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La compatibilité entre le concept de propriété intellectuelle et la shari'a

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par Léo Fradet
Université de Poitiers - Master 2 professionnel en droit des affaires mention techniques de l'information et de la communication 2011
  

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Chapitre II. La Shari'a droit fondamental des pays musulmans.

Tous les pays musulmans n'appliquent pas la Shari'a, et ceux qui le font ne peuvent limiter leur corps de règles aux prescriptions religieuses car cela ne suffirait pas à répondre aux besoins de l'ensemble des activités de la société. En effet la Shari'a est un corps de règle figé qui ne peut en aucun cas être modifié ou évoluer. C'est ce qui sera étudié dans la Section I.

Les juristes musulmans vont alors séparer ce qui dépend de la Loi (Sar) de la politique (Siyasa), afin que puisse être administrée la communauté. C'est le sujet de la seconde Section du présent Chapitre.

Section I. La Shari'a, un corps de règles figé.

La Shari'a est un ensemble de règles immuables, figées, que l'homme ne peut ni modifier, ni compléter. En effet, légiférer est interdit à l'homme car cela reviendrait à corriger le travail de Dieu. Des méthodes ont néanmoins existées afin de prendre en compte l'évolution sociale et les manques éventuels de la Shari'a.

L'istihsan, par exemple, permettait de prendre en compte le bien commun dans l'exécution de la Shari'a, pouvant mener l'acceptation de lois ou d'institutions préexistantes à l'Islam ou même à des solutions contraires à la Shari'a. Émile Tyan, dans son ouvrage « Méthodologie et sources du droit en Islam (Isti?sân, Isti?lâ?, Siyâsa ðar?iyya) » 29, en donne l'exemple suivant :

« Exemple de solutions contraires à un texte coranique. C'est l'argumentum classique d'une armée d'infidèles qui, dans la bataille, fait avancer devant elle, pour la protéger, un groupe de captifs musulmans. On se demande alors s'il est permis aux combattants musulmans de tirer sur ce groupe et de tuer éventuellement des musulmans, alors qu'une disposition du Coran fait un crime et un péché du meurtre d'un croyant. On y répond affirmativement, par l'istihsan, en faisant prévaloir sur la

29 Tyan, Emile. Méthodologie et sources du droit en Islam (Isti?sân, Isti?lâ?, Siyâsa ðar?iyya). Studia Islamica, N° 10 ,1959, p 79-109.

règle formelle du texte spécial coranique, des considérations supérieures tirées de la nécessité de la conservation de l'ensemble de la communauté. » 30

Son effet sera donc de temperer la rigidité du droit religieux afin d'arriver à une solution plus conforme à l'intéret général, il a « pour objet de prévenir « les conséquences exorbitantes, les excès » (Satibi, I'tisam, II, 321) de ce droit, de le maintenir dans les limites du raisonnable et de l'utile » 31.

Suite à « la fermeture des portes à l'ijtihad32 », les juristes musulmans considerèrent que ne devait plus etre fait d'effort de compréhension de la Shari'a. Cet evènement a fige le droit musulman interdisant l'émergence de toute nouvelle règle de droit. Jusqu'à cet évènement, les juristes avaient contourné l'interdiction qui leur etait faite de créer des règles de droit un invoquant qu'ils découvraient de nouvelles règles encore inconnues.

C'est au XIème et XIIème siècle que les theologiens vont decider que plus aucune règle ne reste à découvrir dans la Shari'a et que le travail de compréhension des textes sacres est clos. Pour Andre Poupart, Professeur à la Faculte de Droit de l'Université de Montréal, cette fixation correspond à une periode de ralentissement de la societe musulmane. « La fermeture des portes » est pour lui l'effet le plus visible de ce ralentissement. Cette fixation juridique en apporte à elle seule la preuve eu egard à l'importance du droit dans la societe musulmane (le thème de la place du droit musulman dans la vie des croyants est aborde plus loin dans le même Titre). Dans son ouvrage « Adaptation et Immutabilite en Droit Musulman » 33, Andre Poupart justifie son point de vue ainsi :

« Dans le cadre d'une société~ dont le but est de mettre le croyant sur la voie qui le mènek vers l'Au-delà, il n'est pas surprenant que le droit, la Shari'a, exerce une fonction prééminentek C'est par le droit que l'islam manifeste le mieux sa façon

30 Page 85

31 Page 85

32 L'ijtihad est un effort intellectuel fourni par le juriste afin de faire émerger une nouvelle solution du texte.

33Poupart Andre. Adaptation et Immutabilite en Droit Musulman, Edition l'Harmattant, 2010.

d'assurer le bonheur de ses adeptes sur terre et dans la vie future ; c'est par le droit

que son évolution peut etre le mieux évaluée et exprimée. » 34.

C'est ainsi que les Etats musulmans firent face à une grande difficulté. D'une part la société évoluait et nécessitait de nouvelles normes qui puissent répondre à ces évolutions. D'autre part, leur corpus juridique était figé dans le temps et interdisait tout acte législatif.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius