Section 2 : Efficacité des politiques
anti-inflationnistes aux chocs pétroliers
L'inflation et le chômage sont perçus comme les
deux grandes maladies de l'économie, dans la mesure que la lute contre
l'une se fait au détriment de l'autre, ce qui met les autorités
monétaires dans une situation délicate vu au paradoxe qui s'y
inflige. Cependant, l'enseignement tiré des incidences pervers des deux
premiers chocs pétroliers sur les plans économiques et sociales,
met l'objectif de stabilité des prix au devant de la scène parmi
les préoccupations des banques centrales. La commodité de cette
politique, ainsi que les bienfaits qui peuvent être diffusés sur
les plans économiques et sociales, font l'objet de la première
sous-section. Dans la seconde, nous examinerons le cadre de l'émergence
de la politique de ciblage crédible d'inflation comme la politique la
plus efficace face à la transmission des effets des chocs
pétroliers, tout en utilisant les hausses récentes des cours
pétroliers pour l'évaluation de sa performance.
2-1 Commodité de la politique de stabilité
des prix
Dans l'objectif d'apprécier l'importance de la
stabilité des prix, dans le cadre d'une économie mondiale
caractérisée par des volatilités intenses et
imprévisibles des cours pétroliers et par une instabilité
financière fulgurante, nous préservant cette sous section
à la
découverte des enseignements retenus par les politiques
monétaires, et mis en oeuvre par les pays industrialisées, l'or
des deux premiers chocs pétroliers. Dans un second temps, nous
avançant, du point de vue théorique, les bienfaits d'un tel
objectif.
2-1-1 Réaction des politiques monétaires
aux deux premiers chocs Pétroliers
L'étude de la réaction des principaux pays
industrialisés aux hausses des prix du pétrole l'or des deux
premiers chocs pétroliers peut être présenté comme
suit :
Commençant par le premier choc, la brutalité et
l'ampleur des augmentations des prix du pétrole ont des incidences
perverses, néanmoins, le degré des effets diffère d'un
pays à un autre ; Aux Etats-Unis, les réformes de 1971 concernant
la libéralisation des prix et la suppression du contrôle des
rémunérations ont été suivis par le quadruplement
des prix du pétrole, début 73. Les retombées de ce choc
ont été perverses sur l'inflation, qui table sur 11,7% en 1974
contre 4% en 1973. Confrontée à la hausse des prix et du
chômage, la Réserve Fédérale opte pour le
resserrement de sa politique monétaire, la baisse de l'inflation
été fulgurante et tend vers 5,8% en 1975, même si elle
reste bien supérieure aux taux enregistrés l'or des deux
décennies précédentes.
En Europe, la réaction de l'inflation au choc diverge
par pays, ce qui montre l'importance des effets des politiques mis en oeuvre.
L'inflation a été bien maitrisée en Allemagne et en Suisse
qui ont opérés, respectivement, des politiques monétaires
restrictives fin 1972 et début 1973, les taux d'inflation ont
été abaissés aux alentour des 4% et des 3% en 1976.
Néanmoins, ce choc pétrolier à
été suivi par de fortes pressions inflationnistes pour le reste
des pays européens, qui se sont tournés vers l'objectif de
stimulation de la production et de l'emploi au moyen de politiques
monétaires accommodantes. Les retombées des hausses des prix du
pétrole sur l'inflation ont été dramatiques ; en France
l'inflation grimpa à 15% en 1974 contre 7,3% en 1973. La situation du
Royaume Unis et de l'Italie été plus grave sous l'effet de
l'indexation des salaires, le taux de croissance de l'indice des prix à
la consommation atteignit les 15% en 1974 et 24% en 1975 contre environ 9% en
1973.
Finalement, les réactions de l'inflation à ces
chocs pétroliers constituent un cas particulier pour le Japon, suite au
premier choc pétrolier les hausses prix atteignirent un niveau critique
depuis la guerre et tablent sur 25,3% en 1974 contre 11,7% en 1973, ce qui
reflète la dépendance de l'économie japonaise
vis-à-vis du pétrole importé.
Les divergences des réactions politiques au premier
choc pétrolier pèsent sur les effets inflationnistes du second
choc des années 1979-80, dans la mesure où les pays qui ont
accordés la priorité pour la maitrise de l'inflation semblent
être en position de force, en héritant des taux d'inflation
faibles, relativement à ceux qui ont axés leurs politiques
monétaires vers la stimulation de leurs taux de croissance.
Les incidences du second choc pétrolier aux Etats-Unis
été sévères, le retard pris dans la lutte contre
l'inflation a coûté l'économie américaine un taux
record de 13,5% fin 1980. Le resserrement des conditions monétaires, au
cour des deux années qui suivent, a baissé l'inflation au dessous
de 4% début 1983, néanmoins, ces baisses ont été
coïncidées par une régression de 3,25% du PIB et un taux
culminé de 11% du chômage. Pour les autres pays européens,
à l'exception de l'Allemagne et la Suisse, le constat reste le
même : un coût de récession semble nécessaire pour la
maitrise de l'inflation.
A partir de ce constat, on peut tirer que toute hausse des
prix du brut n'est pas, obligatoirement, synonyme de pressions inflationnistes.
L'idée sous-jacente est que la nature de la politique monétaire
mis en oeuvre joue un rôle crucial dans la réaction de l'inflation
à ces chocs. Cette conclusion peut être approfondie par les
résultats des Série des études économiques et
financières du Fond Monétaire International : « Les vagues
d'inflation de 1973-74 et 1979-80 étaient toutes deux liées
à de fortes augmentations des prix des produits de base, en particuliers
de celui du pétrole. Mais l'enseignement le plus signifiant de ces
épisodes n'était pas le fait que des chocs au niveau de l'offre
de produits de base et d'autres produits peuvent donner une forte impulsion
à l'inflation. Le point important est que la réaction de
l'inflation à ces chocs dépend des politiques appliquées
ainsi que du comportement des rémunérations. »30
Confrontées à des taux d'inflation
inacceptables, les pays industrialisés se trouvent obligés de
s'inscrire, aux années 80, dans le cadre d'une réorientation des
politiques économiques vers une stratégie d'objectifs à
moyen terme. Les piliers de cette stratégie sont principalement le
ciblage de l'inflation pour garantir une stabilité raisonnable des prix
et l'introduction de nouvelles réformes pour l'injection du concept de
flexibilité des salaires sur les marchés de travail. C'est ainsi
que l'objectif de stabilité des prix est devenu vital pour la
résistance économique aux chocs pétroliers.
Néanmoins, l'importance de la stabilité des prix réside
dans plusieurs autres facteurs d'aspect économiques et sociaux.
2-1-2 L'importance de la stabilité des
prix
Déjà illustrer dans la courbe n°1 du
premier chapitre, la stabilité des prix est la période qui
s'épare la désinflation de la déflation dans le cycle des
variations des prix. C'est ainsi qu'on peut définir la stabilité
des prix comme la situation au cours de la quelle les prix n'enregistrent, en
moyenne, ni hausse (inflation) ni baisse (déflation) sensible dans le
temps. C'est-à-dire que « les variations attendues du niveau moyen
des prix sont
30 1996, « Haut et bas de l'inflation : analyse
du bilan de l'après-guerre », Série des études
économiques et financières, Perspectives de l'économie
mondiale, Fond Monétaire International.
suffisamment faibles et graduelles pour ne pas influer
sensiblement sur les décisions financières des entreprises et des
ménages » (Greenspan, 1989). La mise en oeuvre d'une telle
politique fait référence aux bienfaits de ses incidences sur le
plan des consommateurs, des producteurs et de la cohésion sociale.
L'ensemble de ces avantages peuvent être résumés dans les
points qui suivent :
a) Le maintient du pouvoir d'achat des ménages
: La stabilité des prix est un facteur essentiel du maintient
du pouvoir d'achat des ménages ; les inconvénients et les
coûts liés à l'inflation sont effectivement
considérables surtout du point de vue de l'amputation
régulière du pouvoir d'achat des ménages. La
stabilité des prix prévient l'apparition des ces coûts et
offre l'avantage de préserver la valeur des pouvoirs d'achats et le
maintient de la valeur réelle des épargnes des ménages, ce
qui contribue à l'élévation des niveaux de vie et de la
prospérité économique.
b) Favorable à la croissance économique
et à l'emploi : En période d'inflation ou de
déflation, les prix des biens et des services sont soumises à de
fortes variations continues et imprévisibles ce qui rend difficile de
savoir si un changement de prix rend un produit plus cher ou moins cher qu'un
autre, c'est-à-dire que la tâche d'identifier les variations des
prix relatifs deviennent délicate étant donné qu'elles
sont masqué par les fluctuations du niveau général des
prix.
En revanche, lorsque le niveau général des prix
est stable, les consommateurs et les producteurs disposent l'information fiable
sur la significativité des variations des prix, et ne risque plus de
confondre les variations des prix relatifs avec celles du niveau
général des prix. Dans ce cas, ils donnent l'affectation la plus
productive à leurs ressources dans un contexte optimal pour la prise des
décisions de consommation et d'investissement, ce qui accroit le
potentiel productif de l'économie. A cet effet, on peut ajouter l'effet
de compétitivité à l'exportation dans la mesure où
les prix des biens exporté augmentent dans une cadence inférieure
aux pays inflationniste, ce qui favorise les exportations et contribue à
des gains de part de marché par rapport aux concurrents.
En outre, lorsque les prix sont stables, les créanciers
acceptent des taux d'intérêt faibles sur leurs placements vu
qu'ils s'attendent à ce que leur épargne conserve sa valeur sur
le long terme, c'est ainsi qu'ils n'exigent pas des primes de risque
destinées à compenser les pertes en termes d'inflation. En
réduisant ces primes de risque, la faiblesse des taux
d'intérêt contribue à stimuler les crédits
d'investissement et de consommation, ce qui accroit la production et favorise
la création d'emploi. C'est ainsi que la stabilité des prix est
importante pour la croissance économique et l'emploi.
c) Prévient le phénomène de la
progression à froid et contribue à la stabilité
financière : Le phénomène de la progression
à froid peut être illustré par le cas d'un
salarié soumit à des taux d'imposition fiscal et de cotisation
sociale supérieurs aux revendications salariales censées
compenser la perte du pouvoir d'achat, ponctionner par l'inflation. C'est ainsi
que les systèmes fiscaux et de sécurité sociales sont
jugés, dans la plus part des cas, êtres responsables de
créer des distorsions exacerber par l'inflation et la déflation,
dans la mesure où ils n'indexent pas exactement les taux d'imposition et
de cotisation sociale sur les taux d'inflation. Dans ce cadre, on peut conclure
que « La stabilité des prix réduit ces effets de distorsion
liés à l'incidence des tensions inflationnistes ou
déflationnistes sur les systèmes fiscaux et de
sécurité sociales »31.
Outre, la stabilité des prix renforce la
solidité financière des banques dans la mesure où
l'émergence inattendue des pressions inflationnistes entraine la
réévaluation des actifs, ce qui engendre un
déséquilibre entre les dépôts à court terme
et les prêts octroyer à des intérêts fixes sur le
long terme. Les banques se trouvent confrontées à des
problèmes d'insolvabilité qui risque de s'étendent en
chaine via l'effet de mimétisme. C'est ainsi que la stabilité des
prix renforce la stabilité financière en prévenant des
chocs inflationnistes et déflationnistes, susceptibles d'effondre la
valeur réelle des actifs nominaux.
d) Les aspects sociaux de la stabilité des
prix : La stabilité des prix est l'une des piliers de la
stabilité sociale. Par le passé, on peut constater que
l'inflation était une source d'instabilité sociale, telle que le
cas de l'hyperinflation allemande de 1923 et la déstabilisation des
classes moyennes et des salariés, considérées comme les
classes les plus vulnérables aux hausses des prix dans la mesure
où ils peuvent difficilement protéger leurs créances
nominales de l'inflation. Il s'ensuit un transfert arbitraire de richesse des
préteurs vers les emprunteurs engendrant une instabilité sociale
et politique. C'est ainsi que la stabilité des prix contribue à
préserver la cohésion sociale et politique, un facteur
jugé nécessaire pour le développement de toute
économie.
Tous ces arguments nous amène à confirmer que le
maintient de la stabilité des prix par les banques centrales, contribue
significativement à la réalisation des objectifs
économiques plus généraux, tel que
l'élévation du sentier de l'économie et l'augmentation du
niveau de vie. Cette conclusion se trouve authentifiée par la
réalité économique des pays qui maintiennent des taux
d'inflation faibles et réguliers et qui connaissent, en moyenne, une
croissance plus forte à long terme. En outre, dans le choix de la
politique monétaire qui vise à stabiliser les prix, s'impose la
politique de ciblage d'un objectif d'inflation.
31 2007, « Pourquoi la stabilité des prix
est elle importante pour vous ? », Manuel à l'intension des
enseignants, Banque Centrale Européenne.
L'émergence de cette politique et la connaissance de ses
caractéristiques fait l'objet de la sous section suivante.
2-2 La politique de ciblage d'inflation
Dans la mesure de l'importance du rôle joué par
les politiques monétaires face à la transmission des effets des
chocs pétroliers, la plupart des pays ont orienté leurs
politiques monétaires vers l'objectif ultime de stabilité des
prix. Néanmoins, l'échec enregistré par les tentatives de
stabilisation des prix usées au cours des deux premiers chocs
pétroliers a basculé ces économies vers la politique de
ciblage crédible d'inflation. L'émergence de cette politique et
la définition de ces principales caractéristiques fait l'objet de
la première partie de cette sous section. En outre, les hausses
récentes des cours pétroliers enregistrées à la fin
cette décennie, avancent le cadre d'un test réel de la
résistance des composantes de l'inflation sous le contexte de la mise en
oeuvre de cette politique. L'évaluation de la performance de cette
politique face aux hausses des prix pétroliers, ainsi que la
connaissance des engins d'amortir les canaux de transmission, fait l'objet de
la seconde partie.
2-2-1 Exposition de la politique de ciblage
d'inflation
Dans la définition de la politique de ciblage
d'inflation, le recours aux causes de l'échec des stratégies de
maitrise d'inflation, au cours des années 70 et 80, semble fructueux
pour la connaissance du cadre de l'émergence de la politique d'objectif
d'inflation, ainsi qu'aux avantages tirés d'une telle politique.
Deuxièmement, nous avançons les attributs de cette politique en
ce qui concerne le statut juridique et institutionnel de cette stratégie
ainsi qu'au taux objectif optimal à signaler.
a- Emergence de la politique de ciblage
d'inflation
Obliger par les législations nationales à
garantir l'objectif primitif du maintient de la stabilité des prix, les
banques centrales, en général, sont souvent soumises sous
pressions d'une tâche ardue. Selon la discipline de la politique
monétaire, la typologie de réalisation d'un tel objectif fourni
trois procédures ;
La première procédure remonte à la
période 1945-1970 où la stabilité des prix était
fondée sur le système de taux de change
fixe établi à Bretton Woods, l'objectif de ce
système monétaire international était de faire de la
maîtrise de l'inflation aux Etats-Unis le point d'ancrage de la
stabilité des prix dans les autres pays membres du FMI. C'est ainsi que
les monnaies de ces pays se trouvent ancrées par des taux de changes
fixes au dollar
American, à condition que ce pays assure la
convertibilité de sa monnaie en or. On parle ainsi de l'étalon
or-dollar, défini comme le point d'ancrage nominal du système de
Bretton Woods.
Après l'effondrement de ce système au
début des années 70, un nombre important de pays, surtout les
pays en développement, ont continués à maintenir
l'adoption des taux de change fixes, ou presque fixes, en rattachant leurs
monnaies à la monnaie d'un pays à faible taux d'inflation, et
donc considéré comme une monnaie stable. La fonction de la banque
centrale dans le cadre de ce cas particulier de fixité de taux de
change, nommée Currency Board, consiste essentiellement à
conserver une unité de la monnaie d'ancrage (monnaie
étrangère) pour chaque unité de monnaie nationale en
circulation. On dit ainsi que la banque centrale adosse totalement sa monnaie
sur une autre monnaie. Si certaines économies s'en sont servies à
maitriser l'inflation en périodes de fortes hausses, à l'image de
l'Argentine depuis 1991 et le Brésil en 1994-1998, cette politique est
sujette de plusieurs contraintes. L'inconvénient majeur de cette
stratégie est quelle restreint la capacité des banques centrales
à réagir aux chocs intérieurs et extérieurs, vu
qu'elle limite considérablement le champ de la politique
monétaire qui ne s'intéresse qu'aux taux de change. A ce
là s'ajoute le fait de la conjonction des progrès
d'intégration des marchés des produits et des capitaux à
la volatilité accrue des flux de capitaux au cours de ces
dernières décennies, ce qui favorise la transmission des chocs et
astreint le maintien des politiques de taux de change fixes parce qu'elle
doivent résister aux pressions qui y s'imposes. Ces inconvénients
peuvent être résumés comme suit ; « Le principal
inconvénient de cette stratégie est qu'elle limite la
capacité de riposte de la banque centrale face aux chocs. En outre, il
est devenu plus difficile de satisfaire aux conditions nécessaires pour
maintenir un taux fixe en raison de la croissance et de l'instabilité
des flux de capitaux internationaux au cours des vingt dernières
années, comme en témoignent les crises monétaires des
années 90. »32.
En outre, après l'époque de Bretton Woods, la
plus part des pays industrialisés ont données la
préférence aux régimes des taux de change
flottants, dans l'avantage de donner à la politique
monétaire la latitude de choisir divers degrés d'adaptation en
réaction aux chocs extérieurs et intérieurs. Cependant,
l'avantage que transmettent les taux de changes flexible dans la liberté
et l'indépendance des politiques monétaires se trouve
associé à de fortes pressions inflationnistes comme l'on peut
voir au cours des années 70. De plus « On peut en voir une preuve
supplémentaire dans le fait que l'inflation moyenne des pays
32 « Pourquoi cibler l'inflation », l'ABC de
l'ECONOMIE, Finance et Développement, juin 2003.
industrialisés, et les écarts nationaux par rapport
à cette même moyenne, ont tendance à être plus
tenaces dans le monde d'après Bretton Woods. »33
Ayant perdu le point d'ancrage des taux de change fixes et
confrontée à des taux d'inflation élevés
après l'adoption des taux de changes flottant, le problème se
résume dans le besoin d'un nouveau point d'ancrage intérieur pour
assurer la stabilité des prix. Au milieu des années 70, de
nombreux pays industrialisés ont adopté l'objectif de
ciblage des agrégats monétaires pour la
conduite de leurs politiques monétaires. Selon cette optique
monétariste, pour que l'inflation soit stable, la masse monétaire
devrait croitre au même rythme que le produit national. Cependant, bien
que cette stratégie a permit pour un nombre important de pays la
maitrise de l'inflation, par rapport aux taux records de l'après guerre,
cette optique s'est révélée de moins en moins
satisfaisante, au début des années 80, pour le cas des pays ayant
des marchés financiers et boursiers assai développés.
À mesure de l'expansion des innovations dans l'industrie des services
financière, qui ont servis à l'injection des substituts de
monnaie, la demande de monnaie est devenue de plus en plus instable. En
conséquence, la corrélation entre la masse monétaire et
l'inflation se trouve fragilisée, surtout dans le court terme, ce qui
complique la tâche des autorités monétaire à
stabiliser les prix sous cette stratégie.
Au début des années 90, la plupart des pays,
surtout celles de l'Organisation de Coopération et de
Développement Economiques (OCDE), ont cessées à stabiliser
les prix via le ciblage des agrégats monétaires, et ont
opté jusqu'à nos jours pour une politique monétaire
reposant explicitement sur le ciblage crédible d'un objectif
d'inflation. La tendance à adopter des objectifs
d'inflation officiels par un nombre croissant de pays, et les résultats
significatifs qui sont réalisés dans le maintient de la
stabilité des prix, s'appuies sur plusieurs raisons.
Premièrement, la stabilité des prix doit
être l'objectif primitif de la politique monétaire. Une conclusion
qui découle des études de la théorie quantitative de la
monnaie qui montre qu'il n'existe pas d'arbitrage à long terme entre la
stabilité des prix et l'activité économique, c'est ainsi
que la monnaie est neutralisée à long terme vue qu'elle n'a pas
d'impact sur la croissance réelle de l'activité
économique, qui dépond d'autres facteurs tel que la
productivité et le stock de capital, et elle n'a d'influence que sur les
variables nominales, tel que le niveau des prix.
Deuxièmement, et selon la courbe de Phillips, toute
tentative d'abaisser le taux de chômage tend à amorcer les
pressions inflationnistes. L'attachement crédible à un objectif
d'inflation pourra réduire l'ampleur de ce biais inflationniste.
33 George S. Alogoskoufis, «Monetary Accommodation, Exchange
Rate Regimes and Inflation Persistence», Economic Journal, volume 102 (mai
1992), pages 461-80
Le troisième avantage se résume dans les gains de
crédibilité que procurent la transparence et
l'indépendance accrue de la banque centrale.
Outre ces conclusions théoriques, l'échec de
l'ancrage des taux de change et du ciblage des agrégats
monétaires ont joué un rôle important dans l'adoption des
politiques de ciblage d'un objectif d'inflation. Une fois adoptée, les
autorités monétaires doivent fixer les attributs
généraux d'un tel objectif.
b- Les attributs de la politique de ciblage
d'inflation
Sous les recommandations de plusieurs économistes (F.
Mishkin, Ben Bernanke et autres), un nombre croissant de pays ont
adoptés des objectifs officiels d'inflation qu'on peut les advenir, par
ordre chronologique, dans le tableau suivant :
Tableau 2-2 : Ciblage d'inflation dans divers
pays
Pays
|
Année de l'adaptation du ciblage
de l'inflation
|
Taux d'inflation Année de l'adaptation
du ciblage de l'inflation (%)
|
Taux d'inflation établi comme objectif
en 2001 (%)
|
Taux d'inflation en 2001 (%)
|
Nouvelle-Zélande
|
1989
|
7.5
|
0 à 3
|
2.6
|
Canada
|
1991
|
7.5
|
1 à 3
|
2.5
|
Royaume-Unis
|
1992
|
3.7
|
2.5
|
1.8
|
Suède
|
1993
|
4.6
|
1 à 3
|
2.4
|
Pologne
|
1999
|
7.3
|
5.4 à 6.8
|
5.5
|
Colombie
|
2000
|
8.0
|
8.0 pour 2001
|
8.0 en 2001
|
|
|
|
6.0 pour 2002
|
6.3 en 2002
|
Corée
|
2000
|
4.1
|
2.5
|
4.1
|
Islande
|
2001
|
6.4
|
2.5 (+/- 1.5)
|
6.4
|
Mexique
|
2001
|
6.4
|
6.5 pour 2001
|
6.4 en 2001
|
|
|
|
4.5 pour 2002
|
5.0 en 2002
|
* d'après les calculs du FMI, International Financial
Statistics.
Une fois adopté un objectif formel d'inflation,
affermir son statut juridique et institutionnel semble être la
première tâche à accomplir. Ce statut varie beaucoup d'un
pays à un autre, si en Nouvelle Zélande et au Canada cet objectif
est fixé par accord entre le
Ministre des finances et le Gouverneur de la banque centrale,
cet objectif est fixé au Royaume-Unis par le Chancelier de
l'échiquier (le responsable devant le parlement), alors que dans la
plupart des pays, l'organe législatif de cet objectif est sous le
contrôle des banques centrales dans le but de jouir ces autorités
des caractères de responsabilité, d'indépendance et
surtout de crédibilité.
Une fois statué, la transmission du message de
crédibilité des autorités monétaires au public
s'opère normalement par la diffusion d'un taux ou d'une fourchette de
taux d'inflation (habituellement par le ministère des finances). Bien
qu'un taux unique et faible semble plus efficace pour focaliser les
anticipations d'inflation sur une cible bien précise, la plupart des
objectifs d'inflation sont exprimés sous forme de fourchette de taux,
compte tenu des biais de maitrise de l'inflation par les banques centrales.
En outre, et compte tenu des méfaits de l'inflation et de
la déflation, l'absence d'un taux objectif nul nous amène
à s'interroger sur le prétexte d'un taux objectif optimal
positif. L'absence d'un objectif de stabilité absolue des prix revient
à dire que le maintient d'un taux d'inflation positif, mais faible, est
favorable pour l'économie. En effet, une lutte trop ferme contre
l'inflation nuit à la croissance économique, dans la mesure
où le maintient d'une inflation faible et positive allège la
dette des emprunteurs. Bien qu'elle soit désavantageuse pour les
préteurs, l'inflation s'interprète comme une tentation pour les
débiteurs, ceux qui prennent l'initiative économique en tant
qu'entreprises et consommateurs, vu qu'ils remboursent moins. C'est ainsi que
dans l'histoire du capitalisme, l'inflation à joué un rôle
crucial dans la stimulation des projets, qui auraient été
impossibles sans inflation.
D'autre part, le ciblage d'un taux d'inflation faible et
positif rend la politique monétaire plus efficace en période de
récession, vu qu'il permet au taux d'intérêt de devenir
négatif à court terme, une solution efficace pour la relance de
la demande et donc de l'activité économique. Cependant, dans le
cas d'un taux d'inflation nul, les autorités monétaires ne
pourraient qu'annuler les taux d'intérêt à court terme. Une
solution qui ne pourrait pas être suffisante pour la relance de la
demande globale.
Concernant la perte des pouvoirs d'achats, ils sont
relativement faibles pour des taux d'inflation faibles (au alentour des 2%
à 3%), le changement effectif s'opère généralement
pour des taux relativement haut (de 5% à 10%). Finalement, on peut citer
l'avantage de la rehausse des ajustements salariaux entre branches
industrielles dans la mesure qu'un taux d'inflation positif et faible facilite
bien l'ajustement des salaires réels relatifs.
À la lumière de ces externalités
positives, de point de vue économique et social, que procurent le
ciblage d'un objectif crédible d'inflation, il n'est pas surprenant
qu'un nombre important de pays optent pour cette politique anti
inflationniste. Cependant, l'évaluation
des performances d'une telle stratégie sur les effets des
chocs pétroliers peut être fructueuse pour l'accomplissement de
notre étude sur la relation inflation prix du pétrole.
2-2-1 Evaluation des performances de la politique de
ciblage d'inflation sur les effets des chocs pétroliers
L'évaluation des performances de la politique de
ciblage crédible d'un objectif d'inflation sur les effets des chocs
pétroliers, consiste à examiner la transmission des effets des
hausses des cours pétroliers à l'inflation globale dans les
principaux pays industrialisées. A cet effet, la comparaison entre les
incidences des deux premiers chocs pétroliers sur l'inflation, dans un
cadre de ciblage des taux de changes et des agrégats monétaires,
et des retombées des hausses récentes des cours pétroliers
sur l'inflation, dans le cadre de la politique de ciblage crédible
d'inflation peut être commode pour notre étude.
En outre, dans un bref rappel de la transmission des effets
des chocs pétroliers sur l'inflation (déjà évoquer
dans le premier chapitre), les canaux se résument,
généralement, dans l'effet mécanique, dit de premier tour,
et l'effet de boucle prix salaire, dit de second tour. Selon le premier canal,
la hausse des prix du pétrole entraine directement la hausse des prix
des produits énergétiques, surtout ceux qui sont très
intense en pétrole, et l'élévation indirecte des prix
d'autres produits via le renchérissement des coûts des
consommations intermédiaires en énergie. On note que cet effet
touche les composantes les plus volatiles de l'inflation, à savoir les
prix des produits énergétiques et alimentaires.
L'effet de second tour est celui du déclanchement de la
boucle prix-salaire, résultant essentiellement des comportements
conflictuels et rationnels des salariés et des employeurs, dans le
devoir du maintient du pouvoir d'achat et des marges de profits inerte de toute
dévalorisation invoquée par l'inflation. C'est ainsi que face
à une hausse des prix et sous l'effet de l'indexation des salaires sur
les prix, les salariés exigent une revalorisation de leurs salaires pour
défendre leur pouvoir d'achat. L'augmentation des coûts du
travail, qui en résulte, oblige les employeurs à augmenter leurs
prix de ventes pour préserver leurs marges de profits, ce qui
génère un surcroit de l'inflation. Et à nouveau, les
anticipations d'inflation et la spirale prix-salaire s'enclenche. On dit que
l'inflation s'inscrit dans un phénomène auto-entretenu, dans le
quel l'indexation des salaires sur les prix joue un rôle crucial.
Finalement, cet effet s'interprète comme le plus pervers parce qu'il
touche l'essence de l'inflation, à savoir l'inflation sous-jacente.
A ce niveau, et dans la mesure où la réaction de
l'inflation aux chocs pétroliers dépond des politiques
monétaires appliquées et du poids de l'indexation des salaires
sur les prix, on peut dire que la politique monétaire joue un rôle
essentiel dans la transmission de la hausse des prix du pétrole aux
composantes de l'inflation. Cette conclusion peut être
appréciée par
l'affaiblissement des effets des augmentations récentes
des cours pétroliers sur l'inflation relativement aux effets pervers des
deux premiers chocs pétroliers (voir tableau 1-2 page 28). Cependant, la
concomitance de cet affaiblissement des effets à la mise en oeuvre des
politiques monétaires de ciblage crédible d'inflation ne peut pas
être un jeu de hasard. Plusieurs modèles macroéconomiques
affermis la performance de cette politique à handicaper la transmission
des effets de ces chocs. Parmi ces études, nous nous présentons
les résultats de la modélisation de Benoit Heitz (2004) qui
cherche à détecter les cas de déclenchement des spirales
prix-salaires dans le cadre de deux régimes : « Dans le premier
régime, les agents économiques considèrent que, même
si cela doit prendre du temps - après une flambée des prix par
exemple -, l'inflation retournera vers un certain niveau. C'est le cas
notamment si la banque centrale a un objectif d'inflation et qu'elle est
crédible : les agents s'attendent alors à ce que l'on revienne
vers cet objectif. Dans le second régime, ils anticipent d'autant plus
d'inflation qu'ils en ont observée par le passé (mécanisme
d'anticipations adaptatives). Ce genre de situation est propice à un
emballement de l'inflation, via la boucle prix-salaire. »34.
Les résultats conclus qu'aux Etats-Unis, qui a une
cible crédible d'inflation dans plus de 80% du temps entre 1960 et 2004,
la probabilité d'être dans une spirale inflationniste est
très limité et les anticipations de l'inflation par les
ménages convergent vers la cible de 2.75%. Ces résultats se
trouvent consolider par l'enquête auprès des ménages
américains de l'université du Michigan. Pour la France, dont la
politique de désinflation des années 80 a rendu crédible
l'objectif de faible inflation, le constat reste le même et les
résultats confirment que la probabilité d'être dans une
spirale inflationniste est extrêmement faible ce qui est en ligne avec le
diagnostic de l'enquête de conjoncture auprès des ménages
français.
Néanmoins, si l'effet de premier tour des hausses des
prix du pétrole sur l'inflation semble, en général, un
effet mécanique sur lequel les autorités monétaires n'ont
plus d'influence, et dans lequel les politiques d'efficacité
énergétique jouent un rôle crucial. En quoi consistent les
spécificités qui permettent aux politiques de ciblage
crédible d'inflation l'amortissement des effets de second tour ?
Les conclusions des travaux qui se sont penchés sur
cette question convergent sur l'analyse d'une rupture dans l'indexation des
salaires sur les prix, qu'on peut l'interpréter comme le moteur de
démarrage de la spirale prix-salaire. Cette rupture, qui se date au
début des années 80, a restreint considérablement le
pouvoir de négociation des syndicats salariaux, et donc elle a
réduit l'augmentation des coûts unitaires de main-d'oeuvre
relativement aux années 70. De ce fait, et comme le montre le graphique
2-4, l'effet des hausses des prix
34 Benoit Heitz, « Prix du pétrole :
doit-on s'attendre à une spirale inflationniste ? », Division
Synthèse conjoncturelle, Décembre 2004.
pétroliers sur l'augmentation des coûts unitaires de
main-d'oeuvre s'est considérablement affaibli.
Courbe 2-4 : Effet des hausses des prix
pétroliers sur les coûts unitaires de main-d'oeuvre
Sources : Datastream et Desjardins, Études
économiques
A l'inverse des hausses des coûts unitaires de
main-d'oeuvre l'or des deux premiers chocs pétroliers, les hausses
fulgurantes des prix du pétrole au cours des années 2000
n'étaient pas suivies par des variations des coûts unitaires de
main-d'oeuvre, sur l'échelle mondiale. Dans l'analyse de
l'affaiblissement de cette corrélation, divers explications sont
avancées, tel que la hausse des gains de productivité ou la forte
concurrence mondiale enregistrée ces dernières années.
Néanmoins, l'interprétation la plus admise est celle du
succès des politiques de ciblage crédible d'inflation qui ont
réussis à maintenir l'inflation à des taux faibles et
constants, à l'inverse des taux élevés enregistrés
au cours des années 70 et leurs concomitances aux hausses fortes et
fréquentes des salaires (à un rythme de 10% à 20%).
En effet, contrairement aux retombées des deux premiers
chocs pétroliers qui ont conduits aux relèvements durables des
anticipations inflationnistes et au déclanchement de la spirale
prix-salaire. Au cours des années 2000, le maintient des taux
d'inflation bas permet l'ancrage des anticipations des salariés et des
entrepreneurs vers une cible crédible, à la quelle l'inflation
fait retour après la hausse des prix pétroliers. En effet, la
crédibilité des autorités monétaires incite les
agents économiques à abandonner les processus d'anticipations
adaptatives et à prendre comme référence non plus
l'inflation passée mais l'objectif annuel affiché dans le budget
de l'Etat, ce qui limite les probabilités du déclanchement d'une
telle spirale et donc amortir l'effet sur l'inflation sous-jacente. Cette
explication est consolidée par Joseph KERGUERIS, Claude SAUNIER (2006)
comme
suit : « Aujourd'hui, les banques centrales des pays
développés jouissent d'une crédibilité
anti-inflationniste bien plus forte : les anticipations d'inflation à
long terme sont mieux ancrées et les agents anticipent a priori
que la hausse des prix du baril va relever temporairement l'inflation, sans
nécessairement affecter les composantes moins volatiles des prix qui
constituent l'inflation sous-jacente.
En outre, les mécanismes d'indexation automatique des
salaires sur les prix au moment des deux premiers chocs pétroliers ont
disparu et les tensions sur le marché du travail sont partout
inexistantes. »35.
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