INTRODUCTION
Au Sénégal comme
partout ailleurs, la grossesse et l'accouchement ont, depuis l'origine des
temps, fait courir à la femme un risque mortel.
A l'aube du 3e millénaire, le drame de la
mortalité maternelle demeure toujours le même, un fléau qui
frappe durement nos pays en développement et particulièrement
l'Afrique où les conditions socio-économiques, environnementales
et sanitaires très précaires exposent la femme aux complications
redoutables de la grossesse et de l'accouchement.
C'est ainsi que chaque jour, dans le monde, au moins 1600
femmes meurent de complications de la grossesse ou de l'accouchement, ce qui
représente 585 000 décès de femmes chaque année.
La majorité de ces décès (99%) survient dans les pays en
développement et moins de 1% dans les pays développés
[60].
Ce qui fait dire au Directeur Général de
l'OMS : « Des centaines de femmes enceintes, vivantes hier
soir, n'ont pas vu le soleil se lever ce matin. Certaines sont mortes en
travail, leur bassin trop rétréci et déformé pour
laisser passer le nouveau-né. Certaines, voulant mettre fin à une
grossesse non désirée, sont mortes sur la table d'un avorteur
inexpérimenté. D'autres sont mortes dans un hôpital
où il n'y avait pas de sang pour compenser leur hémorragie et
d'autres encore dans les convulsions de l'éclampsie parce qu'elles
étaient simplement trop jeunes pour devenir mères et n'avaient
jamais été à la consultation prénatale. Ce sont les
femmes d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine,
aujourd'hui » [40]. Entre 25 % et 33 % des décès
de femmes en âge de procréer qui surviennent dans de nombreux pays
en développement font suite à une grossesse ou à un
accouchement. Ce qui fait de la mortalité maternelle la première
cause de décès des femmes en âge en procréer. En
plus de cette mortalité maternelle qui est 18 fois plus
élevée que dans les pays développés, plus de 50
millions d'autres femmes souffrent de pathologies liées à la
maternité c'est-à-dire de complications graves de la grossesse
dont 18 millions d'entre elles entraînent des incapacités [60].
Les fistules obstétricales en particulier
(communication entre le vagin et le canal urinaire ou le rectum qui crée
une incontinence permanente d'urines ou de selles), sont une des complications
les plus dramatiques. En Afrique, le risque de mortalité maternelle est
de loin le plus élevé au monde. Il est de 1 sur 16, contre 1 sur
2800 dans les pays riches. En Afrique de l'Ouest, c'est une (1) femme sur 7 qui
risque de mourir chaque année des suites de la grossesse ou de
l'accouchement [8]. En comparaison, en France, à la même
époque, il s'en produisait que 15 pour 100 000 naissances vivantes et
l'ensemble de l'Europe, 36 pour 100 000 Naissances Vivantes. [4].
Au Sénégal, le taux de mortalité
maternelle est actuellement de 401 décès pour 100 000 naissances
vivantes selon les données de l'Enquête Démographique et de
Santé de 2005 [20].
Les régions de Tambacounda et Kolda sont les plus
touchées. Dans le district sanitaire de Tambacounda, ce taux est
estimé, selon les données hospitalières, à 740
décès pour 100 000 naissances vivantes de loin supérieur
au taux national [59]. Avec 810 décès pour 100 000
naissances vivantes à Goudiry [10], le département de Bakel est
terriblement frappé par ce fléau qui touche non seulement les
femmes, mais également les familles et communautés auxquelles
elles appartiennent. Le décès de la mère accroît
considérablement le risque de décès du nourrisson. La mort
d'une femme en âge d'avoir des enfants constitue également une
perte économique importante pour le développement communautaire.
Il est donc impératif de mobiliser toutes les ressources pour lutter
contre la mortalité maternelle.
Depuis l'initiative de la « maternité sans
risque »lancée en 1987 à Nairobi, plusieurs
stratégies ont été développées pour
prévenir les décès maternels. Mais on sait rendu compte
que la stratégie préventive ne permet pas à elle seule de
réduire le fléau. Dans son article « la
mortalité négligée » mis en ligne le 16/09/
2004, La Libre montre comment il est rare voir exceptionnel dans les
maternités européennes qu'une femme meurt en couche, alors que
les complications obstétricales sont la conséquence de la
majorité de décès des femmes en âge de
procréer dans les pays en développement. Il nous apprend que
rares sont les pays en développement qui ont réussi à
réduire la mortalité maternelle [35].
Si les causes médicales sont relativement connues,
des efforts restent cependant à faire sur la connaissance et
l'amélioration des facteurs socioculturels, économiques et
environnementaux. Dans nos pays en développement, la santé
maternelle ne se limite pas seulement au domaine médical, car de
multiples facteurs sont à l'origine du
pourquoi d'un décès d'une femme pendant
la grossesse ou l'accouchement. Il est donc plus important de savoir ceux qui
contribuent aux décès que de connaître les niveaux de
mortalité maternelle. Pour être efficaces, les actions pour la
réduction de la mortalité maternelle nécessitent
l'identification des facteurs contributifs. C'est pourquoi la présente
étude se propose de déterminer par la technique de l'autopsie
verbale les causes mais surtout les facteurs favorisants des
décès maternels dans le département de Bakel. Pour la
réalisation de ce travail, nous allons suivre les étapes
suivantes : Après avoir donné le contexte et la
justification, nous allons énoncer le problème et les questions
de recherche soulevées pour aboutir aux objectifs visés et les
hypothèses posées. Nous présenterons par la suite le cadre
conceptuel, la méthodologie utilisée, l'analyse et
l'interprétation des résultats obtenus, pour terminer par les
recommandations et la conclusion de l'étude.
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