Section III : Facteurs explicatifs relatifs au
Cadre économique
Tableau 3 : Facteurs explicatifs relatifs au cadre
économique de la gestion des déchets en France et en Côte
d'Ivoire
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France
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Côte d'Ivoire
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Ø La valeur économique des
déchets
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- Caractère économique reconnu aux
déchets : 2000 entreprises interviennent dans la chaîne du
recyclage et de la valorisation,
- Le secteur du recyclage et de la valorisation constitue un
gisement d'emploi et de recettes fiscales : 28000 emplois
générés par la collecte sélective et le recyclage
des emballages ménagers Eco-Emballages, 2009).
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- Le dispositif actuel de gestion des déchets ne
confère pas à ceux-ci une valeur économique (Annexe
VII),
- Les déchets n'engendrent que des externalités
négatives : pollution, maladies, nuisances diverses9(*) (Kouadio, 2008),
- Le projet éco-emballages initié par l'ANDE en
2005 n'a jamais vu le jour (Touré Moussa, 2005)
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Ø Le système de financement des
déchets
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- Système économique
équilibré : pour assurer la gestion des déchets
d'emballages ménagers dans le cadre du dispositif Eco-Emballages, les
collectivités ont deux sources principales de financement.
- Les soutiens versés par Eco-Emballages, qui
proviennent des contributions des entreprises. Ces soutiens sont versés
aux collectivités en fonction de leurs performances de recyclage ainsi
que du volume et de la qualité du tri qu'elles effectuent.
- Les bénéfices rapportés par les ventes
de matériaux recyclés aux industriels et négociants. En
2008, ils atteignaient environ 130 millions d'euros (et 20 millions
supplémentaires pour la production d'énergie)
- Ces deux sources de financement représentent
aujourd'hui plus de 60 % des coûts globaux de la gestion de
déchets d'emballages ménagers en France.
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- il n'existe pas de système de ressources
additionnelles pour le financement des déchets. Les principales sources
de financement proviennent des subventions de l'Etat, des bailleurs de fonds,
et des organismes de coopération multilatéraux...
- d'où un recours constant à des subventions
ou prêts des organisations bilatérales ou multilatérales,
à des prêts des banques de développement,
- Système de financement inefficace : en janvier
2009, l'Etat devait 10 mois d'arriérées aux
sociétés de ramassages d'ordures ménagères
(Touré Moussa, 2009).
- Une énième opération
« Abidjan, Ville propre » a vu le jour en mars 2009 et se
poursuit, grâce à un financement de 6 milliards de la Banque
mondiale à travers le Programme d'urgence d'infrastructures urbaines
(PUIUR) et a permis d'enlever 560 mille tonnes d'ordures (Kouadio,
2009).10(*)
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Ø Le système de valorisation des
déchets
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- Matières premières secondaires : Le
chiffre d'affaires réalisé dans le secteur du recyclage et de la
valorisation des déchets est de 423 millions d'Euros (Eco-Emballages,
2009) pour un gisement de 4.7 millions de tonnes de matières
recyclés.
- Forte concentration des entreprises dans le secteur de la
récupération, du recyclage et de la valorisation : environ
2400 entreprises (FEDEREC, 2007)
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- Il n'existe pas de cadre formel, ni d'appui de l'Etat dans
l'organisation des activités de recyclage et de la valorisation. Le
recyclage relève du secteur informel (Silué, 2002), (Cf. Annexe
VII)
- La bourse de déchets, prévu par le Code de
l'environnent en son article 74 n'a pas encore été mise en place
et son décret d'application non encore effectif,
- La mise en décharge constitue la principale
filière d'élimination des déchets industriels et
ménagers, sans aucune forme de traitement ni un grand souci
d'hygiène (Profil environnemental de la Côte d'Ivoire-Rapport
final 2006).
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Source : L'auteur
Pour une entreprise qui veut s'engager dans une
activité RSE ne relevant pas de ses compétences ou de ses
missions traditionnelles, il est de coutume qu'elle s'appuie sur des
partenaires disposant de plans et de moyens d'actions. En France, pour une
entreprise qui voudrait engager des actions RSE dans le domaine de la collecte
et de la valorisation des déchets, il existe un réseau
spécialisé de partenaires sur qui celle-ci peut s'appuyer. Le
cadre légal, institutionnel et économique a favorisé le
développement de toute une filière de métiers et de
compétences qui rendent facilement toute coopération et toute
initiative privée.
Le tableau 3 nous montre que les déchets en Côte
d'Ivoire ne représentent que des externalités négatives.
Aucune expertise ne s'est développé autour de la valorisation des
déchets. Par contre en France, les déchets représentent
une manne financière, un gisement de matières premières
secondaires, et une source de recettes fiscales pour l'Etat. Ainsi Total France
bénéficie de l'intérêt général que
représente la valorisation des déchets pour initier plus
aisément des actions RSE dans ce domaine avec l'appui des partenaires
techniques et opérationnels. Par contre il est difficile pour la Filiale
Total Côte d'Ivoire d'orienter ses actions RSE dans le domaine du
traitement des déchets du moment où il est difficile de trouver
des partenaires opérationnels pour une telle démarche.
En Côte d'Ivoire, la gestion des déchets à
Abidjan semble être une impasse, un problème récurrent et
apparemment sans solution (Sané, 2002). La question semble ne pas
être un souci ni pour les Gouvernants, encore moins pour les populations
qui semblent s'accommoder à la situation (Moussa, 2009). Les
déchets semblent désormais faire partie de l'environnement
malgré les nuisances qu'elles génèrent.
Les théories sociologiques
néo-institutionnelles assurent que les conditions de l'environnement ne
peuvent être séparées des représentations qu'en ont
les acteurs ; elles intègrent les valeurs dominantes du contexte
sociétal dans lequel s'exercent les activités de l'entreprise. Du
moment où la question des déchets ne semble pas être une
priorité pour les pouvoirs publics et les populations (à
l'exemple des questions de santé, d'éducation, de transport,
etc.), elle ne peut constituer non plus une priorité pour une
entreprise, du moment où elle n'en tire aucune légitimé.
La légitimité des entreprises naît au sein d'un
environnement institutionnalisé, c'est-à-dire un environnement
qui impose des exigences sociales et culturelles, où les besoins
prioritaires sont clairement définis, les poussant à jouer un
rôle déterminé et à maintenir certaines apparences
extérieures.
* 9 Kouadio, A., 2008,
« Economie et Déchet », Atelier international sur la
gestion des déchets en Afrique, document non publié, disponible
à l'Université d'Abobo-Adjamé,
* 10Théodore
Kouadio, 2009, « Abidjan-ville propre : 560 mille tonnes
d'ordures enlevées dans le district », Fraternité
Matin, 4/11/2009.
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