'actuelle constitution, qui consacre le droit
à la propriété privée et le réglemente. Elle
est la plus complète, la plus exhaustive et appropriée par le
fait qu'elle prend en compte tous les compartiments du domaine public foncier,
lacustre, fluvial, aérien et maritime. La nature du droit de
l'État sort du secteur étroit du droit privé, pour
escalader les cimes des prérogatives des puissances publiques.
Le concept de « souveraineté » recadre
parfaitement l'étendue et la nature des prérogatives de
l'État sur tout son domaine public naturel. En tout cas, mieux que la
notion de propriété souvent fustigée pour sa
pauvreté, ses lacunes et son absence de prise en compte de la
complexité du patrimoine foncier de l'État, qui ne se limite pas
qu'au sol et au sous-sol. La propriété est un simple concept de
droit privé18, qui ne rend pas compte des aspects propres
à l'espace aérien, maritime ou au plateau continental, ~ Ici on
ne parle pas techniquement du droit de propriété mais de
l'exercice de la souveraineté. Le concept de la
«souveraineté permanente» recadre parfaitement
l'étendue et la nature des prérogatives de l'Etat sur tout son
domaine public naturel, en tout cas, mieux que la notion privatiste de
«propriété».
Les modalités d'exercice de la souveraineté
permanente par lesquelles la R.D.C. peut recouvrir ses richesses
extorquées sont : la nationalisation, la radicalisation, l'expropriation
pour cause d'utilité publique,
18 Séverin MUGANGU, op. cit., p.145.
etc. Mais au surplus, comme le principe de la
souveraineté permanente relève du jus cogens19,
l'État congolais peut attraire en justice tant ses nationaux
(près des juridictions internes) que d'autres pays voisins (près
la C.I.J.) qui ont violé ce sacré principe et pillés ses
ressources naturelles, en vue d'obtenir une réparation adéquate.
Et comme il s'est avéré que l'exploitation des ressources
naturelles en RDC, est une source de conflit, on songerait également
à consolider la paix par la bonne gouvernance, une gestion rationnelle
de ses ressources et à une bonne politique de coopération
internationale entre la RDC et ses pays voisins qui, sans cesse, convoitent ses
richesses.
3. Méthodologie
L'utilisation des méthodes et techniques de recherches
répond à une double nécessité, à savoir la
collecte et le traitement des données ainsique la
rationalisation de procédure, en vue d'atteindre le résultat
escompté.
C'est ainsi que dans le cadre du présent travail, nous
allons faire usage de la méthode juridique.
La méthode juridique accorde la
prépondérance aux textes internationaux et nationaux et son objet
normatif dans le cadre de notre investigation. Ainsi, nous avons
procédé à une analyse des règles internationales,
pour mieux connaître la protection particulière accordée au
principe de la souveraineté permanente sur les ressources naturelles,
tel que consacré par cette nouvelle constitution.
La méthode exégétique20 nous
permettra d'analyser les textes tant nationaux qu'internationaux pour
comprendre l'évolution du régime juridique foncier, des espaces
aériens, maritimes, conformément au principe de la
souveraineté permanente.
19 Car la résolution 1803, à son
alinéa 7, on précise qu'il est conforme aux buts et aux principes
de la charte des Nations Unies. Ce qui revient à dire que violer le
principe de la souveraineté implique directement violation de la charte
de l'ONU.
20 Vóonique VILLIEUX et alii., A la
découverte de la recherche et des chercheurs, Paris Dalloz, 2001,
p.24.
En outre, nous avons fait la recherche sur la
législation congolaise afin de vérifier si les normes
résultant des textes internationaux de protection des ressources
naturelles ont été intégrées dans le droit interne.
Il a donc fallu une démarche quelque peu comparative entre deux ordres
juridiques.
La technique documentaire nous a permis de consulter avec
intérét, d'une part les textes légaux, les traités
internationaux relatifs à notre sujet et d'autre part la doctrine :
ouvrages, articles, rapports, et documents ayant trait à notre sujet,
pour une recherche des faits significatifs.
Enfin nous avons trouvé, grâce à cette
technique, la
jurisprudence nationale aussi bien internationale, qui nous a
aidé à répondre à certaines questions
tranchées par la Cour Internationale de Justice.
La technique d'interview21 pour sa part, nous a
permis de recueillir par entretien certaines données auprès des
praticiens du droit. Ces personnes nous ont non seulement permis d'avoir
accès à certains dossiers en rapport avec notre travail, mais
aussi nous ont fait part des positions soutenues par eux, à ce sujet.
4. Choix et intérêt du sujet
L'intérêt qui a guidé notre choix est
à la fois certain et indéniable. Il se situe ainsi au triple
plan, à savoir : scientifique, pédagogique et social.
- Sur le plan pédagogique, le présent travail
est un exercice de combinaison et de rencontre de plusieurs branches du droit
dont, le Droit International Public, Relations économiques
Internationales, Droit des Organisations Internationales, Droit de Biens, Droit
Constitutionnel,
- Sur le plan social22, l'objet du présent
travail est d'une importance capitale pour la population du monde entier, celle
des pays du Tiers-Monde et
21 Marie Anne COMENDET, Méthode de travail
scientifique, Paris, Mont chrestiens, 1998, p.12.
22 François DEPELTEAU, La démarche
d'une recherche en sciences humaines, De BOECK, Paris, France, 1998,
p.45.
celle de la R.D.C. en particulier. En effet, nous pensons
qu'il est utile et impérieux que la population, soucieuse de son bien
être sache comment s'effectuent la gestion et
la répartition de ses ressources naturelles pour le développement
de son État, surtout que c'est elle qui souffre toujours des
atrocités des guerres menées ça et là.
Voilà pourquoi nous disons, partant de cela, qu'il
intéresse cette population à plus d'un titre. Parce que celle-ci
en a été considérablement affectée.
L'apport du présent travail à la science
juridique consiste notamment dans l'explication de l'écart entre les
notions de propriété et de souveraineté.
Les techniques et principes juridiques de protection des
ressources naturelles, les règles de révision de contrats
léonins. Ainsi, sa pertinence tient au fait qu'il rejoint le
débat houleux sur l'actuelle constitution : la substitution du concept
propriété par celui de souveraineté permanente, d'autre
part au fait qu'il s'efforce de trouver une explication à l'article sous
examen, selon l'esprit de la résolution 1803.
Aussi, ce travail nous semble davantage intéressant
dans la mesure où il se propose de donner des solutions pour rendre
effective et efficace le respect de l'application du principe de la
souveraineté permanente.
Un tel thème ne peut aboutir au résultat
escompté que s'il est accompagné d'une méthodologie
appropriée, étant entendue qu'il est à cheval entre le
Droit International et le Droit interne.
5. Délimitation du sujet
Délimiter un sujet consiste à le situer dans le
temps et dans l'espace23. Sur le plan spatial, notre étude ne
concernera que la RDC. Mais il
23 François DEPELTEAU, op. cit.p.44.
demeure évident que le principe de souveraineté
permanente étant un principe de droit international, il concernera aussi
tous les États (en voie de développement et ceux
développés).
Sur le plan temporel, nous allons remonter à l'origine
de ce principe (résolution 1803 (XVII) 1952), pour comprendre l'essence
et la portée de ce principe, ainsi que les multiples violations qui se
sont produites dans le monde (affaire du Timor Oriental, du Sahara, RDC contre
Uganda). Toutes fois, pour des raisons d'enrichissement du sujet, nous n'
hésiterons pas de quitter le cadre spatio-temporel que nous venons de
tracer, pour puiser dans le passé, soit sous d'autres espaces des
données à méme de rendre plus compréhensible notre
travail.
Quant au corps des règles, les principaux textes
à analyser, dont nous ferons usage ici sont : la résolution 1803,
les codes d'investissements, code forestier, code foncier, maritime, minier,
~
6. Subdivision du travail
Outre l'introduction et la conclusion générale, le
présent travail s'articule en deux chapitres.
Le premier chapitre est intitulé clarification
conceptuelle et comprend cinq sections : de la souveraineté permanente
(section 1ère), distinction entre souveraineté
permanente et la plénitude des droits fonciers, miniers et forestiers
(section 2ème), distinction entre souveraineté
permanente et l'article 53 de la loi du 20/07/1973 (section
3ème), distinction entre souveraineté permanente et
domanialité (section 4ème) et distinction entre
souveraineté permanente et ses notions voisines (section
5ème). Une conclusion partielle mettra fin à ce
premier chapitre.
de la souveraineté permanente (section
2ème) et enfin la violation du principe de la
souveraineté permanente (section 3ème).
CHAPITRE Ier : CLARIFICATION CONCEPTUELLE
Le droit, disait Remy CABRILLAC, constitue une
science24 dont la rigueur repose sur la précision de langage
(...). Un terme juridique employé à la place d'un autre terme du
langage courant peut emporter des conséquences aussi fondamentales
qu'indésirables. Cette impeccable citation est pleinement
justifiée à l'égard de l'article 9, objet du
présent travail. Il dispose : « L'État exerce une
souveraineté permanente notamment sur le sol, le sous-sol, les eaux et
les forêts, sur les espaces aérien, fluvial, lacustre, et maritime
congolais ainsi que sur la mer territoriale congolaise et sur le plateau
continental. Les modalités de gestion et de concession du domaine de
l'Etat visé à l'alinéa précédent sont
déterminées par la loi».
Pour procéder à son examen, deux
problèmes essentiels vont nous préoccuper tout au long de ce
chapitre, d' une part l'analyse de l'alinéa 1er dudit article, (qui pose
le principe de la souveraineté permanente..), d'autre part l'analyse du
second alinéa, (qui prévoit que les modalité25s
de gestion et de concession du domaine public de l'Etat...).
En effet, une analyse minutieuse et combinée de ces
deux alinéas révèle ici une inadéquation des
termes, voire même une lacune causée par l'emploi des termes
« modalités de gestion et de concession du domaine public...»
à l'alinéa 2ème, précédé
de l'expression « l'Etat exerce une souveraineté permanente...
» à l'alinéa 1er. Il semble y avoir dans l'esprit
du législateur, une confusion entre les termes souveraineté et
propriété ; si bien que l'on ne sait plus déterminer
exactement avec l'art.9 de cette nouvelle constitution, si le sol, le sous-sol
et les mines demeurent une propriété inaliénable,
exclusive et imprescriptible de l'Etat Congolais ou non. C'est là le
noeud du problème.
24 Remy CABRILLAC, Dictionnaire du vocabulaire
juridique, 2ème édition, Litec, Paris, 2004, p VII, (in avant
propos).
25 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit.
p22.
D'où, pour replacer les mots à leurs juste
place, de manière à en avoir une idée précise,
claire et nette, il nous paraît mieux indiqué de préciser
en 1er lieu le sens et la portée du principe de la
souveraineté permanente (section1ère), ensuite confronter cette
notion face à la loi BAKAJIKA (section 2ème), à
la loi du 20 juillet 1973(section3), mais également avec la notion de
suzeraineté et celle de domanialité, (section 4 et 5). Enfin,
nous distinguerons ce principe de ses notions voisines, avant de proposer une
nouvelle formulation dudit article, dans une conclusion partielle de ce
chapitre. Tout ceci dans le but de les clarifier et de savoir si ces notions
s'équivalent ou peuvent être employées l'une à la
place de l'autre.
Section 1ère : DE LA SOUVERAINETE
PERMANENTE
Comme nous l'avons annoncé dès le début
de ce travail, l'alinéa 1er de l'article sous examen consacre le
principe de la souveraineté permanente des Etats sur leurs ressources
naturelles. Ce principe a été proclamé deux fois par les
résolutions1803 (V) et la résolution 3281 sur les droits et
devoirs économiques des Etats. Il convient donc, dans la présente
section, de pouvoir dégager le sens et analyser ce principe à
travers son évolution, son contenu (§1), ses caractères
(§2), son étendue (§3) ainsi que ses notions voisines. En
procédant de la sorte, notre objectif n'est rien d'autre que de savoir
le sens que le législateur congolais entend donner à l'article
9.
§ 1. Évolution et contenu du principe
I. Evolution d'ensemble
I.1. Origine
La théorie de la souveraineté permanente des Etats
sur leurs richesses et ressources naturelles est d'origine
latino-américaine.
C'est le Chili qui, en 1952, a amorcé le débat
dans le cadre des Nations Unies. Par la suite, on a vu se développer
toute une argumentation touchant aux problèmes politiques,
économiques et juridiques relatifs à cette notion.
Dans un premier temps, ce principe a été
façonné dans un cadre historique précis, notamment celui
de la décolonisation et ayant une finalité bien précise.
Les pays du tiers monde ont ensuite cherché à faire admettre la
notion par les pays développés en acceptant divers compromis au
sein de l'O.N.U. Une commission chargée de l'étude de ce principe
fut institué par l'A.G. et abouti à la proclamation de la
résolution 1803(XVII).
I.2. Étapes marquant l'évolution du
principe.
Dans l'ensemble, cette évolution traduit le souci de
« des internationaliser» les compétences économiques de
l'État. Souci tactiquement compréhensible : les États en
développement comme les Etats socialistes de l'époque cherchent
à définir leur place dans les relations internationales, par
opposition aux Etats qui dominent aujourd'hui les rapports économiques
internationaux. Pour ce faire, il leur paraît opportun de supprimer les
limitations, imposées par un Droit International Public d'origine
européenne, à leur droit de réglementation interne et
à une utilisation discrétionnaire de leurs richesses naturelles.
Ils sont parfois rejoints dans cette entreprise par des Etats
développés qui y voient le moyen soit de résister plus
efficacement à la domination américaine, soit de dégager
les règles d'une nouvelle discipline économique spécifique
aux relations entre pays développés (exploitation de
l'idée de dualité des normes).
Les principales étapes sont marquées par
l'adoption des textes
suivants :
- Le 1er texte important est la résolution
626 (VI) de 1952 qui, bien que les Etats "occidentaux" se soient abstenus lors
de son adaptation, paraît rétrospectivement bien anodine : elle
insiste sur la "nécessité de maintenir le courant des capitaux
dans des conditions de sécurité et dans une atmosphère de
confiance mutuelle et de coopération entre les États".
L'intérêt de cette résolution tient à l'habitude qui
s'est prise depuis lors, de réaffirmer régulièrement le
principe de la souveraineté sur les ressources nationales. Et donc, dans
un 1er temps, les pays du Tiers-monde ont cherché à
faire admettre la notion par les pays développés en acceptant
divers
compromis, note HERVE Cassan26 dans son ouvrage
très célèbre cité précédemment.
- La 2èmeétape, est marquée
par l'adoption de la résolution 1803 (XVII) de1962. Elle correspond
à une phase de compromis entre les synthèses défendues par
les États occidentaux, ceux des pays socialistes et du Tiers Monde, en
particulier. Le droit de nationaliser la propriété
étrangère y est affirmé clairement, mais son exercice est
entouré de certaines restrictions.
- La 3ème phase, quant à elle est
ponctuée de durcissements successifs du Tiers Monde et trouve un point
d'aboutissement dans la charte de droits et devoirs économiques des
États de 1974. En son article 2, §II, il rappelle que "chaque
État détient et exerce librement une souveraineté
entière et permanente sur toutes ses richesses, ses ressources
naturelles et activités économiques y compris la possession, le
droit de les utiliser et d'en disposer". L'ONU a adopté en tout plus de
80 résolutions concernant ce principe et a créée une
commission chargée de son étude qu'elle a chargée de
procéder à une enquête approfondie concernant la situation
du droit de souveraineté permanente sur les richesses et les ressources
naturelles.
Depuis cette période, la situation est plus complexe.
Les pays développés ont accepté l'insertion de ce principe
dans le droit positif, mais ils contestent vigoureusement les
conséquences externes que certains pays en développement veulent
en tirer dans l'exercice de leur politique, notamment en matière de
nationalisation.
II. Contenu du concept de « la
Souveraineté Permanente »
La constitution de la 3ème République
ne fait que consacrer le principe de la Souveraineté Permanente dans le
droit positif (interne) congolais, à son art.9 alinéa
1er, mais ne définie, ni le sens ni la portée de ce
dernier.
26 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p.
23.
Il n'existe non plus, aucune loi ou jurisprudence ( ) dans le
droit positif congolais qui définisse ce principe. D'où alors,
face à ce vide il nous parait nécessaire d`appliquer le
réflexe du juriste, ainsi, nous avons recouru à la fois aux
travaux préparatoires du parlement, ainsi qu'à la doctrine
juridique internationale, pour combler cette lacune, en vue de réaliser
une analyse minutieuse de notre travail et en dégager le sens, qui
mettra fin à toute controverse autour de cet article. Cela étant,
nous analyserons donc tour à tour les titulaires, l'objet et les
caractères de cette souveraineté, pour en avoir une idée
générale et pertinente.
II.1. Notion de la souveraineté
permanente27 selon les travaux préparatoires
Ces travaux ont été réalisés par
le sénat et la discussion eut lieu au sein du parlement de transition,
les deux chambres réunies. Le Président de cette commission est :
Bruno MBIANGU KAKESE.
D'après la commission chargée de l'examen de
l'art ; 9 de la constitution, "~"le principe repose sur la sécurisation
de la souveraineté de l'État, quelles que soient les
circonstances, en temps de paix ou de guerre, l'Etat doit avoir le
contrôle politique, économique, financier et social sur toute
l'étendue de son territoire.
Cette permanence de sa souveraineté vient à
juste titre protéger, verrouiller la souveraineté de
l'État. En ce sens où, il (l'État) devrait demander
réparation au cas où un préjudice serait constaté
pendant une période des troubles et des guerres.
L'esprit de cet article intervient après que
l'État central ait été bradé par des seigneurs de
guerre qui avaient occupé et divisé le pays en plusieurs
structures politico-économico-judiciaire, la volonté manifeste
d'instituer un contrôle sur toute l'étendue du pays en vue
d'ériger un système de blocage contre les expériences qui
ont consacrées une souveraineté à chaque seigneur de
guerre28.
II.2. Notion de la souveraineté permanente
selon la doctrine
Quant à l'idée générale
développée par la doctrine, elle se résume en ceci: tout
Etat dont les richesses et les ressources naturelles ont été
extorquées ou se trouvent entre des mains étrangères doit
pouvoir recouvrer l'intégralité des droits normalement
attachés à sa souveraineté. Par une extension naturelle de
cette idée, on ajoute qu'un Etat souverain ne peut être contraint
contre son gré de céder à des étrangers les droits
qu'il détient normalement sur les richesses situées sur son
territoire. C'est là l'une des applications principales de ce que le
langage idéologique en usage au Tiers-monde et aux Nations Unies a pu
appelé " la lutte contre l'impérialisme et le
néo-colonialisme".
- Qui est le titulaire du droit de la
souveraineté permanente ?
Deux ambiguïtés subsistent ici : le premier est
juridique, son bénéfice ne devrait revenir qu'aux Etats. Certains
textes, et en particulier la charte de droits et devoirs économiques
(rés. 3281 (XXIX) de 1974) semblent bien en réserver l'exercice
aux Etats ou aux «pays», mais l'autre ambiguïté, qui est
le second nous révèle que des nombreux autres documents
considèrent qu'il s'agit-là «d'un élément
fondamental du droit de peuple et de nations à disposer
d'eux-mêmes»
Par exemple l'art.1er, paragraphe 2 de deux pactes
de droits de l'homme de 1988 qui dispose : " pour atteindre leurs fins, tous
les peuples peuvent disposer librement de leurs ressources et de leur richesses
naturelles.
Il apparaît donc que la souveraineté sur les
richesses et les ressources naturelles appartient à l'Etat qui l'exerce
au nom du peuple à partir du moment où celui-ci est
constitué en Nation ou en Etat. Mais aussi au peuple sous domination
coloniale ou soumis au régime d'apartheid ou de discrimination raciale,
peuple sous colonie, peuple autochtone. La communauté internationale
veille sur leurs, intérêts en attendant leur accession à
l'indépendance.
- Ratione materiae, l'objet de la Souveraineté
Permanente est très étendue29. Il s'agit
notamment :
1° L'objet primordial : les premières
résolutions de N.U. visent exclusivement les richesses et ressources
naturelles.
2° Depuis 1974 l'A.G. y adjoint les activités
économiques.
3°L'expression recouvre aujourd'hui30 tant,
les richesses, ressources minérales et agricoles que les
activités d'exploration, d'exploitation, de transformation et de
commercialisation des richesses étendues sur le territoire où
l'Etat exerce sa souveraineté.
4° Les investissements privés étrangers.
5° Les sociétés transnationales.
Il convient de préciser aussi que parmi les droits qui
découlent de la souveraineté économique de l'Etat figurent
celui de réglementer les investissements étrangers dans les
limites de sa juridiction nationale, de réglementer et de surveiller les
activités des sociétés transnationales dans les
mêmes limites et de nationaliser, d'exproprier ou de transférer la
propriété des biens étrangers situés sur son
territoire.
En pratique, les investissements étrangers ainsi que
l'acquisition d'immeubles sis sur le territoire national sont plus ou moins
réglementés suivant les Etats. La loi Néerlandaise, par
exemple, ne semble pas limiter l'acquisition par des étrangers
d'immeubles situés aux Pays-Bas. Il en va autrement en Suisse.
§ 2. Étendue de l'exercice de cette
Souveraineté Permanente
Nous envisageons ici le territoire, espace31 sur
lequel s'exerce cette souveraineté et ses limites, car les richesses et
ressources naturelles se situent sur ces territoires. C'est pourquoi la
constitution, précisément son
29 Dominique ROSENBERG, op. cit. p.128.
30 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit.,
p.78.
31 Jean COMBACAUD, op. cit., p.567.
article 9 précise qu'il s'agit de tout le territoire,
c'est-à-dire espace aérien, maritime et terrestre. Où doit
--t-elle s'exercer ?
Sur ce point, jurisprudence et doctrine sont toutes unanimes
à affirmer que l'Etat exerce (une souveraineté) des pouvoirs
souverains à l'égard de toutes choses, toutes situations et de
tous les individus se trouvant sur son territoire. C'est ce qu'exprime les
termes latins jus imperium et jus dominium (pour illustrer l'idée de
deux aspects de la souveraineté).
A titre illustratif, la doctrine canadienne
représentée par Claude EMANUELI (professeur à la
faculté de Droit de l'université d'Ottawa, dans un rapport
général sur la maîtrise du sol32 ; l'a si
bien exprimé en ces termes: " le principe de la Souveraineté
Permanente sur les ressources naturelles et les activités
économiques s'applique aussi bien aux ressources minérales qu'aux
ressources agricoles, aux activités d'exploration, d'exploitation, de
gestion, de conservation, de transformation et de commercialisation des
ressources naturelles". Celles-ci peuvent être comprises dans le
territoire terrestre de l'Etat, mais aussi sur son territoire maritime, son
plateau continental, sa zone de pêche exclusive ou sa zone
économique exclusive.
Jusqu'où l'Etat est censé exercer sa
Souveraineté Permanente? Autrement dit, quelles sont ses limites
spatiales, car elles ne sauraient être indéfinies ou
illimitées, sous réserve des droits des Etats tiers et du
patrimoine commun de l'humanité.
La souveraineté territoriale implique que l'Etat
dispose de droits souverains et exclusifs sur l'ensemble de son territoire. Or,
le territoire de l'Etat est composé de l'espace aérien, maritime
et terrestre. Il s'agira avant tout du contrôle effectif que l'Etat
exerce sur son territoire terrestre.
I. Espace terrestre (compétences
territoriales)
«L'Etat exerce une Souveraineté Permanente sur le
sol, le soussol, les foréts,..»
32 Franck MODERNE et alii. La maîtrise du
sol, rapport de synthèse, PUF, Paris, 1995, pp. 3 à 69.
Pour des raisons de précision et de concision, nous
allons englober ici le sol, sous-sol et les foréts. Les
compétences territoriales de l'Etat s'étendent à
l'ensemble de son territoire terrestre auquel sont assimilées les eaux
douces.
L'Etat exerce des pouvoirs souverains à l'égard
de toutes les choses et de tous les individus qui se trouvent sur son
territoire terrestre de même qu'à l'égard de toutes les
activités qui s'y déroulent. Il dispose notamment d'une
souveraineté permanente sur les ressources naturelles
présentées à l'intérieur de son territoire et sur
les activités économiques qui y ont lieu. Le principe de la
souveraineté économique de l'Etat se trouve expressément
mentionné à l'art. 2 §1 de la charte des droits et devoirs
économiques des Etats (1974). Selon cet article : chaque État
détient et exerce librement une souveraineté entière et
permanente sur toutes ses richesses, ressources naturelles et activités
économiques, y compris la possession et le droit de les utiliser et d'en
disposer.
Cependant, il faudra également considérer les
autres espaces à l'égard desquels l'État possède
des droits souverains.
II. Espace maritime et Espace aérien
Le territoire de l'État en tant qu'espace sur lequel il
exerce sa souveraineté est composé des espaces maritime, arien et
terrestre.
Compte tenu de notre thème et par souci de nous
conformer aux prescrits légaux de l'art. 9, nous envisageons avant tout
d'analyser le contrôle effectif que l'État exerce sur son
territoire: que sont le sol, le sous-sol, les forêts et les eaux
intérieurs, le plateau continental, ainsi que sur toute l'étendue
du pays.
§ 3. Caractères de cette
souveraineté
La souveraineté permanente présente les
caractères suivant: inaliénable, exclusive, imprescriptible,
permanente, indivisible, non susceptible d'appropriation privative,
insaisissable.
I. Le caractère économique33
La souveraineté permanente est une souveraineté
économique34. En effet, la plénitude
des compétences de l'Etat sur son territoire se traduit par sa
"souveraineté permanente sur ses ressources naturelles et ses
activités économiques». Une double mise au point
terminologique s'impose. D'une part, il faut noter que cette expression, comme
celle, courante aussi, de "souveraineté économique" est une
simple convention de langage, et qu'elle ne prétend pas amorcer une
dissociation des différents éléments de la
souveraineté étatique. En réalité, la
souveraineté ne se divise pas, elle n'est le critère de l'Etat
que dans toute sa plénitude: il serait abusif et maladroit de distinguer
souveraineté politique, souveraineté économique ou tous
les autres aspects de la souveraineté.
La souveraineté économique regroupe tout
simplement l'ensemble des compétences économiques des
États qui découlent de leur souveraineté. C'est un concept
descriptif, au même titre que l'expression " souveraineté
territoriale" elle -même.
Mais, d'autre part, c'est précisément pour
marquer que ces compétences sont extrêmement larges, peu
limitées par le droit international, que celles-ci sont
regroupées sous le vocable de "souveraineté". C'est pour
renforcer ce caractère presque absolu que les résolutions des
Nations unies qualifient la souveraineté économique de
permanente, entière et inaliénable". Les États en
développement entendent signifier par ces adjectifs que toute
renonciation aux droits que l'État tient de sa souveraineté en
matière économique est précaire et révocable. Il
est vrai que la souveraineté politique est un vain mot si les
États ne possèdent pas des moyens concrets de l'exercer.
Dans le monde contemporain, il n'est pas d'indépendance
sans maîtrise de l'activité économique. C'est ce qui
explique l'accent mis à l'heure
33 Dominique ROSENBERG, op. cit., p.121.
34 Patrick DAILLIER et Alain PELLET, op.cit.
p.1035 et s.
actuelle sur la composante économique de la
souveraineté, surtout par les États en développement, peu
convaincus de pouvoir tirer parti de l' interdépendance
économique, ils insistent sur le droit des États de
contrôler l'ensemble des activités économiques
menées sur leur territoires.
II. Le caractère permanent et inaliénable
de cette souveraineté
L'épithète permanente collée au mot
souveraineté "apparaît dès la résolution 1314 (XII)
et sera régulièrement utilisée à partir de
là. Ce qualificatif marque à la fois l'essence et la
portée du droit revendiqué. En effet, dire que la
souveraineté sur les ressources naturelles est permanente, signifie
qu'elle est inaliénable. L'inaliénabilité se trouve
proclamée par la résolution 1803 (XVII) et par la plus part de
textes ultérieurs. Ce que l'on vise par-dessus tout, ce sont soit les
aliénations effectuées par la puissance métropolitaine
durant l'ère coloniale et dont les bénéficiaires demandent
le maintien au nom de la théorie du respect des droits acquis ; soit
celles qui ont été extorquées à des gouvernements
faibles au profit des ressortissants d'États économiquement
puissants.
III. Le caractère de conformité aux buts
et principes des N.U.
Les résolutions prévoient des moyens de sanction
permettant de faire respecter les compétences souveraines des
États. On citera à ce propos deux dispositions importantes, entre
lesquelles se remarque une différence de ton caractéristique de
l'évolution de la théorie. En 1962, la résolution
1803(XVII) présente un paragraphe 7 ainsi libellé : "la violation
des droits souverains des peuples et des Nations sur leurs richesses et
ressources naturelles va à l'encontre de l'esprit et des principes de la
charte des N.U. et gène le développement de la coopération
Internationale et le maintien de la paix".
Dix ans plus tard, la IIIèmeC.N.U.C.E.D.
qualifie de violation flagrante des principes des Nations Unies, toutes mesures
de pression politique et économique de nature à porter atteinte
au droit de tout le pays, de disposer librement de ses ressources naturelles
(Rés. 46 (III). Aussi l'ONU recommande-t-elle à ses membres de
s'abstenir de toute pression ou action de
contrainte pendant et à travers le libre exercice par
l'État de son droit de souveraineté sur ses ressources
naturelles. Il s'agit-là d'un principe important, en lequel il faut
voir, comme le précise plusieurs résolutions, une application du
principe de non intervention, proclamé par la charte de N.U. et par la
déclaration du 24/10/1970 sur les relations amicales et la
coopération entre les États. Ce principe est lui-même le
corollaire de la souveraineté et de l'égalité.
IV. La souveraineté a le caractère d'un
pouvoir illimité et exclusif
La souveraineté est la source de tout pouvoir
qu'exercent les organes d'un État dans le droit positif d'un
État. Elle a son siège dans tous les citoyens et dans chacun
d'eux. La souveraineté n'est pas susceptible d'appropriation privative,
aucune partie du peuple, aucun individu ou organe au sein de l'Etat ne peut
s'en attribuer le monopole. Seul l'Etat en détient l'exclusivité.
Elle a, en outre, un caractère unique et indivisible. La
souveraineté est une et indivisible35: elle appartient
à la nation toute entière ; aucune section du peuple, aucun
individu ne peut s'en attribuer l'exercice".
V. Non susceptible d'appropriation
Elle ne peut devenir pour qui que ce soit, un objet
d'appropriation. L'Etat est le seul titulaire légitime
de la souveraineté Il subsiste encore cette conséquence qu'en
France aucun organe étatique n'est, à proprement parler souverain
: le peuple n'est pas maître de puissance souveraine, car il ne fait
qu'élire ses représentants ; le parlement ne l'est pas davantage,
bien qu'il soit incontestablement l'organe suprême car il n'est
composé que des membres relativement éphémères...
mais précisément le but de cette combinaison constitutionnelle
est d'empêcher que l'un quelconque des éléments composant
cet organe complexe puisse acquérir une maîtrise complète
et se rendre à lui seul souverain.
35 Raymond CARRE de MALBERG, Introduction
générale à l'étude de État, T.I, Paris,
1945, p. 33.
Section 2ème : DISTINCTION ENTRE SOUVERAINETE
PERMANENTE ET LA PLENITUDE DES DROITS FONCIERS, MINIERS ET FORESTIERS
«Celui qui voudra s'en tenir au présent, à
l'actuel, ne comprendra pas l'actuel ». Cette remarque de Michelet est
pleinement justifiée à l'égard du droit foncier congolais
qui est inséparable de son histoire. Telle est la raison pour laquelle
on ne saurait distinguer la souveraineté permanente de la loi dite,
BAKAJIKA, sans évoquer l'évolution du régime
foncier36 congolais : avant l'E.I.C., sous l'E.I.C., pendant la
période coloniale et post coloniale.
§ 1. EVOLUTION DU REGIME FONCIER CONGOLAIS.
I. Période du régime foncier
coloniale.
Cette évolution du régime foncier congolais sera
analysée à travers quatre périodes : 1. Le régime
foncier coutumier (avant l'E.I.C.), 2. Sous l'E.I.C., 3. Sous le Congo Belge,
4. Et du Zaïre.
I.1. Le régime foncier de l'Etat
Indépendant du Congo
Le professeur S. Mugangu écrit, à propos de
l'occupation européenne du sol africain avant 1876, que certaines
théories de droit international antérieur au XVIIIe siècle
considérait l'Afrique, terre inconnue comme une res nullius. S' y
installait qui voulait sans qu'aucun titre juridique soit nécessaire.
Les premiers établissements portugais sur les deux faces du continent
africain s'étant probablement constitués ainsi37.
Au jour même de la notification aux puissances de la
constitution de l'E.I.C., l'administrateur général au Congo prit
une ordonnance relative à l'occupation des terres à travers tout
le nouveau territoire.
36 Mbemba MULOPO M., « Nouveau Régime
foncier Zaïrois et l'expropriation pour cause d'utilité publique
»,in Annales de la faculté de Droit, UNIKIN, 1974.
37 Séverin MUGANGU M., op. cit., p.
37.
En effet par cette ordonnance l'administrateur
général a voulu marquer d'une part une rupture entre l'ancien et
le nouveau régime en ordonnant qu'à partir de la présente
proclamation, aucun contrat ni convention passés avec des
indigènes pour l'occupation à un titre quelconque des parties du
sol « ne sera reconnu par le gouvernement et ne sera protégé
par lui ». Les droits ne pouvant naître qu'en se conformant aux
règles du nouvel Etat38.
Si l'objet du premier acte fut de cristalliser les droits
acquis à l'époque antérieure au 1er juillet
1885, ce méme acte attribue à l'Etat toutes les terres vacantes
et interdit leur occupation sans titre. Ainsi, pour le Pr. Kalambay, dans le
premier temps l'E.I.C. reconnut trois sortes de terres :
a. les terres occupées par les autochtones et dont le
régime fut soumis à la coutume.
b. Les terres en possession de non indigènes. En
effet, avant la constitution de l'E.I.C., des non-indignes hollandais,
portugais et anglais occupaient le sol en vertu des contrats passés avec
des indigènes : ces contrats furent reconnus valables en
exécution du décret du 22 août 1885 et ces terres furent
enregistrées et soumises à la législation de l' Etat.
c. Tout le reste des terres forma le domaine de l'Etat et une
partie constitua le domaine privé. Ce reste c'était les terres
vacantes.
Si les non indigènes avaient, à partir de cette
ordonnance la faculté de disposer de leur propriété
foncière entre vifs ou pour cause de mort et entre eux, ils ne voulaient
plus acquérir un quelconque droit réel ni sur les terres
appartenant aux communautés traditionnelles, ni sur celles faisant
partie du domaine de l'État sans autorisation de celui-ci. Par cette
disposition, l'Etat se voulait être à méme de
contrôler toute l'occupation du sol sur l'ensemble de son territoire.
Mais les terres occupées par les indigènes furent
réduites ; l'Etat s'appropria de toutes les parties de terres qu'ils
n'exploitaient pas, dans un
38 Gaston Kalambay, Régime foncier et
immobilier, PUZ, Kinshasa, 1989, pp. 5 à 25.
but commercial. Le gouverneur général en
exécution du décret du 5 décembre 1892, avait pris un
arrêté invitant les commissaires des districts et les chefs
d'expéditions à délimiter les droits des indigènes
sur les terres occupées par eux (...) c'est à dire
délimitées en fait à des portions de terres
habitées des droits des indigènes ; « ce n'est pas un
usufruit, une propriété mais un droit d'occupation
»39.
Dans le droit dont la Belgique a doté son ancienne
colonie, le droit consacré à l'amélioration des conditions
des vies des autochtones est relativement mince par rapport aux droits
économiques (...), le droit colonial n'étant pas un droit de
développement40 ; la théorie des biens vacants fut
utilisée comme instrument de la politique du gouvernement colonial pour
mieux exploiter les ressources du Congo (comme dans tous les autres pays
colonisés). Et l'Etat entra en conflit avec les sociétés
commerciales dans le premier temps mais la solution de ce conflit fut
réalisée au détriment de la population. La non observation
des intérêts de chaque groupe fut en fait la cause de la chute de
l'E.I.C.
En conclusion, comme nous venons de le voir, on ne peut pas
parler de la souveraineté permanente sous l'E.I.C., pour plusieurs
raisons, notamment :
1°Ici, le souverain c'est le roi et non l'Etat.
L'E.I.C. est une propriété privée, un bien propre
du roi, le seul souverain. Il ne devait en rendre les comptes à
personne.
2°Les droits souverains de la population
prônés par l'art. 9, étaient méprisés,
méconnus au profit des intéréts du roi. Cela fut
d'ailleurs la cause de la chute de l'E.I.C. : les intéréts de la
population n'étaient pas pris en compte.
3°Rien n'était fait pour l'intérêt de
la population ou pour le développement du pays; toutes les
activités économiques et les revenus tirés de leur
contrôle étaient versés dans le compte du roi. Ce qui est
pratiquement contraire au principe de la souveraineté permanente, selon
l'esprit de la résolution 1803, qui place l'intérêt de la
population au premier rang.
39 Gaston KALAMBAY, op. cit., p. 25.
40 Idem, p. 27.
Toutes ces raisons ci-haut évoquées prouvent
à suffisance que la notion de souveraineté permanente ne saurait
être envisagée ici.
I.2. Le régime foncier du Congo - Belge
Dans le traité de cession du 18 novembre 1907 la
Belgique réitère sa volonté de pouvoir respecter les
droits acquis parce que « sa majesté le Roi souverain
déclare céder à la Belgique la souveraineté des
territoires composant l'E.I.C., tous les droits et obligations qui y sont
attachés, l'Etat belge déclare accepter cette cession et faire
sienne les obligations de l'E.I.C. (...), et s'engage à respecter les
conditions au Congo, ainsi que des droits acquis légalement reconnus
à des tiers indigènes et non indigènes
»41.
Par rapport au principe de la souveraineté permanente,
ici non plus on ne saurait l'évoquer pour la simple et belle raison que
« souveraineté » est inconciliable à la colonisation.
Ajoutons aussi le fait que la cession de la souveraineté de l'E.I.C.
s'est effectuée sans consultation populaire, moins encore consentement
du peuple congolais, tel que l'exige l'art. 214 de la constitution ; ce qui est
également contraire à la charte des Nations Unies, et aux autres
résolutions de l'ONU. Sous cette période, trois textes ont
régi le domaine foncier du Congo qu'il convient de rappeler dans les
lignes qui suivent :
2.1. La charte coloniale (loi) du 18 octobre 1908)
L'article 5 de la charte coloniale assigne au gouvernement
(colonial) entre autre mission l'amélioration des conditions
matérielles d'existence (...) et le développement de la
propriété. Et l'art. 15 de la méme charte traite des
règles relatives aux diverses sortes de concessions ; toute la politique
coloniale trouvant sa source dans cet article qui constitue le régime
provisoire en matière de concession et de cession des biens domaniaux.
Lacunaire, entre autres reproches qu'on lui fit, le « rapport annuel
» de 1922 préconise une nouvelle modification de l'art. 15 de la
charte coloniale de manière à limiter la totalisation.
41 Art. 7 du traité du 18 novembre 1907 relatif
à la cession de l'EIC à la Belgique.
Rappelons aussi que cette cession et ces concessions se faisaient
selon la volonté du législateur belge plutôt que par celle
du peuple congolais.
2.2. Le décret du 20 juillet 1907 sur
l'emphytéose et l'usufruit
Ce décret vint organiser ces deux droits réels
énumérés à l'art.1eralinéa
2ème du décret du 31 juillet 1912, parce que d'abord bien
organisé, l'emphytéose peut suffire dans la plupart des cas
à assurer la mise en valeur des terres domaniales incultes ; il ne sera
plus nécessaire de recourir toujours et nécessairement au
système des grandes concessions en pleine propriété. Ce
serait une faute que la colonie continuât de se dépouiller
définitivement des terres qui lui appartiennent comme bien sans
maître, et ne conservât de son immense domaine qu'une faible
portion pour les temps à venir.
Dans le système de l'emphytéose, dont la
durée est
essentiellement à trois générations, la
colonie retrouvera un jour ses terres avec une valeur considérable et
sans y avoir fait aucune mise de fonds42.
Ensuite, (...) « quant à la matière de la
superficie, il convient de la régler sans retard, afin d'apporter au
principe de la cession consacrée en termes absolus. L'organisation de la
superficie sera particulièrement utile dans la colonie pour la
concession d'exploitation des foréts et des autres produits naturels du
sol ».
2.3. Le décret du 31 mars 1934
Le travail de délimitation des terres indigènes,
par son coût et son inutilité fut condamné en 1927. Mais la
colonisation exigeait que l' Etat colonie continue à accorder des
concessions et cessions avec la garantie à leurs titulaires de ne pas
être inquiétés dans l'exercice de leurs droits. Dès
lors une procédure nouvelle était nécessaire ; le
législateur de 1934 subordonna à une enquête toute demande
de cession ou de concession.
42 Rapport du conseil colonial cité par Gaston
Kalambay, op. cit. p. 123.
Ce décret du 31 mai 1934 permit par un texte
légal de renoncer officiellement à la délimitation
systématique des terres indigènes, et indirectement de
déterminer les terres vacantes, car l'enquête ne devra
désormais s'effectuer qu'en cas de demande de cession ou de concession
des terres rurales.
2.4. Les pouvoirs concédants
L'article 15 de la charte coloniale était en principe
applicable à tout le domaine privé appartenant à la
colonie. Or pendant cette période coloniale, pour le territoire colonial
Belge on dénombre quatre pouvoirs concédants :
- le Congo -Belge
- le comité spécial du Katanga (C.S.K.)
- la compagnie de chemins de fer du Congo supérieur aux
Grands Lacs africain (CFL).
- Comité national du Kivu (C.N.K.I.).
Chacun de ces pouvoirs concédants avait une zone dans
laquelle il avait un droit de céder ou de concéder une portion
des terres. Et à ce propos, les terres qui furent
concédées n' étaient pas vacantes mais bien
occupées par les indigènes. A titre d'exemple, l'administration
faussa les enquêtes pour faire entrer les terres dans le domaine du
C.N.K.I. Le caractère indigène ou domanial d'une terre
établi par un procès verbal dressé par l'administrateur ou
méme un agent territorial, lequel ne faisait l'objet d'aucun
contrôle.
Mais malgré l'existence des divers pouvoirs
concédant, nous pouvons dire que l'article 15 de la charte coloniale a
été appliqué sur tout le territoire colonial d'une part et
d'autre part les pouvoirs concédant ont disparu à la veille de
l'indépendance. Au 30 juin 1960, seul l'Etat congolais était
l'unique propriétaire de tout le domaine privé et pouvait en
disposer librement.
II. Période du régime foncier
post-coloniale
Pour Kalambay, le régime foncier pendant cette
période postcoloniale a connu deux phases fortement
caractérisées.
En effet, dans la première phase qui se situe dans la
première décade de l'indépendance, le régime
foncier est dominé par la conception du droit colonial car le
législateur de cette période, tout en recherchant
l'indépendance économique, a le souci permanent de maintenir ces
textes légaux antérieurs à l'indépendance.
La deuxième phase débute avec la décennie
connue. En effet, dans la loi fondamentale (décret du 19 juin 1960), on
remarque des positions tranchées du législateur ; positons qui
aboutissent à la rupture avec l'ancien régime foncier ; laquelle
rupture étant consacrée par la loi du 20 juillet 1973.
II.1. La loi BAKAJIKA
(1ère décade de l'indépendance)
La constitution du 1er août 1964 invitait le
législateur à régler souverainement par la loi nationale
le régime juridique des cessions et concessions foncières faites
avant le 30 juin 1960.
Et l'ordonnance - loi n° 66/343 du 7 juin 1966
communément appelée loi BAKAJIKA, assurait à la RDC la
plénitude de ses droits de propriété sur son domaine et la
pleine souveraineté dans la concession des droits fonciers forestiers et
miniers sur toute l'étendu de son territoire, (...) tous les textes
législatifs antérieurs ayant pour objet l'exploitation, la
gestion du sol et du sous-sol congolais et qui sont contraires à
l'esprit de l'ordonnance loi précitée étaient
abrogées. Dans l'exposé des motifs, il est dit que « la
souveraineté de notre pays s'accommode mal des privilèges
exorbitants concédés par la législation coloniale »
et le Congo doit pouvoir exiger la plénitude de ses droits de
propriété, de ses pouvoirs concédant... il doit disposer
librement de son patrimoine ».
Cette ordonnance43 prise en vertu de l'article 43
alinéa 3 de la constitution de 1964 annule toutes les cessions et
concessions accordées successivement par l'E.I.C., le Congo Belge, le
CSK, le CNKI et la CFL.
La loi BAKAJIKA voulait constituer pour l'Etat congolais une
loi de régulation de cession ou de concession acquises avant
l'indépendance. Mais, à part la remise en question de cessions et
de concessions accordées avant le 30 juin 1960 n'a pas porté
atteinte à la conception du droit foncier colonial.
II.2. Portée de la loi BAKAJIKA
Cette loi avait 3 articles dont :
L'art.1er stipule : la R.D.C. reprend la pleine et
libre disposition de tous ses droits fonciers, forestiers, et miniers
concédés ou cédés avant le 30 /06/1960 en
propriété ou en participation à des tiers, personnes
morales ou physiques. L'art.2ème renchérit : « la
R.D.C. procédera souverainement à la répartition des
droits d'exploitation ou de gestion de ses ressources naturelles
forestières et minières »
L'art.3ème : « tous les textes
législatifs ou réglementaires antérieures, ayant pour
objet : l'exploitation, la gestion du sol ou du sous sol congolais et qui sont
contraires à l'esprit de la présente ordonnance-loi sont
abrogés.
Ce point sera consacré à l'étude des
concepts de «plénitude des droits fonciers», d'une part, et
d'autre part à celui de « de la pleine souveraineté ».
Après en avoir explicité la portée, on verra quelle
incidence ces deux concepts ont sur les droits cédés ou
concédés sur le sol par l'autorité coloniale.
2.1. Explication du concept « plénitude
des droits fonciers »
Cette expression se trouve consacrée par l'Ordonnance-Loi
n°66- 343 du 7 juin 1966, dite communément Loi
BAKAJIKA44. Il dispose en son
43 Gaston KALAMBAY et Ndeshyo RURIHOSE «
Enseignement de droit et de développement» in Annales de la
Faculté de Droit, UNIKIN, 1976.
article 1er : « La R.D.C. reprend la pleine et
libre disposition de tous ses droits fonciers, forestiers et miniers
concédés ou cédés avant le 30 juin 1960 en
propriété ou en participation à des tiers, personnes
morales ou physiques ». En d'autres mots, en perdant la
propriété du sol, le propriétaire voit son droit
réel de propriété des constructions, se transformer en
droit de créance sur l'Etat. Ainsi bien, la loi dite « BAKAJIKA
» n'eut-elle pu décider autrement sans porter gravement atteinte au
principe général du droit qui prescrit l'enrichissement sans
cause.
1.1. Quelle est donc la portée de cette
disposition?
Dans la terminologie en usage dans les affaires
foncières, le mot cession est l'octroi d'un droit de
propriété tandis que la concession se limite à octroyer un
droit de jouissance bail, emphytéose, occupation provisoire, superficie,
concession gratuite, etc.
Dans une terminologie plus générale le mot
concession signifie tout acte par lequel l'Etat consent un droit de jouissance
sur son domaine, sans distinguer entre le domaine public et le domaine
privé.
Dire que l'Etat reprend la pleine et libre
disposition45 de tous ses droits fonciers ~cédés avant
le 30 juin, revient à dire qu'il reprendre toutes les
propriétés privées reconnues et protégées
par les textes législatifs d'avant cette date. En effet, aux termes de
l'article 14, Livre II du Code Civil la propriété est le droit de
disposer d'une chose d'une manière absolue et exclusive. Le droit de
disposition constitue l'essence méme du droit de propriété
et les mots « pleine et libre disposition » repris à l'article
1er de l'Ordonnance-Loi n°66-343 eussent aussi bien pu
être remplacés par les mots « pleine
propriété».
1.2. Limites de la disposition
Une première limitation se pose dans le temps, sont
uniquement visés les droits cédés ou
concédés avant le 30/06/1960. Il s'ensuit que les droits fonciers
valablement cédés ou concédés, après le
30/06/1960, conformément à
44 Du nom de son initiateur, le député
national Isaac Gérard BAKAJIKA-KANGOMBE, auteur de la loi qui porte son
nom.
45 Gaston KALAMBAY, op.cit., pp.43 à
47.
l'ancienne Loi Fondamentale ou à la constitution, sont
couverts par la garantie inscrite à l'article 43 de la constitution :
« Les droits de propriété, qu'ils aient été
acquis en vertu du droit coutumier ou du droit écrit, sont garantis
conformément aux lois nationales. Nul ne peut être privé de
ses biens meubles ou immeubles justement acquis en une région quelconque
du territoire de la République que pour des motifs
d'intérêt général et en vertu d'une loi nationale
prévoyant le versement préalable d'une indemnité
équitable ainsi que le droit pour l'intéressé de saisir,
en cas de contestation, les tribunaux de l'ordre judicaire pour qu'ils se
prononcent sur ses droits et fixent le montant de l'indemnité ».
Cette loi nationale est pour l'instant le Décret du 24 juillet 1956 sur
l'expropriation pour cause d'utilité publique. L'Ordonnance-Loi
n°66-343 n'eut donc pu disposer pour une époque se situant
après le 30/06/1960, sans aller à l'encontre des garanties
constitutionnelles.
Une deuxième limitation résulte de l'objet sur
lequel a porté la cession ou la concession, à savoir le sol.
L'Etat colonial a cédé ou concédé des terres mais
non les constructions, plantations ou autres améliorations quelconques
qui y ont été faites. La R.D.C. reprend ce qui a
été cédé ou concédé, et non ce que le
concessionnaire y a incorporé. (Discussions des théoriciens.)
Pour nous, en reprenant la propriété du sol, la
R.D.C. reprend par le fait méme la propriété des
constructions, plantations, etc.~qui s'y trouvent, et ce en vertu du principe
de l'accession46. Mais cela ne signifie en aucune façon que
le propriétaire évincé perd tous droits sur ces
constructions. Il se trouve en effet, dans la situation du possesseur de bonne
foi, dont le cas est ainsi prévu par l'article 24 du Code Civil II :
« Lorsque les constructions ouvrages ou plantations ont été
faits par un possesseur47 de bonne foi, avec des matériaux ou
des végétaux lui appartenant, le propriétaire du fonds ne
peut en exiger la suppression ; il doit rembourser au possesseur, soit la
valeur des matériaux ou des végétaux et prix de mains
d'oeuvre, soit la plus value qui en est résultée pour le fonds
».
46 Cfr : article 22 du Code Civil congolais, Livre
II
47 Gaston KALAMBAY, op.cit. p.44.
2.2. Explication du concept « pleine
souveraineté »
S'agissant du concept « pleine souveraineté dans
la concession et la cession des droits fonciers, forestiers, et miniers sur
toute l'étendue de son territoire » dont il est question ici, c'est
l'article 3 de la loi n° 66-343 du 7/06/1966, dite Loi BAKAJIKA qui le
consacre, à l'instar du concept précédemment
étudié.
Il dispose : « la RDC procédera souverainement
à la répartition des droits d'exploitation ou de gestion de ses
ressources naturelles, forestière, et minières ».
L'idée que voulait exprimer le législateur de
cette loi est de concrétiser le voeu de rompre avec la main mise
étrangère dans la gestion du patrimoine foncier, minier et
forestier congolais. Il faut mettre fin à l'ingérence de la main
étrangère, car il n' y a pas d'indépendance politique sans
indépendance économique. Cette fois-ci, ce sont les congolais
eux-mêmes et non les étrangers (colonisateur) qui vont
décider de la gestion des ressources situées sur le domaine de
l'Etat. En effet, il a été démontré plus haut que
l'Etat n'était pas maître de son sol, certaines puissances
gèrent à leur profit et au détriment de la population,
l'essentiel de notre potentiel économique. Le gouvernement colonial,
sans l'aval du peuple congolais distribua aux colons, comme bon lui semble, des
terres sous formes de concessions et de cessions. Pire encore, ils
passèrent un contrat d'exploitation qui devait, suivant les documents
officiels consultés, prendre fin en l'an 2300, leur donnant la totale et
entière liberté d'administrer ces terres, comme si la RDC
était incapable de s'autodéterminer, et donc de se diriger seul,
car il est un Etat souverain .
Bref, comme il est dit dans l'exposé des motifs, la
souveraineté de notre pays s'accommode mal avec les prérogatives
exorbitantes concédées par la législation coloniale aux
intérêts étrangers, qui font fi de nos aspirations les plus
légitimes. A notre humble avis, la «pleine
souveraineté», implique aussi l'indépendance
économique qui signifie ainsi, que les grandes décisions qui
concernent l'activité économique soient prises au Congo et en
fonction des options déterminées par le Gouvernement. C'est
pourquoi il faudrait veiller à
une large participation des congolais et du gouvernement
à la gestion des activités économiques exercées
jusqu' à cette époque-là, par les étrangers.
D'où la reprise offensive de droits des congolais sur les richesses de
leur sol et sous-sol aux termes de la loi BAKAJIKA, nous parait mieux
indiquée pour atteindre ce résultat.
2.3. Incidences de ces deux concepts sur les droits
cédés ou concédés par l'autorité coloniale
Les personnes physiques ou morales visées à
l'article1er pourront poursuivre leurs activités jusqu'à la
notification de la décision par les ministres des terres, mines et
énergie et de l'agriculture comme prévu à l'article 4.
L'Ordonnance d'exécution invitait tous les
bénéficiaires de cessions ou de concessions à introduire
des nouvelles demandes de cessions ou de concessions dans un délai
déterminé. Le dossier de la demande devrait contenir les
renseignements susceptibles de permettre aux autorités
compétentes de juger des conditions présentes
d'exploitation48 des concessions ainsi que les objectifs d'avenir
des exploitants. Pour la réattribution des concessions à leurs
anciens titulaires, les autorités dont il est question ci-haut devaient
tenir compte de la mise en valeur suivant que le terrain était
situé dans la zone urbaine ou dans la zone rurale soumise à un
plan rural d'aménagement.
En résumé, les critères de
l'appréciation de la mise en valeur étaient ceux qui
étaient prévus par l'article 30 de l'arrêté
ministériel du 25/02/1943.
De l'examen du dossier, trois solutions étaient
possibles : ou bien la mise en valeur est prévue par les critères
d'évaluation ; dans ce cas, il y a réattribution du terrain, ou
bien, la mise en valeur est partielle ; dans ce cas, l'Etat reprend la partie
non mise en valeur, ou bien la mise en valeur est insuffisante ou nulle, l'Etat
reprend tout le terrain. C'est ce qu'aussi semble
48 Gaston KALAMBAY, op.cit.p.47.
nous dire dans ses commentaires, M. HERBOTS : « il semble
qu'il ne faut y avoir qu'une faculté : l'Etat n'est pas obligé de
redevenir pleinement propriétaire. Il ne fera usage de cette
faculté que si le cessionnaire ou le concessionnaire n'a pas usé
de son droit dans l'intérêt du pays (ainsi s'il n'a fait que
conserver les terres dans un but spéculatif) ou s'il a abandonné
son bien ».
. Les textes disent que l'Etat reprend la pleine et libre
disposition de
tous ses droits fonciers, forestiers, et miniers
concédés ou cédés avant le 30/06/1960. En d'autres
termes, l'Etat reprend ce qui a été cédé ou
concédé par la Colonie, c'est-à-dire le sol. Quel est,
dès lors, le sort des constructions, plantations ou autres
améliorations quelconques faites par le cessionnaire ou le
concessionnaire ?
Le problème ne se pose pas quand il y a
réattribution intégrale du terrain cédé ou
concédé. Au contraire, il se pose dans d'autres cas. En reprenant
la propriété du sol, en tout ou en partie, l'Etat devient, en
vertu du principe de l'accession immobilière, propriétaire de
tout ce qui a été incorporé au sol repris et l'Etat a
l'obligation dans ce cas d'indemniser le cessionnaire ou le concessionnaire qui
doit être considéré comme un possesseur de bonne foi
construisant sur un terrain appartenant à autrui.
Si l'on observe la superficie totale des terres
cédés et concédés au 31/12/1959 à celle des
terres dont la cession ou la concession a été confirmée ou
non dans le Moniteur congolais, on constate que la superficie de 1959 est de
loin supérieure au total des droits confirmés ou infirmés.
Nous pensons avec le professeur Gaston KALAMBAY, que l'inefficacité de
l'application de la Loi BAKAJIKA résidait dans le manque de formation
des conservateurs des titres fonciers et dans la perte des documents pouvant
servir de pièces de contrôle des cessions et des concessions.
On peut en conclure que la loi BAKAJIKA voulait constituer
pour l'Etat une loi de régulation de cessions ou de concessions acquises
avant l'indépendance par le nouvel Etat. Par cette opération, si
la loi BAKAJIKA avait été bien appliquée, elle aurait
permis à l'Etat d'effectuer un inventaire
complet des terres cédées et
concédés, de connaître leur superficie, leur destination,
et de constater, sur base des doubles des certificats d'enregistrements
gardés dans les conservations des titres fonciers, celles qui ont
été abandonnés et qui, par conséquent,
retourneraient à l'Etat. A part la mise en question des cessions et
concessions accordées avant le 30/06/1960, la loi BAKAJIKA n'a pas
porté atteinte à la conception du droit foncier colonial.
§ 2. Comparaison : Loi BAKAJIKA face à la
Souveraineté permanente
La loi BAKAJIKA présente autant de ressemblances que
des dissemblances avec le principe de la souveraineté permanente. Il
suffit de lire son exposé de motif et d'en comprendre la ratio legis,
pour s'en convaincre. Examinons tout d'abord les ressemblances (3.1.) par la
suite la dissemblance (3.2.).
I. Ressemblance
La loi BAKAJIKA constitue un mécanisme49 de
contrôle du principe de la souveraineté permanente. On serait
même amené à affirmer qu'elle est une application du
principe de la souveraineté permanente.
Chronologiquement, il n'est pas douteux de dire que les
idées tiers-mondistes de ce temps là, qui ont conduit l'ONU
à proclamer ce principe aient eu une incidence50 positive sur
le législateur de la loi BAKAJIKA.
Voici leurs traits communs:
- Non seulement la ratio legis est la même, mais aussi on y
retrouve beaucoup des termes et d'idées de la résolution 1803.
- Pris pour des raisons d'indépendance
économique contre la main mise étrangère dans
l'économie de du pays, leur contexte d'élaboration paraît
être le même : partout c'est la lutte contre l'ingérence
étrangère dans l'économie du pays qui est au centre de la
philosophie de ces deux textes.
- Mais aussi le contexte est le même partout. En effet,
sous la loi BAKAJIKA, on venait de sortir d'un contexte de guerre, où
les richesses du pays sont
49 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit.,
p.238.
50 Résolution 1803 et résolution
3281.
gelées par les étrangers, et la population n'y
trouvait pas son compte. Il fallait donc faire en sorte qu'elle puisse jouir de
ses richesses. Sous l'art.9 de la constitution, on venait d'un contexte de la
guerre d'agression causée par la convoitise des richesses du pays, par
les pays puissants en complicité avec les pays voisins, qui ont
pillés les richesses et ressources naturelles du pays. Les richesses du
pays profitent plus aux étrangers qu'à la population qui croupit
dans la misère. Pour ce faire, il faut protéger, en temps de paix
comme en temps de guerre, les richesses et ressources du pays contre les
agresseurs étrangers, par un mécanisme juridique international et
national, qu'est la souveraineté permanente.
- Les deux poursuivent le but d'améliorer les
conditions de vie de la population et l'intérêt du
développement du pays titulaire de l'exercice de la souveraineté,
la R.D.C. en l'occurrence ici.
- La loi BAKAJIKA a procédée à
l'annulation des cessions et concessions de ceux qui abusaient de leur
propriété au détriment de l'Etat. Elle a donc
consistée en une radicalisation, qui est une technique apparentée
à la nationalisation51 ; or la nationalisation
elle-même est un mécanisme de contrôle institué par
le principe de la souveraineté permanente. C'est méme une
application directe de ce principe, bref, un mécanisme de contrôle
institué par ce principe.
Toutes fois, cette ressemblance n'est pas à
exagérer, car il subsistent quelques différences entre ces deux
notions que nous allons voir dans les lignes qui suivent.
II. Dissemblance
- L'expression « souveraineté »
employée par la loi BAKAJIKA n'est pas collée à
l'épithète permanente qu'on retrouve dans la résolution
1803.
- La loi BAKAJIKA n'était pas consacrée par la
constitution comme c'est le cas de l'art.9, mais plutôt par une loi
ordinaire52. C'est l'Ordonnance-loi du 7 juin 1966.
51 Patrick DAILLIER et Alain PELLET, op. cit.,
p. 965.
52 C'est le député BAKAJIKA qui l'avait
proposée, mais elle fut mal appliquée par un fonctionnaire peu
outillé, d'où elle fut abrogée par la loi de 1971. Nous
sommes ici à une période vers la rupture du régime
colonial.
- Elle ne traite que de la propriété
foncière et donc à ce titre elle fait référence
à l'espace terrestre, sans faire allusion à l'espace maritime,
aérien ou au plateau continental comme c'est le cas avec l'art.9. Il
s'agit-là d'une innovation importante apportée par l'art.9 de
ladite constitution.
- Par rapport à la précision sur la
propriété foncière, le législateur à l'art.
9 est resté silencieux, il ne s'est pas prononcé et son silence
est à la base de plusieurs controverses ; tandis que la loi BAKAJIKA est
claire et assure à la R.D.C. la plénitude de ses droits de
propriété sur son domaine et la pleine souveraineté dans
la concession des droits fonciers, forestiers et miniers sur toute
l'étendue de son territoire.
Le seul problème que n'a pas résolu la loi
BAKAJIKA consiste à ne pas préciser que cette
propriété de l'Etat53 sur son sol était
inaliénable, exclusive et imprescriptible54. C'est ce qu'a
fait la loi de 1971 que nous allons examiner dans le point suivant.
La mauvaise application de cette loi par un personnel non
outillé, poussera à son abrogation.
III. La rupture avec le régime colonial sous la
loi BAKAJIKA renforcée.
La constitution ci haut évoquée connut plusieurs
révisions dont celle du 31 mars 1971, au cours de laquelle
l'assemblée nationale adopta une nouvelle disposition à
insérer à la constitution et dont l'article 14 bis était
libellé comme suit : « le sol et le sous-sol zaïrois ainsi que
leur produits naturels appartiennent à l'Etat. Et sur la base de ce
nouveau texte constitutionnel, l'Assemblée Nationale vota une loi
abrogeant la loi dite BAKAJIKA.
Un comité de rédaction fut institué dont
la mission fut de traduire les options nouvelles en texte de droit positif et
la proposition des lois de 399 articles fut adoptée le 9 juin 1973, en
séance plénière55 du conseil législatif
national et fut promulguée le 20 juillet 1973 dont l'article 53
consacra
53 Cfr. Article 53 de la loi du 20/07/73.
54 R. Carré de MALBERG, op. cit., p.
32.
55 Gaston KALAMBAY L, op. cit., p.65.
l'appropriation du sol et du sous-sol zaïrois à
l'Etat en stipulant : « le sol est la propriété exclusive,
inaliénable.
L'expression « pleine souveraineté »
utilisée par la loi BAKAJIKA prouve à suffisance que la R.D.C.
entendait déjà exercer sa souveraineté permanente, du
moins théoriquement à cette époque ; car la R.D.C.
était déjà devenue indépendante. La ratio legis du
législateur de cette loi est caractérisée par le souci
d'indépendance économique. Comme c'est le cas pour l'art.9 avec
le principe de la souveraineté permanente qui y est consacré.
Section 3ème. DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE FACE
A L'ARTICLE 53 DE LA LOI DU 20/07/1973
La question fondamentale à laquelle nous allons
répondre ici, consiste à savoir, si l'article 9, abroge-t-il ou
pas l'article 53 de la loi du 20/07/73. S'agit-il d'une avancée ou d'un
recul ? Quelle est sa spécificité par rapport à d'autres
textes légaux déjà connus ? Voilà décrit
l'objet de cette section.
Il est à noter que loi du 20 juillet 1973, marque la
rupture définitive avec le régime colonial et est intervenue
à un moment où se manifestent les premiers signes du
déclin de l'Etat. Le volontarisme de la loi BAKAJIKA et des actes
législatifs et réglementaires pris dans le sillage de celleci
n'opérera en réalité qu'à l'égard des
exploitants étrangers installés par la colonie. Pour sa part,
l'art 9 de la constitution est intervenu au moment où la R.D.C. venait
de la guerre d'agression qui a balkanisée le pays et occasionnée
le pillage de ses richesses et ses ressources naturelles.
Quelle est la nécessité et la raison
d'être de ce changement ? Avant d'y arriver, il convient de rappeler que
la présente loi a été élaborée
conformément aux arts. 14,14 bis et 46 de la constitution, aux
directives et aux options fixées par le bureau politique. Ainsi, en
attribuant à l'Etat le sol comme sa propriété exclusive,
inaliénable et en abolissant définitivement l'appropriation
privative du sol et du sous-sol congolais, ce qui est contraire à
l'article 34 de l'actuelle constitution, le nouveau régime foncier et
immobilier a cessé de poursuivre l'évolution du régime
foncier colonial en faisant de l'Etat le seul et unique propriétaire
foncier.
Le 1er paragraphe de l'exposé des motifs de
la loi foncière nous donne à la fois le cadre constitutionnel et
philosophique dans lequel cette loi a été élaborée.
Si les arts.14 et 14 bis sont à la base de la loi foncière, il
est utile de rappeler que ces deux articles ont été maintenus
lors de la révision de la constitution en date du 15/8/1974. En effet,
l'art.14bis est devenue dans la
constitution révisée l'art.11 et placé
dans les titres 1er traitant « du territoire et de la
souveraineté de la République » ; tandis que l'art.14 devenu
art.22 est resté dans le titre 2 traitant « des droits fondamentaux
et devoirs du citoyens ». Le déplacement de l'art .14 bis du Titre
2 au Titre 1er est plein de signification dans le cadre de la
présente analyse, car la R.D.C. a en même temps sur le sol
congolais : et les droits souverains territoriaux et les droits de
propriétés. L'art.46 de la constitution du 24/7/1967 fixe le
domaine de la loi. En effet, l'alinéa 2 de cet article dispose : «
la loi fixe les principes fondamentaux du régime de la
propriété, des droits et des obligations civiles et commerciales
». Ce rappel permettra de comprendre, d'analyser et d'interpréter
l'art.53 de la loi du 20/07/1973, en comparaison avec l'art.9 de la
constitution de la 3ème République et d'en tirer les
conséquences juridiques qui s'imposent.
Toutefois, il convient d'avouer que cette différence
n'est pas aisée à établir, en raison de
l'ambiguïté du terme « souveraineté » qui
n'implique pas forcément la propriété, et d'autre part ne
la prohibe pas.
§ I. ETENDUE DU DROIT DE LA PROPRIETE DE L'ETAT SUR
LE SOL
La loi du 20 juillet 1973 répondait (...) au souci de
voir le conseil législatif national « terminer l'élaboration
de la loi en fixant les modalités du régime foncier et minier
» et a été élaboré aussi conformément
aux options fixées (par le bureau politique du MPR) et dont l'impact est
tel qu'il a paru opportun de mettre d'ores et déjà les
dispositions du Code Civil livre II en harmonie avec les options
définies par les instances supérieures du Parti. Par ailleurs, le
droit de propriété dans son acception générale a
été maintenu. Bien qu'il y ait lieu de considérer que son
champ d'application ait été réduit56.
Selon les prescrits de l'article 6 de la loi du 20 juillet
1973, « le sol et le sous-sol sont immeubles par nature », lesquels
font partie soit du domaine public ou soit du domaine privé de l'Etat.
Par voie de conséquence, les immeubles par nature, notamment le sol,
appartiennent soit au domaine public, soit au domaine privé de l'Etat.
Le droit de propriété de l'Etat congolais
56 Préambule de la loi du 20 juillet 1973.
sur son sol du domaine public lui donne droit à tout ce
qu'il produit et s'étend à tout ce qui s'y unit et s'y incorpore
soit naturellement, soit artificiellement (sans préjudice aux droits
résultant des autorisations de voiries et des permis de
stationnement).
De même, le droit de propriété de l'Etat
congolais sur le sol du domaine privé lui donne aussi droit à
tout ce qu'il produit et s'étend à tout ce qui s'y unit et s'y
incorpore soit naturellement, soit artificiellement qu'il n'est pas
régulièrement concédé.
En matière foncière, l'appropriation privative
du sol a été abolie, le sol étant devenu
propriété inaliénable de l'Etat. (Dérogation
à l'article 34 de la const.) Et le droit de propriété tel
qu' il est défini ne peut plus porter que sur les immeubles par nature.
Les autres droits réels ne peuvent plus s'analyser comme des
démembrements de la propriété mais des droits ayant leur
existence propre sans référence au droit de
propriété dont ils étaient des simples accessoires.
Cette option ci-haut évoquée a exigée la
suppression de l'article 16 du décret de 1912 qui posait en
présomption légale le rapport du principal à l'accessoire
entre le sol et les biens incorporés. Cette présomption qui
n'était plus que relative après le décret du 28 mars 1949
qui admettait la propriété des immeubles envisagée
séparément du sol, doit disparaître dans les nouveaux
textes.
Néanmoins, le principe de l'accession relative reste
maintenu dans l'article 21, étant entendu que le terme « immobilier
» ne concerne que les immeubles par destination à l'exclusion des
immeubles par nature ; tant il est vrai que dans la deuxième partie de
la loi, il est fait une distinction entre les droits immobiliers qui sont ceux
qui portent sur des immeubles autres que les immeubles par nature. Si les
règles posées dans le régime immobilier sont sommaires et
concernent uniquement les droits immobiliers de l'Etat, c'est pour assurer
à la gestion de ces droits, la souplesse nécessaire qu'exige la
mutation rapide de la valeur de ces droits essentiellement
économique.
Toutefois, les droits immobiliers des particuliers sont entre
autre régis par les règles posées dans le régime
général des biens. Comme la propriété du sol
emporte celle du dessous et du dessus, dans toute la profondeur et la hauteur
utiles à son exercice, l'Etat peut aussi s'opposer à ce que sa
propriété soit surplombée et a le droit de se faire
justice lui-même en démolissant ou en coupant tout ce qui
empiète sur son domaine. Il peut aussi faire des fouilles et les fruits
lui reviennent.
Mais, le sous-sol (mines auxquels sont assimilés les
gisements de pétrole) font l'objet d'un régime spécial
distinct de celui du droit foncier et immobilier.
La construction du dogme selon lequel, l'Etat est à
méme de bien gérer en bon père de famille les espaces et
les ressources pour l'intérêt de tous57 se traduit par
l'article 53 de la loi du 20 juillet 1973 qui s'apparente ainsi
étroitement au principe de la souveraineté permanente.
Plutôt que de libéraliser ou de privatiser le sol
pour que les producteurs puissent investir, l'essentiel est qu'ils disposent
des droits reconnus et stables. Cette sécurisation pouvant passer par
des multiples formes notamment les concessions foncières qui sont les
seuls droits fonciers reconnus aux particuliers dans notre pays. Une politique
de privatisation, à la manière de l'article 34, n'a de chance de
réussir que dans les contextes spécifiques où
l'individualisation des droits a déjà atteint un degré
important. D'où la nécessité d'une intervention
(volontariste) de l'Etat qui doit construire un cadre juridique et
administratif qui lui convient.
§ 2. COMPARAISON
I. De prime abord, nous relevons que
l'article 9 consacrant le principe de la souveraineté permanente est
plus riche, plus complet et plus exhaustif par rapport à d'autres textes
légaux et en l'occurrence l'article 53 avec lequel nous le distinguons
ici. C'est que, contrairement à l'art. 53 qui ne traite que du
57 Gaston KALAMBAY, op. cit., pp. 40 et 58.
sol, sous-sol, l'article 9 quant à lui traite à
la fois de l'espace terrestre, maritime, aérien, voir le plateau
continental. C'est en cela qu'il est plus exhaustif et plus complet. Il est
important de noter aussi que, l'article 9 ne supprime pas le monopole de la
propriété foncière de l'État Congolais, au
contraire il le maintient et le renforce par les différents
mécanismes de contrôles institués par le principe de la
souveraineté permanente. Et donc, l'article 9 complète l'article
53, mais ne le contredit pas, il maintient l'État comme seul et unique
propriétaire du sol, sous sol, mines,...L'article 34 ne trouve pas son
application ici, car les particuliers ne peuvent pas détenir le droit de
la propriété sur le sol ou le sous-sol, quand bien même le
droit à la propriété privée est consacré.
L'État lui-même ne peut pas disposer de son droit de
propriété dont il est le seul titulaire, car elle et
inaliénable.
II. En outre, il convient de préciser
que tout propriétaire n'est pas souverain et inversement tout souverain
n'est pas propriétaire. Dans le cas de cet article 9, l'État est
à la fois propriétaire et souverain. Pour comprendre cela,
partons de l'exemple de l'Etat avec son territoire, au sujet de la nature
juridique, du lien qui unit l'Etat à son territoire58. De
quelle nature est ce droit particulier de l'Etat sur son territoire ? Ayant
pour objet une chose, le territoire, on l'appellerait à tort droit de
souveraineté (imperium), parce que la souveraineté, qui est
autorité ne peut s'exercer que sur des personnes et non sur des choses.
L'expression souveraineté territoriale renferme une
équivoque59 : toute souveraineté est personnelle ;
elle n'est territoriale qu'en tant qu'elle vise les personnes se trouvant sur
l'étendue de son territoire. Affectant le territoire méme, le
droit de l'Etat ne saurait donc être qu'un droit de domaine (dominium),
qui se traduira, par exemple, par le droit d'expropriation pour cause
d'utilité publique ou le droit de dévastation aux fins de la
défense nationale (théorie dite du territoire objet). Cette sorte
de droit réel éminent n'est pourtant pas un droit de
propriété. Il ne se confond ni avec le droit de l'Etat sur son
domaine privé, ni méme sur le domaine public. D'une part, le
droit de l'Etat sur le territoire est à la fois général et
limité dans son objet : il frappe le territoire tout entier, alors que
la propriété, même publique,
58 Carré de MALBERG, op. cit., T. I,
n°2 , p.3.
59 Jean DABIN, Doctrine générale de
l'État, n°2, p. 28.
n'atteint que des parcelles déterminées du
territoire ; il ne comporte pas plénitude et exclusivité des
pouvoirs, qui restent en principe au propriétaire sous-jacent, mais
seulement certaines facultés déterminées d'utilisation.
III. Une différence de nature est la
troisième à établir ici, entre ces deux concepts :
-Tout d'abord, la propriété est un concept de
droit privé et relève des rapports ou du lien juridique entre une
personne et un bien ou une chose. La propriété poursuit le but de
satisfaire les intérêts privés, égoïstes,
plutôt que de satisfaire l'intérêt général.
Tandis que la souveraineté est un concept de droit public, un attribut
essentiel de l'Etat.
-En outre, la propriété, en
tant que droit absolu est susceptible d'appropriation privative, elle peut
avoir pour titulaire soit une personne morale, soit une personne physique,
selon les prescrits de l'article 34. Ce qui n'est pas le cas pour la
souveraineté qui n'est qu'une caractéristique, mieux un attribut
de l'Etat et qui ne peut se concevoir que dans l'Etat. Car, nous dit
Carré de Malberg, il ne peut y avoir dans un même Etat deux
souverains.
-La propriété peut se démembrer, ou
être fractionnée pour produire soit l'emphytéose, la
superficie, l'usufruit, la copropriété. Pour sa part ,la
souveraineté en tant que attribut essentiel de l'Etat, est une et
indivisible, LEFUR le dit mieux, en soutenant que l'unité et
l'indivisibilité de la souveraineté est liée à
l'unité et à l'indivisibilité de l'Etat méme, car
diviser la souveraineté revient à diviser l'Etat .
-Un autre élément de différence
entre les deux articles en comparaison ici, se révèle dans la
philosophie ou l'esprit qui ont animés le législateur dans leur
élaboration. La philosophie qui domine ces deux lois, c'est la
philosophie de l'indépendance économique de la R.D.C.
En effet, dans les deux cas, c'est le souci profond de mettre
fin à l'ingérence de la main étrangère dans
l'exploitation et la gestion des richesses et des ressources économiques
du pays. Il faut mettre fin à la colonisation sous toutes ses formes et
ses aspects, surtout l'aspect économique.
Car, il ne saurait exister d'indépendance politique sans
indépendance économique.
Pour la loi du 20/07/1973, en attribuant à l'Etat le
sol et le sous-sol, comme sa propriété inaliénable et
exclusive, on a aboli par conséquent l'appropriation privative du sol,
qui est une exception à l'article 34. Le nouveau régime foncier
et immobilier60 a cessé de poursuivre l' évolution du
régime foncier colonial qui a plus profité aux étrangers
qu'aux congolais. D'ailleurs c'est à cette conclusion que le
rédacteur de l'exposé des motifs est arrivé. Nous le
citons : « le régime foncier immobilier constitue une rupture
définitive et radicale avec le régime légal des terres de
l'époque coloniale. Rupture, mais pas refus de s'inspirer de certaines
solutions spécifiques pratiquées par le régime colonial,
notamment en matière d'emphytéose. Rupture aussi, mais en
respectant, dans une mesure compatible avec l'intérêt
général, les droits acquis ».
Quant à l'art.9, qui consacre le principe de la
souveraineté permanente, l'intention du législateur issu du
contexte de guerre d'agression qui a balkanisé le pays, consiste
à mettre fin aux pillages et à l'exploitation illégales de
ses richesses et ses ressources naturelles et d'éviter la balkanisation
du pays en tout temps. Il s'est révélé impérieux,
voire nécessaire de doter le pays d' un instrument juridique pouvant lui
permettre d'assurer la protection et le contrôle, sur son territoire, de
toutes les activités économiques. La convoitise des richesses et
ressources naturelles de la R.D.C. par ses neuf pays voisins a toujours
été à la base de l'insécurité et du pillage
systématique et autres crimes économiques en R.D.C. Il s'agit
d'une nouvelle forme de priver à la R.D.C. de son indépendance
économique et de le maintenir sous le joug néocolonial,
commandité par certains pays occidentaux en complicités avec les
pays voisins de la R.D.C. (Rwanda, Uganda et Burundi qui ont
systématiquement pillé le pays. Des nombreux crimes
économiques ont été commis dans tous les secteurs de la
vie de l'Etat au détriment de la population).
IV. D'autres différences se situent au
niveau des caractères que les deux concepts présentent. Il
découle de l'article 53 de la loi du 20 juillet 1973 ; loi
60 Gaston KALAMBAY, op. cit., p.65.
portant régime général des biens,
régime fonciers et immobiliers et régimes de
sûretés, que la propriété foncière est
à distinguer à la fois de la propriété
privée dont est question à l'article 34, et de la
propriété immobilière, et semble énumérer
tous les caractères dont est revêtue la propriété
foncière.
Cette énumération étant
incomplète, il nous faudra recourir, tant à la constitution
qu'aux travaux préparatoires de la loi du 20 juillet 1973 pour la
compléter.
De cette opération, il ressort que le droit de
propriété de l'État est un droit universel, absolu,
perpétuel et exclusif, portant sur le sol, qui est inaliénable,
imprescriptible et intransmissible. Pour sa part, la souveraineté est
aussi inaliénable, une et indivisible61, imprescriptible
portant sur l'ensemble du territoire et non seulement sur le sol.
Quel est donc le sens des caractères que chacun de ces
concepts regorge ?
IV.1. Du droit universel
Par la combinaison de l'article 10 de la constitution
révisée et de l'article 53 de la loi du 20 juillet 1973, on peut
déduire que le droit de propriété de l'État
congolais est universel ; et ce à partir des termes « le sol et le
sous-sol zaïrois » et de la place de cet article dans la
constitution.
Les droits de l'État s'étendent sur toutes les
terres comprises dans les limites des frontières nationales. Toutes les
terres sont désormais sans exception soumises à l'État
à titre de propriété avec cette conséquence que la
notion de terres vacantes ou sans maîtres devient sans aucun
objet62.
Dans le rapport du 20 mai, on peut lire que « le sol, le
sous-sol et leurs ressources naturelles appartiennent à l'Etat ; il
n'existera donc plus des catégories de « terres domaniales »
opposées à celles des terres
coutumières, car toute terre vacante est désormais
domaniale »63. Par ce caractère toute la terre du pays
appartient à l'Etat et à lui tout seul64.
Quant au caractère universel de la souveraineté
permanente, on entend que ce droit confère exclusivement à l'Etat
seul des pouvoirs souverains d'exercer un contrôle permanent sur tout
l'ensemble de son territoire, sans exception. C'est à dire les espaces
terrestre, maritime et aérien. Se trouvant placée dans
l'universalité nationale, elle ne saurait être localisée,
par voie de division ou de fractionnement, dans les nationaux individuellement.
Elle est en plus, à cet effet, indivisible.
IV.2. Du droit exclusif
Autant pour le droit de la souveraineté permanente que
pour le droit de la propriété inaliénable se
caractère se vérifie au profit du seul Etat Congolais.
En effet, l'article 9 qui consacre ce principe en attribue
l'exercice exclusif à l'Etat seul65. Aucune partie du peuple,
aucun individu ou organe au sein de l'Etat ne peut détenir ce droit
concurremment avec l'Etat. Tant à l'intérieur qu'à
l'extérieur de l'Etat, il n'existe aucun sujet de droit interne ou
international qui puisse l'exercer avec lui. Seul l'Etat congolais exerce cette
souveraineté.
De méme en déclarant qu'en matière
foncière, toute appropriation individuelle du sol est abolie, le
législateur consacre l'exclusivité des droits de l'Etat sur le
sol et le sous-sol. Ce qui s'oppose à l'art. 34 de la Constitution qui
consacre le droit à la propriété privée. Le droit
congolais n'admet plus comme sujet des droits à la
propriété du sol ni les personnes physiques, ni les personnes
morales. L'Etat ne peut partager ses droits à titre de
copropriétaire, ni les démembrer.
63 Lwango T., op.cit, inédit, p. 60.
64 Idem, p.63.
65 Raymond CARRE de MALBERG, op. cit.,
p.176.
La loi, elle même, interdit totalement et à
jamais que ce droit soit accessible à toute personne autre que l'Etat.
Dans la compréhension actuelle de ce texte, même les personnes
morales de droit public, fussent-elles des subdivisions géographiques de
l'état ne peuvent pas accéder à la propriété
foncière, elles ne peuvent accéder qu'à la concession
foncière66. Ceux qui soutiennent qu'une portion de terre de
l'Etat sera vendue et donc être partagée avec l'Etat se trouvent
désarmés. Voilà donc qu'il devient inutile de continuer
avec les polémiques autour de cet article. Car en effet, il ne faut pas
confondre l'article 9 de l'article 34. Tout devient clarifié.
IV.3. Du droit absolu
Le droit de la souveraineté permanente est absolu, celui
de la propriété inaliénable et exclusive l'est
également.
Le caractère absolu du droit de propriété
de l'Etat congolais sur le sol et le sous-sol, dont il est le seul titulaire,
se dégage de plusieurs dispositions de la loi du 20 juillet 1973.
En effet, en tant que propriétaire foncier, en vertu de
l'article 58 de la loi précitée, l'Etat détermine la
destination des terres concédées et fait respecter cette
destination pendant la durée du droit de jouissance.
L'intervention de l'Etat est prévue d'abord au stade de
concession, ensuite pendant la jouissance notamment lorsqu'il s'avère
nécessaire d'en vérifier ou d'en restaurer la
régularité.
L'intervention au stade de la concession est anormale
étant donné qu'il s'agit de concéder des biens dont l'Etat
à la charge et la garde. Il en sera ainsi lorsque la non occupation et
l'interruption de l'exploitation constitutives de l'abandon sont
établies ou lorsque l'intérêt général exige
une reprise des terres.
66 Thomas LWANGO, op.cit, inédit, p.
63.
Les droits de jouissance à terme accordés par
l'Etat sont renouvelables, cependant le renouvellement n'est pas automatique.
Le titulaire du droit (de jouissance) pourrait être astreint à des
conditions nouvelles au moment du renouvellement.
Le droit de l'Etat en tant que propriétaire foncier est
absolu, emportant pour l'état congolais, le droit de jouir et de
disposer du sol et du sous-sol conformément à la loi. Ce droit de
propriété étant opposable à tous par la
volonté méme du législateur, déroge aux prescrits
de l'article 34 de l'actuelle Constitution.
IV.4. De la propriété inaliénable
La souveraineté permanente de la R.D.C. qui est
consacrée par l'art. 9 est inaliénable. Tout acte, toute
disposition constitutionnelle, qui tendrait à faire acquérir
personnellement la souveraineté à un homme ou à une
assemblée, serait radicalement nul, et vu comme inconciliable avec le
principe que la nation seule est souveraine. Quand encore tous les citoyens
seraient à un moment donné unanimes à consentir une
transmission ou une délégation de ce genre67, ils
demeureraient impuissants à réaliser une telle aliénation.
Car, non seulement le droit de la souveraineté permanente n'appartient
pas aux citoyens eux-mêmes, et ceux-ci n'ont pas le pouvoir d'en disposer
; mais, à bien dire, il ne réside méme pas dans la
collectivité indivisible qu'ils concourent à former, à
chacun des moments successifs de la vie nationale. La raison en est que la
collectivité nationale, en qui est contenu la souveraineté, n'est
pas seulement constituée par la génération présente
des citoyens ; elle comprend, d'une façon indéfinie, la
succession ininterrompue des générations nationales,
présentes et futures. Il en résulte qu'en aucun moment de son
histoire, la nation ne peut être enchaînée pour l'avenir ;
la génération actuelle ne peut prétendre imposer ses
volontés aux générations prochaines. Tout ceci est la
condamnation de la doctrine créée par Napoléon, qui
prétendrait concilier le césarisme avec la souveraineté
nationale, en fondant l'empire sur le plébiscite par lequel les citoyens
étaient censés déléguer à l'empereur la
souveraineté
67 R. Carré de MALBERG, op. cit., T. I,
p.176.
populaire (déclaration des droits du 24/06/1793, art. 28 :
« une génération ne peut assujettir à ses lois les
générations futures».
Le caractère d'inaliénabilité de la
propriété foncière de l'Etat congolais vient surtout de ce
que le domaine foncier est collectif parce que, comme l'écrit MALINGREAU
« qui dit bien collectif dit bien inaliénable
»68.
Subsidiairement, une conception philosophique et
métaphysique tente de justifier ce caractère
d'inaliénabilité. En effet, pour cette conception, on dit que les
collectivités traditionnelles n'ont sur leur domaine que le droit
d'usufruit et que leurs ancêtres seuls ont gardé la
nue-propriété ; ils ont dans leur patrimoine des morts le droit
d'aliéner ; ou parce qu'encore une assemblée réunissant
les vivants et les morts à la fois, et la descendance nécessaire
pour disposer du domaine collectif est impossible à réunir.
Mais ce caractère vient de ce que le domaine foncier a
été déclaré tel par le législateur et ce
pour permettre à l'État d'avoir les mains libres dans sa
politique économique. Et en attribuant la propriété
inaliénable du sol et du sous-sol à l'État, le
législateur a en effet supprimé la propriété
foncière de droit civil, le dominium et l'imperium étant
confondus69.
Le sol est donc hors commerce ; il cesse d'être l'objet de
vente, de donation et d'hypothèque ; l'État ne pouvant consentir
qu'un droit de
jouissance moyennant un prix qualifié de redevance ou de
loyer. C'est pourquoile régime de la propriété
foncière déroge à l'article 34 de la Constitution. Par
ce caractère, le sol congolais est donc incessible parce que le mot
incessibilité est pratiquement synonyme
d'inaliénabilité70.
IV.5. Du droit imprescriptible
Le droit de la souveraineté permanente est
imprescriptible, en ce sens que la nation, qui en est seul titulaire, ne peut
en être dépouillé par l'effet d'une possession adverse, si
prolongée soit-elle. Le principe est que ce
68 Gaston KALAMBAY, op. cit., p. 63.
69 Séverin MUGANGU, op- cit, p. 149.
70 Pierre GUICHO, Jacques BICHOT, Michel LEMARTIN,
Dictionnaire de Droit, économie et gestion,
1ère édition, Paris, l'Hermès, 1994, p. 376.
qui est aliénable est prescriptible et les choses
inaliénables sont imprescriptibles conformément à
l'article 620 du code civil Livre III qui dispose qu' "on ne peut prescrire le
domaine des choses qui ne sont point dans le commerce ». Le sol
étant hors commerce, personne ne peut donc acquérir un droit sur
une portion par usucapion et l'État ne peut perdre son droit sur une
portion du sol par prescription extinctive. C'est ici où se situe le
véritable point de divergence entre l'article 34 d'une part et de
l'autre l'article 9 et l'article 53.
Cette imprescriptibilité est absolue et permanente par
la volonté du législateur. Il en découle qu'admettre la
prescriptible du droit de propriété de l'Etat sur le sol et le
sous-sol, c'est admettre indirectement qu'une personne puisse partager avec
l'Etat son droit de propriété foncière ou celui de
souveraineté permanente le cas échéant.
L'octroi et la reconnaissance des droits de jouissance par
l'Etat congolais sur son sol ne sont donc que des actes de simple
tolérance. Ceux-ci avec ceux de pure faculté, note Patrice
Jourdain ne peuvent conduire à l'usucapion ; le propriétaire n'a
cessé d'exercer son droit, il l'a exercé en donnant son accord et
le bénéficiaire a agi conformément à la
volonté du titulaire du droit71, l'occupation des terres du
domaine de l'Etat par les communautés locales n'est ni constitutive de
droit ni constitué en droit, les occupants ne pouvant se vanter de
l'usucapion sur ces terres72.
Le droit de propriété de l'Etat sur le sol et le
sous-sol est donc perpétuel parce qu'il a vocation de durer autant que
son objet et il est exclu que l'Etat n'ait pas exercé son droit pendant
un laps de temps qui l'éteindra.
IV.6. Du droit intransmissible
Ce caractère est partagé à la fois par la
souveraineté et la propriété inaliénable, exclusive
consacrée par la loi du 20/07/1973, qui les distinguent également
de l'article 34.
71 Patrice JOURDAIN, Les biens, Paris, Dalloz,
1993, p. 128.
72 Séverin MUGANGU, op. cit., p. 149.
En effet, l'Etat est perpétuel et identique à
lui même et par conséquent l'Etat ne peut jamais perdre son
aptitude à être titulaire des droits ou perdre son aptitude
à posséder un patrimoine et l'attribut d'être souverain.
Sinon, il cesse d'être un Etat au sens du droit international et
constitutionnel. De ce fait, pour les particuliers, il est exclu
d'acquérir soit à titre universel, soit pour un particulier
d'être constitué en légataire universel, soit encore
d'acquérir à titre particulier des droits de
propriété foncière ou d'exercer la souveraineté.
La loi ne fait pas seulement de l'Etat congolais le seul
propriétaire foncier à la date du 20 juillet 1973 mais aussi,
elle consacre et protège cette situation pour l'avenir et à
jamais.
La propriété peut donc être
triturée, limitée ou exclue, en fonction des objectifs que les
planificateurs veulent atteindre. La propriété ne s'impose pas
à eux parce qu'elle est dominée par l'intérêt
général et c'est cet intérêt général
qui permet de morceler les prérogatives laissées au
propriétaire selon les souhaits des planificateurs73.
Il en est de même de la souveraineté, c'est un
droit intransmissible dans le sens où c'est un droit propre et
essentiellement étatique. En aucun cas, l'Etat ne peut transmettre sa
souveraineté à une autre personne ni morale ni physique. Si non
il cesserait d'être un « Etat », car il n'est pas d'Etat sans
souveraineté et cela tant pour le présent que pour l'avenir, seul
l'Etat congolais exercera sa souveraineté et ne saurait en aucun cas la
transmettre à qui que ce soit.
Pour l'Etat congolais, les caractères de sa
propriété foncière par la nature et l'importance des
choses qui en font l'objet, confère au propriétaire certains
droits qui ne se trouvent pas dans la propriété classique et qui
constituent par suite des attributs spéciaux à ces genres de
propriété.
73 Christian MOULY, «Place de la
propriété parmi les droits de l'homme », in le Droit de
propriété et l'environnement, Paris, Dalloz, 1997, p. 35.
Section 4ème : DISTINCTION ENTRE SOUVERAINETE
PERMANENTE ET LA DOMANIALITE
Il est très embarrassant d'être exhaustif
à ce propos, car la matière à traiter est vaste. Raison
pour laquelle ce travail se limitera à fixer les idées
maîtresses sur les points les plus importants qui distinguent la
souveraineté permanente de la domanialité.
§ 1. Notion
I. Définition
La domanialité est le caractère des biens
composant le domaine de l'Etat et surtout le domaine public74. Il
s'agit du caractère à lui conféré par notre
système juridique. En analyse juridique, la domanialité vient de
la possibilité reconnue à la puissance publique d'avoir un
patrimoine. Les biens domaniaux sont justement les biens dont est
constitué le patrimoine de l'Etat, en ce compris les entités
territoriales et les services publics. De Page les appelle « biens
nationaux » pour désigner « la domanialité »
entant que construction juridique où le droit fait intervenir sa
fiction.
Pour sa part, la souveraineté se définit comme
l'autorité supreme dans les limites d'un territoire
déterminé. Ainsi, l'exercice de la souveraineté est
subordonné à la possession d'un territoire qui en constitue
l'assise matérielle.
Le terme « domaine » est d'origine latine et
provient de «dominium», l'espace sur lequel s'exercent des droits
possessifs exprimant l'idée de maîtrise.
On entend par le domaine de l'Etat75, l'ensemble
des biens mobiliers, immobiliers et fonciers détenus, utilisés et
consommés par les collectivités administratives. Le domaine de
l'Etat qui sera l'objet d'analyse dans le présent titre est le domaine
foncier et immobilier. Il couvre tout l'espace du territoire congolais, soit
une superficie de 2.345.000Km2, environ 235
74 André de LAUBADERE, Manuel de droit
administratif, 10ème éd., Paris, LGDJ, 1976,
p.299.
75 Gaston KALAMBAY, Domaine de l'Etat,
syllabus, L1droit, 2004-2005, U.C.B., p.3 et suivants.
millions d'hectares, dont 227millions de terres fermes et 8
millions de terres submergées, et ce, depuis 31/12/1971.
II. Aperçu général
Le domaine étant l'ensemble des biens et droits
immobiliers et mobiliers appartenant aux personnes publiques, nous pouvons
affirmer avec Gérard CORNU que la domanialité est le
régime juridique applicable aux biens composant le domaine. Ce terme est
également employé dans l'expression : « domanialité
publique» et pour qualifier l'ensemble des règles spéciales
aux quelles sont soumis les biens composant le domaine public : l'affectation,
l'inaliénabilité, l'insaisissabilité, et
l'imprescriptibilité, sont des modes d'utilisations que nous examinerons
plus loin.
En définitive, on entend par « domanialité
publique le régime applicable à certains des biens appartenant
aux personnes publiques76, biens constituant leur « domaine
public77» et dont le régime juridique exorbitant du
droit commun est commandé par le souci de leur assurer une protection
particulière à la fois contre les tiers et contre
l'administration.
De cette ébauche faite sur la définition et
l'aperçu général de la domanialité, il nous semble
maintenant nécessaire d'établir une distinction beaucoup plus
large entre souveraineté permanente et domanialité.
§ 2. Comparaison
I. Distinction entre Souveraineté permanente et
domanialité.
Le premier élément de différence qui
distingue la souveraineté de la domanialité réside dans la
détermination de la nature juridique ou du lien juridique qui unit
l'Etat à son territoire. En effet, l'Etat tire de son titre deux
76 Góard CORNU, Vocabulaire juridique,
Association Henri Capitant, PUF, Paris, 2001, p. 306.
77 Sur ce que le régime de la
domanialité n'est nullement l'apanage des seules collectivités
territoriales (l'Etat, province, communes) et concerne tout autant les biens
des services publics décentralisés (régies, Etablissements
publics, associations de droit public) même de ceux qui revêtent un
caractère commercial et industriel et quelque soit leur forme
juridique.
sortes de pouvoir correspondant à la double nature de
son territoire, à la fois étendue et chose.
Il est en premier lieu un objet concret, un bien propre
à un usage, par l'Etat lui-même ou par des tiers ; de ce point de
vue l'Etat a sur lui des pouvoirs de nature « réelle », comme
on dit d'un propriétaire qu'il a un droit réel sur son bien ; ce
n'est pas à dire que l'Etat soit propriétaire de son territoire,
car la propriété est légalement une institution de droit
privé interne dérivée et ne peut être
créée que par l'Etat lui-même. Il a un dominium, un pouvoir
domanial, qui l'habilite à déterminer la condition légale
de chaque portion du territoire et à exercer sur lui des pouvoirs
purement matériels. C'est là un premier élément de
différence.
En second lieu, le territoire est une étendue
abstraite, à l'intérieur de laquelle se meuvent des personnes ;
l'Etat exerce sur ces personnes un pouvoir d'un tout autre ordre, l'imperium,
c'est à dire un pouvoir de les régir ; pouvoir qui n'a rien de
« réel » car il n'intéresse pas le territoire en tant
que chose, et qui n'a aucun équivalent en droit privé ; à
vraie dire il ne s'exerce pas sur le territoire mais plutôt, sur des
personnes qui sont à l'intérieur du territoire.
C'est là, la différence essentielle de ces deux
concepts que nous allons expliciter davantage, pour en faire ressortir d'autres
qui ne ressortent pas facilement. Le pouvoir domanial est une autorité
sur le territoire, et le pouvoir « impérial » une
autorité à raison du territoire (ratione loci) ; ils
entretiennent des rapports étroits et l'analyse ne permet pas toujours
de les dissocier.
I.1. Pouvoirs dans le territoire étendue
- Formes et manifestations. : L'Etat a compétence pour
régir les personnes et les objets qui sont sur son territoire ou qui y
accèdent, et les situations qui sont rattachées spatiale ment
à son territoire. On ne s'attardera pas ici à cette affirmation,
qu' on a développée au titre de la condition internationale des
personnes et des biens ; qu'il suffise ici de rappeler que la «
compétence internationale» est l'aptitude, reconnue à l'Etat
par le droit international, à régir légalement des
personnes, des objets et des situations,
dès lors qu'ils se trouvent sur , ou ont des rapports
avec son territoire ; celuici, s'il n'est pas le seul support de
l'autorité de l'Etat, est certainement le plus important parce que c'est
sur son territoire que l'Etat jouit du pouvoir le plus effectif.
L'autorité de l'Etat sur son territoire s'exerce sous
la forme normative ou sous la forme opérationnelle. Son pouvoir normatif
consiste à faire des normes juridiques concernant les personnes, biens
et situations qui y sont soumis : soit des règles, soit des normes
individuelles : les règles en particulier résultent du droit
interne, mais aussi des traités que l'État peut conclure avec
d'autres, en raison précisément de la compétence qui lui
est reconnue pour régir son territoire. Quant à son pouvoir
opérationnel, il se manifeste dans des actions matérielles, c'est
à dire ne comportant un aspect physique. Il n'importe pas ici de savoir
si d'autres personnes que l'État territorial peuvent légalement
exercer ces pouvoirs normatifs et opérationnels, mais seulement de
constater qu'ils lui sont en tout cas reconnus.
- Degrés. -L'imperium de l'Etat sur son territoire
comporte des degrés qui concernent tant sa compétence que l'usage
qu'il en fait. D'abord sa compétence elle-méme n'est pas toujours
exclusive, puisque d'autres Etats peuvent dans une certaine mesure exercer la
leur sur son territoire, chacun pour son compte. Mais surtout les pouvoirs dont
dispose l'Etat à l'intérieur de la compétence exclusive
qui lui reste reconnue dans un grand nombre de domaines concernant son
territoire ne sont pas absolus, soit que l'Etat ait accepté de les
limiter conventionnellement dans l'intérêt de certains autres
Etats, soit que les limitations coutumières de son pouvoir
discrétionnaire aient été dégagées dans
l'intérêt de la communauté internationale.
Cela est particulièrement vrai dans les cas des
communications internationales : pour autant que des parties de son
territoire(espace maritime et aérien territoriaux) sont des supports de
moyens de communication, le droit international limite le pouvoir de
réglementation de l'Etat ; certes, aucune organisation internationale
n'en use à sa place et il garde donc bien une compétence
exclusive, mais il ne peut lui-même user de son pouvoir de
réglementation que dans les limites résultant des règles
internationales et doit
tenir compte de ce que les autres Etats et leurs
ressortissants ont un intérêt légitime à utiliser
son territoire ; c'est ce qui conduit parfois à parler de «
servitudes internationales »constituées sur ces parties de
territoire.
De façon générale, l'appartenance d'un
espace au territoire de l'Etat, si elle modifie le type de compétence
qu'il y exerce, ne lui vaut pas nécessairement un capital de pouvoir
important ; au contraire celui-ci ne cesse de s'amenuiser à mesure qu'on
s'éloigne des espaces territoriaux « purs » vers les «
espaces d'intérêt international », et notamment vers ceux qui
se trouvent à la périphérie du territoire
étatique.
I.2. Pouvoirs sur le territoire-chose
L'Etat tire de son dominium et de son imperium le pouvoir de
déterminer le régime foncier des éléments de son
territoire. Il peut soit faire de l'ensemble de l'espace territorial le domaine
de l'Etat, soit organiser un régime d'appropriation privée
permettant de constituer des situations juridiques de propriétaires au
profit des particuliers ; c'est là un choix politique interne auquel le
droit international général est indifférent. C'est la
raison d'être de l'article 34 de l'actuelle constitution.
2.1. Régime de la propriété
privée
Dans les parties du territoire sur lesquelles des droits de
propriété sont constitués dans le chef de particuliers,
notamment étrangers, ils trouvent leur base dans le droit public interne
et, on le sait, l'Etat peut toujours y porter atteinte en vertu de son pouvoir
éminent, à moins qu'il se le soit internationalement interdit.
2.2. Régime de la domanialité
Dans les parties qui appartiennent à son domaine, il
est loisible à l'Etat, au moins au regard du droit international, de
s'en réserver l'exploitation, ou au contraire d'accorder à des
particuliers, notamment étrangers, un accès aux ressources
qu'elles renferment, des conditions qu'il détermine librement et qu'il
peut modifier de même, sous réserve bien sur d'engagements
internationaux contraires.
Des formules très variées peuvent être
imaginées, notamment pour l'exploitation des ressources vivantes de la
mer et des ressources minérales, terrestres et marines, dans la seule
limite du principe de « souveraineté permanente de l'État
sur ses ressources naturelles ».(supra, section 1ère).
La différence essentielle qui distingue
souveraineté et domanialité se situe dans la nature juridique du
territoire. Mais comment se définie le territoire ? On appelle «
territoire », l'ensemble des espaces sur lesquels un Etat particulier
dispose d'un dominium exclusif et dans lesquels il dispose, en principe sur les
sujets internes, d'un imperium exclusif ou concurrent, que leur rattachement
spatial suffit à fonder. Ces pouvoirs résultent d'un titre
légal comportant l'appropriation de l'espace par l'Etat.
En droit international comme en droit interne, en droit public
comme en droit privé, tout espace peut être
appréhendé de deux manières, comme étendue et comme
chose, et se prête respectivement à deux sortes de pouvoirs,
personnels et réels. C'est de cette distinction fondamentale qu'on doit
partir pour identifier les deux genres entre lesquels se répartit
l'espace.
1°L'espace comme étendue :
A ce titre il s'entend comme, un espace lieu d'exercice d'un
imperium. La première fonction de la division de l'espace est de :
offrir un critère qui permette de déterminer en quels lieux un
Etat peut et en quels lieu il ne peut pas déployer sur une personne, un
objet, une situation, ..., des pouvoirs dont la base légale se trouve
dans sa compétence sur le site de l'être qu'il veut soumettre
à ses normes ou à qui il entend les appliquer. Les pouvoirs que
les uns et les autres peuvent éventuellement détenir ici ou
là sont donc des pouvoirs « personnels », que leurs titulaires
exercent non pas sur l'espace lui-même mais dans l'espace , à
l'égard des personnes soumises à leurs normes et à leurs
opérations d'exécution. Ils se rattachent à l'imperium des
Etats, c'est à dire à leur autorité sur les sujets
internes soumis à leurs
compétence, et appartiennent par là à une
forme de relation légale que le droit privé ignore et qui est
propre au droit public, interne et international.
Toujours comme étendue, il s'entend comme un imperium
et appropriation de l'espace. Parce qu'ils sont personnels, de tels pouvoirs ne
supposent pas nécessairement que l'Etat ait sur l'espace où il
les exercent un titre légal « réel », parent de la
propriété privée ou de la domanialité publique et
comportant une appropriation. A vraie dire, l'espace étendue ne s'y
préte pas parce qu'il n'y a rien à s'approprier :
l'étendue est abstraite elle n'a pas plus de consistance
matérielle que le « ressort » d'un organe administratif ou
d'un tribunal, et les mots d' « appropriation territoriale » dans ce
premier sens ne sont qu'une métaphore destinée à exprimer
la volonté de l'Etat d'exercer, dans les lieux qu'il revendique comme
propres, des pouvoirs exclusifs et en général moins
étroitement encadrés par le droit international, qui lui sont
refusés dans les espaces qui ne lui appartiennent pas. Mais même
dans ces derniers, on le sait, l'Etat dispose sur les personnes de pouvoirs
fondés sur une compétence extraterritoriale ; c'est bien dire que
leur existence, sinon leurs degrés et leurs modalités d'exercice,
ne dépend en aucune manière d'un titre d'appropriation.
D'ailleurs, quoique ce soit exceptionnel, la compétence
territoriale elle-même peut être reconnue à un Etat dans un
espace qui n'est pas proprement le sien et sur lequel il n'a pas de «
titre » territorial.
2° L'espace comme chose
Il s'entend comme espace, objet d'un dominium. Mais les
espaces peuvent être aussi envisagés dans une perspective, qui
nous est jusqu'à présent inconnue parce qu'elle ne concerne pas
l'autorité sur les personnes mais la possession des choses.
L'étendue abstraite et immatérielle qu'on avait en vue
jusqu'à maintenant cède ici la place à un objet concret,
fait de matière et sur lequel peuvent être constitués des
« pouvoirs réels », ceux qu'exerce un sujet de droit sur une
chose, qui en font un bien et qui, contrairement aux précédents,
ne sont pas propres au droit public.
Des tels pouvoirs sont reconnus à l'Etat dans l'ordre
sous les espèces de la domanialité, statut des choses
correspondant dans la sphère publique au statut de
propriété dans la sphère privée : pouvoirs
domaniaux, ou dominium, qui ne comportent pas de relation personnelle entre
leur détenteur et d'autres personnes comme le fait l'imperium, mais
seulement un rapport d'appartenance entre une chose et son détenteur,
objectivement opposable aux autres personnes. Or des tels pouvoirs sont aussi
reconnus à l'Etat dans l'ordre international, mais seulement sur son
« territoire », et c'est pourquoi la question de l'appropriation,
encore relativement secondaire quand il s'agit de l'espace étendue,
passe au premier plan dans le cas de l'espace-chose.
Toujours entendu de l'espace chose, dominium et appropriation
de l'espace : - L'espace78 est à la fois une chose et le
contenant d'autres choses, les fruits et les produits ; l'une comme les autres
peuvent faire l'objet de deux types de statut, d'appropriation ou de non
appropriation. S'agissant d'abord de l'espace lui-même, son appropriation
par un Etat en fait un élément de son « territoire » et
lui confère les pouvoirs domaniaux internationaux qui sont
afférents à cette qualité ; en particulier il lui
appartiendra d'en user pour déterminer le statut interne, privé
ou public des fonds appartenant à son territoire ; mais c'est dans
l'exercice de son imperium qu'il fixera les conditions d'accès à
ceux de ses fonds qu'il maintiendra dans son domaine et dont il lui
appartiendra de déterminer le mode d'exploitation.
Si au contraire l'espace n'est pas incorporé au
territoire d'un État, c'est qu'il n'est pas légalement
appropriable. En effet, on le verra, aucun de ces espaces n'a plus aujourd'hui
le statut de chose sans maître (res nullius), susceptible
d'appropriation, mais n'appartenant encore à personne ; tous sont des
choses communes (res communes) fermées à la constitution
de titres territoriaux mais aptes à être utilisées par
tous. Dans ces conditions, l'exercice d'un dominium79 est exclu mais
non celui de l'imperium des États qui, dans le cadre de leurs
compétences extraterritoriales, définissent les conditions
d'accès à l'espace international et à ses ressources.
78 Jean COMBACAUD, Droit International Public,
Paris, p.123.
79 Idem. p. 124.
Quant à ces dernières, qui tant qu'elles
reposent encore dans l'espace international, sont elles-mêmes des choses
sans maîtres (à moins qu'un statut international spécial ne
les aient soustraites à une exploitation sous un régime national
: cas de la zone internationale du fond des mers), leur statut une fois
qu'elles en auront été tirées dépendra lui aussi de
l'usage de leur imperium par les États de qui relèvent les
personnes dont l'activité en fait des fruits ou des produits.
L'art. 9 de la constitution nous permet de ne pas tergiverser
quant à la question de savoir le lieu où doit s'exercer cette
souveraineté de l'État. Il précise très clairement
que c'est sur le sol, sous sol, espace aérien, maritime et le plateau
continental. Or tous ces espaces constituent parfaitement le domaine de
l'État. Et donc on comprend par là, que la souveraineté de
l `État a une assise territoriale sur laquelle elle doit s'exercer.
A l'article 9 de la loi n° 73 - 021 du 20 juillet 1973
portant régime des biens, régime foncier et immobilier et
régime de sûretés, il est stipulé que « les
particuliers ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent sauf les
modifications établies par la loi ». Ce que nous dit aussi
l'article 34 de la constitution. Et « les biens qui n'appartiennent pas
à des particuliers ne sont administrés et ne peuvent être
aliénés que dans les formes et suivant les règles qui leur
sont particulières ».
Cet article distingue en effet, les biens appartenant aux
particuliers et les biens n'appartenant pas à des particuliers.
Mais la doctrine distingue les biens appartenant aux
particuliers et ceux du domaine de l'État80. Les biens
domaniaux sont ceux qui appartiennent à la puissance
publique81, c'est-à-dire à l'État ou à
ses subdivisions.
II. Rapport entre la Souveraineté permanente et
le domaine éminent du droit du droit médiéval.
80 Jean COMBACAUD, op. cit., p. 125.
81 Ibidem.
La notion de la souveraineté permanente se ressemble
à bien d'égards à celle du domaine
éminent82, à tel point que leur distinction n'est pas
toujours aisée à établir. On se rappellera que dans
l'ancien droit, il était reconnu aux seigneurs un pouvoir auquel le
droit de propriété était subordonné et qui
s'étendait à l'ensemble des biens fonds situés dans les
limites de son territoire. C'est ce qu'on appelle : domaine éminent.
Le domaine éminent du prince pouvait être
défini comme le droit dont était investie l'autorité
souveraine d'affecter, par priorité, les immeubles l'usage commun, de
régler le régime des biens immeubles publics ou privés,
d'organiser et de limiter l'usage de ces biens d'intérêt
général et enfin de recueillir sous forme d'impôts une
partie des fruits que produisent les biens. La notion de domaine éminent
englobait dès lors l'ensemble des droits directs que le prince
exerçait sur les terres faisant partie de sa seigneurie.
Compte tenu du domaine éminent, la
propriété immobilière privée n'existait que dans
les limites prévues et selon les modalités
déterminées par l'autorité publique de plus, elle ne
s'étendait pas au delà des avantages matériels qu'un
particulier peut retirer de la propriété exclusive d'un fonds.
Elle ne conférait au propriétaire aucun droit de nature politique
mais seulement des droits d'ordre économique, c'est ce qui va s'appeler
le domaine utile.
Le domaine utile ou domaine de propriété pouvait
donc se définir comme le droit privatif d'user et de disposer d'un
immeuble ainsi que de recueillir tous les fruits de nature économique
qu'il peut produire dans les limites compatibles avec l'exercice du domaine
éminent. Bien qu'abolie par la Révolution Française, le
régime foncier de l'ancien droit ne paraît plus aujourd'hui
étrange. Il est évident cependant, que la reforme a
changé.
C'est ici que se révèle plus les points de
ressemblances entre la souveraineté permanente et Domaine éminent
du droit médiéval. Car,
82 Séverin MUGANGU, Domaine de
l'État, urbanisme et aménagement du territoire, syllabus,
inédit, L1 Droit, UCB, 1999-2000, p.69
le titulaire du domaine éminent n'est plus le prince
mais l'État qui est aussi titulaire de la souveraineté
permanente. L'exercice de ce pouvoir ne se concrétise plus de la
méme manière, mais il s'agit toujours du méme pouvoir
auquel le Domaine de propriété est subordonné. Cette
survivance du domaine éminent n'est pas en définitive
fondamentalement différent du système mis en place dans les pays
où le sol est nationalisé, comme la R.D.C., l'ex-URSS,... Dans
ces pays, la propriété privée du sol a disparu. Dans les
pays qui n'ont pas nationalisé le sol, les particuliers ne sont
titulaires que du domaine utile. Que ce domaine utile résulte d'une
concession perpétuelle ou d'un droit de propriété qui n'a
plus d'absolue que de nom, cela change peu, nous révèle le
professeur MUGANGU S.
§ 3. COMPOSITION
Le domaine de l'État comprend le domaine public et le
domaine privé. La distinction de deux domaines est
caractérisée par son origine moderne et doctrinale étant
donné qu'elle n'existait pas sous l'Ancien Régime
français, sous la révolution. L'ancien régime connaissait
un régime de la couronne, dont le roi en qualité de souverain
était le propriétaire et qui formait un tout
unique83.
En ce qui concerne la RDC, l'époque léopoldienne
fut caractérisée par une domanialité particulière.
Pour le roi, Léopold II, toutes les terres congolaises font partie du
domaine et ce domaine royal est une propriété privée.
Plusieurs décrets interviendront pour affirmer ce double
caractère84.
Le domaine privé comme le domaine publique
appartiennent à l'État ou à telle autre
collectivité publique mais leur distinction reste fondamentale,
constitue la première base de la théorie du domaine et cette
distinction se pose sur le caractère de nécessité.
I. LE DOMAINE PUBLIC
83 Séverin MUGANGU, op. cit., p. 70.
84 Thomas LWANGO, Cours de Droit civil des biens,
G2 Droit, UCB, 1996 - 1997, inédit.
L'article 10 de la loi précédemment citée
souligne que »les biens de l'État qui sont affectés à
un usage ou à un service public sont hors commerce, tant qu'ils ne sont
pas régulièrement désaffectés ».
Le domaine public renferme la catégorie la plus
importante des biens hors commerce ; des biens appartenant à la nation
et qui de plus ne pourraient point appartenir à des particuliers. Cet
article range dans le domaine public non seulement les biens qui sont
affectés à un usage public, mais encore ceux qui sont
affectés à un service public et c'est sans distinguer entre les
meubles et les immeubles. Cette disposition présente donc un
intérét évident lorsqu'elle dispose que les biens du
domaine public sont comme tels hors commerce, c'est-à-dire
inaliénable et imprescriptible. Ces biens étant en effet
employés à un service d'intérêt
général.
I.1. Composition
En ce qui concerne le critère de la domanialité
publique M.A. FLAMME (85) suggère entre autre :
1. Le domaine public comprend tous les biens qui ne sont pas
susceptibles d'appropriation.
2. Le domaine public ne comprend que les biens mis hors commerce
par la loi.
L'indisponibilité étant une exception, ainsi
pour avoir la qualification des biens publics, les biens doivent être
expressément ou moyennant un texte légal mis hors du commerce.
Toutefois, la formule de l'arrêt de la cour de cassation française
du 2 octobre 1924 est importante pour des raisons à la fois logiques et
pratiques parce qu'elle fournit une excellente raison de mise hors commerce
méme en l'absence d'un texte.
A travers cette formulation, les éléments suivants
sont mis en évidence : - le domaine public suppose une affectation
-cette affectation doit émaner des pouvoirs publics (un
simple particulier ne pouvant, en principe, mettre un bien hors commerce).
85 M.A. FLAMME, Droit administratif, T II
n° 413-432, Bruxelles, Brûlant, 1989, cité par
François Tulkens ; « Le domaine public et la protection de
l'environnement » in Quel avenir pour le droit de l'environnement,
Bruxelles, BURPRESS, 1995, p. 136.
-Cette affectation consiste à livrer une chose à
l'usage du public, à la faire échapper à l'emprise des
particuliers. A cet effet, un texte n'est pas nécessaire, la destination
de la chose emporte pareille conséquence.
3. Le domaine public se compose des biens consacrés par
l'autorité compétente à l'usage du public.
4. Le domaine public comprend les biens affectés à
un service public. Toutefois, il est reproché à ce critère
d'être à la fois trop large et trop étroit. Large par ce
que d'une part il n'y aurait aucun intérêt à rendre
imprescriptible, par exemple, les locaux d'un ministère ou d'une maison
communale lorsque ceux-ci sont simplement loués par l'Etat, d'autre
part, parce que la notion du service public est indéfinie et rend le
critère peu maniable et décisive. Trop étroit parce que ce
critère tend à éliminer du domaine public les biens
affectés à l'usage du public en ne prenant en compte que les
biens affectés au service public de l'Etat.
5. Le domaine public comprend tous les biens affectés
à l'usage public et a pour l'autorité compétente
l'utilité générale86.
Par ailleurs les éléments du domaine public peuvent
être classés comme suite :
a. Le domaine public maritime, fluvial et
lacustre ; les rivages de la mer appartiennent indiscutablement au domaine
public. Et la question se pose en ce qui concerne les eaux territoriales, la
mer territoriale et la mer adjacente aux côtes sur laquelle l'Etat
riverain peut, du rivage même, employer la force armée et exercer
ainsi un pouvoir qui lui est nécessaire pour ce territoire et ses
côtes, assurer la sécurité de ses habitants et sauvegarder
ses intérêts fluviaux et commerciaux.
- les lits de tout lac et de celui de tout cours d' eau
navigable, flottable ou non, font aussi partie du domaine public de l'Etat
conformément aux prescrits de la loi du 09 août 1893.
- Les ouvrages d'art accessoires tels les écluses, les
barrages et les élévateurs électriques.
- les bords des lacs, rivières, fleuves navigables ou
flottables appartiennent à l'Etat.
86 Séverin MUGANGU, Cours de droit civil des
biens, syllabus, inédit, G2 Droit, UCB, 1998 - 1999, p. 27.
- les ports publics maritimes et fluviaux, les bateaux des
commissaires maritimes et du service hydrographique, ~
b. Les Voies de communication par terre et par air et leurs
dépendances - les routes publiques, qui sont classées
d'intérêt général.
- les chemins de fer d'intérêt
général font partie du domaine public. Non seulement les voies
mais toutes les dépenses nécessaires à l' exploitation du
chemin de fer, appareil d'aiguillage et de signalisation, quais et places de
stationnement, les magasins, les ateliers, les immeubles affectés au
logement du personnel dont la présence permanente près de la voie
est nécessaire.
- Dans les circonscriptions urbaines, les avenues et les
monuments qui les ornent, ~
- Les plaines d' aviation ainsi que les constructions y
afférentes ; aérogares, hangars... et les habitations
réservées au personnel sont situés sur le terrain d'
aviation.
c. Le domaine public militaire : La législation
congolaise, en la matière, suit les principes du droit Belge. Et
l'article 540 du code civil Belge consacre l` énumération
suivante :
- Fossés, remparts, places de guerre et forteresse,
l'art. 541 ajoute que les terrains et les fortifications qui n' ont pas
été désaffectées continuent à appartenir au
domaine public de l'Etat.
- les routes et les chemins de fer stratégiques.
- les immeubles affectés au service de l'armée
mais constituant les éléments de défense.
-Les objets mobiliers qui sont nécessairement
attachés à la défense nationale (ex : Grenade, fusil,
...).
d. Les installations et bâtiments administratifs : La
jurisprudence belge et française n'intègre que les immeubles
affectés à l'usage immédiat et direct du public.
Néanmoins, il résulte du rapport du conseil colonial qu'en
étendant la définition du domaine public aux biens
affectés au service public, le législateur a voulu y faire entrer
tous les biens employés par l'Etat à une utilité publique,
tels les archives de l'administration publique et les bureaux.
Pour le Professeur MUGANGU, la conception du droit congolais
est donc large et aucun doute n'est donc possible pour les bureaux aux
différents échelons
de l'administration, les hôpitaux et labos, écoles,
prisons, palais de justice, cimetières, postes et parcs.
e. Les mines : Sous l'E.I.C., l'article 1 du
décret du 8 juin 1888 disposait que «l' aliénation par
l'Etat des terres qui lui appartiennent, et l'enregistrement des terres
effectués conformément aux dispositions sur le régime
foncier, ne confèrent aux acquéreurs et aux propriétaires
de ces terres aucun droit de propriété ni d'exploitation sur les
richesses minérales que le sol peut renfermer. Ces richesses
minérales demeurent la propriété de l'Etat. La
législation minière de 1937 dispose que les mines constituent une
propriété distincte de la propriété du sol et
appartient à la colonie (l'Etat).
Au Congo, la mine est inaliénable. Il n'y a que la
concession qui peut faire l'objet des transactions privées. Et c'est
dans la législation actuelle que l'affectation des mines du domaine
public est manifeste. La loi dite « BAKAJIKA » disposant que le sol
et le sous-sol (mines) sont la propriété exclusive,
inaliénable et imprescriptible de l'Etat » (87).
I.2. Protection juridique du domaine public
Nous allons souligner l'inaliénable et
l'imprescriptibilité d'une part et la protection pénale d'autre
part.
2.1. L'inaliénabilité des biens du
domaine public de l'état
Il ressort des dispositions, l'article 10 de la loi dite
« foncière » que « les biens de l'Etat qui sont
affectés à l'usage ou à un service public sont hors
commerce ».
Le régime juridique applicable au domaine public
comprend deux principes essentiels parce que : le domaine public est
inaliénable, en conséquence imprescriptible et non susceptible
d'expropriation pour cause d'utilité publique.
1°. Le domaine public est
inaliénable
87 Séverin MUGANGU, op. cit.,
inédit, p.23.
En effet, les biens du domaine public ne peuvent être
vendus, ni échangés. Leur vente serait nulle de plein droit. Le
principe «possession vaut titre» n'est pas applicable aux choses
mobilières appartenant au domaine public. Même un acquéreur
de bonne foi peut être contraint à tout moment de les restituer. A
cet effet, méme si l'objet a été acheté dans une
vente publique, l'acquéreur devra restituer sans prétendre au
remboursement du prix. Ceci apparaît comme une conséquence du fait
que « les biens du domaine public appartiennent à l'Etat, ainsi un
particulier ne pourrait soit par titre, soit par usucapion acquérir des
droits sur eux.
En effet, en attribuant à un particulier le droit
d'user de tout ou partie de la route, la destination de cette route ne
serait-elle pas mise en péril ? ~ les biens du domaine public ne peuvent
non plus être loués» 88.
« Le domaine public ne peut être grevé de
servitude, il ne peut non plus être soumis à la servitude de
passage. De méme l'incorporation d'un bien dans le domaine public fait
tomber toutes les servitudes dont le bien serait affecté et contraire
à sa destinée.
Quant à la mitoyenneté, le particulier ne pourra
rendre mitoyen le mur continu de l'immeuble domanial, mais l'Etat pourra lui
ériger une mitoyenneté. Les biens du domaine public ne peuvent
être hypothéqués.
2°. Le domaine public est
imprescriptible.
L'article 620 du code civil congolais livre III dispose « on
ne peut prescrire le domaine des choses qui ne sont point dans le commerce
».
2.2. Protection pénale du domaine public
La protection pénale du domaine public est assortie des
sanctions spéciales, originales ; elle est assurée par une police
spéciale, la police de conservation qui prévoit les
contraventions de voirie.
1°La police de conservation89
C'est une police spéciale qui renferme l'ensemble de
dispositions législatives et régulières destinées
à préserver l'intégrité matérielle de
certaines dépendances du domaine public et l'usage auquel elles sont
affectées.
Il convient de distinguer la police de conservation des
mesures administratives destinées à assurer la conservation du
domaine public mais ne constituent pas nécessairement des mesures de
conservation.
Seules méritent cette qualification celles comportant
des sanctions pénales particulièrement prévues par un
texte.
L'administration dispose donc, d'un pouvoir de plein droit de
conservation qui lui permet d'édicter toutes les mesures
réglementaires ou individuelles pour préserver
l'intégrité de l'ensemble des biens faisant partie du domaine
public.
La police de conservation ne peut s'exercer qu'à
l'égard des biens domaniaux qui bénéficient de la
protection pénale du régime de la contravention des voiries. En
outre, la police de conservation crée des obligations à la charge
des autorités administratives chargées de la mettre en oeuvre.
Ces autorités sont notamment tenues de faire usage des pouvoirs que leur
confèrent les textes pour faire cesser la situation
irrégulière qui compromettait l'usage normal du domaine
public.
2°La police de la conservation se distingue
également de la police d'ordre public. Cette dernière
étant définie comme le pouvoir reconnu à certaines
autorités administratives de prendre des mesures assorties des sanctions
pénales afin d'assurer la sécurité, la tranquillité
et la salubrité publique. Cette police s'exerce sur l'ensemble des
dépendances du domaine public et a été confiée soit
à des autorités de police générale, soit à
des autorités de police spéciale.
La distinction entre la police de la conservation et la police
d'ordre public apparaît plus nettement au plan des sanctions applicables.
Les infractions à la police de conservation constituent les
contraventions des voiries alors que les violations de règlement de
police d'ordre public sont de
contraventions de police sanctionnées par le code
pénal à défaut des dispositions spéciales.
La contravention de voirie est un fait susceptible de
compromettre l'intégrité matérielle des biens du domaine
public ou de nuire à l'usage auquel ces biens sont destinés. Et
elle peut être de grande ou de petite voirie
II. LE DOMAINE PRIVE DE L'ETAT
Celui-ci ne se distingue des propriétés
particulières que par la personne du propriétaire et par
certaines règles protectrices que l'importance de cette personne impose.
Au demeurant, le domaine privé de l'Etat est soumis aux règles
générales de la propriété90.
> Composition du domaine privé de l'Etat
Il se compose principalement des biens 91 suivants
:
1. Toutes les terres qui ne sont pas affectés à un
usage public ou à un service public.
2. Les immeubles, notamment ceux destinés au personnel de
l'Etat.
3. Titres et actions représentant les emprunts des
pouvoirs publics et les participations dans le capital des
sociétés.
4. Les biens sans maître au sens de l'article 12 de la
loi du 20 juillet 1973. Le Professeur MUGANGU souligne que le principe de
l'article 12 a été repris de l'article 529 du C.C. Belge, en
droit belge, les biens sans maître visent exclusivement les immeubles. Il
s'agit principalement des immeubles abandonnés, enregistrés aux
noms des propriétaires disparus ou d'une personne morale dissoute. Les
immeubles en déshérence sont également des biens sans
maîtres au sens de l'article 12 de la loi du 20 juillet 1973.
5. Les choses perdues ou abandonnées92,
épaves : toute chose perdue ou égarée dont on ne
connaît pas le propriétaire. Aucune législation, cependant,
n'a encore traité des épaves fluviales ou maritimes ; quant aux
choses abandonnées et aux épaves terrestres,
l'arrêté ministériel du 16 juin
90 Séverin MUGANGU, op.cit,
inédit, pp. 20 à 43.
91 Gaston KALAMABAY, op. cit., p. 62.
92 Séverin MUGANGU., op. cit, p.128.
1926 prévoit la vente aux enchères un an
après leur remise à l'administrateur territorial.
6. Les biens acquis par expropriation pour cause
d'utilité publique. Ces biens tombent dans le domaine privé avant
d'être affectés dans le domaine public.
7. Les biens obtenus au moyen des modes habituels
d'acquérir la propriété. La composition du domaine
privé n'est pas limitativement définie par la loi «
foncière » (loi du 20 juillet 1973), comme celle du domaine public
n'est qu'exemplative93.
III. MODES D'ACQUISITION DES BIENS DOMANIAUX
Pour les Etats comme pour les particuliers, point de
propriété sans acquisition. Mais les modes d'acquérir les
biens nationaux sont nombreux et différent aussi pour la plupart des
modes d'acquisition du droit commun. Ces modes sont :
- la nationalisation (qui est prévu aussi par la
Résolution 1803);
- l'expropriation pour cause d'utilité publique (ce mode
l'est également); - l'acquisition à titre onéreux ;
- la déshérence successorale ;
- les choses perdues et sans maître ;
- confiscations spéciales ;
- aides et dons ;
- biens vacants ;
- l'usucapion.
IV. PARTICULARITE DES BIENS DU DOMAINE
Les biens du domaine public sont hors commerce et tiennent
leur statut en raison du fait qu'ils sont affectés à l'usage
public ou à un service public et pour cette raison, ils sont
inaliénables, incessibles et insaisissables. « En principe, il ne
sont pas susceptibles de transmission puisque une personne de droit public est
censée ne jamais disparaître ou mourir »94.
93 Thomas LWANGO, Cours de Droit civil des
biens, inédit, UCB, G2 Droit, 1996-1997, p. 62.
94 Idem. p. 63.
« Toute fois ils peuvent faire objet d'une concession
réglementée par le droit administratif, c'est le cas des
autorisations de voirie et des permis de stationnement95 ».
Il y a lieu de mentionner les aisances de voirie et la
possibilité laissée au propriétaire riverain de la voie
publique de laisser couler les eaux de son toit sur la voie publique.
Ce qui implique que la puissance publique peut accorder des
droits « très limités96 » sur le domaine
public.
Les biens du domaine privé sont dans le commerce, cessible
mais : - ils demeurent insaisissables ;
- leur cession n'est jamais à titre gratuit ;
- cette cession est toujours soumise à des
formalités.
> Maintien en vigueur du régime
colonial
L'article 2 de la loi fondamentale dispose : « les lois,
décrets et ordonnances législatives, leurs mesures
d'exécution ainsi que toutes les dispositions réglementaires
existantes au 30 juin 1960 restent en vigueur tant qu'ils ne seront
expressément abrogés.
Ni le Pouvoir central, ni le Pouvoir Provincial n'ont pris,
pendant la période allant du 30 juin 1960 au 1er août
1964, un texte abrogeant les textes coloniaux relatifs aux régimes
fonciers.
Le 1er aoüt 1964, la RDC a une nouvelle
constitution. Et l'article 43 en son alinéa 4 dispose que « ~une
loi nationale réglera souverainement le régime juridique des
cessions et des concessions foncières faites avant le 30 juin 1960
» ; lors du colloque du « foncier et minier » tenu à
Élisabethville du 10 au 18 novembre 1964, le ministre des terres, mines
et énergie du gouvernement central, concluant qu'il ne semblait pas
douteux q'une réforme du régime foncier soit souhaitable et que
cette réforme constitue une des tâches primordiales du
gouvernement central ~ » et imprescriptible de l'Etat ».
95 Séverin MUGANGU, op.cit,
inédit, pp. 21 a 29.
96 Séverin MUGANGU, op.cit,
inédit, pp. 21 a 29.
Section 5ème : DE LA DISTINCTION ENTRE
SUZERAINETE ET
SOUVERAINETE PERMANENTE
§ 1. Notion :
Le suzerain était celui qui, ayant
conféré le fief, avait droit à l'aide du vassal. Du reste,
le même seigneur pouvait être suzerain pour certains fiefs (ceux
qu'il avait conférés), et vassal pour d'autres (ceux qu'il avait
reçus).
Ainsi, les rois de France et d'Angleterre ont eu à
diverses reprises des liens de vassalité croisés. Ce type de
relations, au départ limitées à l'aristocratie
guerrière, où le roi, suzerain des suzerains, attribue des fiefs
à ses fidèles pour protéger plus efficacement son domaine,
s'est étendu à l'ensemble de la société, les serfs,
personnes attachées à la terre du seigneur, ayant un rapport de
vassal à suzerain avec leur seigneur. La féodalité
désigne alors une société caractérisée par
la hiérarchie des personnes et des terres, le morcellement des terres et
de l'autorité, la domination de la classe combattante.
§ 2. Divergences entre Suzeraineté et
souveraineté permanente
La notion de souveraineté permanente, consacrée
par l'art.9 et sous analyse ici, diffère à bien d'égards
de celle de la suzeraineté, par les traits ci-après :
- L'expression de souveraineté, en tant qu'attribut
essentiel et caractéristique de l'Etat ne peut être
partagée, divisée ou détenue par aucune autre personne ni
morale ni physique, au sein d'un méme Etat. C'est le caractère
exclusif de la souveraineté que nous avons évoqué
supra97.
- La souveraineté, exprimée par l'expression
suzeraineté est susceptible d'appropriation privative, car dans la
féodalité, il y avait plusieurs souverains ou suzerains
subordonnés tous au roi suzerain des suzerains, qui leur assurait
protection. C'est une qualité détenue à la fois par le roi
et ses petits sujets ou seigneur, c'est donc un attribut personnel et non
étatique, comme c'est le cas
97 Nous allons nous référer à la
1ère section de ce chapitre, sur les caractères de la
souveraineté.
dans l'autre hypothèse ; ce qui ne peut en aucun cas se
concevoir dans la souveraineté permanente. Seul et uniquement l'Etat,
peut être souverain. C'est un attribut essentiel de l'Etat qui permet de
le caractériser et de l'identifier des autres sujets de
droit.
Toujours dans ce cadre, les suzerains avaient chacun sa terre
et rendaient des comptes en payant même des rançons au suzerain
des suzerains, roi. Cette pratique est incompatible avec la notion de
souveraineté qui est un pouvoir de domination suprême, au dessus
de tout autre pouvoir. Le souverain ne peut ni dépendre de qui que ce
soit, ni rendre de comptes à personne, sinon qu'il n'est lié que
par sa propre volonté98, et donc à sa propre loi.
Section 6ème : SOUVERAINETE PERMANENTE ET
SES
NOTIONS VOISINES
Le principe de la souveraineté permanente entretient
des rapports étroits avec certains autres principes importants du droit
international avec lesquels il faut se garder de faire toute confusion. Il
s'agit : du principe de non ingérence99 dans les affaires
intérieur d'un Etat, droit des peuples à disposer d'eux
mémes (§1) et du patrimoine commun de l'humanité (§2).
Dans les lignes qui suivent, nous nous proposons de confronter chacun d'eux
avec le principe de la souveraineté permanente. C'est aussi le moment
privilégié de distinguer l'article 9 de l'article 34 de la
constitution qui consacre le droit à la propriété
privée dans cette constitution(§3).
§ 1. Souveraineté permanente et Droit du peuple
à disposer de lui-même
La question à résoudre ici, consiste à
savoir s'il existe des liens juridiques à établir entre
souveraineté économique et droit des peuples ?
En effet, les résolutions relatives à la
souveraineté permanente sur les ressources naturelles100
parlent indistinctement du « droit des peuples », des « nations
», ou du droit des « Etats », ou encore du « droit des
98 Pierre d'ARGENT, Droit International Public,
inédits, Bukavu, G3Droit/UCB, 2003-2004
99 Claude EMMANUELLI et alii. op. cit. p.
68.
100 Dominique ROSENBERG, op. cit. p.330.
pays insuffisamment développés »de disposer
librement de leurs richesses naturelles. Ces expressions se rencontrent parfois
successivement dans le méme texte (Rés.626 (VII) du
21décembre1952). L'emploi simultané de ces termes ne
résulte cependant pas d'une confusion de langage. Il vient de la
conception méme que l'on se fait du droit de souveraineté.
D'abord comme une application directe du droit de peuples à disposer
d'eux-mêmes, ensuite un droit appartenant aux Etats.
I. Une application directe de droit des peuples
à disposer d'eux-mêmes
En effet, la souveraineté sur les ressources naturelles
est une application directe du droit de peuples à disposer
d'eux-mêmes. C'est de ce postulat qu'il faut partir si l'on veut
comprendre pourquoi les résolutions désignent souvent les peuples
ou les nations comme titulaire de la souveraineté.
On touche ici à un domaine101 dans lequel la
susceptibilité des pays en développement est très
ombrageuse. Dans son acception classique le droit de peuples à disposer
d'eux mémes n'avait pas de portée juridique. Il ne comportait pas
non plus de considérations économiques. L'évolution qui
s'est produite depuis 1945 a fondamentalement transformé les
données du problème. On admet aujourd'hui que ce principe a
pénétré dans le droit positif102 et que tout
peuple soumis à une domination étrangère peut revendiquer
le droit de s'en libérer. Par ailleurs, l'autodétermination a
débordée du domaine purement politique dans lequel elle se
cantonnait et elle s'étend désormais à toute la
sphère de la vie économique.
Cette évolution trouve son fondement dans les articles
1§2 et 55 de la charte des Nations Unies ou le droit de peuple à
disposer d'eux mémes se trouve présenter comme un but que doivent
viser les Nations Unies. Ce n'est évidemment pas cette
formulation103 qui permet de reconnaître un droit au droit
d'autodétermination un caractère juridique, mais la pratique
subséquente de l'O.N.U. et des Etats membres en matière de
décolonisation. Abstraction
101 Dominique ROSENBERG, op. cit., p.331..
102 Ibidem.
103 Ibidem.
faite de quelques situations délicates comme celle qui
règne en Afrique Australe, on peut dire qu'à l'heure actuelle
presque tous les membres de l'O.N.U. reconnaissent le droit des territoires
coloniaux d'accéder à l'indépendance et de parfaire
celle-ci. C'est admettre par là le droit à la souveraineté
sur les ressources naturelles. Il existe donc un lien direct entre le droit des
peuples à disposer d'eux-mêmes et la souveraineté sur les
ressources naturelles. Ce lien apparaît dans des nombreuses
résolutions.
Dans la résolution 1314 (XIII) du 12 décembre
1958, il est dit expressément que le droit des peuples et des nations
à disposer d'eux-mêmes comprend un droit de souveraineté
permanente sur leurs richesses et leurs ressources naturelles. Cette
résolution visait les pactes internationaux relatifs aux droits de
l'homme, alors en voie d'élaboration. Depuis lors, ces pactes ont
été adoptés par l'Assemblée générale
(Rés.2200 (XXI) du 16 décembre 1966) et ils sont entrés en
vigueur au premier trimestre de 1976. Or, ils contiennent chacun un article
1er qui affirme que tous les peuples ont le droit de disposer d'eux
mémes et que pour pouvoir atteindre les fins qui découlent de ce
droit, c'est à dire déterminer librement leur statut politique et
assurer librement leur développement économique, social et
culturel, ils peuvent disposer souverainement de leurs richesses et de leurs
ressources naturelles. La résolution 1803(XVII) présente la
souveraineté sur les richesses naturelles comme un
«élément fondamental » du droit des peuples à
disposer d'euxmêmes.
Elle déclare en outre que le « droit de
souveraineté des peuples et des nations sur leurs richesses et leurs
ressources naturelles doit s'exercer dans l'intérêt du
développement national et du bien être de la
population104 de l'Etat intéressé » : ainsi au
droit des peuples s'ajoute aussi leur intérét. De son
coté, la 1ère C.N.U.C.E.D. a affirmé que tout
pays a le droit souverain de « de disposer librement de ses ressources
naturelles dans l'intérêt du développement
économique et du bien être de sa population ». Ces
affirmations
104 Guy
FEUER. et Hervé CASSAN, Op.
Cit. p. 235.
se retrouvent dans les textes ultérieurs, par exemple dans
la résolution 2692(XXV).
II. Un droit appartenant aux Etats
L'Assemblée générale et le conseil
économique et social ont toujours présenté, en même
temps, la souveraineté sur les ressources naturelles comme un droit
appartenant aux États (voir par exemple les rés.1515, 3202,
3281).
Il y a donc dualité de formulation et on pourrait alors
craindre la confusion ou l'ambiguïté. Mais que la double
référence à l'Etat colonisateur, politiquement elle
revenait à la population du territoire colonisé. On
procédait donc à une affirmation105 de type
conservatoire.
On réservait en quelque sorte, contre l'emprise des
métropoles et de leurs citoyens, les droits des peuples et des
territoires appelés à former un jour des Etats
indépendants. C'est ce qui explique que dans les textes plus
récents, notamment la déclaration du 1er mai 1974
Rés.3201(S-VI) et la charte des droits et devoirs économiques des
Etats, il ne soit plus question que du droit de souveraineté des Etats
sur leurs ressources naturelles.
On considère en effet, que la décolonisation est
pratiquement achevée et que le droit des peuples à disposer
d'eux-mêmes fait l'objet d'une reconnaissance quasi-universelle.
La construction s'éclaire ainsi d'elle-même. La
souveraineté sur les ressources naturelles se fonde sur le droit des
peuples à disposer d'euxmémes, comme tous les
éléments de l'indépendance nationale. Cette
indépendance s'incarne dans la souveraineté de l'Etat
autorité juridiquement constituée pour gérer les
intérêts de la population106. C'est donc l'Etat qui
est
apte à exercer toute action tendant à la
conquête ou à la récupération du contrôle sur
les richesses de la nation.
§ 2. Souveraineté permanente et patrimoine
commun de l'humanité
La prise en charge par le droit de l'idée
d'Humanité est plus ancienne qu'on ne le croit ordinairement. Les pays
du Tiers monde ont vite compris l'intérêt qu'il y avait pour eux
à se saisir de cette notion et à l'orienter dans le sens de leurs
objectifs. Pour eux, le patrimoine commun de l'Humanité doit jouer le
méme rôle que celui de la souveraineté économique
dans l'ordre interne. En effet, la volonté de ces pays est
d'empêcher que les pays industrialisés puissent exploiter à
leur seul profit des ressources et
richesses dont ils estiment devoir être les premiers. La
question à résoudre iciconsiste à savoir s'il
existe des liens juridiques à établir entre
souveraineté
économique et patrimoine commun de l'humanité.
En effet il désigne un ensemble de richesses et de ressources qui
appartiennent à l'humanité tout entière. Aucun
État, aucun autre sujet de droit international ou national ne peut en
revendiquer la propriété. C'est le point de discorde qui a
toujours opposé les pays du G8, plus particulièrement les
Etats-Unis, des autres pays en voie de développement. Cette
réalité se résume dans la proposition classique que la
souveraineté appartient au peuple et que c'est l'Etat qui l'exerce au
nom de ce dernier.
Si l'on a fait référence à la
souveraineté des peuples sur leurs ressources naturelles, notamment dans
les premières résolutions, c'est à la fois dans une
intention idéologique et parce qu'à l'époque, la
décolonisation n'étant pas achevée, des nombreuses
populations n'étaient pas encore
organisées en Etats indépendants. On entendait
donc marquer que sijuridiquement la souveraineté appartenait
encore à ses bénéficiaires. Dans
cette perspective, l'internationalisation positive que permet
l'affectation des ressources et richesses en question à
l'Humanité tout entière peut susciter, sur le plan collectif,
les mécanismes de contrôle107 allant dans le même
sens que
107 Guy FEUEUR et Hervé CASSAN, op. cit., p.
455.
ceux qu'ils ont institués à titre individuel sur
leur propre territoire. Il en est ainsi parce qu'aux yeux des pays en
développement, les fins de l'Humanité se confondent avec les
revendications du Tiers Monde.
En effet, si le procédé majoritaire ne peut,
à l'évidence engendrer des règles obligatoires dans
l'ordre international, il peut permettre une identification du plus grand
nombre à l'Humanité tout entière. Il résulte de
cela que la gestion108 des biens entrant dans le patrimoine commun
de l'Humanité s'opèrera selon le principe de répartition
équitable.
Cela signifie que l'affectation d'un bien à
l'Humanité implique inéluctablement l'octroi d'un traitement
différencié et plus favorable aux pays en
développement.
Cette notion109, on le sait, a été
invoquée dans des nombreuses enceintes internationales à propos
de questions telles que la technologie, l'alimentation, la culture. Elle
suscite, on le sait aussi, une méfiance de plus en plus grande de la
part des pays développés et c'est ce qui explique que sa mise en
oeuvre risque d'être fort aléatoire. Il est donc inutile d'y
insister davantage. On devra cependant se garder de sous-estimer les effets que
pourrait produire une telle notion, si elle devenait d'utilisation courante en
droit international du développement.
§ 3. La souveraineté permanente et l'article 34
de la constitution.
La souveraineté est un droit étatique, non
susceptible d'appropriation privative et ne peut être attribuée ou
exercée que par l'État, avons-nous dit, parlant de la comparaison
entre propriété et souveraineté. Nous avons
également noté que cet article 9 sous examen ici, ne s'opposait
en rien à l'article 53 qui consacre l'exclusivité et
l'inaliénabilité de la propriété foncière de
l'État congolais. Bien au contraire il le complète. Le fait pour
l'Etat congolais d'exercer sa souveraineté permanente n'entame en rien
l'exercice, ni la jouissance ou la détention du droit de
propriété privée dont l'article 34 en
fixe les modalités. D'où, à notre humble
avis, les articles 9 et 34 se complètent plus qu'ils ne se contredisent.
Pour bien s'en rendre compte, il suffit d'analyser les libellés de
chacun d'eux pour mieux s'en convaincre.
L'article 34 dispose : « La propriété
privée est sacrée. L'État garantit le droit à la
propriété individuelle ou collective, acquis conformément
à la loi ou à la coutume. Il encourage et veille à la
sécurité des investissements privés, d'utilité
publique et moyennant une juste et préalable indemnité
octroyée dans les conditions fixées par la loi. Nul ne peut
être saisi en ses biens qu'en vertu d'une décision prise par une
autorité judiciaire compétente». Dans ces libellés,
il résulte que deux (notions essentielles) droits fondamentaux se
trouvent consacrés par le présent article, à savoir :
1°le droit à la propriété privée
ou collective et
2°l'expropriation pour cause d'utilité publique.
Cette propriété privée qui est
protégée par l'État ne s'applique pas au sol, au sous -
sol, mines,... qui sont la propriété inaliénable et
exclusive de l'État congolais. L'article 34 de la constitution ne
s'applique pas aux biens domaniaux, parce qu'ils sont hors commerce,
imprescriptibles et inaliénables. Ils ne peuvent non plus faire objet
d'expropriation, dont la notion est évoquée par l'article 34.
Comme pour la souveraineté permanente, la propriété
foncière aussi est un droit exclusif et propre à l'État
Congolais. Il ne se conçoit que dans l'État et ne peut être
détenu que par lui.
Pour sa part, le principe de la souveraineté permanente
consacré par l'article 9, souligne aussi en son alinéa 4 la
protection de ces 2 droits fondamentaux, à savoir le droit à la
propriété privée, l'investissement et l'expropriation pour
cause d'utilité publique.
Retenons donc que le droit à la propriété
privée reste maintenu sous la présente constitution autant que
celui de la propriété foncière. Pour des plus amples
détails de cette matière, on pourra se référer au
chapitre deuxième du présent travail qui traite du contenu de
l'article 34.
CONCLUSION PARTIELLE
Sur base de l'analyse que nous venons d'effectuer ci haut, la
construction vient de s'éclairer d'elle-même. Il convient donc, au
terme de ce 1er chapitre, de donner la portée de chacun de deux
alinéas pour comprendre globalement le vrai sens de l'article sous
examen. Quelle est donc la place110 réservée à
la propriété foncière, sous l'article 9 de l'actuelle
constitution? Reste -t-elle maintenue ou pas ? Ou, dirait-on aussi, qu'en
est-il de la place accordée à la propriété
privée111 avec l'avènement de cette nouvelle
constitution ?
Abordant le premier chapitre, intitulé : clarification
conceptuelle112, nous avons constaté que cet
article pose le problème de confusion entre les termes
propriété et souveraineté. D'où, il a
été question de confronter, mieux de distinguer la notion de
souveraineté permanente à celle de la plénitude des droits
fonciers, miniers et forestiers consacrée par la loi BAKAJIKA (sect.
2ème) ensuite à l'article 53 de la loi du 20/07/1973
consacrant la propriété exclusive, inaliénable et
imprescriptible de l'Etat Congolais (sect.3, par après à la
domanialité (sect.4ère)et à celle de la
suzeraineté (sect. 5ème). Tout ceci dans le but de
savoir le sens et la portée de l'art. 9 en examinant les rapports qui
existent entre ces notions et voir si elles peuvent s'équivaloir ou
s'interpénétrer et dire la méme chose.
Bref, il fallait préalablement résoudre ce
problème en le rendant claire, sans ambiguïté, ni confusion,
pour faire cesser toutes les polémiques et controverses autour de cet
article. C'est pourquoi, nous avons pertinemment démontré que
l'expression de souveraineté permanente n'était en rien
différente de celle de la propriété exclusive et de ces
autres textes légaux évoqués ci haut. Bien au contraire la
souveraineté évoquée à l'art.9 les complète,
les englobe, car elle est plus large et complet en prenant en compte toute
l'étendue, tous les compartiments du territoire congolais (espace
terrestre, maritime et aérien).
110 L'article 9 face à l'article 34 de la constitution et
les articles 53 et 9 de la loi foncière du 20/7/73.
111 Voir article 34 de la constitution.
112 On a à faire ici à deux concepts clés :
souveraineté et propriété. Tout propriétaire n'est
pas souverain ou tout souverain n'est pas nécessairement
propriétaire.
Dans l'esprit du législateur congolais, en consacrant
ce principe dans le droit positif congolais, il entend protéger les
générations présentes et à venir contre les
atteintes et convoitises des Etats étrangers sur les richesses et
ressources naturelles de la R.D.C.
En analysant plus profondément cet article, nous avons
constaté qu'il manque un hiatus, servant d'intermédiaire entre le
premier et le second alinéa, pour que cet article soit complet. Pour ce
faire, nous avons estimé que cet hiatus consisterait à
préciser et déterminer la place de la propriété
foncière de l'Etat. D'où elle devrait être formulée
ainsi : le sol, sous-sol, les mines sont la propriété exclusive,
inaliénable et imprescriptible de l'Etat. En répondant de la
sorte, nous venons ainsi de confirmer notre première
hypothèse.
Comment pouvons-nous justifier les termes «
modalités de gestion et de concession du domaine de l'Etat»
employés à l'alinéa 2ème ?
Premièrement, il nous permet de confirmer que la
propriété113 n'est pas supprimée, par l'article
9. Et sur quoi repose cette affirmation ?
En effet, dans la terminologie en usage dans les affaires
foncières, le mot cession s'oppose à concession ; la cession est
l'octroi d'un droit de propriété tandis que la concession se
limite à octroyer un droit de jouissance d'un bien sans en avoir la
disposition et donc la propriété. Il peut s'agir d'un bail, d'une
emphytéose, d'une occupation provisoire, de la superficie, ou d'une
concession gratuite, etc.
En outre, dans une terminologie plus générale le
mot concession signifie tout acte par lequel l'Etat consent un droit de
jouissance sur son domaine, sans distinguer entre le domaine public et le
domaine privé.
Dire que l'Etat reprend la pleine et libre disposition de ses
droits fonciers cédés avant le 30/06/1960, revient à
reprendre toutes les propriétés
113 Henri De PAGE, op. cit. p. 67.
privées reconnues et protégées par les
textes législatifs d'avant cette date. En effet, aux termes de l'article
14, livre 2ème du Code Civil congolais la
propriété est le droit de disposer d'une chose d'une
manière absolue et exclusive. Le droit de disposition114
constitue l'essence méme du droit de propriété et les mots
« pleine et libre disposition » repris à l'article
1er de l'Ordonnance-Loi n°66-343 eussent aussi bien pu
être remplacés par les mots « pleine
propriété». Et donc le droit à la
propriété privée reste d'application et compatible avec la
notion de la souveraineté permanente mais bien entendue, exception faite
au sol, soussol, mines, forets, bref aux biens du domaine de l'État.
Les particuliers (personnes physique ou morales congolais ou
étrangers), avons-nous dits, n'ont droit, qu'à la jouissance
d'une concession ordinaire ou perpétuelle selon les cas. Une des
spécificités de l'article 9 consiste à reconnaître
le droit en faveur de l'État congolais d'exercer un contrôle sur
toute l'étendue de son territoire (espace maritime, aérien
terrestre...) en tout temps, (en temps de guerre comme en temps de paix) mais
aussi de recouvrer toutes les richesses qui lui ont été
extorquées ou pillées, au besoin de saisir les juridictions
internationales, en cas de violation de sa souveraineté permanente, par
tout sujet de droit.
114 Henri De PAGE, op. cit. p.67.
CHAPITRE IIème : REGIME JURIDIQUE, MECANISMES
DE CONTROLE ET MODALITES DE MISE EN OEUVRE DU PRINCIPE DE LA SOUVERAINETE
PERMANENTE
Nous allons analyser ce chapitre à travers trois
sections, d'une part les différents mécanismes de contrôles
institués par le principe de la souveraineté
permanente(section1ère), d'autre part les différentes
modalités115 d'exercice du principe de la souveraineté
permanente ainsi que leur régime juridique .Cependant on ne manquera pas
d'évoquer les cas de violation de ce principe en nous servant des
quelques exemples tirés de la jurisprudence internationale(section3)
telles, l'affaire RDC contre UGANDA, l'affaire de l'île de Palma, ~
Section 1ère : MECANISMES DE CONTROLE
Tous les mécanismes116 de contrôles
que l'Etat est censé exercer sur son territoire se sont
cristallisés autour du principe de la souveraineté permanente.
Dans la présente section, notre tache va consister à les examiner
tous en portant un accent plus particulier sur la nationalisation et les
expropriations. Car, se souviendra-t-on, l'Etat n'a pas sur son territoire un
titre de propriété, mais plutôt il devient
propriétaire par le mécanisme de nationalisation ou
d'expropriation. Telle est la raison pour laquelle on insistera sur ces deux
mécanismes.
§ 1. Nationalisation et expropriation.
Ces deux notions ont toutes les mêmes bases juridiques,
à savoir l'article 34 et la résolution1803. Nous aborderons tour
à tour la nationalisation, l'expropriation pour cause d'utilité
publique ensuite on pourra distinguer ces deux notions entre elles et d'avec
leurs notions voisines.
115 Rapports annuels PNUD-ONU : évolution des
activités économiques mondiales1996, p36-65.
116 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p. 345.
I. Notion
La nationalisation117 consiste en un transfert,
décidé autoritairement, de propriétés
privées à l'Etat ou à une collectivité publique
pour des raisons d'intérêt public. Pour le professeur MUGANGU S.,
c'est la manière la plus radicale et à première vue, la
plus simple d'acquérir une terre, par l'État.
Trois critères doivent être réunis pour
que l'on puisse parler de nationalisation s'ils viennent à manquer, on
est en présence d'un phénomène différent :
- En premier lieu, le transfert de propriété doit
être décidé automatiquement.
- Mais il existe d'autres modes d'acquisition, par les
collectivités publiques, de biens appartenant à des personnes
Privées. L'Etat peut recourir à l'achat, soit dans des conditions
commerciales normales soit en combinant l'usage de
prérogatives118 de puissances publique119 et le
recours aux mécanismes du droit privé, mais la cession se fait
par contrat et non à la suite d'une décision unilatérale
de l'Etat, qui constitue l'un des critères de la nationalisation
(méme si le montant de l'indemnité est ensuite
négocié, ce qui ne change rien à la nature de
l'opération).
- Pour que l'on puisse parler de nationalisation, il faut, en
deuxième lieu, que le bénéficiaire du transfert de
propriété soit l'Etat ou une autre collectivité publique.
Il peut arriver, par ailleurs, que l'Etat oblige un propriétaire
étranger à transférer les avoirs qu'il détient sur
son territoire à des personnes privées ayant sa
nationalité. Une telle décision répond à certains
des objectifs poursuivis par les nationalisations des propriétés
étrangères, mais non à celui de socialisation de la vie
économique. Ce mode de transfert autoritaire des
propriétés étrangères a été
utilisé par certains pays du Tiers-Monde adhérant aux principes
de l'économie capitaliste libérale (Brésil, Corée
du Sud, Côte-d'Ivoire, Maroc).
- Enfin, la nationalisation consacrée par la
résolution 1803(XVII) est inspirée des motifs politiques,
économiques ou sociaux de caractère général et
ceci
117 Voir les différents procédés des
marchés publics.
118 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p. 346.
119 Idem, p.347.
permet de la distinguer de la confiscation dont le mobile est
punitif : il s'agit alors de sanctionner le propriétaire
évincé.
En revanche, la transposition au plan international de la
distinction parfois effectuée en droit interne, entre nationalisation et
expropriation n'entraîne aucune différence de régime
juridique (cfr. art. 2 §2 de la charte des droits et devoirs
économiques des Etats).
La nationalisation n'a d'incidence internationale que dans
deux hypothèses : si elle porte sur des biens et intérêts
appartenant à des propriétaires étrangers et situés
sur le territoire de l'Etat qui nationalise, ou elle vise des biens appartenant
à des nationaux mais situés en territoire étranger. Dans
le premier cas, la compétence territoriale de l'Etat nationalisant se
heurte à la compétence personnelle de l'Etat dont le
propriétaire a la nationalité ; dans le second, c'est l'inverse
qui se produit. Des difficiles problèmes de droit international, tant
public que privé surgissent alors (qui ne se posent pas lorsque l'Etat
nationalise des biens appartenant à ses nationaux et situés sur
son propre territoire), les principes de la plénitude et de
l'exclusivité des compétences étatiques trouvent
pleinement application,
II. Le droit de nationaliser ou de privatiser
La souveraineté (imperium120)
n'implique pas forcement la propriété
(dominium121), du moins ne la prohibe-t-elle pas.
Corollaire direct du principe de l'exclusivité de la compétence
territoriale et élément de la souveraineté permanente sur
les ressources naturelles et les activités économiques, le droit
de nationaliser les propriétés étrangères
situées sur le territoire national ne peut être mis en doute et
n'est aujourd'hui nié par personne.
II.1. Controverse sur le droit de nationaliser
Il existe plusieurs controverses juridiques à ce sujet. Le
droit des Etats de nationaliser les biens étrangers ne fait l'objet
actuellement
120 Dominique ROSENBERG, op. cit. p. 222.
121 Idem, p. 223.
d'aucune contestation. Mais le consensus ne va pas plus loin.
Il existe des sérieuses oppositions entre pays développés
et pays en développement sur le fondement, les limites et les conditions
d'exercice de ce droit.
II.2. Conditions d'exercice du droit de nationaliser
Tout en reconnaissant pleinement le droit de l `État de
nationaliser, le droit international subordonne122 la
validité de son exercice à trois conditions :
1°- la nationalisation devait répondre à un
motif d'intérêt public,
2°- ne pas être discriminatoire,
3°- être accompagnée d'une indemnité.
Sans être abandonnées, les deux premières
sont, aujourd'hui, interprétées de manière très
large. La résolution 1803(XVII) de l'assemblée
générale qui, malgré son ancienneté, est souvent
considérée comme traduisant le droit positif du fait des
conditions de son adoption, dispose : « la nationalisation,
l'expropriation et la réquisition devront se fonder sur des raisons ou
des motifs d'utilité publique, de sécurité ou
d'intérêt national, reconnus comme primant les simples
intérêts des particuliers ou privés, tant nationaux
qu'étrangers ».
Bien que certaines sentences123 postérieures
aient affirmé que « le droit international ne s'occupe pas des
mobiles » (voir sentence Liamco, 12/04/1997, Rev. Arb. 1980, p. 163 et
Texaco-Calasiatic, préc. J.D.I. 1977, p.372), cette condition ne
paraît pas devoir être répudiée ; cependant elle a
perdu toute autonomie et l'intérêt public souverainement
apprécié par l'Etat qui nationalise, se confond largement avec
les exigences du développement.
Il convient maintenant de distinguer l'expropriation de certaines
notions voisines que sont :
· La réquisition,
· la confiscation, la nationalisation,
· l'emprise, voie de fait et l'alignement.
122 Dominique ROSENBERG, op. cit., p.224.
123 Idem, p. 227.
§ 2. Expropriation et ses notions voisines
I. Expropriation et réquisition.
L'article 34 de la nouvelle constitution de la RDC, constitue
la base juridique du droit de l'expropriation pour cause d'utilité
publique. Tandis que la résolution 1803(XVII) consacre à la fois
le droit de nationaliser, d'expropriation et de la réquisition.
La réquisition est une mesure d'exécution
forcée qui permet à l'administration d'entrer en possession des
biens matériels appartenant à des particuliers, alors que
l'expropriation est un acte d'acquisition forcée d'un immeuble par
l'administration124. La réquisition peut porter aussi bien
sur les immeubles que sur les meubles. Les réquisitions portant sur des
immeubles ne peuvent concerner que leur usage et en aucun cas leur
propriété. Elles ne peuvent donc être que temporaires,
toute réquisition destinée à durer indéfiniment
étant irrégulière.
A l'inverse, les réquisitions portant sur des meubles
peuvent porter soit sur l'usage du meuble soit sur sa propriété.
En d'autres termes, la réquisition peut être un mode de cession
forcée des meubles ; elle ne peut être un mode de cession
forcée des immeubles. C'est ce qui la distingue de l'expropriation
où les solutions sont radicalement livrées, car l'expropriation
permet la cession forcée des immeubles et des droits réels
immobiliers mais non les biens meubles 125.
En outre, la réquisition étant une atteinte
à la propriété privée justifiée par
l'intérêt de la nation, elle donne lieu en contrepartie au
payement au profit de la victime d'une indemnité juste et égale
au manque à gagner126. L'indemnisation de la victime de la
réquisition intervient après la réquisition, alors que
celle de la victime de l'expropriation intervient après la
décision d'expropriation mais avant le transfert de
propriété.
124 YUMA BIABA, Cours de Doit administratif, U.C.B., 1995
- 19996, inédit, p. 34.
125 Christian MOULY, Le Droit de propriété et
l'environnement, PUF, Paris 1998, p.332.
126 YUMA BIABA, op. cit., p. 35.
Enfin, la différence entre ces deux notions peut se
situer aussi au niveau des autorités compétentes. La
réquisition civile est de la compétence de l'administrateur du
territoire concerné ou bourgmestre de la commune ; la réquisition
militaire ou policière relève en temps normal de
l'activité civile, cependant, en temps de guerre ou en temps des
troubles graves et immédiats, elle relève de l'autorité
militaire ou de la police selon le cas notamment en cas de trahison (article
431) et de détournement des deniers (article 441 et
443)127.
II. Expropriation et nationalisation
Ces deux notions comportent aussi bien des ressemblances que
des différences, on ne s'étonnera même pas de voir que tous
ont les mêmes bases juridiques, que sont l'article 34 de la constitution
et la résolution 1803(XVII).
S'agissant des ressemblances, on peut dire que dans les deux
cas :
- on a affaire à un mode de cession forcée des
biens qui s'opère dans le respect de la loi,
- il ne peut y avoir cession forcée que lorsque la
nécessité publique, légalement constatée, l'exige
évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable
indemnité128.
Quant à ce qui est des différences, nous pouvons
noter que les différences essentielles entre ces deux notions concernent
d'une part les biens susceptibles d'être expropriés ou
nationalisés et d'autre part, les raisons de ce faire - étant
entendu que, dans les deux cas, il s'agit des raisons d'intérêt
général ou d'utilité publique. Les nationalisations
portent sur des entreprises et, dans la mesure où ces entreprises sont
les plus souvent des sociétés par action, ce sont
généralement les actions qui sont transférées
à la puissance publique, les nationalisations portent donc au premier
chef sur les biens
127 NYABIRUNGU Mwene SONGA, Droit pénal
génóal zaïrois, 2ème édition.
Kinshasa, Droit et Société, DES, cité par Justin
MUSHAGALUSA, « L'expropriation pour cause d'utilité publique en
droit congolais :application à l'extension du PNKB »,
Mémoire, UCB, 1998-1999, p. 45.
128 Ibidem
meubles même si, en pratique, la nationalisation des
actions emporte indirectement le transfert à la puissance publique des
immeubles possédés par les sociétés
nationalisées.
Au surplus, ces entreprises nationalisées continuent
à exercer leurs activités industrielles et commerciales mais,
cette fois-ci, non plus au service d'intérêts privés mais
au service de l'intérêt général. En revanche, les
expropriations correspondent, non à des cessions forcées de
meubles, mais à des cessions forcées qui portent directement sur
des immeubles ou sur des droits réels immobiliers. Par ailleurs, une
fois l'immeuble cédé, il change le plus souvent radicalement
d'affectation129.
Qu'en est-il de l'expropriation, emprise, et voie de fait ?
III. Expropriation, emprise et voie de fait
Cette étude sera subdivisée en quatre points :
l'emprise (1°), la voie de fait (2°), la différence entre
l'emprise irrégulière et la voie de fait (3°) et le
rattachement de ces notions avec l'expropriation (4°).
III.1 Emprise
Par emprise, on entend toute prise de possession par
l'Administration, à titre provisoire ou
définitif, d'une propriété immobilière
privée130. Il ne s'agit pas seulement d'une atteinte
extérieure à la propriété, mais d'une mainmise de
l'Administration sur l'immeuble, qui élimine le propriétaire et
le prive de l'utilisation de son bien. Celui-ci doit être un immeuble :
la possession d'un bien meuble peut donner lieu à la théorie de
l'emprise, comme c'est le cas aussi en matière
d'expropriation131.
Pour qu'il y ait emprise, il faut que deux conditions soient
réunies, il faut d'abord qu'il y ait une véritable
dépossession, c'est-à-dire une main mise sur la
propriété. Il n'y a donc pas emprise tant que l'Administration
reste sur son fonds, ne pénètre pas sur la
propriété privée, ne l'atteint que du dehors sans mettre
la main sur elle : il faut en second lieu
129 Justin MUSHAGALUSA, op. cit.,p. 45.
130 Jean RIVERO et Jean WALINE, Droit administratif,
16ème éd., Paris, Dalloz, 1996, p.155.
131 Voir Georges VEDEL et Pierre DELVOLE, Le système
français de protection des administrés contre
l'administration, Paris, Sirey, 1991, p. 255.
que, l'atteinte ait été portée à
la propriété immobilière ou à un droit réel
fortement protégé, comme c'est le cas, en France, pour les droits
du titulaire d'une concession funéraire dans un cimetière
communal132. L'emprise ainsi définie peut être soit
régulière soit irrégulière.
Elle est régulière lorsqu'elle est
effectuée en vertu des pouvoirs attribués par la loi à
l'administration, c'est-à-dire lorsque la dépossession
immobilière a été prévue par un texte
résulte d'une procédure légale. Il en est ainsi par
exemple de l'expropriation pour cause d'utilité publique, de
l'occupation temporaire, de la réquisition immobilière.
Elle est irrégulière lorsqu'elle est
réalisée en violation des textes, c'est-à-dire si elle ne
se fonde pas sur un titre légal ; dans ce cas l'indemnisation
relève en principe, et méme en l'absence des textes, du juge
judiciaire, en sa qualité de « gardien de la
propriété ». L'emprise irrégulière est soumise
à un régime juridique spécial contenu dans deux points.
1.1. Eléments de l'emprise
irrégulière
L'emprise, par elle-même, suppose de la part de
l'Administration, une prise de possession d'un immeuble : un
simple trouble de jouissance sans dépossession n'est pas constitutif
d'emprise.
-L'emprise est irrégulière dès que le
titre qui la fonde est entaché d'une illégalité ; il n'est
pas nécessaire que cette illégalité présente la
gravité requise dans la théorie de la voie de
fait133.
1.2. Conséquences de l'emprise
irrégulière
Du point de vue de la compétence, la différence
entre l'emprise irrégulière et celle régulière
réside dans le fait que le juge judiciaire exerce sans texte, dans le
premier cas, la compétence que les textes lui accordent le plus souvent
dans le second, c'est-à-dire la fixation de l'indemnité
destinée à réparer l'ensemble des conséquences
dommageables de la dépossession. Le
132 ONG et alii.., Les grands arrêts la jurisprudence
administrative, 10è éd., Paris, Sirey, 1969, p. 401.
133 Jean RIVERO et Jean WALINE, op. cit. p. 156.
juge ne peut pas faire cesser l'emprise par voie d'injonction,
mais seulement condamne l'Administration à une
indemnité134.
Comme le dit Jean-François LACHAUME135., la
voie de fait, institution jurisprudentielle par excellence, est le
résultat d'une atteinte particulièrement grave, portée par
l'Administration, aux droits fondamentaux des citoyens (libertés
publiques essentielles et droit de propriété) et «
insusceptible se rattacher à un pouvoir légal » Dans ce cas,
l'Administration, dans ses prérogatives, a porté gravement
atteinte aux libertés et aux propriétés. Elle est alors
considérée, vu le degré de l'irrégularité,
comme s'écartant de l'accomplissement de sa fonction. Son agissement
n'apparaît plus comme l'exercice irrégulier d'une de ses
attributions, mais comme un pur fait matériel, dénué de
toute justification juridique. Elle ne peut plus, dès lors, se
prévaloir du principe de la séparation et de la compétence
administrative : l'acte a perdu tout caractère administratif, il est
dénaturé, et c'est au judiciaire qu'il appartient par
conséquent d'assurer la protection du particulier136.
Comme le notent Louis TROTABAS et Paul ISOART137,
l'illégalité est tellement manifeste qu'elle dénature
l'acte, d'où l'expression « voie de fait » opposée
à voie de droit. Quant à ses éléments, nous
retiendrons trois qui doivent être réunis :
- Une opération matérielle138 :
l'existence d'une décision ne suffit pas à constituer une voie de
fait ; il faut que l'Administration soit passée à
l'exécution, ou tout au moins menace d'y passer ;
- Une atteinte portée par cette opération
à la propriété immobilière ou mobilière, ou
à une liberté fondamentale ;
- Un vice juridique assez grave pour dénaturer
l'opération139 ; une simple illégalité ne
suffit pas à lui faire perdre son caractère administratif. En
pratique, l'irrégularité soit dans la décision
exécutée, soit dans l'opération d'exécution
elle-même : la voie de fait résulte soit dans l'exécution
d'une
134 Jean RIVERO et Jean WALINE, op. cit. p. 156 et Jean -
Michel de FORGES, Droit administratif, Paris, PUF, 1995, p. 142.
135 Idem. p. 156.
136 Ibidem.
137Ibidem.
138 Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 129.
139 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p. 274.
décision manifestement irrégulière, soit
de l'exécution manifestement irrégulière d'une
décision (cas du recours à l'exécution forcée sans
respecter les conditions.140
Il a été admis que, lorsque la voie de fait
résulte d'un acte inexistant, le juge administratif saisi, a
qualité, au même titre que le juge judiciaire pour constater cette
inexistence.141
Notons aussi que son régime contentieux est assez complexe
:
- La voie de fait peut être constatée
indifféremment par les deux ordres de
juridiction, ce qui s'explique assez bien par la théorie
de l'inexistence, au
moins quant il y a lieu d'appliquer cette théorie ;
- En revanche, seule la juridiction de l'ordre judiciaire peut
réparer les conséquences dommageables de la voie de fait et y
mettre fin.
On considère en effet que, eu égard à la
gravité des agissements de l'Administration, c'est un cas où,
exceptionnellement, le juge judiciaire peut adresser des injonctions à
l'Administration, et particulièrement lui enjoindre d'y mettre
fin142.
III.2. Différence entre emprise
irrégulière et voie de fait
Si la voie de fait n'existe que lorsque l'opération
administrative qui porte atteinte aux droits des individus revét les
vices d'une particulière gravité que l'on a indiqués plus
haut, l'emprise irrégulière, quant à elle, est
réalisée dès lors que le titre en vertu duquel
l'Administration a porté atteinte à la propriété
immobilière est irrégulière, même si cette
irrégularité ne correspond pas au degré de gravité
exigé pour la voie de fait ; la conséquence est qu'il peut y
avoir, selon le cas, cumul ou non-cumul de l'emprise et de la voie de fait. Le
cumul se produit lorsque les conditions de l'emprise et celles de la voie de
fait sont simultanément réunies. Par exemple toute voie de fait
entraînant une dépossession de la propriété
immobilière constitue nécessairement une emprise.
140 Séverin MUGANGU, op. cit., p. 23.
141 T.C., 27 juin 1966, Guignon, A.J., 1966, p. 547, cité
par Jean RIVERO ET Jean WALINE, op. cit., p. 155.
142 T.C., 17 JUIN 1948, Manufacture des velours et peluches et
Société VELVETIA, Rec. 153 cité par Jean-Michel de
FORGES, op. cit., p. 245.
Mais il peut y avoir des cas où emprise et voie de fait
ne se cumulent pas. Il y a par exemple voie de fait sans emprise lorsque le
droit lésé par la voie de fait est autre que la
propriété immobilière. De même il peut y avoir
emprise sans voie de fait lorsque, comme dans l'exemple donné plus haut,
la prise de possession de la propriété immobilière est
simplement entachée de certains vices dont la gravité n' en va
pas jusqu'à constituer la voie de fait.
La théorie de l'emprise irrégulière est
ainsi très différente de celle de la voie de fait à un
triple point de vue :
- Champ d'application : alors que l'emprise ne concerne que la
propriété immobilière, la voie de fait, quant à
elle, peut consister soit dans une atteinte à toutes sortes de
propriété, soit même aux libertés fondamentales.
- Degré de l'illégalité qu'elles
requièrent : il s'agit d'une illégalité simple pour
l'emprise et d'un vice très grave pour la voie de fait.
- Etendue de la compétence judiciaire : en cas de voie
de fait, les tribunaux judiciaires ont une compétence et des pouvoirs
plus larges qu'en cas de simple emprise143.
III.3. Rattachement de ces notions avec
l'expropriation
On a vu que l'emprise régulière peut être
soit une expropriation pour cause d'utilité publique, soit une
réquisition résultant d'une procédure légale.
On a constaté aussi que l'expropriation pour cause
d'utilité publique comme l'emprise régulière ou
irrégulière portent sur la propriété
immobilière.
On peut finalement relever, à la suite de Maurice-
André FLAMME, qu'il est hélas fréquent que
l'autorité publique prenne possession des biens appartenant à des
particuliers, jugés nécessaires à des travaux publics,
avant méme que l'arrêté royal autorisant l'expropriant
intervienne. Il s'agit là, manifestement, d'une « voie de fait
» mais la perpétration de celle-ci ne fait pas
143 Jean RIVERO et Jean WALINE, op. cit., p. 174.
obstacle à ce que la procédure d'expropriation soit
entamée à posteriori et régularise la
situation144.
IV. Expropriation et alignement
La procédure d'alignement n'est pas organisée par
le législateur congolais. Nous ferons recours à la doctrine
française pour cette étude.
L'alignement est défini en France comme la limite
fixée entre la voie publique et les propriétés
limitrophes, soit qu'elle résulte de l'état de possession actuel,
soit qu'elle ait été prescrite pour l'avenir par
l'autorité administrative : soit d'opérer le bornage d'une voie
publique existante, soit de pouvoir à son élargissement ou
à son redressement145.
Cette délimitation des voies publiques
réalisée par l'alignement comporte un régime juridique
tout à fait différent de celui qui, en droit civil, régit
la délimitation des propriétés privées entre elles
et qui porte le nom de bornage. Alors que le bornage résulte d'un accord
entre deux propriétaires ou à défaut d'accord d'un
jugement (action en bornage) et n'a pour objet que de constater les limites
existantes de deux fonds, l'alignement se présente d'une part comme un
acte administratif unilatéral et d'autre part, il n'a pas toujours un
effet déclaratif de constatation ; il peut avoir aussi un effet
attributif de propriété146.
La procédure d'alignement comporte deux opérations,
à savoir le plan général d'alignement et l'alignement
individuel.
Le plan général d'alignement détermine
d'une manière générale les limites d'une voie ou d'un
ensemble de voies. C'est ce plan qui entraîne les effets exorbitants du
droit commun de la procédure d'alignement.
144 Maurice - André FLAMME, Droit administratif, T.
II, Bruxelles, Bruylant, 1989, p. 866.
145 Idem, p. 1087.
146 André de LAUBADERE et al., op. cit., p. 310.
On retiendra aussi que l'Administration peut bien
délimiter unilatéralement la voie mais elle ne peut en fixer
à son gré les limites : elle doit se borner à constater
les limites existantes147.
Comme l'indiquent André de LAUBADERE et les autres, le
plan général d'alignement a pour objet de fixer les limites
d'ensemble d'une voie ou d'un groupe de voies publiques. C'est un acte
administratif unilatéral. L'alignement peut être, selon les
mémes auteurs, simplement déclaratif lorsqu'il se borne à
constater les limites existantes. Il peut aussi et cela son caractère
attributif servir à l'Administration pour élargir une
voie148.
§ 3. Réglementation d'investissements
privées et étrangers
des sociétés transnationales.
La nécessité de contrôler les
investissements privés étrangers ne s'est fait sentir que
progressivement dans les pays du Tiers Monde. En RDC, l'article 34 de la
constitution consacre cette notion.
Dans l'immédiat après-guerre et plus encore lors
de la décolonisation, les pays en développement ont d'abord
cherché à attirer des capitaux étrangers en prenant des
mesures incitatives. En effet durant cette période, l'idéologie
dominante était que le manque de capitaux constituait le frein
principal, au développement. C'est qu'à l'époque,
l'investissement privé étranger était
considéré non seulement comme le meilleur pourvoyeur de capitaux,
mais encore comme meilleur véhicule de l'esprit d'entreprise et de la
technologie. Les pays en développement étaient donc
invités à créer un climat favorable aux investissements
étrangers en adoptant des réglementations libérales et en
prenant des mesures d'encouragement telles que des exonérations fiscales
ou des subventions.
Toutefois, un fort courant s'est dégagé
très rapidement au sein méme du Tiers Monde dans le sens d'une
méfiance de plus en plus profonde à l'égard du capital
privé étranger. On en est cependant arrivé peu à
peu à une attitude intermédiaire plus raisonnée, faisant
prévaloir une vision réaliste des
147 André de LAUBADERE et al., op. cit. p. 311.
148 Ibidem
rapports économiques internationaux sur les
présupposés purement idéologiques. La difficulté de
contrôler ces capitaux est cependant plus grande qu'on ne le pense. La
raison principale en est que la majeure partie des investissements
privés étrangers est le fait des sociétés
transnationales. Dans cette perspective, les investissements sont surtout
constitués des prêts ou des participations au capital des filiales
de la part des sociétés mères situées dans les pays
industrialisés. Il y a ainsi un déséquilibre entre la
rapidité avec laquelle circulent les capitaux et la lenteur qui
caractérise les procédures juridiques de contrôle.
C'est pourquoi nous allons traiter d'une part des
investissements privés étrangers d'autres part des
investissements des sociétés transnationales. Mais avant d'en
arriver là, voyons d'abord comment se définie
l'investissement.
I. Notion et définition
Les contrôles que les pays en développement
entendent mettre en oeuvre se heurtent à la difficulté qu'il y a
aujourd'hui à définir l'investissement privé
étranger. Le problème est en effet de savoir s'il consiste
uniquement en un apport de capitaux entraînant la maîtrise
financière de l'entreprise ou s'il doit comprendre aussi des apports
complémentaires tels que la technologie, les conseils en marketing ou et
les techniques de gestion. Le choix entre ces deux approches n'est pas sans
conséquences sur le plan juridique, comme on le verra plus loin.
La plupart de conventions bilatérales d'investissements
contiennent à l'heure actuelle une définition extensive de
l'investissement, qui se présente souvent sous une forme
énumérative.
On peut en donner l'exemple suivant : « Pour
l'application de la présente convention :
1. le terme « investissements » désigne les
avoirs149 de toute nature et plus particulièrement, mais non
exclusivement : 1.les biens meubles et immeubles
149 Bertin GILLES, L'investissement international, P.U.F.,
Kinshasa, 1975, p. 67.
ainsi que tous les autres droits réels tels que les
hypothèques, privilèges ou cautionnements ;
2. Les actions, titres et obligations dans des
sociétés ou participations à la propriété de
ces sociétés ;
3. Les créances et droits à toutes prestations en
vertu d'un contrat qui ont une valeur financière ou économique
;
4. Les droits d'auteur, les droits de propriété
industrielle (tels que brevets d'invention, licences, marques
déposées, modèles industriels), les procédés
techniques, les noms déposés et la clientèle ;
5. Les concessions industrielles et commerciales
accordées par la loi ou en vertu d'un contrat, notamment les concessions
: les concessions relatives à la prospection, la culture, l'extraction,
ou l'exploitation de richesses naturelles, y compris celles qui se situent dans
les zones maritimes relevant de la juridiction de l'une des parties »
(Convention France - Srilanka du 10/04/1980).
II. Réglementation nationale
Nous avons déjà vu, dans le chapitre
précédent, que l'objet de la souveraineté permanente est
très étendu. L'expression recouvre non seulement les ressources
et richesses naturelles, les activités économiques,
d'exploitation, d'exploration, etc. mais aussi les investissements. Pour
preuve, les résolutions 1803(XVII) sur la souveraineté permanente
et celle de la charte des droits et devoirs économiques les
prévoient expressément. L'alinéa 6 de la résolution
1803(XVII) précise : « ~ qu'elle prenne la forme d'investissements
de capitaux publics ou privés, d'échange de marchandises ou de
services ...»
L'article 2, paragraphe 2 de la charte des droits et devoirs
des États renchérit à son tour en ces termes : «
Chaque État a le droit : a)de réglementer les investissements
étrangers dans les limites de sa juridiction nationale et d'exercer sur
eux son autorité en conformité avec ses lois et règlements
et conformément à ses priorités et objectifs nationaux.
Aucun État ne sera contraint d'accorder un traitement
privilégié à des investissements
étrangers».
En R.D.C., c'est la loi n°004-2004 du 21/2/2002 portant
code des investissements qui régit cette matière. Depuis le
5/6/2002, il existe un décret n°065/2002 portant statuts,
organisation et fonctionnement de l'Agence
nationale pour la promotion des investissements, en sigle
« ANAPI». Précisons en outre que dans le cadre de
règlement des litiges, c'est la convention du 8/3/1965 pour le
règlement de différends relatifs aux investissements entre
États et ressortissants d'autres États.
III. Les Réglementations bilatérales
Ces réglementations150 figurent dans des
conventions passées entre pays développés exportateurs des
capitaux et pays en développement importateurs de capitaux. Elles ont
pris différentes formes151, selon l'époque et les pays
concernés, dont voici les traits :
- La première catégorie est constituée
par les conventions d'établissement au sens classique du terme. Il
s'agit là essentiellement des traités d'amitiés, de
commerce et de navigation qui réglementent le statut des personnes
physiques et morales, leur sécurité et celle de leur biens,
l'exercice de leur profession et de leurs affaires, leurs droits de
propriété immobilière et mobilière, ainsi que les
modes de règlement de différends. Ces traités
prévoient également l'assimilation du national de l'État
d'origine et du national de l'État d'accueil.
- Entrent dans une 2ème catégorie les
« Investment Guaranty Treaties » conclus aujourd'hui par les
États-Unis avec la quasi-totalité des pays en
développement. Ces traités ont pour objectif essentiel
d'élargir le cadre institutionnel du système d'assurance pour les
investissements américains. Ils contiennent 3 sortes de dispositions,
visant respectivement le droit pour le pays importateur d'examiner le projet
d'investissement, la garantie accordée par le gouvernement des
États-Unis à un investissement sous réserve de son
acceptation par les pays d'accueil et enfin, la reconnaissance au profit de
l'État américain du droit de se substituer à son
ressortissant dans tous les cas où il serait conduit à indemniser
l'investisseur victime d'une mesure de dépossession152. Ce
type de traités favorise incontestablement l'État d'origine au
détriment du contrôle exercé par l'État
d'accueil.
150 Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 230.
151 Ibidem.
152 Ibidem.
Pour pallier ses inconvénients, un compromis, mieux un
équilibre à été trouvé entre les
États d'accueil qui prônent pour leur droit national devant
régir ces investissements et les États investisseurs qui
prônent pour le droit international. Les obligations ainsi souscrites
s'articulent autour du principe du traitement juste, équitable et non
discriminatoire, dont le principal corollaire est le libre transfert des
produits de l'investissement.
IV. Réglementations régionales
Parmi les réglementations régionales, on retiendra
ici deux exemples les plus révélateurs :
- une réglementation édifiée par des pays en
développement, celle du Groupe andin ;
- une réglementation négociée entre certains
pays développés et certains pays en développement, qui
prend place dans la convention de Lomé IV.
V. Réglementation Universelle
Une nécessité de mesures de contrôles
internationales à l'échelon universel s'est vite fait sentir
.Depuis long temps, il semble que tous les partenaires soient d'accord sur
l'utilité d'une régulation universellement acceptée des
activités des sociétés transnationales.
Les milieux d'affaires et les syndicats ont marqué leur
intérét pour une telle entreprise. Les organisations
privées et les sociétés transnationales elles-mémes
ont élaborées des directives mettant l'accent sur le devoir des
investisseurs de prendre en considération les objectifs de
développement des pays hôtes, ainsi que sur les droits des
sociétés opérant à l'étranger. Ainsi, le
guide de la chambre de commerce Internationale, adoptée en 1972,
s'adresse aux investisseurs et aux gouvernements des pays d'origine et des
États d'accueil et considère que des règles claires et
stables contribueraient à améliorer le climat des
investissements. Ce document153 souligne aussi la
nécessité pour les États d'accueils de se
référer au droit international et demande en contre partie aux
sociétés transnationales de
153Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 232.
respecter les objectifs économiques et sociaux des pays
dans lesquels elles opèrent.
Dans le même esprit154, plusieurs
sociétés transnationales ont rédigé des directives,
parfois appelées « codes de conduite privés ». Le
mouvement syndical, quant à lui, est très actif dans ce domaine
depuis les années soixante et milite en faveur d'une
réglementation internationale. Dans sa « charte des demandes
syndicales tendant au contrôle législatif des
sociétés multinationales », adoptée à Mexico
en 1975, la C.I.S.L a prôné la conclusion, sous les auspices de
l'ONU, d'un traité multilatéral général et la
création d'une nouvelle Institution spécialisée
chargée de surveiller l'application de ce traité. Les
Organisations Internationales ont répondu à cette attente de
façon diverse. D'abord en élaborant des réglementations
partielles, ensuite en tentant de préparer un code de conduite
générale, plus récemment en mettant sur pied une Agence
Multilatérale de Garantie des Investissements (A.M.G.I).
§ 4. Les Entreprises conjointes et autres formes
d'associations contractuelles
Les pays en développement ont progressivement
affiné les contrôles qu'ils exercent sur les activités
étrangères se déroulant sur leur territoire, à
travers non seulement par la nationalisation155, mais
également d'autres mécanismes de contrôles. Pour ce faire,
ils ont implicitement opéré une distinction entre la
participation au capital, la participation aux organes de direction des
sociétés et la participation à la simple gestion
d'activités économiques. Dans la pratique, cela a donné
naissance à une grande diversité de contrats. Certains de ces
contrats ont abouti à la constitution d'entreprises (joints
ventures).D'autres ne concernent que les modalités d'association des
entreprises privées à la politique de développement de
l'État d'accueil.
I. Les contrats d'entreprises conjointes (contrats de
joints ventures)
La notion d'entreprise conjointe : Comprise dans la
perspective des relations Nord -Sud, l'entreprise conjointe représente
une tentative pour organiser sous une forme juridique adéquate la
collaboration technique,
154 Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 232.
155 Ibidem.
financière ou commerciale entre une entreprise publique
ou privée d'un pays en développement. Il s'agit là, en
réalité, d'un terme générique pouvant recouvrir des
formes juridiques diverses. Mais la formule peut être appliquée
à toutes les structures permettant de placer l'investissement
étranger sous le contrôle total ou partiel de l'État
d'accueil. On comprend donc l'intérêt que ce procédé
a pu susciter dans les pays en développement.
II. De la concession à l'Entreprise conjointe
Les entreprises conjointes constituent par rapport au
régime de la concession, un progrès considérable dans la
recherche par les pays du Tiers Monde d'un contrôle effectif des
activités économiques étrangères se
déroulant sur leur territoire.
En effet, l'entreprise conjointe se distingue de la concession
par deux traits essentiels :
- La différence capitale entre les deux formules est
que dans les cas de l'entreprise conjointe, l'Etat détient un titre
légal de propriété sur l'entreprise et sa production,
alors que dans le cas de la concession156 traditionnelle,
c'était la société étrangère qui devenait
propriétaire de la totalité de la production au lieu méme
de l'exploitation. C'est ce que confirme l'arrêt du 15/02/1973, rendu par
la Cour de Syracuse (Italie) à propos des nationalisations de la British
Petroleum par la Libye157.
- La détention par l'Etat de la propriété
d'une part majoritaire de l'entreprise lui confère non seulement un
certain pourcentage de la production, mais également un rôle
effectif dans le contrôle de la gestion de l'entreprise. En effet, une
participation majoritaire au capital devrait conduire à une position
majoritaire dans les organes de direction et de gestion de l'entreprise
concernée.
II.1. Intérét de l'entreprise conjointe
Elle a 4 avantages, que sont :
156 Guy
FEUER. et Hervé CASSAN, op.
cit., p. 334
157 Ibidem.
1°. L'intérêt essentiel de
l'entreprise conjointe vient de ce qu'elle permet à la fois l'exercice
de la souveraineté permanente sur les ressources naturelles et les
activités économiques158 ainsi que le maintien sur
place de l'investissement étranger. La formule de l'entreprise conjointe
est suffisamment malléable pour que l'Etat d'accueil puisse
équilibrer comme il l'entend ces deux exigences en fonction de son
niveau de développement, de ses besoins en capitaux, et en technologie,
de ses priorités nationales, du secteur concerné et des objectifs
visés par les sociétés étrangères. Cette
souplesse dans le contrôle se vérifie dans tous les
éléments de la structure de l'entreprise conjointe, qu'il
s'agisse de la détermination des partenaires, des modes de
répartition du capital ou de la distribution des pouvoirs de
décision et de gestion.
2°. La détermination des
partenaires : Il existe des formules extrêmement variées
permettant d'associer dans la méme entreprise des partenaires locaux et
étrangers :
- en ce qui concerne les partenaires locaux, il peut s'agir
tout d'abord des organismes publics de l'Etat d'accueil ou méme de
l'Etat lui méme.
- en ce qui concerne les partenaires étrangers,
là encore il peut s'agir du gouvernement, des organismes publics
institutions financières ou sociétés privées (qui
sont ses partenaires naturels), les institutions internationales comme la
Banque Mondiale, S.F.I. (25% de participation au capital).
3°. Les modes de répartition du
capital :
La manière dont le capital est réparti lors de
la constitution d'une entreprise conjointe constitue un autre avantage pour ce
dernier. Car, les modalités sont fonction des exigences des
cocontractants et des contraintes de la loi nationale de l'Etat d'accueil. On
peut en citer 3 modalités :
- participation majoritaire ;
- participation égale ;
- participation minoritaire.
4°. La distribution des pouvoirs de
gestion et de décision : en règle générale, la
distribution du pouvoir est liée à la répartition du
capital. Néanmoins, les contrats159 peuvent prévoir un
grand nombre de modalités particulières.
158 Dominique ROSENBERG, op. cit., p.234
159 Ibidem
Tels sont les 4 avantages que présente cette forme. Voyons
à présent ses inconvénients (limites).
II.2.Limites du procédé
Quels que soient les avantages évidents de l'entreprise
conjointes pour ceux qui y recourent, cette formule juridique ne suffit pas en
elle-même à garantir un contrôle absolu des Etats sur leurs
activités économiques. Cette formule en effet, comporte plusieurs
inconvénients, dont :
- la prise de contrôle effective peut n'être que
très lente,
- diverses procédures peuvent entraver le
contrôle,
- enfin, le procédé de l'entreprise conjointe peut
perpétuer la présence étrangère dans les
activités économiques nationales.
III. Régime traditionnel de la concession
Dans le passé, l'exploitation160 des ressources
naturelles et principalement les ressources minières s'est faite par
voie de concession.
En théorie, ce type de contrat respecte les droits
souverains de l'Etat, qui peut manifester ses prérogatives de puissance
publique et donc y faire insérer des clauses exorbitantes du droit
commun. En pratique, dans les rapports entre sociétés
transnationales et pays en développement, il n'en n'a pas
été ainsi pour plusieurs raisons qui tenaient d'une part à
l'inexistence ou aux lacunes du droit interne, d'autre part à la
puissance et au pouvoir des négociations des sociétés
transnationales, enfin au fait que les Etats d'origine de ces
sociétés appuyaient fortement celle-ci.
§ 4. Autres Contrats d'Association (Diversité
des contrats d'association)
Certains pays en développement et plus
spécialement les pays producteurs de pétrole, qui sont
économiquement en mesure d'exclure totalement le capital
étranger, mais qui restent techniquement tributaires des
sociétés étrangères, ont imaginé d'autres
formules juridiques leur permettant de faire face à cette situation, en
plaçant leurs relations avec ces sociétés sur un plan
purement contractuel excluant toute propriété
étrangère des entreprises qui exploitent leurs ressources
naturelles.
160 Guy FEUEUR et Hervé CASSAN, op. cit., p.
332.
Dans la pratique, ces contrats extrêmement
fréquents, peuvent prendre des noms divers sans pour autant correspondre
à des catégories juridiques différentes :
- contrats de service ;
- contrats d'entreprise ;
- contrats d'exploitation ;
- contrats de « risques » ;
- contrats d'opération161 ;
- contrats de partage de production ;
- contrats de gestion ;
- contrats d'assistance technique ;
- contrats de coopération industrielle ;
- etc.
D'autre part, nombre d'entre eux contiennent des
stipulations162 identiques ou des clauses dont
l'originalité ne s'explique que par la spécificité du
secteur concerné. Il est toutefois possible de distinguer : Contrat de
service, contrat de partage de production et contrat de transfert de
technologie.
161 Guy
FEUR. et Hervé CASSAN, op. cit.,
p.300.
162 Dominique ROSENBERG, op. cit., p.236.
Section 2ème. DU REGIME JURIDIQUE ET DES
MODALITES D'EXERCICE DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE
Il convient, dans la présente section, de passer en
revue les différentes législations163 congolaises en
vigueur, sur les différents domaines de l'Etat visé à
l'alinéa 2 de l'article 9 sous examen, en vue de voir si le
régime juridique en place est conforme au principe de la
souveraineté permanente ou non.
D'où, il sera question d'analyser le régime
juridique du principe de la souveraineté permanente164
à travers : ses modalités d'exercices, (§1er) et
les différents régimes juridiques du domaine de l'État
(§2).
§ 1. Les modalités d'exercice de la
souveraineté permanente des Etats sur leurs ressources naturelles
I. Objectif général
L'objectif général qui commande les
modalités d'exercice de la souveraineté sur les ressources
naturelles a été énoncé dès les
premières résolutions165. La formulation la plus nette
apparaît dans la résolution 1803(XVII)qui déclare : «
le droit de la souveraineté permanente des peuples et des nations sur
leurs ressources naturelles doit s'exercer dans l'intérêt du
développement national et du bien de la population de l'Etat
intéressé».
Plusieurs résolutions ultérieures166
affinent cet énoncé.
C'est ainsi par exemple, que la résolution 2158 (XXI)
rappelle que les ressources naturelles des pays en développement sont
à la base de leur développement économique en
général et de leur progrès industriel en particulier et
que, limitées et épuisables, leur exploitation rationnelle
conditionne le développement, tant dans le présent que dans
l'avenir. La résolution 2692 (XXV) montre le lien entre les conditions
d'exploitation des
163 Gaston KALAMBAY, op. cit., pp. 29 à 112.
164 Cfr. Résolution 1803.
165 Ibidem
166 Dominique ROSENBERG, op. cit., p.246.
ressources naturelles et le financement167 du
développement. C'est donc au nom des intéréts de sa
population que l'Etat doit ou est supposé agir.
II. L'action de l'Etat
Les résolutions de l'O.N.U. contiennent diverses
dispositions relatives aux modalités d'exercice de la
souveraineté sur les ressources naturelles. Cette souveraineté
appartenant juridiquement à l'Etat, c'est à lui qu'il revient de
la mettre en oeuvre : telle est l'idée générale.
Mais les pays développés et les pays en
développement se sont opposés sur le point de savoir si le
contrôle d'un Etat sur ses activités exercées par les
étrangers sur son territoire devait s'effectuer exclusivement selon le
droit interne ou s'il devait relever, au moins pour partie, du droit
international.
Les premiers textes adoptés par les Nations Unies se
montraient favorables à l'intervention du droit international, plus ou
moins conjugué à la loi nationale. En 1960, la résolution
1515 (XV) recommande le respect du droit souverain de chaque Etat de disposer
de ses richesses et de ses ressources naturelles conformément aux droits
et devoirs économiques des Etats en droit international. Ces droits et
devoirs168 doivent s'exercer dans les deux sens : les États
tiers doivent respecter internationalement la souveraineté de
l'État détenteur des ressources en question, mais celui-ci doit
respecter les droits des États et des particuliers étrangers
selon les règles et standards ordinairement reçus en droit
international. La raison profonde d'une telle recommandation est qu'à
l'époque on considérait depuis longtemps la résolution 626
(VII), que la souveraineté sur les ressources naturelles ne devait pas
gêner les mouvements des capitaux à destination des pays en
développement, et ceci tant dans l'intérêt des pays
importateurs que dans celui des pays exportateurs.
La résolution 1803 (XVII) présente une construction
équilibrée dans laquelle primauté est donnée
à la compétence interne pourvu qu'elle ne
167 Ibidem
168 Guy FEUER et Hervé CASSAN, op. cit., p. 206.
s'exerce pas en contradiction avec le droit international.
Progressivement, s'est amorcée une réaction tendant à
donner une primauté de plus en plus marquée, voire,
l'exclusivité, à la compétence nationale. Ici
l'évolution de la doctrine des Nations Unies est allée de pair
avec celle de la pratique des États de plus en plus enclins à
réglementer restrictivement les investissements privés
étrangers et à procéder à des nationalisations.
En 1978, la résolution 3171(XXVIII) affirmait avec
force que c'est le principe de la compétence exclusive de l'État.
L'année suivante, cette solution a été reprise par la
charte des droits et devoirs économiques des États. Mais
l'opposition absolue des pays industrialisés à voir ainsi
évoluer le problème a donné un coup d'arrêt au
discours tenu en ces termes par le Tiers Monde dans l'enceinte des Nations
Unies. Il est significatif que depuis 1974 aucune résolution soutenant
ces thèses n'ait été adoptée par l'Organisation.
III. La coopération internationale
Depuis les premières résolutions, les Nations Unies
ne
reconnaissent pas seulement, en matière de richesses et
ressources naturelles un droit de contrôle aux États
détenteurs. Elles préconisent également la mise sur pied
d'une coopération internationale en ce domaine. Cette
coopération169 doit s'exercer, d'une part avec les
États, d'autre part avec les Organisations internationales.
En ce qui concerne la coopération avec les
États, les résolutions insistent à la fois sur la
coopération avec les pays développés et sur la
coopération entre pays en développement.
Par ailleurs, elles ont prévu l'intervention des
Organisations internationales dans le domaine des ressources naturelles. Cette
intervention apparaît d'abord sous la forme d'une mission d'étude
impartie à l'O.N.U. En application de la résolution 1314 (XII) et
de la résolution 1720 (XVI) qui lui fait suite, le secrétariat a
préparé de nombreux rapports et documents de travail, et
notamment celui qui porte le titre d' « État de la question de la
souveraineté
169 Dominique ROSENBERG, op. cit., p,248.
permanente sur les richesses et ressources naturelles », et
qui contient des renseignements précieux.
Mais l'O.N.U. a voulu aller au-delà de cette mission et
elle a düapporter une aide aux États pour la mise en
valeur et l'utilisation de leurs ressources naturelles. La résolution
2158(XXI) prie le secrétaire général de coordonner les
activités du secrétariat avec celles d'autres organes
et programmes des Nations Unies et de prendre toutes mesures utiles
pour faciliter l'intégration de l'exploitation des ressources
naturelles des pays en développement dans des programmes de
développement économique accéléré.
§ 2. Régime juridique conforme au principe de
la souverainetépermanente
L'État tire de son dominium et de son imperium le
pouvoir de déterminer le régime foncier des
éléments de son territoire et plus particulièrement les
modalités de gestion et de concession de son domaine. C'est là un
choix politique interne, qui trouve sa base dans le droit public interne et, on
le sait, le droit international général est indifférent
quant à ce. Quel est le régime juridique du domaine public sur
lequel l'État exerce sa souveraineté permanente ? Telle est la
question fondamentale qui mérite d'être posée et à
laquelle nous allons tenter de répondre tout au long de ce
paragraphe.
I. Le domaine (ou espace) terrestre
«L'État exerce une souveraineté permanente sur
sol, sous-sol, les eaux et les forets, ~ »170.
Nous allons examiner ici successivement le régime
juridique du sol, sous-sol, les eaux et les forêts. Le domaine
terrestre171 comprend :-la voirie ordinaire ou terrestre et les
voiries spéciales.
170 Article 9 de la constitution de 18 février 2006.
171 Dominique ROSENBERG, op. cit., p. 248.
I.1. Le régime du sol et du
sous-sol
Pour ce qui est de la base juridique, la matière est
traitée par la loi du 20/07/1973 qui restera toujours d'application sous
cette nouvelle constitution. (Voir le détail de ce régime au
premier chapitre du présent travail).
L'Etat demeure le seul propriétaire du sol, sous-sol
et des mines y contenus. Un régime de concession
perpétuelle172 est accordé aux congolais personnes
physiques et la concession ordinaire à l `égard des personnes
morales de droit congolais et à l'égard des étrangers.
I.2. Le régime forestier
2.1. Base juridique
Le droit applicable173 aux forêts trouve sa
base juridique dans la loi 011-2002 du 29 août 2002 portant code
forestier. Elle est accompagnée de règlements d'exécution
portant sur la création d'une société
forestière174, les conseils consultatifs provinciaux des
forêts175 ? La procédure de transaction en
matière forestière, le cadastre, la procédure
d'établissement d'un plan d'aménagement forestier, l'exploitation
forestière et sur la détermination d'essences forestières
protégées.
La loi n°011-2002 du 29/08/2002 portant code forestier
consacre l'État comme propriétaire en ces:
« Les foréts constituent la propriété
de l'État,... »
«Leur exploitation et leur utilisation par les personnes
physiques ou morales de droit privé ou de droit public sont
régies par les dispositions de la présente loi et ses mesures
d'exécution. » (art. 7).
C'est cette loi qui remplace le décret du 11 avril 1948
portant régime forestier au Congo Belge tel que modifié par
l'ordonnance loi n°52-413 du 4 octobre 1959.
172 Rapport économique de la RDC, 1999, p.74.
173 Loi 011-2002 portant Code forestier.
174 Ordonnance 81-068 du 16 mai 1981.
175 Arrêté ministériel /MIN/AF .F .
E.T./259/2002 du 3octobre 2002.
2.2. Les forêts visés et leur
classement
Selon la loi portant code forestier, les forêts sont :
- les terrains recouverts d'une formation
végétale à base d'arbres ou d'arbustes aptes à
fournir des produits forestiers, abriter la faune sauvage et exercer un effet
direct et indirect sur le sol, le climat ou le régime des eaux.
- les terrains qui, supportant précédemment un
couvert végétal arboré ou arbustif, ont été
coupés à blanc ou incendiés et font l'objet
d'opérations de régénération naturelle ou de
reboisement.
Par extension, sont assimilées aux forêts, les
terres réservées pour être recouvertes d'essences ligneuses
soit pour la régénération forestière, soit pour la
protection du sol.(article 1er ).
En ce qui concerne leur propriétaire, l'article 7,
alinéa 1er dispose que « les forêts constituent la
propriété de l'État». L'article 8, alinéa
1er, quant à lui dispose que : « les forêts
naturelles ou plantées comprises dans les terres
régulièrement concédées en vertu de la
législation foncière appartiennent à leurs
concessionnaires ». L'article 9, alinéa 1er dispose
enfin que « les arbres situés dans un village ou son environnement
immédiat ou dans un champ collectif ou individuel sont la
propriété collective du village ou celle de la personne à
laquelle revient le champ».
Les foréts classées font partie du domaine
public de l'État. Ces forêts sont : « les réserves
naturelles intégrales ; les foréts situées dans les parcs
nationaux ; les jardins botaniques et zoologiques ; les réserves de
faune et les domaines de chasse ; les réserves de biosphère ; les
forêts récréatives ; les arboreta ; les foréts
urbaines ; les secteurs sauvegardés».
La loi ajoute aux forêts classées les
périmètres de reboisement appartenant à l'Etat ou à
des entités décentralisées (aricle12) et se fixe
l'objectif176 que les forêts classées doivent
représenter au moins 15 % de la superficie totale du territoire national
(article14).
176 Voir article 13 de la loi 011-2002 portant code forestier.
Des foréts seront en outre classées lorsqu'elles
sont nécessaires à : « la protection des pentes contre
l'érosion ; la protection des sources et des cours d'eau ; la
conservation de la diversité biologique ; la conservation des sols ; la
salubrité publique et l'amélioration du cadre de vie ; la
protection de l'environnement humain ; et en général, toute autre
fin jugée utile par l'administration chargée des forêts
» (art. 13).
Les foréts protégées font partie du
domaine privé de l'Etat et constituent le domaine forestier
protégé. Les produits forestiers qui en découlent, sauf
ceux provenant de la culture des particuliers, appartiennent à
l'État (article 20). Elles sont susceptibles de concession. Les
communautés locales peuvent, à leur demande, obtenir une
concession sur tout ou partie des forêts protégées parmi
les forêts régulièrement possédées en vertu
de la coutume. L'attribution est à titre gratuit (article 22).
2.3. Les institutions de gestion et
d'administration
Les institutions qui interviennent dans la gestion des
forêts sont le ministère ayant dans ses attributions la gestion
des forêts(art.24), le cadastre forestier (art. 28), le conseil
consultatif national(art.30), et les conseils provinciaux des forêts et
les associations et organisations non gouvernementales agréées
(art.134).
2.4. Les éléments du régime
forestier
L'on peut noter parmi les plus saillants, l'organisation des
droits d'usage, l'organisation des mesures de protection ; l'inventaire,
l'aménagement et la reconstitution des foréts; l'organisation de
la concession forestière ; l'organisation de l'exploitation
forestière ; la fiscalité forestière et le régime
pénal.
Cependant par souci de ne pas trop s'écarter de notre
sujet d'analyse, nous allons singulièrement nous atteler sur
l'organisation de la concession forestière.
La concession177 forestière fait l'objet des
articles 82 à 85. Elle confère un droit d'exploitation de la
superficie de forét concédée. L'obtention de la concession
est soumise à deux conditions essentielles à savoir être
domiciliée en R.D.C. pour une personne physique ou être
constituée conformément à la loi et avoir son siège
social en R.D.C. pour les personnes morales d'une part et de l'autre, le
dépôt d'un cautionnement dont le but est : « ~ de garantir le
paiement de toutes les indemnités si les travaux sont de nature à
causer un dommage ou s'il est à craindre que ses ressources ne soient
pas suffisantes pour faire face à sa responsabilité »
(art.82 fine).
La concession s'attribue par voie d'adjudication et,
exceptionnellement, de gré à gré. Une enquête
publique est effectuée préalablement à toute, concession
dans le but de s'assurer de l'existence ou non des droits des tiers sur la
superficie à concéder. L'attribution est constatée dans un
contrat. Ce contrat comprend deux parties à savoir d'une part les droits
et obligations des parties et de l'autre un cahier des charges fixant les
obligations spécifiques incombant au concessionnaire. L'on remarque la
volonté claire du législateur d'accorder à la concession
forestière un rôle important dans le développement
socio-économique des communautés locales.
En effet, il dispose que les clauses
générales178 du cahier des charges concernent les
conditions techniques relatives à l'exploitation tandis que les clauses
particulières concernent, outre les charges financières et les
obligations d'installation industrielle, une clause particulière
relative à la réalisation d'infrastructures
socio-économiques au profit des communautés locales,
spécialement : - la construction, l'aménagement des routes ; - la
réfection, l'équipement des installations hospitalières et
scolaires ; - les facilités en matière de transport des personnes
et des biens (article 89, alinéa
3, c.)
Le contrat de concession est signé par le ministre pour
le compte de l'État. Il requiert toutefois l'approbation par
décret du président de la république lorsque les ou la
forêt à concéder dépassent une superficie de
totale
177 Voir article 13 de la loi 011-2002 portant code forestier de
la RDC
178 Voir les rapports Annuels PNUD-ONU, op. cit, p
:36-65.
de 300 000 ha et par une loi lorsque la superficie
dépasse 400 000 ha (article 92). La loi édicte des mesures
générales de protection des forêts consistant en
l'interdiction d'un certain nombre d'activités nuisibles notamment
l'exploitation illicite, la surexploitation illicite, la surexploitation, le
surpâturage, les incendies, les brûlis, les défrichements et
les déboisement abusifs. Les mesures de protection peuvent
s'étendre mémes aux zones forestières
concédées.
Le code forestier de 2002 assure une véritable
actualisation du droit forestier179 tient le plus souvent compte de
l'évolution du droit international de l'environnement et des
intéréts des particuliers. Il nous semble en revanche qu'il ne
met pas en place un régime suffisamment incitatif de la protection de
l'environnement.
I.3. Le régime minier
Le décret du 24/09/1937 établit une distinction
nette entre la propriété du sol et celle des richesses
minérales qu'il renferme. Le sol appartient à son
propriétaire tandis que les mines appartiennent à l'État
et constituent un domaine public particulier. L'État pouvait donc
attribuer les mines à d'autres personnes que le propriétaire du
sol. Il a partagé les zones minières à quelques compagnies
à chartes qui sont allés à se considérer comme des
véritables propriétaires des richesses minières. La
constitution du 1er/08/1964 donne le pouvoir au législateur
de transférer à l'État certains droits de
propriété moyennant une indemnité équitable pour
les motifs d'intérêts général.
L'ordonnance-loi n°66-343 du 07/06/1966 appelée
communément « loi BAKAJIKA » affirme que la
République reprend la pleine et libre disposition de tous ses droits
fonciers, forestiers et miniers concédés ou cédés
avant le 30/06/1960 en propriété ou en participation à des
tiers personnes morales ou physiques. Et l'article14 bis de la constitution du
31/12/1971 déclare l'État propriétaire du sol et du
sous-sol ainsi que de leurs produits naturels ; il n'est plus question de
parler des relations entre les titulaires de droit minier et les
propriétaires du sol autres que l'État.
179 La loi de 2002 abroge en effet le décret de 1949 sur
le régime forestier.
L'ordonnance-loi n°67-231 du 11/05/1967 supprime les
monopoles qu'avaient certaines sociétés dans la recherche et
l'exploitation des mines et prévoit deux régimes miniers :
1°. Le régime minier de droit
commun qui prévoit 3 démarches de l'éventuel
titulaire des droits miniers. Il introduit une :
- demande d'autorisation personnelle de prospection,
- demande de permis de recherche et
- demande de permis d'exploitation (5 ans renouvelables trois
fois) et de la concession (30 ans renouvelables deux fois).
En plus de ces différents permis, le code minier a
créée un permis spécial : le permis d'exploitation
artisanale. Ce permis180 a pour but de favoriser l'accession des
nationaux à l'exploitation des mines, et de ramener à
l'égalité les exploitations clandestines. Ce permis est
uniquement réservé aux nationaux et aux coopératives
artisanales minières.
2°. Le régime minier
conventionnel est une faculté spéciale accordée
à l'État de concéder, par convention, le droit exclusif de
recherche, le permis d'exploitation et une concession sur une ou plusieurs
zones déterminées. La convention lie l'État et une
personne morale nécessairement.
En R.D.C., le régime minier actuel s'applique à
la prospection, la recherche, l'exploitation, le traitement, le transport et la
commercialisation des substances minérales. Les hydrocarbures font
l'objet des législations particulières. Le code minier consacrant
le libéralisme, le rôle de l'État est essentiellement
limité à la promotion et à la régulation du secteur
minier. Il peut cependant au travers des organismes spécialisés,
se livrer à l'investigation du sol ou du sous-sol dans le seul but
d'améliorer la connaissance géologique du pays ou à des
fins scientifiques qui ne requièrent pas l'obtention d'un droit minier
ou de carrières. Lorsque l'État se livre seul ou en association
avec les tiers à une activité minière, les personnes
morales publiques ainsi que les organismes spécialisés
créées à cet effet sont traités sur un même
pied d'égalité que les investisseurs privés s'adonnent
à cette méme activité.
180 Voir la convention de Montego Bay.
S'agissant d'autres modalités de gestion et de
concessions du domaine de l'État dans ce secteur, la loi n°007 du
11juillet 2002 portant code minier dispose :
- « Les gîtes des substances minérales, y
compris les gîtes artificiels, les eaux souterraines et les gîtes
géothermique se trouvent sur la surface du sol ou renfermés dans
le sous-sol ou dans les cours d'eau du territoire national sont la
propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de
l'État.
- « Toutefois, les titulaires de droit minier ou de
carrières d'exploitation acquièrent la propriété
des produits marchands en vertu de leur droit».
- «La propriété des gîtes des
substances minérales, y compris les eaux souterraines et les gîtes
géométriques, dont question à l'alinéa
1er du présent article, constitue un droit immobilier
distinct séparé des droits découlant d'une concession
foncière. En aucune manière le concessionnaire foncier ne peut se
prévaloir de son titre, pour revendiquer un droit de
propriété quelconque sur les gîtes des substances
minérales, y compris les eaux souterraines et les gîtes
géothermiques que renfermerait sa concession».
II. Le domaine (ou espace) maritime
Le domaine maritime comprend les rivages de la mer, les ports
maritimes et leurs aménagements, des phares, des balises et de toutes
les installations destinées à faciliter la navigation maritime.
Nous allons évoquer successivement le régime juridique fluvial,
lacustre, de la mer territoriale et du plateau continental Congolais.
II.1. Le régime juridique
fluvial181
Le domaine fluvial comprend l'ensemble des cours d'eau
navigable et flottable, et non navigables ni flottables ainsi que les ouvrages
publics construits sur les voies navigables, des lacs.
II.2. Le régime juridique
lacustre182
Les lacs sont des grandes nappes naturelles d'eau stagnantes qui
sont formées d'eau douce. Le fait qu'ils présentent un
intérét économique
181 Voir l'Ordonnance Loi du 14/03/1966.
182 Ibidem
pour deux ou plusieurs États implique la
nécessité d'une législation efficace pouvant
réglementer ce secteur important regorgeant des ressources
naturelles.
En RDC, c'est la loi du 14/03/1966, dite Ordonnance Loi 66-96,
portant Code de navigation fluviale et lacustre qui est d'application. Cette
loi réglemente le transport des personnes et des marchandises, ainsi que
l'exploitation des gaz, pétrole et autres ressources naturelles
lacustres et fluviales. S'agissant de la chasse, c'est la loi 82-002, du
28/05/1982, portant réglementation de la chasse qui est d'application.
Par contre, la péche est régie par le décret du 12/7/1932,
portant réglementation des concessions des pêches.
II.3. Le régime juridique de la mer
territoriale Congolaise
3.1. Principe de la souveraineté de
l'État côtier183
La mer territoriale est constituée par la zone maritime
adjacente aux eaux intérieurs (ou, le cas échéant, aux
eaux archipélagiques sur laquelle s'étend la souveraineté
de l'État. L'article 2 de la Convention de Montego Bay, qui reprend les
termes de la convention de Genève sur la mer territoriale (art .1 et 2)
précise : « ... cette souveraineté s'étend à
l'espace aérien audessus de la mer territoriale, ainsi qu'au fond de
cette mer et à son sous-sol». Il en résulte que
l'État côtier y exerce des compétences exclusives tant au
point de vue économique (péche, exploitation des ressources
minérales) qu'en matière de police (navigation, douane,
santé publique, protection de l'environnement,
sécurité184). En ce sens, la mer
territoriale185 s'intègre dans le territoire de
l'État.
Cependant, le droit international impose à
l'État le respect des droits reconnus aux États tiers, au
delà de ceux admis dans les eaux intérieurs. Pour cette raison,
des auteurs soutiennent que seuls ces eaux sont assimilables au territoire
à l'exclusion de la mer territoriale qu'ils considèrent comme un
élément de la haute mer, sur lequel l'État riverain
n'exerce pas des droits de souveraineté, mais détient seulement
des compétences déterminées
183 Patrick DAILLIER et Alain PELLET, op. cit., p.
1161.
184 C.I.J., arrêt du 27/06/1986, activités
militaires au Nicaragua, Rec. de 1986, p.111 et suivant
185 Ibidem
qui lui sont expressément attribués par le droit
international. Cette opinion restrictive est entièrement ignorée
par le droit positif. Les navires publics étrangers doivent donc
interrompre des compétences exercées légitimement en haute
mer ou dans la zone économique exclusive à l'égard des
navires battant leur propre pavillon ou un pavillon tiers (droit de poursuite :
droit d'arraisonnement) lorsque ces navires pénètrent dans la mer
territoriale d'un État autre que celui du pavillon du navire
poursuivant.
3.2. Droit de passage inoffensif
1°. Principe
La limitation que le droit international coutumier impose
à l'État côtier découle du droit de passage
inoffensif des navires étrangers dans sa mer territoriale.
Déjà codifié par le statut de Barcelone de 1921(art; 2),
ce droit est aujourd'hui réglementé par les articles 14 à
23 de la première convention de Genève et les articles 17
à 32 de la convention de Montego Bay. D'après l'article 17 de
celle-ci, les navires de tous les États, qu'ils possèdent ou non
un littoral maritime, jouissent de ce droit. Aucune
discrimination186 n'est faite entre navires d'États et
navires privés, navire de commerce et navires de guerre.
Le passage est défini comme étant « le fait
de naviguer dans la mer territoriale aux fins de traverser sans entrer dans les
eaux intérieurs » ou de se rendre dans celles-ci ou de les quitter
(art.18, §1). Il doit, en principe, être « continu et rapide
» mais le stoppage et le mouillage constituent des droits pour le navire
de passage à condition de qu'ils soient des « incidents ordinaires
de navigation » ou soient justifiés par la force majeur ou une
situation de détresse ou encore qu'ils aient pour but de porter secours
à des personnes, des navires ou des aéronefs en danger (art.18
§ 2).
Aux termes des articles 16, § 3, de la Convention de 1958
et 25, § 3, de celle de 1982, l'État côtier peut suspendre le
passage inoffensif des navires étrangers, mais cette suspension doit
être temporaire et dûment publiée, ne porter que sur des
zones déterminées de sa mer territoriale, être
186 Convention de Genève, 1982, art 25, §1.
établie sans discrimination et être «
indispensable »pour assurer sa sécurité (la convention de
Montego Bay précise : entre autres pour lui permettre de procéder
à des exercices d'armes ».
2°. Règles applicables aux différentes
catégories de navires
Conformément à une règle
coutumière bien établie, « l'État côtier peut
prendre, dans sa mer territoriale, les mesures nécessaires pour
empécher tout passage qui n'est pas inoffensif 187». Ces
mesures sont cependant différentes selon qu'il s'agit des navires
marchands ou des navires d'États utilisés à des fins non
commerciales.
L'État côtier dispose à l'égard des
premiers des pouvoirs plus limités que dans ses eaux intérieurs,
mais encore très considérables. Reprenant presque en tous points
les règles prévues par celle de Genève (art.19 à
21), la Convention de Montego Bay fait une distinction entre l'exercice des
Juridictions pénale et civile.
L'État côtier se trouve beaucoup plus
démuni à l'égard des infractions commises par un navire
d'État utilisé à des fins non commerciales188
qui bénéficient des immunités de l'État
étranger (art. 32) et qu'il ne peut ni arraisonner ni dérouter.
Toutefois, reprenant les dispositions de 1958, la Convention de Montego Bay
précise que : « si un navire de guerre - la convention le
dissociant ici des autres navires d'État, peut être pour
restreindre au maximum une dérogation aux pouvoirs habituels du
souverain territorial justifiée surtout par le souci de prévenir
un incident militaire-ne respecte pas les lois et règlements de
l'État côtier relatif au passage dans la mer territoriale et passe
outre à la demande qui lui est faite de s'y conformer, l'État
côtier peut exiger que ce navire quitte immédiatement la mer
territoriale» (Article 30).
D'autre part, la convention précise que l'État du
pavillon est responsable des dommages que ces navires peuvent causer à
l'État côtier du
187 Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op. cit., p. 1163 et
773
188 Ibidem.
fait de l'inobservation des lois et règlements de
celui-ci ou du droit international. Ceci n'est qu'une application des
règles générales relatives à la
responsabilité internationale de l'État du fait du fonctionnement
de ses services publics189.
III. Le régime juridique du plateau continental
(congolais)
La Convention de Montego Bay dans ses articles 77 à 82
et 85, qui définissent l'équilibre général du
régime de Plateau Continental, n'apporte pas d'innovation sensible par
rapport à celle de 1958 (art. 2 à 5 et 7).
III.1. Les droits souverains de l'État
côtier sur son plateau continental
Les droits de l'État côtier sur son plateau
Continental sont « souverains », exclusifs - l'essentiel des
ressources naturelles n'étant pas « renouvelables » -,
inhérents et fonctionnels. Ils s'exercent sur le plateau luiméme
et non pas seulement sur les ressources qu'il contient et « sont exclusifs
en ce sens que si l'État côtier n'explore pas le plateau
continental ou n'en exploite pas les ressources naturelles, nul ne peut
entreprendre des telles activités sans son consentement exprès
».
En particulier, l'État côtier a le droit exclusif
d'autoriser ou de réglementer les forages et d'exploiter le sous-sol en
creusant les galeries.
Seules les règles concernant la recherche scientifique
tempèrent quelque peu cette exclusivité ; elles sont identiques
à celles applicables dans la zone économique exclusive. On
notera, à ce propos, que l'ordonnance de la C.I.J. du 11 septembre 1976
a rejeté une demande de mesures conservatoires, dans le litige entre
Grèce et la Turquie sur le Plateau Continental190 de la mer
Égée.
La Cour a estimé que la preuve n'avait pas
été apportée d'un préjudice irréparable
causé par les missions d'explorations d'un navire océanographique
turc.
189 Alain
PELLET.et Patrick DAILLIER, op.
cit., p. 1163 et 773.
190 Idem, p. 1192.
Le caractère inhérent de ces droits tient au
fait qu'ils sont « indépendants de l'occupation effective ou
fictive, aussi bien que de toute proclamation de droit
expresse191» ils existent donc « ipso facto et ab
initio192 » Les droits de l'État côtier sur son
plateau continental sont à certains égards différents de
ceux lui appartenant dans sa zone économique exclusive ; celle-ci doit
faire l'objet d'une proclamation expresse et l'État côtier a
l'obligation d'autoriser d'autres États à y exploiter un
éventuel « reliquat » de ressources, ce qui n'est pas le cas
pour celles du Plateau continental.
Pour étendus qu'ils soient, les droits de l'État
côtier n'en sont pas moins fonctionnels. Ils sont limités aux fins
de l'exploration du plateau continental et de l'exploitation de ses ressources
naturelles193. Celles-ci incluent les : « les ressources
minérales et autres ressources non biologiques des fonds marins et de
leur sous-sol, ainsi que les organismes vivants qui appartiennent aux
espèces sédentaires, c'est à dire les organismes qui, au
stade où ils peuvent être pêchés, sont soit immobiles
sur le fonds ou audessous du fond, soit incapables de se déplacer
autrement qu'en restant constamment en contact avec le fond sous-sol ».
En outre, l'État côtier a le droit exclusif qui
n'est pas qualifié de « souverain »-de construire, sur son
plateau continental, comme dans sa zone économique exclusive, des
îles artificielles, installations et autres ouvrages, et d'établir
autour d'eux des « zones de sécurité » d'un rayon de
500m au maximum.
III.2. Limites aux droits de l'État
côtier sur son plateau continental
Les limites aux droits de l'État côtier tiennent
d'une part aux droits et libertés appartenant aux autres États
et, d'autre part, à des exigences - limitées - de
solidarité internationale. De plus, si l'État côtier est
partie au traité du 11 février 1971 relatif à la
dénucléarisation des fonds marins, il lui
191 Conventions de 1958, art. 2 et de 1982, art. 77, §3.
Cité par Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op.cit., p. 1192.
192 C.I.J., arrêt du 20 février 1969, Plateau
Continental de la mer du Nord, Rec.1969, p.22.
193 Convention de 1958, art. 2, § 1 et de 1982, art. 77,
§ 1).
est interdit de placer ou de laisser placer des armes
nucléaires et d'autres armes de destruction massive dans ou sur son
plateau continental.
1°. Les droits reconnus à
l'État côtier sur son plateau continental ne portent pas atteinte
au régime des eaux sur-jacentes en tant que zone économique
exclusive ou haute mer, ni à celui de l'espace aérien
situé au-dessus de ces eaux. C'est dire que les autres Etats y
bénéficient d'une entière liberté de navigation et
de survol à laquelle l'exercice de ses propres droits par l'État
côtier ne doit pas porter atteinte et qu'il ne peut géner «
de manière injustifiable » (art. 5, §1 et 78, §2).
Les exigences de la protection de l'environnement marin ont
cependant conduit à autoriser l'État côtier à porter
atteinte à ces libertés traditionnelles (v.art.208 de la
Convention de Montego Bay).
En outre, traditionnellement, tous les États ont le
droit de poser des câbles et des pipelines sous-marins sur le plateau
continental (art.4 de la convention de 1958), sous la seule réserve des
« mesures raisonnables »que peut prendre l'État côtier
pour l'exercice de ses propres droits et la maîtrise de la pollution.
L'article 79 de la convention de Montego Bay précise cependant que le
tracé de pipelines doit être agrée par lui.
2°. En second lieu, en contre partie de
l'extension considérable du plateau continental, et pour atténuer
son caractère choquant au regard du concept de patrimoine commun de
l'humanité, l'article 82 de la Convention de Montego Bay prévoit
de faire exception au principe des droits exclusifs de l'État
côtier sur le produit de l'exploitation.
Plus exactement, il s'agit d'une application timide du droit
au développement : l'extraction des ressources non biologiques du
plateau continental, au delà de 200 milles, donnerait lieu à un
renversement, compris selon l'année d'exploitation, entre 1 et 7 % de la
valeur ou du volume de la production, à l'autorité internationale
des fonds marins. Cette obligation194 ne serait pas imposée
à certains pays en développement. Il appartiendrait à
l'autorité de répartir ces contributions, en espèces ou en
nature « entre les États partis
194Voir la convention de Montego Bay, art.80.
selon des critères de partage équitable, compte
tenu des intérêts de besoin des États en
développement, en particulier195 des États en
développement les moins avancés ou sous littoral».
IV. Le domaine (ou espace) aérien
IV.1. Espace aérien national
1.1. Souveraineté de l'État sous-jacent
L'article 1er de la Convention de
Paris196 de 1919 adopte, en termes catégoriques, la solution
de la souveraineté que prônaient Von Liszt et Westlake, en
opposition à la thèse soutenue par : « Les hautes parties
contractantes reconnaissent que chaque puissance a la souveraineté
complète et exclusive sur l'espace atmosphérique au-dessus de son
territoire ». La convention de Chicago de 1944 reconduit le principe. Les
deux conventions ont pris soin de préciser que le territoire de
l'État comprend ses « eaux territoriales adjacentes ». Ce qui
est confirmé par l'article 2, § 2 de la Convention de Montego Bay
de 1982.
1.2. Les règles applicables à la
navigation aérienne
Les règles applicables à la navigation
aérienne, y compris au
dessus de la mer territoriale, sont cependant tout à fait
différentes de celles quirégissent la navigation
maritime. En particulier, il n'existe pas des normes
coutumières autorisant de plein droit le survol du
territoire de l'Etat, qui pourrait être assimilée au principe du
libre passage inoffensif. La seule exception concerne le passage en transit
dans certains détroits internationaux, il en résulte que, sauf
engagement conventionnel contraire, l'Etat est libre de réglementer et
méme d'interdire le survol de son territoire et que tout survol non
autorisé constitue une atteinte à la souveraineté
territoriale de l'Etat sous-jacent (cfr. Activités militaires et
paramilitaires au Nicaragua). La violation de l'espace aérien national
par un aéronef étranger autorise l'Etat survolé à
l'intercepter et à exiger l'atterrissage. Toutes fois, à
l'égard des aéronefs civils, il ne jouit pas d'un pouvoir
illimité de riposte197 ;
195 Ibidem.
196 Convention de Chicago sur l'aviation civile.
197 Ibidem.
celle-ci doit être raisonnable et ne pas mettre en danger
la vie des personnes se trouvant à bord.
IV.2. L'espace aérien International
Le régime de la navigation aérienne
internationale198 étant établi, il faut veiller
à sa correcte application et poursuivre l'effort d'uniformisation des
normes et des procédures qu'exigent les besoins de la
sécurité et de la technique.
Au niveau International, ces taches ne peuvent être
remplies que par une Organisation internationale permanente qu'est l'OACI qui a
remplacée la CINA. Le principe d'application ici est la liberté
de l'air, mais une liberté contrôlée.
Au niveau national, en RDC, c'est l'ordonnance n°62-32,
du 8/10/1955, relative à la navigation aérienne qui est
d'application. Quant à l'aviation civile, il existe une ordonnance
n°66-194 du 30 /3/1966 qui régit le conseil supérieur de
l'aviation civile. Il convient de noter, en outre qu'au niveau des services
aériens, deux lois régissent cette matière. Il s'agit de
:
1°. L'0rdonnance-loi N°78 -009 du b29/3/78 portant
réglementation des conditions générales d'exploitation des
services aériens ;
2°. L'arreté-Ministériel 002/CABIMINECI/2001
fixant les tarifs intérieurs du secteur de transport aérien en
RDC.
198 O-L 62-321, du 8/10/1955 relative à la navigation
aérienne.
Section 3ème. DE LA VIOLATION DU PRINCIPE DE
LA
SOUVERAINETE PERMANENTE
Dans la présente section, notre tache consistera
à étudier le régime de sanction en cas de violation de la
souveraineté permanente, et d'autre part à critiquer
l'arrêt rendu par la C.I.J. dans l'affaire des activités
armées en R.D.C, opposant celle-ci à l'Uganda. S'agissant du
régime de sanction dudit principe, en cas de sa violation, nous allons
en premier lieu examiner la nature de l'obligation violée, en
présenter le régime de responsabilité, la juridiction
compétente, ainsi que la procédure y afférente, et enfin
ça sera le genre de sanction applicable. Quant à la critique
à apporter, il s'agira de savoir pourquoi le juge n'a-t-il pas
condamné l'Uganda sur base de ce principe sous examen, alors que tous
les éléments et faits étaient réunis (c'est
à dire violations flagrantes des droits souverains des peuples
congolais) ?
Les alinéas 4 et 7 de la résolution 1803
traitent de la nature de l'obligation violée et du régime de la
violation de la souveraineté permanente, en précisant à la
fois le genre d'obligation violée et le tribunal compétent pour
trancher le litige.
§ 1. Nature de l'obligation violée (Violation
grave d'une obligation découlant des normes impératives)
On se rappellera que, la violation d'une obligation
internationale constitue un fait internationalement illicite. Or, tout fait
internationalement illicite d'un État ou d'un autre sujet de droit
international engage sa responsabilité internationale. Ceci dit, une
question mérite cependant d'être posée, celle de savoir
où peut-on classer la violation du principe de la souveraineté
permanente ?
En effet, tel qu'il avait été adopté en
première lecture, le projet de la C.D.I. retenait deux catégories
différentes de violations du droit international : le «
délit» et le « crime »international dont la
définition199 était
199 Joe VERHOEVEN, op. cit., p.865.
donnée dans l'article19, paragraphe 2 : « Le fait
illicite qui résulte d'une violation par un État, d'une
obligation si essentielle pour la sauvegarde d'intérêts
fondamentaux de la communauté internationale, que sa violation est
reconnue comme un crime par cette communauté dans son ensemble constitue
un crime international». Le 3ème§ de cette
disposition fournissait une liste des crimes internationaux : l'agression, le
maintien par la force d'une domination coloniale, l'esclavage, le
génocide, l'apartheid, l'atteinte grave à l'environnement humain,
en particulier. Tous les autres faits internationalement illicites
étaient qualifiés de « délits » aux termes du
paragraphe 4 de ce méme article19».
On voit clairement que le principe de la souveraineté
permanente n'est pas nommément cité par cette liste, sans en
connaître la raison. Devant cette lacune, nous estimons pour notre part,
qu'il fait partie de la catégorie des règles de «maintien
par la force d'une domination coloniale » entendue par là, la
colonisation sous toutes ses formes et tous ses aspects ; et surtout l'aspect
politique et économique.
Cependant, bien qu'elle eut, à l'origine
été adoptée à l'unanimité par la C.D.I.,
cette distinction a suscitée des vives critiques, tant de la part de la
doctrine que de certains États, en particulier les grands occidentaux.
Il lui était notamment reproché :
- d'introduire un vocabulaire pénaliste dans les
mécanismes de responsabilité « civile »;
- de reposer sur des appréciations entièrement
subjectives en l'absence de critères clairs permettant de
déterminer l'existence d'un crime ; et
- de ne pas avoir de conséquences pratiques
significatives.
En outre, les exemples figurant au 3ème
§ de l'article 19 ont été jugés non sans raison,
discutables, souvent très « daté » et, en tout
état de cause, il n'était pas approprié d'inclure, dans un
projet de codification une liste d'exemples non limitatives.
A la suite de débats difficiles200 et
parfois houleux, tant au sein de la 6ème Commission de l'A.G.
(compétente en matière juridique) que de la C.D.I., celle-ci a
abandonné toute allusion à d'éventuels degrés
d'illicéité dans
200 Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op. cit. p. 1163 et
773.
la 1ère partie du projet
définitivement adopté en 2001, consacré au « fait
internationalement illicite ». En revanche, la distinction
réapparaît dans la 2ème partie du projet relative au «
contenu de la responsabilité internationale de l'État » dont
le chapitre 3 esquisse le régime juridique applicable aux «
violations graves d'obligations découlant de normes impératives
du droit international », périphrase un peu laborieuse qui se
substitue au mot « crime » du projet précédent tout en
reprenant pour l'essentiel, les dispositions qui en tiraient les
conséquences201 et en ménageant la possibilité
d'évolutions futures. Grâce à cette substitution, la
connotation abusivement « pénaliste» du projet de 1996
disparaît du second qui ne mentionne pas davantage le « délit
», ce qui devrait désarmer une partie des critiques.
Au surplus, les exemples qui figureraient malencontreusement
dans l'ancien article 19 sont relégués dans le commentaire de l
`article 40 et un effort est fait pour préciser la définition de
ces «violations graves ». L'appellation méme de celles-ci
renvoie aux « normes impératives du droit international »,
c'est à dire au jus cogens, dont la définition est maintenant
acquise. C'est pourquoi, tous les auteurs sont unanimes et s'accordent à
reconnaître que le droit de la souveraineté permanente est un jus
cogens, car il fait partie des « normes impératives», et au
surplus, sa violation entraîne une violation grave d'obligation
découlant des normes impératives. L'alinéa 4 de la
résolution 1803 (XVII) l'a si bien exprimé en des termes claires
et précis, il dispose : « La violation des droits souverains des
peuples et des nations sur leurs richesses et ressources naturelles va à
l'encontre de l'esprit et des principes de la charte des Nations Unies et
gêne le développement de la coopération internationale et
le maintien de la paix ».
Deux éléments doivent donc être
réunis : un comportement qui, comme on vient de le signaler, peut
être une action, une abstention ou une omission, et sa
contrariété avec une règle internationale de
caractère coutumier ou conventionnel.
201 Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op. cit. p. 1163 et
773.
§ 2. Attribution à un sujet de droit
international (qui peut violer le principe de la souveraineté
permanente ?)
Avant d'attribuer à un sujet de droit international une
quelconque responsabilité, il faudra au préalable assurer la
détermination de l'illicéité et la nature de l'obligation
violée. Or, il y a violation d'une obligation
internationale par un État, lorsqu'un fait dudit
État n'est pas conforme à ce quiest requis de lui, en
vertu de cette obligation, qu'elle que soit l'origine ou la nature de celle-ci
(article 12 du projet de la C.D.I.)
Le principe de la souveraineté permanente peut
être violé tantôt par un État, tantôt par une
Organisation Internationale à vocation économique surtout, ou
même par une société transnationale. Deux
conséquences découlent de cela :
- d' une part, le fait internationalement illicite est
attribuable à l'État ;
- d' autre part, le fait internationalement illicite est
attribuable à l'Organisation internationale à vocation
économique, ou à une société supranationale. Nous
avons donc à faire à deux régimes de responsabilité
différentes, d'un coté responsabilité des États, de
l'autre coté responsabilité des O.I. à vocation
économique et des Sociétés transnationales.
I. Attribution à un Etat.
L'attribution à l'État est très largement
admise, dès lors que le comportement dénoncé émane
de personnes ou d'organes sous son autorité effective. Le droit
international confirme, par ce biais, que les habilitations juridiques internes
ne sont que des faits pour les autres sujets de droit international. Le fait
illicite est toujours attribué à l'État, ou à
l'Organisation internationale, au nom duquel agit l'auteur de
l'acte202 ou du comportement illicite. Il peut s'agir d'un organe
individuel, depuis les gouvernants et les plus hauts fonctionnaires
jusqu'à l'agent le plus subalterne. De même, aucune distinction
n'est à établir entre les autorités centralisées et
les autorités décentralisées, entre celles qui sont
spécialement en charge des relations extérieurs de l'État
(Chef de l'État, Chef de gouvernement, Ministres des
202 Dominique ROSENBERG, op. cit., p.273.
affaires étrangères et agents diplomatiques), et
les autres, non plus qu'en fonction du caractère législatif,
exécutif, administratif ou juridictionnel des activités de
l'agent.
D'autres faits de l'État peuvent engager la
responsabilité de l'Etat et entraînant ipso facto, la
violation203 du principe de la souveraineté permanente ; il
s'agit de : faits des démembrements de l'État, faits des
particuliers et faits d'insurrection.
II. Attribution à une Organisation
Internationale
à vocation économique
Dans d'autres cas, la violation du principe de la
souveraineté permanente peut être due par le fait d'une ou de
plusieurs Organisations internationales. Bon nombre d'entre elles se livrent
plus dans l'exploitation et le pillage des matières premières et
ressources naturelles. Dans ce cas, comme les États, les Organisations
Internationales voient leur responsabilité internationale engagée
du fait des comportements illicites, qui leur sont imputables.
Il n'y a là qu'une conséquence nécessaire de
leur personnalité juridique. Certains États ne sont pas
favorables à cette solution et préfèrent rechercher la
responsabilité des États membres. Le régime de cette
responsabilité suit, dans ses règles générales,
celui de la responsabilité de l'État. La transposition a
été d'autant plus naturelle qu'il s'agissait de règles
coutumières et que ces règles visaient souvent à
protéger les intérêts de particuliers. Sa mise en oeuvre
est rendue délicate, dans les faits, par l'absence de procédures
de règlement préétablies. Il peut s'agir directement des
faits des organes et agents de l'Organisation Internationale agissant dans le
cadre de leurs compétences ; ou soit des faits d'organes et d'agents
incompétents, soit enfin des faits des États agissant pour le
compte des O.I.
§ 3. Circonstances excluant l'illicéité
La notion de circonstance204 excluant l'
illicéité correspond à ce que l'on appelle, en droit
interne, les causes exonératoires de responsabilité. L'expression
«circonstance excluant l'illicéité» paraît
cependant plus exacte à deux points de vue. D'une part, elle
présente l'avantage d'éviter une confusion entre, d'un
coté, la responsabilité et, de l'autre son fait
générateur : les circonstances dont il s'agit concernent
celui-ci, pas celle-là même si, par ricochet, elles la font
disparaître. D'autre part, elle marque bien que c'est l'un des deux
éléments constitutifs du fait internationalement
illicite205, la violation d'une obligation (constitutive de
l'illicéité) qui, seul, se trouve en quelque sorte
neutralisé ; l'attribution du comportement à l'État ou
à l'organisation internationale intéressés n'en est
nullement modifiée.
En outre, il faut bien comprendre que ces circonstances
excluent l'illicéité d'un comportement déterminé ;
mais elles laissent pleinement subsister l'obligation violée à la
charge de l'auteur du manquement: si les circonstances le permettent (et si
l'obligation s'y préte), celui-ci devra s'en acquitter à nouveau.
Comme le précise l'article 26 du projet de la CDI, aucune circonstance
ne saurait exclure « l'illicéité de tout fait de
l'État qui n'est pas conforme à une obligation découlant
d'une norme impérative du droit international général
».
La liste des circonstances excluant l'illicéité
n'est pas facile à établir. La C.D.I. en a retenue six : le
consentement de l'Etat victime ; la légitime défense ; les
contre-mesures ; la force majeure ; la détresse et l'état de
nécessité (article 20 à 26 du projet).
D'autres circonstances sont
étrangères206 à la victime et excluent de ce
fait toute responsabilité. Il s'agit entre autre de la force majeure.
Ainsi, un État qui commet un acte illicite ne saurait invoquer sa
souveraineté pour
204 Alain PELLET et Patrick DAILLIER, op. cit. p. 920 et
s.
205 Ibidem.
206 Dominique ROSENBERG, op.cit., pp.134 à 178.
s'exonérer de sa responsabilité. Ce serait nier
l'existence méme du droit international.
§ 4. Mécanisme général de la
responsabilité(Conséquences du fait internationalement
illicite)
Sous réserve de l'existence éventuelle d'une
responsabilité sans manquement en droit international, la
responsabilité peut être définie comme la situation
créée par la survenance d'un fait internationalement illicite. Il
en résulte une nouvelle relation juridique entre l'État ou
l'Organisation Internationale auteur de ce fait et un ou plusieurs autres
sujets du droit international. Toute règle de droit international se
décompose en une obligation majeure, qui est de la respecter, et une
obligation mineure, consistant à corriger les effets de son non-respect.
Tel est le contenu même de la responsabilité dans tout
système juridique. C'est le méme qui s'applique à
l'égard du principe de la souveraineté permanente.
Le mécanisme général de la
responsabilité applicable est très clair : pas de
responsabilité internationale sans préjudice ou dommage. La
responsabilité peut être définie comme la situation
créée par la survenance d'un fait internationalement illicite. Ce
fait doit produire un préjudice juridique, condition nécessaire
de l'existence de la responsabilité. Il en résulte une nouvelle
relation juridique entre l'État ou l'Organisation internationale auteur
de ce fait et un ou plusieurs autres sujets du droit international. Toute
règle de droit international se décompose en une obligation
majeure, qui est de la respecter, et une obligation mineure, consistant
à corriger les effets de son non-respect. Tel est le
contenu207 même de la responsabilité dans tout
système juridique qui s'applique également en cas de violation du
principe de la souveraineté permanente.
I. Le préjudice
L'article 31, §2, du projet d'articles de la C.D.I.
reflète indiscutablement le droit positif quand il définit le
préjudice en ces termes : « le
207 Voir le code de la C.D.I.
préjudice comprend tout dommage, tant matériel
que moral résultant du fait internationalement illicite de l'État
». Du méme coup se trouve confirmée la synonymie des mots
« dommage et préjudice».
En cas de violation de la souveraineté permanente, un
État subit plusieurs dommages à la fois liés à ses
ressources naturelles ainsi qu'à toutes sortes des richesses dudit
État victime. Cependant, ce principe obéit à un
régime particulier des violations graves d'obligations découlant
de normes impératives du droit international général.
II. Contenu de la responsabilité internationale
II.1. Exécution de l'obligation, cessation et
non-répétition
Le fait internationalement illicite dont il est question ici,
demeure la violation du principe de la souveraineté permanente. C'est
une atteinte à la sécurité des rapports juridiques comme
le stipule si bien la résolution 3281 (XXIX) du 12/12/1974 sur la charte
des droits et devoirs économiques d'un Etat. Comme tout système
juridique, le droit international, malgré son caractère
faiblement «exécutoire » (par opposition à «
obligatoire », ce qu'il est comme tout ordre juridique) s'efforce d'en
limiter les effets perturbateurs. Et d'abord en réaffirmant la
persistance de l'obligation violée : « Les conséquences
juridiques d'un fait internationalement juridiques208... n'affectent
pas le maintien du devoir de l'État responsable d'exécuter
l'obligation violée» (art. 29 du projet de la C.D.I.).
Aux termes de l'art. 30 du projet de la C.D.I., l'État
responsable du fait internationalement illicite a également «
l'obligation :
1°. d'y mettre fin si ce fait continue ;
2°. d'offrir des assurances et des garanties de non
répétition appropriées si ces circonstances
l'exigent».
La cessation du fait internationalement illicite qui se prolonge
ou se répète dans le temps ne soulève pas les mêmes
problèmes. Elle est la
208 Dominique ROSENBERG op.cit, p. 278.
première et la plus évidente conséquence
de l'obligation générale incombant à l'État ou
à l'Organisation internationale responsable d'éliminer les
conséquences de son fait internationalement illicite, principe qui guide
également le droit applicable en matière de réparation
II.2. L'obligation de réparer.
L'article 31du projet d'articles de la C.D.I. précise
que « l'Etat responsable est tenu de réparer intégralement
le préjudice causé par le fait internationalement illicite».
A coté de l'obligation de réparer, caractéristique de la
responsabilité, existe une faculté de réparer à
titre gracieux.
II.3. Modalités de la réparation
Comme l'indique clairement le projet de la
C.D.I209., « la réparation intégrale du
préjudice causé par le fait internationalement illicite prend la
forme de restitution, d'indemnisation, et de satisfaction,
séparément ou conjointement ».
3.1. Remise des choses en l'état ou restitutio
in integrum
L'objectif premier de la réparation est d'effacer
toutes les conséquences du fait internationalement
illicite210. Il en résulte que, chaque fois que cela est
possible, il convient de privilégier la restitutio integrum qui vise
à la remise des choses dans l'état antérieur au fait
internationalement illicite, par rapport aux autres formes de
réparation. Celle-ci constitue donc la modalité de principe de la
réparation. En cas de préjudice matériel, quand l'acte
juridique a déjà produit des effets irréversibles ou
lorsqu'un acte matériel a causé un dommage définitif, la
remise des choses en l'état n'est plus concevable et il faut chercher
une autre modalité de réparation.
3.2. Réparation par équivalence :
indemnisation
209 Patrick Daillier et Alain PELLET, op. cit.p.895
210 Ibidem
Toujours dans l'affaire211 de l'usine de Chorzow,
la C.P.J.I. a reconnu que « c'est un principe de droit international que
la réparation d'un dommage peut consister en une
indemnité».
En effet, si la restitutio in integrum constitue le mode de
réparation privilégié, celle-ci se révèle le
plus souvent difficile et le paiement d'une indemnité est dans la
pratique la modalité de réparation la plus courante. C'est que,
comme le dit Grotius212, l'argent est la mesure de la valeur des
choses, de fait, l'indemnisation est la forme la plus fréquente de
réparation.
3.3. La satisfaction
Dans certains cas, l'indemnisation est inadéquate pour
réparer un préjudice purement moral ; la réparation la
mieux adaptée est, elle aussi, purement morale : c'est la satisfaction.
Il s'agit par exemple des regrets exprimés ou des excuses
présentées par l'État responsable, ou encore, dans
certains cas, d'actes symboliques comme le salut au drapeau, etc.
§ 5. Mise en oeuvre de la responsabilité
Qui est titulaire du droit d'invoquer la
responsabilité, en cas de la violation de la souveraineté
permanente ? Dans la très grande majorité des cas, seul
l'État lésé, celui qui a subi un préjudice,
immédiat ou médiat, est en droit d'invoquer la
responsabilité de l'auteur de la violation de la souveraineté
permanente.
La Société internationale est marquée par
un degré poussé de décentralisation ; contrairement
à ce qui se passe dans l'État, il n'y existe pas
d'autorité centrale pouvant déclencher des poursuites contre un
État ou une Organisation internationale auquel un fait
internationalement illicite peut être attribué. Sans doute, les
Nations Unies sont-elles dotées de pouvoirs coercitifs qui, en
dernière analyse, peuvent être utilisés pour obliger un
État à exécuter les obligations qui lui incombent en
matière de responsabilité ; et certaines organisations
régionales (O.E.A.,Union Africaine) peuvent contribuer à cette
211 Joe VERHOEVEN, op. cit. p.722.
212 Alain PELLET ET Patrick DAILLIER, op. cit., p. 798 et
s.
mission213. Mais celle-ci ne s'inscrit pas dans le
cadre du droit de la responsabilité : il s'agit de maintenir la paix et
la sécurité internationales, même si à cette
occasion, la cessation d'un fait internationalement illicite ou la
réparation de ses conséquences dommageables peuvent être
exigées, notamment par le conseil de sécurité agissant
dans le cadre du chapitre VII de la charte. L'article 48 du projet de la C.D.I.
va plus loin encore en admettant que « tout État autre qu'un
État lésé est en droit d'invoquer la responsabilité
d'un autre État si ~ (b) l'obligation violée est due à la
communauté. .''.
I.Les modalités d'invocation de la
responsabilité
Les procédures de mise en oeuvre214 de la
responsabilité internationale d'un État ou d'une organisation
internationale, en cas de violation de la souveraineté permanente ne
présentent aucune particularité par rapport aux mécanismes
usuels des relations entre États. Elles passent en général
par le canal des missions diplomatiques des États concernés et le
règlement des divergences qui peuvent opposer l'État responsable
et celui ou ceux qui invoquent sa responsabilité doivent être
résolues par des moyens pacifiques (règlement pacifique de
différends dont les négociations diplomatiques sont les plus
usuels), si le négociations échouent, le différends peut
être soumis à un organe juridictionnel ou arbitral.
II. Règlement pacifique des différends
internationaux
Le règlement de différend215 dû
à la violation du principe de la souveraineté permanente est
complexe et fait intervenir à la fois les deux grandes catégories
de modes de règlement de différends, en combinant le
critère de la portée juridique de la solution et son fondement,
en opportunité ou en droit. Cela parce que tout conflit international
est à la fois politique et
juridique, seule la pondération des aspects politiques
et juridiques varie. D'oüon a successivement :
II.1. Le règlement non juridictionnel
Il s'agit de :
213 Joe VERHOEVEN, op.cit., p.769.
214 Joe VERHOEVEN, op.cit., p.769.
215 Patrick DAILLIER et Alain PELLET, Op. Cit.
p.830-935.
1°. procédés inter étatiques :
négociations diplomatiques ; intervention des tiers (bons offices,
médiation, enquête internationale, conciliation internationale)
;
2°. règlement non juridictionnel dans le cadre des
O.I.
II.2. Le règlement juridictionnel
L'alinéa 4 de la résolution 1803 (XVII )sur la
souveraineté permanente prévoit expressément ce mode de
règlement en ces termes : «...dans tout cas où la question
de l'indemnisation donnerait lieu à une controverse, les voies de
recours nationales devront être épuisées ~ Toutes fois, sur
accord des États souverains, et autres parties
intéressées, le différend devrait être soumis
à l'arbitrage ou à un règlement judiciaire
international». Voilà donc les deux procédés de
règlement prévus par la résolution 1803. Selon le mot d'un
délégué à la conférence de la Haye de 1907,
l'arbitrage est la confiance, le règlement juridictionnel
l'obéissance. Cela étant, le mode de règlement
juridictionnel est constitué de deux procédés que sont le
recours à l'arbitrage et le règlement par une juridiction
permanente. Examinons d'abord l'arbitrage et le règlement judiciaire
ensuite.
2.1. Le règlement arbitral
«L'arbitrage international à pour objet les
règlements des litiges entre les états par les juges de leurs
choix et sur base du respect du droit»216 comme tout acte
juridictionnel, la sentence arbitrale est dotée de l'autorité de
la chose jugée dont le fondement est à recherché soit dans
la souveraineté étatique, soit dans le fait d'être rendue
sur base du droit.
Le recours à l'arbitrage217 implique
l'engagement de se soumettre de bonne foi à la sentence. La
résolution 1803 (XVII) sur la souveraineté permanente, litera 4,
reconnaît expressément l'arbitrage comme mode de règlement
de litige en ces termes : «...Dans tous les cas où la question de
l'indemnisation sera soulevé, le différend devrait être
soumis à l'arbitrage ou à un règlement judiciaire
international». Rappelons aussi que le recours à l'arbitrage
implique
216 Patrick DAILLIER et Alain PELLET, op. cit. p.867 -
885.
217 Voir l'alinéa 4 de la résolution 1803,
où l'arbitrage est proposé parmi les modes de règlement de
différend institués par cette résolution.
le droit de refuser d'être attrait devant un tiers. Elle
implique tout autant le droit de faire exception à ce refus par un
engagement conventionnel. Ce consentement à l'arbitrage doit être
suffisamment clair et précis pour constituer une véritable
obligation juridique internationale. D'où il est tantôt
facultatif, tantôt obligatoire.
2.2. Le Règlement par une juridiction
permanente
La Cour Internationale de Justice (C.I.J.) constitue l'organe
judiciaire principal des Nations Unies. Compte tenue de la nature
juridique218 du principe de la souveraineté permanente, qui
est un jus cogens, les litiges en cas de sa violation sont portés devant
la Cour Internationale de Justice, comme cela est bien prévue par la
résolution 1803(XVII) en son litera 4.
On se rappellera aussi que cette même résolution
stipule que la violation de ce sacré principe entraîne la
violation de la charte de l'O.N.U. et gêne la coopération et le
maintien de la paix et de la sécurité internationale. Le conseil
de sécurité joue donc à son tour un rôle important
en cas de violation de ce sacré principe. C'est à lui que revient
la tache de constater que cette violation de la souveraineté permanente
constitue ou non un cas de rupture ou de menace contre la paix, de le qualifier
et de prendre des mesures qu'il juge nécessaire pour rétablir la
paix dans la zone troublée.
III. Cas pratique : Affaire des activités
militaires et paramilitaires opposant la RDC à l'Uganda
III.1. Prétention de la partie demanderesse
La R.D.C. soutient que l'exploitation illégale et le
pillage de ses ressources naturelles constituent des violations par l'Ouganda,
de « la souveraineté et de l'intégrité territoriale
de la R.D.C., et plus particulièrement de la souveraineté de la
R.D.C. sur ses ressources naturelles ». A cet égard, la R.D.C. se
réclame du droit des États sur leurs ressources naturelles et
mentionne la résolution 1803(XVII) relative à la
souveraineté permanente sur les ressources naturelles adoptée par
l'A.G. des Nations Unies le 14/12/19622,
218 Synthèse de l'additif au mémoire
N°S/221/1156 du gouvernement sur le pillage en R.D.C.
la déclaration sur l'établissement d'un nouvel
ordre économique international contenue dans la résolution
3201(S.VI) adoptée par l'A.G. le 1er mai 1974, et la charte
des droits et devoirs économiques des États adoptés par
l'A.G. des Nations Unies dans sa résolution 3281(XXIX) du 12/12/1974.
La R.D.C. affirme que l'Ouganda est en tout état de
cause responsable des actes de pillage219 et d'exploitation
illégale de ses ressources commis par des officiers et soldats des UPDF,
qui ont qualité d'organe220 de la République
Ougandaise. D'après elle, il importe peu que les membres de
l'armée Ougandaise se soient ou non conformés à des ordres
officiels de leur gouvernement, ou qu'ils aient agi à titre officiel ou
privé.
S'agissant du devoir de vigilance, la R.D.C. prétend
que l'obligation de respecter la souveraineté des États sur leurs
ressources naturelles implique que tout État prenne les mesures
appropriées221 pour que ses forces armées, ses
ressortissants ou les groupes qu'il contrôle ne se livrent pas à
l'exploitation illégale des ressources sur le territoire d'un autre
État. La RDC, affirme que toutes les activités d'exploitation de
ressources naturelles menées par des entreprises et ressortissants
Ougandais ou des mouvements rebelles soutenus par l'Ouganda constituent des
actes d'exploitation illégale de ses ressources naturelles par des
membres des forces armées ougandaises, par des entreprises
privées et des ressortissants ougandais, ou par les mouvements rebelles
congolais qu'il contrôlait et soutenait, manquant ainsi à son
devoir de vigilance.
La RDC fait valoir que, en se livrant à l'exploitation
illégale et au pillage des ressources naturelles congolaises, l'Ouganda
a également violé les obligations qui s'imposaient à lui,
en tant que puissance occupante, en vertu du jus in bello222. Selon
la RDC, « le détail des règles du droit des conflits
armés relatives à l'exploitation des ressources naturelles doit
être examiné au regard du principe fondamental de la
souveraineté permanente sur les
219 Voir rapport panel
220 Ibidem
221 Rapport des commissions `'porter» et `'panels»
222 Cour Internationale de Justice, Rôle
génóal N°16 du 19/12/2005, 100p.publié par
www.cij-icj.org
ressources naturelles », lequel, de l'avis de la RDC, reste
d'application en toutes circonstances, notamment en temps de conflit
armé et d'occupation.
III.2. Prétention de la partie
défenderesse
L'Ouganda nie pour sa part d'avoir violé le principe de
la
souveraineté permanente du peuple congolais sur ses
ressources naturelles. Iisoutient que ce principe «
façonné dans un cadre historique précis
(notamment celui de la décolonisation) et ayant une finalité
bien précise », ne saurait être applicable dans le
contexte de la présente affaire. L'Ouganda affirme que des actes
individuels commis à titre privé par des membres de ses forces
armées et au mépris d'ordres et d'instructions ne permettent
pas de lui imputer une violation de la souveraineté permanente du
peuple congolais sur ses ressources naturelles.
III.3. Décision de la Cour
La Cour considère qu'elle ne peut retenir l'affirmation
du demandeur selon laquelle l'Ouganda aurait violé le principe de la
souveraineté permanente (de la RDC) sur ses ressources naturelles. La
Cour rappelle que, le principe de la souveraineté permanente sur les
ressources naturelles a été énoncé dans les
résolutions 1803(XVII) adoptée par l'A.G. des Nations Unies le
14/12/1962, puis a été développé dans la
déclaration concernant l'instauration d'un nouvel ordre
économique international contenue223 dans la
résolution 3201 (S.VI) adoptée par l'A.G. le 1er mai
1974, et la charte des droits et devoirs économiques des États
adoptés par l'A.G. des Nations Unies dans sa résolution 3281
(XXIX) du 12/12/1974.
Tout en reconnaissant l'importance224 de ce
principe, qui revêt le caractère d'un principe de droit
international coutumier, la Cour relève que rien dans ces
résolutions de l'A.G. ne laisse entendre qu'elles soient applicables au
cas particulier du pillage et de l'exploitation de certaines ressources
naturelles par des membres de l'armée d'un État intervenant
militairement sur
223Arrêt rendue sur l'Affaire des
activités militaires et para militaire être RDC c Uganda, pp. 48
à 57, publié par
www.cij-icj.org.
224 Arrêt rendue sur l'Affaire des activités
militaires et para militaire être RDC c Uganda, pp. 48 à 57,
publié par
www.cij-icj.org.
le territoire d'un autre État, ce qui est l'objet du
troisième chef de conclusions de la RDC. La Cour n'estime pas que ce
principe s'applique à ce type225 de situation.
La Cour conclut qu'elle dispose de suffisamment
d'éléments de preuve crédibles pour considérer que
l'Ouganda a engagé sa responsabilité internationale à
raison des actes de pillages et d'exploitation des ressources naturelles de la
RDC commis par des membres des UPDF226 sur le territoire de la RDC,
de la violation de son devoir227 de vigilance s'agissant de ces
actes et du manquement des obligations lui incombant, en tant que puissance
occupante de l'Ituri, en vertu de l'article 43 de du règlement de la
Haye de 1907, quant à l'ensemble des actes de pillage et d'exploitation
des ressources naturelles commis dans le territoire occupé.
III.4. Bref commentaire sur ce cas
Pour notre part, nous pensons que l'adage `'curria non novit
jus» s'applique dans ce cas précis. Le juge ne sait pas appliquer
la loi, car il n'a pas tenu compte de l'évolution du principe de la
souveraineté permanente pour se rendre compte que son objet s'est
étendu.
En effet, il ne s'agit plus seulement d'un principe de la
décolonisation, mais bien plus son objet s'est étendu, incluant :
1° un pouvoir de contrôle sur les intérêts
économiques étrangers, 2° un pouvoir de réglementer
l'investissement, de réglementer et de surveiller les activités
des sociétés transnationales dans les limites de sa juridiction
nationale l'investissement, 3° un droit de nationaliser, d'exproprier ou
de transférer la propriété des biens étrangers,
...
225 Ibidem.
226 Arrêt rendue sur l'Affaire des activités
militaires et para militaire être RDC c Uganda, pp. 48 à 57,
publié par
www.cij-icj.org.
227 Voir le Rapport commission Lutundula, secrétariat
général de l'Assemblée Nationale congolaise, Kinshasa.
C O N C L U S I O N G E N E R A L E
Au terme du présent travail, qui a consisté
à examiner l'article 9 de la constitution de la 3ème
république en R.D.C., il convient de rappeler que dans l'introduction de
cette étude, nous articulions notre problématique autour de
l'apparente contradiction ou similitude entre, d'un coté l'art.9 et de
l'autre coté la loi BAKAJIKA, l'article 53 de la loi du 20/07/73, et
l'article 34 de la nouvelle constitution.
Nous avons par ailleurs souligné, la
nécessité de connaître les mécanismes juridiques par
lesquels l'État peut recourir pour recouvrir les ressources naturelles,
qui lui ont été extorquées et pillées, en vue de
satisfaire le bien être de la population et le développement du
pays. Cet état de choses engendre des récriminations
entraînant parfois des conflits228 qui opposent la R.D.C.
à ses agresseurs ou à ceux qui pillent ses
richesses229, (individus congolais, étrangers et autres
États belligérants). D'où en définitive, nous en
venions à nous demander si la communauté internationale, ayant
perçu ce phénomène avait prévu des
mécanismes juridiques propres à rétablir
l'équilibre des intérêts antagonistes, en cas de violation
de ce principe.
C'est pourquoi, d'entrée de jeu, nous avons
estimé que la formulation de l'article 9, où l'on emploi
l'expression de souveraineté permanente n'était en rien contraire
à l'art. 53 de la loi du 20/7/73 sur la propriété
inaliénable et exclusive de l'État, et à ces autres textes
légaux évoqués ci haut. Bien au contraire, la
souveraineté évoquée à l'art. 9 les
complète, les englobe, car elle est plus large et complet, en prenant en
compte toute l'étendue, tous les compartiments du territoire congolais
(espace terrestre, maritime et aérien). Dans l'esprit du
législateur congolais, en consacrant ce principe dans le droit positif
congolais, il entend protéger les
228 Mémoire additif du gouvernement congolais
adressé au secrétaire général des Nations Unies,
sur le pillage et l'exploitation illégale des ressources de la RDC
229 On fait allusion ici à toutes les firmes
internationales, aux hommes d'affaires congolais et étrangers, aux pays
puissants, ...qui soutiennent et financent la guerre en RDC, en vue de
perpétrer les crimes économiques et le pillage des ressources
naturelles de la R.D.C. cfr. : Rapports panel
générations présentes et à venir
contre les atteintes et convoitises des Etats étrangers sur les
richesses et ressources naturelles de la R.D.C.
En outre, les ressources naturelles étant
épuisables et un important outil au service du développement
économique, une gestion saine et efficace s'avère non seulement
nécessaire, mais également impérative pour satisfaire le
bien être de la population et le développement du pays, selon
l'esprit de la résolution 1803(XVII). A ce propos, les différents
mécanismes de contrôles institués par le principe de la
souveraineté permanente constituent un levier et un bouclier très
efficace pour mettre fin au pillage230 des ressources naturelles de
la RDC. Celle-ci devra attraire en justice tous ceux qui ont violés
ledit principe et pillés ses ressources naturelles en saisissant la
C.I.J. en vue d'obtenir réparation pour tous les préjudices
subis.
Le développement de l'Afrique dépend en gros de
celui de la RDC. Pour cela on doit favoriser la coopération
internationale pour le développement économique dans les pays des
grands lacs, en procédant par les investissements, en vue de promouvoir
la paix dans cette région231 tant meurtrie par les guerres.
Cela étant, notre analyse s'est subdivisée en deux chapitres ;
dont le premier a porté sur la clarification conceptuelle et le second,
sur le régime juridique, mécanismes de contrôles et
modalités d'exercice de la souveraineté permanente.
Abordant le premier chapitre, intitulé : clarification
conceptuelle, nous avons constaté que cet article pose le
problème de confusion entre les termes propriété et
souveraineté. D'où, il a été question de
confronter, mieux de distinguer la notion de souveraineté permanente
consacrée par l'article 9, à la notion de la plénitude des
droits fonciers, miniers, et forestiers face ainsi à la Loi dite
BAKAJIKA(sect. 1ère), à celle de la domanialité
et de domaine éminent de droit médiéval, à celle de
la suzeraineté (sect. 2ème), face à la loi
BAKAJIKA (sect. 3ème) et enfin à l'article 53 de la
loi du 20/07/1973 consacrant la
230 Cfr Rapport panel des Nations Unies.
231 Nous avons à cet effet recouru aux principes de la vie
internationale, dont: la vocation internationale de la RDC, à la
politique d'ouverture et au principe de bon voisinage.
propriété exclusive, inaliénable et
imprescriptible de l'Etat Congolais (sect. 4ème) et enfin à
l'article 34 de la constitution. Tout ceci dans le but de savoir le sens et la
portée de l' art.9 en examinant les rapports qui existent entre ces
notions et voir si elles peuvent s'équivaloir ou
s'interpénétrer et dire la méme chose.
Bref, il fallait préalablement résoudre ce
problème sémantique en le rendant claire, sans
ambiguïté, ni confusion, pour faire cesser toutes les
polémiques et controverses autour de cet article.
Dans l'esprit du législateur congolais, en consacrant
ce principe dans le droit positif congolais, il entend protéger les
générations présentes et à venir contre les
atteintes et convoitises des Etats étrangers sur les richesses et
ressources naturelles de la R.D.C. Quelle est donc la place de la
propriété foncière sous cette nouvelle constitution ?
En analysant plus profondément cet article, nous avons
constaté qu'il y a un hiatus, servant d'intermédiaire entre le
1er et le 2ème alinéa, pour que cet article
soit complet. Pour ce faire, nous avons estimé que cet hiatus
consisterai à préciser et déterminer la place de la
propriété foncière de l'Etat .D'où elle devrait
être formulée ainsi : le sol, sous-sol, les mines sont la
propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de
l'Etat. En distinguant l'article 9 de l'article 34 de la constitution, on a
démontré que ces deux articles se recouvrent, mais ne s'opposent
pas. Car l'article 9 n'a ni la prétention232 de supprimer la
propriété individuelle et collective acquise conformément
à la loi ou à la coutume, ni de supprimer le monopole de la
propriété foncière de l'Etat. Nous retenons donc, que
l'État demeure toujours le seul et unique propriétaire du sol,
sous-sol, forét, mines,... En répondant de la sorte, notre
première hypothèse se trouve ainsi confirmée à un
degré largement fort.
Poursuivant notre analyse, dans le second chapitre,
intitulé : du régime juridique et des modalités d'exercice
de la souveraineté permanente, il s'est agi de mener un examen minutieux
tout d'abord sur les différents
232Dans la résolution 1803, et l'article 34 on
retrouve le droit à la propriété privée et
l'expropriation pour cause d'utilité publique.
mécanismes de contrôles prévus par ledit
principe(section1ère), ensuite les modalités d'exercice et le
régime juridique du principe sous examen( section 2ème) et enfin
le cas de la violation de ce principe à la fois par les Etats, les
Organisation Internationales, les personnes privées et autres sujets,
tant du droit interne ou du droit international( section 3ème).
Il y a lieu de préciser que, dans l'étude des
mécanismes de contrôles, nous avons mis un accent particulier sur
la nationalisation en le distinguant de ses aspects et de ses notions voisines
telles que : l'expropriation pour cause d'utilité publique, la
radicalisation, la réquisition, l'alignement,~ Ici aussi, nous avons mis
en exergue ces notions aux prescrits de l'article 34 de l'actuelle
constitution, qui consacre le droit à la propriété
privée et collective, sous réserves des prescrits légaux.
Contrairement à ce qui se dit, la propriété privée
dont il est question à l'art.34 ne s'applique pas au sol, au sous-sol,
aux mines qui restent une propriété exclusive, inaliénable
de l'État Congolais.
L'article 53 de la loi du 20/07/73 est donc une limite, disons
mieux, une exception à l'article 34 de la constitution. Nous avons, par
la suite, mentionné d'autres mécanismes de contrôles tels
que la réglementation d'investissement233 privé et
étranger des sociétés transnationales, ainsi que les
Entreprises conjointes, dits autrement « contrats de joints ventures
» et autres formes d'associations contractuelles.
S'agissant du régime juridique et des modalités
d'exercice de la souveraineté permanente, nous avons
démontré, comme l'exige l'alinéa 2ème de
la résolution 1803 (XVII), que la souveraineté permanente doit
s'exercer dans l'objectif de l'intérêt général, pour
le bien être de la population et le développement du pays
titulaire de l'exercice de cette souveraineté. D'où alors, il
était question que l'action de l'Etat congolais commence par
réglementer toutes les activités économiques se
déroulant non plus seulement sur l'espace terrestre, mais cette fois-ci,
sur l'espace maritime et aérien, voire- même le plateau
continental, couvrant l'exclusivité du territoire congolais. Notre
deuxième hypothèse se retrouve également confirmée,
à cet effet.
233 Loi N°004-2004 du 21/2/2002 portant code des
investissements.
En définitive, nous avons abordé la
3ème section qui traite de la violation du principe sous
examen, avec comme cas pratique, l'affaire R.D.C. contre Uganda. A ce propos,
nous avons pu établir que, eu égard à la nature du
principe sous examen, qui est un jus cogens, sa violation constitue une
violation d'obligations impératives graves du droit international.
Par-là aussi, notre troisième hypothèse se trouve
également confirmée.
En relevant les grands constats, nous pouvons dire que les
innovations qui résultent de l'article sous examen ici, par rapport
à la législation précédente, comportent beaucoup
d'aspects novateurs qui sont de nature à assurer aux
générations futures une stabilité. Tel est justement le
mérite de cet article, le législateur congolais innove en
intégrant cette fois l'espace maritime, aérien et terrestre du
territoire congolais ainsi que le plateau continental. Pour ce faire, le terme
propriété du droit privé ne paraît plus dès
lors approprié pour réglementer le lien juridique de
l'État et son territoire et appréhender les cimes des
prérogatives de l'État sur son domaine public et privé.
Toutefois, il convient de préciser que seul
l'État congolais demeure propriétaire du sol, sous sol, et mines
comme cela fut le cas naguère avec la loi dite «BAKAJIKA» et
la loi du 20/07/1973. Cette notion de propriété dont question ici
est radicalement différente de celle de la propriété
privée consacrée par l'article 34 de la constitution. C'est
méme une exception à l'article 34. Les pouvoirs publics sont
seulement chargés de leur gestion administrative ou de leur garde. En
aucun cas ils n'en sont le propriétaire. C'est méme la raison
pour laquelle nous disons que l'art.09 de ladite constitution ne contredit en
rien la conception du monopole de l'État sur son sol, sous sol, mines,
etc. prônée par la loi BAKAJIKA et celle du 20/07/73, car
l'intention du législateur est de rendre l'État
propriétaire foncier maintenant et à jamais.
Malgré la persistance des risques politiques, la RDC,
véritable scandale géologique, est très convoitée
à la fois par ses pays voisins, des milices des hommes armés, et
de l'autre coté par les investisseurs qui
négocient et concluent des marchés de ses
ressources minières. Un futur gouvernement234 congolais
pourra-t-il redresser la situation, répudier unilatéralement une
partie des contrats léonins, mettre fin au pillage et à
l'exploitation illégale des ressources naturelles en restaurant la paix
et la sécurité entre la R.D.C. et ses voisins sans engager sa
responsabilité internationale ? Les pratiques actuelles compromettent
déjà cette perspective.
Soulignons en dernière analyse que, cette piste
complémentaire à la présente étude, nous a
été suggérée par notre étude. Mais nous ne
pouvions malheureusement pas l'aborder, notre recherche étant
forcément délimitée pour des multiples raisons. Notre voeu
demeure que des recherches futures réaffirment l'évolution et la
marche inexorable de la science, comblent nos insuffisances et aident le
législateur congolais à légiférer toujours dans le
sens d'un meilleur équilibre entre la protection des investissements,
des ressources naturelles d'un coté et, de l'autre celle de
l'intérêt général, c'est à dire une vraie
croissance économique et un développement durable pour notre
pays, la R.D.C.
234Le défi majeur que ce gouvernement doit
relever consistera en premier lieu à arrêter le pillage des
ressources naturelles, en passant par la pacification de tout le pays, ensuite
revisiter les contrats dits léonins ; le revenu issu de cette
opération sera réparti et utilisé pour le bien être
de la population et le développement du pays.
BIBLIOGRAPHIE
I. Textes des lois, instruments juridiques
internationaux et nationaux
I.1. Instruments juridiques internationaux
1. Résolution 626 (VII) A.G. du 21/12/1952, Exploitation
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peuples et des Nations à disposer d'eux-mêmes.
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souveraineté permanente des États sur leurs ressources
naturelles.
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Souveraineté sur les ressources naturelles.
5. Résolution 3201 (S-VI) du 1er Mai 1974,
Déclaration relative à un nouvel ordre économique
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6. Résolution 3202 (S-VI) A.G. du 1er Mai
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3) Lois
4) Jurisprudences
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21. M.A.LAFLAMME, Droit Administratif, T.II, Bruyllant,
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25. MUGANGU M. Séverin, La gestion foncière
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27. RIVERO Jean et WALINE Jean, Droit administratif,
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III. ANALES, ARTICLES, NOTES DE COURS, SYLLABUS,
REVUES ET AUTRES PUBLICATIONS
1. D'ARGENT Pierre, Droit International Public, Notes de
cours, inédits, G3droit/U.C.B., 2003-2004.
2. KALAMBAY Gaston, Domaine de l'État,
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Internationales, Notes de cours, inédits, L2
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Urbanisme et Aménagement du territoire, L1 droit/U.C.B., 1999-2000.
7. MUGANGU Séverin, Droit civil : les Biens,
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8. MUSHAGALUSA Justin, « L'Expropriation
pour cause d'Utilité Publique en Droit congolais : application à
l'extension du parc national de KahuziBiega » travail de
mémoire, L2 droit/UCB, 1998-1999, 138p.
IV. SUPPORT ELECTRONIQUE
-www.arso.org
-www.cij-icj.org
-www.hri.ca
-www.unhchr.ch
-www.docip.org
-www.lepotentiel.com
-www.er.uqam.ca
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-www.cetim.ch
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-www.idest-paris.org
V. DICTIONNAIRES ET ENCYCLOPEDIES
1. CABRILLAC Remy (s.d.), Dictionnaire du vocabulaire
juridique, Litec, paris, 2004, 399p.
2. CORNU Gérard, Vocabulaire juridique, Paris,
France, 2003.
3. SALMON Jean, Dictionnaire de Droit International
Public, Bruyllant /A.U.F. Bruxelles, Belgique, 2001,1198p.
TABLE DES MATIERES
. Épigraphe
....................................................................................
I
. Dédicace
......................................................................................
II
. Remerciements
...........................................................................
III
. Sigles et abréviations
.................................................................. V
INTRODUCTION GENERALE 1
1. Problématique 1
2. Hypothèse 7
3. Méthodologie 8
4. Choix et intérét du sujet
............................................................ 9
5. Délimitation spatio-temporelle 11
6. Subdivision du travail
............................................................. ... 12
Chapitre Ier : CLARIFICATION CONCEPTUELLE
12
Section 1ère. De la souveraineté
permanente 13
§1. Évolution et contenu du principe
............................................. 13
I. Evolution d'ensemble
................................................................... 13
I.1.
Origine..................................................................................
13
I.2. Etapes marquant l'évolution du principe 14
II. Contenu du concept de souveraineté permanente
........................ 15
II.1. Notion de la S.P. selon les travaux
préparatoires......................... 16
II.2. Notion de S.P. selon la doctrine 17
§ 2. Étendue de l'exercice de la souveraineté
18
I. Espace terrestre 19
II. Espace maritime et espace aérien
................................................ 21
§ 3. Caractères de la souveraineté permanente
................................ 20
I. Caractère économique 21
II. Caractère permanent et inaliénable 22
III. Caractère de conformité aux buts et principes
des N.U. ......... 23
IV. Caractère d'un pouvoir illimité et exclusif
23
V. Non susceptible d'appropriation
.................................................. 24
Section 2ème. Distinction entre la
souveraineté permanente
et la plénitude des droits fonciers, miniers et
forestiers ............ §1. Évolution du régime
foncier congolais ............... .....................
|
|
24
24
|
I. Période du régime foncier colonial ......
|
|
24
|
I.1. Régime foncier de l'E.I.C.
................................................... .......
|
|
24
|
I.2. Régime foncier du Congo - Belge
............................................. 27
|
|
|
|
II. Période du régime foncier post-coloniale
30
|
|
|
II.1. La loi BAKAJIKA
.................................................................
|
|
30
|
II.2. Portée de la loi BAKAJIKA
...................................................... 31
|
|
|
|
2.1. Explication du concept «plénitude des
droits»...........................
31
|
|
|
2.2. Explication du concept «pleine
souveraineté»
34
|
|
|
2.3. Incidence de ces deux concepts
..............................................
35
|
|
|
§ 2. Loi BAKAJIKA face à la S.P.
...................................................
37
|
|
|
I. Ressemblance
......................................................................
|
|
37
|
II. Dissemblance
.............................................................................
38
|
|
|
III. Rupture avec le régime colonial sous la loi
BAKAJIKA renforcée ~
|
|
39
|
|
Section 3ème. De la souveraineté
permanente face à l'art. 53
de la loi du 20/07/1973
|
|
41
|
§1. Etendue du droit de la propriété de
l'État sur le sol .................. 42
|
|
|
§2. Comparaison
.........................................................................
44
|
|
|
|
Section 4ème. Distinction entre la
souveraineté permanente
et la domanialité
|
|
55
|
§1. Notion
55
|
|
|
I. Définition ............
|
|
55
|
II. Aperçu général
56
|
|
|
§2. Comparaison
...........................................................................
|
|
56
|
I. Distinction entre souveraineté permanente et
domanialité
56
|
|
|
I.1. Pouvoirs dans le territoire étendue
.......................................... 57
|
|
|
I.2. Pouvoirs sur le territoire - chose
............................................. 59
|
|
|
|
II. Rapport entre la souveraineté permanente et le domaine
éminent du droit médiéval
...................................................... ..............
|
|
63
|
§3. Composition
...........................................................................
65
|
|
|
I. Le domaine public ~.~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 65
I.1. Composition ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~. 66
I.2. Protection juridique du domaine public ~~~~~~~~~~~~. 69
II. Domaine privé de l'État
........................................................... 72
III. Modes d'acquisition des biens domaniaux
.................................. 73
IV. Particularité des biens domaniaux
............................................. 73
Section 5ème. Distinction entre
souveraineté permanente et la
suzeraineté 75
§1. Notion 75
§2. Divergences
............................................................................
75 Section 6ème. Distinction entre
souveraineté permanente et ses notions voisines 76
§1. Souveraineté permanente et droits des peuples
à disposer d'eux-mêmes
.................................................................. .........
76
I. Une application du directe du droit des peuples à
disposer
d'eux-mêmes
...................................................................... 77
II. Un droit appartenant aux États
................................................... 79
§2. Souveraineté permanente et patrimoine commun de
l'humanité 80
§3.La souveraineté permanente et l'art. 34 de la
Constitution ;......... 81
CONCLUSION PARTIELLE 83
Chapitre IIème : REGIME JURIDIQUE, MECANISMES
DE
CONTRÔLE ET MODALITES DE MISE EN OEUVRE
DU
PRINCIPE DE LA SOUVERAINETE PERMANENTE 86
Section 1ère. Mécanismes de
contrôle 86
§1. Nationalisation et expropriation
........................... 86
I. Notion 87
II. Le droit de nationaliser ou de privatiser
.................................... 88
II.1. Controverse sur le droit de nationaliser 89
II.2. Conditions d'exercice du droit de nationaliser 89
§2. Expropriation et ses notions voisines
....................................... 90
I. Expropriation et réquisition 90
II. Expropriation et nationalisation
.................................................. 91
III. Expropriation, emprise et voie de fait ~.~~~~~~~~~~~~ 92
III.1. Emprise
.................................................................................
92
III.2. Différence entre emprise irrégulière
et voie de fait ..................... 96
III.3. Rattachement de ces notions avec l'expropriation
..................... 96
IV. Expropriation et alignement
...................................................... 97
§3. Réglementation des investissements privés
et étrangers des
sociétés transnationales
................................. ................ .. 98
I. Notion et définition
.................................................................. 99
II. Réglementation nationale
.......................................................... 100
III. Réglementations bilatérales
...................................................... 102
IV. Réglementations régionales
....................................................... 102
V. Réglementation universelle
...................................................... 102
§4. Entreprises conjointes et autres formes
d'associations
contractuelles
...........................................................................
I. Les contrats d'entreprises conjointes (contrats de joints
ventures) ... 103
II. De la concession à l'entreprise conjointe
....................................... 103
II.1. Intérét de l'entreprise conjointe
................................................ 104
II.2. Limites du procédé
.................................................................. 106
III. Régime traditionnel de la concession
.......................................... 106
§4. Autres contrats d'association
....................................................... 107 Section
2ème. Du régime juridique et des modalités
d'exercice
de la souveraineté permanente 108
§1. Les modalités d'exercice de la
souveraineté permanente des États sur leurs ressources naturelles
.................. .......................................... 108
I. Objectif général
.......................................... 108
II. L'action de l'État
........................................................................ 109
III. La coopération internationale
.............................. ...................... 110
§2. Régime juridique conforme au principe de la
souveraineté
permanente...........................................................................
111
I. Domaine (ou espace) terrestre
....................................................... 111
I.1. Le régime du sol et du sous - sol
................................................ 112
I.2. Le régime forestier
..................................................................... 112
I.3. Le régime minier ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 116
II. Domaine (ou espace) maritime .~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 118
II.1.Régime juridique fluvial 118
II.2. Régime juridique lacustre 118
II.3. Régime juridique de la mer territoriale 119
III. Régime juridique du plateau continental
.................................... 122 III.1. Les droits souverains de
l'État côtier sur son plateau
continental.........................................................................
122
III.2. Limites aux droits de l'État côtier sur son
plateau continental 124
IV. Le domaine (ou espace) aérien 125
IV.1. Espace aérien national 126
IV.2. Espace aérien international ...
............................................. 126 Section
3ème. De la violation du principe de la souveraineté
permanente 127
§1. Nature de l'obligation violée
...................................................... 127
§2. Attribution à un sujet de droit international
..................... ....... 130
I. Attribution à un
État.................................................................
131
II. Attribution à une Organisation Internationale à
vocation
économique.................................................................................
132
§3. Circonstances excluant l'illicéité
....................................... ...... 132
§4. Mécanisme général de la
responsabilité ........................ ......... 133
I. Le préjudice
...............................................................................
133
II. Contenu de la responsabilité internationale
.............................. 134
II.1. Exécution de l'obligation, cessation et non -
répétition ............ 134
II.2. L'obligation de réparer
............................................................. 135
II.3. Modalités de la réparation
...................................................... 135
§5. Mise en oeuvre de la responsabilité 136
I. Les modalités d'invocation de la responsabilité
137
II. Règlement pacifique des différends
internationaux ...................... 137
II.1. Le règlement non juridictionnel
............................................. 137
II.2. Le règlement juridictionnel
...................................................... 138
III. Cas pratique : Affaire des activités militaires et
paramilitaires
opposant la RDC à l'Uganda
................................................... 139
III.1. Prétention de la partie demanderesse
~~~~~~~~~~~~~ 139
III.2. Prétention de la partie défenderesse
....................................... 140
III.3. Décision de le Cour
............................................................... 141
III.4. Bref commentaire sur ce cas ..............................
............... 142
CONCLUSION GENERALE 143
BIBLIOGRAPHIE 149
TABLE DES MATIERES 147
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