2.2. Les éléments d'un fonctionnement
défectueux
Depuis le milieu des années 1980, les contraintes
socioéconomiques et les contraintes institutionnelles ont des
conséquences à la fois sur le financement, sur
l'efficacité et sur la légitimité du système de
protection sociale camerounais. En cela, elles sont les principales sources de
dysfonctionnements dudit système.
2.2.1. Les contraintes socioéconomiques
Les répercussions des contraintes
socioéconomiques sur le système de protection sociale camerounais
peuvent être analysées à travers l'observation des
tendances économiques et sociales de certaines variables.
2.2.1.1. Les tendances économiques
Plusieurs variables économiques ont des
répercussions sur les systèmes de protection sociale notamment
les salaires, les prix (Latullippe et Plamondon, 2004) et la croissance du PIB
(Holzmann, 2000). L'évolution de ces variables explique la crise
financière du système de protection sociale camerounais.
· La croissance du PIB et le taux
d'inflation
Le PIB est un indicateur économique qui
représente le total de la valeur ajoutée des biens et des
services réalisés dans un territoire aussi bien par les nationaux
que par les étrangers pendant une période donnée. Il est
positivement proportionnel aux recettes sociales.
Depuis le milieu des années 1980, le taux de
croissance du PIB au Cameroun a connu des phases ayant entraînées
la variation des recettes et des dépenses du système de
protection sociale. Ces différentes phases sont respectivement
présentées dans la figure 2.2 de la section 2.1 et dans la figure
2.3 ci-dessous.
Figure 2.3. Evolution du taux de croissance
annuelle moyen du PIB
Source : réaliser par l'auteur
à partir des données extraites du CD WDI, (2005)
A l'observation de ces figures, les constats suivants ont
été effectués :
- durant la période 1987-1993, l'économie
camerounaise connait une phase de récession marquée par une chute
brutale du taux de croissance de son PIB. Ce taux est descendu à - 4,31%
en moyenne annuelle alors qu'il était de 8,95% avant cette
période (1980-1986). Cette crise trouve ses origines aussi bien à
l'intérieur qu'à l'extérieur, et se concrétise par
un ralentissement important des activités publiques et par voies de
conséquences privées (Touna Mama et Tsafack Nanfosso, 2001). La
figure 2.3 retrace cette baisse.
Parallèlement, la figure 2.2 montre que les taux de
croissance annuel moyen des recettes et des dépenses sociales ont
chuté de l'ordre de - 5,19% et - 2,92% respectivement. La branche
allocations familiales et la branche risques professionnels ont
également connu des chutes similaires des taux de croissance annuelle
moyens de leurs recettes et de leurs dépenses (voir figure en annexe 1).
Seule la branche assurance vieillesse a vu son taux de croissance annuelle
moyen des recettes sociales s'amoindrir de l'ordre de - 4,36% pendant que celui
des dépenses sociales de la dite branche est resté
élevé de l'ordre de 12,01%.
- la période 1995-2001 est celle de la reprise qui se
manifeste par une relance des activités économiques et donc par
une atténuation des effets néfastes de la crise économique
sur les activités. On assiste à une hausse du taux de croissance
annuelle moyen des recettes sociales de l'ordre de 6,75%, mais également
de celui des dépenses sociales de l'ordre de 5,88%. Dans les
différentes branches de la sécurité sociale, la figure en
annexe 1 montre une amélioration du taux de croissance annuelle moyen
des recettes qui est passé à 7,1% pour l'assurance vieillesse,
à 6,95% pour l'allocation familiale et à 8,04% pour les risques
professionnels pendant que celui des dépenses s'est établi
à 7,12% pour l'assurance vieillesse, à 3,51% pour l'allocation
familiale et à - 0,9% pour les risques professionnels.
Quant à l'inflation, il est défini comme
une situation ou un phénomène caractérisé par une
hausse généralisée, durable et plus ou moins importante
des prix. La relation qui lie aux prestations sociales se décèle
au niveau de l'influence qu'exerce l'inflation sur les prestations sociales des
différentes branches.
Concernant ses mouvements au Cameroun, on peut dire
qu'au cours de la période de récession économique
(1987-1993), l'inflation s'établit à - 0,34% alors qu'elle
était de 11% avant cette période. Après la
dévaluation du franc CFA qui a lieu en 1994, l'inflation s'est
stabilisée autour de 4,06% sous l'impulsion des importants efforts de
lutte contre la crise, de l'apaisement salutaire des relations entre le
Cameroun et ses principaux bailleurs de fonds (FMI et BM), ainsi que des
politiques budgétaires et monétaires prudentes dans le cadre de
l'union monétaire (CEMAC). Ces chiffres sont représentés
dans le tableau 2.1 ci-dessous.
Tableau 2.1. Evolution du taux de croissance
annuelle moyen de l'inflation
|
1980-1986
|
1987-1993
|
1994-2001
|
Inflation
|
11%
|
- 0,34%
|
4,06%
|
Source : calculés par l'auteur
à partir des données extraites du CD WDI (2005)
A lecture de ce tableau, la branche assurance vieillesse
enregistre un taux de croissance annuelle moyen de ses dépenses
élevé à 12,01% pendant la période de
récession (1987-1993). Ceci s'explique par les diverses revalorisations
ayant eu lieu avant cette période pour faire face au coût de la
vie (voir tableau en annexe 1). Les autres branches par contre (allocations
familiales et risques professionnels) n'ont pas connu de revalorisations. Par
exemple, la dernière revalorisation de la branche allocations familiales
remonte au 1 juillet 1985. Ce qui explique la chute de leurs dépenses
durant cette période inflationniste.
Durant la période de relance (1994-2001), on note
le taux de croissance annuelle moyen des dépenses respectives des
branches assurance vieillesse et allocations familiales positifs alors celui de
la branche risques professionnels reste négatif, ceci du fait de la
baisse du taux de croissance annuelle moyen de l'inflation autour de 4,06% par
rapport à la période (1980-1986).
· L'évolution des salaires
réels
Le salaire est une rémunération du travail
effectué par un employé pour le compte d'un employeur, en vertu
d'un contrat de travail. Sa variation à la hausse influence positivement
le système de protection sociale.
En ce qui concerne ses mouvements au Cameroun, ils sont
analysés à travers le tableau 2.2 ci-dessous.
Tableau 2.2. Evolution du taux de croissance
annuelle moyen des salaires réels
|
1980-1986
|
1987-1993
|
1994-2001
|
salaires
|
14,31%
|
71,96%
|
7,13%
|
Source : calculs de l'auteur à
partir des données extraites du CD WDI, (2005)
Durant la période 1987-1993, la croissance
salariale a atteint un niveau élevé (71,96%). Cette croissance
est la résultante de l'emploi créé auparavant et de
l'intervention des bailleurs de fonds dans l'octroi d'emprunt au pays.
L'État a trouvé nécessaire d'augmenter les salaires pour
encourager les travailleurs tout en négligeant le volet protection
sociale qui oblige les employeurs à accomplir l'un de leurs devoirs qui
est celui de verser les cotisations sociale à la CNPS. Ces manquements
sont principalement expliqués par l'arrivée de la
récession économique qui touche l'ensemble du pays. C'est ainsi
que les différentes branches de la CNPS se sont retrouvées dans
une situation de déséquilibre du fait de la chute de leur taux de
croissance annuelle moyen des recettes de cotisations sociales (voir figure en
annexe 1).
Quant à la période 1995-2001, le tableau de
l'évolution du taux de croissance annuelle moyen des salaires ressort
une baisse drastique desdits salaires suite aux mesures des ajustements
structurels. Ce taux de croissance tombe à 7,13% pendant que les
recettes de cotisations des différentes branches s'élèvent
légèrement du fait de la relance économique et les moyens
mis en oeuvre pour améliorer le recouvrement desdites cotisations (voir
figure en annexe1).
|