4.3. Le site maraîcher de Lukunga
Il est situé entre la pente du versant des quartiers
Kimbuala et Don Bosco et celui du quartier Lukunga de la commune de Ngaliema.
Il est limité au Nord par l'avenue Makabi qui la sépare de
l'usine de la Regideso ; au Sud par l'avenue Kikusa, à l'Est par
l'avenue Mobutu Kongolo, à l'Ouest par la rivière Lukunga.
Le quartier Lukunga et son espace
maraîcher
La figure n°9 montre le quartier Lukunga et son site
maraîcher dans les années 1980 avant de commencer à subir
une forte pression de l'habitat. Actuellement, cet espace agricole est
menacé par le lotissement sauvage et le site assiste au recul des zones
agricoles. La pression de l'habitat sur le site maraîcher de Lukunga est
grande. Elle a engendré des bouleversements dans l'approvisionnement des
quartiers environnants en légumes.
4.3.1.
Caractéristiques sociales des maraîchers
Si 63% des maraîchers sont des femmes, il n'est pas
étonnant de voir aussi les hommes (37%). En milieu rural, le
travail agricole a toujours été féminin. Cela a aussi
été <importé> en milieu urbain. Les études de
Lelo Nzuzi (2009) sur l'agriculture urbaine à Kinshasa confirme les
faits : 75% des femmes participent activement aux activités
maraîchères pourvoyeuses de l'emploi et des revenus dans les sites
encadrés par le projet Horticulture Urbaine et
Périphérique (HUP). Et ces maraîchers sont de tout
âge. En gros, ce sont des personnes adultes et valides qui exploitent ces
terres agricoles.
Tableau n°15 : Répartition en groupe
d'âge des maraîchers
Groupe d'âge
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
20-30 ans
|
4
|
4
|
31-40 ans
|
6
|
6
|
41-50 ans
|
27
|
27
|
51-60 ans
|
38
|
38
|
61-70 ans
|
22
|
22
|
71-80 ans
|
2
|
2
|
81-90 ans
|
1
|
1
|
Total
|
100
|
100
|
Source : enquête sur le terrain (2009)
Le tableau n°15 montre 38 % des maraîchers sont
âgés de 51 à 60 ans. C'est le groupe d'âge le plus
important sur le site maraîcher. C'est le groupe d'âge le plus
actif sur de la tranche d'âge de 41 à 50 ans. Beaucoup de
maraîchers doivent être soit des retraités, soit des gens
qui ont perdu leur emploi. On remarque sur le terrain l'arrivée des
jeunes qui commencent à s'y intéresser mais la proportion est
encore insignifiante (4%). De tous ces maraîchers 3% sont
célibataires, 85% sont mariés, 6% sont divorcés et 6% sont
des veufs.
Les enquêtes montrent qu'il y'a une large dominance des
maraîchers mariés. Beaucoup de ces maraîchers
résident à Ngaliema (85%) et 15% viennent de Mont Ngafula qui est
la commune frontalière.
Il est vrai que les distances sont longues et les exploitants
maraîchers sont majoritairement issus de la commune où se trouve
l'espace maraîcher. Si le site était accessible au
véhicule, il attirerait les maraîchers venus d'autres communes.
Ces quartiers périphériques accueillent de nombreux migrants
ruraux qui ont transposé les comportements ruraux en ville. Les
enquêtes montrent que 53% des maraîchers sont nés au
Bas-Congo, 37% au Bandundu, 7% au Kasaï Oriental et 3% seulement à
Kinshasa. Les maraîchers nés à Kinshasa ne
représentent qu'une faible proportion parce que le milieu rural,
c'est-à-dire la province, a toujours été le milieu de
l'agriculture. C'est comme cela qu'on retrouve facilement des maraîchers
qui sont venus des provinces. Ces migrants ruraux qui viennent grossir les
effectifs démographiques de la ville n'ont pas d'emploi et vivent
souvent de l'informel pour entretenir leurs grosses familles. Les
enquêtes montrent que 14% des maraîchers ont des familles de 1 et
à 4 enfants, 73% entre 5 et 9 enfants, 12% entre 10 et 14 enfants, 1%
entre 15 et plus. Le tableau n°20 montre que la plupart des
maraîchers ont entre 5 et 9 enfants dans leur ménage. Ce sont donc
de grosses familles à entretenir. La moyenne de la taille du
ménage à Kinshasa est de 6,8 ; selon MICS2. La taille du
ménage des maraîchers concordent donc avec les chiffres de MICS2.
4.3.2. Caractéristiques
socio-économiques des maraîchers
Les enquêtes ont montré que l'agriculture urbaine
est en train de prendre de l'ampleur à Lukunga depuis l'an 2000. Les
enquêtes montrent que 56% sont sur ce site entre 2005 et 2010, 30% depuis
la fin des années 90 ; 14% depuis 1995. On voit bien que depuis la
deuxième moitié des années 90, les arrivées sur le
site ne font que croître. Ceci est consécutif à la crise de
l'emploi qui a contraint des hommes adultes valides à se convertir en
maraîcher. Tous ne sont pas des illettrés. Les statistiques
montrent qu'à peine 12% des maraîchers sont non
scolarisés. Parmi les maraîchers, 20% ont le niveau primaire, 34%
ont le niveau secondaire, 31% sont du niveau secondaire professionnel. Mais,
ils n'avaient pas dit s'il s'agit de l'enseignement professionnel agricole ou
autre. Il y a même des universitaires qui se sont convertis en
maraîcher (3%). Cette activité produit non seulement des produits
agricoles pour l'autoconsommation, mais aussi pour la vente. En effet, la
crise qui frappe de plein fouet le Congo a accentué l'exode rural et ces
migrants ruraux n'ont qu'un seul emploi : l'agriculture.
Tableau n°16 : Types de légumes
cultivées
Légumes
|
cultivant
|
Non-cultivant
|
Total(%)
|
Amarante
|
88
|
12
|
100
|
Feuille de patate douce
|
99
|
1
|
100
|
Ciboule
|
2
|
98
|
100
|
Feuille de manioc
|
3
|
97
|
100
|
Aubergine
|
14
|
86
|
100
|
Tomate
|
2
|
98
|
100
|
Gombo
|
6
|
94
|
100
|
Source : enquête sur le terrain (2009)
Le tableau n°16 montre que 88% des maraîchers
cultivent les amarantes et 99% les feuilles de patate douce. Ce sont les
légumes qui coûtent moins cher pour les bourses des populations et
dont la production ne prend pas trop de mois. Ce sont des cultures de cycle
court. Ces ménages pauvres sont tellement démunis qu'ils ne
peuvent pas se lancer dans des cultures à cycle long. C'est comme cela
que ces légumes (feuille de patate douce et amarante) sont
cultivés en grande quantité par rapport aux autres légumes
comme les gombos, ciboulette, etc. La feuille des patates douces (le matembele)
est d'ailleurs appelé le légume des pauvres. Les chiffres sur le
nombre des plates bandes le prouvent, comme le montre ce tableau.
Tableau n° 17: Quantité des
légumes nombre de plates bandes en %
Nombre des plates bandes
|
1à3 plates bandes
|
4à5 plates bandes
|
6à9 plates bandes
|
10à13 plates bandes
|
14 et plus
|
Total(%)
|
Amarante
|
44,2%
|
32,9%
|
12,4%
|
4,5%
|
6,0%
|
100,0%
|
Feuille de patate douce
|
3%
|
2%
|
8%
|
35%
|
52%
|
100%
|
Ciboule
|
100%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
100%
|
Feuille de manioc
|
100%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
100%
|
Aubergine
|
100%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
100%
|
Tomate
|
100%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
100%
|
Gombe
|
100%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
100%
|
Autres légumes
(oseille, Pointe-Noire)
|
100%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
100%
|
Source : Enquête sur le terrain (2009)
Le tableau n°17 indique que 44,2% des maraîchers
qui cultivent l'amarante possèdent 1 à 3 plates bandes, 32,9% ont
4 à 5 plates bandes, 12,4% ont 6 à 9 plates bandes, 4,5% ont 10
à 13 plates bandes et 6,0% ont 14 et plus des plates bandes. De l'autre
côté, ceux qui cultivent les feuilles de patate douce, 3% ont 1
à 3 plates bandes ; 2% ont 4 à 5 plates bandes ; 8% ont
6 à 9 plates bandes ; 35% ont 10 à 13 plates bandes et 52%
ont 14 et plus des plates bandes. Par ailleurs, 100% des maraîchers qui
cultivent le ciboule ont 1 à 3 plates bandes ; 100% des
maraîchers cultivant le feuille de manioc ont 1 à 3 plates
bandes ; 100% des maraîchers cultivant l'aubergine ont 1 à 3
plates bandes ; 100% des maraîchers cultivant la tomate ont 1
à 3 plates bandes ; 100% des maraîchers cultivant le gombo
ont 1 à 3 plates bandes et 100% des maraîchers cultivant d'autres
légumes (oseille et Pointe-Noire) ont 1 à 3 plates bandes.
Les maraîchers de Lukunga préfèrent
cultiver les amarantes et les feuilles de patate douce parce qu'ils sont plus
rentables et ont une croissance rapide par rapport à d'autres
légumes.
Les enquêtes indiquent que la majorité des
maraîchers pratique l'agriculture pendant toute l'année et
considère cette activité comme un plein emploi ou encore comme
principale source de revenu.
La plupart des maraîchers exploite entièrement
leurs terres agricoles et la main d'oeuvre familiale est non
rémunérée. Près des 75% des maraîchers
vendent leurs produits agricoles auprès des grossistes pour
éviter les multiples cas d'escroqueries et les multiples taxes de la
part des agents communaux.
La fluctuation de vente des produits agricoles se fait en
fonction des saisons. Durant la saison sèche, la production atteint le
maximum et le minimum s'observe durant la saison de pluie en raison
d'inondation fréquente au sein du site maraîcher. Pour leur
production, plusieurs mécanismes d'arrosage sont employés en
fonction de leur accessibilité. L'eau du rivière Lukunga est la
plus utilisée. C'est ainsi que les résultats d'enquête on
montré que 46% des maraîchers utilisent l'eau de la rivière
Lukunga pour arroser et 25% des maraîchers utilisent l'eau de canal.
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