I. Introduction :
Rappelons que les bidonvilles sont généralement
situés dans des zones périphériques, souvent à
proximité de sites industriels ou de décharges, le long de lignes
de chemin de fer ou d'égouts à ciel ouvert, ou dans des zones
où les risques de glissements de terrain ou d'inondations sont
particulièrement élevés. Ne faisant pas partie des zones
d'aménagement prévues, les bidonvilles n'ont qu'un accès
très limité à des services essentiels comme l'adduction
d'eau, les installations sanitaires, le ramassage des ordures, le transport
public, les écoles, les dispensaires ou les mosquées. Ces
quartiers concentrent plusieurs aspects de précarité et de
marginalisation sociales dont :
· Les femmes et les filles, d'après
l'enquête Budget temps63, passent la majorité de leurs
temps (en moyenne 6 heures par jour) dans des activités telles que la
corvée d'eau, les tâches ménagères, les soins,
l'évacuation d'eau
· Les caractéristiques de l'environnement de
l'habitat insalubre à savoir l'éloignement des écoles,
l'absence de transport et d'éclairage publics, la difficulté
d'accès lors des pluies... aggravent davantage cette situation .
· Les conditions d'hygiène dégradées
pèsent sur la santé des enfants et des
personnes âgées, favorisant la propagation des
épidémies et les maladies d'origine hydriques.
· L'habitat insalubre est également un milieu
où le chômage est très important conjugué à
d'autres maux notamment la délinquance qui engendre
l'insécurité et la violence. En effet, l'habitat est un
indicateur très corrélé avec le niveau économique
et social.
· Les contraintes d'accès des bidonvilles rendent
difficiles les évacuations d'urgence (cas d'incendies ou catastrophes
diverses) en général. Les personnes à mobilité
réduites en souffrent davantage comme le cas de la femme enceinte
nécessitant une évacuation urgente pour accouchement.
Le quartier objet de notre étude résume assez
bien ces maux, de part la situation qu'il occupe sur un terrain
accidenté et en pente, au bord d'un Oued (Oued Chaâba), mais aussi
par les conditions socioéconomiques de ses habitants, pour le moins
précaires, c'est le quartier « BBC ».
63 MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PRIVATISATION. Direction
des Etudes et des prévisions Financières. "Rapport Genre 2007
Accompagnant la Loi de Finances".
Photos 14: Situation des quartiers « BBC » dans la
ville de Safi.
N
Quartiers « BBC »
Photos 15: les quartiers composant « BBC »:
Benzina, Bouregba et Chaâba.
Q. Benzina
Q. Bouregba
Q. Chaâba
«BBC» est l'abréviation des noms de trois
petits quartiers qui sont Benzina, Bouregba et Chaâba. «BBC»
est le nom donné à ces trois quartiers de la ville de Safi que
plusieurs caractéristiques rassemblent. Se sont des quartiers voisins,
non règlementaires et dépourvus,
tous les trois, de l'infrastructure de base. Enfin,
«BBC» a fait dernièrement l'objet d'une intervention de type
restructuration, dans le cadre du programme « ville sans bidonvilles
» (VSB), de Safi. Cette intervention consiste en l'équipement des
trois quartiers en infrastructure routière et en réseaux
d'assainissement, d'électricité et d'eau potable.
Le contrat signé en 2006 entre la ville de Safi et le
ministère de l'urbanisme dans le cadre du programme national (VSB)
concerne trois quartiers insalubres de la ville : il s'agit en plus de
«BBC», des deux quartier Antonio Philipe et Doukkala. L'intervention
sur le quartier «BBC» selon les termes du contrat devait être
de type relogement des habitants dans un quartier du sud de la ville,
seulement, et devant les premières difficultés
financières, sociales et techniques rencontrées, l'option d'une
restructuration du quartier a été retenue par le comité
provincial de suivie du contrat.
Dans cette étude nous allons essayer de tracer les
contours de cette intervention. Nous interrogerons sa conception et son
application, mais, surtout, nous irons à la rencontre des intervenants
et de la population pour mesurer la prise en considération du volet
social dans les options techniques, économiques et financières
adoptées.
Le contrat de ville signé entre l'autorité
locale, la municipalité et le ministère de l'urbanisme dans le
cadre du programme « VSB » consacre plus d'un article à
l'aspect social de l'intervention sur les quartier insalubres et trace parmi
ses premiers objectifs l'intégration de la population dans les
différentes phases de réalisation. La participation de la
population a été déclarée comme composante
principale du projet.
L'équipement du quartier «BBC» en services de
bases et le raccordement des logements au réseau d'eau potable pose,
cependant, le problème de la solvabilité des ménages du
quartier mais aussi de la récupération des investissements par
l'opérateur public du secteur de l'eau potable de la ville, la
RADEES.
Sachant cela, et dans une démarche de confrontation de
la réalité du local avec les principes et objectifs de bonne
gouvernance et de droit d'accès à l'eau, quelles logiques
sociales et économiques sont mises en jeux au cours de cette
opération ? Et quelle gouvernance du secteur de l'eau dans la ville de
Safi de manière générale et dans les opérations
d'intervention sur l'habitat insalubre plus précisément? Telles
seront les questions qui guideront cette étude.
A la lumière de l'expérience de restructuration
de «BBC» nous essayerons aussi d'identifier les acteurs de
l'intervention sur les quartiers insalubres de la ville et leurs logiques
respectives. La réalisation du programme (VSB) dans la ville nous
servira de support d'analyse. Le but étant de chercher l'articulation au
niveau local des principes et objectifs mondiaux et nationaux de
développement et de lutte contre l'exclusion urbaine de la population
des bidonvilles. A travers le cas de «BBC», nous chercherons donc
à savoir, si l'appui déclaré de Sa Majesté au
programme (VSB) se traduit par des synergies effectives, ou y a-t-il de la
résistance (institutionnelle et autres) à son exécution,
dans sa vision et conception affichées, et si la formulation du
programme et les modalités de résorption sont alignées sur
les besoins et les demandes réelles des ménages bidonvillois. La
participation financière attendue des habitants des bidonvilles est-elle
réaliste ? Les mécanismes d'accompagnement social et la
participation de la population ciblée par les opérations de
résorption sont-ils appropriés et opérationnels sur le
terrain ?
Pour répondre à ces questions, une enquête
quantitative et qualitative sur tous les ménages et des interviews avec
des personnes ressources ont étés menés dans le quartier
« BBC ». Les attitudes individuelles et collectives ainsi que la
perception, des acteurs et de la ville, par la population du quartier ont
étés analysées.
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