2. Perspectives à envisager de point de vue
système d'AMO tunisien :
Avant de proposer l'idée d'une CMU en Tunisie,
on va présenter brièvement certains points en concordance avec
l'objectif visé. Ces points concernent d'une manière
générale la couverture de quelques catégories de la
population par les prestations de soins. Ensuite et avant de discuter
l'objectif de la protection financière universelle, les principaux
obstacles à la généralisation de cette CMU à
travers un système formel, seront mis en lumière.
a/ Le système de couverture maladie tunisien : une
brève présentation :
La présente description du système
d'assurance maladie tunisien n'est pas en elle-même l'objectif, mais pour
mettre en lumière certains points qui servent l'objet de la CMU en
Tunisie. Brièvement, et après la loi N° 2004-71 portant
institution d'un régime d'assurance maladie, la réforme de l'AMO
a été déjà partie. En se référant
à un rapport de stage qu'on a effectué à l'OMS -
Genève et ayant pour thème : «L'assurance maladie comme
mécanisme d'incitation à la performance des prestataires de soins
de santé», on va résumer certains aspects techniques du
système tunisien :
- Les dispositions de la loi N° 2004-71
s'appliquent aux assurés sociaux affiliés ou immatriculés
aux divers régimes légaux de sécurité sociale,
autrement les assurés de la Caisse Nationale de Sécurité
Sociale (CNSS) et de la Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance
Sociale (CNRPS). (l'Art 3 de la loi précitée). Seul
l'assuré social et ses ayants droits sous certaines conditions peuvent
bénéficier de la couverture du régime AMO. La
qualité d'assuré social est liée à l'exercice d'une
activité professionnelle justifiée et le paiement d'une
cotisation en pourcentage du salaire ou un montant forfaitaire symbolique (cas
du régime étudiant : 5 DT).
- La réforme tentait d'être une
réponse à plusieurs insuffisances, notamment par la fusion des
branches maladies des divers régimes de sécurité sociale
au sein d'un nouveau régime unique, appliquant un taux de cotisation
unique (6.75% pour les actifs et 4% pour les pensionnés qui ne
cotisaient auparavant pour l'assurance maladie) et géré par une
seule caisse : la CNAM.
- Avec ce nouveau régime, l'accès
à l'offre de soins privée, longtemps ignorée par
l'assurance maladie obligatoire, est désormais possible. L'objectif
annoncé par le gouvernement était que : l'objet de la
présente réforme concerne le volet "amélioration de la
couverture devant le risque maladie".
- L'assuré social peut choisir entre : la
filière «publique», la filière «
privée» et la filière «remboursement ». Le choix
porte sur une seule filière et valable une année, et la
filière «publique» sera attribuée pour défaut de
choix et les assurés qui ont choisi cette filière doivent se
soigner uniquement dans les structures publiques - moyennant le paiement d'un
ticket modérateur -, sauf pour certaines prestations
précisées par la loi et que certains fournisseurs privés
conventionnés délivrent en contrepartie d'une prise en charge par
la CNAM. A noter que la part définitive payée (ticket
modérateur) par l'assuré dépend de la nature des
soins.
La filière « privée » : En
vertu de cette option, l'affilié choisit son médecin traitant qui
doit être conventionné. La filière « remboursement
» : cette dernière filière est très proche du
régime
optionnel qui était en application pour les
affiliés de la CNRPS. En cas d'option pour la filière
«remboursement», l'assuré doit avancer la totalité des
frais de soins, mais, le remboursement ne couvre qu'une partie de ces
frais.
Sans entrer dans le détail concernant, qui peut
opter pour une filière et qui n'a pas ce droit de choix (exemple : les
assurés du régime instauré par la loi 2002-32), et outre
ce régime d'AMO, il y a aussi un régime d'assistance publique
médicale appelée "Assistance Médicale Gratuite" (soins
à tarif réduit : AMG2 et soins gratuits: AMG1). Encore il est
question d'éthique et d'équité, puisque les
bénéficiaires sont obligés de se soigner uniquement dans
les structures publiques et que leur nombre ne cesse d'augmenter. Ce
régime d'assistance médicale est géré par la
direction générale de la promotion sociale (Ministère des
affaires sociales, de la solidarité et des tunisiens à
l'étranger ; l'appellation peut éventuellement
changer).
On peut remarquer que le système de
santé tunisien a mis ses premiers pas sur le chemin de la transition
vers la CMU avant même l'instauration du régime d'AMO en 2007
(exemples : le régime des étudiants, la jeune fille
au foyer, l'assistance médicale gratuite, l'année de couverture
supplémentaire pour les titulaires de diplômes supérieurs
suite à la loi de 2006). La Tunisie figure aussi parmi les
pays qui ont mis en oeuvre une politique de santé visant à
assurer l'accès aux soins à toute la population sans distinction.
En effet, la loi n° 91- 63 du 29 juillet 1991 relative à
l'organisation sanitaire a visé une réduction des
inégalités régionales en termes de distribution
géographique des structures publiques de soins. Cette réforme
d'AMO pourrait renforcer et tracer le chemin vers l'objectif de la couverture
universelle, rien que par l'inspiration de l'idée en elle-même.
Peut-on vraiment parvenir à cet objectif en Tunisie?
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