CONCLUSION
Concernant les implications méthodologiques de cette
étude, il semble que l'hypothèse générale
posée d'une convergence entre indicateurs subjectifs et indicateurs
objectifs de performance soit corroborée. Précisément, les
évaluations subjectives des cadres ou dirigeants reflètent, dans
une certaine mesure, des informations sur les performances effectivement
obtenues par l'entreprise.
Mesurer la performance des entreprises...
Rapport aux traditions théoriques
évoquées pour la conceptualisation de la performance, on constate
qu'il est possible de traduire avec une certaine fiabilité les deux
positions majeures : approche par les buts et approche
par les ressources.
Les questions qui semblent les plus porteuses d'informations
sur la réalité des performances organisationnelles de
l'entreprise sont celles qui portent sur l'atteinte des objectifs
stratégiques, la crainte pour la survie de l'entreprise
à moyen terme et l'appréciation du climat social.
Le jugement porté sur la position de Petroci, sur ses
marchés ne reflète que peu d'information économique, la
maîtrise des coûts n'en apportant pas.
Cependant, les résultats indiquent également que
les questions posées ne reflètent pas strictement et
linéairement les performances organisationnelles.
Alors que certains items donnent une information binaire
(crainte pour la survie de l'entreprise), d'autres reflètent
plutôt des relations d'ordre (atteinte des objectifs stratégiques
et climat social). Quelles hypothèses explicatives peut-on avancer pour
comprendre cette non linéarité ?
Selon nous, trois raisons majeures peuvent être
invoquées.
- La première correspond à la
notion d'effet de seuil qui conduirait le responsable à
considérer qu'en deçà d'un certain niveau de performance
objective, la performance organisationnelle est mauvaise et que, dans le cas
contraire, elle est bonne. Ce seuil peut évidemment varier selon les
individus et les caractéristiques de leur entreprise, et il agirait
comme une heuristique simplificatrice.
- Les deuxième et troisième
hypothèses s'appuient sur la notion de rationalité
limitée. Considérant que le cadre de PETROCI qui doit
évaluer la performance de son entreprise n'est pas en situation
d'information parfaite - puisqu'il connaît certes les résultats de
son entreprise (Petroci) mais pas ceux de l'ensemble des entreprises de son
secteur - son évaluation n'est pas strictement et linéairement
liée aux résultats objectifs.
De même, l'évaluation de la performance
réalisée par le cadre n'est pas le fruit d'un processus purement
calculatoire, strictement rationnel.
Ce processus imparfait conduit à une évaluation
différente de la performance objective de l'organisation.
Dans tous les cas, l'évaluation subjective n'est
cependant pas sans lien avec les résultats économiques.
Claire Gauzente 165
Au total, il ne s'agit pas ici de substituer aux informations
objectives des informations de moindre qualité : on voit en effet
l'imperfection des liaisons observées ici. Il s'agit, bien au contraire,
d'évaluer ce que l'on peut attendre d'informations subjectives sur la
performance, afin de ne pas dériver vers des interprétations
dénuées de prudence et de pondération.
Cette étude n'est pas sans prolongement potentiel. En
premier lieu, les questions proposées aux cadres et dirigeants
d'entreprises pourraient être multipliées pour couvrir des aspects
non étudiés ici (par exemple : degré d'innovation,
acquisition de ressources rares, performance des démarches commerciales,
de l'allocation des ressources...). En second lieu, d'autres types de
données objectives demanderaient à être
intégrées : les données boursières, ce qui ouvre
une voie d'exploration. Il convient cependant d'observer qu'une telle voie de
recherche rencontre une limite forte pour l'étude des petites
entités. Enfin, des études comparables devraient être
réalisées, afin d'apprécier la portée
générale des résultats en dehors du secteur
étudié ici.
Au-delà des prolongements possibles, cette étude
permet de modérer l'emploi aveugle d'indicateurs subjectifs de
performance pour ce qu'ils ne sont pas. Elle conduit à
considérer les évaluations subjectives de la performance comme
des informations de tendance.
Ainsi, sans constituer une panacée, le recours aux
évaluations des cadres et dirigeants de PETROCI, demeure une voie
à ne pas négliger en cas de données économiques
indisponibles, coûteuses ou difficilement isolables.
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