2.4 Les PAS (Plans d'Ajustement Structurel)
Le premier choc pétrolier plonge les Etats-Unis dans la
crise. Pour remédier à ce problème, Le président
Carter, dans un premier temps et le président Reagan par la suite,
cherche à attirer des nouveaux capitaux internationaux pour relancer
l'économie. Pour attirer les capitaux, il faut être attractif en
leur proposant un taux d'intérêt élevé.
Les taux d'intérêts des prêts
accordés aux pays africains vont donc augmenter considérablement
du jour au lendemain, il passe de -1.3% en 1975 à 1.4% en 1979 puis 8.6%
en 1981 [16]. Les nouveaux prêts contractés le sont avec le
nouveau taux et coutent donc très chers. De plus, les investisseurs
privés quittent l'Afrique au profit des EtatsUnis qui ont un besoin
important de capitaux qu'ils rémunèrent très
généreusement et avec un risque moindre.
Au début des années 1980, les premiers pays en
défaut de paiement commencent à voir le jour. Si l'ensemble
des pays endettés avaient arrêtés de payer leurs dettes,
l'ensemble du
système économique mondial, ce serait
effondré. Les banques avaient prêtés des sommes
considérables aux pays en voie de développement, sans ces
remboursements, les banques n'auraient plus pu assurer leur rôle au sein
de l'économie occidentale.
Pour que les pays africains puissent continuer à
rembourser, le FMI et la banque mondiale leur accordent des prêts
à condition d'appliquer les PAS (Plan d'Ajustement Structurel).
Certes certains dirigeants se sont opposés à ces
mesures, dont Thomas Sankara, président du Burkina Faso, qui a tenu un
discours très éloquent à ce sujet [voir Annexe 1].
D'autres dirigeants ont prônés des projets d'inspiration
socialiste dans leur campagne mais, une fois élu, ils se sont totalement
intégrés à la logique néolibérale des PAS.
Par exemple, au Mozambique, arrivé au pouvoir en 1986, Joacquim
Chissano, leadeur du front de libération du Mozambique, opte dès
1987 pour le libéralisme. Deux ans après, le parti abandonne
toutes les références au marxisme-léninisme.
La stratégie radicale des PAS consiste à prendre
des mesures immédiates qui permettent d'attirer des capitaux
étrangers, de trouver des ressources pour le remboursement de la dette
et enfin de limiter les dépenses. L'application des PAS devait,
d'après la Banque mondiale et le FMI permettre de rembourser la dette et
de réduire la pauvreté dans les pays en voie de
développement. Cependant entre 1981 et 2003, la population pauvre,
vivant en dessous du seuil de pauvreté de 1$ par jour à doubler
dans les pays où les PAS ont été appliqués, passant
de 164 millions à 314 millions [15].
Les principales mesures de ce plan sont les suivantes :
1) L'austérité budgétaire
:
Les bailleurs de fonds ont imposé aux états de
limiter de manière drastique leurs dépenses. Ces restrictions
budgétaires ont été opérées dans les
secteurs suivants :
- Suppressions des subventions aux produits de base :
En supprimant l'aide au carburant et aux produits de
premières nécessités, les prix ont augmenté pour
couvrir les coûts que les subsides n'assuraient plus. Les salaires de la
population n'augmentaient pas et il devenait donc de plus en plus difficile
d'acheter des produits de base. La suppression des subsides a également
permis aux pays occidentaux d'être plus compétitifs sur le prix de
ces produits car eux ont maintenu leurs aides. Les exportations des
denrées alimentaires ont diminué et les importations ont quant
à elles augmentées.
- Réduction des budgets sociaux et d'éducation :
Les soins de santé deviennent de plus en plus chers et
inaccessibles pour la majorité des personnes. Les états
licencient du personnel médical qu'ils n'arrivent plus à payer ou
limitent, réduisent les salaires.
L'éducation est limitée à l'enseignement
primaire quand les enfants peuvent se rendre à l'école or elle
possède un rôle prépondérant dans le
développement.
- Investissement limité dans les infrastructures :
De bonnes infrastructures permettent d'exporter les richesses,
les produits à un prix compétitif. En limitant les
investissements dans ce domaine,
l'Afrique n'a fait qu'accroître son retard dans le
développement. La situation est assez catastrophique. En moyenne,
l'Afrique possède 4km de route pour 100 km2 de superficie.
Cela va de 0.02 km pour l'Ethiopie à 80 km pour l'île Maurice (le
seul pays d'Afrique à posséder plus de 10 km de route pour 100
km2) [15]. A titre d'exemple, la densité des routes aux
Etats-Unis est de 15 km/100km2 et en France elle est de 177
km/100km2.
2) Le tout à l'exportation
Les prêts contractés par les pays africains
étaient en devises étrangères. Pour les rembourser, il
fallait donc amasser des devises et la meilleure solution était
l'exportation. Les pays africains, sous l'impulsion des bailleurs de fond, se
sont donc concentrés sur l'exportation de matières
premières ou agricoles. En peu de temps, les volumes d'exportation de
matières premières et agricoles ont augmenté. Comme la
demande ne suivait pas, le cours des prix des produits a fortement
chuté. Les pays devaient exporter beaucoup plus pour les mêmes
revenus que précédemment. De plus, la spécialisation des
exportations (1 produit représente 60% des exportations de 20 pays
africains, 3 produits représentent 80% des exportations pour 31 pays
africains, ce chiffre monte à 95% pour 19 pays africains), montre la
forte dépendance et leur sensibilité aux variations des cours de
ce produits établi dans des places financières dans les ays
riches.
L'ensemble des mesures imposées par la Banque mondiale
et le FMI pour l'obtention des prêts se retrouvent dans les 10
commandements du « Consensus de Washington »1 qui est un
résumé des PAS fait par John Williamson, ex-économiste en
chef de la banque mondiale.
1. Austérité budgétaire : réduction
des dépenses publiques
2. Réforme fiscale : élargissement de l'assiette
fiscale, diminution des taux élevés et
généralisation de la TVA
3. Politique monétaire orthodoxe : politique de taux
d'intérêt réels positifs
4. Taux de change compétitifs : dévaluations
monétaires
5. Libéralisation : réduction des barrières
commerciales et libéralisation des comptes de capital
6. Compétitivité : attraction des investissements
directs étrangers (IDE) en leur garantissant une égalité
des droits avec les investissements domestiques
7. Privatisation : vente des actifs de l'Etat au secteur
privé
8. Réduction des subventions : élimination
progressive des subventions agricoles et à la consommation et
libéralisation des prix
9. Déréglementation : élimination des
règles freinant l'initiative économique et la libre
concurrence
10. Droits de propriété : renforcement des droits
de propriété et de la garantie juridique des investissements
privés
1 Le nom « Consenus de Washingthon »
s'explique par la présence des deux bailleurs de fonds, la Banque
Mondiale et le FMI dans la ville de Washington
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