1.3 Présence de bactéries VNC dans les
denrées alimentaires, impact et enjeux.
De nombreuses espèces bactériennes, et notamment
celles pathogènes pour l'Homme, sont décrites comme pouvant se
trouver dans un état non cultivable dans l'environnement mais aussi dans
les denrées alimentaires. Des germes tels que Salmonella
enterica, Vibrio cholerae, Escherichia coli
O157 :H7 entéro-hémorragique, Campylobacter
jejuni, Vibrio vulnificus, Shigella dysenteriae,
Enterococcus faecalis, Listeria monocytogenes et d'autres,
tous pathogènes pour l'Homme, pourraient se trouver dans nos
denrées alimentaires à l'état VNC. Ce constat
soulève un problème de santé publique. Les formes VNC dans
l'alimentation humaine seraient par définition non détectables
par les méthodes conventionnelles de recherche de germes
pathogènes, ces méthodes se basant principalement sur
l'utilisation de milieux de culture.
La présence potentielle de ces germes dans
l'alimentation amène la question de leur
pathogénécité, de nombreux articles traitent de l'effet
pathogène des bactéries VNC.
Par exemple Oliver et al. ont montrés que l'injection
chez la souris de Vibrio vulnificus à l'état non
cultivable conduisait à une infection puis à la mort des animaux
(Oliver et al., 1995 [31]). Dans d'autres études la
pathogénécité et le retour à l'état
cultivable de formes VNC sont démontrés : l'inoculation chez le
lapin de Vibrio cholerae engendre une pathologie (Colwell R.R. et al.,
1985 [8]), l'injection chez des patients volontaires humains a
démontré la capacité de Vibrio cholerae à
revenir à l'état cultivable et à se multiplier dans
l'intestin de l'hôte humain (Colwell R.R. et al., 1996 [9]).
Escherichia coli O157 :H7
entéro-hémorragique conserve également sa
pathogénécité à l'état VNC, nous avons vu au
paragraphe 1.1.2 qu'une bactérie VNC conserve un métabolisme
actif, dans le cas de E. coli O157 :H7 la toxine
sécrétée par la bactérie à l'état
cultivable l'est toujours à l'état non cultivable (Liu Y. et al.,
2008 [21]).
Tous ces constats montrent l'intérêt de la mise
au point de méthodes de recherche et de détection des germes VNC
dans l'alimentation, l'eau et l'environnement.
1.4 Les bactéries viables non cultivables dans
l'environnement.
Selon Staley et al. plus de 99% des espèces
présentent dans l'environnement seraient dans un état VNC (Staley
J.T. et al., 1985 [37]). Certaines études ont été
menées sur différentes matrices environnementales telles que les
boues de station d'épuration (Garrec N. et al., 2005 [13]) ou sur des
sols (terre brune) (Turpin P.E. et al., 1993 [41]). Selon les auteurs, la
complexité de ces matrices rend les études fastidieuses et les
résultats discutables. Une matrice plus fréquemment
utilisée pour les études de bactéries VNC est l'eau de mer
ou estuarienne car plus facile à traiter. Les données sur les
bactéries VNC dans l'environnement sont à relativiser. En effet
certaines études montrent que la persistance de formes VNC dans
plusieurs matrices environnementales naturellement contaminées par une
flore viable et cultivable n'est pas possible (Bogosian G. et al., 1996 [4] -
Marscher et al. 2000 [23]). Cette forme de survie bactérienne serait
très limitée dans le
temps face à une flore compétitive.
L'hypothèse émise est que l'état VNC est effectivement un
état de secours en cas de stress important. Cet état permet la
survie des bactéries touchées par ce stress si toute la flore
bactérienne environnante est elle aussi amoindrie. Dans le cas ou des
germes stressés se trouvent à l'état VNC en
compétition face à une flore abondante non stressée, leurs
chances de survie s'en trouve très réduites.*
Un cas particulier de VNC dans l'environnement est cependant
intéressant à évoquer, celui des légionelles. Ce
pathogène de l'Homme pose un problème de santé publique en
cas de présence dans les tours
aéro-réfrigérées, dans les systèmes de
climatisation ou dans les thermes. Les traitements utilisés pour
détruire ces germes in situ (chloration, traitement thermique)
peuvent induire l'apparition de formes VNC de Legionella. Ces germes
ont entre autre la capacité à retrouver leur état
cultivable en présence de protozoaires, comme Tetrahymena
pyriformis très commun dans l'eau douce, dont elles sont les
parasites (Alleron L., Thèse 2008 [1]). Il est a noté qu'une
épidémie de légionellose en 1987 (101 personnes
infectées dont 28 décédées) est à l'origine
de la découverte des formes VNC de Legionella pneumophila dans
des échantillons de l'hôpital de Stafford (U.K.). Le risque
sanitaire dû à la présence de forme VNC est donc bien
réel et peut avoir de graves conséquences.
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